Littérature d’évasion et roman de voyage
La littérature de voyage constitue un genre conquérant au XVIIIe siècle pour lequel 3 540 titres sont recensés contre 1 566 au XVIIe siècle et 456 au XVIe siècle : voyages lointains toujours mais aussi, et de plus en plus, voyages européens. Les « collections » se multiplient, dont la plus ambitieuse est L’Histoire générale des voyages par l’abbé Prévost, 16 tomes in-4° entre 1746 et 1761. Les livres de voyage atteignent des prix élevés.
Aux voyages réels s’ajoutent les voyages et les lieux imaginaires : u-topos. La collection des « Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques », qui paraît entre 1789 et 1799 à Amsterdam et Paris, comprend 36 tomes allant de Robinson Crusoé, de Defoe, au Diable amoureux, de Cazotte, en passant par Micromégas, de Voltaire, et Les Voyages de Gulliver, de Swift. La tendance traditionnelle est à l’île, sur le motif de la « robinsonnade ».
La découverte de Tahiti, en 1767, donne encore une impulsion à la création d’utopies géographiques, aux visions idéalisées des îles désertes. Diderot ajoute ainsi au récit réaliste de Bougainville un Supplément utopique, méta-voyage imaginaire, où il dénonce les méfaits de la civilisation en faisant l’éloge de la vie naturelle. Écrite à la veille de la Révolution, La Découverte australe par un homme volant, de Rétif de La Bretonne, insiste sur un autre point : la libération possible de l’homme par les conquêtes de la technique et de la science. Rétif y apparaît par endroits plus proche d'un Jules Verne et d'un Wells que des philosophes de son temps.
EN SAVOIR PLUS
> Defoe, Robinson Crusoé, 1719
> Swift, Les Voyages de Gulliver, 1726
> Prévost, Histoire générale des voyages, 1746
> Voltaire, Micromégas, 1752
> Diderot, Supplément au voyage de Bougainville, 1772
> Rétif de La Bretonne, La Découverte australe par un homme volant, 1781