Titre : La Vie parisienne : moeurs élégantes, choses du jour, fantaisies, voyages, théâtres, musique, modes / par Marcellin
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864
Contributeur : Marcelin, Émile (1825-1887). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328892561
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 1864 1864
Description : 1864 (A2,N1)- (A2,N25). 1864 (A2,N1)- (A2,N25).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k1256583w
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, FOL-LC13-81
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/06/2016
LA VIE PARISIENNE 99
CRITIQUE BIBLIOGRAPHIQUE
PIIILOMELA.
Grand assortiment d'ambroisies
Que déballe aujourd'hui matin,
Dans un livre de poésies,
Un jeune homme au prénom latin ;
Grand choix d'ivresses fantastiques,
De jour, de nuit, d'hiver, d'été,
D'estaminets, temples, boutiques,
lIatschisch, absinthe, encens et thé ;
Décomposition des âmes,
Décomposition des corps,
Baiser vénéneux des infâmes,
Sourire bleu des poissons morts ;
Tremplins pour sauter aux comètes,
Chiboucks qu'on bourre avec des fleurs ;
Miel découlant des monts Hymettes
Dans nos grands égouts collecteurs ;
Neiges, tisons, canards, autruches,
Poudre à canon, poudre de riz,
Larmes d'amour et fanfreluches
Dans le macadam de Paris ;
Parfums, couleurs, muscs et cinabres,
Extases, indigestions,
Cancans joyeux, danses macabres,
Rigolboches, Ephestions ;
Femmes qui truffez de vertiges
Les beaux reins tarabiscotés
De nos poètes callipyges,
— Vous m'embêtez! vous m'embêtez ! il. u 1. 1-
COSTUMES DE BAL
J ai été l autre jour voir un de mes amis et je l'ai trouvé en grande
conférence avec son serrurier, son cartonnier et son ferblantier.
Qu'y a-t-il donc ? fis-je tout étonné. Es-tu en train d'inventer un
nouveau ballon pour couper l'herbe sous le pied à l'infortuné Nadar ?
Non, me dit-il, c'est plus sér;eux que cela : je compose mon cos-
tume pour le bal masqué du ministère.
Et peut-on connaître cette œuvre d'art ?
Certainement. Je me déguise en Lampe modérateur. J'avais bien
songé à me costumer en Question des Duchés ou en Exécution fé-
dérale, mais j'ai réfléchi que, dans l'état de l'Europe, cela pourrait avoir
des inconvénients pour un bal officiel et donner lieu à des demandes
d explication de la part des puissances étrangères. Je suis trop bon
Français pour vouloir susciter des difficultés à ma patrie.
— En effet, rien n'est plus en situation, ni moins compromettant
qu une lampe modérateur ; cependant ne crains-tu pas que ton costume,
par sa modération même, ne soit pris comme une allusion. A ta place, je
pré férerais un simple pierrot, - c'est de tous les régimes — ou bien tout
autre costume connu : marquis, garde-française, mousquetaire, écossais,
polonais, turc, brigand italien, contrebandier espagnol, et tutti quanti.
— Fi, fi, d'où viens-tu ? d'où sors-tu ! mais, très-cher, tout cela
est rococo, usé jusqu'à la corde, nous faisons mieux que cela aujourd'hui.
Le beau mérite vraiment d'aller chez un costumier et de choisir tout
bêtement parmi ses gravures ! Non, non , n ous composons, nous
inventons, nous créons. Tout costume aujourd'hui doit être allégo-
rique, et personnifier n'importe quoi, soit dans l'ordre moral soit dans
l ordre physique. Nos élégantes se costument en espérance vogue, en
réception académique, en élection protestée, en forêt vierge, en flammede
punch, en printemps qui s'avance, etc., etc. Le costume de balançoire est
très en vogue parmi les petites dames ; celui de caprice est déjà un peu
usé, mais la souscription publique fait toujours fureur. La dernière nou-
veauté est la cascade de Niagara avec Blondin et son balancier dans les
cheveux ; c'est délicieux ! — Pour les hommes on choisit générale-
ment des costumes moins abstraits. Les meubles sont très-bien portés.
Nous avons fait ces jours-ci chez M"" X>** un quadrille qui a eu un cer-
tain succès, je m'en flatte. Nous avons composé une chambre à coucher.
En ma qualité d'imprésario — à tout seigneur tout honneur — je repré.
sentais le lit et j'avais sur la tête un baldaquin des mieux réussis, si ce
n'est des plus légers; mon partner était une charmante armoire il glaça
en bois de rose avec médaillons de Sèvres. Mon vis-à-vis était le canapé
avec une ravissante toilette duchesse, toute en point d'Alençon et en An-
gleterre. Le bonhnir du jour donnait le bras à une indolente chaise longue,
un capricieux guéridon offrait la main à la table...
— Laquelle ?
Schocking ! la table de jeu; et ce n'était pas le plus vilain costume ,
tout en vert avcc des liserés palissandre et les 52 cartes brodées, les fiS
en vedette.
— Et vous avez dansé ainsi ?
— Pas du tout. Est-ce qu'on danse en costume ?
— Où est le plaisir alors ?
Mais tu n'y songes donc pas ! Le plaisir d'être regardé, et surtout
pendant les quinze jours qui précèdent le bal, celui de composer son cos-
tume, de le faire exécuter.
Enfin, au bal, si tu ne dansais pas, tu causais du moins?
Causer; mais tu n'y penses pas; mon costume de lit m'obligeait
d'ailleurs à la plus grande discrétion.
— Qu'as-tu pu faire alors ?
Voila : nous avons fait une entrée solennelle ; l'orchestre a j oué la mar •
che funèbre de Beethoven ; après un tour de salon, nous avons été nous
placer dans une chambre écartée que la maîtresse de la maison avait
gracieusemeut démeublée à notre intention, et nous sommes restés là, à la
place des meubles absents. Ah! nous nous sommes bien amusé!
-Tant que cela ! eh bien, vrai, je ne m'en serais pas douté. Au moins
avec ton nouveau costume, tu pourras rester dans le salon, et si tu ne
peux danser, tu pourras t'asseoir dans un coin.
M'asseoir ! As-tu jamais vu une lampe s'asseoir? En tous cas, mon
costume ne me le permettra pas. J'ai le corps entièrement pris dans un
cylindre, en fer bipnc doré, depuis les aisselles jusqu'aux pieds ; mes
deux bras repliés, que je tiendrai en T, figureront le remontoir e t la gou.
pille à lever la mèche. Ce qui m'a donné le plus de peine, c'est le globe;
je suis parvenu enfin à trouver un bocal à poissons rouges assez grand
pour y entrer la tète, et mon cartonnier me confectionne un délicieux
abat-jour avec les dernières charges de Neuville. J'ai organisé un petit
système magnético-électrique, que j'aurai dans le dos, de façon à allu-
mer à volonté la mèche que j'aurai sur la tête, dans mon bocal. — Ah!
je compe sur un joli succès, et on en parlera dans la Vie parisienne. —
Une seule chose me chiffonne : je ne sais où mettre mon mouchoir dans
mon cylindre de fer blanc, et ce n'est pas commode par ce temps de
rhumes de cerveau qui court.
— Une idée ! Fais-moi inviter.
— Volontiers, mais quel costume prendras-tu ?
— Celui de lampiste. Je te remonterai, et au besoin, je te moucherai.
CHRISTOPHE.
CRITIQUE BIBLIOGRAPHIQUE
PIIILOMELA.
Grand assortiment d'ambroisies
Que déballe aujourd'hui matin,
Dans un livre de poésies,
Un jeune homme au prénom latin ;
Grand choix d'ivresses fantastiques,
De jour, de nuit, d'hiver, d'été,
D'estaminets, temples, boutiques,
lIatschisch, absinthe, encens et thé ;
Décomposition des âmes,
Décomposition des corps,
Baiser vénéneux des infâmes,
Sourire bleu des poissons morts ;
Tremplins pour sauter aux comètes,
Chiboucks qu'on bourre avec des fleurs ;
Miel découlant des monts Hymettes
Dans nos grands égouts collecteurs ;
Neiges, tisons, canards, autruches,
Poudre à canon, poudre de riz,
Larmes d'amour et fanfreluches
Dans le macadam de Paris ;
Parfums, couleurs, muscs et cinabres,
Extases, indigestions,
Cancans joyeux, danses macabres,
Rigolboches, Ephestions ;
Femmes qui truffez de vertiges
Les beaux reins tarabiscotés
De nos poètes callipyges,
— Vous m'embêtez! vous m'embêtez ! il. u 1. 1-
COSTUMES DE BAL
J ai été l autre jour voir un de mes amis et je l'ai trouvé en grande
conférence avec son serrurier, son cartonnier et son ferblantier.
Qu'y a-t-il donc ? fis-je tout étonné. Es-tu en train d'inventer un
nouveau ballon pour couper l'herbe sous le pied à l'infortuné Nadar ?
Non, me dit-il, c'est plus sér;eux que cela : je compose mon cos-
tume pour le bal masqué du ministère.
Et peut-on connaître cette œuvre d'art ?
Certainement. Je me déguise en Lampe modérateur. J'avais bien
songé à me costumer en Question des Duchés ou en Exécution fé-
dérale, mais j'ai réfléchi que, dans l'état de l'Europe, cela pourrait avoir
des inconvénients pour un bal officiel et donner lieu à des demandes
d explication de la part des puissances étrangères. Je suis trop bon
Français pour vouloir susciter des difficultés à ma patrie.
— En effet, rien n'est plus en situation, ni moins compromettant
qu une lampe modérateur ; cependant ne crains-tu pas que ton costume,
par sa modération même, ne soit pris comme une allusion. A ta place, je
pré férerais un simple pierrot, - c'est de tous les régimes — ou bien tout
autre costume connu : marquis, garde-française, mousquetaire, écossais,
polonais, turc, brigand italien, contrebandier espagnol, et tutti quanti.
— Fi, fi, d'où viens-tu ? d'où sors-tu ! mais, très-cher, tout cela
est rococo, usé jusqu'à la corde, nous faisons mieux que cela aujourd'hui.
Le beau mérite vraiment d'aller chez un costumier et de choisir tout
bêtement parmi ses gravures ! Non, non , n ous composons, nous
inventons, nous créons. Tout costume aujourd'hui doit être allégo-
rique, et personnifier n'importe quoi, soit dans l'ordre moral soit dans
l ordre physique. Nos élégantes se costument en espérance vogue, en
réception académique, en élection protestée, en forêt vierge, en flammede
punch, en printemps qui s'avance, etc., etc. Le costume de balançoire est
très en vogue parmi les petites dames ; celui de caprice est déjà un peu
usé, mais la souscription publique fait toujours fureur. La dernière nou-
veauté est la cascade de Niagara avec Blondin et son balancier dans les
cheveux ; c'est délicieux ! — Pour les hommes on choisit générale-
ment des costumes moins abstraits. Les meubles sont très-bien portés.
Nous avons fait ces jours-ci chez M"" X>** un quadrille qui a eu un cer-
tain succès, je m'en flatte. Nous avons composé une chambre à coucher.
En ma qualité d'imprésario — à tout seigneur tout honneur — je repré.
sentais le lit et j'avais sur la tête un baldaquin des mieux réussis, si ce
n'est des plus légers; mon partner était une charmante armoire il glaça
en bois de rose avec médaillons de Sèvres. Mon vis-à-vis était le canapé
avec une ravissante toilette duchesse, toute en point d'Alençon et en An-
gleterre. Le bonhnir du jour donnait le bras à une indolente chaise longue,
un capricieux guéridon offrait la main à la table...
— Laquelle ?
Schocking ! la table de jeu; et ce n'était pas le plus vilain costume ,
tout en vert avcc des liserés palissandre et les 52 cartes brodées, les fiS
en vedette.
— Et vous avez dansé ainsi ?
— Pas du tout. Est-ce qu'on danse en costume ?
— Où est le plaisir alors ?
Mais tu n'y songes donc pas ! Le plaisir d'être regardé, et surtout
pendant les quinze jours qui précèdent le bal, celui de composer son cos-
tume, de le faire exécuter.
Enfin, au bal, si tu ne dansais pas, tu causais du moins?
Causer; mais tu n'y penses pas; mon costume de lit m'obligeait
d'ailleurs à la plus grande discrétion.
— Qu'as-tu pu faire alors ?
Voila : nous avons fait une entrée solennelle ; l'orchestre a j oué la mar •
che funèbre de Beethoven ; après un tour de salon, nous avons été nous
placer dans une chambre écartée que la maîtresse de la maison avait
gracieusemeut démeublée à notre intention, et nous sommes restés là, à la
place des meubles absents. Ah! nous nous sommes bien amusé!
-Tant que cela ! eh bien, vrai, je ne m'en serais pas douté. Au moins
avec ton nouveau costume, tu pourras rester dans le salon, et si tu ne
peux danser, tu pourras t'asseoir dans un coin.
M'asseoir ! As-tu jamais vu une lampe s'asseoir? En tous cas, mon
costume ne me le permettra pas. J'ai le corps entièrement pris dans un
cylindre, en fer bipnc doré, depuis les aisselles jusqu'aux pieds ; mes
deux bras repliés, que je tiendrai en T, figureront le remontoir e t la gou.
pille à lever la mèche. Ce qui m'a donné le plus de peine, c'est le globe;
je suis parvenu enfin à trouver un bocal à poissons rouges assez grand
pour y entrer la tète, et mon cartonnier me confectionne un délicieux
abat-jour avec les dernières charges de Neuville. J'ai organisé un petit
système magnético-électrique, que j'aurai dans le dos, de façon à allu-
mer à volonté la mèche que j'aurai sur la tête, dans mon bocal. — Ah!
je compe sur un joli succès, et on en parlera dans la Vie parisienne. —
Une seule chose me chiffonne : je ne sais où mettre mon mouchoir dans
mon cylindre de fer blanc, et ce n'est pas commode par ce temps de
rhumes de cerveau qui court.
— Une idée ! Fais-moi inviter.
— Volontiers, mais quel costume prendras-tu ?
— Celui de lampiste. Je te remonterai, et au besoin, je te moucherai.
CHRISTOPHE.
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