Critiques
Voltaire
« LE SAGE, né à Vannes, en Basse-Bretagne, en 1667. Son roman de Gil Blas est demeuré, parce qu'il y a du naturel ; il est entièrement pris du roman espagnol intitulé La Vida del escudero don Marcos de Obregon. Mort en 1747. »
(Le siècle de Louis XIV, 1751)
Saint-Marc de Girardin
« Avant lui, on n'avait pas soupçonné ce que pouvait fournir à l'imagination le développement d'un caractère, il le montra ; mais le roman de mœurs resta cependant tel qu'il l'avait fait ; et Gil Blas fut sans imitateur, comme il avait été sans modèle. »
(Éloge de Lesage, 1822)
Jean-François La Harpe
« Le Sage, qui eut un goût particulier pour la littérature espagnole dans un temps où tout le monde l'abandonnait, y prit le fond et les mœurs de la plupart de ses romans […]. Mais s'il se servit en homme d'esprit de cette littérature étrangère, il eut assez de talent pour que chez lui l'écrivain original l'emportât de beaucoup sur l'imitateur ingénieux. Le meilleur de ses romans, sans aucune comparaison, Gil-Blas, lui appartient en propre »
(Lycée, ou Cours de littérature ancienne et moderne, 1834)
Sainte-Beuve
« Gil Blas, malgré le costume espagnol et toutes les imitations qu'on a pu y relever, est un des livres les plus français que nous ayons. Il importe assez peu pour la qualité de l'ouvrage que l'auteur en ait pris ici ou là le canevas, qu'il y ait inséré tel ou tel épisode d'emprunt : le mérite n'est pas dans l'invention générale, mais dans la conduite, dans le ménagement de chaque scène et de chaque tableau, dans le détail du propos et du récit, dans l'air aisé et le tour d'enjouement qui unit tout cela. En prose et sous forme de roman, c'est un mérite, une originalité du même genre que celle de La Fontaine. La touche de Le Sage est toute française, et si notre littérature possède un livre qu'il soit bon de relire après chaque invasion, après chaque trouble dans l'ordre de la morale, de la politique et du goût, pour se calmer l'humeur, se remettre l'esprit au point de vue et se rafraîchir le langage , c'est Gil Blas. »
(Préface à Gil Blas, 1864)
Emile Faguet
« Mais où il [Lesage] excelle, c'est à voir et à bien montrer des hommes qui ont du bon et du mauvais en un constant mélange, et qu’il ne faudrait que très peu de chose pour jeter sans retour dans le mal, ou sans défaillance prévue, dans le bien. C'est en cela qu'il est plus capable de vérité que personne. »
(Dix-huitième siècle, études littéraires, 1910)