LA VIE PARISIENNE 21
A son retour du boulevard où elle donne
souvent des représentations....
Vous trouverez ce sujet bien
vieillot. Tant mieux. C'est un
enfant chéri du public qui n'en
verra jamais les rides.
Cependant si vous préférez
met.tre en scène un gentil-
homme pauvre qui finit million-
naire après avoir beaucoup médit
de l'argent, je ne vous cacherai
pas que ce dénoùment a fait la
fortune de plusieurs de vos con-
frères. Prenez-le en note pour
plus tard; mais quelque sujet que
vous adoptiez, vous ne pouvez
vous affranchir de jeter dans
l'action les personnages épisodiques qui suivent. Ils sont devenus
classiques.
Le cher oncle qui vient passer la saison d'hiver chez ses chers ne-
veux et nièces, afin d'admirer
les beautés nouvelles de la ca-
pitale.
Un petit cousin bien naïf,
bien godiche, façon adroite de
démontrer le ridicule de la jeu-
nesse ; Ilalterie ingénieuse à
l'adresse des grands parents.
Une jeune femme de dix-huit
dans dont le mari est sexagé-
naire : elle en rafl'olera. Très-
moral et peu dangereux à la
censure.
Ce cher oncle.
Une voisine de campagne. Grande coquette comme dans les comé-
dies de l'empire. Mais ne l'appelez plus Mme Saint-Ange. Ces types
Une jeune femme de dit-huit ans dont le mar
sera sexagénaire.
sont d un placement facile et tou-
jours de mise. Pour la manière
de s'en servir, consulter les œu-
vres de Scribe (répertoire du
théâtre de Madame.)
Quant aux personnages officiels,
les éviter, cela jette du froid. On
pourra parler du ministre, mais
qu'il reste à la cantonnade.
A l'exemple du tailleur qui
met un collet neuf à un vieux
vêtement afin d'en déguiser la
caducité, vous pouvez annexer à
1 ce senario la situation audacieuse
et touchante d'un faux artiste ou
d'un écrivassier quelconque : infecte canaille qui n'aura fait des
accrocs à sa réputation qu'afin de laisser un nom connu à son fils.
Une voisine de campagne grande coquette.
L'introduction de ce personnage dans votre œuvre, vous permettra
de populariser l'argot sur la première scène du monde. Ne pas
Ne lias oublier de faire voir le bout
de sa pipe.
oublier de faire voir le bout de sa
pipe. Effet bien suranné dans les
théâtres de genre, mais qui passera
comme un éclair de génie à la Comédie-
Française.
Pour corser l'action, placez la lutte
du père et du fils. Autrefois, les pères
avaient la spécialité des malédictions.
De nos jours ce sont les enfants qui en
ont l'entreprise— au théâtre du moins.
Donc votre jeune homme maudira
papa, mais du geste ; l'auteur de ses
jours se couvrira discrètement la figure et sortira sans mot dire.
Le iils terrible tombera alors dessus ou dedans un fauteuil, à son
choix, et la farce est jouée.
Ce qui fera la force de cette
scène, c'est que vous ne l'au-
rez pas faite du tout. Au reste,
la pantomime des acteurs
l'enlèvera.
Comme incident à effet ,
vous ne pouvez vous priver .
d'un repas, on mangera pour
de vrai. Parler en mangeant
s'exécute tous les jours dans
le monde, sans que personne
songe à prendre un brevet
Donc votre jeune homme maudira papa.
pour ce talent de société, mais au théâtre cela semble miracle.
Résultat un effet de mâchoire pour l'acteur, mais dont vous béné-
ficierez. Aucun inconvénient à ce qu'un des convives se grise ; —
Le donné de tout proverbe reposant sur le caprice.
toutefois, si ce n'est
pas un homme du
populaire , maiss
c'est un gentilhom-
me! Il roulerait sous
la table, que ce serait
encore charmant.
Pour le style de
votre œuvre, sous le
prétexte d'être na-
ture, vous aurez le
droit d'être vulgaire :
un dialogue de phra-
ses hachées menues; queiques tartines bien prétentieuses interrom-
pues à temps, une ou deux allusions politiques sur l'Irlande ou le
Japon, voilà où doit s'arrêter votre muse. Embrochant sur le tout
quelques locutions familières qui
sont aujourd'hui le fond de notre
langue.
Elle est bonne, el.'e est forte, ne
sont pas de trop. Ce langage
aussi simple qu'imagé fait aujour-
d'hui la gloire et la fortune de la
maison de Molière.
Un effetcerlain que je soumets
à vos méditations. Afin de perpë-
tuer l'émotion du spectateur,
glissez la nouvelle d'un malheur
irniltendu dans votre dernier acte.
La perte d'un frère? — Non.
Enfant n'y touc liez pas.
— La perte d'un fils? — mieux que cela. Une grosse perte d'argent ;
la salle entière s'attendrira. •
Comme un véritable auteur dramatique doit sa' voir mettre ses
idées à toutes sauces, vous n'avez pas manqué de rêve, r de signer une
A son retour du boulevard où elle donne
souvent des représentations....
Vous trouverez ce sujet bien
vieillot. Tant mieux. C'est un
enfant chéri du public qui n'en
verra jamais les rides.
Cependant si vous préférez
met.tre en scène un gentil-
homme pauvre qui finit million-
naire après avoir beaucoup médit
de l'argent, je ne vous cacherai
pas que ce dénoùment a fait la
fortune de plusieurs de vos con-
frères. Prenez-le en note pour
plus tard; mais quelque sujet que
vous adoptiez, vous ne pouvez
vous affranchir de jeter dans
l'action les personnages épisodiques qui suivent. Ils sont devenus
classiques.
Le cher oncle qui vient passer la saison d'hiver chez ses chers ne-
veux et nièces, afin d'admirer
les beautés nouvelles de la ca-
pitale.
Un petit cousin bien naïf,
bien godiche, façon adroite de
démontrer le ridicule de la jeu-
nesse ; Ilalterie ingénieuse à
l'adresse des grands parents.
Une jeune femme de dix-huit
dans dont le mari est sexagé-
naire : elle en rafl'olera. Très-
moral et peu dangereux à la
censure.
Ce cher oncle.
Une voisine de campagne. Grande coquette comme dans les comé-
dies de l'empire. Mais ne l'appelez plus Mme Saint-Ange. Ces types
Une jeune femme de dit-huit ans dont le mar
sera sexagénaire.
sont d un placement facile et tou-
jours de mise. Pour la manière
de s'en servir, consulter les œu-
vres de Scribe (répertoire du
théâtre de Madame.)
Quant aux personnages officiels,
les éviter, cela jette du froid. On
pourra parler du ministre, mais
qu'il reste à la cantonnade.
A l'exemple du tailleur qui
met un collet neuf à un vieux
vêtement afin d'en déguiser la
caducité, vous pouvez annexer à
1 ce senario la situation audacieuse
et touchante d'un faux artiste ou
d'un écrivassier quelconque : infecte canaille qui n'aura fait des
accrocs à sa réputation qu'afin de laisser un nom connu à son fils.
Une voisine de campagne grande coquette.
L'introduction de ce personnage dans votre œuvre, vous permettra
de populariser l'argot sur la première scène du monde. Ne pas
Ne lias oublier de faire voir le bout
de sa pipe.
oublier de faire voir le bout de sa
pipe. Effet bien suranné dans les
théâtres de genre, mais qui passera
comme un éclair de génie à la Comédie-
Française.
Pour corser l'action, placez la lutte
du père et du fils. Autrefois, les pères
avaient la spécialité des malédictions.
De nos jours ce sont les enfants qui en
ont l'entreprise— au théâtre du moins.
Donc votre jeune homme maudira
papa, mais du geste ; l'auteur de ses
jours se couvrira discrètement la figure et sortira sans mot dire.
Le iils terrible tombera alors dessus ou dedans un fauteuil, à son
choix, et la farce est jouée.
Ce qui fera la force de cette
scène, c'est que vous ne l'au-
rez pas faite du tout. Au reste,
la pantomime des acteurs
l'enlèvera.
Comme incident à effet ,
vous ne pouvez vous priver .
d'un repas, on mangera pour
de vrai. Parler en mangeant
s'exécute tous les jours dans
le monde, sans que personne
songe à prendre un brevet
Donc votre jeune homme maudira papa.
pour ce talent de société, mais au théâtre cela semble miracle.
Résultat un effet de mâchoire pour l'acteur, mais dont vous béné-
ficierez. Aucun inconvénient à ce qu'un des convives se grise ; —
Le donné de tout proverbe reposant sur le caprice.
toutefois, si ce n'est
pas un homme du
populaire , maiss
c'est un gentilhom-
me! Il roulerait sous
la table, que ce serait
encore charmant.
Pour le style de
votre œuvre, sous le
prétexte d'être na-
ture, vous aurez le
droit d'être vulgaire :
un dialogue de phra-
ses hachées menues; queiques tartines bien prétentieuses interrom-
pues à temps, une ou deux allusions politiques sur l'Irlande ou le
Japon, voilà où doit s'arrêter votre muse. Embrochant sur le tout
quelques locutions familières qui
sont aujourd'hui le fond de notre
langue.
Elle est bonne, el.'e est forte, ne
sont pas de trop. Ce langage
aussi simple qu'imagé fait aujour-
d'hui la gloire et la fortune de la
maison de Molière.
Un effetcerlain que je soumets
à vos méditations. Afin de perpë-
tuer l'émotion du spectateur,
glissez la nouvelle d'un malheur
irniltendu dans votre dernier acte.
La perte d'un frère? — Non.
Enfant n'y touc liez pas.
— La perte d'un fils? — mieux que cela. Une grosse perte d'argent ;
la salle entière s'attendrira. •
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idées à toutes sauces, vous n'avez pas manqué de rêve, r de signer une
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