Titre : Le Bien public : Union bourguignonne ["puis" libéral, anticollectiviste "puis plus de sous-titre"]
Éditeur : [s.n.] (Dijon)
Date d'édition : 1887-05-19
Contributeur : Jobard, Eugène (1828-1902). Directeur de publication
Contributeur : Langeron, Jean-Claude (1809-1898). Directeur de publication
Contributeur : Mercier, Jules (rédacteur au Bien public de Dijon). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327124626
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 19 mai 1887 19 mai 1887
Description : 1887/05/19 (A37,N137)-1887/05/20. 1887/05/19 (A37,N137)-1887/05/20.
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG21 Collection numérique : BIPFPIG21
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t5450019r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Fonds du service reproduction, NUM P.V-19
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 11/07/2021
Jeudi 19 et Vendredi 20 lai 1887
UNION BOURGUIGNONNE
Trente-Septième Année. — B 1 137
ABONNEMENTS
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Réclames : la ligue 40 c.
Les insertions sont reçues pour le no du lendemain
jusqu’à li heures.
RÉDACTEUR EN CHEL
LANGERON
Ias manuscrits non insérés ne sont pas rendus.
L'INDEX
Cette pauvre Exposition universelle ne bat
décidément que d’une aile ; elle file un mau-
ais coton. Les Hippocrates étrangers refusent
es présents d’Artaxerxès Lockroy. Notre mi-
nistre israélite en sera pour ses frais de
mamours à l’adresse des rois et des empe
reurs.
Nous avons sous les yeux l’article du Frem-
junblatt de Vienne, qui avait été signalé par
e télégraphe et où l’organe officieux du ca-
jinet de Vienne annonce sans embages le
refus du gouvernement austro-hongrois de
prendre part à l’Exposition de Paris. La
feuille viennoise s’étonne que les républicains
français aient pu pousser le manque de tact jus-
qu’à convier à la glorification de la révolution
française un gouvernement chez qui ale dou
loureux souvenir de Marie-Antoinette est tou
jours si vivace.
L’Italie elle-même, ajoute le Fremdenblatt,
malgré tant d’affinités avec la France, ne veut
pas se séparer des autres monarchies et re
fuse de figurer dans une manifestation en
l’honneur d’un événement qui, s’il a fourni à
humanité quelques idées civilisatrices, a dé-
versé sur les peuples d’Europe des maux in-
alculables.
Du reste, la situation générale n’est pas de
nature à engaher les gouvernements à se don-
ner rendez-vous à Paris pour assister à des
fies internationales. Après les excès aux-
‘quels s’est livrée la population parisienne à
propos de l’opéra de Wagner, les étrangers
je voudront certes pas concourir à une dé
monstration qui, comme le centenaire en
| question, peut si facilement donner lieu à des
.incidents des plus périlleux pour la paix.
Quant aux gouvernements, leur devoir est de
p tenir éloignés de réjouissances qui pour-
1 rient faire croire à tort que la situation eu-
I méenne est redevenue normale, tandis
quelle continue à être extrêmement pré
caire.
D’autre part, la Nouvelle Presse libre, qui
et plus favorable à la France et même à no
ire gouvernement puisque, à ce propos, elle
a été ces jours-ci l’objet des attaques de la
Suite de P Allemagne du Nord, prévoit que
l'Exposition universelle de 1889 est condam-
oie à un fiasco complet. Parlant au nom des
'industriels autrichiens, le journal viennois
l expose que ce genre d’exhibition n’est plus
quun anachronisme à une époque où, sur le
terrain économique, les peuples s’entourent
de plus en plus de barrières difficiles à fran-
Ichir et où le libre échange est partout battu
en brèche par le protectionnisme.
Quant à l’Angleterre, dans une des der-
pères séances de la Chambre des Communes,
ir J. Fergusson, répondant à M. Labouchère,
Hit qu’il ne faut pas conclure de son refus de
prticiper officiellement à l'Exposition de Pa-
fis en 1889, que le gouvernement ne prendra
M désormais, à aucune exposition étran
gère. Celle de Paris étant destinée à glorifier
les événements de la Révolution de 1789, le
gouvernement ne croit pas qu’il lui convienne
de s’associer, en pays étranger, à la célébra
tion d’événements sur lesquels il existe des
divergences de vues.
Celui-là, du moins, s’explique nettement.
La parole ne lui a pas été donnée pour dé
guiser sa pensée.
Bref, voilà notre révolution mise à V index
par toute l’Europe monarchique. Nos prin
cipes sont conspués.
C’est plus vexant encore que le sommeil
ronflant du duc d’Edimbourg.
L.
NOUVELLES
Paris, 19 mai.
Le président de la République a conféré mer
credi avec les présidents du Sénat et de la Cham
bre, avec M. Raynal, président de l’Union des
gauches, ainsi qu’avec un certain nombre d’au
tres pérsonnages parlementaires.
On dit que l’entrevue de M. Raynal avec M.
Grévy a eu lieu en quelque sorte'accidentelle
ment. M. Raynal n’avait pas été appelé à l’Elysée
au moment où il a vu le président de la Répu
blique.
La seule convocation que M. Grévy avait
faite était celle adressée au président de la Cham
bre.
Nous croyons savoir que, dès le début de l’en
tretien avec M. Floquet, il a été établi que c’était
seulement à titre de consultation que la convo
cation avait lieu. L’honorable président de la
Chambre a dit, si nous sommes bien informés,
que si l’on voulait appliquer strictement la règle
parlementaire, il fallait faire le cabinet avec
des membres de la commission du budget; mais
que, si l’on voulait faire un cabinet de concilia
tion, il fallait choisir d’autres personnalités.
Mercredi, à 2 heures) M. Grévy a reçu M. Le
Royer, président du Sénat. Il a fait appeler MM.
Brisson, Ribot, Bouvier, etc., dans le courant de
l’après-midi, pour s’entretenir avec eux.
Le président de la République a reçu une dé
légation du comité de la fête militaire et dan
sante qui doit avoir lieu le 31 mai à l’Opéra.
Les délégués venaient prier M. J. Grévy de vou
loir bien assister à cette soirée.
Disons, à propos de la fête de la territoriale et
de la réserve, que l’on a renoncé au programme
primitif, qui a été vivement critiqué, et qui con
sistait, comme on sait, « en une salle de bal au
camp, le soir d’une victoire. »
Des observations de M. Garnier, fondées sur
des difficultés d’exécution, ont servi de prétexte
pour renoncer à ce projet, et la soirée n’aura
qu’à y gagner.
La majorité qui a renversé le ministère se com-
pose de 58 membres de l’Union des gauches,
33 membres de l’extrême gauche, 6 membres de
la gauche radicale, 13 indépendants et 165 dépu
tés de la droite.
La minorité qui a voté en faveur du ministère
ne comprend que des républicains, ravoir :
70 membres de l’Union des gauches. 40 de l’ex
trême gauche, GO de la gauche radicale et près
de 80 indépendants.
M. Goblet a reçu mercredi matin l’archevêque
de Paris.
Les études relatives au rattachement des di
vers services du ministère de l'agriculture à
d’autres départements ministériels auraient
abouti aux conclusions suivantes :
« Les choses seraient remises en l’état où elles
étaient avant le décret du 1l novembre 1881.
» La division de l’hydraulique agricole passe
rait aux travaux publics.
» Les autres services seraient rattachés au mi
nistère du commerce, qui reprendrait son an
cienne dénomination de ministère de l’agricul
ture et du commerce.
» Ils formeraient une direction générale com
prenant l’agriculture proprement dite, les haras
et les forêts, qu’il a été un instant question de
rendre aux finances, dont ils faisaient partie
avant le décret du 15 décembre 1877.
Sur la demande de l’almany Samory, des mo
difications viennent d’être apportées au traité
qu’il a signé l’an dernier avec la France. Le
nouveau traité stipule que les Etats de Samory
sur les deux rives du Niger sont placés sous no
tre protectorat. C'est le capitaine Peroz, de l’in
fanterie de marine, qui a mené cette négocia
tion.
On mande de Metz, le 17 mai, à la Gazette de
Cologne, que l’ordre a été donné aux troupes du
15’ corps d’armée, stationnant en Alsace-Lor
raine, d’éviter soigneusement de dépasser la
frontière française.
Cette recommandation a été faite aux simples
soldats aussi bien qu’aux officiers de ce corps
d’armée.
On mande de Berlin, le 18, à la Gazette de Colo
gne, que l’empereur se rendra à Ems le 15 juin,
pour y faire sa cure habituelle.
Le monarque désire également se rendre à
Gastein, et l’on espère qu’il pourra entreprendre
ce voyage.
Berne, 18 mai. — D’après le recensement of
ficiel des votes arrêté ce matin, le monopole de
l’eau-de-vie a été sanctionné, au plébiscite de
dimanche dernier, par 267.255 voix contre
138,122.
Le Moniteur, journal officiel de Haïti, a publié
à la date du 28 du mois dernier, les termes du
règlement de la question de l’île de la Tortue.
Haïti doit payer à l’Angleterre 32,000 livres ster
ling en quatre échéances, savoir 2,000 livres im-
médiatement et trois fois 10,000 livres; le der
nier paiement devant être effectué en juillet
1888.
L’Angleterre renonce à toutes ses prétentions.
Au cas où le gouvernement haïtien ne payerait
pas aux échéances déterminées, il aurait à servir
pour sa dette un intérêt de 6 0[0.
Haïti reprend possession de l’île de la Tortue.
CORRESPONDANGES
Paris, 18 mai.
Si le gouvernement a été battu, hier, au Palais-
Bourbon, par 275 voix contre 257, la commission
du budget, exclusivement composée de républi
cains, l’a été également, puisque, déduction faite
des voix de la droite, 113 députés républicains
ou radicaux se sont seulement prononcés pour
elle, alors que 257 approuvaient la politique
financière du Cabinet. D’où la conséquence que
le futur ministère républicain n’est nullement
obligé, par le vote d’hier, de se conformer aux
vues de la commission, au contraire !
C’est, il est vrai, le gâchis dans toute sa splen
deur, mais c’est comme cela ! Et cela est si vrai,
que si M. Bouvier, président de la commission
du budget, devient ministre des finances, il de
vra s’incliner devant les 257 voix républicaines
battues hier, mais qui sont, en somme, l’expres
sion de la volonté des gauches pour la commis
sion et le gouvernement entièrement composés
de républicains.
Attachez donc, après cela, quelque impor
tance à tous les articles, des organes des gau
ches, voire à ceux de la Justice, qui déclarent
pompeusement ce matin qu'après le vote d’hier,
le gouvernement a enfin une orientation finan-
ci ère à
lie il lui faudra désormais se con-
;! les économies ne suffiront pas
plus demain quelles ne suffisaient hier pour
équilibrer
get, et le recours à l’emprunt
comme à de nouveaux impôts est aussi fatal que
jamais. Tout le monde dans le public le sait et
en convient, seuls, les politiciens, membres de
la minorité des 113, ne veulent pas l’avouer; ab
solument comme s’ils entendaient par là se mé
nager le moyen de renverser encore un ou deux
cabinets. Mais laissons cela, car c’est vraiment
enfoncer des portes ouvertes.
L’on s’entretient beaucoup dans le public,
comme dans les cercles parlementaires, de la
personnalité politique à laquelle M. Jules Grévy
va confier la mission de former le nouveau ca
binet. MM. Clémenceau, de Freycinet. Devès
(oui, M. Devès), auraient, dit-on, des chances à
cet égard, mais le président de la République
doit, auparavant, prendre l’avis des présidents
des deux Chambres et de quelques anciens pré
sidents de conseil, comme M. Jules Ferry, par
exemple ! Eh bien ! permettez-moi, sur ce point,
de constater une chose, c’est que, du moins ici,
la grande majorité du public ne s’intéresse que
médiocrement au choix de la personne qui sera
à la tête du futur ministère. On est convaincu
queM. Clémenceau, si on en faisait l’expérience,
ne durerait pas huit jours, et quant à M. de
Freycinet, il a suffisamment, c’est-à-dire à trois
reprises différentes, fourni la preuve de son
manque d’énergie et de ses dispositions à se
lancer dans des dépenses plus ou moins inop
portunes,pour qu’on ne soit aucunement rassuré
si l’on voyait l’un ou l’autre de ces personnages
devenir le chef du gouvernement. L’un et l’autre
obéissent fatalement aux passions, comme aux
entraînements de leur parti ou de leur entou
rage; et dès lors vous conviendrez aisément
qu’il n’y aurait pas autrement à se réjouir de
l’avènement de M. Clémenceau ou de celui de
M. de Freycinet.
Aussi les préoccupations générales portent-
elles sur ce point unique : le général Boulanger
figurera-t-il, oui ou non, dans la nouvelle combi
naison? Toute la crise actuelle se résume dans
cette question, je le répète, au moins à Paris,
car si le général Boulanger a perdu, dans ces
derniers temps, du terrain dans le Parlement,
l’on est obligé de convenir qu’il en a gagné dans
les masses populaires.
Si M. Clémenceau, qui a lancé le célèbre géné
ral, est appelé à former le cabinet, il est certain
qu’il ne le prendra pas pour collègue, car il est
aujourd’hui brouillé avec lui, et ses amis assu
rent d’ailleurs qu’il confiera au général Thibau-
din le portefeuille de la guerre. Si c’est M. de
Freycinet, au contraire, qui dispose des porte
feuilles, on est enclin à supposer que, dans son
désir de vivre en paix avec tous nos voisins, il
préférera se priver des services de l’ancien mi
nistre de la guerre, en prenant lui-même la di
rection de son département. Le portefeuille des
affaires étrangères serait laissé à M. Flourens, le
nouveau président du conseil se réservant alors
celui de la guerre.
L’on estime, d’ailleurs, que M. J. Grévy, qui
partage les idées pacifiques de M. de Freycinet,
n’insistera pas beaucoup pour que le général
Boulanger conserve son portefeuille. Cependant,
il ne faut pas le dissimuler, cette élimination
fera beaucoup crier, notamment dans les quar
tiers excentriques, dont les électeurs sont acquis
à l’ancien ministre de la guerre, et elle fournira
prétexte, dans le Parlement aussi bien que dans
nombre de feuilles radicales, à l’accusation que
le nouveau Cabinet, quelle que soit sa composi
tion, pactise avec les opportunistes.
Quoi qu’il en soit, ce n’est pas seulement ici
que la question du maintien à son poste du gé
néral Boulanger préoccupe les esprits, elle dé
fraie, dès aujourd’hui même, les articles des
principaux journaux anglais et allemands, qui,
le Standard à part, ne dissimulent pas que la
formation d’un Cabinet sans le général Bou
langer, rassurerait immédiatement l’opinion pu
blique dans toute l’Europe.
Aujourd’hui, comme hier, l’absence d’affiches
et de convocation de réunions publiques, en vue
de l’élection législative du 22 mai dans la Seine,
cause une stupéfaction profonde parmi les élec
teurs. Il paraît devoir en résulter fatalement un
nombre considérable d’abstentions, et tel que
l’élection de M. Mesureur risquerait de ne pou
voir être valable, faute d’un nombre suffisant de
votants.
Les amis de l'ancien président du Conseil mu
nicipal, qui mènent cette campagne, ont, du
reste, l’air de ne pas se douter de ces dispositions
du public ou plutôt de ne pas s’en soucier, puis
que pas un de leurs journaux ne cherche à ex
pliquer le silence gardé aussi bien par le candi
dat que par le Comité républicain radical socia
liste chargé d’assurer l’élection de M. Mesureur.
Il y a même ceci de plaisant dans la circons
tance, que le Cri du Peuple ne serait pas fâché
qu’en somme M. Mesureur continuât à passer
pour l’un des siens, bien que, quelques lignes
plus loin, il le somme de déclarer s’il est vrai
qu’il soit aussi éloigné du parti ouvrier que des
opportunistes.
Les journaux républicains du soir s’accordent
tous pour conseiller d’éviter les polémiques qui
pourraient retarder la solution de la crise; ce
qui ne les empêche pas de prêcher pour
leurs saints. Il paraît que ce n’est pas la même
chose.
Le plus grand nombre croit
heures, M. J. Grévy aura choisi
chargé de former le nouveau
dant, la galerie estime que si
doit être M. de Freycinet, dont
que, d’ici à 24
le personnage
cabinet. Cepen-
ce personnage
les hésitations
sont proverbiales, il se passera quelques jours
avant qu’un résultat soit obtenu.
Au surplus, le mot d’ordre, à l’Elysée est
de répondre à tout venant : que la crise sera de
très courte durée et terminée peut-être d’ici à
samedi.
Pour la Nation, la solution ne présente aucune
difficulté : « Que les trois groupes de gauche,,
dit-elle, s’entendent seulement sur un program
me commun et nous aurons aussitôt un excellent
ministère républicain. »
C’est, en effet, simple comme bonjour. Mal
heureusement, il y a dix ans que les républicains
essaient de cette entente sans avoir jamais pu
parvenir à la réaliser.
J’apprends, à la dernière heure, que M. Bris-
son, en sa qualité d’ancien président du conseil,
a été également mandé à l’Elysée.
Les opportunistes oublient
En somme, il y a quelque chose de juste
dans le rapport de la commission du budget.
On devrait pouvoir faire des économies sur
l’innombrable personnel administratif.
Avant le triomphe de la République, les
républicains avaient fait entendre bien sou
vent cette plainte amère :
— Les bureaux sont une dépense mi
neuse ! Il faut opérer la réforme administra
tive, il faut débarrasser les bureaux d’un tas
d’employés inutiles qui sucent le budget
comme autant de pucerons paresseux et gour
mands.
Mais, aussitôt triomphants, les républicains
n’eurent rien de plus pressé que de caser
leurs parents et amis, en sorte que, depuis
4877, la réforme administrative tant réclamée
par eux donnait pour résultat une augmenta
tion de dépense annuelle s’élevant à plus de
cent millions. •
Certes, on pourrait économiser cette somme
sans nuire à la bonne expédition des affaires.
Si, pourtant, M. Goblet ou M. Dauphin
avaient mis dehors les protégés de M. Bouvier
ou ceux de M. Pelletan ou ceux de M. Jules
METILLBTON
- 10 -
Le Secret du Squelette
PAR GEORGES PRADEL
PREMIRE PARTIE
LA FEUILLE D’OR
ikmafoi! exaspéré!... ne se contenant plus...
Virale point au major, aux deux capitaines
" "lr (lisant :
Vousètes des brutes !...
-e Qui fit rire encore plus fort les trois offi-
Ciers,
„ais l’interrogatoire était terminé, les police,
"h Qui l’avaient amené le firent sortir de la
«aile,
ne ibis dans la rue, il fallait traverser à nou-
9. a foule menaçante.
mils doute une indiscrétion avait été com-
De? car des cris furieux éclatèrent à son as-
7 t Walter Handel !,.. » «Walter Handel.,. »
polllisssmots étaient hurlés!... Lafressange lie
haalt en saisir la prononciation, mais il devi-
moples bien qu'ils voulaient dire « à mort! à
me8s Anglais ont plus «un coté commun
reste 6 Américains. Lafressange savait cela de
ml se disait très bien, avec un léger frémis-
affaire due Cette foule furieuse, croyant avoir
mieuy" véritable Walter Handel, pouvait le
etcol monde le lyncher et le brancher haut
I alla! premier reverbère venu.
tort Bien pu répondre à ceux qui
criaient sa mort, comme l’abbé Maury à ceux
qui voulaient l’accrocher à la lanterne.
— Et quand vous m’aurez accroché à la lan
terne, y verrez-vous plus clair?...
Mais il n’aurait pas été compris. Il n’avait pas
la moindre ressource de prouver son innocence,
et devait subir bon gré mal gré ce supplice pro
longé, qui menaçait à tout instant de se trans
former, de se terminer en mort violente.
La foule, s’ameutant de plus en plus,
ses
rangs devenant de plus en plus compacts, les
deux policemen
le firent entrer
maison.
L’un d’eux se
voiture.
qui escortaient Lafressange
sous la porte cochère d’une
détacha et alla
requérir une
Et notre pauvre Lafressange
monter, très heureux encore d’y
fuge.
fut obligé d’y
trouver un re-
Mais cette fuite en cab ne faisait point les af
faires de la foule. Elle entendait avoir des vic
times expiatoires.
Elle prétendait exécuter justice sommaire.
Et elle se rua sur le cab lorsqu’il sortit;
s’accrochant au cheval, aux harnais, aux roues
Les revolvers des agents avaient été sortis de
leur haine.
Le cocher avait beau taper sur la bête, celle-ci
se cabrait et se refusait à avancer.
Instant critique.
Encore quelques secondes et Lafressange était
pris!... il devenait la proie de cette foule ivre de
fureur qui le mettrait infailliblement en pièces.
Les pierres commençaient à pleuvoir, des
bâtons, des gourdins étaient lancés à toute
volée..,
Admirables, ces policemen ! Ils faisaient un
rempart de leur corps à leur prisonnier.
Enfin sanglé de nouveau par la lanière du co
cher, le cheval pointa deux fois, secoua la grappe
humaine qui s’attachait à lui, et partit à fond de
train, emballé !... 1
Il y eut des cris, des hurlements, quelques
membres cassés, une vingtaine d’individus bous
culés et chavirés sur le pavé de la rue... Mais le
cheval libre, et affolé par le bruit, les pierres et
les bâtons qui le poursuivaient, filait la tête
haute, avec une rapidité vertigineuse.
Un caillou, une borne, un coin mal tourné et
le cheval s’abattait broyant la voiture, et sans
doute aussi les deux policemen et leur prison
nier.
A bout de souffle, la bête finit par modifier
son allure.
Mais on était cette fois hors de tout danger.
On avait traversé Bridport et l’on s’engageait
dans les vieilles rues tortueuses et mal pavées
de Weymouth,
La voiture s’arrêta devant une maison de
sombre apparence qu’éclairaient mal deux ré
verbères.
Elle était btle au 'milieu d’une place.
A sôn ailure particulière, ses fenêtres grillées,
Lafressange reconnut la prison.
Devant, une foule muette, encombrant les
portes.
Cette foule placide était composée de bour
geois et baigneurs de Weymouth qui venaient
assister à l’incarcération des prisonniers.
Car plusieurs avaient été déjaamenés à la mai
son d’arrêt de Weymouth.
Il en était déjà venu des convois, des files,
conduits par des piquets de troupes dont Lafres- '
sange voyait reluire les canons de fusils et les |
baïonnettes.
Un colloque animé s’engagea entre un officier :
et les deux policemen.
Aux gestes impérieux de l’officier. Lafressange
comprit qu’on leur ordonnait de s’éloigner.
— Corn-castle, répétait-il, Corn-Castle... |
Evidemment la prison était pleine et ne pou
vait recevoir le nouvel arrivant.
Le cocher reprit sa course à travers les rues
de Weymouth, sortit de la ville, se dirigeant en
longeant une jetée appuyée sur de hautes roches,
vers une masse noire qui s’élevait à quelque
distance.
C’était Corn-Castle, un poste de marine, un
sémaphore qui servait également de prison pro
visoire aux contrebandiers et aux smugglers
que l’on arrêtait fort souvent dans ces pa-
rages.
Une tour crénelée dont on apercevait la
silhouette noire se détachait sur le ciel bleu
foncé.
G était tout ce qui "ostait d’un petit châ-
teau-fort, perché jadis comme un nid d’aigle,
au SOMmet de ces roches. La tour était deve
nue un poste de douane, surmonté d’un séma
phore.
Des douaniers et des marins de l’Etat y mon
taient la garde.
Un brigadier reçut le prisonnier que l’un des
policemen fit descendre de la voiture.
Et le malheureux Lafressange put enten
dre prononcer encore par son
nom de Walter Handel qui lui
désormais.
On le fit entrer dans une salle
conducteur le
était attribué
basse, la salle
du corps de garde, et le brigadier apporta un
registre, le registre d’écrou sur
inscrit toujours sous le nom de
del...
Protester était inutile... Peine
lequel il fut
Walter Han-
perdue, per-
sonne là ne parlait français, et, en outre, ses dé
négations, bien que comprises, n’eussent pas été
crues.
Les papiers trouvés sur lui faisaient foi
H était, il devait rester, jusqu’à ce que l’on put
constater son identité, Walter Handel, I
Les deux policemen, leur tâche terminée, se
retiraient avec la voiture.
Lafressange demeurait seul aux mains du bri
gadier et d’une douzaine d’hommes qui, pour la
plupart, se recouchaient sur un lit de camp,,
après l’avoir curieusement dévisagé.
Le brigadier donna un ordre à l’un des Som
mes, celui-ci s’en fut chercher deux bottes de
paille, et Lafressange, à un signe qui lui fut
adressé, suivit ses geôliers.
Le Drgadier avait pris une lanterne, une
grosse clef et s’engageait, en compagnie du
porte-paille et de Lafressange, dans un escalier
qui descendait en vis dans les profondeurs du
roc.
Deux doubles portes ferrées furent ouvertes
tour à tour.
Elles crièrent d’une façon sinistre en roulant
sur leurs gonds.
Les deux bottes de paille jetées dans un coin
indiquèrent au prisonnier sa couche, et le bri-
gadier, ainsi que le matelot qui l’accompagnait,
laissèrent le malheureux Lafressange dans l’ob
scurité, en compagnie des réflexions les moins
gaies.
— Bah ! fit-il, en s’armant de philosophie, je
suis éreinté, mais, en somme, je n’ai rien de
cassé, et irai point de blessures. Il pouvait m’ar
river bien pis encore. Je pouvais être enlevé et
pendu à un réverbère !... C’est ça qui aurait fait
une jolie « Dernière heure » pour le journal. Dor
mons toujours, je suis rompu de fatigue, demain
il fera clair.
Et, se jetant sur la paille de son cachot — qui
n’était pas encore humide, il en lit plaisamment
lui-même la remarque — il s’endormit à poings
fermes, avec cetté insouciance heureuse que
donne à la lois la jeunesse et le courage bercé'
par la mer qu’il entendait battre le rocher à deux,
pas de sa tête...
Son sommeil ne fut pas de longue durée.
(La suite, au orochain numéro)*
UNION BOURGUIGNONNE
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es présents d’Artaxerxès Lockroy. Notre mi-
nistre israélite en sera pour ses frais de
mamours à l’adresse des rois et des empe
reurs.
Nous avons sous les yeux l’article du Frem-
junblatt de Vienne, qui avait été signalé par
e télégraphe et où l’organe officieux du ca-
jinet de Vienne annonce sans embages le
refus du gouvernement austro-hongrois de
prendre part à l’Exposition de Paris. La
feuille viennoise s’étonne que les républicains
français aient pu pousser le manque de tact jus-
qu’à convier à la glorification de la révolution
française un gouvernement chez qui ale dou
loureux souvenir de Marie-Antoinette est tou
jours si vivace.
L’Italie elle-même, ajoute le Fremdenblatt,
malgré tant d’affinités avec la France, ne veut
pas se séparer des autres monarchies et re
fuse de figurer dans une manifestation en
l’honneur d’un événement qui, s’il a fourni à
humanité quelques idées civilisatrices, a dé-
versé sur les peuples d’Europe des maux in-
alculables.
Du reste, la situation générale n’est pas de
nature à engaher les gouvernements à se don-
ner rendez-vous à Paris pour assister à des
fies internationales. Après les excès aux-
‘quels s’est livrée la population parisienne à
propos de l’opéra de Wagner, les étrangers
je voudront certes pas concourir à une dé
monstration qui, comme le centenaire en
| question, peut si facilement donner lieu à des
.incidents des plus périlleux pour la paix.
Quant aux gouvernements, leur devoir est de
p tenir éloignés de réjouissances qui pour-
1 rient faire croire à tort que la situation eu-
I méenne est redevenue normale, tandis
quelle continue à être extrêmement pré
caire.
D’autre part, la Nouvelle Presse libre, qui
et plus favorable à la France et même à no
ire gouvernement puisque, à ce propos, elle
a été ces jours-ci l’objet des attaques de la
Suite de P Allemagne du Nord, prévoit que
l'Exposition universelle de 1889 est condam-
oie à un fiasco complet. Parlant au nom des
'industriels autrichiens, le journal viennois
l expose que ce genre d’exhibition n’est plus
quun anachronisme à une époque où, sur le
terrain économique, les peuples s’entourent
de plus en plus de barrières difficiles à fran-
Ichir et où le libre échange est partout battu
en brèche par le protectionnisme.
Quant à l’Angleterre, dans une des der-
pères séances de la Chambre des Communes,
ir J. Fergusson, répondant à M. Labouchère,
Hit qu’il ne faut pas conclure de son refus de
prticiper officiellement à l'Exposition de Pa-
fis en 1889, que le gouvernement ne prendra
M désormais, à aucune exposition étran
gère. Celle de Paris étant destinée à glorifier
les événements de la Révolution de 1789, le
gouvernement ne croit pas qu’il lui convienne
de s’associer, en pays étranger, à la célébra
tion d’événements sur lesquels il existe des
divergences de vues.
Celui-là, du moins, s’explique nettement.
La parole ne lui a pas été donnée pour dé
guiser sa pensée.
Bref, voilà notre révolution mise à V index
par toute l’Europe monarchique. Nos prin
cipes sont conspués.
C’est plus vexant encore que le sommeil
ronflant du duc d’Edimbourg.
L.
NOUVELLES
Paris, 19 mai.
Le président de la République a conféré mer
credi avec les présidents du Sénat et de la Cham
bre, avec M. Raynal, président de l’Union des
gauches, ainsi qu’avec un certain nombre d’au
tres pérsonnages parlementaires.
On dit que l’entrevue de M. Raynal avec M.
Grévy a eu lieu en quelque sorte'accidentelle
ment. M. Raynal n’avait pas été appelé à l’Elysée
au moment où il a vu le président de la Répu
blique.
La seule convocation que M. Grévy avait
faite était celle adressée au président de la Cham
bre.
Nous croyons savoir que, dès le début de l’en
tretien avec M. Floquet, il a été établi que c’était
seulement à titre de consultation que la convo
cation avait lieu. L’honorable président de la
Chambre a dit, si nous sommes bien informés,
que si l’on voulait appliquer strictement la règle
parlementaire, il fallait faire le cabinet avec
des membres de la commission du budget; mais
que, si l’on voulait faire un cabinet de concilia
tion, il fallait choisir d’autres personnalités.
Mercredi, à 2 heures) M. Grévy a reçu M. Le
Royer, président du Sénat. Il a fait appeler MM.
Brisson, Ribot, Bouvier, etc., dans le courant de
l’après-midi, pour s’entretenir avec eux.
Le président de la République a reçu une dé
légation du comité de la fête militaire et dan
sante qui doit avoir lieu le 31 mai à l’Opéra.
Les délégués venaient prier M. J. Grévy de vou
loir bien assister à cette soirée.
Disons, à propos de la fête de la territoriale et
de la réserve, que l’on a renoncé au programme
primitif, qui a été vivement critiqué, et qui con
sistait, comme on sait, « en une salle de bal au
camp, le soir d’une victoire. »
Des observations de M. Garnier, fondées sur
des difficultés d’exécution, ont servi de prétexte
pour renoncer à ce projet, et la soirée n’aura
qu’à y gagner.
La majorité qui a renversé le ministère se com-
pose de 58 membres de l’Union des gauches,
33 membres de l’extrême gauche, 6 membres de
la gauche radicale, 13 indépendants et 165 dépu
tés de la droite.
La minorité qui a voté en faveur du ministère
ne comprend que des républicains, ravoir :
70 membres de l’Union des gauches. 40 de l’ex
trême gauche, GO de la gauche radicale et près
de 80 indépendants.
M. Goblet a reçu mercredi matin l’archevêque
de Paris.
Les études relatives au rattachement des di
vers services du ministère de l'agriculture à
d’autres départements ministériels auraient
abouti aux conclusions suivantes :
« Les choses seraient remises en l’état où elles
étaient avant le décret du 1l novembre 1881.
» La division de l’hydraulique agricole passe
rait aux travaux publics.
» Les autres services seraient rattachés au mi
nistère du commerce, qui reprendrait son an
cienne dénomination de ministère de l’agricul
ture et du commerce.
» Ils formeraient une direction générale com
prenant l’agriculture proprement dite, les haras
et les forêts, qu’il a été un instant question de
rendre aux finances, dont ils faisaient partie
avant le décret du 15 décembre 1877.
Sur la demande de l’almany Samory, des mo
difications viennent d’être apportées au traité
qu’il a signé l’an dernier avec la France. Le
nouveau traité stipule que les Etats de Samory
sur les deux rives du Niger sont placés sous no
tre protectorat. C'est le capitaine Peroz, de l’in
fanterie de marine, qui a mené cette négocia
tion.
On mande de Metz, le 17 mai, à la Gazette de
Cologne, que l’ordre a été donné aux troupes du
15’ corps d’armée, stationnant en Alsace-Lor
raine, d’éviter soigneusement de dépasser la
frontière française.
Cette recommandation a été faite aux simples
soldats aussi bien qu’aux officiers de ce corps
d’armée.
On mande de Berlin, le 18, à la Gazette de Colo
gne, que l’empereur se rendra à Ems le 15 juin,
pour y faire sa cure habituelle.
Le monarque désire également se rendre à
Gastein, et l’on espère qu’il pourra entreprendre
ce voyage.
Berne, 18 mai. — D’après le recensement of
ficiel des votes arrêté ce matin, le monopole de
l’eau-de-vie a été sanctionné, au plébiscite de
dimanche dernier, par 267.255 voix contre
138,122.
Le Moniteur, journal officiel de Haïti, a publié
à la date du 28 du mois dernier, les termes du
règlement de la question de l’île de la Tortue.
Haïti doit payer à l’Angleterre 32,000 livres ster
ling en quatre échéances, savoir 2,000 livres im-
médiatement et trois fois 10,000 livres; le der
nier paiement devant être effectué en juillet
1888.
L’Angleterre renonce à toutes ses prétentions.
Au cas où le gouvernement haïtien ne payerait
pas aux échéances déterminées, il aurait à servir
pour sa dette un intérêt de 6 0[0.
Haïti reprend possession de l’île de la Tortue.
CORRESPONDANGES
Paris, 18 mai.
Si le gouvernement a été battu, hier, au Palais-
Bourbon, par 275 voix contre 257, la commission
du budget, exclusivement composée de républi
cains, l’a été également, puisque, déduction faite
des voix de la droite, 113 députés républicains
ou radicaux se sont seulement prononcés pour
elle, alors que 257 approuvaient la politique
financière du Cabinet. D’où la conséquence que
le futur ministère républicain n’est nullement
obligé, par le vote d’hier, de se conformer aux
vues de la commission, au contraire !
C’est, il est vrai, le gâchis dans toute sa splen
deur, mais c’est comme cela ! Et cela est si vrai,
que si M. Bouvier, président de la commission
du budget, devient ministre des finances, il de
vra s’incliner devant les 257 voix républicaines
battues hier, mais qui sont, en somme, l’expres
sion de la volonté des gauches pour la commis
sion et le gouvernement entièrement composés
de républicains.
Attachez donc, après cela, quelque impor
tance à tous les articles, des organes des gau
ches, voire à ceux de la Justice, qui déclarent
pompeusement ce matin qu'après le vote d’hier,
le gouvernement a enfin une orientation finan-
ci ère à
lie il lui faudra désormais se con-
;! les économies ne suffiront pas
plus demain quelles ne suffisaient hier pour
équilibrer
get, et le recours à l’emprunt
comme à de nouveaux impôts est aussi fatal que
jamais. Tout le monde dans le public le sait et
en convient, seuls, les politiciens, membres de
la minorité des 113, ne veulent pas l’avouer; ab
solument comme s’ils entendaient par là se mé
nager le moyen de renverser encore un ou deux
cabinets. Mais laissons cela, car c’est vraiment
enfoncer des portes ouvertes.
L’on s’entretient beaucoup dans le public,
comme dans les cercles parlementaires, de la
personnalité politique à laquelle M. Jules Grévy
va confier la mission de former le nouveau ca
binet. MM. Clémenceau, de Freycinet. Devès
(oui, M. Devès), auraient, dit-on, des chances à
cet égard, mais le président de la République
doit, auparavant, prendre l’avis des présidents
des deux Chambres et de quelques anciens pré
sidents de conseil, comme M. Jules Ferry, par
exemple ! Eh bien ! permettez-moi, sur ce point,
de constater une chose, c’est que, du moins ici,
la grande majorité du public ne s’intéresse que
médiocrement au choix de la personne qui sera
à la tête du futur ministère. On est convaincu
queM. Clémenceau, si on en faisait l’expérience,
ne durerait pas huit jours, et quant à M. de
Freycinet, il a suffisamment, c’est-à-dire à trois
reprises différentes, fourni la preuve de son
manque d’énergie et de ses dispositions à se
lancer dans des dépenses plus ou moins inop
portunes,pour qu’on ne soit aucunement rassuré
si l’on voyait l’un ou l’autre de ces personnages
devenir le chef du gouvernement. L’un et l’autre
obéissent fatalement aux passions, comme aux
entraînements de leur parti ou de leur entou
rage; et dès lors vous conviendrez aisément
qu’il n’y aurait pas autrement à se réjouir de
l’avènement de M. Clémenceau ou de celui de
M. de Freycinet.
Aussi les préoccupations générales portent-
elles sur ce point unique : le général Boulanger
figurera-t-il, oui ou non, dans la nouvelle combi
naison? Toute la crise actuelle se résume dans
cette question, je le répète, au moins à Paris,
car si le général Boulanger a perdu, dans ces
derniers temps, du terrain dans le Parlement,
l’on est obligé de convenir qu’il en a gagné dans
les masses populaires.
Si M. Clémenceau, qui a lancé le célèbre géné
ral, est appelé à former le cabinet, il est certain
qu’il ne le prendra pas pour collègue, car il est
aujourd’hui brouillé avec lui, et ses amis assu
rent d’ailleurs qu’il confiera au général Thibau-
din le portefeuille de la guerre. Si c’est M. de
Freycinet, au contraire, qui dispose des porte
feuilles, on est enclin à supposer que, dans son
désir de vivre en paix avec tous nos voisins, il
préférera se priver des services de l’ancien mi
nistre de la guerre, en prenant lui-même la di
rection de son département. Le portefeuille des
affaires étrangères serait laissé à M. Flourens, le
nouveau président du conseil se réservant alors
celui de la guerre.
L’on estime, d’ailleurs, que M. J. Grévy, qui
partage les idées pacifiques de M. de Freycinet,
n’insistera pas beaucoup pour que le général
Boulanger conserve son portefeuille. Cependant,
il ne faut pas le dissimuler, cette élimination
fera beaucoup crier, notamment dans les quar
tiers excentriques, dont les électeurs sont acquis
à l’ancien ministre de la guerre, et elle fournira
prétexte, dans le Parlement aussi bien que dans
nombre de feuilles radicales, à l’accusation que
le nouveau Cabinet, quelle que soit sa composi
tion, pactise avec les opportunistes.
Quoi qu’il en soit, ce n’est pas seulement ici
que la question du maintien à son poste du gé
néral Boulanger préoccupe les esprits, elle dé
fraie, dès aujourd’hui même, les articles des
principaux journaux anglais et allemands, qui,
le Standard à part, ne dissimulent pas que la
formation d’un Cabinet sans le général Bou
langer, rassurerait immédiatement l’opinion pu
blique dans toute l’Europe.
Aujourd’hui, comme hier, l’absence d’affiches
et de convocation de réunions publiques, en vue
de l’élection législative du 22 mai dans la Seine,
cause une stupéfaction profonde parmi les élec
teurs. Il paraît devoir en résulter fatalement un
nombre considérable d’abstentions, et tel que
l’élection de M. Mesureur risquerait de ne pou
voir être valable, faute d’un nombre suffisant de
votants.
Les amis de l'ancien président du Conseil mu
nicipal, qui mènent cette campagne, ont, du
reste, l’air de ne pas se douter de ces dispositions
du public ou plutôt de ne pas s’en soucier, puis
que pas un de leurs journaux ne cherche à ex
pliquer le silence gardé aussi bien par le candi
dat que par le Comité républicain radical socia
liste chargé d’assurer l’élection de M. Mesureur.
Il y a même ceci de plaisant dans la circons
tance, que le Cri du Peuple ne serait pas fâché
qu’en somme M. Mesureur continuât à passer
pour l’un des siens, bien que, quelques lignes
plus loin, il le somme de déclarer s’il est vrai
qu’il soit aussi éloigné du parti ouvrier que des
opportunistes.
Les journaux républicains du soir s’accordent
tous pour conseiller d’éviter les polémiques qui
pourraient retarder la solution de la crise; ce
qui ne les empêche pas de prêcher pour
leurs saints. Il paraît que ce n’est pas la même
chose.
Le plus grand nombre croit
heures, M. J. Grévy aura choisi
chargé de former le nouveau
dant, la galerie estime que si
doit être M. de Freycinet, dont
que, d’ici à 24
le personnage
cabinet. Cepen-
ce personnage
les hésitations
sont proverbiales, il se passera quelques jours
avant qu’un résultat soit obtenu.
Au surplus, le mot d’ordre, à l’Elysée est
de répondre à tout venant : que la crise sera de
très courte durée et terminée peut-être d’ici à
samedi.
Pour la Nation, la solution ne présente aucune
difficulté : « Que les trois groupes de gauche,,
dit-elle, s’entendent seulement sur un program
me commun et nous aurons aussitôt un excellent
ministère républicain. »
C’est, en effet, simple comme bonjour. Mal
heureusement, il y a dix ans que les républicains
essaient de cette entente sans avoir jamais pu
parvenir à la réaliser.
J’apprends, à la dernière heure, que M. Bris-
son, en sa qualité d’ancien président du conseil,
a été également mandé à l’Elysée.
Les opportunistes oublient
En somme, il y a quelque chose de juste
dans le rapport de la commission du budget.
On devrait pouvoir faire des économies sur
l’innombrable personnel administratif.
Avant le triomphe de la République, les
républicains avaient fait entendre bien sou
vent cette plainte amère :
— Les bureaux sont une dépense mi
neuse ! Il faut opérer la réforme administra
tive, il faut débarrasser les bureaux d’un tas
d’employés inutiles qui sucent le budget
comme autant de pucerons paresseux et gour
mands.
Mais, aussitôt triomphants, les républicains
n’eurent rien de plus pressé que de caser
leurs parents et amis, en sorte que, depuis
4877, la réforme administrative tant réclamée
par eux donnait pour résultat une augmenta
tion de dépense annuelle s’élevant à plus de
cent millions. •
Certes, on pourrait économiser cette somme
sans nuire à la bonne expédition des affaires.
Si, pourtant, M. Goblet ou M. Dauphin
avaient mis dehors les protégés de M. Bouvier
ou ceux de M. Pelletan ou ceux de M. Jules
METILLBTON
- 10 -
Le Secret du Squelette
PAR GEORGES PRADEL
PREMIRE PARTIE
LA FEUILLE D’OR
ikmafoi! exaspéré!... ne se contenant plus...
Virale point au major, aux deux capitaines
" "lr (lisant :
Vousètes des brutes !...
-e Qui fit rire encore plus fort les trois offi-
Ciers,
„ais l’interrogatoire était terminé, les police,
"h Qui l’avaient amené le firent sortir de la
«aile,
ne ibis dans la rue, il fallait traverser à nou-
9. a foule menaçante.
mils doute une indiscrétion avait été com-
De? car des cris furieux éclatèrent à son as-
7 t Walter Handel !,.. » «Walter Handel.,. »
polllisssmots étaient hurlés!... Lafressange lie
haalt en saisir la prononciation, mais il devi-
moples bien qu'ils voulaient dire « à mort! à
me8s Anglais ont plus «un coté commun
reste 6 Américains. Lafressange savait cela de
ml se disait très bien, avec un léger frémis-
affaire due Cette foule furieuse, croyant avoir
mieuy" véritable Walter Handel, pouvait le
etcol monde le lyncher et le brancher haut
I alla! premier reverbère venu.
tort Bien pu répondre à ceux qui
criaient sa mort, comme l’abbé Maury à ceux
qui voulaient l’accrocher à la lanterne.
— Et quand vous m’aurez accroché à la lan
terne, y verrez-vous plus clair?...
Mais il n’aurait pas été compris. Il n’avait pas
la moindre ressource de prouver son innocence,
et devait subir bon gré mal gré ce supplice pro
longé, qui menaçait à tout instant de se trans
former, de se terminer en mort violente.
La foule, s’ameutant de plus en plus,
ses
rangs devenant de plus en plus compacts, les
deux policemen
le firent entrer
maison.
L’un d’eux se
voiture.
qui escortaient Lafressange
sous la porte cochère d’une
détacha et alla
requérir une
Et notre pauvre Lafressange
monter, très heureux encore d’y
fuge.
fut obligé d’y
trouver un re-
Mais cette fuite en cab ne faisait point les af
faires de la foule. Elle entendait avoir des vic
times expiatoires.
Elle prétendait exécuter justice sommaire.
Et elle se rua sur le cab lorsqu’il sortit;
s’accrochant au cheval, aux harnais, aux roues
Les revolvers des agents avaient été sortis de
leur haine.
Le cocher avait beau taper sur la bête, celle-ci
se cabrait et se refusait à avancer.
Instant critique.
Encore quelques secondes et Lafressange était
pris!... il devenait la proie de cette foule ivre de
fureur qui le mettrait infailliblement en pièces.
Les pierres commençaient à pleuvoir, des
bâtons, des gourdins étaient lancés à toute
volée..,
Admirables, ces policemen ! Ils faisaient un
rempart de leur corps à leur prisonnier.
Enfin sanglé de nouveau par la lanière du co
cher, le cheval pointa deux fois, secoua la grappe
humaine qui s’attachait à lui, et partit à fond de
train, emballé !... 1
Il y eut des cris, des hurlements, quelques
membres cassés, une vingtaine d’individus bous
culés et chavirés sur le pavé de la rue... Mais le
cheval libre, et affolé par le bruit, les pierres et
les bâtons qui le poursuivaient, filait la tête
haute, avec une rapidité vertigineuse.
Un caillou, une borne, un coin mal tourné et
le cheval s’abattait broyant la voiture, et sans
doute aussi les deux policemen et leur prison
nier.
A bout de souffle, la bête finit par modifier
son allure.
Mais on était cette fois hors de tout danger.
On avait traversé Bridport et l’on s’engageait
dans les vieilles rues tortueuses et mal pavées
de Weymouth,
La voiture s’arrêta devant une maison de
sombre apparence qu’éclairaient mal deux ré
verbères.
Elle était btle au 'milieu d’une place.
A sôn ailure particulière, ses fenêtres grillées,
Lafressange reconnut la prison.
Devant, une foule muette, encombrant les
portes.
Cette foule placide était composée de bour
geois et baigneurs de Weymouth qui venaient
assister à l’incarcération des prisonniers.
Car plusieurs avaient été déjaamenés à la mai
son d’arrêt de Weymouth.
Il en était déjà venu des convois, des files,
conduits par des piquets de troupes dont Lafres- '
sange voyait reluire les canons de fusils et les |
baïonnettes.
Un colloque animé s’engagea entre un officier :
et les deux policemen.
Aux gestes impérieux de l’officier. Lafressange
comprit qu’on leur ordonnait de s’éloigner.
— Corn-castle, répétait-il, Corn-Castle... |
Evidemment la prison était pleine et ne pou
vait recevoir le nouvel arrivant.
Le cocher reprit sa course à travers les rues
de Weymouth, sortit de la ville, se dirigeant en
longeant une jetée appuyée sur de hautes roches,
vers une masse noire qui s’élevait à quelque
distance.
C’était Corn-Castle, un poste de marine, un
sémaphore qui servait également de prison pro
visoire aux contrebandiers et aux smugglers
que l’on arrêtait fort souvent dans ces pa-
rages.
Une tour crénelée dont on apercevait la
silhouette noire se détachait sur le ciel bleu
foncé.
G était tout ce qui "ostait d’un petit châ-
teau-fort, perché jadis comme un nid d’aigle,
au SOMmet de ces roches. La tour était deve
nue un poste de douane, surmonté d’un séma
phore.
Des douaniers et des marins de l’Etat y mon
taient la garde.
Un brigadier reçut le prisonnier que l’un des
policemen fit descendre de la voiture.
Et le malheureux Lafressange put enten
dre prononcer encore par son
nom de Walter Handel qui lui
désormais.
On le fit entrer dans une salle
conducteur le
était attribué
basse, la salle
du corps de garde, et le brigadier apporta un
registre, le registre d’écrou sur
inscrit toujours sous le nom de
del...
Protester était inutile... Peine
lequel il fut
Walter Han-
perdue, per-
sonne là ne parlait français, et, en outre, ses dé
négations, bien que comprises, n’eussent pas été
crues.
Les papiers trouvés sur lui faisaient foi
H était, il devait rester, jusqu’à ce que l’on put
constater son identité, Walter Handel, I
Les deux policemen, leur tâche terminée, se
retiraient avec la voiture.
Lafressange demeurait seul aux mains du bri
gadier et d’une douzaine d’hommes qui, pour la
plupart, se recouchaient sur un lit de camp,,
après l’avoir curieusement dévisagé.
Le brigadier donna un ordre à l’un des Som
mes, celui-ci s’en fut chercher deux bottes de
paille, et Lafressange, à un signe qui lui fut
adressé, suivit ses geôliers.
Le Drgadier avait pris une lanterne, une
grosse clef et s’engageait, en compagnie du
porte-paille et de Lafressange, dans un escalier
qui descendait en vis dans les profondeurs du
roc.
Deux doubles portes ferrées furent ouvertes
tour à tour.
Elles crièrent d’une façon sinistre en roulant
sur leurs gonds.
Les deux bottes de paille jetées dans un coin
indiquèrent au prisonnier sa couche, et le bri-
gadier, ainsi que le matelot qui l’accompagnait,
laissèrent le malheureux Lafressange dans l’ob
scurité, en compagnie des réflexions les moins
gaies.
— Bah ! fit-il, en s’armant de philosophie, je
suis éreinté, mais, en somme, je n’ai rien de
cassé, et irai point de blessures. Il pouvait m’ar
river bien pis encore. Je pouvais être enlevé et
pendu à un réverbère !... C’est ça qui aurait fait
une jolie « Dernière heure » pour le journal. Dor
mons toujours, je suis rompu de fatigue, demain
il fera clair.
Et, se jetant sur la paille de son cachot — qui
n’était pas encore humide, il en lit plaisamment
lui-même la remarque — il s’endormit à poings
fermes, avec cetté insouciance heureuse que
donne à la lois la jeunesse et le courage bercé'
par la mer qu’il entendait battre le rocher à deux,
pas de sa tête...
Son sommeil ne fut pas de longue durée.
(La suite, au orochain numéro)*
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