Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1889-11-01
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32757974m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 68249 Nombre total de vues : 68249
Description : 01 novembre 1889 01 novembre 1889
Description : 1889/11/01 (A18,N6498). 1889/11/01 (A18,N6498).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7560955b
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
Dix-huitième année"—K* 6,199 OINQ ContlIUGS - Paris et,n'parlements --'CINQ Centimes VENDREDI 1er novembre 1899
':'- E
JOURNAL REPUBLICAIN.
rédaction .1
it48, Rue & £ oxrtxn £ urt$&
t,. PARIS
* -
DIRECTEUR POLITIQUE
A. •• ÉDOUARD PORT A
PRIX OF L'ABONHEIERT > l
Paris. Trois mois, 6L; SiiBsis, lit; ba, 201
Départements — 7L, — 12 f.; — 241
Union Postale - 9L; — 16 L; — 32 L
§*$abonnement» partent de* lm et 15 de chaqu moi&
Adresse télégraphique : XIX. SIÈCLE — PARIS ;
ADMINISTRATION -
J.4a, Rue ikÊontmsirtrd
PARIS
RÉGISSEURS D'ANNONCES
IIIÍ; LAGRANGE, CERF «t G^T
6, place de la Bourte, S
PRIX DE L'ABONNEMENT : -
Farts. Inuam, 6L; SilIIOiI, 11 L; liai, 20t.
Départements — 71; — 42 f.; — 24 t-
Union Postale - gt; 16L; — 32 t
Les abonnements partel" et 15 de chaque moit
Adresse télégraphique : XIX. SJËCLB — PABIS
Le Mgst de la guerre allemand
LES PROCÈS DE GIEN
LES DÉCORATIONS DE L'EXPOSITION
L'AFFAIRE KAPS
LA « LUTTE POUR LA YIE »
AU GYMNASE
MAUVAIS PRETEXTES
Les réactionnaires embrouillent à
plaisir la question sur laquelle il se-
rait nécessaire de s'expliquer claire-
ment avant de passer à tout autre
suj et. M. Delafosse dit, dans le Matin,
qu'en demandant aux droitiers de
commencer par faire acte d'adhésion
à la République, les républicains tom-
bent dans la rhétorique « la plus
creuse qui soit au mondes, et il cher-
che à soutenir que ci se soumettre pré-
ventivement à la République, c'est
proprement ne se soumettre à rien,
parce que la République ne repré-
sente par elle-même ni un corps de
doctrine ni une politique déterlninee".
Il y a dans ces quelques lignes une
confusion évidente entre deux objets
très différents. La République repré-
sente par elle-même quelque chose, et
en se soumettant ou en adhérant à la
République,on adhère à quelque chose
de très précis qui est le gouvernement
de la nation par elle-même, et l'on
renonce à toute intention d'opposer
au droit populaire et à la volonté du
suffrage universel, le droit monarchi-
que et une volonté qui se réclame
soit d'une autorité supérieure à l'au-
torité nationale, soit même de l'auto-
rité nationale exprimée dans des plé-
biscites comme ceux de 185â et de
1870, pour entrer en conflit avec les
volontés de la nation. En adhérant à
la République, on prend l'engagement
d'abandonner Fidée de poursuivre le
rétablissement de la monarchie ou de
l'empire ou - la création d'une dictature
qui, en conservant l'étiquette républi-
caine, enlève à la nation le droit de
gérer elle-même ses affaires. Par con-
séquent, la soumission "préventive"
à la République a une signification
très nette.
Du moment où la République est le
gouvernement de la nation par elle-
même, il est évident que la République
ne représente, comme le dit M. Dela-
fosse, ni un corps de doctrine, ni une
politique déterminée. C'est aux partis
qu'il appartient de constituer, dans la
République, leur corps dé doctrine,
leur politique particulière, de lutter
par la parole et par la plume pour
convertir le pays à leurs idées, et de
se trouver en situation de prendre le
pouvoir pour les appliquer. C'est ainsi
que les choses se passent sous toute
espèce de gouvernement. Il y a tou-
jours une fraction du parti constitu-
tionnel qui forme la Droite, une qui
forme le Centre, et une la Gauche.
Suivant qu'une de ces fractions a ga-
gné ou perdu du terrain, c'est elle qui
prend le pouvoir ou qui le cède à une
de ses rivales.
Mais sous toute espèce de gouver-
nement, les seuls partis qui puissent
être appelés à prendre le pouvoir ou
sur lesquels les ministères puissent
s'appuyer sont les partis qŸeulent
le maintien du gouvernement, et non
pas ceux qui cherchent à profiter de
leur passage aux affaires pour prépa-
rer sa ruine — ainsi que nous vîmes
les réactionnaires le faire en 1873,
après la chute de M. Thiers, et en
1877, au moment du Seize-Mai.
Si les réactionnaires voulaient de
bonne foi examiner la situation, ils
reconnaîtraient que, aussi pieu sous
la République que sous la monarchie,
la plus élémentaire prudence com-
mande au parti constitutionnel de ne
pas confier le pouvoir à ses adver-
saires et de ne pas même compter sur
leur concours. On ne peut, ni d'une
façon ni de l'autre, gouverner avec les
hommes qui, il y a quelques mois ou
quelques semaines, criaient « Yive le
roi î » dans leurs banquets ou annon-
çaient leur intention « d'étrangler la
gueuse ». Ils reconnaîtraient que, tant
qu'ils se cantonnent dans cette oppo-
sition de principe à la forme républi-
caine du gouvernement, ils ne peuvent
prétendre à aucune influence légitime
sur la direction de ce gouvernement;
et, loin de se plaindre de se trouver
exclus de cette influence, ils ne de-
vraient pas accepter de l'exercer si on
la leur offrait. Est-ce que jamais Ber-
ryer a songé à prendre le pouvoir sous
la monarchie de Juillet? Est-ce que,
sous l'empire, Pelletan ou M. Jules
Simon ont pensé à faire partie d'une
combinaison ministérielle? Il n'y a
Que sous la République conseryatrice
que l'on a vu des monarchistes impé-
nitents accepter des ministères ou des
ambassades, et c'est précisément à
cause de cette anomalie qu'on a pu
dire avec raison de la République con-
servatrice que c'était « une bêtise ».
On ne peut pas, sans abandonner
toute sincérité et toute franchise,
songer à soutenir un gouvernement
d'une main et à l'ébranler de l'autre.
Il faut choisir. Si les réactionnaires
sont las de ne pas détenir le pouvoir,
s'ils prétendent exercer dans la Répu-
blique une action dirigeante, il faut
qu'ils commencent par se convertir
sincèrement à la République, par re-
noncer à toute pensée de supprimer
la République, et par former dans la
République un parti tory. Si ce parti
dispose de la maj orité dans les Cham-
bres, il prendra le pouvoir et il appli-
quera ses doctrines politiques. Mais
tant que les droitiers ne forment pas
dans la République un - parti tory,
tant qu'ils restent les partisans avérés
de la monarchie ou de l'empire, tant
qu'ils se confinent dans l'opposition
irréconciliable ou que, si parfois ils
acceptent de soutenir un ministère,
comme le ministère Rouvier, ce n'est
que parce que leur intérêt le leur or-
donne et, qu'ils veulent donner le
change au pays en lui faisant croire
qu'on les calomnie en dénonçant leur
opposition systématique; tant qu'ils
se posent en adversaires de la forme
républicaine ou qu'ils - ne font, du
bout des dents, à la République,
qu'une adhésion enveloppée de ré-
ticençes, ils ne peuvent pas comp-
ter dans la formation d'une maj o-
rité. Les appeler au pouvoir ou
gouverner avec leur concours, ce se-
rait commettre contre la République
un acte de trahison. Ce n'est doncpas,
comme le soutient M. Delafosse, une
« querelle de mots » que nous faisons
aux réactionnaires, et l'adhésion «pré-
ventive » n'est pas comme il lui
plaît de le dire, une formule creuse de
rhétorique. C'est un point de fait
bien clair, et on peut croire qu'en
cherchant à compliquer la question et
à l'embrouiller comme ils le font, les
écrivains de la Droite veulent surtout
se donner un prétexte pour persister
dans leur opposition systématique,
tout en faisant croire qu'ils étaient
animés des intentions les plus conci-
liantes et qu'ils se sont heurtés à des
résistances injustifiées. C'est se faire
la part belle à bon compte, à trop
bon compte 1
Le XIXe SItîGLE publiera demain la
« Vie de Paris » par Henry Fouquier.
A PORTLAND-PLACE
Hôtel à louer. — 30,000 francs de loyer
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Londres, 30 octobre.
On vient de mettre à louer l'hôtel qu'ha-
bitait à Portland-Place, 51, le général Bou-
langer.
Avant de partir pour Jersey, le général a
payé tous les mois restant à courir sur
une année de location, c'est-à-dire huit
mois.
La location avait été faite à raison-de
30,000 francs par an.
L'hôtel tout meublé est remis à louer au
même prix.
L'immeuble appartient à la veuve du
capitaine Ellis, et se compose de dix-huit
pièces avec remises et écuries pour sept
chevaux.
Les affiches annonçant la mise en loca-
tion sont collées sur les deux fenêtres du
salon donnant sur la rue.
DÉMENTIS RUSSES
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Saint-Pétersbourg, 30 octobre.
On dément le bruit d'un nouvel em-
prunt.
Dans les cercles bien informés, on dé-
ment le récit fait dans la Pall Mali Gaette,
sous la signature « Un vieux diplomate",
au sujet de l'audience accordée par le tsar,
lors de son passage à Berlin, au prince
chancelier, et d'après lequel l'entrevue au-
rait entièrement roulé sur l'arrangement
de la question bulgare et sur les arme-
ments continus et progressifs des puissan-
ces européennes.
LE LENDEMAIN DES FÊTES D'ATHÈNES
Reprise de la question crétoise
{D'UN COlmESPONDAHT)
Athènes, 30 octobre.
Le tsarévitch, par l'intermédiaire du roi
de Danemark, a demandé au tsar l'auto-
risation de prolonger son séjour à Athè-
nes. Cette autorisation lui a été accor-
dée.
La question de Crète reprendra la pre-
mière place dès que l'empereur d'Allema-
gne aura quitté la Grèce.
Le comité crétois d'Athènes remettra,
après les fêtes, aux représentants des puis-
sances, un état détaillé des atrocités et des
meurtres commis par les Turcs en Crète.
Le mémoire qui l'accompagnera, conclut
comme suit ;
« Aussi supplions-nous les grandes puis-
sances de daigner, dans leur haute et équi-
table prévoyance, couper les faibles liens
qui nous rattachent à un Etat en décom-
position, incapable par conséquent de gou-
verner selon les exigences du progrès et
de civilisation moderne un peuple dont on
connaît les tendances et les Unitaires aspi-
rations avec la Grèce*
LES
DÉPENSES MILITAIRES
DE L'ALLEMAGNE
Déclaration ministérielle. — Promesses
de paix.
CVUN CORRMPMDA"
Berlin, 30 octobre.
M. de Maltzahn, ministre des finances
de l'empire, a fait hier la déclaration sui-
vante au Reichstag, à propos de la discus-
sion en première lecture du budget im-
périal de 1890-91 t
« La plupart des dépenses extraordinai-
res, dit M. de Maltzahn en terminant, sont
nécessitées par la défense de l'empire. Ce
n'est pas un symptôme de l'incertitude de
la paix. Mais le ferme espoir que les gou-
vernements confédérés ont dans le main-
tien de la paix, la ferme volonté de l'Alle-
magne de maintenir la paix autant qu'il
dépend d'elle, nous autorisent-ils à négli-
ger les moyens qui nous mettent en situa-
tion de défendre cette paix ?
» Nous ne pouvons nous soustraire aux
sacrifices nécessaires pour conserver notre
force toujours prête. Nous ne pouvons
rester inactifs quand de nouvelles inven-
tions d'art militaire s'imposent et sont
adoptées par d'autres peuples. Il en est de
même pour les charges consignées dans le
présent budget pour deux corps d'armée
et leurs accessoires.
» Cela ne veut pas dire que nous pré-
voyons une guerre, mais bien plutôt le
contràire, S'est-à-dire que nous comptons
bien avoir devant nous assez de temps
pour cette nouvelle organisation. »
DISCOURS DE M. BEBEL POUR
LA PAIX
Une voix en faveur de l'Alsace-
Lorraine*
(D'UN CORRESPONDANT1
Berlin, 30 octobre.
Quand est venue la reprise de la discussion
du budget de la guerre, le fameux député
socialiste Bebel a pris la parole :
« Les peuples, a-t-il dit, veulent la paix ;
les gouvernements poussent à la guerre. Il
est parfaitement indifférent aux peuples
de savoir par qui ils seront gouvernés,
pourvu qu'ils soient bien gouvernés.
Pendant les trois dernières années, on a
dépensé en préparatifs militaires 951 mil-
lions de marcs. C'est une vis sans fin, qui
oblige à des dépenses sans cesse crois-
santes par suite des progrès de l'industrie.
Qui songe encore aujourd'hui à rendre la
guerre plus humaine? Plus une arme est
meurtrière, plus tôt on espère qu'elle
mettra fin à la guerre.
Lorsque les peuples se rueront les uns
sur les autres, sur l'ordre des souverains
placés à leur tête, il n'y aura pas assez de
frères de l'ordre de Saint-Jean et de sœurs
de charité pour soigner toutes les blessu-
res.
Il est vrai que^Oçs peuples auront, après
cela, un nouveau répit pour aller à labou-
cherie, jusqu'à ce que l'on ait inventé et fa-
briqué un nouveau fusil.
Le véritable ennemi héréditaire
Notre seul ennemi, si nous en avons un,
c'est la Russie, ce pays barbare, notre
ennemi héréditaire, qui cherche à faire
des conquêtes à l'occident et qui tend à
la possession exclusive de la mer Noire.
Il ne saurait être question de rendre
sans conditions l'Alsace - Lôrraine à la
France ; toutefois, nos hommes d'Etat de-
vraient s'efforcer d'établir un état de cho-
ses tolérable en rétablissant un lien entre
ces provinces et la France.
En France, on est persuadé que l'Alle-
magne n'attend que le moment propice
pour anéantir son voisin.
Où ces armements nous conduiront-ils ?
Quand il faudra combattre, nous seron*
épuisés. Je ne crois pas que l'Autriche es.
l'Italie, dont les finances ne sont pas dest
-plus solides, puissent facilement effectuer
leur mobilisation, et j'ai même des doutes
en ce qui concerne l'Allemagne, si je con-
sidère le peu de dévouement dont notre
bourgeoisie a fait preuve en 1870. »
Réplique du ministre de la guerre
Le ministre de la guerre proteste contre
l'assertion de M. Bebel d'après laquelle la
Russie serait l'ennemie héréditaire de l'Al-
lemagne.
Il déclare que le peuple allemand est
d'accord avec ses princes pour désirer le
maintien de la paix.
« Les efforts de l'empereur, dit-il en ter-
minant, porteront très probablement leurs
fruits. »
Umm
LES GRÈVES DU NORD
La réunion de Beuvry. — Continuation
de la grève.
(DB NOTRB CORRESPONDANT PARTICULIER)
Lens, 30 octobre.
La réunion -annoncée hier a eu lieu à
Beuvry, sur la grande place. Deux mille
personnes y assistaient, sous la présidence
de M. Lamendin.
Celui-ci démontre la baisse constante
des salaires depuis 1885, le surcroît de tra-
vail imposé aux ouvriers par les heures
supplémentaires et la hausse du prix des
charbons.
En ce qui concerne la caisse de secours,
l'orateur reproche à la Compagnie : 1° De
ne laisser, d'après son avis même, que un
pour cent, pendant que les ouvriers lais-
sent trois pour cent; o d'administrer elle-
même ladite caisse, tandis qu'elle ne doit
figurer dans l'administration que propor-
tionnellement à ses versements.
Abordant ensuite la question des veuves
de mineurs, il regrette que la Compagnie
prive ces dernières du logementpour elles
et les orphelins.
Il déclare cette mesure d'autant plus in-
humaine et arbitraire que, souvent, la ma-
ladie du défunt a été contractée dans les
travaux des mines, en respirant l'air vi-
cié.
Il prend, à l'appui de sa thèse, les mé-
moires du docteur Rimbault, des hospices
de Saint-Etienne, lequel a fait l'autopsie de
cadavres de mineurs et a conclu qu'après
dix ans de service au fond des puits, ces
ouvriers étaient atteints d'anémie, qui est*
la maladie spéciale des mineurs.
L'orateur a été très applaudi et pas un
seul des employés de la Compagnie de
Nœux qui étaient présents à la réunion n'a
réfuté seS arguments.
La continuation de la grève a été votée
à l'unanimité.
Deplain, réunion à Barlin; cette commu-
ne fo»nnj* heaucouo d'ouvriers a Noeux.
Une cartouche de dynamite
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Lille, 30 octobre.
La situation est toujours la même dans
le Nord.
Hier, une cartouche de dynamite a fait
explosion à Déchy, dans la maison du garde
Caron; personne n'a été blessé; les per-
sonnes ont volé en éclats et les murs ont
été lézardés.
A Aniche, la troupe a dissipé la foule et
une réunion qui avait lieu chez Maillard,
dans la Grande-Rue, a été dissoute. On a
trouvé que le commissaire de police se
montrait un peu trop zélé et sa conduite
est blâmée par la population.
Les grévistes sont très calmes ; les ver-
riers ont fait une manifestation en leur fa-
veur.
On commente le décret ministériel du
Sty octobre qui permet de réquisitionner le
cantonnement des troupes.
-
LES DÉSORDRES
DE CHATILLON-SUR-LOIRE
L'affaire devant le tribunal. — Con-
damnation de tous les prévenus.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Gien, 30 octobre.
L'affaire des désordres de Châtillon-
sur-Loire est venue aujourd'hui devant
le tribunal correctionnel de Gien.
On connaît les faits ; ils ont été racontés
par le XIXf Siècle dans le numéro du 27
septembre.
Près de deux cents personnes faisaient,
le jour du premier tour de scrutin, à Châ-
tillon, une manifestation en faveur de M.
Loreau. Manifestation essentiellement réac-
tionnaire, aux cris de : « A bas Carnot! A
bas la République ! Vivent les Prussiens !
Vive Napoléon ! Vive Loreau 1 » Violences,
coups et blessures, rien ne manquait à cette
petite fête, dont M. Loreau payait les frais.
Le jugement qui a été rendu aujour-
d'hui confirme de tous points les faits ra-
contés par le XIXe Siècle.
Imbault a été condamné à six jours de
prison ;
Augustin Guillerault à huit jours ;
Jean Chevallier et Avon à 30 francs d'a-
mende ;
Frédéric Guillerault, ainsi que Damon et
Fayat, à seize francs d'amende. Ceux-ci
avaient déjà subi des condapanations pour
coups et blessures.
Et tous à onze francs pour tapage inju-
rieux.
Sur les neuf accusés, aucun n'a été ac-
quitté. 1
Procès Port alis-Lor eau
Dans le procès en diffamation intenté
par le Xl Xe Siècle et M. Portalis contre
M. Loreau, Me Millerand, notre avocat, a
obtenu un énorme succès. Sa plaidoirie
s'est terminée au' milieu d'une salve d'ap-
plaudissements, après une péroraison écra-
sante pour le candidat des honnêtes gens.
Après une plaidoirie de Me. Desponds, le
ministère public réclame une sévère appli-
cation de la loi. Le jugement est remis à
huitaine.
Me G.
A LA PRÉSIDENCE DU CONSEIL
Soirée artistique
Hier soir, a eu lieu à l'hôtel du minis-
tère du commerce, rue de Grenelle, la
grande soirée musicale et dramatique of-
ferte par M. Tirard, président du conseil,
ministre du commerce, et par Mme Ti-
rard.
Cinq mille invitations avaient été lan-
cées. Elles avaient été adressées aux mem-
bres du corps diplomatique, aux sommi-
tés littéraires et artistiques, aux membres
des grands corps de l'Etat et des jurys ainsi
qu'aux principaux exposants.
La salle des fêtes avait été transformée
pour la circonstance en salle de spectacle.
Un coquet théâtre, qui s'ouvrait au milieu
de draperies de velours rouge frangées
d'or, s'élevait à l'extrémité. a
La partie instrumentale avait été orga-
nisée surtout par MM. Delibes et Delsart.
La partie vocale a été également des plus
brillantes. On y asuccessivement applaudi
Mmes Krauss, Rose Caron, Melba et ,MM.
Lassalle, Soulacroix et Dupuy.
La partie littéraire était confiée à l'élite
de la Comérdie-Française : les bravos les
plus chaleureux ont accueilli MM. Coque-
lin ainé, Mounet-Sully, Worms, et Mmes
Barretta, Reichenberg et Kàlb.
On parle d'une soirée dansante qui serait
prochainement donnée à la présidence du
conseil.
CONSEIL MUNICIPAL DE PARIS
Le conseil municipal de Paris est convoqué
en session ordinaire pour le lundi h novem-
bre.
Contrairement au bruit qui en a couru, le
conseil n'est encore saisi d'aucune propo-
sition relative au chemin de fer métropoli-
tain.
LE MARIAGE DU PRINCE DE MONACO
Cérémonie sans apparat
Hier, à deux heures, a été célébré, à la
légation de Monaco, 6, rue d'Isly, le ma-
riage civil du prince Albert de Monaco
avec la duchesse de Richelieu.
A cette occasion, on avait arboré le dra-
peau blanc aux armes des Grimaldi, au
lieu du drapeau monégasque blanc et
rouge.
C'est le baron Fernand du Charmel qui
remplissait les fonctions d'officier de l'état
civil et qui a célébré le mariage dont les
témoiné étaient, pour le prince souverain :
le baron de Farincourt, gouverneur géné-
ral de la principauté de Monaco, et M. le
colonel de Castro ; pour Mme la duchesse
de Richelieu, née Alice Heine : ses cou-
sins, le duc de Rivoli et - le marquis de Na-
daillac. -
Les assistants, en raison du grand deuil
du marié, étaient peu nombreux ; les mem-
bres des deux familles, le prince hérédi-
taire de Monaco, M. le commandant Mai-
gret, représentant le président de la Répu-
blique, M. Charles Theuret, évêque de
Monaco, et quelques hauts fonctionnaires
de la principauté, tous en uniforme de
gala.
Aujourd'hui, à onze heures, dans 1% cha-
pelle de la nonciature, aura lieu le mariage
religieux.
La bénédiction nuptiale sera donnée par
le nonce anostolique.
i CHRONIQUE
Je viens de lire le rapport que M. E. Zé-
vorta adressé au ministre de l'instruction
publique sur le concours d'agrégation de
l'enseignement spécial, section littéraire
et économique.
H est fort bien fait, ce rapport, et très
intéressant. J'y ai vu avec chagrin que
les épreuves qui avaient donné les résul-
tats les plus faibles portaient justement
sur les matières qui me semblent les plus
importantes. Ainsi, il parait qu'en géo-
graphie les candidats ont fait des compo-
sitions excellentes, qu'ils ont tracé des
cartes irréprochables; mais qu'en revan-
che, la composition de littérature fran-
çaise a laissé à désirer.
Le sujet avait été pourtant choisi à
souhait pour une agrégation de l'ensei-
gnement spécial. Il reposait>sur cette pen-
sée de Joachim du Bellay, que la F rance
peut produire, elle aussi, des Homères,
des Démosthènes, des Virgiles et des Cicé-
rons. On demandait aux candidats de
montrer brièvement comment cette espé-
rance de Joachim du Bellay s'est réalisée,
et comment les grands écrivains de
France, lus, expliqués et commentés
comme le sont les auteurs anciens, don-
nent aux jeunes esprits une forte et saine
nourriture.
C'est là, en effet, un thème assez vaste
pour que tout concurrent qui sait un
peu d'histoire littéraire puisse trouver
quelque chose à dire. Il a de plus le mé-
rite d'offrir aux bons esprits l'occasion
de montrer qu'ils savent ordonner une
composition. Il est trop clair que l'effort
de l'écolier doit porter sur ces trois mots :
lus, expliqués et commentés. La nourri-
ture que donne l'antiquité aux jeunes
esprits n'est forte et saine que parce que
les auteurs grecs et latins sont lus, expli-
qués et commentés d'une certaine façon ;
elle serait tout aussi saine et forte, si nos
grands écrivains de France étaient étu-
diés de la même façon, et l'on verrait alors
que nous avons dans notre langue des
ouvrages qui ne le cèdent en rien à ceux
des Virgile et des Cicéron.
Il semble qu'il n'y ait pas d'autre fa-
çon de comprendre et de distribuer le
sujet. Une fois ces grandes lignes éta-
blies, chacun sera libre d'y fourrer tout
ce qu'il voudra. L'un parlera de Bossuet
et de Fénelon, l'autre de Corneille et de
Molière, peu importe! Je pourrai, moi,
professeur, corrigeant les copies, savoir
gré à l'élève de quelques détails justes,
de quelques jugements exprimés ayec
netteté et élégance, comme je pourrai lui
en vouloir de quelques erreurs de fait, de
quelques appréciations peu justes ou va-
gues ; mais ce ne sera pas pour moi l'es-
sentiel de la composition. Je reconnaîtrai
l'élève qui a fait de bonnes études, qui en
a emporté ce qu'elles doivent donnerj un
sens droit et un esprit clair, à ce signe
unique qu'il aura mis le doigt sur le
point essentiel du sujet proposé et qu'il
aura établi-une juste proportion entre
les diverses parties où il l'aura dis-
tribué.
Eh bien! M. Zévort nous apprend que
sur cent douze copies, dix-sept seulement
.ont atteint une note égale ou supérieure
à la moyenne, et qu'un seul s'est élevé à
la note quinze, vingt étant le chiffre
maximum.
« La plupart des concurrents, dit M. Zé-
vort, n'ont traité que la première partie
du sujet. Ils se sont lancés dans un dé-
veloppement banal et fastidieux sur l'his-
toire de la littérature française ; ils ont
cru devoir faire montre d'une érudition
qui ne convenait nullement au sujet. »
Je crois bien qu'elle ne convenait pas
au sujet! Elle était en dehors du sujet.
M. Zévort est bien indulgent, quand il
reproche à ces jeunes gens de n'avoir
traité que la première partie du sujet.
La vérité est qu'ils n'ont pas vu le vrai
sujet et qu'il ne l'ont pas traité du tout.
Et ce sont des jeunes gens qui se présen-
tent à l'agrégation! Cela fait pitié! Et voilà
pourquoi je me défie si fort de l'agréga-
tion de l'enseignement spécial, que l'on
veut, pour les avantages matériels, assi-
miler à la vieille agrégation classique.
M. Zévort est fort au courant deces ques-
tions universitaires : qu'il me permette
de lui pousser une interrogation.
On donne à cent jeunes gens, se présen-
tant au concours de l'agrégation pour
l'enseignement classique, le même sujet
à traiter, posé dans les mêmes termes :
combien M. Zévort croit-il qu'il s'en trou-
vera qui auront manqué le point précis
du sujet?
Un ou deux peut-être, parce qu'il y a
toujours, dans les concours, des agités
à qui la trépidation qu'ils éprouvent
brouille la vue et obscurcit le jugement.
Tous les autres auront vu juste le point
précis autour duquel doivent rayonner
tous les développements. Je ne dis pas
que tous feront de bonnes compositions ;
on peut avoir fait d'excellentes études
classiquite et avoir le style empesé, ou
traînant, ou encombré de redites; on
peut n'avoir pas de style du tout. Mais
elles donnent nécessairement, fatalement,
inévitablement, la droiture du sens et la
justesse de l'esprit.
Il paraît, c'est M. Zévort qui l'affirme
dans son rapport, que la composition de
gréographie a été très supérieure à celle
de littérature. Les cartes sont tracées
en général avec netteté, la plupart des
copies attestent de sérieuses connaissan-
ces géographiques. Tout cela est bel et
bien ; je ne veux point dire du mal de la
géographie. Mon excellent confrère, mon
camarade d'école, Raoul Frary, m'arra-
cherait les yeux, lui qui croit que la géo-
graphie devrait être la-base de tout l'en-
seignement universitaire.
Mais enfin la géographie. si je sors
du lycée la sachant mal, je puis la rap-
prendre plus tard ; ou même si, ne la
sachant pas du tout. j'ai besoin, un jour,
pour une raison ou pour une autre;
d'en connaître une partie, rien ne sera si
simple que de me procurer les livres n
cessaires, et en quelques jours je me
mettrai au courant.
Mais un bon jugement, mais un es
prit juste, mais un sens droit, cela ne
s acquiert ni en un jour, ni en vingt;
cela se forme, goutte à goutte, durant les
dix années de l'éducation classiaue. On
ne le croit plus aujourd'hui : c'est pour-
tant la vérité, que la rectitude de l'esprit
et l'affinement du goût sont les deux
meilleurs fruits de l'étude du grec et du
latin, les seuls même qu'il faille lui de-
mander. Je me sens des envies folles de
hausser les épaules, quand on me jette
au nez cette objection ridicule : Les élè-
ves passent dix ans de leur vie sur les
bancs du collège à apprendre le latin, et
ils en sortent sans le savoir.
Eh non ! ils ne le savent pas ; et quand
ils le sauraient, le latin leur serait d'une
médiocre utilité d'esprit. Mais le latin
leur a été une gymnastique à l'aidç de
laquelle ils ont pris l'habitude d'ana-
lyser la pensée des autres et de conduire
la leur. N'est-ce donc rien que cela ? Mais
c'est le tout de l'homme.
Nous soutenons encore que Fou n'ap-
prend bien le français qu'en traduisant
du latin ou du grec. On se moque de
nous quand nous avançons cette idée,
qui était jadis un axiome - et qui paraît
saugrenue à cette heure. Voyez pourtant
es qui arrive s
« De toutes les épreuves orales, dit
M, Zévort en son rapport au -ministre,
l'explication des auteurs français a été.
incontestablement la plus faible. Les
uns, ayant à expliquer une page de Ra-
belais ou de Régnier,se sont perdus dans
les menues réflexions sur le vocabulaire
et l'orthographe; il* n'ont point traduit
le passage et ne l'ont pas commenté, et
par contre ils ont soulevé des questiong
de langue qu'ils traitaient d'une ma-
nière incomplète. D'autres, sur les pages
les plus célèbres de Pascal, de Bossuet, de
Molière, n'ont trouvé crue des remararuea
oiseuses, banales, quelquefois même
inexactes ; on aurait pu croire, qu'ils Ii--=.
saient ces pages pour la première fois et
qu'ils improvisaient une explication..
Nous avons cru devoir nous montrer
particulièrement sévères pour cette épreu-
ve, et nous ne saurions assez recomman-
der aux candidats de lire attentivement
leurs auteurs classiques, d'en compren-
dre et d'en sentir les beautés, pour les
faire comprendre à leurs élèves. »
Recommandez, cher monsieur Zévort,
recommandez tout ce qu'il vous plaira.
C'est absolument comme si vous chan-
tiez; autant en emporte le vent. On"
n'apprend à lire et à commenter une
page- de français que lorsqu'on a sou-
vent et très souvent essayé de faire
passer dans notre langue des morceaux
de l'antiquité, et que souvent et très
souvent on s'est livré à l'opération con-
traire. On a été obligé de peser les
mots, d'analyser les tours, de se ren-
dre compte de tous les incidents de la
phrase.
En revanche, M. Zévort déclare que
l'épreuve orale de la géographie l'a plei-
nement satisfait. Allons, tant mieux ! il
paraît que le jury s'est félicité de ce ré-
sultat ! J'en suis bien aise.
Les leçons sur la législation usuelle et
l'économie commerciale ont donné moins
de satisfaction. Deux ou trois ont été
assez bonnes : «Nous aurions voulu frbu-
ver dans toutes les autres, d'une part,
un plan simple et logique, d'autre part,
un peu plus de généralisation. »
De la logique! de la généralisation l
va-t'en voir s'ils viennent, Jean, va-t'ec
voir s'ils viennent.
Francisque Saroey.
L'AFFAIRE KAPS
COUR D'ASSISES DE LA SEINE
Il n'aime pas les municipaux. — D ouï
comme un mouton. — Le vol et la
prostitution. - Un motif
trop délicat. -
A onze heures et demie, l'accusé est in- *
troduit dans la salle d'audience, qu'avait
envahie une foule avide d'émotions.
A la stupéfaction générale, Kaps est ac-,
compagné d'agents en bourgeois.
L'assassin du père Vinçard et de Léonie
Drieux, on l'a vu ce matin, dans le rerfjar-
quable exposé de notre collaborateur
Me Gervasy, n'aime pas les municipaux.
La cour a voulu montrer de la déférence
pour ce jeune criminel à poigne. C'est un
précédent fâcheux. En persévérant dans
cette voie, on pourrait aller fort loin.
De l'interrogatoire, mené au petit galop
de chasse par M. le président Robert, nous
ne reproduirons que les parties' essentiel-
les.
Le reste ne nous apprend rien que ne e
connaissent nos lecteurs.
L'accusé est âgé de dix-neuf ans.. Vêtu.
d'une redingote noire croisée, assez pro-
pre, il a le visage maigre. Pas un poil de
barbe. Les traits sont saillants, les yeux
durs. En somme, physionomie ingrate du.
rôdeur de barrière, du souteneur de pro-
fession. Aux questions qui lui sont posées,
il répond avec assurance, mais sans for-
fanterie. On sait ce que fut sa jeunesse. Il
reconnaît, sans la moindre difficulté, avoir
vécu de la prostitution de sa maîtresse.
M. le président. - Vous avez déclaré à l'ins-
truction que vous aimiez mieux vivre de la
prostitution que du vol?
L'accusé. — Parfaitement.
M. le président. — Vous avez été cependant
condamné pour vol. Vous avez assassiné, la
15 mars dernier, votre maîtresse, Léontina
Drieu. Pourquoi l'avez-vous tuée?-
L'accusé. — Le motif est trop délicat pour
être livré à la publicité (sic) et raconté à MM.
! es jurés.
M. le président. — Il suffit. Vous vous faites
suffisamment comprendre. Vous avez dit tout
d'abord que vous avez agi par jalousie.
L'accusé. - Je l'aimais!
M. le président. — Ensuite vous avez avoué
que vous redoutiez ses indiscrétions.
La mort du père Vinçard
, Le président retrace la scène de l'as&a««fc
':'- E
JOURNAL REPUBLICAIN.
rédaction .1
it48, Rue & £ oxrtxn £ urt$&
t,. PARIS
* -
DIRECTEUR POLITIQUE
A. •• ÉDOUARD PORT A
PRIX OF L'ABONHEIERT > l
Paris. Trois mois, 6L; SiiBsis, lit; ba, 201
Départements — 7L, — 12 f.; — 241
Union Postale - 9L; — 16 L; — 32 L
§*$abonnement» partent de* lm et 15 de chaqu moi&
Adresse télégraphique : XIX. SIÈCLE — PARIS ;
ADMINISTRATION -
J.4a, Rue ikÊontmsirtrd
PARIS
RÉGISSEURS D'ANNONCES
IIIÍ; LAGRANGE, CERF «t G^T
6, place de la Bourte, S
PRIX DE L'ABONNEMENT : -
Farts. Inuam, 6L; SilIIOiI, 11 L; liai, 20t.
Départements — 71; — 42 f.; — 24 t-
Union Postale - gt; 16L; — 32 t
Les abonnements partel" et 15 de chaque moit
Adresse télégraphique : XIX. SJËCLB — PABIS
Le Mgst de la guerre allemand
LES PROCÈS DE GIEN
LES DÉCORATIONS DE L'EXPOSITION
L'AFFAIRE KAPS
LA « LUTTE POUR LA YIE »
AU GYMNASE
MAUVAIS PRETEXTES
Les réactionnaires embrouillent à
plaisir la question sur laquelle il se-
rait nécessaire de s'expliquer claire-
ment avant de passer à tout autre
suj et. M. Delafosse dit, dans le Matin,
qu'en demandant aux droitiers de
commencer par faire acte d'adhésion
à la République, les républicains tom-
bent dans la rhétorique « la plus
creuse qui soit au mondes, et il cher-
che à soutenir que ci se soumettre pré-
ventivement à la République, c'est
proprement ne se soumettre à rien,
parce que la République ne repré-
sente par elle-même ni un corps de
doctrine ni une politique déterlninee".
Il y a dans ces quelques lignes une
confusion évidente entre deux objets
très différents. La République repré-
sente par elle-même quelque chose, et
en se soumettant ou en adhérant à la
République,on adhère à quelque chose
de très précis qui est le gouvernement
de la nation par elle-même, et l'on
renonce à toute intention d'opposer
au droit populaire et à la volonté du
suffrage universel, le droit monarchi-
que et une volonté qui se réclame
soit d'une autorité supérieure à l'au-
torité nationale, soit même de l'auto-
rité nationale exprimée dans des plé-
biscites comme ceux de 185â et de
1870, pour entrer en conflit avec les
volontés de la nation. En adhérant à
la République, on prend l'engagement
d'abandonner Fidée de poursuivre le
rétablissement de la monarchie ou de
l'empire ou - la création d'une dictature
qui, en conservant l'étiquette républi-
caine, enlève à la nation le droit de
gérer elle-même ses affaires. Par con-
séquent, la soumission "préventive"
à la République a une signification
très nette.
Du moment où la République est le
gouvernement de la nation par elle-
même, il est évident que la République
ne représente, comme le dit M. Dela-
fosse, ni un corps de doctrine, ni une
politique déterminée. C'est aux partis
qu'il appartient de constituer, dans la
République, leur corps dé doctrine,
leur politique particulière, de lutter
par la parole et par la plume pour
convertir le pays à leurs idées, et de
se trouver en situation de prendre le
pouvoir pour les appliquer. C'est ainsi
que les choses se passent sous toute
espèce de gouvernement. Il y a tou-
jours une fraction du parti constitu-
tionnel qui forme la Droite, une qui
forme le Centre, et une la Gauche.
Suivant qu'une de ces fractions a ga-
gné ou perdu du terrain, c'est elle qui
prend le pouvoir ou qui le cède à une
de ses rivales.
Mais sous toute espèce de gouver-
nement, les seuls partis qui puissent
être appelés à prendre le pouvoir ou
sur lesquels les ministères puissent
s'appuyer sont les partis qŸeulent
le maintien du gouvernement, et non
pas ceux qui cherchent à profiter de
leur passage aux affaires pour prépa-
rer sa ruine — ainsi que nous vîmes
les réactionnaires le faire en 1873,
après la chute de M. Thiers, et en
1877, au moment du Seize-Mai.
Si les réactionnaires voulaient de
bonne foi examiner la situation, ils
reconnaîtraient que, aussi pieu sous
la République que sous la monarchie,
la plus élémentaire prudence com-
mande au parti constitutionnel de ne
pas confier le pouvoir à ses adver-
saires et de ne pas même compter sur
leur concours. On ne peut, ni d'une
façon ni de l'autre, gouverner avec les
hommes qui, il y a quelques mois ou
quelques semaines, criaient « Yive le
roi î » dans leurs banquets ou annon-
çaient leur intention « d'étrangler la
gueuse ». Ils reconnaîtraient que, tant
qu'ils se cantonnent dans cette oppo-
sition de principe à la forme républi-
caine du gouvernement, ils ne peuvent
prétendre à aucune influence légitime
sur la direction de ce gouvernement;
et, loin de se plaindre de se trouver
exclus de cette influence, ils ne de-
vraient pas accepter de l'exercer si on
la leur offrait. Est-ce que jamais Ber-
ryer a songé à prendre le pouvoir sous
la monarchie de Juillet? Est-ce que,
sous l'empire, Pelletan ou M. Jules
Simon ont pensé à faire partie d'une
combinaison ministérielle? Il n'y a
Que sous la République conseryatrice
que l'on a vu des monarchistes impé-
nitents accepter des ministères ou des
ambassades, et c'est précisément à
cause de cette anomalie qu'on a pu
dire avec raison de la République con-
servatrice que c'était « une bêtise ».
On ne peut pas, sans abandonner
toute sincérité et toute franchise,
songer à soutenir un gouvernement
d'une main et à l'ébranler de l'autre.
Il faut choisir. Si les réactionnaires
sont las de ne pas détenir le pouvoir,
s'ils prétendent exercer dans la Répu-
blique une action dirigeante, il faut
qu'ils commencent par se convertir
sincèrement à la République, par re-
noncer à toute pensée de supprimer
la République, et par former dans la
République un parti tory. Si ce parti
dispose de la maj orité dans les Cham-
bres, il prendra le pouvoir et il appli-
quera ses doctrines politiques. Mais
tant que les droitiers ne forment pas
dans la République un - parti tory,
tant qu'ils restent les partisans avérés
de la monarchie ou de l'empire, tant
qu'ils se confinent dans l'opposition
irréconciliable ou que, si parfois ils
acceptent de soutenir un ministère,
comme le ministère Rouvier, ce n'est
que parce que leur intérêt le leur or-
donne et, qu'ils veulent donner le
change au pays en lui faisant croire
qu'on les calomnie en dénonçant leur
opposition systématique; tant qu'ils
se posent en adversaires de la forme
républicaine ou qu'ils - ne font, du
bout des dents, à la République,
qu'une adhésion enveloppée de ré-
ticençes, ils ne peuvent pas comp-
ter dans la formation d'une maj o-
rité. Les appeler au pouvoir ou
gouverner avec leur concours, ce se-
rait commettre contre la République
un acte de trahison. Ce n'est doncpas,
comme le soutient M. Delafosse, une
« querelle de mots » que nous faisons
aux réactionnaires, et l'adhésion «pré-
ventive » n'est pas comme il lui
plaît de le dire, une formule creuse de
rhétorique. C'est un point de fait
bien clair, et on peut croire qu'en
cherchant à compliquer la question et
à l'embrouiller comme ils le font, les
écrivains de la Droite veulent surtout
se donner un prétexte pour persister
dans leur opposition systématique,
tout en faisant croire qu'ils étaient
animés des intentions les plus conci-
liantes et qu'ils se sont heurtés à des
résistances injustifiées. C'est se faire
la part belle à bon compte, à trop
bon compte 1
Le XIXe SItîGLE publiera demain la
« Vie de Paris » par Henry Fouquier.
A PORTLAND-PLACE
Hôtel à louer. — 30,000 francs de loyer
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Londres, 30 octobre.
On vient de mettre à louer l'hôtel qu'ha-
bitait à Portland-Place, 51, le général Bou-
langer.
Avant de partir pour Jersey, le général a
payé tous les mois restant à courir sur
une année de location, c'est-à-dire huit
mois.
La location avait été faite à raison-de
30,000 francs par an.
L'hôtel tout meublé est remis à louer au
même prix.
L'immeuble appartient à la veuve du
capitaine Ellis, et se compose de dix-huit
pièces avec remises et écuries pour sept
chevaux.
Les affiches annonçant la mise en loca-
tion sont collées sur les deux fenêtres du
salon donnant sur la rue.
DÉMENTIS RUSSES
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Saint-Pétersbourg, 30 octobre.
On dément le bruit d'un nouvel em-
prunt.
Dans les cercles bien informés, on dé-
ment le récit fait dans la Pall Mali Gaette,
sous la signature « Un vieux diplomate",
au sujet de l'audience accordée par le tsar,
lors de son passage à Berlin, au prince
chancelier, et d'après lequel l'entrevue au-
rait entièrement roulé sur l'arrangement
de la question bulgare et sur les arme-
ments continus et progressifs des puissan-
ces européennes.
LE LENDEMAIN DES FÊTES D'ATHÈNES
Reprise de la question crétoise
{D'UN COlmESPONDAHT)
Athènes, 30 octobre.
Le tsarévitch, par l'intermédiaire du roi
de Danemark, a demandé au tsar l'auto-
risation de prolonger son séjour à Athè-
nes. Cette autorisation lui a été accor-
dée.
La question de Crète reprendra la pre-
mière place dès que l'empereur d'Allema-
gne aura quitté la Grèce.
Le comité crétois d'Athènes remettra,
après les fêtes, aux représentants des puis-
sances, un état détaillé des atrocités et des
meurtres commis par les Turcs en Crète.
Le mémoire qui l'accompagnera, conclut
comme suit ;
« Aussi supplions-nous les grandes puis-
sances de daigner, dans leur haute et équi-
table prévoyance, couper les faibles liens
qui nous rattachent à un Etat en décom-
position, incapable par conséquent de gou-
verner selon les exigences du progrès et
de civilisation moderne un peuple dont on
connaît les tendances et les Unitaires aspi-
rations avec la Grèce*
LES
DÉPENSES MILITAIRES
DE L'ALLEMAGNE
Déclaration ministérielle. — Promesses
de paix.
CVUN CORRMPMDA"
Berlin, 30 octobre.
M. de Maltzahn, ministre des finances
de l'empire, a fait hier la déclaration sui-
vante au Reichstag, à propos de la discus-
sion en première lecture du budget im-
périal de 1890-91 t
« La plupart des dépenses extraordinai-
res, dit M. de Maltzahn en terminant, sont
nécessitées par la défense de l'empire. Ce
n'est pas un symptôme de l'incertitude de
la paix. Mais le ferme espoir que les gou-
vernements confédérés ont dans le main-
tien de la paix, la ferme volonté de l'Alle-
magne de maintenir la paix autant qu'il
dépend d'elle, nous autorisent-ils à négli-
ger les moyens qui nous mettent en situa-
tion de défendre cette paix ?
» Nous ne pouvons nous soustraire aux
sacrifices nécessaires pour conserver notre
force toujours prête. Nous ne pouvons
rester inactifs quand de nouvelles inven-
tions d'art militaire s'imposent et sont
adoptées par d'autres peuples. Il en est de
même pour les charges consignées dans le
présent budget pour deux corps d'armée
et leurs accessoires.
» Cela ne veut pas dire que nous pré-
voyons une guerre, mais bien plutôt le
contràire, S'est-à-dire que nous comptons
bien avoir devant nous assez de temps
pour cette nouvelle organisation. »
DISCOURS DE M. BEBEL POUR
LA PAIX
Une voix en faveur de l'Alsace-
Lorraine*
(D'UN CORRESPONDANT1
Berlin, 30 octobre.
Quand est venue la reprise de la discussion
du budget de la guerre, le fameux député
socialiste Bebel a pris la parole :
« Les peuples, a-t-il dit, veulent la paix ;
les gouvernements poussent à la guerre. Il
est parfaitement indifférent aux peuples
de savoir par qui ils seront gouvernés,
pourvu qu'ils soient bien gouvernés.
Pendant les trois dernières années, on a
dépensé en préparatifs militaires 951 mil-
lions de marcs. C'est une vis sans fin, qui
oblige à des dépenses sans cesse crois-
santes par suite des progrès de l'industrie.
Qui songe encore aujourd'hui à rendre la
guerre plus humaine? Plus une arme est
meurtrière, plus tôt on espère qu'elle
mettra fin à la guerre.
Lorsque les peuples se rueront les uns
sur les autres, sur l'ordre des souverains
placés à leur tête, il n'y aura pas assez de
frères de l'ordre de Saint-Jean et de sœurs
de charité pour soigner toutes les blessu-
res.
Il est vrai que^Oçs peuples auront, après
cela, un nouveau répit pour aller à labou-
cherie, jusqu'à ce que l'on ait inventé et fa-
briqué un nouveau fusil.
Le véritable ennemi héréditaire
Notre seul ennemi, si nous en avons un,
c'est la Russie, ce pays barbare, notre
ennemi héréditaire, qui cherche à faire
des conquêtes à l'occident et qui tend à
la possession exclusive de la mer Noire.
Il ne saurait être question de rendre
sans conditions l'Alsace - Lôrraine à la
France ; toutefois, nos hommes d'Etat de-
vraient s'efforcer d'établir un état de cho-
ses tolérable en rétablissant un lien entre
ces provinces et la France.
En France, on est persuadé que l'Alle-
magne n'attend que le moment propice
pour anéantir son voisin.
Où ces armements nous conduiront-ils ?
Quand il faudra combattre, nous seron*
épuisés. Je ne crois pas que l'Autriche es.
l'Italie, dont les finances ne sont pas dest
-plus solides, puissent facilement effectuer
leur mobilisation, et j'ai même des doutes
en ce qui concerne l'Allemagne, si je con-
sidère le peu de dévouement dont notre
bourgeoisie a fait preuve en 1870. »
Réplique du ministre de la guerre
Le ministre de la guerre proteste contre
l'assertion de M. Bebel d'après laquelle la
Russie serait l'ennemie héréditaire de l'Al-
lemagne.
Il déclare que le peuple allemand est
d'accord avec ses princes pour désirer le
maintien de la paix.
« Les efforts de l'empereur, dit-il en ter-
minant, porteront très probablement leurs
fruits. »
Umm
LES GRÈVES DU NORD
La réunion de Beuvry. — Continuation
de la grève.
(DB NOTRB CORRESPONDANT PARTICULIER)
Lens, 30 octobre.
La réunion -annoncée hier a eu lieu à
Beuvry, sur la grande place. Deux mille
personnes y assistaient, sous la présidence
de M. Lamendin.
Celui-ci démontre la baisse constante
des salaires depuis 1885, le surcroît de tra-
vail imposé aux ouvriers par les heures
supplémentaires et la hausse du prix des
charbons.
En ce qui concerne la caisse de secours,
l'orateur reproche à la Compagnie : 1° De
ne laisser, d'après son avis même, que un
pour cent, pendant que les ouvriers lais-
sent trois pour cent; o d'administrer elle-
même ladite caisse, tandis qu'elle ne doit
figurer dans l'administration que propor-
tionnellement à ses versements.
Abordant ensuite la question des veuves
de mineurs, il regrette que la Compagnie
prive ces dernières du logementpour elles
et les orphelins.
Il déclare cette mesure d'autant plus in-
humaine et arbitraire que, souvent, la ma-
ladie du défunt a été contractée dans les
travaux des mines, en respirant l'air vi-
cié.
Il prend, à l'appui de sa thèse, les mé-
moires du docteur Rimbault, des hospices
de Saint-Etienne, lequel a fait l'autopsie de
cadavres de mineurs et a conclu qu'après
dix ans de service au fond des puits, ces
ouvriers étaient atteints d'anémie, qui est*
la maladie spéciale des mineurs.
L'orateur a été très applaudi et pas un
seul des employés de la Compagnie de
Nœux qui étaient présents à la réunion n'a
réfuté seS arguments.
La continuation de la grève a été votée
à l'unanimité.
Deplain, réunion à Barlin; cette commu-
ne fo»nnj* heaucouo d'ouvriers a Noeux.
Une cartouche de dynamite
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Lille, 30 octobre.
La situation est toujours la même dans
le Nord.
Hier, une cartouche de dynamite a fait
explosion à Déchy, dans la maison du garde
Caron; personne n'a été blessé; les per-
sonnes ont volé en éclats et les murs ont
été lézardés.
A Aniche, la troupe a dissipé la foule et
une réunion qui avait lieu chez Maillard,
dans la Grande-Rue, a été dissoute. On a
trouvé que le commissaire de police se
montrait un peu trop zélé et sa conduite
est blâmée par la population.
Les grévistes sont très calmes ; les ver-
riers ont fait une manifestation en leur fa-
veur.
On commente le décret ministériel du
Sty octobre qui permet de réquisitionner le
cantonnement des troupes.
-
LES DÉSORDRES
DE CHATILLON-SUR-LOIRE
L'affaire devant le tribunal. — Con-
damnation de tous les prévenus.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Gien, 30 octobre.
L'affaire des désordres de Châtillon-
sur-Loire est venue aujourd'hui devant
le tribunal correctionnel de Gien.
On connaît les faits ; ils ont été racontés
par le XIXf Siècle dans le numéro du 27
septembre.
Près de deux cents personnes faisaient,
le jour du premier tour de scrutin, à Châ-
tillon, une manifestation en faveur de M.
Loreau. Manifestation essentiellement réac-
tionnaire, aux cris de : « A bas Carnot! A
bas la République ! Vivent les Prussiens !
Vive Napoléon ! Vive Loreau 1 » Violences,
coups et blessures, rien ne manquait à cette
petite fête, dont M. Loreau payait les frais.
Le jugement qui a été rendu aujour-
d'hui confirme de tous points les faits ra-
contés par le XIXe Siècle.
Imbault a été condamné à six jours de
prison ;
Augustin Guillerault à huit jours ;
Jean Chevallier et Avon à 30 francs d'a-
mende ;
Frédéric Guillerault, ainsi que Damon et
Fayat, à seize francs d'amende. Ceux-ci
avaient déjà subi des condapanations pour
coups et blessures.
Et tous à onze francs pour tapage inju-
rieux.
Sur les neuf accusés, aucun n'a été ac-
quitté. 1
Procès Port alis-Lor eau
Dans le procès en diffamation intenté
par le Xl Xe Siècle et M. Portalis contre
M. Loreau, Me Millerand, notre avocat, a
obtenu un énorme succès. Sa plaidoirie
s'est terminée au' milieu d'une salve d'ap-
plaudissements, après une péroraison écra-
sante pour le candidat des honnêtes gens.
Après une plaidoirie de Me. Desponds, le
ministère public réclame une sévère appli-
cation de la loi. Le jugement est remis à
huitaine.
Me G.
A LA PRÉSIDENCE DU CONSEIL
Soirée artistique
Hier soir, a eu lieu à l'hôtel du minis-
tère du commerce, rue de Grenelle, la
grande soirée musicale et dramatique of-
ferte par M. Tirard, président du conseil,
ministre du commerce, et par Mme Ti-
rard.
Cinq mille invitations avaient été lan-
cées. Elles avaient été adressées aux mem-
bres du corps diplomatique, aux sommi-
tés littéraires et artistiques, aux membres
des grands corps de l'Etat et des jurys ainsi
qu'aux principaux exposants.
La salle des fêtes avait été transformée
pour la circonstance en salle de spectacle.
Un coquet théâtre, qui s'ouvrait au milieu
de draperies de velours rouge frangées
d'or, s'élevait à l'extrémité. a
La partie instrumentale avait été orga-
nisée surtout par MM. Delibes et Delsart.
La partie vocale a été également des plus
brillantes. On y asuccessivement applaudi
Mmes Krauss, Rose Caron, Melba et ,MM.
Lassalle, Soulacroix et Dupuy.
La partie littéraire était confiée à l'élite
de la Comérdie-Française : les bravos les
plus chaleureux ont accueilli MM. Coque-
lin ainé, Mounet-Sully, Worms, et Mmes
Barretta, Reichenberg et Kàlb.
On parle d'une soirée dansante qui serait
prochainement donnée à la présidence du
conseil.
CONSEIL MUNICIPAL DE PARIS
Le conseil municipal de Paris est convoqué
en session ordinaire pour le lundi h novem-
bre.
Contrairement au bruit qui en a couru, le
conseil n'est encore saisi d'aucune propo-
sition relative au chemin de fer métropoli-
tain.
LE MARIAGE DU PRINCE DE MONACO
Cérémonie sans apparat
Hier, à deux heures, a été célébré, à la
légation de Monaco, 6, rue d'Isly, le ma-
riage civil du prince Albert de Monaco
avec la duchesse de Richelieu.
A cette occasion, on avait arboré le dra-
peau blanc aux armes des Grimaldi, au
lieu du drapeau monégasque blanc et
rouge.
C'est le baron Fernand du Charmel qui
remplissait les fonctions d'officier de l'état
civil et qui a célébré le mariage dont les
témoiné étaient, pour le prince souverain :
le baron de Farincourt, gouverneur géné-
ral de la principauté de Monaco, et M. le
colonel de Castro ; pour Mme la duchesse
de Richelieu, née Alice Heine : ses cou-
sins, le duc de Rivoli et - le marquis de Na-
daillac. -
Les assistants, en raison du grand deuil
du marié, étaient peu nombreux ; les mem-
bres des deux familles, le prince hérédi-
taire de Monaco, M. le commandant Mai-
gret, représentant le président de la Répu-
blique, M. Charles Theuret, évêque de
Monaco, et quelques hauts fonctionnaires
de la principauté, tous en uniforme de
gala.
Aujourd'hui, à onze heures, dans 1% cha-
pelle de la nonciature, aura lieu le mariage
religieux.
La bénédiction nuptiale sera donnée par
le nonce anostolique.
i CHRONIQUE
Je viens de lire le rapport que M. E. Zé-
vorta adressé au ministre de l'instruction
publique sur le concours d'agrégation de
l'enseignement spécial, section littéraire
et économique.
H est fort bien fait, ce rapport, et très
intéressant. J'y ai vu avec chagrin que
les épreuves qui avaient donné les résul-
tats les plus faibles portaient justement
sur les matières qui me semblent les plus
importantes. Ainsi, il parait qu'en géo-
graphie les candidats ont fait des compo-
sitions excellentes, qu'ils ont tracé des
cartes irréprochables; mais qu'en revan-
che, la composition de littérature fran-
çaise a laissé à désirer.
Le sujet avait été pourtant choisi à
souhait pour une agrégation de l'ensei-
gnement spécial. Il reposait>sur cette pen-
sée de Joachim du Bellay, que la F rance
peut produire, elle aussi, des Homères,
des Démosthènes, des Virgiles et des Cicé-
rons. On demandait aux candidats de
montrer brièvement comment cette espé-
rance de Joachim du Bellay s'est réalisée,
et comment les grands écrivains de
France, lus, expliqués et commentés
comme le sont les auteurs anciens, don-
nent aux jeunes esprits une forte et saine
nourriture.
C'est là, en effet, un thème assez vaste
pour que tout concurrent qui sait un
peu d'histoire littéraire puisse trouver
quelque chose à dire. Il a de plus le mé-
rite d'offrir aux bons esprits l'occasion
de montrer qu'ils savent ordonner une
composition. Il est trop clair que l'effort
de l'écolier doit porter sur ces trois mots :
lus, expliqués et commentés. La nourri-
ture que donne l'antiquité aux jeunes
esprits n'est forte et saine que parce que
les auteurs grecs et latins sont lus, expli-
qués et commentés d'une certaine façon ;
elle serait tout aussi saine et forte, si nos
grands écrivains de France étaient étu-
diés de la même façon, et l'on verrait alors
que nous avons dans notre langue des
ouvrages qui ne le cèdent en rien à ceux
des Virgile et des Cicéron.
Il semble qu'il n'y ait pas d'autre fa-
çon de comprendre et de distribuer le
sujet. Une fois ces grandes lignes éta-
blies, chacun sera libre d'y fourrer tout
ce qu'il voudra. L'un parlera de Bossuet
et de Fénelon, l'autre de Corneille et de
Molière, peu importe! Je pourrai, moi,
professeur, corrigeant les copies, savoir
gré à l'élève de quelques détails justes,
de quelques jugements exprimés ayec
netteté et élégance, comme je pourrai lui
en vouloir de quelques erreurs de fait, de
quelques appréciations peu justes ou va-
gues ; mais ce ne sera pas pour moi l'es-
sentiel de la composition. Je reconnaîtrai
l'élève qui a fait de bonnes études, qui en
a emporté ce qu'elles doivent donnerj un
sens droit et un esprit clair, à ce signe
unique qu'il aura mis le doigt sur le
point essentiel du sujet proposé et qu'il
aura établi-une juste proportion entre
les diverses parties où il l'aura dis-
tribué.
Eh bien! M. Zévort nous apprend que
sur cent douze copies, dix-sept seulement
.ont atteint une note égale ou supérieure
à la moyenne, et qu'un seul s'est élevé à
la note quinze, vingt étant le chiffre
maximum.
« La plupart des concurrents, dit M. Zé-
vort, n'ont traité que la première partie
du sujet. Ils se sont lancés dans un dé-
veloppement banal et fastidieux sur l'his-
toire de la littérature française ; ils ont
cru devoir faire montre d'une érudition
qui ne convenait nullement au sujet. »
Je crois bien qu'elle ne convenait pas
au sujet! Elle était en dehors du sujet.
M. Zévort est bien indulgent, quand il
reproche à ces jeunes gens de n'avoir
traité que la première partie du sujet.
La vérité est qu'ils n'ont pas vu le vrai
sujet et qu'il ne l'ont pas traité du tout.
Et ce sont des jeunes gens qui se présen-
tent à l'agrégation! Cela fait pitié! Et voilà
pourquoi je me défie si fort de l'agréga-
tion de l'enseignement spécial, que l'on
veut, pour les avantages matériels, assi-
miler à la vieille agrégation classique.
M. Zévort est fort au courant deces ques-
tions universitaires : qu'il me permette
de lui pousser une interrogation.
On donne à cent jeunes gens, se présen-
tant au concours de l'agrégation pour
l'enseignement classique, le même sujet
à traiter, posé dans les mêmes termes :
combien M. Zévort croit-il qu'il s'en trou-
vera qui auront manqué le point précis
du sujet?
Un ou deux peut-être, parce qu'il y a
toujours, dans les concours, des agités
à qui la trépidation qu'ils éprouvent
brouille la vue et obscurcit le jugement.
Tous les autres auront vu juste le point
précis autour duquel doivent rayonner
tous les développements. Je ne dis pas
que tous feront de bonnes compositions ;
on peut avoir fait d'excellentes études
classiquite et avoir le style empesé, ou
traînant, ou encombré de redites; on
peut n'avoir pas de style du tout. Mais
elles donnent nécessairement, fatalement,
inévitablement, la droiture du sens et la
justesse de l'esprit.
Il paraît, c'est M. Zévort qui l'affirme
dans son rapport, que la composition de
gréographie a été très supérieure à celle
de littérature. Les cartes sont tracées
en général avec netteté, la plupart des
copies attestent de sérieuses connaissan-
ces géographiques. Tout cela est bel et
bien ; je ne veux point dire du mal de la
géographie. Mon excellent confrère, mon
camarade d'école, Raoul Frary, m'arra-
cherait les yeux, lui qui croit que la géo-
graphie devrait être la-base de tout l'en-
seignement universitaire.
Mais enfin la géographie. si je sors
du lycée la sachant mal, je puis la rap-
prendre plus tard ; ou même si, ne la
sachant pas du tout. j'ai besoin, un jour,
pour une raison ou pour une autre;
d'en connaître une partie, rien ne sera si
simple que de me procurer les livres n
cessaires, et en quelques jours je me
mettrai au courant.
Mais un bon jugement, mais un es
prit juste, mais un sens droit, cela ne
s acquiert ni en un jour, ni en vingt;
cela se forme, goutte à goutte, durant les
dix années de l'éducation classiaue. On
ne le croit plus aujourd'hui : c'est pour-
tant la vérité, que la rectitude de l'esprit
et l'affinement du goût sont les deux
meilleurs fruits de l'étude du grec et du
latin, les seuls même qu'il faille lui de-
mander. Je me sens des envies folles de
hausser les épaules, quand on me jette
au nez cette objection ridicule : Les élè-
ves passent dix ans de leur vie sur les
bancs du collège à apprendre le latin, et
ils en sortent sans le savoir.
Eh non ! ils ne le savent pas ; et quand
ils le sauraient, le latin leur serait d'une
médiocre utilité d'esprit. Mais le latin
leur a été une gymnastique à l'aidç de
laquelle ils ont pris l'habitude d'ana-
lyser la pensée des autres et de conduire
la leur. N'est-ce donc rien que cela ? Mais
c'est le tout de l'homme.
Nous soutenons encore que Fou n'ap-
prend bien le français qu'en traduisant
du latin ou du grec. On se moque de
nous quand nous avançons cette idée,
qui était jadis un axiome - et qui paraît
saugrenue à cette heure. Voyez pourtant
es qui arrive s
« De toutes les épreuves orales, dit
M, Zévort en son rapport au -ministre,
l'explication des auteurs français a été.
incontestablement la plus faible. Les
uns, ayant à expliquer une page de Ra-
belais ou de Régnier,se sont perdus dans
les menues réflexions sur le vocabulaire
et l'orthographe; il* n'ont point traduit
le passage et ne l'ont pas commenté, et
par contre ils ont soulevé des questiong
de langue qu'ils traitaient d'une ma-
nière incomplète. D'autres, sur les pages
les plus célèbres de Pascal, de Bossuet, de
Molière, n'ont trouvé crue des remararuea
oiseuses, banales, quelquefois même
inexactes ; on aurait pu croire, qu'ils Ii--=.
saient ces pages pour la première fois et
qu'ils improvisaient une explication..
Nous avons cru devoir nous montrer
particulièrement sévères pour cette épreu-
ve, et nous ne saurions assez recomman-
der aux candidats de lire attentivement
leurs auteurs classiques, d'en compren-
dre et d'en sentir les beautés, pour les
faire comprendre à leurs élèves. »
Recommandez, cher monsieur Zévort,
recommandez tout ce qu'il vous plaira.
C'est absolument comme si vous chan-
tiez; autant en emporte le vent. On"
n'apprend à lire et à commenter une
page- de français que lorsqu'on a sou-
vent et très souvent essayé de faire
passer dans notre langue des morceaux
de l'antiquité, et que souvent et très
souvent on s'est livré à l'opération con-
traire. On a été obligé de peser les
mots, d'analyser les tours, de se ren-
dre compte de tous les incidents de la
phrase.
En revanche, M. Zévort déclare que
l'épreuve orale de la géographie l'a plei-
nement satisfait. Allons, tant mieux ! il
paraît que le jury s'est félicité de ce ré-
sultat ! J'en suis bien aise.
Les leçons sur la législation usuelle et
l'économie commerciale ont donné moins
de satisfaction. Deux ou trois ont été
assez bonnes : «Nous aurions voulu frbu-
ver dans toutes les autres, d'une part,
un plan simple et logique, d'autre part,
un peu plus de généralisation. »
De la logique! de la généralisation l
va-t'en voir s'ils viennent, Jean, va-t'ec
voir s'ils viennent.
Francisque Saroey.
L'AFFAIRE KAPS
COUR D'ASSISES DE LA SEINE
Il n'aime pas les municipaux. — D ouï
comme un mouton. — Le vol et la
prostitution. - Un motif
trop délicat. -
A onze heures et demie, l'accusé est in- *
troduit dans la salle d'audience, qu'avait
envahie une foule avide d'émotions.
A la stupéfaction générale, Kaps est ac-,
compagné d'agents en bourgeois.
L'assassin du père Vinçard et de Léonie
Drieux, on l'a vu ce matin, dans le rerfjar-
quable exposé de notre collaborateur
Me Gervasy, n'aime pas les municipaux.
La cour a voulu montrer de la déférence
pour ce jeune criminel à poigne. C'est un
précédent fâcheux. En persévérant dans
cette voie, on pourrait aller fort loin.
De l'interrogatoire, mené au petit galop
de chasse par M. le président Robert, nous
ne reproduirons que les parties' essentiel-
les.
Le reste ne nous apprend rien que ne e
connaissent nos lecteurs.
L'accusé est âgé de dix-neuf ans.. Vêtu.
d'une redingote noire croisée, assez pro-
pre, il a le visage maigre. Pas un poil de
barbe. Les traits sont saillants, les yeux
durs. En somme, physionomie ingrate du.
rôdeur de barrière, du souteneur de pro-
fession. Aux questions qui lui sont posées,
il répond avec assurance, mais sans for-
fanterie. On sait ce que fut sa jeunesse. Il
reconnaît, sans la moindre difficulté, avoir
vécu de la prostitution de sa maîtresse.
M. le président. - Vous avez déclaré à l'ins-
truction que vous aimiez mieux vivre de la
prostitution que du vol?
L'accusé. — Parfaitement.
M. le président. — Vous avez été cependant
condamné pour vol. Vous avez assassiné, la
15 mars dernier, votre maîtresse, Léontina
Drieu. Pourquoi l'avez-vous tuée?-
L'accusé. — Le motif est trop délicat pour
être livré à la publicité (sic) et raconté à MM.
! es jurés.
M. le président. — Il suffit. Vous vous faites
suffisamment comprendre. Vous avez dit tout
d'abord que vous avez agi par jalousie.
L'accusé. - Je l'aimais!
M. le président. — Ensuite vous avez avoué
que vous redoutiez ses indiscrétions.
La mort du père Vinçard
, Le président retrace la scène de l'as&a««fc
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.04%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.04%.
- Auteurs similaires Bibliographie de la presse française politique et d'information générale Bibliographie de la presse française politique et d'information générale /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "BIPFPIG00"Le Briard : journal républicain, organe des intérêts de la Brie ["puis" journal régional ... "ou" journal de la démocratie] /ark:/12148/bd6t53936607d.highres L'Union bourguignonne : ["puis" journal de Dijon] : paraissant les mercredis, vendredis et dimanches ["puis" paraissant tous les jours, les dimanches et les jeudis exceptés "puis" paraissant les lundi, mardi, mercredi, vendredi et samedi] /ark:/12148/bd6t526290287.highresFonds régional : Aquitaine Fonds régional : Aquitaine /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "Aquit1"
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7560955b/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7560955b/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7560955b/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7560955b/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7560955b
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7560955b
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7560955b/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest