Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1902-08-02
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 02 août 1902 02 août 1902
Description : 1902/08/02 (N11831). 1902/08/02 (N11831).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
,
CINO CENTIMES la Numéro.
PARIS & DEPARTEMENTS
Le NuWe,— CINQ CENTIMES
f F Y¥YE CTVPT t1
tt JM ifUt ! AlA DlmjJjJj
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NOS LEADERS
FIN DE COMÉDIE
Interviewé par un journal ami, M.
François Coppée a déclaré que ses amis
et lui éprouvaient le besoin de se repo-
ser un peu. C'est trop juste. Après avoir
créé le monde en six jours, le Dieu fan-
tochard auquel croit M. Coppée s'ac-
corda un dimanche de congé; après
leur manifestation si piteusement ratée
de la place de la Concorde, M. Coppée et
ses amis ont bien acquis le droit de faire
le lundi.
Au surplus, M. Coppée annonce que
ce repos sera préparatoire de nouvelles
démonstrations. Quant à la résistance
légale, il y croit médiocrement, il l'a-
voue; ce que ses coreligionnaires et lui
appellent de tous leurs vœux c'est le tu-
multe dans la rue, les bagarres, au be-
soin le sang versé.
M. Coppée, qui jadis outrageait les
vaincus de la Commune et accusait jésui-
tiquement les superbes « outrances » du
siège, les héros du Bourget, de Cham-
pigny, de Buzenval, d'avoir « réservé
leurs fusils pour la guerre civile » (1),
ne serait pas fâché de fomenter, pour
les beaux yeux des sœurs, une petite
guerre civile.
Son espoir sera déçu.
Les cléricaux ont pu se rendre comp-
te, dimanche dernier, do l'inanité de
leurs efforts pour soulever la popula-
tion. Soyez, sûrs que, s'ils annoncent
l'intention de prendre du repos — ce
qui est une manière de battre en re-
traite — c'est qu'ils sont parfaitement
convaincus de leur défaite. Rien à faire,
décidément, rien à tenter, rien à espé-
rer.
Le pays, en immense majorité, ap-
prouve la fermeture des écoles con-
gréganistes; et ceux qui n'approuvent
pas sont indifférents ; çà leur est égal ;
ils ne se dérangeront ni de leurs affai-
res ni de leurs plaisirs ; les Coppée, les
Lemaître, les Lerolle,. les Edmond Le-
pelletier, les de Mun, en un mot, les
cléricaux les plus notoires et les plus
actifs ont beau se démener, gesticuler,
brailler, ils ne font retourner la tête à
personne.
Ainsi, parfois, dans les fêtes foraines
des baraques ne réussissent point à ar-
rêter au passage les allants et venants.
La parade pourtant fait rage ; la peau
d'âne du tambour hurle sous les ba-
guettes, le trombone gémit, la clari-
nette pleure, le pitre s'épuise en calem-
bours, les demoiselles en maillot val-
sent éperdument, rien n'y fait : les
gens circulent, vont plus loin. Tel estle
sort de la parade cléricale. -
***
Et cependant toute la troupe donne.
C'est pitié, vraiment, de voir se tré-
mousser ces pauvres gens. Quelquefois,
je le reconnais, ils ont des trouvailles
amusantes. Ainsi, l'autre jour, M. Al-
phonse Humbert faisait cette découverte
assurément curieuse que crier : A bas
la calotte ! cela veut dire : « A bas l'o-
pinion de mon voisin ! *» ; et il partait
de là pour geindre à propos de « l'indé-
lébile esprit d'intolérance de notre
race ».
Il semble, pourtant, que le cri de
« A bas la calotte ! » soit parfaitement
clair — j'emploie à dessein ce mot pour
faire plaisir à M. Alphonse Humbert —
et dise très nettement ce qu'il veut
dire.
Pas besoin de chercher. A bas la ca-
lotte ! cela signtfie : dehors les congré-
ganistes qui empoisonnent l'âme de
l'enfance ! guerre à l'obscurantisme clé-
rical ! mort aux dogmes oppresseurs !
gloire à la pensée libre ! — Mais, quoi !
M. Alphonse Humbert a pris du service
dans l'armée ennemie ; il serait cruel à
nous de lui reprocher de défendre mal
la cause mauvaise qu'il a faite sienne.
Attendons la guerre civile espérée par
le doux et gluant M. Coppée; peut-être
verrons-nous alors reparaître le « Père
Duchène », mais bien entendu trans-
formé, nouvelle manière, avec des ti-
tres, par exemple, dans ce goût : « La
grande colère de Notre Saint-Père le
Pape contre ces j.-f. de républicains
qui persécutent les bonnes sœurs. »
Tenez ! j'ai là une lettre d'un brave
homme, maire d'une petite commune
d'Eure-et-Loir. Il m'expose ainsi la si-
tuation. Dans sa commune, deux écoles
de filles : l'une, communale, laïqUê =
l'autre congréganiste, soutenue, proté-
gée, subventionnée par tous les châte-
lains d'alentour.Des trois religieuses at-
(1) Ç esA UQ yers. Dans fais çe quç do~
tachées à cette école deux font la
classe, la troisième a pour mission —
et s'en acquitte, paraît-il, avec zèle —
d'aller de porte en porte, faisant une
active propagande antirépublicaine et
clabaudant contre l'institution laï-
que. 1 .1 1 7.
Aussi le conseil municipal, par 7 voix
contre 4 et une abstention, a-t-il pris
une délibération réclamant la fermeture
de cette école des sœurs. Est-ce là de la
persécution ? qui donc oserait le préten-
dre ? Non, c'est l'acte réfléchi, raisonné
de citoyens républicains qui, justement
inquiets du mal que peuvent faire leurs
ennemis installés au milieu d'eux, de-
mandent que ces ennemis soient. mis
dans l'impossibilité de nuire. Il y a, en
tout, dans cette commune, soixante
quatre petites filles suscsptibles d'aller
à l'école. Pourquoi deux écoles ? Une
suffirait parfaitement. Laquelle doit
rester? « Cela ne se demande pas »,
m'écrit le maire.
Mais, en vérité, ne peut-il pas paraî-
tre bien superflu de discuter? Niera-t-
on que les lois organisant la gratuité,
l'obligation et la laïcité de l'enseigne-
ment primaire aient été sanctionnées à
maintes reprises, de façon éclatante
par les votes du pays tout entier?
La France veut, cela est manifeste,
qu'une éducation laïque soit donnée à
ses enfants. Sur ce point, pas de doute,
et nous n'avons en ce moment affaire
qu'à un petit nombre de cléricaux qui
refusent de se soumettre à la loi.
Comme on l'a dit très justement, ce
n'est pas la liberté de l'enseignement
qui est en cause, c'est la liberté des con-
grégations. Eh bien ! le pays républi-
cain a entendu soumettre ces congréga-
tions à l'accomplissement de certaines
formalités, à l'observation de certaines
prescriptions, à l'obéissance aux lois,
pour tout dire en un mot. Ceux qui re-
fusent de se soumettre ne sont que des
rebelles, voilà toute l'affaire, et en vé-
rité, on comprend bien que le peuple
ne s'émeuve pas pour si peu de chose.
Pauvre parade cléricale! îe tambour
est crevé, le trombone se fêle, la cla-
rinette se bouche, le pitre est aphone,
les demoiselles en maillot n'en peuvent
plus, tout à l'heure un souffle va étein-
dre les derniers lampions. Fini de rire.
lté, missa est. M. Coppée, découragé, se
repose. Et il n'y a pas de raison pour
que nous ne continuions pas tout tran-
quillement de cultiver notre jardin.
Lucien Victor-Meunier.
IRONIE GENEVOISE
Le Journal de Genève n'est
pas contèat de la loi Waldeck-
Rousseau, ni de l'application
de cette loi, faite par le cabi-
net Combes. Notre confrère
suisse est de ceux qui récla-
ment : « Liherté ! Liberté! J)
en l'honneur des congrégations. Et les
modérés, ainsi que les nationalistes se ré-
jouissent de voir l'un des représentants les
plus autorisés de l'esprit calviniste défen-
dre la thèse chère aux papistes ortho-
doxes.
Si le Journal de Genève est si épris des
prétendus « droits » des catholiques cléri-
caux, pourquoi donc ne demande t-il pas
la réforme du système législatif de l'Hel-
vétie ?
Les porte soutanes, qui se plaignent si
fort du Parlement et du gouvernement
français, n'oseraient certes pas réclamer la
liberté — comme en Suisse.
A Genève, non seulement un curé ne
peut séjourner dans la ville ; mais un prê-
tre qui traverse la cité est étroitement sur-
veillé par la police ; et pour éviter des en-
nuis, le moine ou le curé de passage fait
bien de porter une valise ou un sac de nuit
à la main : ainsi, il indique son intention
de déguerpir au plus tôt.
Et c'est de Genève que nous viennent des
conseils de tolérance ! L'ironie est plai-
sante ; elle a une saveur toute locale. Le
genre d'esprit qu'elle indique rappelle à
ceux qui seraient capables de l'oublier, que
Genève donna naissance à ce ravissant hu-
moriste de Topfer,le dessinateur et le poète
de l'Histoire de M. Vieux-Bois.
Je me souviens du chapitre où M. Vieux-
Bois « noie un petit moine qu'il a décou-
vert ». Ni M. Vieux-Bois, ni les lecteurs, ni
la Suisse, n'ont jamais versé de larmes sur
ce petit moine.
Il appartenait au Journal de Genève de se
montrer plus paradoxal et plus déconcer-
tant que Topfer. - -
On fait des progrès à Genève. En France
aussi, quelques protestants se liguent avec
la Congrégation. N'en soyons pas surpris :
nous avons connu — nous connaissons —
des juifs antisémites. L'antiprotestantisme
devait faire naître, parmi les timides, des
protestants amis de l'Eglise catholique,
apostolique et romaine.
Ces défaillances confessionnelles ne nous
empêcheront pas de lutter contre toutes les
doctrines de guerre religieuse.
La Libre-Pensée est assez forte pour se
passer du concours des dévots du Temple
comme des dévots de l'Eglise.
CY
MŒURS U ANCIEN REGUWE"
(De notre correspondant particulier)
Berlin, 31 juillet.
Voici quelques détails sur la mise à la re-
traite d'office du receveur des finances Loh-
ning.
Ce haut fonctionnaire s'était fiancé avec une
jeune fille très estimée mais dont la père était
commis aux écritures à la préfecture. Il était
lui-même très honorable et ancien adjudant
retraité.
Le préfet a fait venir Lohniog et lui a dit
textuellement : « Nous n'avons rien à repro-
« cher à votre fiancée ; mais vous, receveur
« des finances, vous ne pouvez épouser la fille
« d'un ancien adjudant, pas plus qu'un colo-
« nel ne pourrait le faire. »
l Môme en Allemagne, il f aa$S (909 qui , $'iJ)'
I diftaaat* k M»W*j
LETTRE D'ITALIE
Le campanile de Saint-Marc. — Son
histoire. — La villa Borghèse. — Sa
vente. — Les inquiétudes. —
Le cardinal Ledochowski.
- Pape rouge, pape noir
et pape blanc. — La
hausse de la tem-
pérature.
(De notre correspondant spécial en Italie)
Rome, 30 juillet.
L'émotion provoquée dans toute l'Italie par
l'écroulement du clocher de Venise commence
à se calmer. On a pris de nombreuses mesures
pour donner un semblant de satisfaction à
l'opinion publique ; on a révoqué l'architecte,
qui n'avait pas su prévoir et prévenir le mal-
heur ; on a donné de l'avancement à ceux qui,
composant une commission chargée il y a trois
ans de constater l'état de solidité du campa-
nile, avaient exprimé quelques doutes. Le mi-
nistre de l'instruction publique, M. Nasi, s'est
rendu en personne à Venise pour contempler
les débris du célèbre monument, et enfin on
a promis de procéder dans le plus bref délai à
sa reconstruction.
Je ne voudrais pas porter atteinte à la vé-
nération unanime dont le campanile de Ve-
nise était entouré. Mais ce monument, com-
mencé, dit-on, en 888, était un peu comme le
couteau de Jeannoi ; il avait déjà subi pas
mal d'accidents qui avaient laissé en place
bien peu des premiers matériaux employés à
sa construction.
Sa reconstruction avait été décidée en 910 et
après avoir posé les fondations,on s'étaitarrêté
pendant 140 ans. Terminé vers 1150, il fut dé-
truit complètement, sans doute par un trem-
blement de terre, et réédifié en 1329.
Mais en 1489 un coup de foudre détruisit
toute la partie au-dessus du clocher et ce ne fut
qu'en 1512 que cette partie fut reconstruite et
qu'on plaça tout en haut l'ange de bois recou-
vert de cuivre doré.
En 1511, à la suite d'un tremblement de
terre, des lézardes se produisirent aux quatre
angles.
En 1548,1563, 1653, 1657. il fut frappé par
la foudre sans grands dommages, mais en
1765 la foudre occasionna plusieurs lézardes.
On le préserva par uu paratonnerre en 1776.
Néanmoins ce malheur, car c'en est un véri-
table, aura eu pour résultat de faire organiser
une plus sévère surveillance sur nos monu-
ments artistiques un peu négligés, on peut
l'avancer. On est tellement habitué à les voir
qu'on ne songe pas assez que l'insouciance ou
l'ignorance d'un architecte peuvent les faire
disparaître.
Autre alerte
On dirait que nous sommes à l'époque des
préoccupations artistiques. Notre villa Bor-
ghèse, qui est quelque chose comme le bois de
Boulogne des habitants de Rome, a failli être
vendue aux enchères.
Le gouvernement voulait l'acheter pour la
dédier au roi Humbert et en faire ensuite ca-
déau à la ville de Rome. Pour protéger les in-
térêts des ayants droits et s'assurer s'il ne se-
rait pas possible d'en tirer un prix plus élevé
que celui que l'Etat offrait, on l'a mise aux en-
chères sur la mise à prix de 5.247.676 fr. 92.
La propriété de la villa Borghèse est divisée
en trentièmes. 16130 appartiennent,à don Paolo
Borghèse, 2130 à chacun des cinq frères, Fran-
çois, Félix, Camille, Jean et Joseph et 1130
aux autres enfants.
Cette campagne est grevée d'une hypothèque
de 2.250.000 fr. au profit de la Caisse d'épar-
gne de Rome, prise au nom de don Paolo mais
garantie par les autres héritiers.
Quelques dettes de moindre importance grè-
vent encore la part de don Paolo.
L'Etat offrait 3 millions de la propriété. On
voit que lorsque la Caisse d'Epargne de Rome
aurait prélevé ce qui lui est dû et que chaque
héritier aurait reçu sa part, il ne resterait pas
grand chose aux autres créanciers de don Paul
Borghèse- Torlonia.
Aussi ce sont ces derniers qui ont exigé la
vente aux enchères, espérant obtenir un prix
plus élevé que celui qu'offrait l'Etat. De nou-
velles enchères sur baisse de mise à prix vont
avoir lieu; si elles ne donnent pas de résultat,
comme c'est probable, la villa Borghèse sera
adjugée à l'Etat pour 3 millions.
Dans ce cas ce serait une grosse perte pour
la famille Borghèse, l'Etat ayant le droit de
retenir sur le prix de vente la valeur des ser-
vitudes auxquelles est soumise la propriété,
entre autres celle d'être destinée à une prome-
nade publique, sans limitation de jours ni
d'heures. Cette servitude est évaluée au cahier
des charges à une somme de 842,361 fr.
S'il se présentait un acheteur, la famille
Borghèse y gagnerait quelque peu, mais la
population de Rome y perdrait beaucoup, car
la combinaison imaginée par le gouvernement
et dont nous attendons tous la réalisation avec
impatience serait retardée indéfiniment, peut-
être même devrait-elle être abandonnée.
Une mort
Au milieu de ces préoccupations, est passée
presque inaperçue la mort d'un homme qui a
eu son heure de célébrité, le cardinal Ledo-
chowski. A une certaine époque, lors de ses
démêlés célèbres avec le prince 1e Bismarck,
il était obligé de vivre absolument cloîtré dans
le Vatican, il n'osait sortir dans Rome et mét-
re le pied sur le sol italien de crainte d'être
textradé et livré à son ennemi.
Sa mortaété l'occasion d'un importantmou-
vement dans l'administration du Vatican. Il
était préfet de la Propagande, et en cette qua-
lité, était appelé le pape rouge. Le général das
jésuites est le pape noir. Léon XIII est natu-
rellement le pape blanc.
Le cardinal Ledochowski était un des der-
niers cardinaux créés par Pie IX. Il n'en reste
plus actuellement que deux. Il passait pour
très réactionnaire, fortement opposé aux idées
nouvelles.
Comme préfet de la Propagande, il était le
doyen des cardinaux de l'ordre des prêtres.
La chaleur
Agé de plus de 80 ans, il doit être plutôt
mort de vieillesse que de toute autre maladie.
Il ne serait cependant pas surprenant que les
grandes chaleurs de ces derniers jours aient
avancé sa .fin.
Le thermomètre est monté ici jusqu'à 35 de-
grés à l'ombre. A Milan, la chaleur a dépassé
tout ce qu'on pourrait imaginer.Le thermomè-
tre est allé jusqu'à 39" 3, hauteur qu'il n'avait
plus atteinte depuis 1830. Les cas d'insolation
et de congestion ont été très nombreux. —
Luigi Fossati, -
LE COURONNEMENT D'EDOUARD VII
Londres, 31 juillet.
La santé du roi fait des progrès rapides de-
puis lundi; l'état général ne laisse rien à dé-
sirer. La plaie se ferme d'une façon satisfai-
sante. Le roi peut maintenant se promener faci-
lement sur toute la longueur du pont sans
aide.
Les journaux publient actuellement un nou-
veau programme du couronnement. La céré-
monie à l'abbaye de Westminster a été consi-
dérablement réduite ; il est probable que sa
durée ne dépassera pas une heure et demie.
On a enfin compris la nécessité de prendre
-tçàtoe les précautions possibles pour éviter an
accident le jour du couronnement. Si, au der-
nier moment, les médecins s'opposent à ce que
le roi prenne part au cortège, on le fera en-
trer directement dans l'abbaye par la Deanery.
Il se pourrait même qu'il y dormit la nuit
précédente. Quelle triste chose que ces prépa-
ratifs pour l'aphothéose forcée d'un malade à
peine convalescent 1
Le roi est parti ce matin pour une croi-
sière.
Voir à la 3e page
les DERNIERES DEPECHES
de la nuit et
la REVUE DES JOURNAUX
du matin
EN TURQUIE
Constantinople, 31 juillet.
Les encaissements des arriérés des impôts
provinciaux ont permis de payer hier la pres-
que totalité des salaires de tous les militaires
et fonctionnaires de la capitale.
Le sultan a fait cadeau au grand vizir de
15,000 livres turques et au ministre des affai-
res étrangères du konak qui lui sert de rési-
dence à Pera.
En attendant les traites françaises Lorando
et Tubini n'ont pas encore été payées ; la Porte
cherche à en emprunter le montant pour
le restituer après l'encaissement des dettes Lo-
rando et Tubini envers le fisc, espérant que
l'ambassade voudra y prêter son concours
mais l'ambassade ne se prêtera pas à celle pe-
tite supercherie bien orientale.
LE PAPE ET LES CONGREGATIONS
M. de Cassagnac s'indigne chaque matin,
dans VAutorité, de ce que le pape ne soit pas
encore intervenu auprès du gouvernement en
faveur des Congrégations. Il perd son temps.
Le souverain pontife fera lui aussi, quand le
moment sera venu, sa petite manifestation. Il
aime trop les moines pour ne pas élever la voix
en leur faveur.
Il les aime même au point de préférer par-
fois leurs intérêts à ceux de l'Eglise tout en-
tière. En voulez vous un exemple ? Un inci-
dent significatif vient de se produire à l'occa-
sion des négociations engagées entre les Etats-
Unis et le Vatican au sujet des Philippines,
On sait que les religieux pullulent dans ces
iles : Augustins, Franciscains, Dominicains,
Récollets, s'y sont multipliés sous la domina-
tion espagnole. On conçoit facilement que les
Etats-Unis, en présence d'uue pareille situa-
tion, se soient émus.
Le cabinet de Washington justement préoc-
cupé, a demandé au pape le retrait de ces con-
grégations. En échange, et renonçant à une
politique séculaire, il faisait au souverain
pontife un certain nombre d'offres dont l'ac-
ceptation eût équivalu à un véritable con-
cordat.
Les Etats-Unis n'auraient pas institué un
budget des cultes, mais, sous prétexte de rache-
ter les biens des congrégations ils auraient
versé au Vatican une somme que l'on évaluait
à 150.000.000 de francs laquelle eût constitué le
fonLes Etats-Unis trouvaient que ce n'était
point trop cher acheter l'expulsion des moi-
nes des territoires conquis. Léon XIII a refusé
de mettre sa signature au bas de ce traité qui
eût pourtant assuré des avantages considéra-
bles à l'église catholique aux Philippines. 11 a
montré une fois de plus qu'il plaçait les inté-
rêts des congrégations avant ceux du clergé.
Remarquons, d'ailleurs, que son refus n'em-
pêchera cas au'un lour ou l'autre les moines
disparaissent des îles américaines. Le gouver-
nement de Washington a des idées très abso-
lues sur ce point, et rien ne l'arrêtera.
M. de Cassagnac a donc tort de se faire de
la bile, à propos de l'inaction apparente du
pape. Léon XIII agira, quand il le jugera op-
portun. Nous ne perdrons rien pour attendre.
- L. Armbruster.
———————————— ————————————
Idéal royaume pour le militarisme
(De notre correspondant particulier)
Athènes, 31 juillet.
Avant le départ du roi, les sous-officiers,
mécontents de l'avancement, se sont rendus,
in corpore, au château royal. Ils ont présenté
une requête avec tant d'insistance qu'on a vu
le moment où ils allaient refuser de partir. Il
fallut que le gouverneur de la ville les prit
par la douceur (c'est ainsi qu'on s'exprime
ici!)
Le roi est furieux de cet acte d'insubordina-
tion et va faire punir les meneurs,
Mais on annonce déjà que, de leur côté, les
officiers subalternes vont commencer une cam-
pagne en faveur de leurs intérêts mécon-
nus.
Doux pays!
LA POLICE PRUSSIENNE
(De notre correspondant particulier)
Berlin, 31 juillet.
Le samedi 12 juillet, Gustave Ackermann,
négociant, se rendait à la préfecture de police
pour y purger une condamnation de 3 jours de
prison. Ne le voyant pas revenir le--15, sa
femme fit demander à la préfecture de police
la cause de ce retard.
On lui fit tenir une vague réponse. Elle s'y
rendit elle-même le 18. On lui apprit alors que
« le bonhomme (sic) était devenu subitement
feu et qu'il était interné à Herzberge ».
La malheureuse se rendit à Herzberge où on
lui fit savoir que sou mari était mortel enterré.
Outre que l'histoire paraît louche, il semble
tout au moins bizarre qu'une femme apprenne
incidemment la folie subite et la mort de son
mari. — R. W.
CIVILISATION AMERICAINE
(De notre correspondant particulier)
New-York, 31 juillet.
On raffine les plaisirs du lynchage. Voici
quelques détails sur la dernière exécution au
Texas :
Le nègte incriminé eut les yeux brûlés, ses
vêtements furent égalemejit brûlés sur lui.
Son corps fut lardé de coups de couteaux, puis
le mari outragé mit le feu au bûcher sur le-
quel était placé le malheureux noir. L'infor-
tuné ne cessait de crier :« Achevez-moil Ache-
vez-moi 1 »
La foule trouva qu'il était mort trop vile et
qu'on l'avait torturé sans habileté.
Son supplice n'avait duré que 35 minutes 1
PAPE FUTUR
(De notre correspondant particulier)
Rome, 31 juillet.
Les journaux italiens, commentant la nomi-
nation du cardinal Gotti comme préfet géné-
ral de la propagande, disent que cette nomi-
nation équivaut presque à la désignation par
[ Léon XIU de saD successeur,
LES CONGREGATIONS
Le mouvement anticlérical. — Trai-
tement supprimé. — Les troubles
en Bretagne. — Incidents dans
les départements. — A
l'étranger.
La « permanence d'avant-garde républi-
caine » du 10e arrondissement de Paris (2' cir-
conscription) adresse de vives félicitations au
gouvernement de défense et d'action républi-
caines, qui a résolument fait appliquer la loi
du 1" juillet 1901 ; elle compte sur sa fermeté
pour contraindre au respect absolu des volon-
tés nationales les congrégations factieuses
ainsi que ceux qui les incitent à la résis-
tance.
L'avant-garde émet en outre le vœu qu'à ces
mesures préliminaires ne s'arrête pas l'oeuvre
de laïcisation intégrale, seule capable de don-
ner à la République la sérénité indispensable
à la solution des grands problèmes sociaux.
Le groupe socialiste de Romainville
Le bureau du groupe socialiste de Romain-
ville félicite le gouvernement pour son éner-
gie en face du refus des congrégations 1e se
soumettra à la loi, lui demande de ne tenir
compte des protestations que pour ce qu'elles
valent, signées comme elles le sont par des
ouvriers influencés par leurs patrons, par des
femmes trompées par le mensonge éternelle-
ment nécessaire à la cause cléricale et par des
enfants ; l'engage à poursuivre la laïcisation
afin de débarrasser les cerveaux des générations
futures de la superstition qu'ont laissée aux
présentes 18 siècle du christianisme. — Le bu-
reau du groupe : Dupé, Amie, Drieux, Savart
et Brice.
Le desservant de Levallois
Le traitement do l'abbé Bardinal, desservant
de la paroisse de Levallois-Perret, est sup-
primé en raison des manifestations auxquelles
cet ecclésiastique a pris part, lors de la ferme-
ture de l'école de Levallois.
La Bretagne s'apaise ?
Brest, 31 juillet.
Une détente s'est produite aujourd'hui à
Landerneau. Les sœurs quittent la ville, la
porte du pensionnat est ouverte.
A Sainl-Méen, la population continue la
garde autour de l'école ; les habitants sont ar-
més de bêches, de faux et de faucilles, ils veil-
lent sans relâche jour et nuit.
Il y eut une alerte ce matin, 650 personnes
sont accourues devant la maison des soeurs,
sept clairons ont sonné le rappel, l'abbé Ma-
nach a recommandé aux habitants de ne pas
user de violence; on ne sait pas comment
cela finira.
Trois journalistes déguisés en bouchers, ar-
rivés dans une charrette de boucher, ont pu
entrer dans le bourg, mais ont dû fuir devant
l'attitude menaçante des habitants.
Le procureur de la République a ouvert une
enquête sur les incidents de Sainl-Méen. MM.
Aubaud et Chansard, qui furent l'objet d'une
agression de la parties habitants, seront in-
terrogés par M. Martin, commissaire de po-
lice.
En province
Tours, 31 juillet.
Au cirque de la Touraine, une réunion or-
ganisée par M. Lerolle, député de Paris, avait
incité les républicains et les socialistes à con-
voquer leurs amis à 8 h. 1[2, pour faire une
contre-manifestation.
Au début de la réunion, les socialistes ont
tenté d9 pénétrer dans le cirque dont les por-
tes ont été enfoncées et les vitres brisées.
Les gendarmes à cheval, ayant à leur tête
le commandant et le capitaine, ont refoulé les
manifestants sur les trottoirs, ce qui a permis
à la réunion d'avoir lieu ; mais les socialistes,
au nombre de 300 environ, sont restés massés
aux abords du cirque, chantant l'Internationale
et poussant des cris divers. Quelques bagarres
se sont produites; des pierres ont été lancées
et deux agents de police ont été atteints.
A 10 h. 1{2, à la sortie du cirque, de nou-
veaux cris de : « A bas les cléricaux ! Vive la
loi! ) accueillent les personnes qui ont assisté
à la conférence et des rixes se produisent en-
tre manifestants d'opinions différentes. Les ré-
publicains se répandent ensuite à travers la
ville en chantant.
La gendarmerie a fait des patrouilles en ville
pour assurer l'ordre.
Lyon, 31 juillet.
Le commissaire de police de Cours, accom-
pagné de la gendarmerie de Thizy, s'est rendu
à Bourg-de-Thizy pour expulser les religeuses
de l'Enfant-Jésus. Malgré les protestations du
propriétaire de l'immeuble, les sœurs de l'école
ont été expulsées et les scellés ont été apposés.
Ils ont été brisés aussitôt.
Moulins, 31 juillet.
Les maires des localités où les religieuses en-
seignantes ont décidé de résister, ont reçu de
la préfecture une circulaire les invitant à exhor-
ter leurs administrés au calme et à leur expli-
quer que rien ne saurait arrêter lo gouverne-
ment dans l'oeuvre consistant à imposer à tous
le respect de la loi et ajoutant que, quelles que
puissent être ses décisions, le gouvernement
les exécutera.
Largentière, 31 juillet.
A Banne, hier, les religieuses de la Présen-
tation sont parties, sur l'ordre de la supé-
rieure.
Angers, 31 juillet.
D'après un ordre venant de la préfecture, le
conseil municipal de Grez-Neuville (Maine-et-
Loire) s'était réuni à l'effet de voter une som-
me pour la construction d'une école commu-
nale de jeunes filles.
Le conseil, à l'unanimité, a demandé la réin-
tégration des religieuses, et a refusé, égale-
ment à l'unani'milé,de voter une somme quel-
conque pour la construction demandée.
Audincourt, 31 juillet.
Le maire d'Audincourt a soumis au conseil
municipal une pétition revêtue de 836 signa-
tures demandant à l'assemblée municipale
d'intervenir auprès des pouvoirs publics en fa-
veur du maintien des sœurs de la charité dans
l'établissement d'instruction qu'elles occupent
à Audincourt.
Le conseil s'y est refusé ; il a décidé « qu'il
n'y a pas lieu d'intervenir auprès des pouvoirs
publics et, passant à l'ordre du jour sur la pé-
tition, invite les parents à faire inscrire leurs
enfants aux différentes écoles publiques com-
munales.a>
Rodez, 31 juillet.
A la suite des rapports fournis par le juge
de paix et la gendarmerie sur les incidents de
Camarès, une enquête a été ouverte par l'ad-
ministration préfectorale et l'autorité judi-
ciaire, M. Marie, préfet de l'Aveyron, M. Bé.
quignon, inspecteur d'académie, le procureur
de la République, le juge d'instruction et le
capitaine de gendarmerie de Saint-Affrique se
rendent aujourd'hui à Camarès. Quatre briga-
des de gendarmerie à cheval ont reçu l'ordre
de se trouver sur les lieux.
A la suite de l'échauffourée de Camarès, les
habitants d'une localité voisine, appelée Fayet,
croyant qu'on allait expulser les religieuses de
leur couvent, se sont entendus pour s'opposer
à l'expulsion. Cinquante d'entre eux, armés
chacun do sa faucille à moissonner, montent
la garde nuit et jour autour du couvent.
Perpignan, 31 juillet.
De nombreux moines et religieuses français
- passent depuis quelques jours en gare de Cer-
bère, allant en Espigne. L'exode est devenu
surtout important depuis l'application de la cir-
culaire de M. Combes.
A l'étranger
Bade, 31 juillet.
Les trois établissements d'enseign6ment su-
périeur du grand-duché protestent, quoi qu'on
en ait dit, contre l'autorisation accordée aux
couvents et vont remettre une adresse au
grand-duc à cet effet.
Madrid, 31 juillet.
M. Sagasta se propose de conférer avec les
ministres des affaires étrangères et de l'inté-
rieur au sujet des démarches à faire près du
Vatican pour la réforme du Concordat. Le
Vatican ne soulèvera pas de difficulté au sujet
de la réduction du haut clergé.
Le préfet de Gerona confirme que trois ca-
ristes français sont entrés en Espagne. Les
autres préfets de la frontière n'ont pas fourni
de renseignements à ce sujet.
Le gouvernement a donné l'ordre de veiller
à ce que tous les religieux entrant en Espagne
se soumettent aux lois espagnoles, sinon ils se-
ront expulsés.
MAUVAIS CHOIX
On nous rapporte - et nous avons peine à
le croire — que le préfet de la Seine aurait
désigné pour présider la distribution des prix
aux enfants des écoles laïques de Neuilly-sur-
Seine, qui aura lieu demain samedi, M. Ché..
rest, conseiller général nationaliste, membre
du comité de la «Patrie française », et M.
Suard, 2' adjoint au maire, qui fut candidat
de la « Patrie française », et qui la semaine
dernière, ceint de son écharpe, a protesté con-
tre l'expulsion des sœurs de la rue des Pois-
sonniers.
M. Suard a même signé une affiche qui
s'étale sur les murs de Neuilly, offensante pour
le gouvernement et le Président de la Répu-
blique. Ce n'est donc pas la présidence d'une
distribution de prix qu'aurait dû lui confier le
préfet.
Les républicains de Neuilly sont outrés de
cette désignation et espèrent qu'il suffira que
le ministre de l'intérieur soit informé pour
qu'on n'impose pas à leurs enfants de tels pré-
sidents
LE VOYAGE DE LA REINE D'ESPAGNE
La reine d'Espagne et l'infante Marie-Thé-
rèse avec une suite.de dix personnes, venant
de Saint-Sébastien en train spécial, sont arri-
vées hier matin à Hendaye et sont reparties
pour Paris par la Sud-Express.
MM. Dignac et Algier, commissaires spé-
ciaux, ont reçu la reine à sa descente de
wagon.
Les membres de la colonie espagnole étaient
à la gare avec le consul d'Espagoe.
La reine a versé d'abondantes larmes 8a
quittant son fils à Irun.
'Voir la suite dans notre DEUXIEME EDITIONà
DRAME CONJUGAL A ASNIÊRES
Discussion orageuse. — Trois coups
de couteau. — La criminelle se cons-
titua nriQnnniflPfl
Au chemin des Caboeufs, à Asnières, dans
une maisonnette, demeurait depuis plusieurs
années un couple de maraîchers. Le ménage
était loin d'être uni; de fréquentes discussions
avaient lieu, et les voisins s'étaient souvent
demandé de quelle façon ces querelles journa-
lières prendraient fin.
Pierre Sonnouïs, âgé de 29 ans, était un ex-
cellent ouvrier et ses primeurs étaient religieu-
sement soignées.
Mais Pierre Sonnouïs aimait un peu le ca-
baret : la femme écoutait volontiers les galants"
propos de ses voisins: d'où le désaccord entre
les époux.
Hier soir, Pierre Sonnouïs s'était laissé rete-
nir un peu plus que de-coutume au cabaret;
quand il rentra, Jeanne Sonnouïs le reçut avec
des injures et des propos acerbes. Le mari ré-
pondit sur le même ton. La discussion s'enve-
mina et, sur un mot plus vif, plus méchant du
mari, la femme, saisie d'une violente colère, ne
se connaissant plus, saisit un couteau de cui-
sine qui se trouvait sur la table et en frappa
Pierre Sonnouïs à la poitrine, en lui disant :
-' Crève donc ! tu me débarrasseras 1
Le malheureux s'affaissa dans une mare de
sang. La meurtrière, pour achever sa victime,
lui porta deux autres coups de son arme.
La chose était bien inutile, car, dès le pre-
mier coup, Sonnouïs avait été atteint mortel-
lement.
Son crime commis, Jeanne Sonnouïs, qui est
une belle jeune femme de 23 ans, se rendit au
commissariat de police de M. Kien, et se cons-
titua prisonnière.
M. Kien ne put que vérifier le crime, cons-
tater la mort do la victime, apposer les scellés
sur la demeure, et garder prisonnière Jeaune
Sonnouïs. Un juge d'instruction sera désigné
aujourd'hui pour instruire cette affaire.
Abbatncci et l'Enéide
Le général Pendezec, chef d'état-major général
de l'armée, a prononcé hier, à la distribution des
prix du lycée Bufîon, un fort intéressant discours,
qui a été très applaudi.
Après avoir montré que l'étude des lettres est
utile môme à ceux qui se destinent aux sciences,
ot tout particulièrement à ceux qui choisiront la
carrière militaire, le général Pendezec a conté la
curieuse anecdote suivante, que nous nous plai-
sons à reproduire : -
En 1796, les armées de Moreau et de Jour-
dan avaient été obligées de repasser le Rhin :
la défense de la tête de pont d'Huningue fut
confiée au général Abbattucci, dont le général
Foy disait que « dans un temps fécond en
« beaux talents et en beaux caractères, il n'a-
« vait pas vu un homme plus remarquable ni
« qui promit davantage à la France ». Abba-
tucci avait été prévenu que les Autrichiens
devaient l'attaquer de nuit avec des forces con-
sidérables. Après avoir pris ses dispositions,
il réunit ses officiers sous sa tente ; et là,
comme pour exalter le moral de ceux à qui il
allait demander les plus grands efforts, il leur
lut le livre X de l'Enéïde, la lutte d'gaée dans
le Latium et ses combats contre Lausus et
Mézence. Il en était au moment où ce dernier
cherche à venger sur Eaée la mort de son fils,
lorsqu'un coup de canon retentit. « C'est l'at-
taque! » s'écria Foy , mais, comme pour mieux
rappeler à chacun l'étendue de ses devoirs et
la nécessité de vaincre ou de mourir, Abba-
tucci continua :
« Ultor eris mecum ; aut, aperit si nulla
« viam vis, occumbes parler. »
« Tu seras avec moi te vengeur de Lausus ;
ou, si la fortune trahit nos efforts, tu succom-
beras. »
Il succomba, en effet, mais en plein triom-
phe ; et, avant de mourir, comme s'il n'avait
pas encore assez fait, l'esprit nourri des vi-
sions antiques, il voulut rédiger lui-même la
bulletin de sa victoire ; et dans un langago
digne des héros dont il lisait sans cesse les
exploits, il mentionna à peine sa blessure et
s'étendit longuement sur l'éloge de ses subor-
don nés.
Puisse, mes chen amis. cet egsuple dq
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NOS LEADERS
FIN DE COMÉDIE
Interviewé par un journal ami, M.
François Coppée a déclaré que ses amis
et lui éprouvaient le besoin de se repo-
ser un peu. C'est trop juste. Après avoir
créé le monde en six jours, le Dieu fan-
tochard auquel croit M. Coppée s'ac-
corda un dimanche de congé; après
leur manifestation si piteusement ratée
de la place de la Concorde, M. Coppée et
ses amis ont bien acquis le droit de faire
le lundi.
Au surplus, M. Coppée annonce que
ce repos sera préparatoire de nouvelles
démonstrations. Quant à la résistance
légale, il y croit médiocrement, il l'a-
voue; ce que ses coreligionnaires et lui
appellent de tous leurs vœux c'est le tu-
multe dans la rue, les bagarres, au be-
soin le sang versé.
M. Coppée, qui jadis outrageait les
vaincus de la Commune et accusait jésui-
tiquement les superbes « outrances » du
siège, les héros du Bourget, de Cham-
pigny, de Buzenval, d'avoir « réservé
leurs fusils pour la guerre civile » (1),
ne serait pas fâché de fomenter, pour
les beaux yeux des sœurs, une petite
guerre civile.
Son espoir sera déçu.
Les cléricaux ont pu se rendre comp-
te, dimanche dernier, do l'inanité de
leurs efforts pour soulever la popula-
tion. Soyez, sûrs que, s'ils annoncent
l'intention de prendre du repos — ce
qui est une manière de battre en re-
traite — c'est qu'ils sont parfaitement
convaincus de leur défaite. Rien à faire,
décidément, rien à tenter, rien à espé-
rer.
Le pays, en immense majorité, ap-
prouve la fermeture des écoles con-
gréganistes; et ceux qui n'approuvent
pas sont indifférents ; çà leur est égal ;
ils ne se dérangeront ni de leurs affai-
res ni de leurs plaisirs ; les Coppée, les
Lemaître, les Lerolle,. les Edmond Le-
pelletier, les de Mun, en un mot, les
cléricaux les plus notoires et les plus
actifs ont beau se démener, gesticuler,
brailler, ils ne font retourner la tête à
personne.
Ainsi, parfois, dans les fêtes foraines
des baraques ne réussissent point à ar-
rêter au passage les allants et venants.
La parade pourtant fait rage ; la peau
d'âne du tambour hurle sous les ba-
guettes, le trombone gémit, la clari-
nette pleure, le pitre s'épuise en calem-
bours, les demoiselles en maillot val-
sent éperdument, rien n'y fait : les
gens circulent, vont plus loin. Tel estle
sort de la parade cléricale. -
***
Et cependant toute la troupe donne.
C'est pitié, vraiment, de voir se tré-
mousser ces pauvres gens. Quelquefois,
je le reconnais, ils ont des trouvailles
amusantes. Ainsi, l'autre jour, M. Al-
phonse Humbert faisait cette découverte
assurément curieuse que crier : A bas
la calotte ! cela veut dire : « A bas l'o-
pinion de mon voisin ! *» ; et il partait
de là pour geindre à propos de « l'indé-
lébile esprit d'intolérance de notre
race ».
Il semble, pourtant, que le cri de
« A bas la calotte ! » soit parfaitement
clair — j'emploie à dessein ce mot pour
faire plaisir à M. Alphonse Humbert —
et dise très nettement ce qu'il veut
dire.
Pas besoin de chercher. A bas la ca-
lotte ! cela signtfie : dehors les congré-
ganistes qui empoisonnent l'âme de
l'enfance ! guerre à l'obscurantisme clé-
rical ! mort aux dogmes oppresseurs !
gloire à la pensée libre ! — Mais, quoi !
M. Alphonse Humbert a pris du service
dans l'armée ennemie ; il serait cruel à
nous de lui reprocher de défendre mal
la cause mauvaise qu'il a faite sienne.
Attendons la guerre civile espérée par
le doux et gluant M. Coppée; peut-être
verrons-nous alors reparaître le « Père
Duchène », mais bien entendu trans-
formé, nouvelle manière, avec des ti-
tres, par exemple, dans ce goût : « La
grande colère de Notre Saint-Père le
Pape contre ces j.-f. de républicains
qui persécutent les bonnes sœurs. »
Tenez ! j'ai là une lettre d'un brave
homme, maire d'une petite commune
d'Eure-et-Loir. Il m'expose ainsi la si-
tuation. Dans sa commune, deux écoles
de filles : l'une, communale, laïqUê =
l'autre congréganiste, soutenue, proté-
gée, subventionnée par tous les châte-
lains d'alentour.Des trois religieuses at-
(1) Ç esA UQ yers. Dans fais çe quç do~
tachées à cette école deux font la
classe, la troisième a pour mission —
et s'en acquitte, paraît-il, avec zèle —
d'aller de porte en porte, faisant une
active propagande antirépublicaine et
clabaudant contre l'institution laï-
que. 1 .1 1 7.
Aussi le conseil municipal, par 7 voix
contre 4 et une abstention, a-t-il pris
une délibération réclamant la fermeture
de cette école des sœurs. Est-ce là de la
persécution ? qui donc oserait le préten-
dre ? Non, c'est l'acte réfléchi, raisonné
de citoyens républicains qui, justement
inquiets du mal que peuvent faire leurs
ennemis installés au milieu d'eux, de-
mandent que ces ennemis soient. mis
dans l'impossibilité de nuire. Il y a, en
tout, dans cette commune, soixante
quatre petites filles suscsptibles d'aller
à l'école. Pourquoi deux écoles ? Une
suffirait parfaitement. Laquelle doit
rester? « Cela ne se demande pas »,
m'écrit le maire.
Mais, en vérité, ne peut-il pas paraî-
tre bien superflu de discuter? Niera-t-
on que les lois organisant la gratuité,
l'obligation et la laïcité de l'enseigne-
ment primaire aient été sanctionnées à
maintes reprises, de façon éclatante
par les votes du pays tout entier?
La France veut, cela est manifeste,
qu'une éducation laïque soit donnée à
ses enfants. Sur ce point, pas de doute,
et nous n'avons en ce moment affaire
qu'à un petit nombre de cléricaux qui
refusent de se soumettre à la loi.
Comme on l'a dit très justement, ce
n'est pas la liberté de l'enseignement
qui est en cause, c'est la liberté des con-
grégations. Eh bien ! le pays républi-
cain a entendu soumettre ces congréga-
tions à l'accomplissement de certaines
formalités, à l'observation de certaines
prescriptions, à l'obéissance aux lois,
pour tout dire en un mot. Ceux qui re-
fusent de se soumettre ne sont que des
rebelles, voilà toute l'affaire, et en vé-
rité, on comprend bien que le peuple
ne s'émeuve pas pour si peu de chose.
Pauvre parade cléricale! îe tambour
est crevé, le trombone se fêle, la cla-
rinette se bouche, le pitre est aphone,
les demoiselles en maillot n'en peuvent
plus, tout à l'heure un souffle va étein-
dre les derniers lampions. Fini de rire.
lté, missa est. M. Coppée, découragé, se
repose. Et il n'y a pas de raison pour
que nous ne continuions pas tout tran-
quillement de cultiver notre jardin.
Lucien Victor-Meunier.
IRONIE GENEVOISE
Le Journal de Genève n'est
pas contèat de la loi Waldeck-
Rousseau, ni de l'application
de cette loi, faite par le cabi-
net Combes. Notre confrère
suisse est de ceux qui récla-
ment : « Liherté ! Liberté! J)
en l'honneur des congrégations. Et les
modérés, ainsi que les nationalistes se ré-
jouissent de voir l'un des représentants les
plus autorisés de l'esprit calviniste défen-
dre la thèse chère aux papistes ortho-
doxes.
Si le Journal de Genève est si épris des
prétendus « droits » des catholiques cléri-
caux, pourquoi donc ne demande t-il pas
la réforme du système législatif de l'Hel-
vétie ?
Les porte soutanes, qui se plaignent si
fort du Parlement et du gouvernement
français, n'oseraient certes pas réclamer la
liberté — comme en Suisse.
A Genève, non seulement un curé ne
peut séjourner dans la ville ; mais un prê-
tre qui traverse la cité est étroitement sur-
veillé par la police ; et pour éviter des en-
nuis, le moine ou le curé de passage fait
bien de porter une valise ou un sac de nuit
à la main : ainsi, il indique son intention
de déguerpir au plus tôt.
Et c'est de Genève que nous viennent des
conseils de tolérance ! L'ironie est plai-
sante ; elle a une saveur toute locale. Le
genre d'esprit qu'elle indique rappelle à
ceux qui seraient capables de l'oublier, que
Genève donna naissance à ce ravissant hu-
moriste de Topfer,le dessinateur et le poète
de l'Histoire de M. Vieux-Bois.
Je me souviens du chapitre où M. Vieux-
Bois « noie un petit moine qu'il a décou-
vert ». Ni M. Vieux-Bois, ni les lecteurs, ni
la Suisse, n'ont jamais versé de larmes sur
ce petit moine.
Il appartenait au Journal de Genève de se
montrer plus paradoxal et plus déconcer-
tant que Topfer. - -
On fait des progrès à Genève. En France
aussi, quelques protestants se liguent avec
la Congrégation. N'en soyons pas surpris :
nous avons connu — nous connaissons —
des juifs antisémites. L'antiprotestantisme
devait faire naître, parmi les timides, des
protestants amis de l'Eglise catholique,
apostolique et romaine.
Ces défaillances confessionnelles ne nous
empêcheront pas de lutter contre toutes les
doctrines de guerre religieuse.
La Libre-Pensée est assez forte pour se
passer du concours des dévots du Temple
comme des dévots de l'Eglise.
CY
MŒURS U ANCIEN REGUWE"
(De notre correspondant particulier)
Berlin, 31 juillet.
Voici quelques détails sur la mise à la re-
traite d'office du receveur des finances Loh-
ning.
Ce haut fonctionnaire s'était fiancé avec une
jeune fille très estimée mais dont la père était
commis aux écritures à la préfecture. Il était
lui-même très honorable et ancien adjudant
retraité.
Le préfet a fait venir Lohniog et lui a dit
textuellement : « Nous n'avons rien à repro-
« cher à votre fiancée ; mais vous, receveur
« des finances, vous ne pouvez épouser la fille
« d'un ancien adjudant, pas plus qu'un colo-
« nel ne pourrait le faire. »
l Môme en Allemagne, il f aa$S (909 qui , $'iJ)'
I diftaaat* k M»W*j
LETTRE D'ITALIE
Le campanile de Saint-Marc. — Son
histoire. — La villa Borghèse. — Sa
vente. — Les inquiétudes. —
Le cardinal Ledochowski.
- Pape rouge, pape noir
et pape blanc. — La
hausse de la tem-
pérature.
(De notre correspondant spécial en Italie)
Rome, 30 juillet.
L'émotion provoquée dans toute l'Italie par
l'écroulement du clocher de Venise commence
à se calmer. On a pris de nombreuses mesures
pour donner un semblant de satisfaction à
l'opinion publique ; on a révoqué l'architecte,
qui n'avait pas su prévoir et prévenir le mal-
heur ; on a donné de l'avancement à ceux qui,
composant une commission chargée il y a trois
ans de constater l'état de solidité du campa-
nile, avaient exprimé quelques doutes. Le mi-
nistre de l'instruction publique, M. Nasi, s'est
rendu en personne à Venise pour contempler
les débris du célèbre monument, et enfin on
a promis de procéder dans le plus bref délai à
sa reconstruction.
Je ne voudrais pas porter atteinte à la vé-
nération unanime dont le campanile de Ve-
nise était entouré. Mais ce monument, com-
mencé, dit-on, en 888, était un peu comme le
couteau de Jeannoi ; il avait déjà subi pas
mal d'accidents qui avaient laissé en place
bien peu des premiers matériaux employés à
sa construction.
Sa reconstruction avait été décidée en 910 et
après avoir posé les fondations,on s'étaitarrêté
pendant 140 ans. Terminé vers 1150, il fut dé-
truit complètement, sans doute par un trem-
blement de terre, et réédifié en 1329.
Mais en 1489 un coup de foudre détruisit
toute la partie au-dessus du clocher et ce ne fut
qu'en 1512 que cette partie fut reconstruite et
qu'on plaça tout en haut l'ange de bois recou-
vert de cuivre doré.
En 1511, à la suite d'un tremblement de
terre, des lézardes se produisirent aux quatre
angles.
En 1548,1563, 1653, 1657. il fut frappé par
la foudre sans grands dommages, mais en
1765 la foudre occasionna plusieurs lézardes.
On le préserva par uu paratonnerre en 1776.
Néanmoins ce malheur, car c'en est un véri-
table, aura eu pour résultat de faire organiser
une plus sévère surveillance sur nos monu-
ments artistiques un peu négligés, on peut
l'avancer. On est tellement habitué à les voir
qu'on ne songe pas assez que l'insouciance ou
l'ignorance d'un architecte peuvent les faire
disparaître.
Autre alerte
On dirait que nous sommes à l'époque des
préoccupations artistiques. Notre villa Bor-
ghèse, qui est quelque chose comme le bois de
Boulogne des habitants de Rome, a failli être
vendue aux enchères.
Le gouvernement voulait l'acheter pour la
dédier au roi Humbert et en faire ensuite ca-
déau à la ville de Rome. Pour protéger les in-
térêts des ayants droits et s'assurer s'il ne se-
rait pas possible d'en tirer un prix plus élevé
que celui que l'Etat offrait, on l'a mise aux en-
chères sur la mise à prix de 5.247.676 fr. 92.
La propriété de la villa Borghèse est divisée
en trentièmes. 16130 appartiennent,à don Paolo
Borghèse, 2130 à chacun des cinq frères, Fran-
çois, Félix, Camille, Jean et Joseph et 1130
aux autres enfants.
Cette campagne est grevée d'une hypothèque
de 2.250.000 fr. au profit de la Caisse d'épar-
gne de Rome, prise au nom de don Paolo mais
garantie par les autres héritiers.
Quelques dettes de moindre importance grè-
vent encore la part de don Paolo.
L'Etat offrait 3 millions de la propriété. On
voit que lorsque la Caisse d'Epargne de Rome
aurait prélevé ce qui lui est dû et que chaque
héritier aurait reçu sa part, il ne resterait pas
grand chose aux autres créanciers de don Paul
Borghèse- Torlonia.
Aussi ce sont ces derniers qui ont exigé la
vente aux enchères, espérant obtenir un prix
plus élevé que celui qu'offrait l'Etat. De nou-
velles enchères sur baisse de mise à prix vont
avoir lieu; si elles ne donnent pas de résultat,
comme c'est probable, la villa Borghèse sera
adjugée à l'Etat pour 3 millions.
Dans ce cas ce serait une grosse perte pour
la famille Borghèse, l'Etat ayant le droit de
retenir sur le prix de vente la valeur des ser-
vitudes auxquelles est soumise la propriété,
entre autres celle d'être destinée à une prome-
nade publique, sans limitation de jours ni
d'heures. Cette servitude est évaluée au cahier
des charges à une somme de 842,361 fr.
S'il se présentait un acheteur, la famille
Borghèse y gagnerait quelque peu, mais la
population de Rome y perdrait beaucoup, car
la combinaison imaginée par le gouvernement
et dont nous attendons tous la réalisation avec
impatience serait retardée indéfiniment, peut-
être même devrait-elle être abandonnée.
Une mort
Au milieu de ces préoccupations, est passée
presque inaperçue la mort d'un homme qui a
eu son heure de célébrité, le cardinal Ledo-
chowski. A une certaine époque, lors de ses
démêlés célèbres avec le prince 1e Bismarck,
il était obligé de vivre absolument cloîtré dans
le Vatican, il n'osait sortir dans Rome et mét-
re le pied sur le sol italien de crainte d'être
textradé et livré à son ennemi.
Sa mortaété l'occasion d'un importantmou-
vement dans l'administration du Vatican. Il
était préfet de la Propagande, et en cette qua-
lité, était appelé le pape rouge. Le général das
jésuites est le pape noir. Léon XIII est natu-
rellement le pape blanc.
Le cardinal Ledochowski était un des der-
niers cardinaux créés par Pie IX. Il n'en reste
plus actuellement que deux. Il passait pour
très réactionnaire, fortement opposé aux idées
nouvelles.
Comme préfet de la Propagande, il était le
doyen des cardinaux de l'ordre des prêtres.
La chaleur
Agé de plus de 80 ans, il doit être plutôt
mort de vieillesse que de toute autre maladie.
Il ne serait cependant pas surprenant que les
grandes chaleurs de ces derniers jours aient
avancé sa .fin.
Le thermomètre est monté ici jusqu'à 35 de-
grés à l'ombre. A Milan, la chaleur a dépassé
tout ce qu'on pourrait imaginer.Le thermomè-
tre est allé jusqu'à 39" 3, hauteur qu'il n'avait
plus atteinte depuis 1830. Les cas d'insolation
et de congestion ont été très nombreux. —
Luigi Fossati, -
LE COURONNEMENT D'EDOUARD VII
Londres, 31 juillet.
La santé du roi fait des progrès rapides de-
puis lundi; l'état général ne laisse rien à dé-
sirer. La plaie se ferme d'une façon satisfai-
sante. Le roi peut maintenant se promener faci-
lement sur toute la longueur du pont sans
aide.
Les journaux publient actuellement un nou-
veau programme du couronnement. La céré-
monie à l'abbaye de Westminster a été consi-
dérablement réduite ; il est probable que sa
durée ne dépassera pas une heure et demie.
On a enfin compris la nécessité de prendre
-tçàtoe les précautions possibles pour éviter an
accident le jour du couronnement. Si, au der-
nier moment, les médecins s'opposent à ce que
le roi prenne part au cortège, on le fera en-
trer directement dans l'abbaye par la Deanery.
Il se pourrait même qu'il y dormit la nuit
précédente. Quelle triste chose que ces prépa-
ratifs pour l'aphothéose forcée d'un malade à
peine convalescent 1
Le roi est parti ce matin pour une croi-
sière.
Voir à la 3e page
les DERNIERES DEPECHES
de la nuit et
la REVUE DES JOURNAUX
du matin
EN TURQUIE
Constantinople, 31 juillet.
Les encaissements des arriérés des impôts
provinciaux ont permis de payer hier la pres-
que totalité des salaires de tous les militaires
et fonctionnaires de la capitale.
Le sultan a fait cadeau au grand vizir de
15,000 livres turques et au ministre des affai-
res étrangères du konak qui lui sert de rési-
dence à Pera.
En attendant les traites françaises Lorando
et Tubini n'ont pas encore été payées ; la Porte
cherche à en emprunter le montant pour
le restituer après l'encaissement des dettes Lo-
rando et Tubini envers le fisc, espérant que
l'ambassade voudra y prêter son concours
mais l'ambassade ne se prêtera pas à celle pe-
tite supercherie bien orientale.
LE PAPE ET LES CONGREGATIONS
M. de Cassagnac s'indigne chaque matin,
dans VAutorité, de ce que le pape ne soit pas
encore intervenu auprès du gouvernement en
faveur des Congrégations. Il perd son temps.
Le souverain pontife fera lui aussi, quand le
moment sera venu, sa petite manifestation. Il
aime trop les moines pour ne pas élever la voix
en leur faveur.
Il les aime même au point de préférer par-
fois leurs intérêts à ceux de l'Eglise tout en-
tière. En voulez vous un exemple ? Un inci-
dent significatif vient de se produire à l'occa-
sion des négociations engagées entre les Etats-
Unis et le Vatican au sujet des Philippines,
On sait que les religieux pullulent dans ces
iles : Augustins, Franciscains, Dominicains,
Récollets, s'y sont multipliés sous la domina-
tion espagnole. On conçoit facilement que les
Etats-Unis, en présence d'uue pareille situa-
tion, se soient émus.
Le cabinet de Washington justement préoc-
cupé, a demandé au pape le retrait de ces con-
grégations. En échange, et renonçant à une
politique séculaire, il faisait au souverain
pontife un certain nombre d'offres dont l'ac-
ceptation eût équivalu à un véritable con-
cordat.
Les Etats-Unis n'auraient pas institué un
budget des cultes, mais, sous prétexte de rache-
ter les biens des congrégations ils auraient
versé au Vatican une somme que l'on évaluait
à 150.000.000 de francs laquelle eût constitué le
fonLes Etats-Unis trouvaient que ce n'était
point trop cher acheter l'expulsion des moi-
nes des territoires conquis. Léon XIII a refusé
de mettre sa signature au bas de ce traité qui
eût pourtant assuré des avantages considéra-
bles à l'église catholique aux Philippines. 11 a
montré une fois de plus qu'il plaçait les inté-
rêts des congrégations avant ceux du clergé.
Remarquons, d'ailleurs, que son refus n'em-
pêchera cas au'un lour ou l'autre les moines
disparaissent des îles américaines. Le gouver-
nement de Washington a des idées très abso-
lues sur ce point, et rien ne l'arrêtera.
M. de Cassagnac a donc tort de se faire de
la bile, à propos de l'inaction apparente du
pape. Léon XIII agira, quand il le jugera op-
portun. Nous ne perdrons rien pour attendre.
- L. Armbruster.
———————————— ————————————
Idéal royaume pour le militarisme
(De notre correspondant particulier)
Athènes, 31 juillet.
Avant le départ du roi, les sous-officiers,
mécontents de l'avancement, se sont rendus,
in corpore, au château royal. Ils ont présenté
une requête avec tant d'insistance qu'on a vu
le moment où ils allaient refuser de partir. Il
fallut que le gouverneur de la ville les prit
par la douceur (c'est ainsi qu'on s'exprime
ici!)
Le roi est furieux de cet acte d'insubordina-
tion et va faire punir les meneurs,
Mais on annonce déjà que, de leur côté, les
officiers subalternes vont commencer une cam-
pagne en faveur de leurs intérêts mécon-
nus.
Doux pays!
LA POLICE PRUSSIENNE
(De notre correspondant particulier)
Berlin, 31 juillet.
Le samedi 12 juillet, Gustave Ackermann,
négociant, se rendait à la préfecture de police
pour y purger une condamnation de 3 jours de
prison. Ne le voyant pas revenir le--15, sa
femme fit demander à la préfecture de police
la cause de ce retard.
On lui fit tenir une vague réponse. Elle s'y
rendit elle-même le 18. On lui apprit alors que
« le bonhomme (sic) était devenu subitement
feu et qu'il était interné à Herzberge ».
La malheureuse se rendit à Herzberge où on
lui fit savoir que sou mari était mortel enterré.
Outre que l'histoire paraît louche, il semble
tout au moins bizarre qu'une femme apprenne
incidemment la folie subite et la mort de son
mari. — R. W.
CIVILISATION AMERICAINE
(De notre correspondant particulier)
New-York, 31 juillet.
On raffine les plaisirs du lynchage. Voici
quelques détails sur la dernière exécution au
Texas :
Le nègte incriminé eut les yeux brûlés, ses
vêtements furent égalemejit brûlés sur lui.
Son corps fut lardé de coups de couteaux, puis
le mari outragé mit le feu au bûcher sur le-
quel était placé le malheureux noir. L'infor-
tuné ne cessait de crier :« Achevez-moil Ache-
vez-moi 1 »
La foule trouva qu'il était mort trop vile et
qu'on l'avait torturé sans habileté.
Son supplice n'avait duré que 35 minutes 1
PAPE FUTUR
(De notre correspondant particulier)
Rome, 31 juillet.
Les journaux italiens, commentant la nomi-
nation du cardinal Gotti comme préfet géné-
ral de la propagande, disent que cette nomi-
nation équivaut presque à la désignation par
[ Léon XIU de saD successeur,
LES CONGREGATIONS
Le mouvement anticlérical. — Trai-
tement supprimé. — Les troubles
en Bretagne. — Incidents dans
les départements. — A
l'étranger.
La « permanence d'avant-garde républi-
caine » du 10e arrondissement de Paris (2' cir-
conscription) adresse de vives félicitations au
gouvernement de défense et d'action républi-
caines, qui a résolument fait appliquer la loi
du 1" juillet 1901 ; elle compte sur sa fermeté
pour contraindre au respect absolu des volon-
tés nationales les congrégations factieuses
ainsi que ceux qui les incitent à la résis-
tance.
L'avant-garde émet en outre le vœu qu'à ces
mesures préliminaires ne s'arrête pas l'oeuvre
de laïcisation intégrale, seule capable de don-
ner à la République la sérénité indispensable
à la solution des grands problèmes sociaux.
Le groupe socialiste de Romainville
Le bureau du groupe socialiste de Romain-
ville félicite le gouvernement pour son éner-
gie en face du refus des congrégations 1e se
soumettra à la loi, lui demande de ne tenir
compte des protestations que pour ce qu'elles
valent, signées comme elles le sont par des
ouvriers influencés par leurs patrons, par des
femmes trompées par le mensonge éternelle-
ment nécessaire à la cause cléricale et par des
enfants ; l'engage à poursuivre la laïcisation
afin de débarrasser les cerveaux des générations
futures de la superstition qu'ont laissée aux
présentes 18 siècle du christianisme. — Le bu-
reau du groupe : Dupé, Amie, Drieux, Savart
et Brice.
Le desservant de Levallois
Le traitement do l'abbé Bardinal, desservant
de la paroisse de Levallois-Perret, est sup-
primé en raison des manifestations auxquelles
cet ecclésiastique a pris part, lors de la ferme-
ture de l'école de Levallois.
La Bretagne s'apaise ?
Brest, 31 juillet.
Une détente s'est produite aujourd'hui à
Landerneau. Les sœurs quittent la ville, la
porte du pensionnat est ouverte.
A Sainl-Méen, la population continue la
garde autour de l'école ; les habitants sont ar-
més de bêches, de faux et de faucilles, ils veil-
lent sans relâche jour et nuit.
Il y eut une alerte ce matin, 650 personnes
sont accourues devant la maison des soeurs,
sept clairons ont sonné le rappel, l'abbé Ma-
nach a recommandé aux habitants de ne pas
user de violence; on ne sait pas comment
cela finira.
Trois journalistes déguisés en bouchers, ar-
rivés dans une charrette de boucher, ont pu
entrer dans le bourg, mais ont dû fuir devant
l'attitude menaçante des habitants.
Le procureur de la République a ouvert une
enquête sur les incidents de Sainl-Méen. MM.
Aubaud et Chansard, qui furent l'objet d'une
agression de la parties habitants, seront in-
terrogés par M. Martin, commissaire de po-
lice.
En province
Tours, 31 juillet.
Au cirque de la Touraine, une réunion or-
ganisée par M. Lerolle, député de Paris, avait
incité les républicains et les socialistes à con-
voquer leurs amis à 8 h. 1[2, pour faire une
contre-manifestation.
Au début de la réunion, les socialistes ont
tenté d9 pénétrer dans le cirque dont les por-
tes ont été enfoncées et les vitres brisées.
Les gendarmes à cheval, ayant à leur tête
le commandant et le capitaine, ont refoulé les
manifestants sur les trottoirs, ce qui a permis
à la réunion d'avoir lieu ; mais les socialistes,
au nombre de 300 environ, sont restés massés
aux abords du cirque, chantant l'Internationale
et poussant des cris divers. Quelques bagarres
se sont produites; des pierres ont été lancées
et deux agents de police ont été atteints.
A 10 h. 1{2, à la sortie du cirque, de nou-
veaux cris de : « A bas les cléricaux ! Vive la
loi! ) accueillent les personnes qui ont assisté
à la conférence et des rixes se produisent en-
tre manifestants d'opinions différentes. Les ré-
publicains se répandent ensuite à travers la
ville en chantant.
La gendarmerie a fait des patrouilles en ville
pour assurer l'ordre.
Lyon, 31 juillet.
Le commissaire de police de Cours, accom-
pagné de la gendarmerie de Thizy, s'est rendu
à Bourg-de-Thizy pour expulser les religeuses
de l'Enfant-Jésus. Malgré les protestations du
propriétaire de l'immeuble, les sœurs de l'école
ont été expulsées et les scellés ont été apposés.
Ils ont été brisés aussitôt.
Moulins, 31 juillet.
Les maires des localités où les religieuses en-
seignantes ont décidé de résister, ont reçu de
la préfecture une circulaire les invitant à exhor-
ter leurs administrés au calme et à leur expli-
quer que rien ne saurait arrêter lo gouverne-
ment dans l'oeuvre consistant à imposer à tous
le respect de la loi et ajoutant que, quelles que
puissent être ses décisions, le gouvernement
les exécutera.
Largentière, 31 juillet.
A Banne, hier, les religieuses de la Présen-
tation sont parties, sur l'ordre de la supé-
rieure.
Angers, 31 juillet.
D'après un ordre venant de la préfecture, le
conseil municipal de Grez-Neuville (Maine-et-
Loire) s'était réuni à l'effet de voter une som-
me pour la construction d'une école commu-
nale de jeunes filles.
Le conseil, à l'unanimité, a demandé la réin-
tégration des religieuses, et a refusé, égale-
ment à l'unani'milé,de voter une somme quel-
conque pour la construction demandée.
Audincourt, 31 juillet.
Le maire d'Audincourt a soumis au conseil
municipal une pétition revêtue de 836 signa-
tures demandant à l'assemblée municipale
d'intervenir auprès des pouvoirs publics en fa-
veur du maintien des sœurs de la charité dans
l'établissement d'instruction qu'elles occupent
à Audincourt.
Le conseil s'y est refusé ; il a décidé « qu'il
n'y a pas lieu d'intervenir auprès des pouvoirs
publics et, passant à l'ordre du jour sur la pé-
tition, invite les parents à faire inscrire leurs
enfants aux différentes écoles publiques com-
munales.a>
Rodez, 31 juillet.
A la suite des rapports fournis par le juge
de paix et la gendarmerie sur les incidents de
Camarès, une enquête a été ouverte par l'ad-
ministration préfectorale et l'autorité judi-
ciaire, M. Marie, préfet de l'Aveyron, M. Bé.
quignon, inspecteur d'académie, le procureur
de la République, le juge d'instruction et le
capitaine de gendarmerie de Saint-Affrique se
rendent aujourd'hui à Camarès. Quatre briga-
des de gendarmerie à cheval ont reçu l'ordre
de se trouver sur les lieux.
A la suite de l'échauffourée de Camarès, les
habitants d'une localité voisine, appelée Fayet,
croyant qu'on allait expulser les religieuses de
leur couvent, se sont entendus pour s'opposer
à l'expulsion. Cinquante d'entre eux, armés
chacun do sa faucille à moissonner, montent
la garde nuit et jour autour du couvent.
Perpignan, 31 juillet.
De nombreux moines et religieuses français
- passent depuis quelques jours en gare de Cer-
bère, allant en Espigne. L'exode est devenu
surtout important depuis l'application de la cir-
culaire de M. Combes.
A l'étranger
Bade, 31 juillet.
Les trois établissements d'enseign6ment su-
périeur du grand-duché protestent, quoi qu'on
en ait dit, contre l'autorisation accordée aux
couvents et vont remettre une adresse au
grand-duc à cet effet.
Madrid, 31 juillet.
M. Sagasta se propose de conférer avec les
ministres des affaires étrangères et de l'inté-
rieur au sujet des démarches à faire près du
Vatican pour la réforme du Concordat. Le
Vatican ne soulèvera pas de difficulté au sujet
de la réduction du haut clergé.
Le préfet de Gerona confirme que trois ca-
ristes français sont entrés en Espagne. Les
autres préfets de la frontière n'ont pas fourni
de renseignements à ce sujet.
Le gouvernement a donné l'ordre de veiller
à ce que tous les religieux entrant en Espagne
se soumettent aux lois espagnoles, sinon ils se-
ront expulsés.
MAUVAIS CHOIX
On nous rapporte - et nous avons peine à
le croire — que le préfet de la Seine aurait
désigné pour présider la distribution des prix
aux enfants des écoles laïques de Neuilly-sur-
Seine, qui aura lieu demain samedi, M. Ché..
rest, conseiller général nationaliste, membre
du comité de la «Patrie française », et M.
Suard, 2' adjoint au maire, qui fut candidat
de la « Patrie française », et qui la semaine
dernière, ceint de son écharpe, a protesté con-
tre l'expulsion des sœurs de la rue des Pois-
sonniers.
M. Suard a même signé une affiche qui
s'étale sur les murs de Neuilly, offensante pour
le gouvernement et le Président de la Répu-
blique. Ce n'est donc pas la présidence d'une
distribution de prix qu'aurait dû lui confier le
préfet.
Les républicains de Neuilly sont outrés de
cette désignation et espèrent qu'il suffira que
le ministre de l'intérieur soit informé pour
qu'on n'impose pas à leurs enfants de tels pré-
sidents
LE VOYAGE DE LA REINE D'ESPAGNE
La reine d'Espagne et l'infante Marie-Thé-
rèse avec une suite.de dix personnes, venant
de Saint-Sébastien en train spécial, sont arri-
vées hier matin à Hendaye et sont reparties
pour Paris par la Sud-Express.
MM. Dignac et Algier, commissaires spé-
ciaux, ont reçu la reine à sa descente de
wagon.
Les membres de la colonie espagnole étaient
à la gare avec le consul d'Espagoe.
La reine a versé d'abondantes larmes 8a
quittant son fils à Irun.
'Voir la suite dans notre DEUXIEME EDITIONà
DRAME CONJUGAL A ASNIÊRES
Discussion orageuse. — Trois coups
de couteau. — La criminelle se cons-
titua nriQnnniflPfl
Au chemin des Caboeufs, à Asnières, dans
une maisonnette, demeurait depuis plusieurs
années un couple de maraîchers. Le ménage
était loin d'être uni; de fréquentes discussions
avaient lieu, et les voisins s'étaient souvent
demandé de quelle façon ces querelles journa-
lières prendraient fin.
Pierre Sonnouïs, âgé de 29 ans, était un ex-
cellent ouvrier et ses primeurs étaient religieu-
sement soignées.
Mais Pierre Sonnouïs aimait un peu le ca-
baret : la femme écoutait volontiers les galants"
propos de ses voisins: d'où le désaccord entre
les époux.
Hier soir, Pierre Sonnouïs s'était laissé rete-
nir un peu plus que de-coutume au cabaret;
quand il rentra, Jeanne Sonnouïs le reçut avec
des injures et des propos acerbes. Le mari ré-
pondit sur le même ton. La discussion s'enve-
mina et, sur un mot plus vif, plus méchant du
mari, la femme, saisie d'une violente colère, ne
se connaissant plus, saisit un couteau de cui-
sine qui se trouvait sur la table et en frappa
Pierre Sonnouïs à la poitrine, en lui disant :
-' Crève donc ! tu me débarrasseras 1
Le malheureux s'affaissa dans une mare de
sang. La meurtrière, pour achever sa victime,
lui porta deux autres coups de son arme.
La chose était bien inutile, car, dès le pre-
mier coup, Sonnouïs avait été atteint mortel-
lement.
Son crime commis, Jeanne Sonnouïs, qui est
une belle jeune femme de 23 ans, se rendit au
commissariat de police de M. Kien, et se cons-
titua prisonnière.
M. Kien ne put que vérifier le crime, cons-
tater la mort do la victime, apposer les scellés
sur la demeure, et garder prisonnière Jeaune
Sonnouïs. Un juge d'instruction sera désigné
aujourd'hui pour instruire cette affaire.
Abbatncci et l'Enéide
Le général Pendezec, chef d'état-major général
de l'armée, a prononcé hier, à la distribution des
prix du lycée Bufîon, un fort intéressant discours,
qui a été très applaudi.
Après avoir montré que l'étude des lettres est
utile môme à ceux qui se destinent aux sciences,
ot tout particulièrement à ceux qui choisiront la
carrière militaire, le général Pendezec a conté la
curieuse anecdote suivante, que nous nous plai-
sons à reproduire : -
En 1796, les armées de Moreau et de Jour-
dan avaient été obligées de repasser le Rhin :
la défense de la tête de pont d'Huningue fut
confiée au général Abbattucci, dont le général
Foy disait que « dans un temps fécond en
« beaux talents et en beaux caractères, il n'a-
« vait pas vu un homme plus remarquable ni
« qui promit davantage à la France ». Abba-
tucci avait été prévenu que les Autrichiens
devaient l'attaquer de nuit avec des forces con-
sidérables. Après avoir pris ses dispositions,
il réunit ses officiers sous sa tente ; et là,
comme pour exalter le moral de ceux à qui il
allait demander les plus grands efforts, il leur
lut le livre X de l'Enéïde, la lutte d'gaée dans
le Latium et ses combats contre Lausus et
Mézence. Il en était au moment où ce dernier
cherche à venger sur Eaée la mort de son fils,
lorsqu'un coup de canon retentit. « C'est l'at-
taque! » s'écria Foy , mais, comme pour mieux
rappeler à chacun l'étendue de ses devoirs et
la nécessité de vaincre ou de mourir, Abba-
tucci continua :
« Ultor eris mecum ; aut, aperit si nulla
« viam vis, occumbes parler. »
« Tu seras avec moi te vengeur de Lausus ;
ou, si la fortune trahit nos efforts, tu succom-
beras. »
Il succomba, en effet, mais en plein triom-
phe ; et, avant de mourir, comme s'il n'avait
pas encore assez fait, l'esprit nourri des vi-
sions antiques, il voulut rédiger lui-même la
bulletin de sa victoire ; et dans un langago
digne des héros dont il lisait sans cesse les
exploits, il mentionna à peine sa blessure et
s'étendit longuement sur l'éloge de ses subor-
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