LA VIE PARISIENNE 173
CHOSES ET AUTRES
Quelques mots sur les ébouriffantes toilettes de Mlle Delaporte, dans l'A mi
des Femmes, car dans les comédies nouvelles les toilettes font partie du
Hbretto.
La première est une ample robe de cachemire blanc très-clair, laissant voir
au travers une autre robe de taffetas rose, découpée au bas en créneaux, et re-
levée, seulement devant, jusqu'à mi-jupe le derrière traînant comme un man-
teau de cour. — Une chlamyde grecque arrangée en costume Pompadour. —
C'est assez joli ; mais qui osera jamais se retrousser ainsi dans un salon ?
La seconde, une toilette de soirée, est une jupe courte, sur une robe blanche,
d'un cerise féroce avec des broderies d'or et des franges noires, jr. crois. Coif-
fure à la sauvage. — Où pourrait jouer Iogur;ritrz avec ce costume-là?
La troisième, et c'est celle dont on parle le plus, est la reproduction exacte
des costumes de musca ti/es. ies. C'est une robe de taffetas feuille-morte, dont le
corsage est decoupé comme les revers d'un frac d'incroyable avec de larges
boutons de nacre, et dont la jupe s'entr'ouvre comme deux larges basques
d'homme pour laisser passer une autre jupe de pekin rayé avfc un large
volant pareil. Coiffure à la Titis. Ajoutez à cela une crinoline d'une envergure
inconnue jusqu'à ce jour.
C'est original, je n'en disconviens pas; mais c'est peu gracieux; et puis,
jamais une honnête femme ne s'est habillée comme cela ; ce sont des toilettes
de toquettes.
*
* *
Mmc Sand vient de braver les rigueurs de la photographie et de livrer sa tête
à Nadar. Le Constitutionnel, toujours gracieux, ajoute : M. Nadar, qui se
préoccupe surtout de la ressemblance intime, a merveilleusement rendu le
calme infini et la bonté caractéristique de son glorieux morlèle.
Je veux bien croire que Nadar enlève et remette le bouchon de sa boîte avec
une délicatesse de sentiment qui touche au génie; mai<, en bonne conscience,
sa machine est bien pour quelque chose dans tout cela.
Des listes de jurés, pour la prochaine exposition de pein'ure, circulent dans
les ateliers.
Plusieurs de mes amis, hésitant entre ces imprimés, OP. seraient pas indif-
férents à l'offre d'une prime, soit en argent, soit en nature.
Une mauvaise langue m'assurait que, dépossédés du professorat à l'Écols
des Beaux-Arts, certains membres de l'Institut feraient des démarches pour
avoir le droit d'y donner des répétitions de dessin, le soir.
En somme, le soir et pendant peu de temps, ça ne pourrait pas faire grand
mal.
Sur un papier trouvé il y a six mois environ dans les parages de l'École de
médecine, nous lisons :
QUATHAtX.
Ci-gît un doyen d'école
Pour son embonpoint cité;
Il lui manque la parole,
Mais quelle capacité !
Le Séndt vient de s'occuper chaudement de la vivised 011. Les médecins ont-
ils ou n'ont-ils pas le droit d'écorcher tout vifs les animaux. Le Sénat a donné
son entière adhésion à l'écorchage. Il serait curieux, en effet, qu'écorchant
depuis si longtemps l'humanité, les médecins n'eussent point le droit de traiter
de même les chats et les grenouilles.
(*) Le mot est illisible.
Le moment des élections de Paris, — pour la S" et 6e circonscription, —
approche.
Les journaux fourmillent de candidats nouveaux, tous vertueux, tous fils
de leurs œuvres, tous représentant incontestablement l'opinion publique, tous
enfants de 89.
Diable! lequel prendre?
Mes idées ne sont point changées. — Je veux soutenir le pouvoir, mais en
même temps l'édairer. Il y a des gens qui, sous prétexte de vous éclairer, se
précipitent chez vous avec une torche enflammée dans chaque main. Je ne veux
plus de cela.
Je veux une lumière douce.
Diable! lequel prenire?
Ma femme me dit : Ne vote pas, et laisse-moi la paix. — Mais puis-je
ne pas voter? le puis-je? — On parle de l'opinion de la masse. Est-elle heu-
reuse cette masse?
Quand on entre dans cette grande salle, la poche pleine Ai bulletins recueillis
à la porte, lorsque l'on aperçoit au fond le bureau surmonté de la boîte, lorsque
le président se lève avec gravité, et qu'on se dit : J'en ai quinze dans ma
poche, lequel, Seigneur, lequel? On sent une sueur froide vous passer dans
le dos.
Cinq minutes de recueillement, pour l'amour du bon Dieu, monsieur le pré-
sident. Je veux soutenir le pouvoir, mais l'éclairer.
Aux dernières élections, j'avais la tète en feu, il me sembla que les deux
factionnaires croisaient la baïonnette; je saisis le bulletin le plus profondément
enfoui dans ma poche, et je l'abandonnai en fermant les yeux.
Le ciel fut témoin que mes intentions étaient pures; mais je n'ai jamais su à
qui j'avais confié le soin d'éclairer le pouvoir. 1)
. On vend, non loin d'une église, des pâtés entièrement maigres. Le saumon
joue le jambon, et je ne sais quel poisson imite, à s'y méprendre, le blanc de
volaille. Je ne trouve pas l'invention heureuse, fiire maigre, en réalité, Fil
ayant l'air de faire gras. On n'a même pas l'apparence pour soi. Le contraire
serait infiniment plus logique; et je soutiens que des gigots, sous forme de bar-
bue ou de raie au beurre noir, auraient un immense succès.
On donne beaucoup.
Vous n'êtes pas sans avoir entendu parler d'un certain brave homme, lequel,
ayant été surpris la main dans la poche d'une jeune fille, a attiré sur lui la
commisération publique, si bien qu'en quelques jours, et grâce... à sa faiblesse,
le voilà devenu riche, et capable de faire l'aumône à d'autres.
Loin de nous la pensée d'adresser un blâme à cette bienfaisance. Elle nous
inspire seulement une réflexion.
En supposant que le brave homme n'eût pas cessé un instant, une seconde,
moins que rien, d'être brave homme, personne n'aurait pensé à lui. Personne
n'ayant pensé à lui, il aurait pu mourir de faim, en compagnie de sa probité
inaltérable.
D'où suit un conseil tout naturel donné aux probités, qui s'obstineraient à
demeurer intactes.
Ce bonhomme me fait songer à dire aux divers journaux, qui ouvrent des
souscriptions, soit pour des Italiens, soit pour des Polonais, soit pour les peti!es
filles qui sont battues par leur gouvernante au Monomotapa, qu'il y a autour
d'eux, chez eux, bien des misères intéressantes, et qu'il devient terrible en
vérité d'être obligé, pour attirer leur attention, d'être chilien, cochinchinois, ou
tout au moins scélérat.
Que voulez-vous? On parlerait si peu du la main droite, si elle ne disait pas
ce qu'elle donne à la main gauche.
CHOSES ET AUTRES
Quelques mots sur les ébouriffantes toilettes de Mlle Delaporte, dans l'A mi
des Femmes, car dans les comédies nouvelles les toilettes font partie du
Hbretto.
La première est une ample robe de cachemire blanc très-clair, laissant voir
au travers une autre robe de taffetas rose, découpée au bas en créneaux, et re-
levée, seulement devant, jusqu'à mi-jupe le derrière traînant comme un man-
teau de cour. — Une chlamyde grecque arrangée en costume Pompadour. —
C'est assez joli ; mais qui osera jamais se retrousser ainsi dans un salon ?
La seconde, une toilette de soirée, est une jupe courte, sur une robe blanche,
d'un cerise féroce avec des broderies d'or et des franges noires, jr. crois. Coif-
fure à la sauvage. — Où pourrait jouer Iogur;ritrz avec ce costume-là?
La troisième, et c'est celle dont on parle le plus, est la reproduction exacte
des costumes de musca ti/es. ies. C'est une robe de taffetas feuille-morte, dont le
corsage est decoupé comme les revers d'un frac d'incroyable avec de larges
boutons de nacre, et dont la jupe s'entr'ouvre comme deux larges basques
d'homme pour laisser passer une autre jupe de pekin rayé avfc un large
volant pareil. Coiffure à la Titis. Ajoutez à cela une crinoline d'une envergure
inconnue jusqu'à ce jour.
C'est original, je n'en disconviens pas; mais c'est peu gracieux; et puis,
jamais une honnête femme ne s'est habillée comme cela ; ce sont des toilettes
de toquettes.
*
* *
Mmc Sand vient de braver les rigueurs de la photographie et de livrer sa tête
à Nadar. Le Constitutionnel, toujours gracieux, ajoute : M. Nadar, qui se
préoccupe surtout de la ressemblance intime, a merveilleusement rendu le
calme infini et la bonté caractéristique de son glorieux morlèle.
Je veux bien croire que Nadar enlève et remette le bouchon de sa boîte avec
une délicatesse de sentiment qui touche au génie; mai<, en bonne conscience,
sa machine est bien pour quelque chose dans tout cela.
Des listes de jurés, pour la prochaine exposition de pein'ure, circulent dans
les ateliers.
Plusieurs de mes amis, hésitant entre ces imprimés, OP. seraient pas indif-
férents à l'offre d'une prime, soit en argent, soit en nature.
Une mauvaise langue m'assurait que, dépossédés du professorat à l'Écols
des Beaux-Arts, certains membres de l'Institut feraient des démarches pour
avoir le droit d'y donner des répétitions de dessin, le soir.
En somme, le soir et pendant peu de temps, ça ne pourrait pas faire grand
mal.
Sur un papier trouvé il y a six mois environ dans les parages de l'École de
médecine, nous lisons :
QUATHAtX.
Ci-gît un doyen d'école
Pour son embonpoint cité;
Il lui manque la parole,
Mais quelle capacité !
Le Séndt vient de s'occuper chaudement de la vivised 011. Les médecins ont-
ils ou n'ont-ils pas le droit d'écorcher tout vifs les animaux. Le Sénat a donné
son entière adhésion à l'écorchage. Il serait curieux, en effet, qu'écorchant
depuis si longtemps l'humanité, les médecins n'eussent point le droit de traiter
de même les chats et les grenouilles.
(*) Le mot est illisible.
Le moment des élections de Paris, — pour la S" et 6e circonscription, —
approche.
Les journaux fourmillent de candidats nouveaux, tous vertueux, tous fils
de leurs œuvres, tous représentant incontestablement l'opinion publique, tous
enfants de 89.
Diable! lequel prendre?
Mes idées ne sont point changées. — Je veux soutenir le pouvoir, mais en
même temps l'édairer. Il y a des gens qui, sous prétexte de vous éclairer, se
précipitent chez vous avec une torche enflammée dans chaque main. Je ne veux
plus de cela.
Je veux une lumière douce.
Diable! lequel prenire?
Ma femme me dit : Ne vote pas, et laisse-moi la paix. — Mais puis-je
ne pas voter? le puis-je? — On parle de l'opinion de la masse. Est-elle heu-
reuse cette masse?
Quand on entre dans cette grande salle, la poche pleine Ai bulletins recueillis
à la porte, lorsque l'on aperçoit au fond le bureau surmonté de la boîte, lorsque
le président se lève avec gravité, et qu'on se dit : J'en ai quinze dans ma
poche, lequel, Seigneur, lequel? On sent une sueur froide vous passer dans
le dos.
Cinq minutes de recueillement, pour l'amour du bon Dieu, monsieur le pré-
sident. Je veux soutenir le pouvoir, mais l'éclairer.
Aux dernières élections, j'avais la tète en feu, il me sembla que les deux
factionnaires croisaient la baïonnette; je saisis le bulletin le plus profondément
enfoui dans ma poche, et je l'abandonnai en fermant les yeux.
Le ciel fut témoin que mes intentions étaient pures; mais je n'ai jamais su à
qui j'avais confié le soin d'éclairer le pouvoir. 1)
. On vend, non loin d'une église, des pâtés entièrement maigres. Le saumon
joue le jambon, et je ne sais quel poisson imite, à s'y méprendre, le blanc de
volaille. Je ne trouve pas l'invention heureuse, fiire maigre, en réalité, Fil
ayant l'air de faire gras. On n'a même pas l'apparence pour soi. Le contraire
serait infiniment plus logique; et je soutiens que des gigots, sous forme de bar-
bue ou de raie au beurre noir, auraient un immense succès.
On donne beaucoup.
Vous n'êtes pas sans avoir entendu parler d'un certain brave homme, lequel,
ayant été surpris la main dans la poche d'une jeune fille, a attiré sur lui la
commisération publique, si bien qu'en quelques jours, et grâce... à sa faiblesse,
le voilà devenu riche, et capable de faire l'aumône à d'autres.
Loin de nous la pensée d'adresser un blâme à cette bienfaisance. Elle nous
inspire seulement une réflexion.
En supposant que le brave homme n'eût pas cessé un instant, une seconde,
moins que rien, d'être brave homme, personne n'aurait pensé à lui. Personne
n'ayant pensé à lui, il aurait pu mourir de faim, en compagnie de sa probité
inaltérable.
D'où suit un conseil tout naturel donné aux probités, qui s'obstineraient à
demeurer intactes.
Ce bonhomme me fait songer à dire aux divers journaux, qui ouvrent des
souscriptions, soit pour des Italiens, soit pour des Polonais, soit pour les peti!es
filles qui sont battues par leur gouvernante au Monomotapa, qu'il y a autour
d'eux, chez eux, bien des misères intéressantes, et qu'il devient terrible en
vérité d'être obligé, pour attirer leur attention, d'être chilien, cochinchinois, ou
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