Titre : Le Journal
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-05-14
Contributeur : Xau, Fernand (1852-1899). Directeur de publication
Contributeur : Letellier, Henri (1867-1960). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34473289x
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 14 mai 1903 14 mai 1903
Description : 1903/05/14 (A12,N3878). 1903/05/14 (A12,N3878).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG87 Collection numérique : BIPFPIG87
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7627617x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-220
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/11/2014
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• 1
JEUDI 14 MAI 1903
*
;-«!•■ FERNAND XAU, Fondateur
RÉDACTION ET ADMINISTRATION s iOO, RUE RICHELIEU, PARIS .>
t
i
,- Prix des Abonnements
,. * On an Six mois Trois mit
SETNE & SEIKE-ET-OISE. 20. » 10.50 5.50
DÉPARTEMENTS ET ALGËRIE. 24. J) 12. n 6. t
LÀTMNGER (UNION POSTALE) 35. a 18. » 1 10. *
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Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus.
LOUISON
- Mon ami Georges m'ayant, hier, en-
traîné chez Mme Alexandrit, à Montrou-
ge, j'ai fait la connaissance de ses trois
filles, de ses deux nièces VII.,es sont,
comme vous le savez, espiègles et vicieu-
ses, prêtes à jouer le rôle de petites nym-
phes complaisantes, pour. les- membres
de leur conseil de famille, personnages
d'importance mais joyeux par l'humeur.
L'un d'eux manquait, le peintre
Tvlaxence Tribot, fort occupé, en ce mo-
>ment, par ses démarches afin d'obtenir
'la médaille. Déjà son tableau d'histoire :
L'armée de Ramsès en Syrie, est acheté
par le banquier du khédive. :
Celle des jeunes filles que cet artiste
admire particulièrement, la blonde et
grasse Augusta, me fut aimable.
Lorsque nous eûmes vidé nos verres
ae frontignan, le docteur Crotonat me
parut enclin à vouloir briller au moyen
de ses récits ; il parla en gardant assise
sur son genou la petite Louise dont le
-minois farceur s'égayait exagérément à
cha,que phrase du conteur. La grande
Riza, pour marquer le plaisir de son atr
lention, embrassait constamment la
moustache fauve du capitaine Desnoix,
qui est chauve et hâlé comme un Maure.
Toutes les deux minutés, Armande tirait
ees bas roses en relevant sa jupe. Cela
contentait fort le député Pierron lequel
est majestueux par sa corpulence et la
sérénité de son éloquente bêtise. La mi-
gnonne Colette s'était blottie dans la poi-
trine de Georges qui la caressait lente-
ment et partout. Langoureuse, elle fré-
missait.
Sans qu'on sût à quelle rêverie Riza
tonnait une conclusion, elle s'écria
brusquement. : « Etre reine ! » Mme
Alexandrit, en époussétant le jais de son
maigre corsage, en vérifiant de la main
le bon ordre de sa chevelure poudrée,
réprimanda l'ambition de sa nièce : « Il
~au't être contente de son sort », énonça-
t-elle dans un soupir.
Avant que la phrase fût finie, le doc-
teur Crotonat s empressait déjà de lui
prodiguer ses approbations.
— Je veux appuyer, madame, la sa-
gesse de votre sentence, poursuivit-il,
par l'exemple d'un fait personnel, ou
plutôt d'une curieuse illusion p ers ou-
nelle. Voici les faits dont vous connais-
sez une partie : Samedi, l'idée me vint
d'aller à Longchamps, pour voir la foule
applaudir notre Président et son hôte
royal. J'aime les chatoiements noirs de
-la multitude au soleil, quand elle grouil-
le sur, la verdure de larges pelouses.Cela
me rappelle les vibrions qui se démè-
ment, sur leur lame de verre, à portée de
mon microscope bactériologique. La
comparaison au point de vue de la mo-
rale m'est salutaire. Vous me permîtes,
ce jour-là, chère madame Alexandrit,
d'emmener Louise au pesage et je louai,
pour la circonstance, une Victoria de re-
mise parfaitement correcte, munie d'un
cocher brillant et roide, dans sa livrée
bleue à boutons d'argent. Je me plus
à jouir de la. satisfaction qui se pei-
gnait sur la * claire figure de cette
obère enfant, tout heureuse d'être un
sujet d'envie pour les couples installés
dans les humbles fiacres, un sujet de
désir pour les cyclistes fanfarons, un su-
jet de jalousie pour les piétons qu'a-
vaient déversés au Bois, le Métropolitain
et les tramways.
» Oui, mon petit Louison, tu te pa-
vanais, bien fière d'être., pour tant d'hu-
mains, une cause de souffrance. Tu
triomphais comme un général dont les
soldats semèrent,de la douleur dans les
contrées envahies, et qui chevauche à la
lace des vaincus. Alors, tu es devenue
plus jolie, s'il est possible. La clarté de
ton visage a mieux resplendi. En tes
#eux gris se miraient les vertes lueurs
^des feuilles suspendues dans l'air, au-
tour des branches humides encore. Ta
jeune gorge enflait le drap de ta jaquette
sanglée sur tes formes mignonnes et
pleines. Une vie plus ardente battait
dans ta poitrine. Et toutes choses te fu-
rent des motifs de joie : les attelages qui
rivalisaient avec le nôtre, les allures des
hauts alezans robustes qui traînaient les
voitures étincelantes des riches, les lu-
mières des roues, les couleurs des toi-
lettes féminines, le mouvement indéfini
des équipages et leur nombre en file, la
forêt des fouets grêles, les mastodontes
automobiles stridents et dociles sous la
main du watman attentif, les perspecti-
ves de la pelouse plantée de gens jus-
qu'aux toiLs des tribunes, jusqu'au dôme
ides futaies, jusqu'aux collines vaporeu-
ses et aux fins clochers debout dans le
ciel nuageux de l'horizon.
» Puis, quand tu te promenas, la traî-
ne lâchée, autour du parterre, sous les
œillades discrètes des messieurs cam-
brés dans leurs redingotes, que de vani.
Lés encore t'enivrèrent. L'espoir ne ces-
sait plus de jouer mille féeries dans ton
imagination, qui discernait le prince des
enlèvements merveilleux sous chacun
des chapeaux à huit reflets. Cent fois tu
lo crus près d'être la reine de cœurs
millionnaires, la maîtresse de leurs pas-
sions, l'épouse de leur amour, la prin-
cesse de leurs vassaux. Ta physionomie
se 'travestissait selon les variations de
tes vœux naïfs. Ton jeune esprit s'en-
flammait de tant de façons différentes
que tu me semblais une succession de
personnes dIverses, habiles à se méta-
morphoser selon lalnesure de ton corps
et à s'insinuer dans l'apparat de ta toilet-
te, mais sans perdre, pour cela, le ca-
ractère de leur être distinct.
» Enfin, le piqueur aux galons d'or
émergea de la foule pressée. Les oreilles
du cheval, un peu de crinière, accouru-
rent par-dessus les tiares brillantes des
hommes, par-dessus les panaches et les
auréoles des femmes ; d'autres oreilles
de chevaux, les glands d'or écrasés sur
les casquettes des piqueurs, eux-mêmes
sursautant au gré du trot, les lanternes
argentées de. la calèche.
» Vive le roi ! Tu l'as crié, Louison,
de ta jeune bouche gamine, mais 'en-
thousiaste tout à coup, ce dont s'égayè-
rent discrètement tes voisins. Eh ! oui,
Louison* toit la fille parisienne gouail-
leuse, toi l'écolière révoltée, toi la fille
d'un rouge, toi qui vantais l'anarchie de
tes camarades ! Ah ! Louison, jjétais tout
centre toi dans cet instant. J'ai senti le5
muscles vigoureux et souples de ton
corps se contracter pour un élan, j'ai
perçu la chaleur accrue -de ton sang à
travers la robe, j'ai su que fies nerfs, tes
nerfs subtils formés par la vie de ton
père, de ta mère, par toute la force hé-
ritée des ancêtres, que tes nerfs obéis-
saient à la vieille loi des aïeux, celle dont
nous ne sommes affranchis que par la
raison, mais non par la nature. Loui-
son !
» Alors, j'ai profondément souhaité ta
jeunesse, ton adolescence, encore liée à
ses causes directes ; j'ai souhaité de vi-
vre comme toi, dans ton corps délicat
et potelé, avec l'élan des muscles sou-
ples, avec la fébrilité de tes nerfs et de
ton cerveau, avec toute l'harmonie de
tes membres et de tes sensations en gai-
nées dans cette alerte beauté savoureuse
aux lèvres. Etre toi, tes élans irréfléchis,
tes joies spontanées, tes désirs vifs, tes
appétits violents, tes gourmandises mê-
mes, tes epoirs innombrables et em-
brouillés : être l'être que ne déçoivent
pas encore la - froide raison, ni le scepti-
cisme ricaneur, ni la satiété !.
» C'était le cas évidemment, messieurs,
d'expérimenter la théorie du docteur
William Donnaught sur la méthode hyp-
notique deis transferts. Vous avez tous
entendu parler de 1. cette nouvelle con-
naissante relative aux faits magnétiques
et psychiques. Après avoir étudié long-
temps, et sous le contrôle scientifique le
plus minutieux, les phénomènes de télé-
pathie, et de suggestion à distance, le
docteur William Donnaught en vient à
prétendre que si, de deux amis, l'un do
mine assez l'autre par la puissance de
sa volonté, il peut, non seulement trans-
former le caractère d'autrui, selon le
sien, ce que nous constatons chaque
jour, mais aussi échanger la conscience
du faible avec la sienne, autant dire lo-
ger son esprit dans le corps du parte-
naire. Vous savez ces choses aussi bien
que moi. Les revues publient trop d'arti-
cles à ce propos. Donc, j'entrepris d'in-
troduire ma conscience dans le corps de
Louison. Au retour, dans la voMire,
j'employai la méthode ordinaire : nyp-
nose par le regard fixe, par le souffle et
les passes de la main, les pressions ryth-
mées sur la nuque et l'épigastre. Dans
l'état nerveux où se trouvait cette petite,
il se pouvait que l'expérience aboutît.
•t » Messieurs, et vous, madame, soyez
certains que je ne mens pas. Je péné-
trai, peu à peu, la personne de Louison
endormie ; et, quand je me réveillai,
mon but était atteint. C'était ma main
qui tenait l'ombrelle. Dans mon visage
sans barbe, c'étaient cependant mes
yeux qui voyaient la fête de Paris, toute
la rue Saint-Honoré où flambaient les
langues rouges des drapeaux britanni-
ques, e't la magnificence des portiques
verts, des étendards. Chaque passant
me semblait difforme et comique, et j'a-
vais. Ah ! Louison. Ah ! perverse
Louison !. Et, j'avais surtout l'anxiété
de n'être point à quatre heures au bu-
reau de tramways de la Madeleine où
devait m'attendre Eugène.
» Eugène !.Rougissez, Louison.:.Vous
étiez alors auprès de moi, mais dans
mon pardessus gris, et vous tâtiez avec
stupeur le poil de mon menton qui était
devenu le vôtre. Vos yeux exprimaient
le dépit d'accorder à la poussière une
attention que vous réserviez tout entière,
une seconde auparavant,. aux emblèmes
de la fête ; et vous me contempliez ahu-
rie de vous reconnaître là, telle que dans.
les glaces, mais séparée de vous. Profi-
tant de ce trouble, je fis arrêter la Vic-
toria, sautai légèrement à terre, vous
envoyai le petit salut ordinaire, et m'es-
quivai pour rejoindre Eugène.i. Eugè-
ne ! ô Louison. Cependant, la Victoria
vous emportait vers ma demeure.
» Oui, messieurs, je me suis vu fille,
preste et gentille que les messieurs dé-
visageaient impudemment. Ce riie valut
quelques colères d'abord. Je les répri-
mai vite. D'ailleurs, le petit faux-col dou-
ble m'étouffait, et quelques-uns ,de mes
cheveux demeuraient pris, à la nuque,
dans les boutonnières, en sorte que je
n'y pus remédier. Le corset me sciait les
hanches à chaque pas, chose atroce, le
buse me pinçait le ventre. Quant à mon
chapeau de dentelles, le vent lé soule-
vait sans cesse, et j'avais peur qu'il ne
s'envolait, malgré les épingles entortil-
lées dans ma coiffure. Enfin, mes. jupes
ramassaient tant de poussières, #ue je
comptais avec effroi les myriades de mi-
crobes mortels ainsi emmagasinés, dans
mes dessous. Et puis, les jarretelles ti-
raient trop mes bas. Comme je me mor-
dais les lèvres, le goût inopiné du. fard
me répugna.., Une frisure défaite S'em-
barrassa dans mes cils, et il me fallait
bien retrousser ma robe. Telles furent
mes premières impressions. Je les. ju-
geai désagréables, d'autant que ma mé-
moire grondait : « Si tu es en retard,
Eugène t' « engueulera» !
» Eh bien 1 messieurs, il m' « èm-
gueula ». Je le rencontrai derrière l'a Nia,
deleine. Il arpentait le trottoir le long: de
la grille. « Espèce de petite garce ! fc^st-
» ce que tu vas me faire marronne,
» comme ça tous les jours ? » Telles fi-
rent ses paroles de bon accueil. Ah M
Louison, que je vous plains. Certes, vo-
tre amant est jeune i; les furoncles de
l'adolescence ornent encore son front et
les commissures de ses lèvres. Certes, il
est beau ; ses cheveux noirs plaqués par
une pommade trop odorante descendent
le long de ses tempes ; une cravate de
satin noir à la 1830 fait plusieurs fois le
tour de son cou délicat et comprime sa
pomme d'Adam, qui reste en saillie, tou-
tefois. Certes, il est mince ; les rotules
de ses genoux sont marquées dans son
pantalon, malgré le pli du fer. Certes, il
a bon estomac, car son langage fleurait
à la fois l'eau-de-vie, le roquefort et le
maryland. Certes, il est mâle, car l'odeur
de son paletot, vers les aisselles, en té-
moigne. Mais il est, confessez-le, sans
politesse, Louison ; il est sans politesse,
votre amant ! J'use de meilleurs égards.
» Me prenant pour mon apparence, il
demanda comment j'avais « semé le
vieux ». Il me pria d'essuyer mes lèvres
avant le baiser, parce qu'il ne voulait pas
'- 1 ~e -. -r~ rlr*
lécher les traces de mar salive, j'entends,
celles du docteur Crotonat. Sa jalousie
fut âpre âuranV-le voyage on tramway
qui nous mena jusqu'à votre nid. Ce nid
est un rez-de-chausséè obscur au fond
d'une cour, madame ! C'est 14 que votre
fille me trompe et trompe ces messieurs.
Ce lieu sent le tabac refroidi et le cuir
des savates. Timidement, si pénètre un
étroit rayon de soleil, l'acre odeur de la
poussière sort des rideaux épais et ta-
chés. De l'encre répandue a souillé le ta-
pis rouge de la table.
» Afin de me séduire, Eugène me prit
à bras le corps, me colla sous le nez sa
moustache au chester, à l'eau-de-vie et
au maryland, et, pendant qu'il me grif-
fait la gorge, il promenait sur ma joue sa
bouche visqueuse et les furoncles de son
front. Pardonne-moi, Louise. Je n'étais
pas assez toi-même pour m'arranger de
cet amour. Mon odorat supportait mal
cette haleine trop virile ; et, si je vous
avais pris le vif désir d'être en volupté,
si ce désir échauffait mes oreilles, séchait
ma gorge et tourmentait mon échine, il
était malheureusement distrait par l'en-
nui de me sentir palpé, pétri, bousculé
de toutes manières. Que dirai-je de plus,
Louison ? Votre Eugène-se déshabilla. Il
me parut grotesque et tout osseux dans
son tricot un peu jauni, dans son caleçon
douteux. Soudain, il défit ses chausset-
tes. Ses ongles de pied étaient en deuil,
Louison !. Parfaitement, ils étaient en
deuil, couleur de la chaussette qu'il ôtavt. «
» En vain, esquissa-t-il des gambades.
En vain, imita-t-il Sarah Bernhardt et Co-
quelin. En vain simuIa-t-il le mal d'une
grenouille près d'accoucher ; les ongles
en deuil de ses pieds me désolèrent trop
pour que je pusse feindre de m'égayer à
ses pitreries. Il alla dans la pièce voisine.
J'en profitai pour fuir en me rajustant,
sauter en fiacre, parvenir chez moi, te
trouver, mon petit Louison, au coin de
mon feu, toi, lasse et abrutie sous l'em-
blémature d'un docteur quadragénaire
que son domestique raillait avec défé-
rence : « Monsieur à trop bien déjeuné.
sans doute. Monsieur ne parle point COlI)¡¡¡
me à son ordinaire. »
» Voilà pourquoi, chère petite, je t'ai
de nouveau endormie. Rentré dans ma
peau, je te fis repasser dans la tienne.
Je préfère ne plus te dérober tes illusions
sur Eugène.
» Dieu fait bien ce qu'il fait !. A cha-
que âge ses plaisirs ! » conclut senten-
cieusement- Mme Alexandrit, en hochant
sa vénérable tête blanche. « Mais Loui-
son ne mérite pas vos bontés, docteur.
Un Eugène !. Oh ! un Eugène ! »
L'enfant, confuse, bougonnait.
PAUL ADAM.
ÉCHOS
Aujourd'hui, à deux heures, réunion au Bois ûe
Boulogne.
NOS FAVORIS
Prix de Courcclles, — Crépuscule, Beverly.
Prix de Montfort. — Amer Picon.
Prix de Saint.Georges.- Gradignan, Pont d'Arcole.
Prix des Acacias. - Anastasie, Shebdiz.
Prix du Champ de Mars. — Wide Awake.
Prix de Compiègne. - Cléopàtre II, Arcadius.
L
e Président de la République, accompagné
du général Dubcis, secrétaire général de
la Présidence, chef de la maison, militaire, s'est
rendu, hier après-midi, à une heure et demie, à
l'hôtel Bristol, pour rendre visite à la reine Amé-
lie de Portugal.
La reine n'étant pas reçue officiellement par
le gouvernement de la République, la voiture
du Président n'était suivie d'aucune escorte.
L'entrevue entre la reine et le Président a
duré vingt-cinq minutes. La reine, avec une ama-
bilité pleine de grâce, a remercié M. Loubet de
sa visite et a exprimé tout son plaisir de se trou-
ver à Paris.
A deux heures un quart, le Président était de
retour à l'Elysée. et ,.
La reine Amélie s'est rendue, après la visite
présidentielle, aux hôpitaux d'Ormesson et de
Villiers. Elle était accompagnée des docteurs
Léon Petit et de Lencastre. Elle a été reçue
par une délégation du comité de l'Association
pour la lutte contre la tuberculose et par les
docteurs Let aile et Landouzy, représentant le
bureau du dernier Congrès international con-
tre la tuberculose. La reine a fait le voyage en
voiture-automobile Serpollet. ;
A six heures, le comte de Figueiro, grand
chambellan de la reine, et le ministre de Por-
tugal à Paris, se sont rendus à l'Elysée pour
rendre au Président, au nom de leur souve-
raine, la visite que celle-ci a reçue de M. Lou-
ber.
L
e départ de M. Jonnart
M. Jonnart, gouverneur général de l'Al.
gène, s est embarque, nier, a Marseille, pour
prendre possession de son poste. Il est accom-
pagné de Mme et de M. Raymond Aynard, qui
remplira auprès de lui les fonctions de direc-
teur du cabinet et du personnel. M. Maginot,
auditeur au Conseil d'Etat, et M. David, con-
seiller de préfecture, accompagnent aussi le
gouverneur.
A Alger, M. Jonnart s'installera au Palais
d'Hiver, qui a été récemment aménagé pour le
séjour qu'y a fait M. Loubet.
Dès son arrivée, le gouverneur général aura
à présider les Délégations financières. Leur
session est fixée, en effet, au 18 mai.
Disons, à ce propos, que le conseil des mi-
nistres a approuvé une décision du président
Ju conseil portant création d'un costume offi-
c;el pour le gouverneur général de l'Algérie.
Conformément à cette décision, le ministre
de l'intérieur a signé un arrêté qui fixe l'uni-
forme du gouverneur général.
* Cet uniforme est à peu près semblable à ce-
lui des gouverneurs généraux des colonies : il
com porte une grande tenue et une petitè tenue.
Av\çc la grande tenue, le gouverneur général
de t'Algérie portera le chapeau français à plu-
mes blanches et l'épée à poignée de nacre et à
coquille d'or. ----
L
e prince héritier Christian de Danemark
et la princesse sont arrivés, hier matin, à
Pans, par le train de luxe, venant de Nice; et
En descendus à l'hôtel Bristol, où ils reste-
ront jusqu'au fi courant.
Le prince et la princesse sont accompagnés
des princesses Thyra et Dagmar et du prince
Gustave, leurs enfants. Leur suite se compose,
en'outre, du chambellan von Bull, d'un précep-
teur candidat Hendriksen, d'une dame d'hon-
neur, Mlle von Wimffen, et d'une gauvemanta
œi** ClwRroft
- 1,
Le prince et la princesse occupent le grand
entrfescd de l'hôtel. Leur appartement, qui a
vue sur la ptaee Vendôme et sur 4a rue Saint*
Honoré, se compose de onze pièces.
Selon toute probabilité, le jeune héritier de
Danemark ira saluer aujourd'hui, à l'Elysée,
le Président de la République.
M
Chaumié, ministre de l'instruction publi-
que, est nommé grand-croix du Sauveur
de Grèce, et les membres de la mission, seront
prochainement décorés par le roi de Grèce.
L
a mort de M: Piault.
A peu près tous les élus de la Seine, sé-
nateurs, députés, conseillers municipaux et gé-
néraux, sont venus s'inscrire, hier matin, au
domicile du déf un t.
Des adresses, en nombre considérable, éma-
nant d'amis politiques ou privés, sont égale-
ment parvenues à Mme Piault.
Le préfet de la Seine est venu, dans l'après-
midi, rendre visite à la famille de M. Piault.
Les obsèques auront lieu aux frais de la
Ville.
La cérémonie sera célébrée demain vendredi,
à midi, en l'église Saint-Louis-d'Antin.
L'inhumation aura lieu au Père-Lachaise,
où des discours seront prononcés par les prési-
dents du Conseil municipal et du Conseil géné-
ral et par le préfet de la Seine.
Le Conseil municipal devait se réunir, hier.
Il s'est réuni, en effet; mais la séance a
été levée aussitôt, en signe de deuil, après que
le président, M. Deville, eut exprimé les regrets
de l'assemblée tout entière, pour la fin tragique
de M. René Piault, et adressé à sa veuve l'ex-
pression attristée de ses condoléances.
L
es journaux anglais donnent de nombreux
détails sur le prochain voyage du Prési-
dent de la République en Angleterra Ces dé-
tails sont prématurés; aucune invitation offi-
cielle n'a été faite encore, à ce sujet, à M.
Loubet.
E
pilogue d'une vieille affaire.
On se souvient peut-être encore d'un inci-
dent qui fitf l'an dernier, un certain bruit dans
le mande sportif.
Un bookmaker, M. Blin, accusé d'avoir mis
des planchettes garnies de clous sur la piste de
Bagatelle, se vit l'objet d'une information ju-
diciaire qui, d'ailleurs, aboutit à une ordon-
nance de non-lieu.
Néanmoins, M. Blin n'en a pas été quitte
pour cela avec la justice. Son cas a été « poli-
cise M, en ce sens qu'il a comparu devant le
Tribunal de simple police .qui lui a infligé une
amende de cinq francs pour avoir jeté sur la
voie publique des choses quelconques pouvant
nuire à. la circulation.
Le
successeur de Léon.
Depuis hier, il est officiellement dési-
.£Dé. l ",>,
C'est Honoré qui, à partir du 15 octobre pro-
chain, est appelé à remplacer Léon, l'excellent
huissier appariteur de l'Ordre des avocats dont
le Journal annonçait, l'autre jour, le départ
prématuré.
Ainsi en a décidé le Conseil de discipline,
réuni en Assemblée plénière.
Honoré Chauve exerçait, jusqu'à aujour-
d'hui, les fonctions d'appariteur à la bibliothè-
que du Barreau. Précédemment, il avait appar-
tenu, pendant 21 ans, comme brigadier à la
garde républicaine, et, en 1893, lors des fameux
troubles qui éclatèrent au quartier Latin, à pro-
pos de la mort de Nuger, il reçut, en récom-
pense de sa belle conduite, la médaille mili-
taire.
Honoré est la correction même. Il sera, ou
plutôt il continuera, comme son digne prédéces-
seur, à être le dévoué serviteur des vieilles tra-
ditions de l'Ordre des avocats. ,-
La
maison de Victor Hugo.
Victor Hugo attend toujours qu'on lui
ouvre sa maison. L aménagement continue. Les
tentures et les rideaux sont posés dans toutes
les salles; les grands dessins ornent déjà les
murs; les petits dessins emplissent les vitrines.
Les toiles des maîtres qui ont illustré l'œuvre
et la vie de Victor Hugo s'entassent au premier
étage. Tout sera prêt, décidément, à la fin de
cette semaine.
, Le préfet de la Seine va prendre jour, inces-
samment, avec le Président de la République,
pour l'inauguration, qui aura lieu vraisembla-
blement le 22 mai, anniversaire de la mort de
Victor Hugo. Dans tous les cas, l'inauguration
ne saurait être retardée que d'une huitaine et
fixée, au plus tard, dans les derniers jours de
mai.
L
e commerce des vins de Champagne.
- Chaque année, au mois d'avril, la Cham-
bre de commerce de Reims dresse une statisti-
que du mouvement des vins mousseux de Cham-
pagne expédiés à l'étranger,- à l'intérieur et
dans le département de la Marne.
Pendant l'exercice 1902-1903, le nombre des
bouteilles expédiées à l'étranger s'est élevé à
22,523,746; le nombre des bouteilles expédiées
en France, aux marchands en gros, aux débi-
tants et aux consommateurs, à 9,335,412, ce
qui donne pour l'importance réelle du com-
merce 31,859,158 bouteilles.
Si on ajoute à ce chiffre l'expédition de né-
gociant à négociant dans le département,
4,676,444 bouteilles, on arrive à un mouvement
total de 36,535,602 bouteilles.
Ainsi qu'on peut en juger par les chiffres ci-
dessus, le commerce des vins de Champagne,
dans le dernier exercice, a augmenté, compara,
tivement à l'exercice 1901-1902, de plus de deux
millions de bouteilles dans les expéditions à
l'étranger et de près d'un. million et demi de
bouteilles dans celles de l'intérieur.
1
1 a semblé à un certain nombre d'écrivains et
d'artistes qu'avec du goût, de la tenue et de
la belle humeur, on pouvait faire un journal
comique illustré, qui fût drôle sans grossièreté,
familial sans niaiserie, comme il faut sans fa-
deur. Tel est le programme réalisé par l'Œil,
dont le premier numéro est mis en vente au-
jourd'hui, au prix de o fr. 15.
D
e Rome à Paris, Edouard VII ne s'est
arrêté qu'à Dijon. évidemment pour
consacrer la nouvelle voiture populaire Cotte-
rèau et Cto, à 3,750 francs.
.1
amais l'imitation n'atteint la perfection de
l'original. La fameuse tiare, pour bien exé-
cutéa qu'elle fut, n'a pu passer pour authenti-
que. Les imitateurs du Looping the Loop se
cassent les reins les uns après les autres. Seul,
Diavolo, le créateur, boucle la boucle à l'Olym-
pia, tous les soirs et les jeudis et dimanches en
matinée, avec assurance, et le public enthou-
siaste lui fait fête, ainsi qu'à Germaine Gal-
lois, l'exquise commère de la bientôt bi-cente-
naire Olympia-Revue.
L
a 33e Exposition canine internationale, or-
ganisée par la Société centrale pour l'amé-
lioration des races de chiens, sera ouverte au
public le mardi 19 mai.
Elle sera installée, comme d'habitude, sur la
terrasse de l'Orangerie des Tuileries et com-
prendra environ. 1,350 chiens.
Parmi eux, 54 pointers, 97 setters, 35 coc-
kers, 30 collies, 14 meutes sont engagés.
Dans l'Orangerie, sera installée la 148 Expo-
sition des peintres et sculpteurs de chasse et
vénerie.
A
voir la taille fine sans souffrir, tel est le
rêve de toutes nos jolies femmes. Le cor-
set Louis XV de Dodane, II, boulevard des
Italiens, réunit, à ce point de vue, tous les suf-
frages, grâce à ses précieuses qualités de sou-
plesse et d'élégance. *
A
u merveilleux dîner de la « Poule au
Pot », donné ces jours derniers au res-
taurant des Ambassadeurs, Les seules liqueurs
annoncées sur le menu, avec la fine Champagne,
étaient les Liqueurs de la Maison Bols, aniset-
tes, curaçaos blancs, etc. On sait que la « Poule
au Pot » est composée des premiers res.
taurateurs et limonadiers de Paris. Cet
hommage reindu aux liqueurs Bols se passe
de tout commentaire. 7"
L
es Etablissements Allez frères ont un as-
sortiment de meubles de jardin, sièges et
tables en bois, fer, acier, jonc, rotin, si com-
plet, ils ont établi un tarif à des prix si bas,
qu'ils rendent réellement toute concurrence im-
possible.
p
renez tous de la-TIsane de santé de l'Abbaye
des Trappistes. Se trouve dans toutes phar-
macies. Dépurative, laxative, antiglaireuse,
agréable à boire. Dépôt général, Rouvièré, phar-
macien, 48, avenue de la République, Paris.
L
es salons, salles à manger et chambres à
r coucher les plus beaux, les meilleurs et les
moins cher, "se trouvent aux magasins du « Bois
Sculpté», 105, boulevard Sébastopol, Paris.
NOUVELLE A LA MAIN
E
ntre bons bourgeois se rencontrant avenue
d'Antin. -
- Où allez-vous donc par là?.
- Mais, au Salon, voir la toile de mon
fils.
- Il est donc peintre?. Et qu'a-t-il ex-
pose?.
- Une nature morte. -
- Oh! pourquoi avoir choisi uni sujet aussi
triste!.
: JOINVILLE. '-
Nous commencerons dans quelques
jours la publication d'un grand roman
inédit :
Le Curë du Haulin-Rooie
PAR
PIERRE DECOURCELLE
Dans cette œuvre nouvelle, l'auteur
des Deux Gosses, des Fêtards de Paris,
et de tant d'autres romans célèbres, s'af-
firme plus brillant et plus fécond que
jamais.
Le CUré du Moulin-Rouge
c'est un prêtre dont l'existence entière
— toute d'un admirable dévouement —
est consacrée à l'accomplissement d'une
mission intime: à l'exécution d'un devoir
sacré.
Pour accomplir cette mission, il doit
se mêler à tous les mondes, vivre dans
tous les milieux. Ces promiscuités passa-
gères font de lui le principal acteur d'un
drame poignant, destiné à faire couler
bien des larmes.
N'en disons pas plus long pour ne pas
décorer ce roman, qui est appelé à un
grand succès de ctïriocîfp m r1'pmntlnn.
ha Vie Drôle
- Helvétisons la Corso
Exception faite de l'élément corse, qui cons-
titue le fond de sa population, on peut dire
que la Corse a tout pour elle.
Quel admirable pays !
Tel que vous me voyez, je viens d'accomplir
au sein de cette île un trop court, hélas !
voyage (une semaine et quelques heures) ; j'en
reviens la proie du plus vif ravissement.
Ravissement panaché de profonde affliction.
Ces deux sentiments, en apparence contra-
dictoires, exigent une éclaircie (1). ,
Allons-y donc de notre embellissement (2) !
La plupart des Français continentaux, dès
qu'ils se sentent à la tête d'une somme de qua-
tre sous et de cinq minutes de temps, n'ont
rien de plus pressé que de filer en Italie, en
Suisse ,en Ecosse, en N orvège, et même, les
snobs ! en Finlande (de plus fjord en plus
fjord!).
Pourquoi, je vous le demande, ces niais ne
dirigent-ils pas leurs simples pas vers la
Corse, ce plus beau département de France, la
Corse, ce plus superbe pays du monde"?
Beauté des sites,, agrément du cernât, abon-
dance et prix dérisoire des primeurs, fleurs et
autres légumes, poissons frais comme s'il en
pleuvait, mille gibiers. Que désirez-vous de
plus ? l' é d'"l é
A joutons que, en sa qualité d'île méditerra-
néenne, la Corse se trouve affublée d'un lit-
toral enchanteur : Bordighera, Sorrente, vous
n'êtes que de bien pâles bibines auprès de cer-
taines plages corsicanes que, seul, le défaut de
place m'empêche de citer, véritables nids pour
Yankees tuberculo-milliardaires, et bien por-
tants Français !
Alors, se récrie le lecteur simpliste, si cette
Corse, dont vous faites votre Dieu, vous sem-
ble si belle, comment, raisonnablement, ex-
pliquer, passez-moi l'expression, son insonda-
ble purée ?
Ah ! voilà !
Ou, plutôt : Ah ! voici :
La Corse appartient aux Corses.
La Corse est gérée, administrée, exploitée
par les Corses.
Or, les Corses, vous n'avez pas idée de cela,
impossible d'imaginer population moins gé-
rante, administrante, exploitante.
(1) L'auteur a voulu dire sans doute éclaircissement.
(Note de L'auteur lui-même.)
(2) L'auteur a vonlu dire sans doute embellie syno-
nyme, dans son esprit, d'éclaircie. (Note de l'auteur
lui-même, l
Pleins de qualités, autrement.
Hospitaliers, surtout, à dérouter les plus
flatteuses prévisions.
Hospitaliers, ai-je dit, voilà. le grand mot
lâché, car c'est juste cette délicate venu qui
les ruine et perd leur délicieux pays.
II est grand temps de hausser la,Corse à son
étiage vrai et lui communiquer la valeur que
ses mérites lui assignent.
Et comme il serait simple à remplir, ce no-
ble but !
Débarrasser la Corse de tous ses habitante
et remplacer nos vieux Corses par de jeunes
Suisses.
Les Suisses sont un peuple rempli d'acti-
vité.
Un jour, le hasard vous conduit chez l'un
deux; jetant les yeux en l'air, vous remar-
quez un rocher abrupt.
Le mois suivant, vous revenez.
JPlus de rocher abrupt, mais, à sa place, un
hôtel gorgé de trois cents Anglais de foua
sexes, en toilette de soirée, et qui bouffent des
mtttton-shops à deux guinées la livre.
Voyez-vous la Corse aux mains de ces gem-i
là ! -
Tout cet argent restera chez nous, mon
vieux RÕuvier, chez nous !
ALPHONSE ALLAIS.
Arrestation de Martin
A GLASCOW
L'assassin de Berthe de Brienne voulait
filer sur New-York. — Trop tard :
le paquebot venait de partir. —
Pris dans un hôtel avec tous
les bijoux de la victime.
Ainsi que les derniers télégrammes !e faî*
saient pressentir, Paul-Jules Martin, <;>!
« l'Anglais », dit , « Emile », dit u Bras-de-
Fer», l'assassin de Berthe de Brienne, n'a
pas tardé à tomber entre les mains de la
justice.
C'est encore à la police française que re-r
vient l'honneur de cette importante capture,
opérée, à Glascow, par deux agents do AU
Hamard, chef du service do la Sûreté, i9
eous-brigadier Chris taud et l'inspecteur
de Bisschoff. -
La nouvelle officielle de l'arrestation estr
parvenue dans les bureaux du quai des i)r-
lèvres, hier, vers trois heures de l'après-
midi, sous la forme d'un télégramme amst
conçu :
« Avons arrêté Martin, aujourd'hui, midt.
à Glascoiv, Swan llotel, 79, Roberlson-
Street; où il était depuis hier. Tous les bi-
joux retrouvés. Inculpé très abattu. Corn-
plèferrieni rasé. Lorgnon' fumé. Attendons
Sexton. - ,
» CHRISTAUDJ DE BISSCHOFF. Il
Les deux policiers étaient porteurs, on
S'en souvient, d'un mandat d'amener, déli-
vré, à ta îîate du 12 mai 1903, par M. Bou-
cart, l'actif juge d'instruction chargé de
cette affaire sensationnelle.
Ce mandat porte inculpation d'assassinat
suivi de vol, contre le nommé Martin (paut-
Jules), vingt et un ans, né le 24 janvier 188L\
à Maisons-Alfort (Seine) ; célibataire, em-
ployé de commerce, ancien garçon épicier,
qui a étranglé, dans la nuit du jeudi 7 au
vendredi 8 mal, une veuve Gérault, née L)e-
beinche (Zoé-Sidonie), dite CI veuve Aubert
dite « Berthe de Brienne », femme galante,
demeurant à Paris, rue Chalgrin, numéro. 9.
Dès le premier jour, et on .verra tout à
l'heure pourquoi, on avait acquis l intame
conviction que l'assassin de Berthe de
Brienne ne pouvait s'être réfugié ailleurs
qu'en Angleterre, après l'exécution de son
effroyable forfait, Mais,, comme, le bruit fait
autour de cette affaire pouvait donner l'éveil
au mîsérable, des mesures de .la plus haute
importance furent prises par le chef au ser-
vice de la Sûreté.
C'est ains; que les agents de Paris en-
voyés à Londres reçurent l'ordre d'avoir à
se rendre dans tous les ports d'embarq.ue-
ment, de manière à vérifier Les listes de pas-
sagers et de montrer aux personnes compé-
tentes la photographie de Martin.
En fuite
L'amant de Berthe de Brienne habitait
Londres, en réalité, depuis un peu plus de
dix-huit mois, lorsqu'il eut l'idée de com-
mettrg son crime ; il vivait à Hay mante t
Street, 25 A. Oxindon Street, en compagnie
d'une fille galante, connue, dans un monda
spécial, sous le nom d'Isabelle d'Herblay.
On sait qu'il avait précédemment séjourna
en Belgique, d'où on dut l'expulser, en rai-
son de ses mœurs déplorables et de sa con-
duite à l'égard des filles de débauche.
Martin quitta Londres le 30 avril, sans
dire à sa maîtresse où il se rendait; d'ail.
leurs, il était, dit-on, au plus mai avec cette
dernière, et celle-ci ne cherchait qu'une, oc-
casion de le quitter dans le moment où il
lui annonça fort simplement qu il allait faire
un petit voyage.
A Paris, l'ancien garçon épicier descendit
dans un hôtel meublé de la rue Buffaut,
près du faubourg Montmartre. Là, il se tit
inscrire sous le nom de Pierre Morin, voya-
geur de commerce, âgé de vingt-trois ans, et
venant de Tours.
Il se montre, pendant son séjour Ici, dans
les établissements à la mode, avec celle
qu'il doit assassiner ; puis, sitôt le crime ac-
compli, il quitte Paris, le 8 mai, à nuit
heures du matin, par la gare du Nord, i e-
gagnant l'Angleterre, en passant par 'HoUo<'
logne-sur-Mer et Folkestone.
Martin, qui ne portait pour tout bagage
qu'une simpte valise de cuir rouge, arriva à
quatre heures de l'après-midi à Londies.
Isabelle d'Herblay était là. Elle trouva
son amant taquet, plus nerveux qu'à l'or-
dinaire.
— Hé ! quoi ! s'écria-t-elle, en remarquant
les blessures que Martin portait au visage et
aux mains, tu t'es donc battu ?
aux mains, fit l'assassin, visiblement troubLé
— Non,
et baissant la tête, en essayant de détourner
la conversation ; non. un simple accident,
en voyage. Un employé de chemin de 1er
qui, maladroitement, a refermé sur moi la
portière. et m'a fait les blessures que tu
vois.
Martin, dès ce moment, n'est pas tran-
quille : il va et vient, vire, tourne dans la
chambre, vingt-quatre heures durant, et, ii-
nalement, consulte les journaux. Le crime
est découvert ! il se rase complètement le
visage, achète un lorgnon fumé, reprend sa
valise et repart, en disant à Isabelle dHer-
blay qu'il se rend à Bruxelles.
Une fois dehors, il court à la gare Victo-
ria, y dépose sa précieuse valise et se met à
courir à travers Londres, dans le but de se
métamorphoser des pieds à la tête. Il troque
son chapeau melon contre un magnifique
haut de forme ; il s'achète du linge fin, plu-
sieurs vêtements complets, un pardessus
mastic, des bottines vernies, une canne à
pomme d'or. Il étale des. billets de banque,
paye royalement, « épate » quelques notoires
« marchands de viande » et, finalement, d s
parait.
Depuis, on ne sait guère où il a passé son
temps.
Enfin, pris !
Mais, comme noua le disons Plus hsuV
• 1
JEUDI 14 MAI 1903
*
;-«!•■ FERNAND XAU, Fondateur
RÉDACTION ET ADMINISTRATION s iOO, RUE RICHELIEU, PARIS .>
t
i
,- Prix des Abonnements
,. * On an Six mois Trois mit
SETNE & SEIKE-ET-OISE. 20. » 10.50 5.50
DÉPARTEMENTS ET ALGËRIE. 24. J) 12. n 6. t
LÀTMNGER (UNION POSTALE) 35. a 18. » 1 10. *
TELEPHONE
PtMCTMK. 102-96 1 RÉDACTION. 103-10
Adhikisibation 101-95 4
Annonces, Réclames, et Faits Divers
CHEZ LAGRANGE, CERF ITC
6, PLACE DB LA BOURSE 'II'
et aux bureaux du JOURNAL
Adresser les mandats-poste a fil. l'AdminUtratœr
Adresse télégraphique : JOURNAL-RICHELIEU-PARIt
Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus.
LOUISON
- Mon ami Georges m'ayant, hier, en-
traîné chez Mme Alexandrit, à Montrou-
ge, j'ai fait la connaissance de ses trois
filles, de ses deux nièces VII.,es sont,
comme vous le savez, espiègles et vicieu-
ses, prêtes à jouer le rôle de petites nym-
phes complaisantes, pour. les- membres
de leur conseil de famille, personnages
d'importance mais joyeux par l'humeur.
L'un d'eux manquait, le peintre
Tvlaxence Tribot, fort occupé, en ce mo-
>ment, par ses démarches afin d'obtenir
'la médaille. Déjà son tableau d'histoire :
L'armée de Ramsès en Syrie, est acheté
par le banquier du khédive. :
Celle des jeunes filles que cet artiste
admire particulièrement, la blonde et
grasse Augusta, me fut aimable.
Lorsque nous eûmes vidé nos verres
ae frontignan, le docteur Crotonat me
parut enclin à vouloir briller au moyen
de ses récits ; il parla en gardant assise
sur son genou la petite Louise dont le
-minois farceur s'égayait exagérément à
cha,que phrase du conteur. La grande
Riza, pour marquer le plaisir de son atr
lention, embrassait constamment la
moustache fauve du capitaine Desnoix,
qui est chauve et hâlé comme un Maure.
Toutes les deux minutés, Armande tirait
ees bas roses en relevant sa jupe. Cela
contentait fort le député Pierron lequel
est majestueux par sa corpulence et la
sérénité de son éloquente bêtise. La mi-
gnonne Colette s'était blottie dans la poi-
trine de Georges qui la caressait lente-
ment et partout. Langoureuse, elle fré-
missait.
Sans qu'on sût à quelle rêverie Riza
tonnait une conclusion, elle s'écria
brusquement. : « Etre reine ! » Mme
Alexandrit, en époussétant le jais de son
maigre corsage, en vérifiant de la main
le bon ordre de sa chevelure poudrée,
réprimanda l'ambition de sa nièce : « Il
~au't être contente de son sort », énonça-
t-elle dans un soupir.
Avant que la phrase fût finie, le doc-
teur Crotonat s empressait déjà de lui
prodiguer ses approbations.
— Je veux appuyer, madame, la sa-
gesse de votre sentence, poursuivit-il,
par l'exemple d'un fait personnel, ou
plutôt d'une curieuse illusion p ers ou-
nelle. Voici les faits dont vous connais-
sez une partie : Samedi, l'idée me vint
d'aller à Longchamps, pour voir la foule
applaudir notre Président et son hôte
royal. J'aime les chatoiements noirs de
-la multitude au soleil, quand elle grouil-
le sur, la verdure de larges pelouses.Cela
me rappelle les vibrions qui se démè-
ment, sur leur lame de verre, à portée de
mon microscope bactériologique. La
comparaison au point de vue de la mo-
rale m'est salutaire. Vous me permîtes,
ce jour-là, chère madame Alexandrit,
d'emmener Louise au pesage et je louai,
pour la circonstance, une Victoria de re-
mise parfaitement correcte, munie d'un
cocher brillant et roide, dans sa livrée
bleue à boutons d'argent. Je me plus
à jouir de la. satisfaction qui se pei-
gnait sur la * claire figure de cette
obère enfant, tout heureuse d'être un
sujet d'envie pour les couples installés
dans les humbles fiacres, un sujet de
désir pour les cyclistes fanfarons, un su-
jet de jalousie pour les piétons qu'a-
vaient déversés au Bois, le Métropolitain
et les tramways.
» Oui, mon petit Louison, tu te pa-
vanais, bien fière d'être., pour tant d'hu-
mains, une cause de souffrance. Tu
triomphais comme un général dont les
soldats semèrent,de la douleur dans les
contrées envahies, et qui chevauche à la
lace des vaincus. Alors, tu es devenue
plus jolie, s'il est possible. La clarté de
ton visage a mieux resplendi. En tes
#eux gris se miraient les vertes lueurs
^des feuilles suspendues dans l'air, au-
tour des branches humides encore. Ta
jeune gorge enflait le drap de ta jaquette
sanglée sur tes formes mignonnes et
pleines. Une vie plus ardente battait
dans ta poitrine. Et toutes choses te fu-
rent des motifs de joie : les attelages qui
rivalisaient avec le nôtre, les allures des
hauts alezans robustes qui traînaient les
voitures étincelantes des riches, les lu-
mières des roues, les couleurs des toi-
lettes féminines, le mouvement indéfini
des équipages et leur nombre en file, la
forêt des fouets grêles, les mastodontes
automobiles stridents et dociles sous la
main du watman attentif, les perspecti-
ves de la pelouse plantée de gens jus-
qu'aux toiLs des tribunes, jusqu'au dôme
ides futaies, jusqu'aux collines vaporeu-
ses et aux fins clochers debout dans le
ciel nuageux de l'horizon.
» Puis, quand tu te promenas, la traî-
ne lâchée, autour du parterre, sous les
œillades discrètes des messieurs cam-
brés dans leurs redingotes, que de vani.
Lés encore t'enivrèrent. L'espoir ne ces-
sait plus de jouer mille féeries dans ton
imagination, qui discernait le prince des
enlèvements merveilleux sous chacun
des chapeaux à huit reflets. Cent fois tu
lo crus près d'être la reine de cœurs
millionnaires, la maîtresse de leurs pas-
sions, l'épouse de leur amour, la prin-
cesse de leurs vassaux. Ta physionomie
se 'travestissait selon les variations de
tes vœux naïfs. Ton jeune esprit s'en-
flammait de tant de façons différentes
que tu me semblais une succession de
personnes dIverses, habiles à se méta-
morphoser selon lalnesure de ton corps
et à s'insinuer dans l'apparat de ta toilet-
te, mais sans perdre, pour cela, le ca-
ractère de leur être distinct.
» Enfin, le piqueur aux galons d'or
émergea de la foule pressée. Les oreilles
du cheval, un peu de crinière, accouru-
rent par-dessus les tiares brillantes des
hommes, par-dessus les panaches et les
auréoles des femmes ; d'autres oreilles
de chevaux, les glands d'or écrasés sur
les casquettes des piqueurs, eux-mêmes
sursautant au gré du trot, les lanternes
argentées de. la calèche.
» Vive le roi ! Tu l'as crié, Louison,
de ta jeune bouche gamine, mais 'en-
thousiaste tout à coup, ce dont s'égayè-
rent discrètement tes voisins. Eh ! oui,
Louison* toit la fille parisienne gouail-
leuse, toi l'écolière révoltée, toi la fille
d'un rouge, toi qui vantais l'anarchie de
tes camarades ! Ah ! Louison, jjétais tout
centre toi dans cet instant. J'ai senti le5
muscles vigoureux et souples de ton
corps se contracter pour un élan, j'ai
perçu la chaleur accrue -de ton sang à
travers la robe, j'ai su que fies nerfs, tes
nerfs subtils formés par la vie de ton
père, de ta mère, par toute la force hé-
ritée des ancêtres, que tes nerfs obéis-
saient à la vieille loi des aïeux, celle dont
nous ne sommes affranchis que par la
raison, mais non par la nature. Loui-
son !
» Alors, j'ai profondément souhaité ta
jeunesse, ton adolescence, encore liée à
ses causes directes ; j'ai souhaité de vi-
vre comme toi, dans ton corps délicat
et potelé, avec l'élan des muscles sou-
ples, avec la fébrilité de tes nerfs et de
ton cerveau, avec toute l'harmonie de
tes membres et de tes sensations en gai-
nées dans cette alerte beauté savoureuse
aux lèvres. Etre toi, tes élans irréfléchis,
tes joies spontanées, tes désirs vifs, tes
appétits violents, tes gourmandises mê-
mes, tes epoirs innombrables et em-
brouillés : être l'être que ne déçoivent
pas encore la - froide raison, ni le scepti-
cisme ricaneur, ni la satiété !.
» C'était le cas évidemment, messieurs,
d'expérimenter la théorie du docteur
William Donnaught sur la méthode hyp-
notique deis transferts. Vous avez tous
entendu parler de 1. cette nouvelle con-
naissante relative aux faits magnétiques
et psychiques. Après avoir étudié long-
temps, et sous le contrôle scientifique le
plus minutieux, les phénomènes de télé-
pathie, et de suggestion à distance, le
docteur William Donnaught en vient à
prétendre que si, de deux amis, l'un do
mine assez l'autre par la puissance de
sa volonté, il peut, non seulement trans-
former le caractère d'autrui, selon le
sien, ce que nous constatons chaque
jour, mais aussi échanger la conscience
du faible avec la sienne, autant dire lo-
ger son esprit dans le corps du parte-
naire. Vous savez ces choses aussi bien
que moi. Les revues publient trop d'arti-
cles à ce propos. Donc, j'entrepris d'in-
troduire ma conscience dans le corps de
Louison. Au retour, dans la voMire,
j'employai la méthode ordinaire : nyp-
nose par le regard fixe, par le souffle et
les passes de la main, les pressions ryth-
mées sur la nuque et l'épigastre. Dans
l'état nerveux où se trouvait cette petite,
il se pouvait que l'expérience aboutît.
•t » Messieurs, et vous, madame, soyez
certains que je ne mens pas. Je péné-
trai, peu à peu, la personne de Louison
endormie ; et, quand je me réveillai,
mon but était atteint. C'était ma main
qui tenait l'ombrelle. Dans mon visage
sans barbe, c'étaient cependant mes
yeux qui voyaient la fête de Paris, toute
la rue Saint-Honoré où flambaient les
langues rouges des drapeaux britanni-
ques, e't la magnificence des portiques
verts, des étendards. Chaque passant
me semblait difforme et comique, et j'a-
vais. Ah ! Louison. Ah ! perverse
Louison !. Et, j'avais surtout l'anxiété
de n'être point à quatre heures au bu-
reau de tramways de la Madeleine où
devait m'attendre Eugène.
» Eugène !.Rougissez, Louison.:.Vous
étiez alors auprès de moi, mais dans
mon pardessus gris, et vous tâtiez avec
stupeur le poil de mon menton qui était
devenu le vôtre. Vos yeux exprimaient
le dépit d'accorder à la poussière une
attention que vous réserviez tout entière,
une seconde auparavant,. aux emblèmes
de la fête ; et vous me contempliez ahu-
rie de vous reconnaître là, telle que dans.
les glaces, mais séparée de vous. Profi-
tant de ce trouble, je fis arrêter la Vic-
toria, sautai légèrement à terre, vous
envoyai le petit salut ordinaire, et m'es-
quivai pour rejoindre Eugène.i. Eugè-
ne ! ô Louison. Cependant, la Victoria
vous emportait vers ma demeure.
» Oui, messieurs, je me suis vu fille,
preste et gentille que les messieurs dé-
visageaient impudemment. Ce riie valut
quelques colères d'abord. Je les répri-
mai vite. D'ailleurs, le petit faux-col dou-
ble m'étouffait, et quelques-uns ,de mes
cheveux demeuraient pris, à la nuque,
dans les boutonnières, en sorte que je
n'y pus remédier. Le corset me sciait les
hanches à chaque pas, chose atroce, le
buse me pinçait le ventre. Quant à mon
chapeau de dentelles, le vent lé soule-
vait sans cesse, et j'avais peur qu'il ne
s'envolait, malgré les épingles entortil-
lées dans ma coiffure. Enfin, mes. jupes
ramassaient tant de poussières, #ue je
comptais avec effroi les myriades de mi-
crobes mortels ainsi emmagasinés, dans
mes dessous. Et puis, les jarretelles ti-
raient trop mes bas. Comme je me mor-
dais les lèvres, le goût inopiné du. fard
me répugna.., Une frisure défaite S'em-
barrassa dans mes cils, et il me fallait
bien retrousser ma robe. Telles furent
mes premières impressions. Je les. ju-
geai désagréables, d'autant que ma mé-
moire grondait : « Si tu es en retard,
Eugène t' « engueulera» !
» Eh bien 1 messieurs, il m' « èm-
gueula ». Je le rencontrai derrière l'a Nia,
deleine. Il arpentait le trottoir le long: de
la grille. « Espèce de petite garce ! fc^st-
» ce que tu vas me faire marronne,
» comme ça tous les jours ? » Telles fi-
rent ses paroles de bon accueil. Ah M
Louison, que je vous plains. Certes, vo-
tre amant est jeune i; les furoncles de
l'adolescence ornent encore son front et
les commissures de ses lèvres. Certes, il
est beau ; ses cheveux noirs plaqués par
une pommade trop odorante descendent
le long de ses tempes ; une cravate de
satin noir à la 1830 fait plusieurs fois le
tour de son cou délicat et comprime sa
pomme d'Adam, qui reste en saillie, tou-
tefois. Certes, il est mince ; les rotules
de ses genoux sont marquées dans son
pantalon, malgré le pli du fer. Certes, il
a bon estomac, car son langage fleurait
à la fois l'eau-de-vie, le roquefort et le
maryland. Certes, il est mâle, car l'odeur
de son paletot, vers les aisselles, en té-
moigne. Mais il est, confessez-le, sans
politesse, Louison ; il est sans politesse,
votre amant ! J'use de meilleurs égards.
» Me prenant pour mon apparence, il
demanda comment j'avais « semé le
vieux ». Il me pria d'essuyer mes lèvres
avant le baiser, parce qu'il ne voulait pas
'- 1 ~e -. -r~ rlr*
lécher les traces de mar salive, j'entends,
celles du docteur Crotonat. Sa jalousie
fut âpre âuranV-le voyage on tramway
qui nous mena jusqu'à votre nid. Ce nid
est un rez-de-chausséè obscur au fond
d'une cour, madame ! C'est 14 que votre
fille me trompe et trompe ces messieurs.
Ce lieu sent le tabac refroidi et le cuir
des savates. Timidement, si pénètre un
étroit rayon de soleil, l'acre odeur de la
poussière sort des rideaux épais et ta-
chés. De l'encre répandue a souillé le ta-
pis rouge de la table.
» Afin de me séduire, Eugène me prit
à bras le corps, me colla sous le nez sa
moustache au chester, à l'eau-de-vie et
au maryland, et, pendant qu'il me grif-
fait la gorge, il promenait sur ma joue sa
bouche visqueuse et les furoncles de son
front. Pardonne-moi, Louise. Je n'étais
pas assez toi-même pour m'arranger de
cet amour. Mon odorat supportait mal
cette haleine trop virile ; et, si je vous
avais pris le vif désir d'être en volupté,
si ce désir échauffait mes oreilles, séchait
ma gorge et tourmentait mon échine, il
était malheureusement distrait par l'en-
nui de me sentir palpé, pétri, bousculé
de toutes manières. Que dirai-je de plus,
Louison ? Votre Eugène-se déshabilla. Il
me parut grotesque et tout osseux dans
son tricot un peu jauni, dans son caleçon
douteux. Soudain, il défit ses chausset-
tes. Ses ongles de pied étaient en deuil,
Louison !. Parfaitement, ils étaient en
deuil, couleur de la chaussette qu'il ôtavt. «
» En vain, esquissa-t-il des gambades.
En vain, imita-t-il Sarah Bernhardt et Co-
quelin. En vain simuIa-t-il le mal d'une
grenouille près d'accoucher ; les ongles
en deuil de ses pieds me désolèrent trop
pour que je pusse feindre de m'égayer à
ses pitreries. Il alla dans la pièce voisine.
J'en profitai pour fuir en me rajustant,
sauter en fiacre, parvenir chez moi, te
trouver, mon petit Louison, au coin de
mon feu, toi, lasse et abrutie sous l'em-
blémature d'un docteur quadragénaire
que son domestique raillait avec défé-
rence : « Monsieur à trop bien déjeuné.
sans doute. Monsieur ne parle point COlI)¡¡¡
me à son ordinaire. »
» Voilà pourquoi, chère petite, je t'ai
de nouveau endormie. Rentré dans ma
peau, je te fis repasser dans la tienne.
Je préfère ne plus te dérober tes illusions
sur Eugène.
» Dieu fait bien ce qu'il fait !. A cha-
que âge ses plaisirs ! » conclut senten-
cieusement- Mme Alexandrit, en hochant
sa vénérable tête blanche. « Mais Loui-
son ne mérite pas vos bontés, docteur.
Un Eugène !. Oh ! un Eugène ! »
L'enfant, confuse, bougonnait.
PAUL ADAM.
ÉCHOS
Aujourd'hui, à deux heures, réunion au Bois ûe
Boulogne.
NOS FAVORIS
Prix de Courcclles, — Crépuscule, Beverly.
Prix de Montfort. — Amer Picon.
Prix de Saint.Georges.- Gradignan, Pont d'Arcole.
Prix des Acacias. - Anastasie, Shebdiz.
Prix du Champ de Mars. — Wide Awake.
Prix de Compiègne. - Cléopàtre II, Arcadius.
L
e Président de la République, accompagné
du général Dubcis, secrétaire général de
la Présidence, chef de la maison, militaire, s'est
rendu, hier après-midi, à une heure et demie, à
l'hôtel Bristol, pour rendre visite à la reine Amé-
lie de Portugal.
La reine n'étant pas reçue officiellement par
le gouvernement de la République, la voiture
du Président n'était suivie d'aucune escorte.
L'entrevue entre la reine et le Président a
duré vingt-cinq minutes. La reine, avec une ama-
bilité pleine de grâce, a remercié M. Loubet de
sa visite et a exprimé tout son plaisir de se trou-
ver à Paris.
A deux heures un quart, le Président était de
retour à l'Elysée. et ,.
La reine Amélie s'est rendue, après la visite
présidentielle, aux hôpitaux d'Ormesson et de
Villiers. Elle était accompagnée des docteurs
Léon Petit et de Lencastre. Elle a été reçue
par une délégation du comité de l'Association
pour la lutte contre la tuberculose et par les
docteurs Let aile et Landouzy, représentant le
bureau du dernier Congrès international con-
tre la tuberculose. La reine a fait le voyage en
voiture-automobile Serpollet. ;
A six heures, le comte de Figueiro, grand
chambellan de la reine, et le ministre de Por-
tugal à Paris, se sont rendus à l'Elysée pour
rendre au Président, au nom de leur souve-
raine, la visite que celle-ci a reçue de M. Lou-
ber.
L
e départ de M. Jonnart
M. Jonnart, gouverneur général de l'Al.
gène, s est embarque, nier, a Marseille, pour
prendre possession de son poste. Il est accom-
pagné de Mme et de M. Raymond Aynard, qui
remplira auprès de lui les fonctions de direc-
teur du cabinet et du personnel. M. Maginot,
auditeur au Conseil d'Etat, et M. David, con-
seiller de préfecture, accompagnent aussi le
gouverneur.
A Alger, M. Jonnart s'installera au Palais
d'Hiver, qui a été récemment aménagé pour le
séjour qu'y a fait M. Loubet.
Dès son arrivée, le gouverneur général aura
à présider les Délégations financières. Leur
session est fixée, en effet, au 18 mai.
Disons, à ce propos, que le conseil des mi-
nistres a approuvé une décision du président
Ju conseil portant création d'un costume offi-
c;el pour le gouverneur général de l'Algérie.
Conformément à cette décision, le ministre
de l'intérieur a signé un arrêté qui fixe l'uni-
forme du gouverneur général.
* Cet uniforme est à peu près semblable à ce-
lui des gouverneurs généraux des colonies : il
com porte une grande tenue et une petitè tenue.
Av\çc la grande tenue, le gouverneur général
de t'Algérie portera le chapeau français à plu-
mes blanches et l'épée à poignée de nacre et à
coquille d'or. ----
L
e prince héritier Christian de Danemark
et la princesse sont arrivés, hier matin, à
Pans, par le train de luxe, venant de Nice; et
En descendus à l'hôtel Bristol, où ils reste-
ront jusqu'au fi courant.
Le prince et la princesse sont accompagnés
des princesses Thyra et Dagmar et du prince
Gustave, leurs enfants. Leur suite se compose,
en'outre, du chambellan von Bull, d'un précep-
teur candidat Hendriksen, d'une dame d'hon-
neur, Mlle von Wimffen, et d'une gauvemanta
œi** ClwRroft
- 1,
Le prince et la princesse occupent le grand
entrfescd de l'hôtel. Leur appartement, qui a
vue sur la ptaee Vendôme et sur 4a rue Saint*
Honoré, se compose de onze pièces.
Selon toute probabilité, le jeune héritier de
Danemark ira saluer aujourd'hui, à l'Elysée,
le Président de la République.
M
Chaumié, ministre de l'instruction publi-
que, est nommé grand-croix du Sauveur
de Grèce, et les membres de la mission, seront
prochainement décorés par le roi de Grèce.
L
a mort de M: Piault.
A peu près tous les élus de la Seine, sé-
nateurs, députés, conseillers municipaux et gé-
néraux, sont venus s'inscrire, hier matin, au
domicile du déf un t.
Des adresses, en nombre considérable, éma-
nant d'amis politiques ou privés, sont égale-
ment parvenues à Mme Piault.
Le préfet de la Seine est venu, dans l'après-
midi, rendre visite à la famille de M. Piault.
Les obsèques auront lieu aux frais de la
Ville.
La cérémonie sera célébrée demain vendredi,
à midi, en l'église Saint-Louis-d'Antin.
L'inhumation aura lieu au Père-Lachaise,
où des discours seront prononcés par les prési-
dents du Conseil municipal et du Conseil géné-
ral et par le préfet de la Seine.
Le Conseil municipal devait se réunir, hier.
Il s'est réuni, en effet; mais la séance a
été levée aussitôt, en signe de deuil, après que
le président, M. Deville, eut exprimé les regrets
de l'assemblée tout entière, pour la fin tragique
de M. René Piault, et adressé à sa veuve l'ex-
pression attristée de ses condoléances.
L
es journaux anglais donnent de nombreux
détails sur le prochain voyage du Prési-
dent de la République en Angleterra Ces dé-
tails sont prématurés; aucune invitation offi-
cielle n'a été faite encore, à ce sujet, à M.
Loubet.
E
pilogue d'une vieille affaire.
On se souvient peut-être encore d'un inci-
dent qui fitf l'an dernier, un certain bruit dans
le mande sportif.
Un bookmaker, M. Blin, accusé d'avoir mis
des planchettes garnies de clous sur la piste de
Bagatelle, se vit l'objet d'une information ju-
diciaire qui, d'ailleurs, aboutit à une ordon-
nance de non-lieu.
Néanmoins, M. Blin n'en a pas été quitte
pour cela avec la justice. Son cas a été « poli-
cise M, en ce sens qu'il a comparu devant le
Tribunal de simple police .qui lui a infligé une
amende de cinq francs pour avoir jeté sur la
voie publique des choses quelconques pouvant
nuire à. la circulation.
Le
successeur de Léon.
Depuis hier, il est officiellement dési-
.£Dé. l ",>,
C'est Honoré qui, à partir du 15 octobre pro-
chain, est appelé à remplacer Léon, l'excellent
huissier appariteur de l'Ordre des avocats dont
le Journal annonçait, l'autre jour, le départ
prématuré.
Ainsi en a décidé le Conseil de discipline,
réuni en Assemblée plénière.
Honoré Chauve exerçait, jusqu'à aujour-
d'hui, les fonctions d'appariteur à la bibliothè-
que du Barreau. Précédemment, il avait appar-
tenu, pendant 21 ans, comme brigadier à la
garde républicaine, et, en 1893, lors des fameux
troubles qui éclatèrent au quartier Latin, à pro-
pos de la mort de Nuger, il reçut, en récom-
pense de sa belle conduite, la médaille mili-
taire.
Honoré est la correction même. Il sera, ou
plutôt il continuera, comme son digne prédéces-
seur, à être le dévoué serviteur des vieilles tra-
ditions de l'Ordre des avocats. ,-
La
maison de Victor Hugo.
Victor Hugo attend toujours qu'on lui
ouvre sa maison. L aménagement continue. Les
tentures et les rideaux sont posés dans toutes
les salles; les grands dessins ornent déjà les
murs; les petits dessins emplissent les vitrines.
Les toiles des maîtres qui ont illustré l'œuvre
et la vie de Victor Hugo s'entassent au premier
étage. Tout sera prêt, décidément, à la fin de
cette semaine.
, Le préfet de la Seine va prendre jour, inces-
samment, avec le Président de la République,
pour l'inauguration, qui aura lieu vraisembla-
blement le 22 mai, anniversaire de la mort de
Victor Hugo. Dans tous les cas, l'inauguration
ne saurait être retardée que d'une huitaine et
fixée, au plus tard, dans les derniers jours de
mai.
L
e commerce des vins de Champagne.
- Chaque année, au mois d'avril, la Cham-
bre de commerce de Reims dresse une statisti-
que du mouvement des vins mousseux de Cham-
pagne expédiés à l'étranger,- à l'intérieur et
dans le département de la Marne.
Pendant l'exercice 1902-1903, le nombre des
bouteilles expédiées à l'étranger s'est élevé à
22,523,746; le nombre des bouteilles expédiées
en France, aux marchands en gros, aux débi-
tants et aux consommateurs, à 9,335,412, ce
qui donne pour l'importance réelle du com-
merce 31,859,158 bouteilles.
Si on ajoute à ce chiffre l'expédition de né-
gociant à négociant dans le département,
4,676,444 bouteilles, on arrive à un mouvement
total de 36,535,602 bouteilles.
Ainsi qu'on peut en juger par les chiffres ci-
dessus, le commerce des vins de Champagne,
dans le dernier exercice, a augmenté, compara,
tivement à l'exercice 1901-1902, de plus de deux
millions de bouteilles dans les expéditions à
l'étranger et de près d'un. million et demi de
bouteilles dans celles de l'intérieur.
1
1 a semblé à un certain nombre d'écrivains et
d'artistes qu'avec du goût, de la tenue et de
la belle humeur, on pouvait faire un journal
comique illustré, qui fût drôle sans grossièreté,
familial sans niaiserie, comme il faut sans fa-
deur. Tel est le programme réalisé par l'Œil,
dont le premier numéro est mis en vente au-
jourd'hui, au prix de o fr. 15.
D
e Rome à Paris, Edouard VII ne s'est
arrêté qu'à Dijon. évidemment pour
consacrer la nouvelle voiture populaire Cotte-
rèau et Cto, à 3,750 francs.
.1
amais l'imitation n'atteint la perfection de
l'original. La fameuse tiare, pour bien exé-
cutéa qu'elle fut, n'a pu passer pour authenti-
que. Les imitateurs du Looping the Loop se
cassent les reins les uns après les autres. Seul,
Diavolo, le créateur, boucle la boucle à l'Olym-
pia, tous les soirs et les jeudis et dimanches en
matinée, avec assurance, et le public enthou-
siaste lui fait fête, ainsi qu'à Germaine Gal-
lois, l'exquise commère de la bientôt bi-cente-
naire Olympia-Revue.
L
a 33e Exposition canine internationale, or-
ganisée par la Société centrale pour l'amé-
lioration des races de chiens, sera ouverte au
public le mardi 19 mai.
Elle sera installée, comme d'habitude, sur la
terrasse de l'Orangerie des Tuileries et com-
prendra environ. 1,350 chiens.
Parmi eux, 54 pointers, 97 setters, 35 coc-
kers, 30 collies, 14 meutes sont engagés.
Dans l'Orangerie, sera installée la 148 Expo-
sition des peintres et sculpteurs de chasse et
vénerie.
A
voir la taille fine sans souffrir, tel est le
rêve de toutes nos jolies femmes. Le cor-
set Louis XV de Dodane, II, boulevard des
Italiens, réunit, à ce point de vue, tous les suf-
frages, grâce à ses précieuses qualités de sou-
plesse et d'élégance. *
A
u merveilleux dîner de la « Poule au
Pot », donné ces jours derniers au res-
taurant des Ambassadeurs, Les seules liqueurs
annoncées sur le menu, avec la fine Champagne,
étaient les Liqueurs de la Maison Bols, aniset-
tes, curaçaos blancs, etc. On sait que la « Poule
au Pot » est composée des premiers res.
taurateurs et limonadiers de Paris. Cet
hommage reindu aux liqueurs Bols se passe
de tout commentaire. 7"
L
es Etablissements Allez frères ont un as-
sortiment de meubles de jardin, sièges et
tables en bois, fer, acier, jonc, rotin, si com-
plet, ils ont établi un tarif à des prix si bas,
qu'ils rendent réellement toute concurrence im-
possible.
p
renez tous de la-TIsane de santé de l'Abbaye
des Trappistes. Se trouve dans toutes phar-
macies. Dépurative, laxative, antiglaireuse,
agréable à boire. Dépôt général, Rouvièré, phar-
macien, 48, avenue de la République, Paris.
L
es salons, salles à manger et chambres à
r coucher les plus beaux, les meilleurs et les
moins cher, "se trouvent aux magasins du « Bois
Sculpté», 105, boulevard Sébastopol, Paris.
NOUVELLE A LA MAIN
E
ntre bons bourgeois se rencontrant avenue
d'Antin. -
- Où allez-vous donc par là?.
- Mais, au Salon, voir la toile de mon
fils.
- Il est donc peintre?. Et qu'a-t-il ex-
pose?.
- Une nature morte. -
- Oh! pourquoi avoir choisi uni sujet aussi
triste!.
: JOINVILLE. '-
Nous commencerons dans quelques
jours la publication d'un grand roman
inédit :
Le Curë du Haulin-Rooie
PAR
PIERRE DECOURCELLE
Dans cette œuvre nouvelle, l'auteur
des Deux Gosses, des Fêtards de Paris,
et de tant d'autres romans célèbres, s'af-
firme plus brillant et plus fécond que
jamais.
Le CUré du Moulin-Rouge
c'est un prêtre dont l'existence entière
— toute d'un admirable dévouement —
est consacrée à l'accomplissement d'une
mission intime: à l'exécution d'un devoir
sacré.
Pour accomplir cette mission, il doit
se mêler à tous les mondes, vivre dans
tous les milieux. Ces promiscuités passa-
gères font de lui le principal acteur d'un
drame poignant, destiné à faire couler
bien des larmes.
N'en disons pas plus long pour ne pas
décorer ce roman, qui est appelé à un
grand succès de ctïriocîfp m r1'pmntlnn.
ha Vie Drôle
- Helvétisons la Corso
Exception faite de l'élément corse, qui cons-
titue le fond de sa population, on peut dire
que la Corse a tout pour elle.
Quel admirable pays !
Tel que vous me voyez, je viens d'accomplir
au sein de cette île un trop court, hélas !
voyage (une semaine et quelques heures) ; j'en
reviens la proie du plus vif ravissement.
Ravissement panaché de profonde affliction.
Ces deux sentiments, en apparence contra-
dictoires, exigent une éclaircie (1). ,
Allons-y donc de notre embellissement (2) !
La plupart des Français continentaux, dès
qu'ils se sentent à la tête d'une somme de qua-
tre sous et de cinq minutes de temps, n'ont
rien de plus pressé que de filer en Italie, en
Suisse ,en Ecosse, en N orvège, et même, les
snobs ! en Finlande (de plus fjord en plus
fjord!).
Pourquoi, je vous le demande, ces niais ne
dirigent-ils pas leurs simples pas vers la
Corse, ce plus beau département de France, la
Corse, ce plus superbe pays du monde"?
Beauté des sites,, agrément du cernât, abon-
dance et prix dérisoire des primeurs, fleurs et
autres légumes, poissons frais comme s'il en
pleuvait, mille gibiers. Que désirez-vous de
plus ? l' é d'"l é
A joutons que, en sa qualité d'île méditerra-
néenne, la Corse se trouve affublée d'un lit-
toral enchanteur : Bordighera, Sorrente, vous
n'êtes que de bien pâles bibines auprès de cer-
taines plages corsicanes que, seul, le défaut de
place m'empêche de citer, véritables nids pour
Yankees tuberculo-milliardaires, et bien por-
tants Français !
Alors, se récrie le lecteur simpliste, si cette
Corse, dont vous faites votre Dieu, vous sem-
ble si belle, comment, raisonnablement, ex-
pliquer, passez-moi l'expression, son insonda-
ble purée ?
Ah ! voilà !
Ou, plutôt : Ah ! voici :
La Corse appartient aux Corses.
La Corse est gérée, administrée, exploitée
par les Corses.
Or, les Corses, vous n'avez pas idée de cela,
impossible d'imaginer population moins gé-
rante, administrante, exploitante.
(1) L'auteur a voulu dire sans doute éclaircissement.
(Note de L'auteur lui-même.)
(2) L'auteur a vonlu dire sans doute embellie syno-
nyme, dans son esprit, d'éclaircie. (Note de l'auteur
lui-même, l
Pleins de qualités, autrement.
Hospitaliers, surtout, à dérouter les plus
flatteuses prévisions.
Hospitaliers, ai-je dit, voilà. le grand mot
lâché, car c'est juste cette délicate venu qui
les ruine et perd leur délicieux pays.
II est grand temps de hausser la,Corse à son
étiage vrai et lui communiquer la valeur que
ses mérites lui assignent.
Et comme il serait simple à remplir, ce no-
ble but !
Débarrasser la Corse de tous ses habitante
et remplacer nos vieux Corses par de jeunes
Suisses.
Les Suisses sont un peuple rempli d'acti-
vité.
Un jour, le hasard vous conduit chez l'un
deux; jetant les yeux en l'air, vous remar-
quez un rocher abrupt.
Le mois suivant, vous revenez.
JPlus de rocher abrupt, mais, à sa place, un
hôtel gorgé de trois cents Anglais de foua
sexes, en toilette de soirée, et qui bouffent des
mtttton-shops à deux guinées la livre.
Voyez-vous la Corse aux mains de ces gem-i
là ! -
Tout cet argent restera chez nous, mon
vieux RÕuvier, chez nous !
ALPHONSE ALLAIS.
Arrestation de Martin
A GLASCOW
L'assassin de Berthe de Brienne voulait
filer sur New-York. — Trop tard :
le paquebot venait de partir. —
Pris dans un hôtel avec tous
les bijoux de la victime.
Ainsi que les derniers télégrammes !e faî*
saient pressentir, Paul-Jules Martin, <;>!
« l'Anglais », dit , « Emile », dit u Bras-de-
Fer», l'assassin de Berthe de Brienne, n'a
pas tardé à tomber entre les mains de la
justice.
C'est encore à la police française que re-r
vient l'honneur de cette importante capture,
opérée, à Glascow, par deux agents do AU
Hamard, chef du service do la Sûreté, i9
eous-brigadier Chris taud et l'inspecteur
de Bisschoff. -
La nouvelle officielle de l'arrestation estr
parvenue dans les bureaux du quai des i)r-
lèvres, hier, vers trois heures de l'après-
midi, sous la forme d'un télégramme amst
conçu :
« Avons arrêté Martin, aujourd'hui, midt.
à Glascoiv, Swan llotel, 79, Roberlson-
Street; où il était depuis hier. Tous les bi-
joux retrouvés. Inculpé très abattu. Corn-
plèferrieni rasé. Lorgnon' fumé. Attendons
Sexton. - ,
» CHRISTAUDJ DE BISSCHOFF. Il
Les deux policiers étaient porteurs, on
S'en souvient, d'un mandat d'amener, déli-
vré, à ta îîate du 12 mai 1903, par M. Bou-
cart, l'actif juge d'instruction chargé de
cette affaire sensationnelle.
Ce mandat porte inculpation d'assassinat
suivi de vol, contre le nommé Martin (paut-
Jules), vingt et un ans, né le 24 janvier 188L\
à Maisons-Alfort (Seine) ; célibataire, em-
ployé de commerce, ancien garçon épicier,
qui a étranglé, dans la nuit du jeudi 7 au
vendredi 8 mal, une veuve Gérault, née L)e-
beinche (Zoé-Sidonie), dite CI veuve Aubert
dite « Berthe de Brienne », femme galante,
demeurant à Paris, rue Chalgrin, numéro. 9.
Dès le premier jour, et on .verra tout à
l'heure pourquoi, on avait acquis l intame
conviction que l'assassin de Berthe de
Brienne ne pouvait s'être réfugié ailleurs
qu'en Angleterre, après l'exécution de son
effroyable forfait, Mais,, comme, le bruit fait
autour de cette affaire pouvait donner l'éveil
au mîsérable, des mesures de .la plus haute
importance furent prises par le chef au ser-
vice de la Sûreté.
C'est ains; que les agents de Paris en-
voyés à Londres reçurent l'ordre d'avoir à
se rendre dans tous les ports d'embarq.ue-
ment, de manière à vérifier Les listes de pas-
sagers et de montrer aux personnes compé-
tentes la photographie de Martin.
En fuite
L'amant de Berthe de Brienne habitait
Londres, en réalité, depuis un peu plus de
dix-huit mois, lorsqu'il eut l'idée de com-
mettrg son crime ; il vivait à Hay mante t
Street, 25 A. Oxindon Street, en compagnie
d'une fille galante, connue, dans un monda
spécial, sous le nom d'Isabelle d'Herblay.
On sait qu'il avait précédemment séjourna
en Belgique, d'où on dut l'expulser, en rai-
son de ses mœurs déplorables et de sa con-
duite à l'égard des filles de débauche.
Martin quitta Londres le 30 avril, sans
dire à sa maîtresse où il se rendait; d'ail.
leurs, il était, dit-on, au plus mai avec cette
dernière, et celle-ci ne cherchait qu'une, oc-
casion de le quitter dans le moment où il
lui annonça fort simplement qu il allait faire
un petit voyage.
A Paris, l'ancien garçon épicier descendit
dans un hôtel meublé de la rue Buffaut,
près du faubourg Montmartre. Là, il se tit
inscrire sous le nom de Pierre Morin, voya-
geur de commerce, âgé de vingt-trois ans, et
venant de Tours.
Il se montre, pendant son séjour Ici, dans
les établissements à la mode, avec celle
qu'il doit assassiner ; puis, sitôt le crime ac-
compli, il quitte Paris, le 8 mai, à nuit
heures du matin, par la gare du Nord, i e-
gagnant l'Angleterre, en passant par 'HoUo<'
logne-sur-Mer et Folkestone.
Martin, qui ne portait pour tout bagage
qu'une simpte valise de cuir rouge, arriva à
quatre heures de l'après-midi à Londies.
Isabelle d'Herblay était là. Elle trouva
son amant taquet, plus nerveux qu'à l'or-
dinaire.
— Hé ! quoi ! s'écria-t-elle, en remarquant
les blessures que Martin portait au visage et
aux mains, tu t'es donc battu ?
aux mains, fit l'assassin, visiblement troubLé
— Non,
et baissant la tête, en essayant de détourner
la conversation ; non. un simple accident,
en voyage. Un employé de chemin de 1er
qui, maladroitement, a refermé sur moi la
portière. et m'a fait les blessures que tu
vois.
Martin, dès ce moment, n'est pas tran-
quille : il va et vient, vire, tourne dans la
chambre, vingt-quatre heures durant, et, ii-
nalement, consulte les journaux. Le crime
est découvert ! il se rase complètement le
visage, achète un lorgnon fumé, reprend sa
valise et repart, en disant à Isabelle dHer-
blay qu'il se rend à Bruxelles.
Une fois dehors, il court à la gare Victo-
ria, y dépose sa précieuse valise et se met à
courir à travers Londres, dans le but de se
métamorphoser des pieds à la tête. Il troque
son chapeau melon contre un magnifique
haut de forme ; il s'achète du linge fin, plu-
sieurs vêtements complets, un pardessus
mastic, des bottines vernies, une canne à
pomme d'or. Il étale des. billets de banque,
paye royalement, « épate » quelques notoires
« marchands de viande » et, finalement, d s
parait.
Depuis, on ne sait guère où il a passé son
temps.
Enfin, pris !
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