Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1910-01-12
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 12 janvier 1910 12 janvier 1910
Description : 1910/01/12 (Numéro 12). 1910/01/12 (Numéro 12).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
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Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k2887046
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
Mercredi 12 Jànylèf Hit 1
te Numéro quotidien = SEINE & SEINE-ET-OISE 15 centimes = DEPARtEMENTS 20 centimes
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H. DE VILLÉMESSANT
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Gaston CALMETTE
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8, place de la Bourse
Loué par ceux-ci, blâmé par ceux-là, me moquant des sots, bravant les méchants, je me hâte
y, de rire de tout. de peur d'être obligé d'en pleurer. » (BEAUMARCHAIS.)
S O JxZJML A. IKB-
PAGES 1, 2 ET 3
La Crise anglaise et les Anabaptistes Jules
ROCHE.
Un amour d'Alfred de Musset Aimée d'Alton
LÉON Séché.
Dessin A l'heure du thé ABEL Faivee,-
La Succession du roi Léopold Il. -̃
PAGES 4, 5 ET 6
La Chambre PAS-PERDUS.
Le Sénat A. A.
Autour de la politique AuGUSTE AVRIL.
Les décorés du 1" janvier.
Journaux et Revues: Axdré BEAUNIER.
L'Angleterre et l'Allemagne sur mer Marc
Landry. «
Une nouvelle Constitution apostolique H.Mereu.
Académie de médecine Horace Bianchon.
Aux Ecoles Jacques-Pierre.
A l'Hôtel de Ville Janville.
Courrier de la Bourse Armand Yvel.
Feuilleton La Forestière GEORGES Fo-
EESTIER.
LA CRISE ANGLAISE 1
ET
LES ANABAPTISTES
La véritable physionomie de la crise
anglaise se manifeste de jour en jour
plus nettement, grâce aux réunions pu-
bliques où le fond des choses surgit en
pleine lumière. Là, devant la foule po-
pulaire, les demi-teintes, les circonlocu-
tions parlementaires ne sont plus de
mise, et il faut parler catégoriquement.
Les ministres radicaux et socialistes du
cabinet Asquith n'ont pas reculé, et leur
vrai programme est exposé sans réti-
cence.
Il est à la fois singulièrement ancien
et nouveau, nouveau, parce que c'est
la première fois en Angleterre qu'il est
1 proclamé par un gouvernement, an-
cien, parce qu'il n'est pas autre chose,
au fond, que l'antique et indestruc-
tible chimère du socialisme et de la dé-
magogie.
Le langage passionné aujourd'hui tenu
parle ministre Lloyd George, ses atta-
ques furieuses contre la « richesse », ses
promesses mystiques d'un bonheur so-
cial fabriqué de toutes pièces par un lé-
gislateur inspiré, les Anglais enten-
dirent déjà tout cela de la bouche du ré-
vérend Robert Owcn, en 1830, de Hunt
ct de sir Charles Wolscley en 1819,
qui, eux-mêmes, ne faisaient que répé-
ter les déclamations de Wat Tyler ct
de John Ball en Ces derniers fu-
rent même un moment assez puis- I
sants, par leur parole enflammée, pour
soulever, entraîner par milliers et mil-
liers une immense multitude, envahir
Londres, s'emparer de la Tour, mettre
en fuite, épouvantés, le roi Richard II,
les princes, les princesses, la Cour, les
magistrats, les bons citoyens; répandre
de toutes parts le pillage, l'incendie, le
massacre, pour mieux établir parmi les
hommes la paix,ratnour, la joie etla jus-
lice.
Les sarcasmes de M. Lloyd George
contre les Lords, la chanson de John
Bail les avait bien plus ônergiquement
exprimés 1
When Adam del>:cd and Eve span
MVlio was then ihe gentleman ?
(Lorsque Adam bêchait et qu'Eve filait,
qui était alors gentilhomme?)
Et, bien plus cloquemment encore que
le ministre du roi Edouard VII, le tuilier
et le prêtre fanatique de 1381 avaient
promis àlafoule la suppression des pri-
vilèges, l'égalité fraternelle, les salaires
•opulents, la poule au pot sans effort 1
~#
Un ministre cependant, un des plus
illustres de l'histoire anglaise, pourrait
être invoqué à son appui par M. Lloyd
George; mais il écrivit en latin, pour
lui seul, par jeu d'esprit, et garda soi-
gneusement dans son tiroir ses fantai-
sies, qui ne furent publiées que vingt
ans après sa mort ce fut le grand chan-
celier Thomas Morus, et son livre s'ap-
pelle l'Utopie. Un titre devenu tout un
symbole Il y réfute d'ailleurs lui-même,
en termes décisifs, les paradoxes « col-
lectivistes » qu'il avait fait exposer par le
personnage imaginaire à qui il confie le
rôle aujourd'hui repris par M. Lloyd
George, et qu'il nomme Raphaël Hy-
'thlodée
« Tout au contraire de vous, je pense
>que le pays où l'on aurait supprimé la
propriété serait le plus misérable de
tous. Tout le monde y fuirait le travail.
Personne n'espérant plus de récompense
de ses efforts, chacun comptant sur au-
trui, tous s'engourdiraient dans la pa-
resse. Et si la crainte de la privation
stimulait quelques-uns, le produit du
travail n'étant plus garanti l'émeute
affamée et menaçante sévirait en per-
manence et le massacre ensanglanterait
votre République
» Quelle barrière opposeriez-vous à
l'anarchie? On ne peut même pas conce-
voir un gouvernement possible chez un
peuple le ni voleurs, repoussant toute
espèce do supériorité. »
Les « camarades » du Labour-parti/ et
les amis de M. Lloy.i George ont oublié
cette réponse Ils sont les fidèles héri-
tiers des ap'ôtres de la « cinquième Mo-
narchie » et des millénaires de 1660, qui
se soulevèrent sous la conduite de Ven-
ner, dont l'éloquence eût fait pâlir celle
de M. Lloyd George lui-même, et qui
finirent si malheureusement!
Ils continuent, -en ce pays qui passe
pour si « pratique » et qui se trouve en
même temps si fertile en visionnaires,
la tradition des Whitby, des Thomas
Newton (l'évêque de Bristol), des Bel-
lamy, de tous ces écrivains et prêcheurs
laïques, détraqués détraquant, qui rava-
gent de siècle en siècle les cervelles fai-
bles et poussent, sans le vouloir, tant de
furieux au meurtre et au pillage..
.•̃•• i
# 1
Les Anglais, d'ailleurs, n'ont pas le ]
monopole de ces prédications, de ces ex- j
plosions de la crédulité et de l'ignorance t
populaires; l'Allemagne ne leur permet-
trait pas cette prétention i
Ecoutez (
« La terre est le bien commun de l'hu-
manité, elle nous appartient et ce n'est 1
que par la force qu'on nous a ravi notre
part. Ils s'en disent les maîtres légiti-
mes mais à quelle époque avons-nous
donc cédé la portion de l'héritage d'A-
dam, notre père commun? Riches du ]
siècle, injustes usurpateurs, rendez-nous i
les biens qui nous appartiennent! » i
Qui prêche ainsi? Où?. Devant qui?. j
Contre qui?.
M. Lloyd George, le « baptiste », à
Londres, en 1910, contre les Lords `'
Non! Thomas Mùntzcr, « l'anabap-5^
tiste » en 1523, à Mùhlhausen en Thu- 1
ringe, contre les propriétaires et les
« bourgeois » saxons,
M. Lloyd George sera-t-il vainqueur?
On le saura dans quelques jours. Tho-
mas Muntzer le fut. Le peuple l'acclama,
Il siégea en maître dans le palais de la
Commanderie de Saint-Jean-de-Jérusa-
lem, distribua à tous les biens, les objets,
les richesses; et le bien-être et l'oisiveté
régnèrent parmi la foule en fète.-v quel-
ques semaines. On connaît le dénoue-
menttragique et sanglant de l'aventure
Douze années plus tard, ce fut le tour
de Bocold le tailleur, Jean de Leyde,
que Meyerbeer a rendu plus familier
aux Français par le Prophète, que tous
les historiens allemands. Cependant,
quelle leçon plus saisissante, plus dé-
monstrative, plus salutaire à faire' con-
naître que celle enseignée par la vie de
ce type achevé du thaumaturge révolu-
tionnaire-socialiste ? L'effroyable crise
de toute la population d'une cité
aussi puissante que Munster, à la fois
conquise par la force et séduite par
les promesses d'un incomparable char-
latan tyrannisée, exploitée de la fa-
çon la plus odieuse, pendant près de
deux ans tour h io.ur sp réjpuisjant et
noyée dans le sang; payant enfin de
sa ruine, du supplice d'un nombre con-
sidérable des siens, sa crédulité et ses
fautes; tel est un des épisodes les plus
dramatiques, les' plus instructifs de
l'histoire sociale des idées et des peuples.
Les Anabaptistes qui échappèrent aux
désastres de 1530 et de 1537 se réfu-
gièrent en Hollande où ils ne furent pas
moins malfaisants qu'en Allemagne, et
leur contagion passa en Angleterre.
Il y a là une histoire que les Anglais
savent mieux que personne. Ils ont suivi
la trace du fléau à travers les convul-
sions de leur pays au milieu du dix-
septième siècle. Ils savent quel rôle joua
le fanatisme social des « Saints », qui
« cherchèrent le Seigneur » dans la spo-
liation et dans le carnage, pendant une
tyrannie de vingt ans, auprès de laquelle
notre Terreur pourrait presque passer
pour une berquinade.
En définitive c'est le même esprit qui
plane au-dessus des races, des temps,
des frontières, toujours semblable à lui-
même sous des noms divers; qui s'in-
carna d'une manière plus complète
parm'i les Anabaptistes, représentant
toujours le même principe d'erreur, en-
gendrant les mêmes catastrophes, infli-
geant les mêmes déceptions à ceux-là
mêmes qu'il séduisit et furent dupes des
mêmes illusions.
Il tourmente aujourd'hui l'âme des
Baptistes anglais, tel qu'il fut dans celle
de Muntzer, à la fois révolutionnaire et
mystique, ennemi de la liberté, impé-
rieux, destructeur de toute supériorité
naturelle afin de dominer, sans partage,
par la violence des armes ou du nom-
bre.
C'est lui qui veut aujourd'hui déman-
teler la Chambre des lords frapper au
cœur le principe de la propriété, en at-
tendant, plus tard, après le triomphe,
l'assaut à la liberté elle-même.
Car cet esprit ne souffre ni résistance,
ni rival. Qu'il' soit encore « religieux »
comme chez les Anabaptistes anciens ou
nouveaux, ou antireligieux comme chez
les socialistes des pays latins, il est iden-
tique dans son essence et profondément
« religieux sans l'être », car il se résume
en la croyance au miracle, lorsqu'il est
sincère, comme en l'appétit brutal
et en la haine sauvage, lorsqu'il ne
l'est point. J'ai dit « miracle »; c'est
bien le mot; miracle laïque, opéré non
par la volonté de Dieu mais par la
volonté des hommes, malgré et contre
la nature invincible des choses. L'arti-
san est changé, mais le prodige reste.
Et l'Anabaptiste croit aux prodiges de
sa volonté. Il est le roi-prophète des
temps nouveaux, et « Tout est possible
au Roi-prophète », dans le temple légis-
latif de Westminster ou du quai d'Or-
say, comme jadis dans la cathédrale de
Munster.
Hélas rien n'est possible aux hom-
mes, prophètes ou non, excepté de se
conformer aux lois naturelles des choses,
lorsqu'ils ont pu les découvrir. En cela
consistent leur sagesse et leur liberté,
car c'est être « libre ». que de consa-
crer ses efforts au service de la vérité
connue, comme à la recherche de la
vérité inconnue.
Puissent les électeurs anglais conjurer
le triomphe des Anabaptistes du ving-
tième siècle; ils n'auront pas servi seu-
lement la civilisation de leur noble
pays.
Jules Roche.
Echos
La Température
Hier, la pluie est tombée à Paris, depuis le
matin jusqu'au' soir, par intermittences. Le
temps est toujours humide, mais la tempéra-
turc est encore très douce. Le thermomètre,
marquait, à sept heures du matin, 8° au-des-
sus de zéro et 90 à cinq heures du soir. La
pression barométrique s'est abaissée elle ac-
cusait à midi, 767111"
Une vaste zone»inférieure à 760™ avec mi-
nimum de 72. \m, s'étend sur tout le nord du
continent, tandis qu'une aire supérieure à
--omm persiste dans le Sud (Biarritz 776mm.)
Des pluies sont tombées sur le nord et
l'ouest de l'Europe; en France, il a plu à
Dunkerque, à Cherbourg, à Brest, à Nancy et
à Nantes.
Départements, le matin. Att-dessus de \èro
i° à Lyon et à Perpignan, 40 à Cette et à
Marseille, 5° à Dunkerque et à Oran, 6° à
Boulogne, à Limoges, à Toulouse et à Bel-
fort, 70 à Brest, à Nantes, au Mans, à Char-
leville, à Besançon et à Cap-Béarn, 8° à Cher-
bourg, à Clermont et à Nancy, 90 à Rochefort
et à Bordeaux, io° à Lorient, à Ouessant, à
File d'Aix, à Biarritz et à Alger.
En France, un temps doux est encore proba-
ble avec des ondées dans le Nord et l'Ouest.
(La température du n janvier 1909 était, à
'Fàfis 20>au-dessus de zéro le matin et 40
l'après-midi. Baromètre 766" ciel très
sombre.)
Monte-Carlo (terrasse du Casino). Tem-
pérature à dix heures du matin, 180 à midi,
2i°; temps printanicr. 1
Nice. A midi, 140 à trois heures, 130.
Du New York Herald
A New-York: Temps assez beau. Tempé-
raure minima, 90 maxima, 1°. Vent
nord-ouest.
A Londres Temps couvert. Pluie. Tempé-
rature maxima, 70 minima, 40. Baromètre,
756™ en baisse.
A Berlin Temps beau. Température (à
midi): 8°.
A Travers Paris
Antonio Paterno Castello, marquis de
San Giuliano. qui était depuis 1906 l'am-.
bassadeur d'Italie à la Cour de Saint-
James, vient d'être officiellement nommé
ambassadeur à Paris, en remplacement
du comte Galliim, admis à la retraite.
Le marquis est un Sicilien il est né à
Catane en 1852; son père était le mar-
quis Benedetto de San Giuliano, et sa
mère, la comtesse Caterina Statella, fille
du prince de Cassaro.
Il fit ses études à l'université de Ca-
tane et fut trois ans maire de cette ville;
élu député en 1882, il resta à la Chambre
jusqu'en 1904, où il passa au Sénat. Il
lu t, en 1892-93, sous-secrétaire d'Etat pour
l'agriculture, l'industrie et le commerce,
ministre des postes et télégraphes en
•1899-1900, ministre des affaires étrangè-
res en 1905-1906.
11 est l'autour d'un livre très remar-
quable sur l'état social et économique dp
la Sicile et de nombreux articles dans les
revues italiennes et étrangères.
Très courtois, très affable, doué d'un
esprit vif et d'une parole vibrante, le
marquis de San Giuliano avait su se
créer à Londres une situation considé-
rable. Il retrouvera rapidement cette si-
tuation ù l'aria.
Ilicr a eu lieu le dîner de la Chambre
syndicale des agents de change à la
Bourse. M. Briand, président du Conseil,
et M. Cochery, ministre des finances, y
assistaient.
-ç.>-o-
Au lendemain de la moindre manifes-
tation, c'est une habitude invariable
qu'un conseiller municipal dévoué aux
doctrines de M. Gustave Ilorvé monte à
la tribune pour interpeller le préfet de
police sur la brutalité de ses agents.
11 est admis et reconnu, dans un cer-
tain monde, que les gardiens de la
paix dégainent leur sabre sous le plus
futile prétexte, et frappent à coups re-
doublés les passants inoffensifs. A vrai
dire, nous savions bien que les victimes
des agents étaient moins nombreuses
que les victimes du Devoir. Mais peut-
être aurions-nous fini par l'oublier.
Or, l'autre jour, un bandit a tué un
agent, en a blessé plusieurs autres, et
ce n'est qu'après une longue bataille
qu'un gardien s'est enfin décidé à ali-
puyer son sabre sur la gorge de l'agres-
seur. Nous en sommes venus là, que les
agents risquent plus volontiers la mort
que le geste de se défendre. On est'porté
à. regretter cet héroïsme passif, qui fait
de nos défenseurs des victimes désignées
au revolver des malfaiteurs. Nos huma-
nitaires patentés sont prêts à s'émouvoir
sur le sort de quelque niais mené au
poste un peu rudement. Ils trouvent
fort naturel que les agents essuient sans
broncher les feux de salve des assassins.
Mais M. Lépine considère que cette
attitude résignée convient mal à ses su-
bordonnés. Il leur a rappelé hier « qu'ils
ont le devoir de faire usage de leurs ar-
mes chaque fois qu'en présence de mal-
faiteurs ils se trouveraient en état de
légitime défense ».
Mais, pour inviter les agents à ne pas
se laisser massacrer sans résistance, M. 1
Lépine a dû leur adresser un ordre de
service.
~JOJ~Oy~
Les bonnes idées.
Le préfet de police vient de décider
qu'à partir d'aujourd'hui les voitures
qui, du boulevard des Italiens vont au
boulevard Ilaussmann, passeront par la
rue Taitboul; et les voitures qui vont
du boulevard Ilaussmann au boulevard
des Italiens prendront la rue du Helder.
C'est une excellente décision et qui
rendra sans doute la circulation plus
facile dans ce quartier si encombré.
Mais il nous est agréable de noter que,
cette bonne idée, le Figaro l'a indiquée
le premier, grâce à l'un, de ses lecteurs
qui la lui avait suggérée. Précisons, à
force d'orgueil c'est le 8 septembre
̃dernier que nous avons publié l'intéres-
sante lettre de notre lecteur. Bien des
réformes utiles, et simples, mettent plus
de quatre mois à se faire
Il faut bien que nos jeunes amis du
quartier Latin nous permettent de le
leur dire certains d'entre eux donnent
en ce moment un bien mauvais exem-
ple, et dont vraiment s'attristent leurs
défenseurs ordinaires.
On lira plus loin le récit des nouveaux
incidents qui se sont produits hier, à la
Faculté de droit, et des violences, beau-
coup plus graves encore, dont la Faculté
de médecine a été le théâtre. Ce sont là
d'intolérables mœurs, et qui, si nos étu-
diants devaient s'y obstiner, n'abouti-
raient à rien de moins qu'à rendre chez
nous toute vie scolaire impossible.
Les « chahuts ont existé de tout
temps, au quartier Latin. De tout temps,
il a été d'usage que les étudiants expri-
massent leur mauvaise humeur à l'égard
d'une réforme ou leur ressentiment i1
l'égard d'un maître en les «conspuant».
Mais on s'en tenait là. On n'allait pas
jusqu'aux 03ufs. pourris on ne songeait
point à « enfariner » le professeur qui
avait cessé de plaire. Au fond, le respect
du maître subsistait.
Les incidents dont nous parlons sem-
bleraient indiquer que ce respect s'en
va. Le voilà, le mauvais exemple.
Ceux qui le donnent sont de jeunes
hommes « bien élevés », et de forte
culture. Ils fourniront demain au pays
ses sujets les meilleurs, une partie de.
son élite. Et ce sont ces jeunes gens-là
qui nous donnent le spectacle du mépris
violent de l'autorité, de la brimade, de
l'injure infligée à ceux qui leur distri-
buent la science.
Nous les supplions de réfléchir à ce
qu'ils font, à la responsabilité qu'ils as-
sument.
Les ouvriers ont, eux aussi, des pa-
trons qu'on leur reproche de ne plus
respecter. Mais croit-on que c'est à la
vue de jeunes « bourgeois » criblaut
d'oeufs1 pourris leurs professeurs, qu'ils
se convaincront de la nécessité de ce
respect-là ?
I
Nous avons reçu hier
Pour la veuve de l'agent de police
Deray, tué en opérant l'arrestation du
misérable Liabeuf
D'un anonyme. 100 fI'.
Pour le monument a élever dans Pa-
ris aux glorieuses victimes do l'avia-
tion
Du marquis de Diou. 100 fr v
De M. Grosdidier, député
de lu.Mousc. 50 fr.
Ce qui élève à 2,415 francs le total des
sommes reçues par nous depuis la pu-
blication de l'éloquent appel de M. d'Es-
tournelles de Constant.
Un bel exemple de succès., c'est celui
remporté par la ravissante publication
qu'offrait gracieusement la Maison Ro-
cher frères, à l'occasion de Noël et du
Nouvel An. Trente mille demandes ont i
été adressées en quelques jours à la mai-
son _de la rue lialévy, et il a fallu procé- j
der à une seconde édition cela ne s'ex-
plique que par l'excellente réputation
que les liqueurs Rocher frères ont ac-
quise dans le monde entier, ou il est
établi, aujourd'hui, que ce qui vient de
cette maison, plus de deux fois cente-
naire, est réellement de tout premier {
ordre.
ordrc, -<>-<:><>-0- 1"
C'est aujourd'hui que commence, chez
Max Auspitz, le réputé fourreur de la
rue Saint-Honoré, la vente sensation-
nelle si attendue des soldes de fin de
saison. On annonce des occasions in-
croyables en manteaux, étoles, man-
chons, parmi lesquels on ne peut man-
quer de citer les ravissants tours de cou
à cent francs et des manteaux de loutre
a trois cents francs. Nul doute que l'af-
fluence sera grande durant toute cette
semaine dans les élégants salons où rè-
gne encore le souvenir de Mme Geoffrin 1
dans un cadre de luxe discret et spirituel.
Quo vadis?, le triomphant succès du
Théâtre Lyrique de la Gaîté, a été donné, 1
avec le maximum de recettes, trente fois
en quarante jours. C'est un fait sans f
précédent, croyons-nous, dans les an- ¡
nales des succès lyriques. Il était bon de
le signaler.
Le terme reste le grand souci de toutes
les maîtresses de maison soucieuses de
leur home. C'est l'époque fatale pour les
meubles transportés dans les déménage-
ments. Toutes les Parisiennes profitent
de l'occasion pour remettre au goût du
jour l'intérieur, dont le décor est parfois
suranné. Mercier frères, les maîtres ta-
pissiers du faubourg Saint-Antoine, res- 1
tent toujours chargés de ces transforma-
tions dans lesquelles ils excellent.
Nouvelles â la Main 1
Vous avez vu cet avocat qui vient j
de mourir centenaire.
Oui, c'est très curieux, il y a des j
centenaires à peu près dans toutes les
professions, excepté dans celle de mé-
decin.
Le Sénat s'occupe avec zèle des
retraites ouvrières.
C'est bien naturel les sénateurs j
ont l'âge de toutes les retraites.
Grave nouvelle.
Nous avons la C. G. T., la R. P., les
Q. M. A la suite de cet abus, les lettres
de l'alphabet, ont décidé de se mettre en
grève. Le Masque de Fer.
I Les Lettres de iusset 1
1 à Inconnue"
Le FIGARO commencera demain la
publication des lettres d'Alfred de Musset 1
à Aimée d'Alton qui ont été remises à la
Bibliothèque Nationale par M. Jules
Troubat il y a trente ans et ouvertes en
sa présence le 3 janvier dernier, et qui
sont déjà fameuses sous le nom de
« Lettres à l'INCONNUE ».
Nous avons tenu à offrir à nos lecteurs
la primeur de cette correspondance dont
la seule révélation a piqué au vif la
curiosité de tous les lettrés.
Comme préface à cette publication,
nous avons demandé à l'un des cher-
cheurs qui connaissent le mieux le poète
des Nuits, son œuvre et son époque,
M. Léon Séché, de vouloir bien écrire
pour le FIGARO l'histoire de cet amour
qui va revivre dans les lettres de Musset.
Le FIGARO publiera demain les pre-
mières « Lettres à l'INCONNUE » et en
continuera la série, sans interruption. 1
UN AMOUR DALFRED DE MUSSET
Aimée d'Alton
1
On. savait dans son entourage, et no-
tanviuent chez Mme Jaubert, sa cousine,
qu'elle avait été la bonne amie d'Alfred
f! mystère, et elle se flattait volontiers d'a-
voir inspiré le Fils du Titien. Mais cela
remontait si haut et avait duré si peu,
que nous n'en aurions probablement
rien su, si elle n'avait eu la coquetterie
posfcliinne de nous mettre les pièces à
conviction sous les yeux.
Àïmeè-Ii'èno d'Alton naquit à Ham-
J^ûUKg,{l) le 20 septembre 1811.
/Son père, Alexandre, descendait du
chevalier Gauthiev-d'Alton qui accom-
pagna Guillaume le Conquérant en An-
gleterre, et lit souche -ensuite en .Ir-
lande (2).. Il était fils de Guillaume et de
Marie-Louise-Aiilometlc Coilliot, cuu-
sine de la mère de Sainte-Beuve. Guil-
laume d'Alton était venu en France, en
1738, appelé par deux oncles dont l'un
était évoque et l'autre maréchal de
camp. L'évoque voulait en faire un
homme d'Eglise. Après quatre ans d'cf-
forts inutiles il lo passa au maréchal de
camp qui le fit entrer dans lo corps des
cadets. Guillaume prit part à la bataille
de Fontenoy, puis, comme il était d'hu-
meur aventureuse, il s'embarqua pour
les Indes où il se lia d'amitié avec sou
consin Shéc.
C'est par la protection de celui-ci
qu'Alexandre d'Alton obtint, en 1791, un
brevet de soua-lieutenant dans l'infante-
rie et fut nommé, quatre ans plus tard,
aide de camp du général Uédouville. Il
assista en cette qualité aux préliminaires
de la pacification de la Vendée et dut
une partie de sa fortune à deux circons-
tances que je crois bon de rapporter.
Un jour c'était en 1795 des
paysans se présentent au quartier géné-
ral de Hoche et lui adressent de justes
réclamations. Hoche veut les indemni-
ser, mais il n'a comme argent que des
assignats. 11 demande dix louis à l'aide
de camp du général Hédouville. Alexan-
dre d'Alton les emprunte à son frère
James, qui en possédait trois cents et
servait de secrétaire à ce général. Hoche
les distribue aux paysans qui, touchés
de ce procédé, lui découvrent la retraite
de l'abbé Bernier. Mais l'abbé se tenait
sur ses gardes. Quand on arriva devant
la cachette, il s'était enfui, et l'on ne
prit que Sto filet qui fut passé par les
armes.
A quelque temps de là, Alexandre
d'Alton se signala de nouveau par un
coup d'éclat. 11 était en garnison à
Rennes. Un soir, à la sortie du théâtre,
en rentrant chez lui, il entend dans la
rue deux ou trois détonations d'arme à
feu. C'était un Vendéen qui venait de
décharger son pistolet sur Hoche.
Alexandre se retourne et aperçoit l'as-
sassin qui se sauvait à toutes jambes.. Il
s'élance à sa poursuite avec un de ses
camarades, gagne rapidement du terrain
et va l'atteindre, quand l'autre s'esquive
et se blottit dans un fossé. Alexandre,
avant découvert la ruse, revient sur ses
pas et se jette sur lui.
Mais le Vendéen était grand et fort. Il
se relève, se débarrasse de l'étreinte
du jeune officier et reprend sa course.
Alexandre lui saute alors sur le dos, s'y
cramponne et donne à ceux qui venaient
à la rescousse le temps de le rejoindre
et de s'emparer du meurtrier. Le lende-
main le général Hoche demandait au
général Hédouville de lui céder son aide
de camp, et d'Alton demeura à ce poste
d'honneur jusqu'à la mort du pacifica-
teur de ia Vendée, Il avait à ce moment
le grade de capitaine en quelques an-
nées il devint chef de bataillon, colo-
nel, général de brigade, employé à l'état-
major générai de la grande armée; il fut
fait baron de l'Empire par lettres paten-
(1) Et non à Paris, comme le dit à tort son acte
de décès.
(2) Arch. du ministère de la guerre. Alexan-
dre d'Ai ton était, né à Brive (Corrèze)le 22 avril
1770. li mourut à Versailles le 20 mars 1S59.
t£s du 15 janvier 1810, et après la prise
de Ômolensk où il reçut un coup de bis-
caïen au pied gauého, le général comte
Morand demanda pour lui à l'Empereur
« avec de l'avancement une bonne dota-
tion parce qu'il était très pauvre, n'ayant
pour toute fortune que trois enfants et
4,000 francs de rentes mal payés. » (1)
C'est dire avec quelles histoires fut
bercée l'enfance d'Aimée.
Nourrie dans le culte de Napoléon, elle
avait à peine dix ans quand il mourut à
Sainte-Hélène. Sa fin tragique lui causa
une telle émotion, que, soixante ans
après, elle frissonnait encore à ce sou-
venir.
Elle ne pardonna jamais aux Alliés
d'avoir martyriséle grand homme. Aussi,
quand il fut question de ramener ses
cendres, partagea-t-elle la joie de tous
les patriotes, à commencer par son père
dont le nom venait précisément d'être
gravé sur l'Arc de triomphe de l'Etoile.
Huit ans auparavant, la mort de sa
mère, arrivée le 11 septembre 1832, avait
complètement change le cours de sa vie.
Comme elle était majeure et qu'elle
avait été élevée librement, à l'anglaise,
on lui avait laissé la bride sur le cou.
Elle en profita pour s'émanciper tout à
fait, et bientôt, dans le salon cosmopo-
lite de Caroline d'Alton, sa. cousine, elle
se vit très entourée, très courtisée, pour
ses dons naturels qui étaient charmants.
Si l'on s'en rapporte à' la délicieuse fi-
gurine de Barre (3j qui est aujourd'hui
en ma possession, elle était effective-
ment très séduisante avec ses cheveux
blonds, séparés en deux grappes de pa-
pillotes ses yeux de myosotis candide-
ment effrontés, son nez futé,, sa bouche
mutine, sa main mignonne et son pied
fin. Mais. elle était peut-être encore plus
spirituelle que jolie, et je tiens d'une
personne de sa famille que, sous ce rap-
port, elle était de force à jouer à la ra-
quette avec Mme Jaubert, et ce n'est
pas peu dire. En tout cas Mme Jaubert
s'amusa de bonne heure des mots et des
traits d'esprit de sa jeune cousine. Elle
écrivait une fois à son frère Edmond
Une bonne lettre d'Aimée hier. Elle ma
conte, sous le sceau du secret, que dernière-
ment, causant avec Barre, il soutint la thèse
que les hommes de mérite étaient bien nés,
que partis de bas, leur talent demeurait in-
complet, etc., etc. Aimée, avec une politesse
exquise, songeant tout le temps au père de
Barre, soutint le contraire. « Sorti du peu-
ple, dit-elle, on peut parvenir à toute dis-
tinction. Je n'en excepte, continua-t-ello un
riant, que les fils de portier. Ah ne dites
pas cela, s'écria Barre, mon père est fils de
portier. » Aimée prétend que, suant sang et
eau, sans se "troupier, ;oUava.fai^4>^oge çlpl
padre. Sa bouche rdevait'êtro pincée, si j'en
juge par cette plifa«g^ll;$$tptie le. récit:
« Pourtant, nous h'dhiidnsr guère les portiers
chez nous! » Conclusion qui m'a tout à
tait l'ait rire (o).
Mais l'esprit chez Aimée n'avait pas
toujours ce caractère; il avait, à l'occa-
sion, une pointe de sentiment qu'il n'a-,
vait pas chez Mme Jaubert,. et cela don-
nait son commerce, un charme poéti-
que de plus. Bref, l'ensemble de ses
qualités, voire de ses défauts, composait
un tout singulièrement capiteux; et je
ne m'étonne pas qu'Alfred de Musset
l'ait trouvée un jour de son goût.
'H '̃
Justement, il avai;t été présenté à Mme
Jaubert, quand Aimée allait avoir ses
vingt-cinq ans. Cô n'était déjà plus.la
jeune fille. Elle avait" beau être fraîche
et rosé, comme une pèche mûre sur
l'espalier, ses allures, sa conversation,
ses manières, étaient.:d'une jeune femme
qui sait à quoi s'en tenir sur l'article 7.
Mais, tout libertin qu'il était, Alfred de
Musset ne se sentait..pas a l'aise avec ces
sortes de demi-yierges. Plus d'une fois,
il lui était arrivé d'être tenté par un de
ces petits serpents à l'œil candide, et
chaque fois il avait résisté" à. la tentation.
Il aimait t moins le fruit vert que le fruit
mûr, même un peu piqué. Et donc, pen-
dant un certain temps, il sembla ne faire
qu'une attention médiocre à la jolie cou-
sine de sa petite marraine. Un jour
pourtant, comme elle lui paraissait en-
nuyée et inquiète, il se risqua à lui dire,
entre deux eontredanseSj que le seul
moyen de n'avoir jamais d'ennui était
d'aimer. Mais elle lui répondit très sé-
rieusement qu'elle n'avait « que faire d'a-
moureux». Etil se le tintpour dit. Or, voilà
qu'un beau soir elle arrive chez Mme
Jaubert avec une boîte à aiguilles en
écaille noire, dont elle lui fait présent.
Alfred qui était là s'empare de. la boîte,
l'admire et la veut garder. La marraine
proteste et la c ousine se fâche. Alfred
s'obstine, tant et si bien qu'a minuit, on
disputait encore à qui resterait la boîte.
Aimée, trouvant que la petite comédie
avait assez duré, passe dans l'anti-
chambre, s'enveloppe d'un capuchon
blanc qui lui seyait à merveille, et se
retire. «Ah! le joli petit moinillon
blanc! » s'écrie Musset. Et le lendemain
matin, au petit jour, Aimée recevait les
strophes pimpantes du petit moinillon
blanc et rose que Paul de Musset ,a
publiées à la fin de la biographie de son
frère, sans nous dire à qui elles étaient
adressées.
On devine la surprise d'Aimée. Elle
répondit le jour même à, l'auteur de cet
impromptu en lui envoyant une petite
boîte en bois de santal contenant non
des aiguilles, mais une plume que nous
retrouverons dans sa correspondance
avec elle.
Pour le coup, la glace fut rompue
si glace il y avait entre Alfred et le
petit moinillon rose, et ce fut bientôt au
tqur d'Aimée d'intriguer le poète-dandy.
Elle raffolait' de ses Contes d'Espagne
et d! 7~e et mettait au-dessus de tous
les romans à la mode sa Confession d'un
(1) Arch. du ministère de la guerre. Le Bojr
de Friedland où il entra le premier, le général
d'Alton fut porte à l'ordre du jour par le maré-
chal Ney.
(2) Barre est l'auteur du -buste d\lfrèd de Mus-
set qui décore son tombeau.
(3) Cf. notre ouvrage sur Alfred de .Musset,
t. U.
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Loué par ceux-ci, blâmé par ceux-là, me moquant des sots, bravant les méchants, je me hâte
y, de rire de tout. de peur d'être obligé d'en pleurer. » (BEAUMARCHAIS.)
S O JxZJML A. IKB-
PAGES 1, 2 ET 3
La Crise anglaise et les Anabaptistes Jules
ROCHE.
Un amour d'Alfred de Musset Aimée d'Alton
LÉON Séché.
Dessin A l'heure du thé ABEL Faivee,-
La Succession du roi Léopold Il. -̃
PAGES 4, 5 ET 6
La Chambre PAS-PERDUS.
Le Sénat A. A.
Autour de la politique AuGUSTE AVRIL.
Les décorés du 1" janvier.
Journaux et Revues: Axdré BEAUNIER.
L'Angleterre et l'Allemagne sur mer Marc
Landry. «
Une nouvelle Constitution apostolique H.Mereu.
Académie de médecine Horace Bianchon.
Aux Ecoles Jacques-Pierre.
A l'Hôtel de Ville Janville.
Courrier de la Bourse Armand Yvel.
Feuilleton La Forestière GEORGES Fo-
EESTIER.
LA CRISE ANGLAISE 1
ET
LES ANABAPTISTES
La véritable physionomie de la crise
anglaise se manifeste de jour en jour
plus nettement, grâce aux réunions pu-
bliques où le fond des choses surgit en
pleine lumière. Là, devant la foule po-
pulaire, les demi-teintes, les circonlocu-
tions parlementaires ne sont plus de
mise, et il faut parler catégoriquement.
Les ministres radicaux et socialistes du
cabinet Asquith n'ont pas reculé, et leur
vrai programme est exposé sans réti-
cence.
Il est à la fois singulièrement ancien
et nouveau, nouveau, parce que c'est
la première fois en Angleterre qu'il est
1 proclamé par un gouvernement, an-
cien, parce qu'il n'est pas autre chose,
au fond, que l'antique et indestruc-
tible chimère du socialisme et de la dé-
magogie.
Le langage passionné aujourd'hui tenu
parle ministre Lloyd George, ses atta-
ques furieuses contre la « richesse », ses
promesses mystiques d'un bonheur so-
cial fabriqué de toutes pièces par un lé-
gislateur inspiré, les Anglais enten-
dirent déjà tout cela de la bouche du ré-
vérend Robert Owcn, en 1830, de Hunt
ct de sir Charles Wolscley en 1819,
qui, eux-mêmes, ne faisaient que répé-
ter les déclamations de Wat Tyler ct
de John Ball en Ces derniers fu-
rent même un moment assez puis- I
sants, par leur parole enflammée, pour
soulever, entraîner par milliers et mil-
liers une immense multitude, envahir
Londres, s'emparer de la Tour, mettre
en fuite, épouvantés, le roi Richard II,
les princes, les princesses, la Cour, les
magistrats, les bons citoyens; répandre
de toutes parts le pillage, l'incendie, le
massacre, pour mieux établir parmi les
hommes la paix,ratnour, la joie etla jus-
lice.
Les sarcasmes de M. Lloyd George
contre les Lords, la chanson de John
Bail les avait bien plus ônergiquement
exprimés 1
When Adam del>:cd and Eve span
MVlio was then ihe gentleman ?
(Lorsque Adam bêchait et qu'Eve filait,
qui était alors gentilhomme?)
Et, bien plus cloquemment encore que
le ministre du roi Edouard VII, le tuilier
et le prêtre fanatique de 1381 avaient
promis àlafoule la suppression des pri-
vilèges, l'égalité fraternelle, les salaires
•opulents, la poule au pot sans effort 1
~#
Un ministre cependant, un des plus
illustres de l'histoire anglaise, pourrait
être invoqué à son appui par M. Lloyd
George; mais il écrivit en latin, pour
lui seul, par jeu d'esprit, et garda soi-
gneusement dans son tiroir ses fantai-
sies, qui ne furent publiées que vingt
ans après sa mort ce fut le grand chan-
celier Thomas Morus, et son livre s'ap-
pelle l'Utopie. Un titre devenu tout un
symbole Il y réfute d'ailleurs lui-même,
en termes décisifs, les paradoxes « col-
lectivistes » qu'il avait fait exposer par le
personnage imaginaire à qui il confie le
rôle aujourd'hui repris par M. Lloyd
George, et qu'il nomme Raphaël Hy-
'thlodée
« Tout au contraire de vous, je pense
>que le pays où l'on aurait supprimé la
propriété serait le plus misérable de
tous. Tout le monde y fuirait le travail.
Personne n'espérant plus de récompense
de ses efforts, chacun comptant sur au-
trui, tous s'engourdiraient dans la pa-
resse. Et si la crainte de la privation
stimulait quelques-uns, le produit du
travail n'étant plus garanti l'émeute
affamée et menaçante sévirait en per-
manence et le massacre ensanglanterait
votre République
» Quelle barrière opposeriez-vous à
l'anarchie? On ne peut même pas conce-
voir un gouvernement possible chez un
peuple le ni voleurs, repoussant toute
espèce do supériorité. »
Les « camarades » du Labour-parti/ et
les amis de M. Lloy.i George ont oublié
cette réponse Ils sont les fidèles héri-
tiers des ap'ôtres de la « cinquième Mo-
narchie » et des millénaires de 1660, qui
se soulevèrent sous la conduite de Ven-
ner, dont l'éloquence eût fait pâlir celle
de M. Lloyd George lui-même, et qui
finirent si malheureusement!
Ils continuent, -en ce pays qui passe
pour si « pratique » et qui se trouve en
même temps si fertile en visionnaires,
la tradition des Whitby, des Thomas
Newton (l'évêque de Bristol), des Bel-
lamy, de tous ces écrivains et prêcheurs
laïques, détraqués détraquant, qui rava-
gent de siècle en siècle les cervelles fai-
bles et poussent, sans le vouloir, tant de
furieux au meurtre et au pillage..
.•̃•• i
# 1
Les Anglais, d'ailleurs, n'ont pas le ]
monopole de ces prédications, de ces ex- j
plosions de la crédulité et de l'ignorance t
populaires; l'Allemagne ne leur permet-
trait pas cette prétention i
Ecoutez (
« La terre est le bien commun de l'hu-
manité, elle nous appartient et ce n'est 1
que par la force qu'on nous a ravi notre
part. Ils s'en disent les maîtres légiti-
mes mais à quelle époque avons-nous
donc cédé la portion de l'héritage d'A-
dam, notre père commun? Riches du ]
siècle, injustes usurpateurs, rendez-nous i
les biens qui nous appartiennent! » i
Qui prêche ainsi? Où?. Devant qui?. j
Contre qui?.
M. Lloyd George, le « baptiste », à
Londres, en 1910, contre les Lords `'
Non! Thomas Mùntzcr, « l'anabap-5^
tiste » en 1523, à Mùhlhausen en Thu- 1
ringe, contre les propriétaires et les
« bourgeois » saxons,
M. Lloyd George sera-t-il vainqueur?
On le saura dans quelques jours. Tho-
mas Muntzer le fut. Le peuple l'acclama,
Il siégea en maître dans le palais de la
Commanderie de Saint-Jean-de-Jérusa-
lem, distribua à tous les biens, les objets,
les richesses; et le bien-être et l'oisiveté
régnèrent parmi la foule en fète.-v quel-
ques semaines. On connaît le dénoue-
menttragique et sanglant de l'aventure
Douze années plus tard, ce fut le tour
de Bocold le tailleur, Jean de Leyde,
que Meyerbeer a rendu plus familier
aux Français par le Prophète, que tous
les historiens allemands. Cependant,
quelle leçon plus saisissante, plus dé-
monstrative, plus salutaire à faire' con-
naître que celle enseignée par la vie de
ce type achevé du thaumaturge révolu-
tionnaire-socialiste ? L'effroyable crise
de toute la population d'une cité
aussi puissante que Munster, à la fois
conquise par la force et séduite par
les promesses d'un incomparable char-
latan tyrannisée, exploitée de la fa-
çon la plus odieuse, pendant près de
deux ans tour h io.ur sp réjpuisjant et
noyée dans le sang; payant enfin de
sa ruine, du supplice d'un nombre con-
sidérable des siens, sa crédulité et ses
fautes; tel est un des épisodes les plus
dramatiques, les' plus instructifs de
l'histoire sociale des idées et des peuples.
Les Anabaptistes qui échappèrent aux
désastres de 1530 et de 1537 se réfu-
gièrent en Hollande où ils ne furent pas
moins malfaisants qu'en Allemagne, et
leur contagion passa en Angleterre.
Il y a là une histoire que les Anglais
savent mieux que personne. Ils ont suivi
la trace du fléau à travers les convul-
sions de leur pays au milieu du dix-
septième siècle. Ils savent quel rôle joua
le fanatisme social des « Saints », qui
« cherchèrent le Seigneur » dans la spo-
liation et dans le carnage, pendant une
tyrannie de vingt ans, auprès de laquelle
notre Terreur pourrait presque passer
pour une berquinade.
En définitive c'est le même esprit qui
plane au-dessus des races, des temps,
des frontières, toujours semblable à lui-
même sous des noms divers; qui s'in-
carna d'une manière plus complète
parm'i les Anabaptistes, représentant
toujours le même principe d'erreur, en-
gendrant les mêmes catastrophes, infli-
geant les mêmes déceptions à ceux-là
mêmes qu'il séduisit et furent dupes des
mêmes illusions.
Il tourmente aujourd'hui l'âme des
Baptistes anglais, tel qu'il fut dans celle
de Muntzer, à la fois révolutionnaire et
mystique, ennemi de la liberté, impé-
rieux, destructeur de toute supériorité
naturelle afin de dominer, sans partage,
par la violence des armes ou du nom-
bre.
C'est lui qui veut aujourd'hui déman-
teler la Chambre des lords frapper au
cœur le principe de la propriété, en at-
tendant, plus tard, après le triomphe,
l'assaut à la liberté elle-même.
Car cet esprit ne souffre ni résistance,
ni rival. Qu'il' soit encore « religieux »
comme chez les Anabaptistes anciens ou
nouveaux, ou antireligieux comme chez
les socialistes des pays latins, il est iden-
tique dans son essence et profondément
« religieux sans l'être », car il se résume
en la croyance au miracle, lorsqu'il est
sincère, comme en l'appétit brutal
et en la haine sauvage, lorsqu'il ne
l'est point. J'ai dit « miracle »; c'est
bien le mot; miracle laïque, opéré non
par la volonté de Dieu mais par la
volonté des hommes, malgré et contre
la nature invincible des choses. L'arti-
san est changé, mais le prodige reste.
Et l'Anabaptiste croit aux prodiges de
sa volonté. Il est le roi-prophète des
temps nouveaux, et « Tout est possible
au Roi-prophète », dans le temple légis-
latif de Westminster ou du quai d'Or-
say, comme jadis dans la cathédrale de
Munster.
Hélas rien n'est possible aux hom-
mes, prophètes ou non, excepté de se
conformer aux lois naturelles des choses,
lorsqu'ils ont pu les découvrir. En cela
consistent leur sagesse et leur liberté,
car c'est être « libre ». que de consa-
crer ses efforts au service de la vérité
connue, comme à la recherche de la
vérité inconnue.
Puissent les électeurs anglais conjurer
le triomphe des Anabaptistes du ving-
tième siècle; ils n'auront pas servi seu-
lement la civilisation de leur noble
pays.
Jules Roche.
Echos
La Température
Hier, la pluie est tombée à Paris, depuis le
matin jusqu'au' soir, par intermittences. Le
temps est toujours humide, mais la tempéra-
turc est encore très douce. Le thermomètre,
marquait, à sept heures du matin, 8° au-des-
sus de zéro et 90 à cinq heures du soir. La
pression barométrique s'est abaissée elle ac-
cusait à midi, 767111"
Une vaste zone»inférieure à 760™ avec mi-
nimum de 72. \m, s'étend sur tout le nord du
continent, tandis qu'une aire supérieure à
--omm persiste dans le Sud (Biarritz 776mm.)
Des pluies sont tombées sur le nord et
l'ouest de l'Europe; en France, il a plu à
Dunkerque, à Cherbourg, à Brest, à Nancy et
à Nantes.
Départements, le matin. Att-dessus de \èro
i° à Lyon et à Perpignan, 40 à Cette et à
Marseille, 5° à Dunkerque et à Oran, 6° à
Boulogne, à Limoges, à Toulouse et à Bel-
fort, 70 à Brest, à Nantes, au Mans, à Char-
leville, à Besançon et à Cap-Béarn, 8° à Cher-
bourg, à Clermont et à Nancy, 90 à Rochefort
et à Bordeaux, io° à Lorient, à Ouessant, à
File d'Aix, à Biarritz et à Alger.
En France, un temps doux est encore proba-
ble avec des ondées dans le Nord et l'Ouest.
(La température du n janvier 1909 était, à
'Fàfis 20>au-dessus de zéro le matin et 40
l'après-midi. Baromètre 766" ciel très
sombre.)
Monte-Carlo (terrasse du Casino). Tem-
pérature à dix heures du matin, 180 à midi,
2i°; temps printanicr. 1
Nice. A midi, 140 à trois heures, 130.
Du New York Herald
A New-York: Temps assez beau. Tempé-
raure minima, 90 maxima, 1°. Vent
nord-ouest.
A Londres Temps couvert. Pluie. Tempé-
rature maxima, 70 minima, 40. Baromètre,
756™ en baisse.
A Berlin Temps beau. Température (à
midi): 8°.
A Travers Paris
Antonio Paterno Castello, marquis de
San Giuliano. qui était depuis 1906 l'am-.
bassadeur d'Italie à la Cour de Saint-
James, vient d'être officiellement nommé
ambassadeur à Paris, en remplacement
du comte Galliim, admis à la retraite.
Le marquis est un Sicilien il est né à
Catane en 1852; son père était le mar-
quis Benedetto de San Giuliano, et sa
mère, la comtesse Caterina Statella, fille
du prince de Cassaro.
Il fit ses études à l'université de Ca-
tane et fut trois ans maire de cette ville;
élu député en 1882, il resta à la Chambre
jusqu'en 1904, où il passa au Sénat. Il
lu t, en 1892-93, sous-secrétaire d'Etat pour
l'agriculture, l'industrie et le commerce,
ministre des postes et télégraphes en
•1899-1900, ministre des affaires étrangè-
res en 1905-1906.
11 est l'autour d'un livre très remar-
quable sur l'état social et économique dp
la Sicile et de nombreux articles dans les
revues italiennes et étrangères.
Très courtois, très affable, doué d'un
esprit vif et d'une parole vibrante, le
marquis de San Giuliano avait su se
créer à Londres une situation considé-
rable. Il retrouvera rapidement cette si-
tuation ù l'aria.
Ilicr a eu lieu le dîner de la Chambre
syndicale des agents de change à la
Bourse. M. Briand, président du Conseil,
et M. Cochery, ministre des finances, y
assistaient.
-ç.>-o-
Au lendemain de la moindre manifes-
tation, c'est une habitude invariable
qu'un conseiller municipal dévoué aux
doctrines de M. Gustave Ilorvé monte à
la tribune pour interpeller le préfet de
police sur la brutalité de ses agents.
11 est admis et reconnu, dans un cer-
tain monde, que les gardiens de la
paix dégainent leur sabre sous le plus
futile prétexte, et frappent à coups re-
doublés les passants inoffensifs. A vrai
dire, nous savions bien que les victimes
des agents étaient moins nombreuses
que les victimes du Devoir. Mais peut-
être aurions-nous fini par l'oublier.
Or, l'autre jour, un bandit a tué un
agent, en a blessé plusieurs autres, et
ce n'est qu'après une longue bataille
qu'un gardien s'est enfin décidé à ali-
puyer son sabre sur la gorge de l'agres-
seur. Nous en sommes venus là, que les
agents risquent plus volontiers la mort
que le geste de se défendre. On est'porté
à. regretter cet héroïsme passif, qui fait
de nos défenseurs des victimes désignées
au revolver des malfaiteurs. Nos huma-
nitaires patentés sont prêts à s'émouvoir
sur le sort de quelque niais mené au
poste un peu rudement. Ils trouvent
fort naturel que les agents essuient sans
broncher les feux de salve des assassins.
Mais M. Lépine considère que cette
attitude résignée convient mal à ses su-
bordonnés. Il leur a rappelé hier « qu'ils
ont le devoir de faire usage de leurs ar-
mes chaque fois qu'en présence de mal-
faiteurs ils se trouveraient en état de
légitime défense ».
Mais, pour inviter les agents à ne pas
se laisser massacrer sans résistance, M. 1
Lépine a dû leur adresser un ordre de
service.
~JOJ~Oy~
Les bonnes idées.
Le préfet de police vient de décider
qu'à partir d'aujourd'hui les voitures
qui, du boulevard des Italiens vont au
boulevard Ilaussmann, passeront par la
rue Taitboul; et les voitures qui vont
du boulevard Ilaussmann au boulevard
des Italiens prendront la rue du Helder.
C'est une excellente décision et qui
rendra sans doute la circulation plus
facile dans ce quartier si encombré.
Mais il nous est agréable de noter que,
cette bonne idée, le Figaro l'a indiquée
le premier, grâce à l'un, de ses lecteurs
qui la lui avait suggérée. Précisons, à
force d'orgueil c'est le 8 septembre
̃dernier que nous avons publié l'intéres-
sante lettre de notre lecteur. Bien des
réformes utiles, et simples, mettent plus
de quatre mois à se faire
Il faut bien que nos jeunes amis du
quartier Latin nous permettent de le
leur dire certains d'entre eux donnent
en ce moment un bien mauvais exem-
ple, et dont vraiment s'attristent leurs
défenseurs ordinaires.
On lira plus loin le récit des nouveaux
incidents qui se sont produits hier, à la
Faculté de droit, et des violences, beau-
coup plus graves encore, dont la Faculté
de médecine a été le théâtre. Ce sont là
d'intolérables mœurs, et qui, si nos étu-
diants devaient s'y obstiner, n'abouti-
raient à rien de moins qu'à rendre chez
nous toute vie scolaire impossible.
Les « chahuts ont existé de tout
temps, au quartier Latin. De tout temps,
il a été d'usage que les étudiants expri-
massent leur mauvaise humeur à l'égard
d'une réforme ou leur ressentiment i1
l'égard d'un maître en les «conspuant».
Mais on s'en tenait là. On n'allait pas
jusqu'aux 03ufs. pourris on ne songeait
point à « enfariner » le professeur qui
avait cessé de plaire. Au fond, le respect
du maître subsistait.
Les incidents dont nous parlons sem-
bleraient indiquer que ce respect s'en
va. Le voilà, le mauvais exemple.
Ceux qui le donnent sont de jeunes
hommes « bien élevés », et de forte
culture. Ils fourniront demain au pays
ses sujets les meilleurs, une partie de.
son élite. Et ce sont ces jeunes gens-là
qui nous donnent le spectacle du mépris
violent de l'autorité, de la brimade, de
l'injure infligée à ceux qui leur distri-
buent la science.
Nous les supplions de réfléchir à ce
qu'ils font, à la responsabilité qu'ils as-
sument.
Les ouvriers ont, eux aussi, des pa-
trons qu'on leur reproche de ne plus
respecter. Mais croit-on que c'est à la
vue de jeunes « bourgeois » criblaut
d'oeufs1 pourris leurs professeurs, qu'ils
se convaincront de la nécessité de ce
respect-là ?
I
Nous avons reçu hier
Pour la veuve de l'agent de police
Deray, tué en opérant l'arrestation du
misérable Liabeuf
D'un anonyme. 100 fI'.
Pour le monument a élever dans Pa-
ris aux glorieuses victimes do l'avia-
tion
Du marquis de Diou. 100 fr v
De M. Grosdidier, député
de lu.Mousc. 50 fr.
Ce qui élève à 2,415 francs le total des
sommes reçues par nous depuis la pu-
blication de l'éloquent appel de M. d'Es-
tournelles de Constant.
Un bel exemple de succès., c'est celui
remporté par la ravissante publication
qu'offrait gracieusement la Maison Ro-
cher frères, à l'occasion de Noël et du
Nouvel An. Trente mille demandes ont i
été adressées en quelques jours à la mai-
son _de la rue lialévy, et il a fallu procé- j
der à une seconde édition cela ne s'ex-
plique que par l'excellente réputation
que les liqueurs Rocher frères ont ac-
quise dans le monde entier, ou il est
établi, aujourd'hui, que ce qui vient de
cette maison, plus de deux fois cente-
naire, est réellement de tout premier {
ordre.
ordrc, -<>-<:><>-0- 1"
C'est aujourd'hui que commence, chez
Max Auspitz, le réputé fourreur de la
rue Saint-Honoré, la vente sensation-
nelle si attendue des soldes de fin de
saison. On annonce des occasions in-
croyables en manteaux, étoles, man-
chons, parmi lesquels on ne peut man-
quer de citer les ravissants tours de cou
à cent francs et des manteaux de loutre
a trois cents francs. Nul doute que l'af-
fluence sera grande durant toute cette
semaine dans les élégants salons où rè-
gne encore le souvenir de Mme Geoffrin 1
dans un cadre de luxe discret et spirituel.
Quo vadis?, le triomphant succès du
Théâtre Lyrique de la Gaîté, a été donné, 1
avec le maximum de recettes, trente fois
en quarante jours. C'est un fait sans f
précédent, croyons-nous, dans les an- ¡
nales des succès lyriques. Il était bon de
le signaler.
Le terme reste le grand souci de toutes
les maîtresses de maison soucieuses de
leur home. C'est l'époque fatale pour les
meubles transportés dans les déménage-
ments. Toutes les Parisiennes profitent
de l'occasion pour remettre au goût du
jour l'intérieur, dont le décor est parfois
suranné. Mercier frères, les maîtres ta-
pissiers du faubourg Saint-Antoine, res- 1
tent toujours chargés de ces transforma-
tions dans lesquelles ils excellent.
Nouvelles â la Main 1
Vous avez vu cet avocat qui vient j
de mourir centenaire.
Oui, c'est très curieux, il y a des j
centenaires à peu près dans toutes les
professions, excepté dans celle de mé-
decin.
Le Sénat s'occupe avec zèle des
retraites ouvrières.
C'est bien naturel les sénateurs j
ont l'âge de toutes les retraites.
Grave nouvelle.
Nous avons la C. G. T., la R. P., les
Q. M. A la suite de cet abus, les lettres
de l'alphabet, ont décidé de se mettre en
grève. Le Masque de Fer.
I Les Lettres de iusset 1
1 à Inconnue"
Le FIGARO commencera demain la
publication des lettres d'Alfred de Musset 1
à Aimée d'Alton qui ont été remises à la
Bibliothèque Nationale par M. Jules
Troubat il y a trente ans et ouvertes en
sa présence le 3 janvier dernier, et qui
sont déjà fameuses sous le nom de
« Lettres à l'INCONNUE ».
Nous avons tenu à offrir à nos lecteurs
la primeur de cette correspondance dont
la seule révélation a piqué au vif la
curiosité de tous les lettrés.
Comme préface à cette publication,
nous avons demandé à l'un des cher-
cheurs qui connaissent le mieux le poète
des Nuits, son œuvre et son époque,
M. Léon Séché, de vouloir bien écrire
pour le FIGARO l'histoire de cet amour
qui va revivre dans les lettres de Musset.
Le FIGARO publiera demain les pre-
mières « Lettres à l'INCONNUE » et en
continuera la série, sans interruption. 1
UN AMOUR DALFRED DE MUSSET
Aimée d'Alton
1
On. savait dans son entourage, et no-
tanviuent chez Mme Jaubert, sa cousine,
qu'elle avait été la bonne amie d'Alfred
f!
voir inspiré le Fils du Titien. Mais cela
remontait si haut et avait duré si peu,
que nous n'en aurions probablement
rien su, si elle n'avait eu la coquetterie
posfcliinne de nous mettre les pièces à
conviction sous les yeux.
Àïmeè-Ii'èno d'Alton naquit à Ham-
J^ûUKg,{l) le 20 septembre 1811.
/Son père, Alexandre, descendait du
chevalier Gauthiev-d'Alton qui accom-
pagna Guillaume le Conquérant en An-
gleterre, et lit souche -ensuite en .Ir-
lande (2).. Il était fils de Guillaume et de
Marie-Louise-Aiilometlc Coilliot, cuu-
sine de la mère de Sainte-Beuve. Guil-
laume d'Alton était venu en France, en
1738, appelé par deux oncles dont l'un
était évoque et l'autre maréchal de
camp. L'évoque voulait en faire un
homme d'Eglise. Après quatre ans d'cf-
forts inutiles il lo passa au maréchal de
camp qui le fit entrer dans lo corps des
cadets. Guillaume prit part à la bataille
de Fontenoy, puis, comme il était d'hu-
meur aventureuse, il s'embarqua pour
les Indes où il se lia d'amitié avec sou
consin Shéc.
C'est par la protection de celui-ci
qu'Alexandre d'Alton obtint, en 1791, un
brevet de soua-lieutenant dans l'infante-
rie et fut nommé, quatre ans plus tard,
aide de camp du général Uédouville. Il
assista en cette qualité aux préliminaires
de la pacification de la Vendée et dut
une partie de sa fortune à deux circons-
tances que je crois bon de rapporter.
Un jour c'était en 1795 des
paysans se présentent au quartier géné-
ral de Hoche et lui adressent de justes
réclamations. Hoche veut les indemni-
ser, mais il n'a comme argent que des
assignats. 11 demande dix louis à l'aide
de camp du général Hédouville. Alexan-
dre d'Alton les emprunte à son frère
James, qui en possédait trois cents et
servait de secrétaire à ce général. Hoche
les distribue aux paysans qui, touchés
de ce procédé, lui découvrent la retraite
de l'abbé Bernier. Mais l'abbé se tenait
sur ses gardes. Quand on arriva devant
la cachette, il s'était enfui, et l'on ne
prit que Sto filet qui fut passé par les
armes.
A quelque temps de là, Alexandre
d'Alton se signala de nouveau par un
coup d'éclat. 11 était en garnison à
Rennes. Un soir, à la sortie du théâtre,
en rentrant chez lui, il entend dans la
rue deux ou trois détonations d'arme à
feu. C'était un Vendéen qui venait de
décharger son pistolet sur Hoche.
Alexandre se retourne et aperçoit l'as-
sassin qui se sauvait à toutes jambes.. Il
s'élance à sa poursuite avec un de ses
camarades, gagne rapidement du terrain
et va l'atteindre, quand l'autre s'esquive
et se blottit dans un fossé. Alexandre,
avant découvert la ruse, revient sur ses
pas et se jette sur lui.
Mais le Vendéen était grand et fort. Il
se relève, se débarrasse de l'étreinte
du jeune officier et reprend sa course.
Alexandre lui saute alors sur le dos, s'y
cramponne et donne à ceux qui venaient
à la rescousse le temps de le rejoindre
et de s'emparer du meurtrier. Le lende-
main le général Hoche demandait au
général Hédouville de lui céder son aide
de camp, et d'Alton demeura à ce poste
d'honneur jusqu'à la mort du pacifica-
teur de ia Vendée, Il avait à ce moment
le grade de capitaine en quelques an-
nées il devint chef de bataillon, colo-
nel, général de brigade, employé à l'état-
major générai de la grande armée; il fut
fait baron de l'Empire par lettres paten-
(1) Et non à Paris, comme le dit à tort son acte
de décès.
(2) Arch. du ministère de la guerre. Alexan-
dre d'Ai ton était, né à Brive (Corrèze)le 22 avril
1770. li mourut à Versailles le 20 mars 1S59.
t£s du 15 janvier 1810, et après la prise
de Ômolensk où il reçut un coup de bis-
caïen au pied gauého, le général comte
Morand demanda pour lui à l'Empereur
« avec de l'avancement une bonne dota-
tion parce qu'il était très pauvre, n'ayant
pour toute fortune que trois enfants et
4,000 francs de rentes mal payés. » (1)
C'est dire avec quelles histoires fut
bercée l'enfance d'Aimée.
Nourrie dans le culte de Napoléon, elle
avait à peine dix ans quand il mourut à
Sainte-Hélène. Sa fin tragique lui causa
une telle émotion, que, soixante ans
après, elle frissonnait encore à ce sou-
venir.
Elle ne pardonna jamais aux Alliés
d'avoir martyriséle grand homme. Aussi,
quand il fut question de ramener ses
cendres, partagea-t-elle la joie de tous
les patriotes, à commencer par son père
dont le nom venait précisément d'être
gravé sur l'Arc de triomphe de l'Etoile.
Huit ans auparavant, la mort de sa
mère, arrivée le 11 septembre 1832, avait
complètement change le cours de sa vie.
Comme elle était majeure et qu'elle
avait été élevée librement, à l'anglaise,
on lui avait laissé la bride sur le cou.
Elle en profita pour s'émanciper tout à
fait, et bientôt, dans le salon cosmopo-
lite de Caroline d'Alton, sa. cousine, elle
se vit très entourée, très courtisée, pour
ses dons naturels qui étaient charmants.
Si l'on s'en rapporte à' la délicieuse fi-
gurine de Barre (3j qui est aujourd'hui
en ma possession, elle était effective-
ment très séduisante avec ses cheveux
blonds, séparés en deux grappes de pa-
pillotes ses yeux de myosotis candide-
ment effrontés, son nez futé,, sa bouche
mutine, sa main mignonne et son pied
fin. Mais. elle était peut-être encore plus
spirituelle que jolie, et je tiens d'une
personne de sa famille que, sous ce rap-
port, elle était de force à jouer à la ra-
quette avec Mme Jaubert, et ce n'est
pas peu dire. En tout cas Mme Jaubert
s'amusa de bonne heure des mots et des
traits d'esprit de sa jeune cousine. Elle
écrivait une fois à son frère Edmond
Une bonne lettre d'Aimée hier. Elle ma
conte, sous le sceau du secret, que dernière-
ment, causant avec Barre, il soutint la thèse
que les hommes de mérite étaient bien nés,
que partis de bas, leur talent demeurait in-
complet, etc., etc. Aimée, avec une politesse
exquise, songeant tout le temps au père de
Barre, soutint le contraire. « Sorti du peu-
ple, dit-elle, on peut parvenir à toute dis-
tinction. Je n'en excepte, continua-t-ello un
riant, que les fils de portier. Ah ne dites
pas cela, s'écria Barre, mon père est fils de
portier. » Aimée prétend que, suant sang et
eau, sans se "troupier, ;oUava.fai^4>^oge çlpl
padre. Sa bouche rdevait'êtro pincée, si j'en
juge par cette plifa«g^ll;$$tptie le. récit:
« Pourtant, nous h'dhiidnsr guère les portiers
chez nous! » Conclusion qui m'a tout à
tait l'ait rire (o).
Mais l'esprit chez Aimée n'avait pas
toujours ce caractère; il avait, à l'occa-
sion, une pointe de sentiment qu'il n'a-,
vait pas chez Mme Jaubert,. et cela don-
nait son commerce, un charme poéti-
que de plus. Bref, l'ensemble de ses
qualités, voire de ses défauts, composait
un tout singulièrement capiteux; et je
ne m'étonne pas qu'Alfred de Musset
l'ait trouvée un jour de son goût.
'H '̃
Justement, il avai;t été présenté à Mme
Jaubert, quand Aimée allait avoir ses
vingt-cinq ans. Cô n'était déjà plus.la
jeune fille. Elle avait" beau être fraîche
et rosé, comme une pèche mûre sur
l'espalier, ses allures, sa conversation,
ses manières, étaient.:d'une jeune femme
qui sait à quoi s'en tenir sur l'article 7.
Mais, tout libertin qu'il était, Alfred de
Musset ne se sentait..pas a l'aise avec ces
sortes de demi-yierges. Plus d'une fois,
il lui était arrivé d'être tenté par un de
ces petits serpents à l'œil candide, et
chaque fois il avait résisté" à. la tentation.
Il aimait t moins le fruit vert que le fruit
mûr, même un peu piqué. Et donc, pen-
dant un certain temps, il sembla ne faire
qu'une attention médiocre à la jolie cou-
sine de sa petite marraine. Un jour
pourtant, comme elle lui paraissait en-
nuyée et inquiète, il se risqua à lui dire,
entre deux eontredanseSj que le seul
moyen de n'avoir jamais d'ennui était
d'aimer. Mais elle lui répondit très sé-
rieusement qu'elle n'avait « que faire d'a-
moureux». Etil se le tintpour dit. Or, voilà
qu'un beau soir elle arrive chez Mme
Jaubert avec une boîte à aiguilles en
écaille noire, dont elle lui fait présent.
Alfred qui était là s'empare de. la boîte,
l'admire et la veut garder. La marraine
proteste et la c ousine se fâche. Alfred
s'obstine, tant et si bien qu'a minuit, on
disputait encore à qui resterait la boîte.
Aimée, trouvant que la petite comédie
avait assez duré, passe dans l'anti-
chambre, s'enveloppe d'un capuchon
blanc qui lui seyait à merveille, et se
retire. «Ah! le joli petit moinillon
blanc! » s'écrie Musset. Et le lendemain
matin, au petit jour, Aimée recevait les
strophes pimpantes du petit moinillon
blanc et rose que Paul de Musset ,a
publiées à la fin de la biographie de son
frère, sans nous dire à qui elles étaient
adressées.
On devine la surprise d'Aimée. Elle
répondit le jour même à, l'auteur de cet
impromptu en lui envoyant une petite
boîte en bois de santal contenant non
des aiguilles, mais une plume que nous
retrouverons dans sa correspondance
avec elle.
Pour le coup, la glace fut rompue
si glace il y avait entre Alfred et le
petit moinillon rose, et ce fut bientôt au
tqur d'Aimée d'intriguer le poète-dandy.
Elle raffolait' de ses Contes d'Espagne
et d! 7~e et mettait au-dessus de tous
les romans à la mode sa Confession d'un
(1) Arch. du ministère de la guerre. Le Bojr
de Friedland où il entra le premier, le général
d'Alton fut porte à l'ordre du jour par le maré-
chal Ney.
(2) Barre est l'auteur du -buste d\lfrèd de Mus-
set qui décore son tombeau.
(3) Cf. notre ouvrage sur Alfred de .Musset,
t. U.
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