Titre : Le Journal
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1917-01-26
Contributeur : Xau, Fernand (1852-1899). Directeur de publication
Contributeur : Letellier, Henri (1867-1960). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34473289x
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 26 janvier 1917 26 janvier 1917
Description : 1917/01/26 (N8888). 1917/01/26 (N8888).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG87 Collection numérique : BIPFPIG87
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7599188k
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-220
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/03/2014
100. Rue de Richelieu
PARIS
ÉDITION DE PARIS
CHARLES HUMBERT
Directeur
CINQ HEURES DU MATIN
Quatre pages — Cinq centimes
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Adresse télégraphique : NAUOLR-P.VRIS
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S'adresser a lu Société LE JOURNAL-PUBLICITE
11, Boulevard des italiens
CINQ HEURES DUMATIN
Vendredi 26 janvier 191 7. - N° 8888
ABOWEMRiN'TS Un an Six mois Trois mois
SEINE & S.-ET-OISE. 20 » 1050 5 50
FRANCE & COLONIES.. 24 » 12 » 6 »
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Les manuscrits non insérés ?is sont pas rendes
UNE GRANDE TACHE
L'ENFANT
du mobilisé
adroit à notre sauvegarde
Coup sur coup, de Paris, de province,
des mères de famille nous écrivent la
même lettre terrifiée : « Mon mari est
au front ; mes enfants travaillent dès
qu'ils sont en âge de gagner un salaire ;
mon fils — (quinze, dix-sept, dix-huit
uns), — qui s'était toujours très bien
conduit, très bien tenu, revient parfois
un peu g#s ; le samedi soir, à moitié
ivre ; les autres, les anciens, le forcent
à boire pour prouver qu'il est un
lwtrune. C'est affreux. Gomment défen-
dre mon petit ? Quelle sera la douleur
du père quand il reviendra. s'il re-
vient ! »
L'histoire est banale.
Je l'ai contée cent fois, jadis, dans les
campagnes que les imbéciles appe-
laient « antimilitaristes » parce qu'el-
les ont à peu près nettoyé la caserne de
l'alcoolisme, de la tuberculose, de l'ava-
rie et des brimades. J'ai montré cent
fois la funeste influence des mauvais
sujets sur les bons, le misérable respect
humain, la faiblesse, la triste émula-
tion qui soumettent les bons sujets au
mauvais.
« Tu n'es donc pas un homme ? Tu
ne veux pas t'enivrer, tu ne veux pas
traîner dans lés lieux de débauche, tu
ne veux pas empoisonner ton corps et
salir ton âme, tu n'es donc pas un
homme ? M Phrase abominable qui a
tué plus de petits Français, à la caserne
ou à l'atelier, qu'une grande guerre. Au-
jourd'hui, plus criminelle que jamais.
Les pères de famille mobilisés ris-
quent leur vie au front, accomplissent
des besognes nécessaires à l'intérieur,
loin de leur foyer. Ils ont laissé leurs
enfants à ia garde de la communauté
pour laquelle eux-mêmes se sacrifient.
Les travailleurs que leur âge ou leur
invalidité dispense de répondre à l'ap-
pel de la patrie ont d'autres devoirs ;
le premier, le plus sacré, n'est-il pas de
veiller sur les enfants des camarades
soldats ? de les préserver du mal ? Et
ils les corrompent!
La solidarité devant l'épreuve rappro-
che même des antagonistes. Nous avons
vu, ces dernières semaines, au cours
d'une des grèves qui troublaient la pro-
duction des obus, un patron soigner
pendant huit jours, dans la crèche en-
tretenue à ses frais, les enfants des ou-
vrières qui avaient abandonné son usine
et qui se coalisaient contre lui.
La solidarité entre travailleurs ne .de-
vrait-elle pas §e montrer aussi forte,
aussi 'noble ?
On éprouve un serrement de cœur
lorsqu'on entend, au milieu de la rue,
les injures qu'échangent des cochers,
des charretiers, des ouvriers quelcon-
ques, parce que l'on aura barré le pas-
sage, frôlé l'attelage ou heurté la charge
de l'autre ; des malédictions et des mots
obscènes retentissent, et même des me-
naces, et même des coups ; les adver-
saires s'éloignent-enfin ; mais ils se
retournent encore à cent pas de là pour
se lancer une dernière invective. Puis-
que, dans leurs organisations politiques,
ils s'appellent « camarades », ne pour-
raient-ils pas montrer une meilleure
camaraderie dans la vie de chaque
jour ?
Et c'est avec les enfants des camara-
des mobilisés que le devoir devient plus
strict, plus délicat
Les adolescents qui remplacent au
foyer le père, soldat, sont sous la garde
des ouvriers non soldats, au chantier, à
l'atelier, à l'usine. Leur seule présence
devrait rendre une dignité, une respec-
tabilité, un instinct paternel, aux plus
relâchés.
Cependant, c'est un fait que tous' les
passants constatent sur la voie publi-
que : les très jeunes charretiers em-
ployés maintenant par les entrepre-
neurs affectent encore plus dé dureté
avec les chevaux que leurs aînés ; ils
inventent des sévices nouveaux et raffi-
nés ; quand on s'approche d'eux pour
les reprendre, on s'aperçoit ordinaire-
ment qu'ils ont bu ; ils veulent « être
des hommes D, af/îrmer leur énergie vi-
rile par l'ivresse et par la cruauté. Pour-
quoi leurs collègues plus âgés ne com-
prennent-ils pas. le rôle de tuteurs que
les circonstances présentes nous impo-
sent à tous ?
Secourir et sauver les orphelins de
la guerre, dont les pères sont morts,
c'est une grande tâche ; mais c'est aussi
une grande tâche d'assister, d'instruire,
de sauvegarder les a orphelins provi-
soires » dont les pères ne sont qu'ab-
sents.
Au lieu de leur dire : a Tu n'es donc
pas un homme ? » pour les attirer au
mal, il faut leur apprendre' qu'on n'est
pas un homme quand on succombe à
la tentation ; qu'on n'est pas un homme
quand on roule au-dessous des bêtes ;
qu'on n'est pas un homme quand on ne
remplit pas son devoir envers la famil-
le, quand on ne rapporte pas son sa-
laire intact à la maison, quand on ne
garde pas la tenue qui convient à un
petit Français de la guerre, au fils d'un
soldai
S'ils remplissaient cette belle mission,
les travailleurs non mobilisés mérite-
raient bien de la patrie, et paieraient une
partie de leur dette aux combattants. A
force de prêcher, ils feraient aussi un
retour sur eux-mêmes et, pour, donner
le bon exemple avec autorité, ils se ren-
draient plus respectables.
La guerre aurait dû être la source de
disciplines nouvelles pour toute la na-
tion.
URBAIN GOHIER.
A LA 2" PAGE :
LE PROJET DE REVISION
DES EXEMPTES ET REFORMES
A LA 3* PAGE :
CE VUE LE PRESIDENT WILS01Y
ENTEND PAR « UNE PAIX SANS
VICTOIRE ». "-",
JUSTES RÉPARATIONS
LA GRÈCE
s'e:x:cuse
auprès des nations alliées
ATHÈNES, 25 janvier. — Le gouverne-
ment grec a adressé hier aux ministres
des puissances alliées à Athènes la let-
tre officielle suivante :
Conformément à la promesse qu'il a
donnée dans sa réponse à l'ultimatum
des gouvernements alliés en date du 28
décembre-B janvier, le gouvernement
royal présente des excuses formelles à
Leurs Excellences les ministres de
France, de Grande-Bretagne, d'Italie et
de Russie en raison des regrettables
événements du 18 novembre- 1er décem-
bre 1916. - Signé: ZALACOSTAS.
Le salut aux drapeaux ailiés
ATHÈNES, 25 janvier. — La cérémonie
solennelle du salut aux drapeaux alliés
sera célébrée samedi prochain devant le
Zappéion. Les ministres des puissances
alliées y assisteront en uniformp ainsi
que l'amiral commandant en chef des
forces navales et les représentants des
marines alliées.
he général Callaris destitué
ATHÈNES, 25 janvier. — Le Journal
officiel a publié hier matin un décret
royai aux termes duquel le général Cal-
laris, commaïiditïit lo 1er (ijrps- (t'arUl"ê"e;
est remplacé par le général Hennakis.
[La révocation du général Callaris avait été
demandée par les Allies parce que ceux-ci con-
sidéraient cet officier, qui commandait les trou-
pes d'Athènes, comme responsable des massa-
cres du 1er décembre.]
lie contrôle des Alliés
Athènes, 25 janvier (dép. part.). — On
sait que la réorganisation du contrôle de
la police, des postes et télégraphes ^t des
chemins de fer constitue un des points
essentiels de l'accord intervenu entre le
gouvernement grec et l'Entente à la suite
du dernier ultimatum. Les événements des
dernières semaines ont montré l'insuffi-
sance du système inauguré depuis le mois
de septembre. Le nouveau régime, très
strict, sera dirigé par le général français
Cauboné et le général anglais Philips.
La Chambre en Comité secret
La Chambre avait décidé de discuter hier
les interpellations de M. Abel Ferry « sur
la situation actuelle de notre corps expédi-
tionnaire en Macédoine, et les garanties de
sécurité accordées par le gouvernement
grec M, et de M. Abrami, «sur les événe-
ments des 1" et 2 décembre 1916 et sur
la politique du gouvernement en Grèce D.
1. Mais-au moment où elte- allait Aborder
le débat sur la Grèce, M. Deschanel lui a
fait connaître qu'il était saisi d'une de-
mande de formation de la Chambre en co-
mité secret.
De vives protestations se sont élevées de
divers côtés.
Le président a ajouté que cette demande
était signée de vingt membres, comme
l'exige le règlement.
— Les noms ? les noms ? a-t-on crié sur de
nombreux bancs1.
— Le règlement ne l'exige pas, a objecté le
président, mais si vous le voulez je vais les ap-
peler.
Le président a donc appelé les noms.
Les premiers étaient ceux de MM. d'Iriart
d'Etcheparrp, -,ebret, Stern, Lamy, Babaud-
Lacroze.
« Tous les partisans de la" himière n, s'est
écrié M. Emile Constant.
« Tous les membres de la famille », a
ajouté à M. Emile Fabre.
Comme le nombre réglementaire était
atteint, le président a mis aux voix la de-
mande de comité secret, qui a été adoptée
par 289 voix contre 187.
La séance du comité secret a été ouverte
à 14 h. 45, pour se terminer quatre heures
plus tard. (Elle sera; reprise aujourd'hui.
La première interpellation à discuter
était celle de M. Abrami.
ALPHONSE XIII MÉDIATEUR
MADRID, 25 janvier. — Le comte de
Romanonès assista, hier, au déjeuner offert
par le maire de Madrid à ses collègues des
capitales de provinces, réunis à Madrid
pour offrîr au roi les insignes de l'ordre
civil de Bienfaisance.
Le président du conseil prononça un
éloquent discours, au cours duquel il af-
firma, une fois' de plus, que l'Espagne,
quoi qu'il arrive, n'interviendra pas dans
la guerre européenne et continuera à
observer une loyale neutralité.
Parlant de la situation créée par la
guerre mondiale, le comte de Romanonès
formula l'espoir de voir un jour le roi
Alphonse XIII intervenir comme média-
teur, ajoutant « que cette intervention
n'aurait lieu qu'au moment opportun, pas
avant ?.
Guynemer abat son 27e avion
1 Heurteaux son 17e
OFFICIEL, 25 JANVIER, 14 HEURES.
Le lieutenant Guynemer a abattu, dans
la journée d'hier, un deuxième avion alle-
mand vers la gare de Chaulnes, ce qui porte
à vingt-sept le nombre des appareils en-
nemis détruits par ce pilote.
Le lieutenant Heurteaux, dans la même
journée,descendu son dix-septième avion
eiïnemi, qui s'est écrasé sur le sol, près de
Parvillers.
COMMUNIQUÉS OFFICIELS
25 JANVIER, 14 HEURES.
Les Allemands ont tenté sans
succès, après un vif bombarde-
ment, un coup de main sur nos
tranchées à trois kilomètres au
sud-est de BERRY-AU-BAC. L'enne-
mi a laissé des morts sur le terrain.
25 JANVIER, 23 HEURES.
Notre artillerie a exécuté des tirs
de destruction sur les - organisa-
tions et les batteries allemandes de
la région de BURES (nord-est de
LUNÉVILLE) et de THARTMANNSWIL-
LERKOPF. Lutte d'artillerie assez
vive en HAUTE-ALSACE.
Aucun événement important à
signaler sur le reste du front.
LE régime DES DEUX PLATS
LE GARÇON. — Il n'y aurait qu'un seul moyen: c'est que monsieur
revienne déjeuner une seconde fois. ossam DE LEANDHE.
PARIS PENDANT LA GUERRE
LA DISETTE DE CHARBON
sous la vague de froid
« En France, le temps va rester nuageux
et froid. » Ainsi s'exprime, avec une im-
placable sobriété de termes, le bulletin
météorologique d'hier. Cependant, la jour-
née avait été moins froide, dans la région
parisienne tout au moins. La température
s'était adoucie sensiblement pendant
l'après-midi. On avait supporté la veil ie
dix degrés au-dessous de zéro et, dans la
matinée d'hier, huit au-dessous; vers
2 heures de l'après-midi, le thermomètre
ne marquait plus que deux degrés au-
dessous de la glace.
Il n'en a pas été de même sur le littoral,
où le froid est descendu, en certaines lo-
calités, jusqu'à moins douze.
La chasse au charfcoa
Passionnante, comme toutes les chasses,
mais décevante parce que toujours infruc-
tueuse, la chasse au charbon est la seule
qui soit ouverte. Ces jours-ci, les Pari-
siens s'y livrent — bien malgré eux, d'ail-
leurs — avec une frénésie exaspérée par la
recrudescence du froid.
Nous y avons pris part hier et voici le
récit fidèle de nos aventures.
Chez le petit charbonnier
« Charbons. Bois: Vins. » Chaque fois
qu'apparaît à nos yeux l'enseigne classi-
que et alléchante, nous pénétrons dans la
boutique. Elle est généralement déserte et
c'est dans la pièce voisine qu'il faut aller
chercher le patron ou la patronne. Hé-
las'! partout la réponse, est la même: à
Montmartre, à Bellev^lle ou ailleurs. Du
bois, oui ; du vin, tant que vous en vou-
drez ; mais de charbon, point.
Rarissimes sont les petits charbon-
niers de quartier qui se déclarent en me-
sure de livrer quelques sacs de « tout
venant » ou ; de « criblé a. Le prix est
généralement de 14 fr. 50.
Chez les charbonniers en gros
Des affiches péremptoires défendent le
seuil des « bureaux de commandes » des
maisons de gros. « Nous ne prenons pas de
commandes » ; « Les livraisons sont sus-
pendues », déclarent-elles.
Généralement, les- clients lisent l'avis,
n'insistent pas, et s'en retournent mé-
lancoliquement. Mais nous, nous avons
hardiment franchi ces portes interdites.
lorsqu'elles n'étaient pas fermées à clef.
Peine perdue. C'est en vain que nous usons
d'une éloquence tour à tour persuasive,
humble, énergique. « Il n'y a plus rien ! »
scandent les employés, visiblement agacés
par une discussion qui se renouvelle du
matin au soir. Dans quelques maisons, on
nous conseille de « repasser dans une
dizaine de jours », mais on se refuse à
enregistrer notre commande bien que nous
offrions de payer d'avance.
Mais s'if est difficile de se procurer du
charbon, il est encore plus malaisé d'ap-
procher le patron d'une maison de charbons
en gros.
L'un d'eux que nous avons réussi à
joindre, un peu par , surprise, nous a dit :
« La crise ne 8 améliore pas parce qu'elle
ne peut s'améliorer actuellement. Si vous
tenez à renseigner exactement vos lecteurs,
dites-leur que nous payons en ce moment
l'excès d'optimisme des autorités, l'été der-
nier.
— Et les camions du ministère du ravi-
taillement ? demandons-nous.
- C'est une idée très ingénieuse, nous
répond notre interlocuteur. Pour notre
part, nous en avons vu six, hier, qui nous
ont apporté douze à quinze tonnes préle-
vées sur les stocks municipaux, mais c'est
bien peu 1 »
La vente au détail
Si l'on doit plaindre les Parisiens en
quête de quelques sacs de charbon, que
dire des pauvres gens à qui leurs moyens
limités ne permettent d'acheter qu' « au
détail » ? Ils sont astreints à une longue
et pénible attente sous la bise glacée pour
avoir dix kilogrammes, qu'ils paieront au
moins aussi cher qu'en gros et qu'ils em-
porteront, serrés contre leur poitrine,
comme un trésor.
Hier, nous avons passé un long moment
•
à contempler ce spectacle attristant, devant
le principal de ces magasins de détail. A
3 heures de l'après-midi, la « queue »
s'allongeait sur une longueur de soixante-
dix mètres. - -
L'attente était de deux heures et dix mi-
nutes (dédaratiÓns de deux infortunés,
clients qui avaient chronométré leur sup-!
plice). On ne délivrait plus cF anthracite.
Pour être juste, nous ajouterons que les
distributions gratuites opérées par les
soins des bureaux de bienfaisance conti-
nuent à s'opérer régulièrement. Il en est
de même des ventes à tarif réduit (4 fr. 75
le sac) effectuées aux mêmes bureaux.
Il faut s'en féliciter, puisque ce charbon
va aux plus déshérités. Mais les autres ?
Qu'on y songe enfin. Poil de CaroLte disait
que « tout le monde ne peut pas être or-
phelin ». Nous dirons que tout le monde
ne peut pas être indigent. mais que tout
le monde a froid ! — GEO LONDON.
L'attente devant les dépôts
Après lecture de divers rapports qui sont
parvenus à la préfecture de police, signa-
lant certains incidents. qui s'étaient pro-
duits devant les maisons de vente de
combustibles, le préfet de police a con-
voqué, hier soir, -les commissaires divi-
sionnaires et a longuement : conféré avec
eux.. • ¡.
A la suite de cet entretien, des instrne-j
tions très précises ont été transmfise's aux
officiers de paix de chaque arrondisse-
ment, qui devront veiller à ce que l'on
n'admette pas apprendre la file plus d'a-
cheteurs que la maison ne pourra'livrer
-de charbon. •• 1
Le patron ou gérant de chaque maison
devra déclarer, le matin, aux agents
chargés d'assurer l'ordre aux abords de
son établissement, la quantité de charbon
qu'il pourra livrer et établir ainsi le
nombre d'acheteurs à qui il pourra, donner
satisfaction.
Les agents n'admettront à la filé d'at-
tente que le nombre d'acheteurs qui pour-
ront être servis. On évitera ainsi l'attente
inutile.
Les stocks de la Vilîe
En conformité des décisions prises par-la
municipalité parisienne, une répartition
de charbon a été faite hier entre, les petits
marchands qui se sont adressés à la caser-
ne Napoléon, ainsi qu'il était indiqué.
! Dans la seule journée d'hier, plus de
çent mille francs de charbon ont ainsi été
délivrés, à raison de 115 francs la tonne
pour le tout-venant et de 135 francs pour
le criblé.
Ces quantités de charbon sont prélevées
sur le stock de précaution constitué par la
Ville et qui a déjà permis de subvenir, en
partie tout au moins, aux besoins de la
Compagnie du Gaz, des lavoirs, des blan-
chisseries, de certaines usines de guerre,
de la Compagnie d'Electricité, sans comp-
ter les distributions aux indigents et les
ventes à prix réduit consènties à certaines
catégories de citoyens.
Actuellement, en dépit de tous ces prélè-
vements, le stock de la Ville de Paris estv
encore d'environ 105,000 tonnes, lesquelles,
si on en use avec ménagement, permettront
d'attendre la fin de la saison très froide -
on l'espère du moins.
Au Parlement
La crise du charbon va soulever, au Par-
lement, deux importants débats.
MM. Poirrier, Strauss, Ranson, Barbier,
Steeg, etc., ont déposé, hier, sur le bureau
du Sénat, une interpellation sur jiappro-
visionnement en charbon des usines de
guerre, services publics et de la population
l'ivile de la Seine.
D'autre part, à la Chambre, la commis-
sion des mines a entendu M. Herriot sur
les mesures que le gouvernement compte
prendre pour remédier à la crise r du
charbon. f'
Elle a décidé d'intervenir dans l'inter-
pellation déposée par MM. Henry Paté,
Lauche et Ignace, sur les difficultés du
ravitaillement en charbon.
POUR LA DÉFENSE NATIONALE
MJAGINOT NOUS DIT CE QUE FERA
la commission de l'armée
':,
Le moment n'est pas encore venu où il ;
nous sera possible de dire au pays les
efforts \faits par les grands organes parle-
mentaires de défense nationale. Oh saura
cependant un jour avec quelle conscience
et quelle inlassable ténacité les deux com-
missions de l'armée, celle de la Chambre et
celle du Sénat, ont rempli leur devoir,
exercé leur mission, poussé le gouverne-
ment à agir en portant tour à tour son
attention sur les plus graves problèmes de
la guerre.
La récente élection de M. Maginot à la
présidence de la Commission de l'armée de
la Chambre marque la volonté de cette
grande commission de donner une impul-
sion plus grande à l'œuvre de défense na-
tionale à laquelle elle s'est associée. Aussi
nous a-t-il paru utile de connaître les pro-
jets du nouveau président. C'est ce que
nous lui avons demandé. Et voici les dé-
clarations intéressantes qu'il nous a faites:
Le contrôle aux armées
— Le contrôle aux armées, nous déclare
M. Maginot, continuera à fonctionner et il
doit être plus actif, non seulement parce
qu'il constitue une des prérogatives essen-
tielles des représentants du pays, mais
aussi dans l'intérêt même des chefs et des
soldats. Il ne s'inspire pas d'un sentiment
de défiance à l'égard de ceux qui ont la
lourde tâche de mener nos troupes à la
victoire, mais bien au contraire du désir
de les aider, de leur procurer tout ce dont
ils ont besoin, de leur donner les instru-
ments indispensables à la guerre actuelle.
Entre le Parlement et l'armée, une colla-
boration étroite est nécessaire. J'ai tout
lieu de penser que les généraux Lyautey
et Nivelle, que je me félicite de voir placés
à la tête de nos armées, comprendront la
nécessité de cette collaboration. Sans elle,
la tâche qui s'impose à tous les Français
deviendrait impossible.
» Le contrôle parlementaire est un de-
voir essentiel du Parlement. Nous assu-
mons la charge de veiller aux intérêts du
pays. Nous manquerions à nos obligations
les plus élémentaires si, en temps de
guerre, alors que le contrôle s'impose plus
que jamais, nous renoncions à ce que je
considère non comme une prérogative,
mais comme l'élémentaire devoir.
» Rien ne nous fera dévier de la route
que nous nous sommes tracée. Je ne de-
mande pour nos délégués aux armées ni
uniforme ni panache. Je veux seulement
que les autorités militaires facilitent leur
mission, réclamée d'ailleurs par les soldats
et aussi par un grand nombre de chefs.
Un programme
— Comment concevez-vous votre rôle de
président de la commission de l'armée ?
— Je prends cette présidence, R(MtS ré-
pond M. Maginot, après deux ans et demi
de guerre, pendant lesquels la commission,
vous le savez, a beaucoup travaillé. L'a-
venir rendra justice à notre persévérance
et à notre âpreté. Avec la commission
sénatoriale, nous avons fait effort pour
doter nos admirables poilus de l'outillage
indispensable. Notre tâche a été difficile.
Il a fallu, ici et là-bas, lutter contre la
routine et les préjugés et redresser pas
mal d'erreurs.
» Je puis vous affirmer que, sous ma
présidence, la commission continuera à
s'employer de toutes ses forces à pour-
suivre plus vigoureusement la guerre. Son
action ne se ralentira pas, je vous l'assure.
Elle s'accentuera.
» Ménager le plus possible nos effectifs.
épargner le sang précieux de la France en
développant le matériel de guerre dans
une lutte qui, il faut se décider à le com-
prendre, est avant tout une lutte de ma-
tériel, tel a été et tel est le programme de
la commission. Je pense que, pour le réali-
ser, il faut améliorer nos méthodes de
travail. C'est pourquoi j'ai décidé, d'accord
avec mes collègues, de grouper nos réu-
nions. Nous délibérerons tous les mercre-
dis et jeudis.' Le reste de la semaine, nos
délégués iront aux armées exeréer leur
mission de contrôle. Deux séances hebdo-
madaires permettent de faire de la besogne.
Nous sommes, en effet, décidés à mettre
fin aux interminables parlotes. Plus dite-
tion, moins de discours; voilà ma formule.
» Il faut coordonner le travail de nos
délégués aux armées. Dans ce but, j'ai fait
décider par la commission que. chaque
mois, les délégués se réuniraient* pour
échanger leurs observations, orienter leur
action, contrôler leurs propres rensei-
gnements..
» D'autre part, pour éviter toute perte,
de temps à la commission et au ministre
de la guerre qui, je le reconnais, supporte
un fardeau écrasant, je suis d'avis d'avoir
des auditions communes avec nos collègues
de la commission sénatoriale de rarmée.
Il faut ménager le temps précieux du
ministre. Pourquoi le contraindre à répéter;
à la commission de la Chambre ce qu 11 a
dit déjà à la commission du Sénat ? Cetta
procédure aurait cet avantage énorme
d'être rapide, de fournir aux deux grande
organismes de la défense nationale une
documentation unique, de permettre l'é-
change des travaux des rapporteurs de
façon que sur les questions capitales,
effectifs, armement, aviation, etc., une unité
de vues, une unité d'action se créent. Nous
éviterions ainsi des divergences d'opinions
reposant sur des documentations drffé-'
rentes. Nous mettrions fin à des contre
verses stériles. L'intérêt supérieur de la
patrie nous commande ces modestes sacri-
fices d'aipour-propre. »
Les exemptés et réformés
Abordant la question des exemptés et re.
formés, M. Maginot ne nous dissimule pas
qu'il est tenu à une certaine réserve car il
entend présider avec impartialité le débat
qui s'engage devant la commission ; cepen-
dant, sur notre insistance, il nous déclare s
— Nous n'avons rien refusé de ce qui
nous a été demandé pour la défense na-
tionale. Nous avons successivement ac-
cordé notre vote aux projets visant les
jeunes classes. Pour maintenir les effectifs
dont nous avons besoin, le gouvernement
nous demande un nouvel effort. Nous som-
mes disposés à le faire. Mais encore faut-il
que cet effort soit utile. Appeler des hom-
mes sous les drapeaux pour les diriger là
lendemain dans un hôpital, ce serait sup-
primer des concours indispensables à la vie
économique du pays et. désorganiser la dé-
fense nationale. C'est pourquoi nous ne
pouvions souscrire au projet que le gou-
vernement avait primitivement élaboré. -
» J'accepte d'entrer dans. les vues dij
général Lyautey, à la condition de ne sou-
mettre h la visite que les exemptés et ré-
formés d'avant guerre, à l'exception des
R. A. T., parmi lesquels il est difficile de
récupérer* des$oldats, Ce que nous deman-
dons, c'est un- projet qui, visant mointt
d'hommes, porte sur les catégories dont le
coefficient de récupération est le plus
élevé.
, » On ne peut refuser de donner des
hommes à la défense' nationale. encore
faut:-il que les hommes appelés, puissent
rendre de réels services et qu'on ne porte
pas une atteinte trop grande à la vie da
pays.
» Le principe même du projet sur les
réformés et exemptés, à mon avis, doit être
accepté, ne serait-ce qu'au point de vue Ie
la stricte équité. Ceux qui se battent de-
puis le début de la guerre, les hommes des
vieilles classes qui n'ont pu encore êtrè
renvoyés à l'arrière, seraient en droit da
trouver injuste et inadmissible que des
hommes souvent plus jeunes qu'eux, qu ùne
visite permettrait de reconnaître validas,
ne soient pas soumis à leur tour atf devoir
militaire. Il faut en finir avec ce débat
irritant, avec cette controverse que les hé-
sitations et les variations des gouvernants
ont alimentée. Il importe de mettre fin
le plus rapidement possible au trouble
causé par Fincertitude qui pèse depuis trop
longtemps sur le pays au sujet du projet
de révision des exemptés et réformés. »
A LA PORTION CONGRUE
H. HERRIOT LIMITE
le menu
des restaurants
M. Herriot, ministre du ravitaillement,
a réuni hier les représentants de l'ali-
mentation parisienne pour étudier avec
eux les moyens de restreindre le nombre
des plats dans les restaurants. Après une
assez longue discussion, l'accord s'est fait
sur les bases spécifiées par le décret sui-
vant, publié ce matin à 1 Officiel :
A partir du 15 février 1017, la consommation
de& denrées alimentaires dans les hôtels, pen-
sions, restaurants, buffets, wagons-restaurants,
auberges, cafés,, cafés-brasseries, cafés-restau-
rants, cercles, clubs, crémeries, coopératives de
consommation, cantines, buvettes, et tous éta-
blissements de consommation ouverts au public
est soumise à la réglementation ci-après:
ART. 1ER. — Il est interdit de servir, au même
repas, à la même personne, un nombre de plats
supérieur à deux, dont un seul de viande. En
dehors de ces deux plats, le consommateur
peut demander:
1° Un potage ou un hors-d'œuvre (les hors-.
d'œuvre étant limités à quatre sortes) ;
2° Un fromage ou un dessert (fruits. confi-
tures, compotes, marmelades, pâtisserie).
Les légumes cuits ou crus sont comptés pour
un plat quand ils sont consommés séparément,
c'est-à-dire quand ils ne servent pas de garniture.
Afln de réduire là consommation de la 'farine,
du lait, des œufs et du sucre, l'entremets est
supprimé.
Art. 2. — Le menu du jour ne devra pas com-
prendre pour chaque repas plus de 2 potages
et plus de 9 plats, savoir : 1 plat d'œufs au
choix, 2 plats de poisson, 3 plats de viande,
3 plats de lëgumes.
Les chefs, directeurs ou gérants des établis-
sements visés par le présent arrêté sont tenus
de mettre à la. disposition des commissaires de
police et des autres offlciiers de la force publi-
que, chaque jour, les menus à partir de dix
heures pmir le repas du déjeuner, et à partir de
dix-septheurcs pour le repas du dîner.
On espère, par cette mesure, éviter le
gaspillage inévitable qui se produit dans
es cuisines, lorsque les chefs sont obligés,
dans une seule matinée ou dans une seule
soirée, de Confectionner ces vingt ou trente
mets différents qui figurent à la carte de
presque tous nos restaurants ou bouillons.
C\ Ce qu'on veut surtout, nous disait une
des personnalités qui assistaient à la con-
férence, c'est apprendre au public à se dis-
cipliner, à envisager certaines restrictions
qui suffiront à ménager dans une certaine
mesure nos stocks. » ;
A L'ACADÉMIE FRANÇAISE
M. HENRI DE REGNIER
reçoit
M. de La Gorce 1
Par ERNEST LA JEUNESSE
L'immortalité se reprend à vivre.
Trois ans, presque jour pour jour, après
avoir accueilli le dernier récipiendaire,
M. Boutroux, l'Académie française re-f
cevait hier, avec sa pompe tradition-
nelle et ses tambours, l'un des trois élus
du 12 février 1914, M. Pierre de La
Gorce.
Assistance émouvante et émue pour
ce renouveau, pour cette séance pour
térité, d'histoire, de foi et d'espérance.
où l'historien du second Empire suc-
cède, presque mécaniquement, à fhiii".
torien de la monarchie de Juillet : des
officiers, des prélats, des diplomates,
des veuves de guerre, des blessés, des
académiciens de demain applaudirent
longuement les habits verts en action,
le directeur Henri de Régnier, lè chan-
celier René Doumic, le secrétaire per-
pétuel Etienne Lamy et le vcnérablâ
récipiendaire entre ses deux parraini,
le comte d'Haussoiiville et René Bazin,
épanoui.
Le discours de M. de La Gorce, d'une
rare élévation et d'un tour archaïque,
ressuscita son prédécesseur Thureau-
Dangin, dans les évocations religieuses
de Saint-Sulpice, dans la paix de la rue
Garancière, dans sa carrière au Conseil
d'Etat, au Français jde 1868 et dans ses
œuvres : une apologie de Louis-Phi-
lippe, un trait heureux à La Fayette,
« connétable de la démocratie », une
philippique contre la bourgeoisie abou-
tirent, dans des bravos, à uii juste éloge
de l'ancien secrétaire perpétuel pour
avoir « incarné la vertu ».
La réponse d'Henri de Régnier, haute
et nette, d'une ironie respectueuse et
d'une irâce inspirée, fut saluée avec
enthousiasme. Après s'être incliné de-
vant ce qu'il y avait « de fier et da
rare ) en Thureau-Dangin, il coûta
l'aventure merveilleuse du récipien-
daire septuagénaire ; bon fils et bon
PARIS
ÉDITION DE PARIS
CHARLES HUMBERT
Directeur
CINQ HEURES DU MATIN
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Les manuscrits non insérés ?is sont pas rendes
UNE GRANDE TACHE
L'ENFANT
du mobilisé
adroit à notre sauvegarde
Coup sur coup, de Paris, de province,
des mères de famille nous écrivent la
même lettre terrifiée : « Mon mari est
au front ; mes enfants travaillent dès
qu'ils sont en âge de gagner un salaire ;
mon fils — (quinze, dix-sept, dix-huit
uns), — qui s'était toujours très bien
conduit, très bien tenu, revient parfois
un peu g#s ; le samedi soir, à moitié
ivre ; les autres, les anciens, le forcent
à boire pour prouver qu'il est un
lwtrune. C'est affreux. Gomment défen-
dre mon petit ? Quelle sera la douleur
du père quand il reviendra. s'il re-
vient ! »
L'histoire est banale.
Je l'ai contée cent fois, jadis, dans les
campagnes que les imbéciles appe-
laient « antimilitaristes » parce qu'el-
les ont à peu près nettoyé la caserne de
l'alcoolisme, de la tuberculose, de l'ava-
rie et des brimades. J'ai montré cent
fois la funeste influence des mauvais
sujets sur les bons, le misérable respect
humain, la faiblesse, la triste émula-
tion qui soumettent les bons sujets au
mauvais.
« Tu n'es donc pas un homme ? Tu
ne veux pas t'enivrer, tu ne veux pas
traîner dans lés lieux de débauche, tu
ne veux pas empoisonner ton corps et
salir ton âme, tu n'es donc pas un
homme ? M Phrase abominable qui a
tué plus de petits Français, à la caserne
ou à l'atelier, qu'une grande guerre. Au-
jourd'hui, plus criminelle que jamais.
Les pères de famille mobilisés ris-
quent leur vie au front, accomplissent
des besognes nécessaires à l'intérieur,
loin de leur foyer. Ils ont laissé leurs
enfants à ia garde de la communauté
pour laquelle eux-mêmes se sacrifient.
Les travailleurs que leur âge ou leur
invalidité dispense de répondre à l'ap-
pel de la patrie ont d'autres devoirs ;
le premier, le plus sacré, n'est-il pas de
veiller sur les enfants des camarades
soldats ? de les préserver du mal ? Et
ils les corrompent!
La solidarité devant l'épreuve rappro-
che même des antagonistes. Nous avons
vu, ces dernières semaines, au cours
d'une des grèves qui troublaient la pro-
duction des obus, un patron soigner
pendant huit jours, dans la crèche en-
tretenue à ses frais, les enfants des ou-
vrières qui avaient abandonné son usine
et qui se coalisaient contre lui.
La solidarité entre travailleurs ne .de-
vrait-elle pas §e montrer aussi forte,
aussi 'noble ?
On éprouve un serrement de cœur
lorsqu'on entend, au milieu de la rue,
les injures qu'échangent des cochers,
des charretiers, des ouvriers quelcon-
ques, parce que l'on aura barré le pas-
sage, frôlé l'attelage ou heurté la charge
de l'autre ; des malédictions et des mots
obscènes retentissent, et même des me-
naces, et même des coups ; les adver-
saires s'éloignent-enfin ; mais ils se
retournent encore à cent pas de là pour
se lancer une dernière invective. Puis-
que, dans leurs organisations politiques,
ils s'appellent « camarades », ne pour-
raient-ils pas montrer une meilleure
camaraderie dans la vie de chaque
jour ?
Et c'est avec les enfants des camara-
des mobilisés que le devoir devient plus
strict, plus délicat
Les adolescents qui remplacent au
foyer le père, soldat, sont sous la garde
des ouvriers non soldats, au chantier, à
l'atelier, à l'usine. Leur seule présence
devrait rendre une dignité, une respec-
tabilité, un instinct paternel, aux plus
relâchés.
Cependant, c'est un fait que tous' les
passants constatent sur la voie publi-
que : les très jeunes charretiers em-
ployés maintenant par les entrepre-
neurs affectent encore plus dé dureté
avec les chevaux que leurs aînés ; ils
inventent des sévices nouveaux et raffi-
nés ; quand on s'approche d'eux pour
les reprendre, on s'aperçoit ordinaire-
ment qu'ils ont bu ; ils veulent « être
des hommes D, af/îrmer leur énergie vi-
rile par l'ivresse et par la cruauté. Pour-
quoi leurs collègues plus âgés ne com-
prennent-ils pas. le rôle de tuteurs que
les circonstances présentes nous impo-
sent à tous ?
Secourir et sauver les orphelins de
la guerre, dont les pères sont morts,
c'est une grande tâche ; mais c'est aussi
une grande tâche d'assister, d'instruire,
de sauvegarder les a orphelins provi-
soires » dont les pères ne sont qu'ab-
sents.
Au lieu de leur dire : a Tu n'es donc
pas un homme ? » pour les attirer au
mal, il faut leur apprendre' qu'on n'est
pas un homme quand on succombe à
la tentation ; qu'on n'est pas un homme
quand on roule au-dessous des bêtes ;
qu'on n'est pas un homme quand on ne
remplit pas son devoir envers la famil-
le, quand on ne rapporte pas son sa-
laire intact à la maison, quand on ne
garde pas la tenue qui convient à un
petit Français de la guerre, au fils d'un
soldai
S'ils remplissaient cette belle mission,
les travailleurs non mobilisés mérite-
raient bien de la patrie, et paieraient une
partie de leur dette aux combattants. A
force de prêcher, ils feraient aussi un
retour sur eux-mêmes et, pour, donner
le bon exemple avec autorité, ils se ren-
draient plus respectables.
La guerre aurait dû être la source de
disciplines nouvelles pour toute la na-
tion.
URBAIN GOHIER.
A LA 2" PAGE :
LE PROJET DE REVISION
DES EXEMPTES ET REFORMES
A LA 3* PAGE :
CE VUE LE PRESIDENT WILS01Y
ENTEND PAR « UNE PAIX SANS
VICTOIRE ». "-",
JUSTES RÉPARATIONS
LA GRÈCE
s'e:x:cuse
auprès des nations alliées
ATHÈNES, 25 janvier. — Le gouverne-
ment grec a adressé hier aux ministres
des puissances alliées à Athènes la let-
tre officielle suivante :
Conformément à la promesse qu'il a
donnée dans sa réponse à l'ultimatum
des gouvernements alliés en date du 28
décembre-B janvier, le gouvernement
royal présente des excuses formelles à
Leurs Excellences les ministres de
France, de Grande-Bretagne, d'Italie et
de Russie en raison des regrettables
événements du 18 novembre- 1er décem-
bre 1916. - Signé: ZALACOSTAS.
Le salut aux drapeaux ailiés
ATHÈNES, 25 janvier. — La cérémonie
solennelle du salut aux drapeaux alliés
sera célébrée samedi prochain devant le
Zappéion. Les ministres des puissances
alliées y assisteront en uniformp ainsi
que l'amiral commandant en chef des
forces navales et les représentants des
marines alliées.
he général Callaris destitué
ATHÈNES, 25 janvier. — Le Journal
officiel a publié hier matin un décret
royai aux termes duquel le général Cal-
laris, commaïiditïit lo 1er (ijrps- (t'arUl"ê"e;
est remplacé par le général Hennakis.
[La révocation du général Callaris avait été
demandée par les Allies parce que ceux-ci con-
sidéraient cet officier, qui commandait les trou-
pes d'Athènes, comme responsable des massa-
cres du 1er décembre.]
lie contrôle des Alliés
Athènes, 25 janvier (dép. part.). — On
sait que la réorganisation du contrôle de
la police, des postes et télégraphes ^t des
chemins de fer constitue un des points
essentiels de l'accord intervenu entre le
gouvernement grec et l'Entente à la suite
du dernier ultimatum. Les événements des
dernières semaines ont montré l'insuffi-
sance du système inauguré depuis le mois
de septembre. Le nouveau régime, très
strict, sera dirigé par le général français
Cauboné et le général anglais Philips.
La Chambre en Comité secret
La Chambre avait décidé de discuter hier
les interpellations de M. Abel Ferry « sur
la situation actuelle de notre corps expédi-
tionnaire en Macédoine, et les garanties de
sécurité accordées par le gouvernement
grec M, et de M. Abrami, «sur les événe-
ments des 1" et 2 décembre 1916 et sur
la politique du gouvernement en Grèce D.
1. Mais-au moment où elte- allait Aborder
le débat sur la Grèce, M. Deschanel lui a
fait connaître qu'il était saisi d'une de-
mande de formation de la Chambre en co-
mité secret.
De vives protestations se sont élevées de
divers côtés.
Le président a ajouté que cette demande
était signée de vingt membres, comme
l'exige le règlement.
— Les noms ? les noms ? a-t-on crié sur de
nombreux bancs1.
— Le règlement ne l'exige pas, a objecté le
président, mais si vous le voulez je vais les ap-
peler.
Le président a donc appelé les noms.
Les premiers étaient ceux de MM. d'Iriart
d'Etcheparrp, -,ebret, Stern, Lamy, Babaud-
Lacroze.
« Tous les partisans de la" himière n, s'est
écrié M. Emile Constant.
« Tous les membres de la famille », a
ajouté à M. Emile Fabre.
Comme le nombre réglementaire était
atteint, le président a mis aux voix la de-
mande de comité secret, qui a été adoptée
par 289 voix contre 187.
La séance du comité secret a été ouverte
à 14 h. 45, pour se terminer quatre heures
plus tard. (Elle sera; reprise aujourd'hui.
La première interpellation à discuter
était celle de M. Abrami.
ALPHONSE XIII MÉDIATEUR
MADRID, 25 janvier. — Le comte de
Romanonès assista, hier, au déjeuner offert
par le maire de Madrid à ses collègues des
capitales de provinces, réunis à Madrid
pour offrîr au roi les insignes de l'ordre
civil de Bienfaisance.
Le président du conseil prononça un
éloquent discours, au cours duquel il af-
firma, une fois' de plus, que l'Espagne,
quoi qu'il arrive, n'interviendra pas dans
la guerre européenne et continuera à
observer une loyale neutralité.
Parlant de la situation créée par la
guerre mondiale, le comte de Romanonès
formula l'espoir de voir un jour le roi
Alphonse XIII intervenir comme média-
teur, ajoutant « que cette intervention
n'aurait lieu qu'au moment opportun, pas
avant ?.
Guynemer abat son 27e avion
1 Heurteaux son 17e
OFFICIEL, 25 JANVIER, 14 HEURES.
Le lieutenant Guynemer a abattu, dans
la journée d'hier, un deuxième avion alle-
mand vers la gare de Chaulnes, ce qui porte
à vingt-sept le nombre des appareils en-
nemis détruits par ce pilote.
Le lieutenant Heurteaux, dans la même
journée,descendu son dix-septième avion
eiïnemi, qui s'est écrasé sur le sol, près de
Parvillers.
COMMUNIQUÉS OFFICIELS
25 JANVIER, 14 HEURES.
Les Allemands ont tenté sans
succès, après un vif bombarde-
ment, un coup de main sur nos
tranchées à trois kilomètres au
sud-est de BERRY-AU-BAC. L'enne-
mi a laissé des morts sur le terrain.
25 JANVIER, 23 HEURES.
Notre artillerie a exécuté des tirs
de destruction sur les - organisa-
tions et les batteries allemandes de
la région de BURES (nord-est de
LUNÉVILLE) et de THARTMANNSWIL-
LERKOPF. Lutte d'artillerie assez
vive en HAUTE-ALSACE.
Aucun événement important à
signaler sur le reste du front.
LE régime DES DEUX PLATS
LE GARÇON. — Il n'y aurait qu'un seul moyen: c'est que monsieur
revienne déjeuner une seconde fois. ossam DE LEANDHE.
PARIS PENDANT LA GUERRE
LA DISETTE DE CHARBON
sous la vague de froid
« En France, le temps va rester nuageux
et froid. » Ainsi s'exprime, avec une im-
placable sobriété de termes, le bulletin
météorologique d'hier. Cependant, la jour-
née avait été moins froide, dans la région
parisienne tout au moins. La température
s'était adoucie sensiblement pendant
l'après-midi. On avait supporté la veil ie
dix degrés au-dessous de zéro et, dans la
matinée d'hier, huit au-dessous; vers
2 heures de l'après-midi, le thermomètre
ne marquait plus que deux degrés au-
dessous de la glace.
Il n'en a pas été de même sur le littoral,
où le froid est descendu, en certaines lo-
calités, jusqu'à moins douze.
La chasse au charfcoa
Passionnante, comme toutes les chasses,
mais décevante parce que toujours infruc-
tueuse, la chasse au charbon est la seule
qui soit ouverte. Ces jours-ci, les Pari-
siens s'y livrent — bien malgré eux, d'ail-
leurs — avec une frénésie exaspérée par la
recrudescence du froid.
Nous y avons pris part hier et voici le
récit fidèle de nos aventures.
Chez le petit charbonnier
« Charbons. Bois: Vins. » Chaque fois
qu'apparaît à nos yeux l'enseigne classi-
que et alléchante, nous pénétrons dans la
boutique. Elle est généralement déserte et
c'est dans la pièce voisine qu'il faut aller
chercher le patron ou la patronne. Hé-
las'! partout la réponse, est la même: à
Montmartre, à Bellev^lle ou ailleurs. Du
bois, oui ; du vin, tant que vous en vou-
drez ; mais de charbon, point.
Rarissimes sont les petits charbon-
niers de quartier qui se déclarent en me-
sure de livrer quelques sacs de « tout
venant » ou ; de « criblé a. Le prix est
généralement de 14 fr. 50.
Chez les charbonniers en gros
Des affiches péremptoires défendent le
seuil des « bureaux de commandes » des
maisons de gros. « Nous ne prenons pas de
commandes » ; « Les livraisons sont sus-
pendues », déclarent-elles.
Généralement, les- clients lisent l'avis,
n'insistent pas, et s'en retournent mé-
lancoliquement. Mais nous, nous avons
hardiment franchi ces portes interdites.
lorsqu'elles n'étaient pas fermées à clef.
Peine perdue. C'est en vain que nous usons
d'une éloquence tour à tour persuasive,
humble, énergique. « Il n'y a plus rien ! »
scandent les employés, visiblement agacés
par une discussion qui se renouvelle du
matin au soir. Dans quelques maisons, on
nous conseille de « repasser dans une
dizaine de jours », mais on se refuse à
enregistrer notre commande bien que nous
offrions de payer d'avance.
Mais s'if est difficile de se procurer du
charbon, il est encore plus malaisé d'ap-
procher le patron d'une maison de charbons
en gros.
L'un d'eux que nous avons réussi à
joindre, un peu par , surprise, nous a dit :
« La crise ne 8 améliore pas parce qu'elle
ne peut s'améliorer actuellement. Si vous
tenez à renseigner exactement vos lecteurs,
dites-leur que nous payons en ce moment
l'excès d'optimisme des autorités, l'été der-
nier.
— Et les camions du ministère du ravi-
taillement ? demandons-nous.
- C'est une idée très ingénieuse, nous
répond notre interlocuteur. Pour notre
part, nous en avons vu six, hier, qui nous
ont apporté douze à quinze tonnes préle-
vées sur les stocks municipaux, mais c'est
bien peu 1 »
La vente au détail
Si l'on doit plaindre les Parisiens en
quête de quelques sacs de charbon, que
dire des pauvres gens à qui leurs moyens
limités ne permettent d'acheter qu' « au
détail » ? Ils sont astreints à une longue
et pénible attente sous la bise glacée pour
avoir dix kilogrammes, qu'ils paieront au
moins aussi cher qu'en gros et qu'ils em-
porteront, serrés contre leur poitrine,
comme un trésor.
Hier, nous avons passé un long moment
•
à contempler ce spectacle attristant, devant
le principal de ces magasins de détail. A
3 heures de l'après-midi, la « queue »
s'allongeait sur une longueur de soixante-
dix mètres. - -
L'attente était de deux heures et dix mi-
nutes (dédaratiÓns de deux infortunés,
clients qui avaient chronométré leur sup-!
plice). On ne délivrait plus cF anthracite.
Pour être juste, nous ajouterons que les
distributions gratuites opérées par les
soins des bureaux de bienfaisance conti-
nuent à s'opérer régulièrement. Il en est
de même des ventes à tarif réduit (4 fr. 75
le sac) effectuées aux mêmes bureaux.
Il faut s'en féliciter, puisque ce charbon
va aux plus déshérités. Mais les autres ?
Qu'on y songe enfin. Poil de CaroLte disait
que « tout le monde ne peut pas être or-
phelin ». Nous dirons que tout le monde
ne peut pas être indigent. mais que tout
le monde a froid ! — GEO LONDON.
L'attente devant les dépôts
Après lecture de divers rapports qui sont
parvenus à la préfecture de police, signa-
lant certains incidents. qui s'étaient pro-
duits devant les maisons de vente de
combustibles, le préfet de police a con-
voqué, hier soir, -les commissaires divi-
sionnaires et a longuement : conféré avec
eux.. • ¡.
A la suite de cet entretien, des instrne-j
tions très précises ont été transmfise's aux
officiers de paix de chaque arrondisse-
ment, qui devront veiller à ce que l'on
n'admette pas apprendre la file plus d'a-
cheteurs que la maison ne pourra'livrer
-de charbon. •• 1
Le patron ou gérant de chaque maison
devra déclarer, le matin, aux agents
chargés d'assurer l'ordre aux abords de
son établissement, la quantité de charbon
qu'il pourra livrer et établir ainsi le
nombre d'acheteurs à qui il pourra, donner
satisfaction.
Les agents n'admettront à la filé d'at-
tente que le nombre d'acheteurs qui pour-
ront être servis. On évitera ainsi l'attente
inutile.
Les stocks de la Vilîe
En conformité des décisions prises par-la
municipalité parisienne, une répartition
de charbon a été faite hier entre, les petits
marchands qui se sont adressés à la caser-
ne Napoléon, ainsi qu'il était indiqué.
! Dans la seule journée d'hier, plus de
çent mille francs de charbon ont ainsi été
délivrés, à raison de 115 francs la tonne
pour le tout-venant et de 135 francs pour
le criblé.
Ces quantités de charbon sont prélevées
sur le stock de précaution constitué par la
Ville et qui a déjà permis de subvenir, en
partie tout au moins, aux besoins de la
Compagnie du Gaz, des lavoirs, des blan-
chisseries, de certaines usines de guerre,
de la Compagnie d'Electricité, sans comp-
ter les distributions aux indigents et les
ventes à prix réduit consènties à certaines
catégories de citoyens.
Actuellement, en dépit de tous ces prélè-
vements, le stock de la Ville de Paris estv
encore d'environ 105,000 tonnes, lesquelles,
si on en use avec ménagement, permettront
d'attendre la fin de la saison très froide -
on l'espère du moins.
Au Parlement
La crise du charbon va soulever, au Par-
lement, deux importants débats.
MM. Poirrier, Strauss, Ranson, Barbier,
Steeg, etc., ont déposé, hier, sur le bureau
du Sénat, une interpellation sur jiappro-
visionnement en charbon des usines de
guerre, services publics et de la population
l'ivile de la Seine.
D'autre part, à la Chambre, la commis-
sion des mines a entendu M. Herriot sur
les mesures que le gouvernement compte
prendre pour remédier à la crise r du
charbon. f'
Elle a décidé d'intervenir dans l'inter-
pellation déposée par MM. Henry Paté,
Lauche et Ignace, sur les difficultés du
ravitaillement en charbon.
POUR LA DÉFENSE NATIONALE
MJAGINOT NOUS DIT CE QUE FERA
la commission de l'armée
':,
Le moment n'est pas encore venu où il ;
nous sera possible de dire au pays les
efforts \faits par les grands organes parle-
mentaires de défense nationale. Oh saura
cependant un jour avec quelle conscience
et quelle inlassable ténacité les deux com-
missions de l'armée, celle de la Chambre et
celle du Sénat, ont rempli leur devoir,
exercé leur mission, poussé le gouverne-
ment à agir en portant tour à tour son
attention sur les plus graves problèmes de
la guerre.
La récente élection de M. Maginot à la
présidence de la Commission de l'armée de
la Chambre marque la volonté de cette
grande commission de donner une impul-
sion plus grande à l'œuvre de défense na-
tionale à laquelle elle s'est associée. Aussi
nous a-t-il paru utile de connaître les pro-
jets du nouveau président. C'est ce que
nous lui avons demandé. Et voici les dé-
clarations intéressantes qu'il nous a faites:
Le contrôle aux armées
— Le contrôle aux armées, nous déclare
M. Maginot, continuera à fonctionner et il
doit être plus actif, non seulement parce
qu'il constitue une des prérogatives essen-
tielles des représentants du pays, mais
aussi dans l'intérêt même des chefs et des
soldats. Il ne s'inspire pas d'un sentiment
de défiance à l'égard de ceux qui ont la
lourde tâche de mener nos troupes à la
victoire, mais bien au contraire du désir
de les aider, de leur procurer tout ce dont
ils ont besoin, de leur donner les instru-
ments indispensables à la guerre actuelle.
Entre le Parlement et l'armée, une colla-
boration étroite est nécessaire. J'ai tout
lieu de penser que les généraux Lyautey
et Nivelle, que je me félicite de voir placés
à la tête de nos armées, comprendront la
nécessité de cette collaboration. Sans elle,
la tâche qui s'impose à tous les Français
deviendrait impossible.
» Le contrôle parlementaire est un de-
voir essentiel du Parlement. Nous assu-
mons la charge de veiller aux intérêts du
pays. Nous manquerions à nos obligations
les plus élémentaires si, en temps de
guerre, alors que le contrôle s'impose plus
que jamais, nous renoncions à ce que je
considère non comme une prérogative,
mais comme l'élémentaire devoir.
» Rien ne nous fera dévier de la route
que nous nous sommes tracée. Je ne de-
mande pour nos délégués aux armées ni
uniforme ni panache. Je veux seulement
que les autorités militaires facilitent leur
mission, réclamée d'ailleurs par les soldats
et aussi par un grand nombre de chefs.
Un programme
— Comment concevez-vous votre rôle de
président de la commission de l'armée ?
— Je prends cette présidence, R(MtS ré-
pond M. Maginot, après deux ans et demi
de guerre, pendant lesquels la commission,
vous le savez, a beaucoup travaillé. L'a-
venir rendra justice à notre persévérance
et à notre âpreté. Avec la commission
sénatoriale, nous avons fait effort pour
doter nos admirables poilus de l'outillage
indispensable. Notre tâche a été difficile.
Il a fallu, ici et là-bas, lutter contre la
routine et les préjugés et redresser pas
mal d'erreurs.
» Je puis vous affirmer que, sous ma
présidence, la commission continuera à
s'employer de toutes ses forces à pour-
suivre plus vigoureusement la guerre. Son
action ne se ralentira pas, je vous l'assure.
Elle s'accentuera.
» Ménager le plus possible nos effectifs.
épargner le sang précieux de la France en
développant le matériel de guerre dans
une lutte qui, il faut se décider à le com-
prendre, est avant tout une lutte de ma-
tériel, tel a été et tel est le programme de
la commission. Je pense que, pour le réali-
ser, il faut améliorer nos méthodes de
travail. C'est pourquoi j'ai décidé, d'accord
avec mes collègues, de grouper nos réu-
nions. Nous délibérerons tous les mercre-
dis et jeudis.' Le reste de la semaine, nos
délégués iront aux armées exeréer leur
mission de contrôle. Deux séances hebdo-
madaires permettent de faire de la besogne.
Nous sommes, en effet, décidés à mettre
fin aux interminables parlotes. Plus dite-
tion, moins de discours; voilà ma formule.
» Il faut coordonner le travail de nos
délégués aux armées. Dans ce but, j'ai fait
décider par la commission que. chaque
mois, les délégués se réuniraient* pour
échanger leurs observations, orienter leur
action, contrôler leurs propres rensei-
gnements..
» D'autre part, pour éviter toute perte,
de temps à la commission et au ministre
de la guerre qui, je le reconnais, supporte
un fardeau écrasant, je suis d'avis d'avoir
des auditions communes avec nos collègues
de la commission sénatoriale de rarmée.
Il faut ménager le temps précieux du
ministre. Pourquoi le contraindre à répéter;
à la commission de la Chambre ce qu 11 a
dit déjà à la commission du Sénat ? Cetta
procédure aurait cet avantage énorme
d'être rapide, de fournir aux deux grande
organismes de la défense nationale une
documentation unique, de permettre l'é-
change des travaux des rapporteurs de
façon que sur les questions capitales,
effectifs, armement, aviation, etc., une unité
de vues, une unité d'action se créent. Nous
éviterions ainsi des divergences d'opinions
reposant sur des documentations drffé-'
rentes. Nous mettrions fin à des contre
verses stériles. L'intérêt supérieur de la
patrie nous commande ces modestes sacri-
fices d'aipour-propre. »
Les exemptés et réformés
Abordant la question des exemptés et re.
formés, M. Maginot ne nous dissimule pas
qu'il est tenu à une certaine réserve car il
entend présider avec impartialité le débat
qui s'engage devant la commission ; cepen-
dant, sur notre insistance, il nous déclare s
— Nous n'avons rien refusé de ce qui
nous a été demandé pour la défense na-
tionale. Nous avons successivement ac-
cordé notre vote aux projets visant les
jeunes classes. Pour maintenir les effectifs
dont nous avons besoin, le gouvernement
nous demande un nouvel effort. Nous som-
mes disposés à le faire. Mais encore faut-il
que cet effort soit utile. Appeler des hom-
mes sous les drapeaux pour les diriger là
lendemain dans un hôpital, ce serait sup-
primer des concours indispensables à la vie
économique du pays et. désorganiser la dé-
fense nationale. C'est pourquoi nous ne
pouvions souscrire au projet que le gou-
vernement avait primitivement élaboré. -
» J'accepte d'entrer dans. les vues dij
général Lyautey, à la condition de ne sou-
mettre h la visite que les exemptés et ré-
formés d'avant guerre, à l'exception des
R. A. T., parmi lesquels il est difficile de
récupérer* des$oldats, Ce que nous deman-
dons, c'est un- projet qui, visant mointt
d'hommes, porte sur les catégories dont le
coefficient de récupération est le plus
élevé.
, » On ne peut refuser de donner des
hommes à la défense' nationale. encore
faut:-il que les hommes appelés, puissent
rendre de réels services et qu'on ne porte
pas une atteinte trop grande à la vie da
pays.
» Le principe même du projet sur les
réformés et exemptés, à mon avis, doit être
accepté, ne serait-ce qu'au point de vue Ie
la stricte équité. Ceux qui se battent de-
puis le début de la guerre, les hommes des
vieilles classes qui n'ont pu encore êtrè
renvoyés à l'arrière, seraient en droit da
trouver injuste et inadmissible que des
hommes souvent plus jeunes qu'eux, qu ùne
visite permettrait de reconnaître validas,
ne soient pas soumis à leur tour atf devoir
militaire. Il faut en finir avec ce débat
irritant, avec cette controverse que les hé-
sitations et les variations des gouvernants
ont alimentée. Il importe de mettre fin
le plus rapidement possible au trouble
causé par Fincertitude qui pèse depuis trop
longtemps sur le pays au sujet du projet
de révision des exemptés et réformés. »
A LA PORTION CONGRUE
H. HERRIOT LIMITE
le menu
des restaurants
M. Herriot, ministre du ravitaillement,
a réuni hier les représentants de l'ali-
mentation parisienne pour étudier avec
eux les moyens de restreindre le nombre
des plats dans les restaurants. Après une
assez longue discussion, l'accord s'est fait
sur les bases spécifiées par le décret sui-
vant, publié ce matin à 1 Officiel :
A partir du 15 février 1017, la consommation
de& denrées alimentaires dans les hôtels, pen-
sions, restaurants, buffets, wagons-restaurants,
auberges, cafés,, cafés-brasseries, cafés-restau-
rants, cercles, clubs, crémeries, coopératives de
consommation, cantines, buvettes, et tous éta-
blissements de consommation ouverts au public
est soumise à la réglementation ci-après:
ART. 1ER. — Il est interdit de servir, au même
repas, à la même personne, un nombre de plats
supérieur à deux, dont un seul de viande. En
dehors de ces deux plats, le consommateur
peut demander:
1° Un potage ou un hors-d'œuvre (les hors-.
d'œuvre étant limités à quatre sortes) ;
2° Un fromage ou un dessert (fruits. confi-
tures, compotes, marmelades, pâtisserie).
Les légumes cuits ou crus sont comptés pour
un plat quand ils sont consommés séparément,
c'est-à-dire quand ils ne servent pas de garniture.
Afln de réduire là consommation de la 'farine,
du lait, des œufs et du sucre, l'entremets est
supprimé.
Art. 2. — Le menu du jour ne devra pas com-
prendre pour chaque repas plus de 2 potages
et plus de 9 plats, savoir : 1 plat d'œufs au
choix, 2 plats de poisson, 3 plats de viande,
3 plats de lëgumes.
Les chefs, directeurs ou gérants des établis-
sements visés par le présent arrêté sont tenus
de mettre à la. disposition des commissaires de
police et des autres offlciiers de la force publi-
que, chaque jour, les menus à partir de dix
heures pmir le repas du déjeuner, et à partir de
dix-septheurcs pour le repas du dîner.
On espère, par cette mesure, éviter le
gaspillage inévitable qui se produit dans
es cuisines, lorsque les chefs sont obligés,
dans une seule matinée ou dans une seule
soirée, de Confectionner ces vingt ou trente
mets différents qui figurent à la carte de
presque tous nos restaurants ou bouillons.
C\ Ce qu'on veut surtout, nous disait une
des personnalités qui assistaient à la con-
férence, c'est apprendre au public à se dis-
cipliner, à envisager certaines restrictions
qui suffiront à ménager dans une certaine
mesure nos stocks. » ;
A L'ACADÉMIE FRANÇAISE
M. HENRI DE REGNIER
reçoit
M. de La Gorce 1
Par ERNEST LA JEUNESSE
L'immortalité se reprend à vivre.
Trois ans, presque jour pour jour, après
avoir accueilli le dernier récipiendaire,
M. Boutroux, l'Académie française re-f
cevait hier, avec sa pompe tradition-
nelle et ses tambours, l'un des trois élus
du 12 février 1914, M. Pierre de La
Gorce.
Assistance émouvante et émue pour
ce renouveau, pour cette séance pour
térité, d'histoire, de foi et d'espérance.
où l'historien du second Empire suc-
cède, presque mécaniquement, à fhiii".
torien de la monarchie de Juillet : des
officiers, des prélats, des diplomates,
des veuves de guerre, des blessés, des
académiciens de demain applaudirent
longuement les habits verts en action,
le directeur Henri de Régnier, lè chan-
celier René Doumic, le secrétaire per-
pétuel Etienne Lamy et le vcnérablâ
récipiendaire entre ses deux parraini,
le comte d'Haussoiiville et René Bazin,
épanoui.
Le discours de M. de La Gorce, d'une
rare élévation et d'un tour archaïque,
ressuscita son prédécesseur Thureau-
Dangin, dans les évocations religieuses
de Saint-Sulpice, dans la paix de la rue
Garancière, dans sa carrière au Conseil
d'Etat, au Français jde 1868 et dans ses
œuvres : une apologie de Louis-Phi-
lippe, un trait heureux à La Fayette,
« connétable de la démocratie », une
philippique contre la bourgeoisie abou-
tirent, dans des bravos, à uii juste éloge
de l'ancien secrétaire perpétuel pour
avoir « incarné la vertu ».
La réponse d'Henri de Régnier, haute
et nette, d'une ironie respectueuse et
d'une irâce inspirée, fut saluée avec
enthousiasme. Après s'être incliné de-
vant ce qu'il y avait « de fier et da
rare ) en Thureau-Dangin, il coûta
l'aventure merveilleuse du récipien-
daire septuagénaire ; bon fils et bon
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