Titre : Revue universitaire : éducation, enseignement, hygiène...
Éditeur : A. Colin et Cie (Paris)
Date d'édition : 1897-01-15
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb344376179
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 15 janvier 1897 15 janvier 1897
Description : 1897/01/15 (A6,N1,T1)-1897/05/15 (A6,N5,T1). 1897/01/15 (A6,N1,T1)-1897/05/15 (A6,N5,T1).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t53817546
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-R-11751
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/08/2022
514 REVUE UNIVERSITAIRE.
Cosmopolis 1 (Mai). Quelques lettres inédites de Fr. Nietzsche.
Ces lettres publiées par M. Lichtenberger jettent un jour curieux
sur les sentiments intimes de celui qu’on s’était plu à nommer
le misogyne par excellence, le contempteur le plus acerbe de la
femme qui eût paru depuis Schopenhauer. Il y a, à première vue,
un contraste piquant entre le Nietzsche des écrits philosophiques et
le Nietzsche que la correspondance nous laisse entrevoir : senti
mental, un peu rêveur, sachant parfaitement apprécier le charme
d’une amitié de femme. Le contraste toutefois n’est qu’apparent; le
cas de Schopenhauer et celui de son disciple sont aux antipodes l’un
de l’autre, parce quel’un partdecette prémisse que la vie est mauvaise,
qu’il faut l’anéantir et par conséquent fuir la créature qui incarne le
désir de vivre, échapper au mariage, « ce piège que la nature nous
tend » ; l’autre au contraire veut la vie universelle aussi riche,
aussi intense, aussi puissante que possible : « Comme jadis l’animal
a donné naissance à une espèce supérieure dans l’échelle des êtres,
à l’homme, de même l’homme doit tendre à son tour vers une
forme plus haute de la vie, vers le sur-homme. » Nietzsche ne peut
donc avoir les raisons du père du pessimisme pour maudire l'amour
et mépriser la femme ; le mariage est pour lui l’acte sacré par
excellence. Mais l’amour n’a pas la même importance pour les deux
sexes : dans la vie de l’homme ce n’est qu’un épisode, tandis que
« tout dans la femme est une énigme, tout en elle a une solution
qui a nom : enfantement ». Aussi doit-elle mettre sa gloire à se
donner tout entière, sans réserve, au maître qu’elle a choisi-
« L’homme doit être élevé pour la guerre, et la femme pour le
délassement du guerrier, tout le reste est folie » (Zarathustra). La
femme-idole, objet du culte de l’éternel féminin excite la colère
de Nietzsche; mais sa bête noire, c’est l’émancipée, le bas-bleu, la
femme commis qui aspire à l’indépendance juridique et économique
et prétend traiter d’égal à égal avec le maître. Les femmes illustres
qu’on cite pour légitimer les prétentions des féministes, Mme Roland,
Mme de Staël, George Eliot et « Monsieur » George Sand, il les traite
presque comme des ennemis personnels. En réalité dans le com
merce ordinaire de la vie, le farouche philosophe ne fut pas insen
sible à l’amitié de femmes supérieures, telles que Mme de Meysenbug
et Mm Lou Andreas-Salomé, la confidente de ses angoisses intellec
tuelles et morales.
Le Correspondant (10 avril). Le mouvement féministe et la
décadence romaine, par M. Paul Allard.
Dans ce qu’il y a d’exceptionnellement vrai et par ce qu’il ren
ferme de généralement faux, ce mouvement, à en croire l’auteur,
aurait presque toutes ses racines dans l’antiquité. Avis à ceux que
l’attrait de la nouveauté surtout attire dans le camp des belles
rebelles. Sous certains points même les Romains étaient aussi
I. Paris, Armand Colin et G io .
Cosmopolis 1 (Mai). Quelques lettres inédites de Fr. Nietzsche.
Ces lettres publiées par M. Lichtenberger jettent un jour curieux
sur les sentiments intimes de celui qu’on s’était plu à nommer
le misogyne par excellence, le contempteur le plus acerbe de la
femme qui eût paru depuis Schopenhauer. Il y a, à première vue,
un contraste piquant entre le Nietzsche des écrits philosophiques et
le Nietzsche que la correspondance nous laisse entrevoir : senti
mental, un peu rêveur, sachant parfaitement apprécier le charme
d’une amitié de femme. Le contraste toutefois n’est qu’apparent; le
cas de Schopenhauer et celui de son disciple sont aux antipodes l’un
de l’autre, parce quel’un partdecette prémisse que la vie est mauvaise,
qu’il faut l’anéantir et par conséquent fuir la créature qui incarne le
désir de vivre, échapper au mariage, « ce piège que la nature nous
tend » ; l’autre au contraire veut la vie universelle aussi riche,
aussi intense, aussi puissante que possible : « Comme jadis l’animal
a donné naissance à une espèce supérieure dans l’échelle des êtres,
à l’homme, de même l’homme doit tendre à son tour vers une
forme plus haute de la vie, vers le sur-homme. » Nietzsche ne peut
donc avoir les raisons du père du pessimisme pour maudire l'amour
et mépriser la femme ; le mariage est pour lui l’acte sacré par
excellence. Mais l’amour n’a pas la même importance pour les deux
sexes : dans la vie de l’homme ce n’est qu’un épisode, tandis que
« tout dans la femme est une énigme, tout en elle a une solution
qui a nom : enfantement ». Aussi doit-elle mettre sa gloire à se
donner tout entière, sans réserve, au maître qu’elle a choisi-
« L’homme doit être élevé pour la guerre, et la femme pour le
délassement du guerrier, tout le reste est folie » (Zarathustra). La
femme-idole, objet du culte de l’éternel féminin excite la colère
de Nietzsche; mais sa bête noire, c’est l’émancipée, le bas-bleu, la
femme commis qui aspire à l’indépendance juridique et économique
et prétend traiter d’égal à égal avec le maître. Les femmes illustres
qu’on cite pour légitimer les prétentions des féministes, Mme Roland,
Mme de Staël, George Eliot et « Monsieur » George Sand, il les traite
presque comme des ennemis personnels. En réalité dans le com
merce ordinaire de la vie, le farouche philosophe ne fut pas insen
sible à l’amitié de femmes supérieures, telles que Mme de Meysenbug
et Mm Lou Andreas-Salomé, la confidente de ses angoisses intellec
tuelles et morales.
Le Correspondant (10 avril). Le mouvement féministe et la
décadence romaine, par M. Paul Allard.
Dans ce qu’il y a d’exceptionnellement vrai et par ce qu’il ren
ferme de généralement faux, ce mouvement, à en croire l’auteur,
aurait presque toutes ses racines dans l’antiquité. Avis à ceux que
l’attrait de la nouveauté surtout attire dans le camp des belles
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