LE CHANTAGE
XX
Lorsqu'elle disait que son artiste était devenu fou, la discrète M*' Poileveu
ne semblait pas fort éloignée de la vérité.
Son opinion dut être celle de tous les gens qui aperçurent ce grand jeune
homme, habillé de blanc, qui courait avec une incroyable rapidité le long des
rues qui conduisent du quartier des Martyrs aux Champs-Ëtysées.
En sortant de sa maison, il avait croisé un fiacre vide dont le cocher lui avait
fait un signe engageant; la pensée d'y monter ne lui vint pas. Même il sourit de
pitié. Est-ce que jamais les maigres rosses de la Compagnie auraient pu appro-
cher de sa vitesse!
Il allait à fond de train, les coudes au corps, ménageant son haleine, guidé à
travers la foule par le pur instinct machinal. Son visage avait une si étrange
expression qu'on s'écartait devant lui, et qu'ensuite on se retournait pour le
suivre des yeux.
1 n'avait, d'ailleurs. pas l'ombre d'un projet. Pourquoi il courait rue de Mati-
gnon, ce qu'il ferait ou dirait, il l'ignorait. il ne se demandait pas s'il lui restait
une espérance.
Sabine était malade, mourante, croyait-il il se rapprochait d'elle, voilà tout.
A chaque moment, dans Paris, on rencontre des gens qui vont ainsi, traver-
sant la foule affairée sans la voir ni l'entendre, poussés par leur passion comme
les boulets par l'explosion de la poudre.
C'est seulement en arrivant à l'entrée de la rue de Matignon, que André recou-
vra la faculté de réfléchir, de délibérer, de souffrir.
Autant pour recueillir ses idées que pour reprendre hateine,– il n'avait pas
mis vingt minutes à faire ce trajet, il s'assit sur une borne, à quelques pas de
l'hôtel de Mussidan.
S'il était venu, c'est qu'il voûtait des nouvelles précises, exactes, des détails.
Mais comment s en procurer, quel expédient imaginer?
H faisait nuit. Le mince filet de gaz des réverbères tremblottait rougeAtro et
sans rayonnements au milieu d'un de ces brouillards de février qui suivent
toutes les reprises des gelées.
Il faisait froid. La rue de Matignon, rarement animée, même de jour, était
XX
Lorsqu'elle disait que son artiste était devenu fou, la discrète M*' Poileveu
ne semblait pas fort éloignée de la vérité.
Son opinion dut être celle de tous les gens qui aperçurent ce grand jeune
homme, habillé de blanc, qui courait avec une incroyable rapidité le long des
rues qui conduisent du quartier des Martyrs aux Champs-Ëtysées.
En sortant de sa maison, il avait croisé un fiacre vide dont le cocher lui avait
fait un signe engageant; la pensée d'y monter ne lui vint pas. Même il sourit de
pitié. Est-ce que jamais les maigres rosses de la Compagnie auraient pu appro-
cher de sa vitesse!
Il allait à fond de train, les coudes au corps, ménageant son haleine, guidé à
travers la foule par le pur instinct machinal. Son visage avait une si étrange
expression qu'on s'écartait devant lui, et qu'ensuite on se retournait pour le
suivre des yeux.
1 n'avait, d'ailleurs. pas l'ombre d'un projet. Pourquoi il courait rue de Mati-
gnon, ce qu'il ferait ou dirait, il l'ignorait. il ne se demandait pas s'il lui restait
une espérance.
Sabine était malade, mourante, croyait-il il se rapprochait d'elle, voilà tout.
A chaque moment, dans Paris, on rencontre des gens qui vont ainsi, traver-
sant la foule affairée sans la voir ni l'entendre, poussés par leur passion comme
les boulets par l'explosion de la poudre.
C'est seulement en arrivant à l'entrée de la rue de Matignon, que André recou-
vra la faculté de réfléchir, de délibérer, de souffrir.
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