Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1890-05-22
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 22 mai 1890 22 mai 1890
Description : 1890/05/22 (A19,N6702). 1890/05/22 (A19,N6702).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
Dix-neuvième année. — Ne 6,702
CIRO Centimes — Paris et Départements CINQ Centimes
7EUDJ 92 MAI 1890
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LA LOI CONTRE 11 PRESSE
DEVANT LA CHAMBRE
ENCORE L'AMIRAL DUPERRÉ
- M. SAINT-SAENS A PARIS
CONVERSATION AVEC M. BAYOL
Le Drame de la rue de Provence
France et ltoiG
On s'est quelque peu ému, il y a
trois ou quatre jours, d'une nouvelle
à sensation lancée par le correspon-
dant viennois du Times. Il annonçait
un revirement complet de la politique
russe: l'empereur Alexandre, repous-
sant définitivement toute idée d'al-
liance avec la France, serait sur le
point de reprendre la tradition de ses
prédécesseurs et de renouer avec la
Prusse les liens d'une amitié plus que
séculaire. Nous serions donc con-
damnés à un isolement absolu et sans
remède, en face de l'Europe groupée
tout entière autour du César alle-
mand.
Le Times n'est pas un vulgaire ca-
nard, quoique son autorité ait été for-
tement atteinte en même temps que sa
caisse par le procès que lui a intenté
M. Parnell. La feuille volumineuse
qu'on appelle par excellence le jour-
nal de la Cité a eu la primeur de plus
d'une nouvelle importante, et nous
aurions quelque peine à croire qu'elle
compromît par un pur roman ce qui
lui reste de crédit.
Rien cependant n'est venu confir-
mer cette prétendue information, qui
avait d'autant plus besoin de confir-
mation qu'elle est en soi peu vraisem-
blable. Ni la presse russe, ni la presse
allemande n'ont traduit par des mar-
ques de sympathie mutuelle ce rap-
prochement des deux cours. Il fau-
drait donc supposer que le correspon-
dant du Times a découvert un secret
que les ministres et les souverains
eux-mêmes voulaient garder soigneu-
sement. Ce n'est pas tout. L'empereur
d'Allemagne se promenait précisé-
ment dans ses provinces orientales,
près de la frontière russe ; il a pro-
noncé des allocutions et l'on a remar-
qué qu'il faisait allusion à la possibi-
lité d'une guerre sur cette frontière.
Cette allusion,qui a paru à peine cour-
toise, serait, à coup sûr, le comble de
la dissimulation et de la rouerie de la
part de Guillaume II, s'il pensait que
son cousin et voisin va se jeter dans
ses bras ; et, s'il l'ignore, qui va se
vanter de le savoir?
Un officieux allemand de la Corres-
pondance politique dit avec raison que
le Times méconnaît la situation de l'Al-
lemagne, qui est engagée trop avant
dans la triple alliance pour former un
nouveau pacte avec une quatrième
puissance sans que cette quatrième
puissance se rapproche en même temps
de l'Autriche et de l'Italie. En d'autres
termes, la Russie ne pourrait redevenir
l'amie de la Prusse qu'à condition de
s'entendre avec l'Autriche, c'est-à-dire
de renoncer à toute influence dans les
Balkans. Ce serait de la part d'Alexan-
dre III une abdication humiliante. Il
lui faudrait accepter comme lé-
gale et définitive la présence de Fer-
dinand de Cobourg en Bulgarie, à
moins que la cour de Vienne ne retire
à ce prince l'appui qu'elle lui a donné
jusqu'ici. Or, le Times lui-même n'an-
nonce rien de pareil.
Quel motif pousserait donc la Russie
à changer d'attitude et le tsar à changer
de sentiments? Quel bénéfice peut-il
attendre de l'alliance allemande, à la-
quelle il a renoncé parce qu'elle lui
faisait jouer un rôle de dupe? M. de
Bismarck a quitté le pouvoir. Mais la
froideur d'Alexandre III n'était pas
inspirée par une rancune personnelle
contre M. de Bismarck. C'est la politi-
que allemande qui l'a froissé et en-
gagé à se recueillir dans une réserve
pleine de fierté; c'est l'action hostile
de l'Autriche en Serbie, en Roumanie,
en Bulgarie, qui a fait perdre à la
Russie le fruit de ses sacrifices et de
ses victoires; c'est la conclusion de la
triple alliance, qui a rendu l'Allema-
gne et l'Italie solidaires de la politique
anti-russe suivie par la cour de Vien-
ne. Il n'y a rien de changé dans la si-
tuation respective des grandes puis-
sances européennes, et c'est faire au
tsar une injure gratuite que de lui at-
tribuer un repentir et des résolutions
que rien ne justifierait.
On ne voit pas plus de motifs pour
qu'Alexandre III prenne à l'égard de la
France une attitude moins bienveil-
lante. Jamais les rapports entre les
deux nations n'ont été plus cordiaux ;
jamais leur mutuelle amitié ne s'est
affirmée par plus de démonstrations
publiques. Le tsar est un souverain
absolu; rien n'autorise à le faire pas-
ser pour un souverain capricieux qui
substitue sa fantaisie à la raison d'E-
tat. C'était pour son père, après le
traité de Francfort, ç'a été jusqu'ici
pour lui-même une maxime fonda-
mentale, qu'une France forte et bien
armée est indispensable à l'équilibre
européen. N'est-ce pas pour cela
qu'Alexandre II s'opposa en 1875 aux
desseins menaçants de M. de Moltke
et de M. de Bismarck; qu'Alexandre 111
pesa en 1887 sur l'Allemagne pour l'en-
gager à dénouer pacifiquement les fa-
meux incidents de la frontière?
S'agirait-il d'une sainte-alliance des
gouvernements monarchiques? Le mo-
ment serait singulièrement choisi pour
la conclure et pour y faire entrer la
Russie, quand l'empereur allemand
vient de réunir à Berlin une confé-
rence où il a négligé d'appeler les re-
présentants de la Russie et fait de
notables efforts pour rallier à sa cou-
ronne les socialistes de ses Etats. Per-
sonne dans l'Europe actuelle n'est de
taille ou d'humeur à jouer'les Metter-
nich et à prendre la direction d'une
politique de réaction internationale ;
s'il existait un souverain qui éprouvât
le besoin de chercher un appui au
dehors, ce ne serait assurément pas le
tsar, qui sait que son pouvoir est d'au-
tant plus solide qu'il répond aux aspi-
rations de son peuple en suivant une
politiqne toute nationale, c'est-à-dire
anti-allemande.
Qu'y a-t-il donc derrière la nouvelle
donnée par le Times? Rien, ou peu de
chose : tout au plus une intrigue dont
le but nous échappe et qui aurait
sans doute quelque rapport avec le
procès Panitza, où les ministres du
prince Ferdinand de Cobourg essaient
d'impliquer des diplomates russes
pour compromettre ou décourager
Alexandre III.
L'AMIRAL DUPERRÉ
La note attendue. — Renseignements
confirmés. — Grades et décorations.
- Où sont les états de services?
Une note officieuse envoyée à Y agence
Havas essaie de contredire les renseigne-
ments que nous avons publiés dans notre
dernier numéro touchant l'amiral Duperré,
et d'adoucir son étrange rôle pendant la
guerre de 1870-71.
L'agence Havas ne fait que confirmer ce
que nous avons dit. Voici cette note :
Deux journaux du matin ont publié sur le
vice-amiral Charles Duperré, tout récemment
appelé au commandement de l'escadre, des
renseignements inexacts.
Pour rétablir la vérité, il suffit de s'en réfé-
rer au dossier de cet officier général.
Il en résulte qu'en août 1870 il commandait,
en qualité de capitaine de vaisseau, le garde-
cotes le Taureau.
Appelé à l'armée de Metz, il franchit la
frontière de Belgique lors de la bataille de
Sedan.
Comme tous les officiers qui se trouvaient
dans la même situation, il fut interné en Bel-
gique par ordre du gouvernement de ce pays.
Prisonnier sur parole, il fut autorisé par le
ministre de la guerre belge à séjourner en
Angleterre jusqu'à la fin des hostilités.
Enfin, le 10 mars 1871, il reçut de la même
autorité l'ordre de rentrer en France, avec in-
vitation,de la part du général Faidherbe, de se
présenter à l'état-major de la place de Lille'
Depuis cette epoque, l'amiral Charles Du-
perré a exercé d'importants commandements
à la mer et rempli les fonctions de préfet
maritime à Lorient, Cherbourg et Toulon ; il a
été nommé contre-amiral en 1878 par l'amiral
Pothuau, vice-amiral en 188A par l'amiral
Peyron ; il a été fait commandeur de la Légion
d'honneur le 6 juillet 1881 par l'amiral Cloué,
et grand-oflicier de la Légion d'honneur le
19 décembre 1886 par l'amiral Aube.
Avons-nous dit autre chose ?
La guerre est déclarée en juillet. Jus-
qu'en août,l'amiral Duperré commande un
garde-côtes; il est appelé à l'armée de
Metz. et il « franchit la frontière de Belgi-
que lors de la bataille de Sedan ", lors,
c'est-à-dire au moment où l'impératrice,
dont il était aide de camp, « franchissait »
la frontière de France pour se rendre en
Angleterre.
Aussitôt il demande au gouvernement
belge l'autorisation d'aller rejoindre sa
souveraine et il séjourne en Angleterre jus-
qu'à la fin des hostilités.
La guerre est terminée; l'amiral Duperré
rentre en France au mois de mars, — or,
l'armistice a été signé le S8 février.
Et alors, il exerce d'importants comman-
dements à la mer, car l'amiral Duperré n'a
jamais eu que des fonctions aussi « im-
portantes » que peu périlleuses à accom-
plir; et c'est sans doute comme homme de
mer qu'il se révèle, en qualité de préfet
maritime à Lorient, Cherbourg, Toulon !
En France, il ne perd pas de temps.
Capitaine de vaisseau en 1870, il est contre-
amiral huit ans après, vice-amiral au bout
de six ans et membre du conseil supérieur
de la marine.
D'un grade à l'autre, l'amiral se fait dé-
corer. En 1881, il est commandeur de la Lé-
gion d'honneur; en 1886, grand-officier.
Voilà le « dossier », comme dit l'agence
Havas. Et maintenant, quels sont ses états
de services ? Pour avoir le grade de Courbet
et être plus que lui chamarré de décora-
tions, est-il allé à Fou-Tcheou? se trou-
vait-il à S fax?
Les états de services de l'amiral Duperré,
c'est d'être le dictateur rue Royale, c'est de
distribuer faveurs et disgrâces, postes et
grades. « Quand nous ne sommes pas pour
Duperré, nous disait un officier de vais-
seau, nous n'avons qu'à donner notre dé-
mission. Nous n'arriverons jamais. »
C'est la vérité, malheureusement.
GUILLAUME II EN VOYAGE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Copenhague, 20 mai.
L'empereur Guillaume et l'impératrice d'Al-
lemagne sont attendus ici mardi prochain 27
mars.
LA
LOI CONTRE LA PRESSE
! ,- L'OUVERTURE DU DÉBAT -.
La discussion générale. — Deux grands
discours. — M. Paul Deschanel et
M. Joseph Reinaoh. — Contre
et pour la loi Marcel Barthe.
C'est hier qu'est venue devant la Chambre
la grave question de la loi sur — ou, pour
mieux dire, contre la presse. On sait dans
quelles conditions se présentait le débat.
Rappelons-le en deux mots :
Le Sénat a voté assez récemment une pro-
position de M. Marcel Barthe ayant pour
objet — nous copions l'intitulé de Y Offi-
ciel — « de rendre aux tribunaux correc-
tionnels la connaissance des délits d'injure,
outrage et diffamation commis par la voie
de la presse contre le président de la Répu-
blique, les ministres, les membres des deux
Chambres, les fonctionnaires publics, les
dépositaires ou agents de l'autorité publi-
que, et toutes personnes chargées d'un ser-
vice ou d'un mandat public ».
En présence de cette proposition adop-
tée par la Chambre haute, M. Joseph Rei-
nach retira une proposion similaire dont
il avait précédemment pris l'initiative. La
Chambre nomma une commission entière-
ment défavorable à cette loi Barthe, et
cette commission, après un assez bref exa-
men, désigna comme rapporteur M. Ca-
mille Pelletan, avec mandat de conclure à
ce qu'il ne fût pas passé à la discussion des
articles. - - ..,
Le discours dé M. Deschanel
La discussion générale a été ouverte par
M. Deschanel qui, dans un long discours, a
combattu, lui aussi, cette proposition ré-
trograde.
Le député d'Eure-et-Loir a du talent et le
succès ne lui a pas fait défaut, au moins
pour certaines parties de sa harangue.
Mais il faut reconnaître qu'il a aussi ap-
porté à la tribune plusieurs arguments, et
surtout un certain nombre de considéra-
tions de l'ordre politique, qui ont paru
contestables à des titres divers.
M. Deschanel a semblé préoccupé de
plaire à tous les partis. C'est là une tâche à
peu près impossible, même à qui possède
une éloquence abondante et souple comme
l'est celle par où se distingue le jeune ora-
teur.
Plusieurs, en l'entendant hier, ressen-
taient comme une légère envie de répéter
avec une petite variante la légendaire ex-
clamation de Calchas et de s'écrier : « Trop
de fleurs. de rhétorique! »
M. Paul Deschanel a débuté par un coup
d'œil général sur la situation matérielle et
morale de la presse d'aujourd'hui. Le ta-
bleau qu'il en a tracé est vraiment excessif
en son pessimisme. Tout n'est pas louable,
à coup sûr, dans le journalisme contempo-
rain. Mais l'orateur a paru faire une place
plus large que de raison à cette presse de
diffamations, de scandales et de chantage
qu'il a d'ailleurs si justement flétrie. Collillie
si le public ne savait pas mettre à la place
qui leur convient certaines feuilles qui, par
l'odieux de leurs pratiques quotidiennes,
ne déshonorent qu'elles-mêmes,—sans par-
venir à salir l'exercice d'une profession
honorable entre toutes !
«—Ce sont lesexcès commis par ces tristes
journaux qui ont fait naitre l'idée de modi-
fications à apporter à la loi de 1881, a pour-
suivi l'orateur. Cette idée se peut-elle ap-
prouver en principe? Grave problème pour
tout homme impartial et soucieux de s'éle-
ver au-dessus de l'esprit de parti! En tous
cas, s'il y a quelque chose à faire, c'est le
gouvernement qui devrait prendre l'initia-
tive de le proposer, au lieu de se laisser
trainer à la remorque de l'initiative parle-
mentaire.
"On nous demande aujourd'hui de ren-
dre aux tribunaux correctionnels la con-
naissance des délits d'inj ure, outrage et
diffamation commis envers les fonction-
naires. Pour quelles raisons? Examinons-
les, en tàchant de les réfuter.
On reproche à la cour d'assises d'être
trop lente. Or, à Paris au moins, la cour
d'assises siège tous les quinze jours. Et
quant aux départements, la loi de 1881 n'ad-
met-elle pas des réunions extraordinaires
du jury? Il est facile d'user de cette faculté,
ou mieux encore, peut-être, de porter un
procès de presse devant lé jury d'un dé-
partement voisin et du ressort de la même
cour.
» On dit en second lieu que le jury ne
rend pas de jugements motivés, ce qui est
très fâcheux en matière de diffamation. Or,
qui empêche de poser aux jurés une dou-
ble question, à laquelle il répondra par oui
ou par non, et de lui demander : 1° Si le
fait de diffamation est vrai, s'il considère
que la preuve en a été faite; UO Si, dans ce
cas, le journaliste qui l'a produit était de
bonne foi? Dès lors, une réponse négative
sur le premier point et affirmative sur le
second permettrait l'acquittement du jour-
naliste sans qu'il en résultât une condam-
nation morale du fonctionnaire attaqué.»
Les juges correctionnels sont-ils
indépendants?
Enfin, on déclare que le jury est trop
souvent partial et passionné, a poursuivi
M. Deschanel. Et nous lui empruntons une
partie de sa réponse à cet argument, qui
est en somme l'argument essentiel et capi-
tal du débat :
SI. Paul Desehanel. — Eh oui 1 le jury est
faillible, parce qu'il est composé d'hommes
qui partagent les entraînements de l'opinion
publique. Mais c'est ici que de deux maux il
faut choisir te moindre. Le jury dépend de
l'opinion publique, mais le tribunal correc-
tionnel, de qui dépend-il donc? (Très bien!
très bien !)
Entre le gouvernement et l'écrivain, vous
ne pouvez pas prendre pour arbitres des juges
nommés par le gouvernement, des juges qui
sont dans sa main et qui attendent de lui la
récompense de leurs services. (Applaudisse-
ments.)
Vous dites : Mais si un simple particulier
peut aller devant la police correctionnelle,
pourquoi le fonctionnaire public ne le pour-
rait-il pas, à raison même de sa fonction?
Vous faites ici une double confusion. C'est, en
effet, une erreur juridique que d'assimiler
ainsi la diffamation contre un particulier à la
diffamation contre un fonctionnaire public.
Vous n'avez pas le droit d'alléguer un fait,
même vrai, contre un particulier, tandis que
c'est un droit et même un devoir que de dé-
noncer le fonctionnaire qui a abusé de ses
pouvoirs, l'agent infidèle ou prévaricateur.
C'est même là le noble rôle qui appartient à
la presse. (Très bien ! très bien ! sur divers
bancs.)
Il est donc inadmissible que le gouverne-
ment fasse juger par la police correction-
nelle les procès dirigés contre les hauts fonc-
tionnaires, les miuistres, les sénateurs et les
| députés. Voyez-vous d'ici le ministre prenant
pour arbitre le juge qu'il décorera au 1A juil-
let? (On rit.) Voyez-vous le sénateur, le dépu-
té implorant la même justice?
Et voilà pourquoi, même en 1822, quand
tous les procès de presse étaient déférés à la
police correctionnelle, on décida que le Par-
lement connaîtrait des délits commis contre
lui, et que l'école libérale a toujours identifié
la liberté de la-presse avec l'institution du
jury. (Très bien J très bien ! à gauche.)
Si, en regard de cette tradition libérale,
vous mettez la police correctionnelle, que
voyez-vous?
Partout l'abus de la répression, aboutissant
à l'arbitraire, à la négation de la liberté, et en
même temps une absolue impuissance à ré-
primer les écarts de la presse.
En effet, de deux choses : ou le tribunal
correctionnel acquitte, et alors quelle humi-
liation pour le pouvoir; ou le tribunal cor-
rectionnel condamne, et comment cette con-
damnation ne serait-elle pas suspecte?
M. Deschanel a ensuite rappelé l'édifiant
exemple des magistrats du 16 Mai qui par-
vinrent à découvrir ce fameux délit d'in-
jure dans le fameux dilemme de Gambetta:
« Se soumettre ou se démettre. »
Considérations politiques
Puis, après avoir indiqué que l'idée pre-
mière des mesures restrictives de la liberté
de la presse date de l'époque où le césa-
risme menaçait nos institutions libres, il
s'est demandé si cet état d'esprit doit du-
rer encore aujourd'hui, quand, suivant
son expression, « la situation est net-
toyée »:
Il s'agit maintenant de savoir si la politique
qui pouvait convenir pendant la lutte est en-
core la meilleure au lendemain de la victoire,
si des lois d'exception que pouvait expliquer
le péril national doivent devenir le régime
normal de l'établissement républicain.
Eh bien, non ! Un gouvernement personnel
peut vivre un temps d'expédients, de mesures
de rigueur, de lois de compression.
Nous savons ce que cela vaut et où cela
mène. Et c'est pour cela que nous avons voulu
réaliser l'idéal de nos pères et faire un gou-
vernement libre (Très bien ! très bien J eur les
mêmes bancs.)
L'avons--nous fait, ce gouvernement-là? le
faisons-nous? (Mouvements divers.)
La proposition qu'on vous apporte et qui
n'est pas seule de son espèce, qui se rallie à
d'autres lois analogues, qui n'est qu'un an-
neau d'une chaîne, le système général dont
elle fait partie, l'état d'esprit qu'elle révèle
sont-ils de nature à enra iner la liberté pu-
blique dans ce pays? (Très bien! très bien I à
gauche.)
Si quelque chose m'étonne, m'effraye, c'est
de voir que, vingt ans après que la République
a été établie, toutes les institutions adminis-
tratives, judiciaires, fiscales du premier em-
pire sont encore debout. (Applaudissements à
gauche.)
Et c'est au moment où, éclairés par cette
grande épreuve, nous devrions nous efforcer
plus que jamais de délivrer, d'affranchir l'Etat
de tous les fardeaux inutiles, de toutes les
responsabilités compromettantes, sous les-
quelles il chancelle, sous lesquelles il suc-
combe. (Interruptions au centre et sur di-
vers bancs.)
Je suis étonné de ces interruptions, car je
défends la doctrine libérale de tous nos maî-
tres depuis un siècle. (Très bien! très bien !
à gauche.)
M. Ciolterora. — Précisez
■M. Paul Deschanel. — Que je précise 1
Mais cet amas de centralisation et de bureaux
qui date de l'an VIII, qu'en faites-vous ? (Vifs
applaudissements sur un grand nombre de
bancs. — Mouvements divers.)
M. Deschanel a conclu, — et cette partie
de son discours était tout à fait hors du
sujet en même temps quelle a été médio-
cre en soi, — par l'exposé de la politique
qu'il préconise, politique « véritablement
nationale », a-t-il dit. Il s'est autorisé du
précédent de Raoul Duval et a fait, en som-
me, de larges avances à la Droite. Toujours
la politique des Débats! M. Deschanel a,
d'ailleurs, appartenu à la rédaction de ce
journal, comme chacun sait.
La réplique de M. Reinach
C'est M. Joseph Reinach qui, répondant à
M. Deschanel, est venu soutenir la loi Mar-
cel Barthe.
Le député des Basses-Alpes a pu voir
qu'il ne suffit pas d'avoir du talent pour dé-
fendre une aussi mauvaise cause.
Nous n'analyserons pas il discours de M.
Reinach. Les arguments dont il s'est servi
ne sont-ils pas depuis longtemps connus ?
— La liberté de la presse n'a rien de
commun avec la liberté de l'injure et de
l'outrage. La presse ne saurait bénéficier
d'une législation spéciale : elle doit être
soumise au droit commun. Le gouverne-
ment a le devoir de faire respecter ses
fonctionnaires. Sans doute, nous avons
vaincu le boulangisme ; mais est-ce une
raison pour oublier un passé si récent et
nous endormir, désarmés, dans notre vic-
toire?
Ces quelques phrases suffisent à résumer
l'argumentation de M. Reinach : « Nous de-
mandons une loi efficace et prompte, s'est-
il encore écrié. Le jury est ondoyant et mo-
bile. Pour mieux armer la République, il
nous faut les magistrats de la police cor-
rectionnelle. Eux seuls sauront faire justice
des injures et des diffamations commises
contre nos fonctionnaires. »
A voir l'accueil que la Chambre a fait à
ces théories, on peut juger bien compro-
mise dès maintenant la fortune de la pro-
position Barthe.
La clôture a été réclamée après le discours
de M. Reinach. Mais elle a été repoussée à.
la demande de M. Maxime Leconte, qui se
propose de soutenir le système mixte de la
diffamation maintenue au jury et de l'injure
déférée à la police correctionnelle.
M. Henri de Lacretelle a donc pu faire
entendre une brève allocution en faveur de
la liberté. Après quoi, la suite de la discus-
sion générale a été renvoyée à jeudi.
Il parait que dix-huit orateurs sont en-
core inscrits pour prend part au débat ; mais
la plupart renonceront évidemment à leur
tour de parole.
Ce qui est le plus curieusement attendu
maintenant, c'est l'opinion du gouverne-
ment, opinion que doit faire connaître M.
Faliières.
M. COSTA ELU
(D'UN CORRESPONDANT)
Rome, 20 mai.
M. Andréa Costa, candidat socialiste, réfu-
gié en France, a été élu à la Chambre des dé-
putés par la ville de Bologne, avec 300 voix
de majorité.
RETOUR DU COMMANDANT HUE
Souvenirs récents. — Un maquignon
allemand contre notre attaché -
militaire à Berlin.
On dit que le commandant Hue, premier
attaché militaire de France à Berlin, va
être prochainement rappelé, sur sa de-
mande.
On se rappelle les voies de fait commi-
ses, il y a quelques mois, sur cet officier
supérieur par un maquignon allemand, et
la condamnation dérisoire infligée à ce
dernier par les tribunaux de Berlin.
Cet incident n'est probablement pas
étrahgér à la demande de rappel du com-
mandant Hue.
Le choix, assez délicat, de son succes-
seur, retarde seul, paraît-il, son retour en
France.
M. CAMILLE SAINT-SAENS
Arrivée à Paris. — M. Saint-Saëns et
« Ascanio ». — Les débuts d'un ba-
ryton. — Une faillite de qua-
rante sous. -
Ainsi que nous l'annoncions hier, M. Ca-
mille Saint-Saëns est arrivé à Paris hier
matin à neuf heures, par le rapide venant
de Marseille.
Il est descendu à l'hôtel Terminus, où, à
peine installé, il a été assailli par une nuée
de reporters, auxquels il n'a pu échapper
qu'à grand'peine pour se rendre chez son
collaborateur, M. Louis Gallet, qui l'atten-
dait pour déjeuner. Là encore il a dû con-
signer rigoureusement sa porte afin de se
dérober aux interviews.
Un.de.nos collaborateurs attendaitM. Saint-
Saëns à l'Opéra, où sa visite était annoncée,
et a pu causer longuement avec l'éminent
compositeur.
M. Saint-Saëns à l'Opéra
Tout a été dit, ou à peu près, sur le sé-
jour à Las Palmas de M. Saint-Saëns, qui
n'a fait, à ce sujet, que confirmer à notre
collaborateur les nouvelles que nous avons
données ici-même.
Il est parfaitement exact que l'auteur
d'Ascanio ignorait complètement où en
étaient les études de son ouvrage ; les jour-
naux français arrivent difficilement a Las
Palmas et c'est seulement quand la presse
européenne tout entière s'est préoccupée
de la mystérieuse disparition du composi-
teur, et que son incognito a été dévoilé, que
M. Saint-Saëns a appris que son œuvre
avait été représentée avec un immense
succès.
Il s'est d'ailleurs largement rattrapé
hier, et il a passé une partie de l'après-
midi à lire les comptes rendus d'Ascanio,
que M. Gallet avait mis de côté à son inten-
tion.
Il a approuvé sans restriction toutes les
coupures qu'on avait jugées nécessaires, et
il a remercié avec la plus vive effusion
M. Gailhard, qui a monté son œuvre avec
tant d'activité et de dévouement.
Ce soir seulement il pourra remercier
les excellents interprètes d'Ascanio. Il as-
sistera à la représentation; une troisième
loge de face est reten ue.
Détail curieux : M. Saint-Saëns a été tris
surpris en apprenant l'effet produit par la
belle phrase de Lassalle : <* 0 beauté, j'ai
compris ta puissance », que le public rede-
mande chaque soir avec enthousiasme; le
compositeur considérait cette page comme
la plus mauvaise de la partition.
Un impresario dans l'embarras
Encore un détail, très piquant, pour
finir :
Les journaux de Las Palmas avaient ra-
conté que, pendant son séjour dans cette
ville, M. Saint-Saëns avait prié le directeur
d u théâtre de lui laisser chanter le rôle de
Monterone dans Rigoletto. Nous n'avions
pas osé reproduire cette anecdote, la ju-
geant par trop fantaisiste. Elle est absolu-
ment exacte, et M. Saint-Saëns riait aux
larmes en contant cette amusante aventure
à notre collaborateur.
Tout était décidé: le baryton improvisé
avait répété son rôle, en italien, à la satis-
faction générale ; il attendait avec impa-
tience l'heure de lancer l'anathème contre
le duc de Mantoue, lorsqu'on vint lui an-
noncer que la représentation n'aurait pas
lieu. Le directeur avait mis la clef sous la
porte, ne pouvant payer les appointements
de sa première chanteuse, qui devait tou-
cher deux francs par représentation î
Heureux pays, où les compositeurs im-
plorent la faveur de chanter gratis des
rôles qu'ils n'ont pas écrits et où les direc-
teurs font faillite pour quarante sous 1
Le a XIX" Siècle a publiera demain la
« Chronique » par M. Francisque Sarcey.
L'ARMÉE ALLEMANDE
ET L'ARMÉE FRANÇAISE
Les déclarations du ministre de la
guerre. — Une comparaison.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Berlin, 20 mai.
On assure,dans les cercles militaires,que
l'effectif de paix de l'armée allemande sera
porté à 5A0,000 hommes, sur la base de
1 1/8 0/0 de la population recensée au der-
nier dénombrement en 1885. Cette augmen-
tation nécessitera la création de deux corps
d'armée nouveaux, portant à vingt-deux le
nombre total des corps d'armée.
A la commission chargée d'examiner la
demande de crédits militaires, le ministre
de la guerre a déclaré que la France est en
avance sur l'Allemagne et fait tous les jours
de nouveaux efforts. La France a 561 ba-
taillons, tandis que l'Allemagne n'en a que
53h.
De plus, tous ceux qui sont au courant
de la situation savent que l'armée française
de 1890 est tout autre que l'armée de 1870;
en outre, l'esprit de l'armée est plus mili-
taire et enfin l'armement est beaucoup
meilleur.
LI Allemagne et la triple alliance
Ce matin, la commission militaire a reçu
communication du tableau comparatif des
forces militaires de l'Autriche et de l'Ita-
lie.
Le président de la commission n ilitairs
du Parlement allemand, ayant fait savoir
au chancelier de l'empire que plusieurs
membres de cette commission désiraient
obtenir des informations concernant la si-
tuation politique, le général de Caprivi a
écrit qu'en ce qui concerne la triple al-
liance, il pouvait seulement constater de
nouveau un fait connu de tout le monde, à
savoir que cette alliance existait toujours
et n'avait pas éprouvé de changement, et
qu'il ne s'était produit aucune modification
dans les relations que les puissances alliées
entretienijent les unes avec les autres.
LA VIEDE PARIS
Le théâtre est certainement une préoc-
cupation de tous les Parisiens,. riches, de
moyenne aisance ou même pauvres. Il
est la distraction, la mode, la passion, la
source d'oubli pour les uns et pour les
autres. Chacun s'intéresse à ce qui le
touche. C'est pourquoi, quitte à y reve-
nir avec plus de détails à mesure que les
questions se débattront une à une, je
dois signaler la brochure que M. Antoine
a fait paraître aujourd'hui, et qui est
une source féconde de réflexions sur bien
des su jets divers touchant aux théâtres.
Dans cette brochure, M. Antoine fait
l'historique du Théâtre-Libre qu'il dirige
depuis quatre ou cinq ans, historique
que nos lecteurs connaissent, car nous
avons suivi, au jour le jour le dévelop-
pement de cette entreprise.
Modeste en ses débuts, inaugurée en
un véritable « boui-boui » des hauteurs
de Montmartre, elle émigra à Montpar-
nasse et, depuis un an, elle s'est trans-
portée dans les régions moins lointaines
du boulevard de Strasbourg. Je ne re-
viens pas sur ces migrations. Je ne m'ar-
rête pas davantage, pour l'heure, à ce
que M. Antoine appelle son programme -
littéraire. Il ne fait guère que résumer
des choses que nous savons ici. Mais ce
qui doit toucher les ParisienS; c'est le
plan de ïïéformes qam propose et qu'il
s'engage à accomplir, si on lui en donne
les moyens, ce que je souhaite de grand
cœur.
Dans ce plan de réformes, il y a deux
parties distinctes. Certaines nouveautés
sont d'ordre moral, certaines d'ordre
matériel. Les premières consistent sur-
tout à rompre avec le système des « étoi-
les » dramatiques, c'est-à-dire avec l'ha-
bitude des directeurs rs- mettre en ve-
dette sur l'affiche le nom II! qédien,
d'un chanteur, à qui on fait, dans la
pièce, la part du lion. Les auteurs, quand
un interprète a l'oreille du public, ne se
défendent pas d'écrire un rôle pour lui,
pour lui seul, tirant parti de sa « nature M,
comme on dit, et même de ses défauts
physiques. Les acteurs s'habituent de la
sorte, non à entrer dans la peau des per-
sonnages qu'ils jouent, mais à voir ces
personnages entrer dans leur propre
peau.
- C'est incontestablement là une cause
de décadence pour le théâtre, et, malgré
l'apparence, une cause de la crise que
l'on traverse. Oui, certes, il y a un pu-
blic pour aller voir tel ou tel acteur à la
mode, et quand cet acteur joue, le théâ-
tre fait des recettes. Mais, tout d'abord,
cette.« étoile » charge le budget du théâ-
tre de prétentions énormes ; et quand
elle disparaît, pour une raison ou pour
une autre, le vide se fait dans les salles
où jadis on avait un public d'amateurs
qui, tous les mois, allait au moins une
fois au théâtre, et constituait un public
très supérieur à celui d'aujourd'hui.
Mais ce sont surtout les améliorations
matérielles que les Parisiens , vous ou
moi, nous réclamons avec le plus de rai-
son. Elles tiennent, d'ailleurs, de près
aux réformes d'ordre moral, artistique.
Car la première chose que nous voulons,
c'est aller au théâtre pour un prix rai-
sonnable. Or, le spectacle, aujourd'hui,
est infiniment trop cher, et une des rai-
sons de cette cherté est le système des
étoiles.
Je ne veux citer ni un théâtre ni un ar-
tiste ; mais il est des maisons où un seul
interprète coûte, à lui seul, autant que le
reste de la troupe. Cherté des acteurs, dé-
veloppement absurde de la mise en scène,
voilà les raisons qui font que le théâtre
coûte trop cher, sans que cette élé-
vation des prix soit une garantie de for-
tune pour les directeurs, écrasés d'ail-
leurs par cet inique droit des pauvres.
Nous voulons aller au théâtre à meilleur
marché, ce qui nous permettra d'y aller
plus souvent, de devenir meilleurs juges,
d'y trouver un élément d'instruction po-
pulaire et de distraction familiale. Et
nous voulons, ce qui est aussi très pos-
sible, y aller dans des conditions meil-
leures de confortable. Il est singulier que
le pays de France, égalitaire et démocra-
tique, soit celui où l'on fait le moins
pour que le peuple ait les commodités
ou les plaisirs auxquels il a droit et qui
ont sur lui la plus salutaire influence.
Les troisièmes classes, en chemin de fer,
sont abominables. Les places à bon
marché, dans les théâtres, sont impos-
sibles à occuper sans y risquer toutes
sortes de maux.
On ne parquerait pas des chevaux de
prix là où on entasse des hommes..
Sans dégagements, sans confortable, sans
circulation intérieure, sans aucun des
services nécessaires, les théâtres sont des
endroits de gehenne et on comprend que
les petits bourgeois, que les ouvriers
aillent de préférence aux cafés-concerts,
qui offrent cependant des spectacles bien
inférieurs à tous les points de vue. Il est
grand temps que nous profitions, pour
l'aération, pour l'éclairage, pour la sûreté
comme pour la commodité des specta-
teurs, des progrès qui ont été accomplis,.
j'ai le regret de le dire, dans les pays
étrangers.
Parisiens, mes amis, qui aimez le
théâtre à la passion, vous ne l'avez pas
tel que vous mériteriez de l'avoir. L'es-
prit de routine pèse lourdement sur tout
ce qui touche aux choses de la scène. Je
ne prétends pas que M. Antoine ait, d'un
coup, apporté remède à tout, que ses
projets soient tous parfaits ou tous éga-
lement réalisables. Mais il me semble quoi
c'est quelque chose d'avoir posé la ques-
tion, d'avoir établi que la lassitude du
public ne vient pas d'un refroidissement
de sa part pour une noble distraction et
qu'on lui doit de s'associer à son effort
Henry Fouquier.
CIRO Centimes — Paris et Départements CINQ Centimes
7EUDJ 92 MAI 1890
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LA LOI CONTRE 11 PRESSE
DEVANT LA CHAMBRE
ENCORE L'AMIRAL DUPERRÉ
- M. SAINT-SAENS A PARIS
CONVERSATION AVEC M. BAYOL
Le Drame de la rue de Provence
France et ltoiG
On s'est quelque peu ému, il y a
trois ou quatre jours, d'une nouvelle
à sensation lancée par le correspon-
dant viennois du Times. Il annonçait
un revirement complet de la politique
russe: l'empereur Alexandre, repous-
sant définitivement toute idée d'al-
liance avec la France, serait sur le
point de reprendre la tradition de ses
prédécesseurs et de renouer avec la
Prusse les liens d'une amitié plus que
séculaire. Nous serions donc con-
damnés à un isolement absolu et sans
remède, en face de l'Europe groupée
tout entière autour du César alle-
mand.
Le Times n'est pas un vulgaire ca-
nard, quoique son autorité ait été for-
tement atteinte en même temps que sa
caisse par le procès que lui a intenté
M. Parnell. La feuille volumineuse
qu'on appelle par excellence le jour-
nal de la Cité a eu la primeur de plus
d'une nouvelle importante, et nous
aurions quelque peine à croire qu'elle
compromît par un pur roman ce qui
lui reste de crédit.
Rien cependant n'est venu confir-
mer cette prétendue information, qui
avait d'autant plus besoin de confir-
mation qu'elle est en soi peu vraisem-
blable. Ni la presse russe, ni la presse
allemande n'ont traduit par des mar-
ques de sympathie mutuelle ce rap-
prochement des deux cours. Il fau-
drait donc supposer que le correspon-
dant du Times a découvert un secret
que les ministres et les souverains
eux-mêmes voulaient garder soigneu-
sement. Ce n'est pas tout. L'empereur
d'Allemagne se promenait précisé-
ment dans ses provinces orientales,
près de la frontière russe ; il a pro-
noncé des allocutions et l'on a remar-
qué qu'il faisait allusion à la possibi-
lité d'une guerre sur cette frontière.
Cette allusion,qui a paru à peine cour-
toise, serait, à coup sûr, le comble de
la dissimulation et de la rouerie de la
part de Guillaume II, s'il pensait que
son cousin et voisin va se jeter dans
ses bras ; et, s'il l'ignore, qui va se
vanter de le savoir?
Un officieux allemand de la Corres-
pondance politique dit avec raison que
le Times méconnaît la situation de l'Al-
lemagne, qui est engagée trop avant
dans la triple alliance pour former un
nouveau pacte avec une quatrième
puissance sans que cette quatrième
puissance se rapproche en même temps
de l'Autriche et de l'Italie. En d'autres
termes, la Russie ne pourrait redevenir
l'amie de la Prusse qu'à condition de
s'entendre avec l'Autriche, c'est-à-dire
de renoncer à toute influence dans les
Balkans. Ce serait de la part d'Alexan-
dre III une abdication humiliante. Il
lui faudrait accepter comme lé-
gale et définitive la présence de Fer-
dinand de Cobourg en Bulgarie, à
moins que la cour de Vienne ne retire
à ce prince l'appui qu'elle lui a donné
jusqu'ici. Or, le Times lui-même n'an-
nonce rien de pareil.
Quel motif pousserait donc la Russie
à changer d'attitude et le tsar à changer
de sentiments? Quel bénéfice peut-il
attendre de l'alliance allemande, à la-
quelle il a renoncé parce qu'elle lui
faisait jouer un rôle de dupe? M. de
Bismarck a quitté le pouvoir. Mais la
froideur d'Alexandre III n'était pas
inspirée par une rancune personnelle
contre M. de Bismarck. C'est la politi-
que allemande qui l'a froissé et en-
gagé à se recueillir dans une réserve
pleine de fierté; c'est l'action hostile
de l'Autriche en Serbie, en Roumanie,
en Bulgarie, qui a fait perdre à la
Russie le fruit de ses sacrifices et de
ses victoires; c'est la conclusion de la
triple alliance, qui a rendu l'Allema-
gne et l'Italie solidaires de la politique
anti-russe suivie par la cour de Vien-
ne. Il n'y a rien de changé dans la si-
tuation respective des grandes puis-
sances européennes, et c'est faire au
tsar une injure gratuite que de lui at-
tribuer un repentir et des résolutions
que rien ne justifierait.
On ne voit pas plus de motifs pour
qu'Alexandre III prenne à l'égard de la
France une attitude moins bienveil-
lante. Jamais les rapports entre les
deux nations n'ont été plus cordiaux ;
jamais leur mutuelle amitié ne s'est
affirmée par plus de démonstrations
publiques. Le tsar est un souverain
absolu; rien n'autorise à le faire pas-
ser pour un souverain capricieux qui
substitue sa fantaisie à la raison d'E-
tat. C'était pour son père, après le
traité de Francfort, ç'a été jusqu'ici
pour lui-même une maxime fonda-
mentale, qu'une France forte et bien
armée est indispensable à l'équilibre
européen. N'est-ce pas pour cela
qu'Alexandre II s'opposa en 1875 aux
desseins menaçants de M. de Moltke
et de M. de Bismarck; qu'Alexandre 111
pesa en 1887 sur l'Allemagne pour l'en-
gager à dénouer pacifiquement les fa-
meux incidents de la frontière?
S'agirait-il d'une sainte-alliance des
gouvernements monarchiques? Le mo-
ment serait singulièrement choisi pour
la conclure et pour y faire entrer la
Russie, quand l'empereur allemand
vient de réunir à Berlin une confé-
rence où il a négligé d'appeler les re-
présentants de la Russie et fait de
notables efforts pour rallier à sa cou-
ronne les socialistes de ses Etats. Per-
sonne dans l'Europe actuelle n'est de
taille ou d'humeur à jouer'les Metter-
nich et à prendre la direction d'une
politique de réaction internationale ;
s'il existait un souverain qui éprouvât
le besoin de chercher un appui au
dehors, ce ne serait assurément pas le
tsar, qui sait que son pouvoir est d'au-
tant plus solide qu'il répond aux aspi-
rations de son peuple en suivant une
politiqne toute nationale, c'est-à-dire
anti-allemande.
Qu'y a-t-il donc derrière la nouvelle
donnée par le Times? Rien, ou peu de
chose : tout au plus une intrigue dont
le but nous échappe et qui aurait
sans doute quelque rapport avec le
procès Panitza, où les ministres du
prince Ferdinand de Cobourg essaient
d'impliquer des diplomates russes
pour compromettre ou décourager
Alexandre III.
L'AMIRAL DUPERRÉ
La note attendue. — Renseignements
confirmés. — Grades et décorations.
- Où sont les états de services?
Une note officieuse envoyée à Y agence
Havas essaie de contredire les renseigne-
ments que nous avons publiés dans notre
dernier numéro touchant l'amiral Duperré,
et d'adoucir son étrange rôle pendant la
guerre de 1870-71.
L'agence Havas ne fait que confirmer ce
que nous avons dit. Voici cette note :
Deux journaux du matin ont publié sur le
vice-amiral Charles Duperré, tout récemment
appelé au commandement de l'escadre, des
renseignements inexacts.
Pour rétablir la vérité, il suffit de s'en réfé-
rer au dossier de cet officier général.
Il en résulte qu'en août 1870 il commandait,
en qualité de capitaine de vaisseau, le garde-
cotes le Taureau.
Appelé à l'armée de Metz, il franchit la
frontière de Belgique lors de la bataille de
Sedan.
Comme tous les officiers qui se trouvaient
dans la même situation, il fut interné en Bel-
gique par ordre du gouvernement de ce pays.
Prisonnier sur parole, il fut autorisé par le
ministre de la guerre belge à séjourner en
Angleterre jusqu'à la fin des hostilités.
Enfin, le 10 mars 1871, il reçut de la même
autorité l'ordre de rentrer en France, avec in-
vitation,de la part du général Faidherbe, de se
présenter à l'état-major de la place de Lille'
Depuis cette epoque, l'amiral Charles Du-
perré a exercé d'importants commandements
à la mer et rempli les fonctions de préfet
maritime à Lorient, Cherbourg et Toulon ; il a
été nommé contre-amiral en 1878 par l'amiral
Pothuau, vice-amiral en 188A par l'amiral
Peyron ; il a été fait commandeur de la Légion
d'honneur le 6 juillet 1881 par l'amiral Cloué,
et grand-oflicier de la Légion d'honneur le
19 décembre 1886 par l'amiral Aube.
Avons-nous dit autre chose ?
La guerre est déclarée en juillet. Jus-
qu'en août,l'amiral Duperré commande un
garde-côtes; il est appelé à l'armée de
Metz. et il « franchit la frontière de Belgi-
que lors de la bataille de Sedan ", lors,
c'est-à-dire au moment où l'impératrice,
dont il était aide de camp, « franchissait »
la frontière de France pour se rendre en
Angleterre.
Aussitôt il demande au gouvernement
belge l'autorisation d'aller rejoindre sa
souveraine et il séjourne en Angleterre jus-
qu'à la fin des hostilités.
La guerre est terminée; l'amiral Duperré
rentre en France au mois de mars, — or,
l'armistice a été signé le S8 février.
Et alors, il exerce d'importants comman-
dements à la mer, car l'amiral Duperré n'a
jamais eu que des fonctions aussi « im-
portantes » que peu périlleuses à accom-
plir; et c'est sans doute comme homme de
mer qu'il se révèle, en qualité de préfet
maritime à Lorient, Cherbourg, Toulon !
En France, il ne perd pas de temps.
Capitaine de vaisseau en 1870, il est contre-
amiral huit ans après, vice-amiral au bout
de six ans et membre du conseil supérieur
de la marine.
D'un grade à l'autre, l'amiral se fait dé-
corer. En 1881, il est commandeur de la Lé-
gion d'honneur; en 1886, grand-officier.
Voilà le « dossier », comme dit l'agence
Havas. Et maintenant, quels sont ses états
de services ? Pour avoir le grade de Courbet
et être plus que lui chamarré de décora-
tions, est-il allé à Fou-Tcheou? se trou-
vait-il à S fax?
Les états de services de l'amiral Duperré,
c'est d'être le dictateur rue Royale, c'est de
distribuer faveurs et disgrâces, postes et
grades. « Quand nous ne sommes pas pour
Duperré, nous disait un officier de vais-
seau, nous n'avons qu'à donner notre dé-
mission. Nous n'arriverons jamais. »
C'est la vérité, malheureusement.
GUILLAUME II EN VOYAGE
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Copenhague, 20 mai.
L'empereur Guillaume et l'impératrice d'Al-
lemagne sont attendus ici mardi prochain 27
mars.
LA
LOI CONTRE LA PRESSE
! ,- L'OUVERTURE DU DÉBAT -.
La discussion générale. — Deux grands
discours. — M. Paul Deschanel et
M. Joseph Reinaoh. — Contre
et pour la loi Marcel Barthe.
C'est hier qu'est venue devant la Chambre
la grave question de la loi sur — ou, pour
mieux dire, contre la presse. On sait dans
quelles conditions se présentait le débat.
Rappelons-le en deux mots :
Le Sénat a voté assez récemment une pro-
position de M. Marcel Barthe ayant pour
objet — nous copions l'intitulé de Y Offi-
ciel — « de rendre aux tribunaux correc-
tionnels la connaissance des délits d'injure,
outrage et diffamation commis par la voie
de la presse contre le président de la Répu-
blique, les ministres, les membres des deux
Chambres, les fonctionnaires publics, les
dépositaires ou agents de l'autorité publi-
que, et toutes personnes chargées d'un ser-
vice ou d'un mandat public ».
En présence de cette proposition adop-
tée par la Chambre haute, M. Joseph Rei-
nach retira une proposion similaire dont
il avait précédemment pris l'initiative. La
Chambre nomma une commission entière-
ment défavorable à cette loi Barthe, et
cette commission, après un assez bref exa-
men, désigna comme rapporteur M. Ca-
mille Pelletan, avec mandat de conclure à
ce qu'il ne fût pas passé à la discussion des
articles. - - ..,
Le discours dé M. Deschanel
La discussion générale a été ouverte par
M. Deschanel qui, dans un long discours, a
combattu, lui aussi, cette proposition ré-
trograde.
Le député d'Eure-et-Loir a du talent et le
succès ne lui a pas fait défaut, au moins
pour certaines parties de sa harangue.
Mais il faut reconnaître qu'il a aussi ap-
porté à la tribune plusieurs arguments, et
surtout un certain nombre de considéra-
tions de l'ordre politique, qui ont paru
contestables à des titres divers.
M. Deschanel a semblé préoccupé de
plaire à tous les partis. C'est là une tâche à
peu près impossible, même à qui possède
une éloquence abondante et souple comme
l'est celle par où se distingue le jeune ora-
teur.
Plusieurs, en l'entendant hier, ressen-
taient comme une légère envie de répéter
avec une petite variante la légendaire ex-
clamation de Calchas et de s'écrier : « Trop
de fleurs. de rhétorique! »
M. Paul Deschanel a débuté par un coup
d'œil général sur la situation matérielle et
morale de la presse d'aujourd'hui. Le ta-
bleau qu'il en a tracé est vraiment excessif
en son pessimisme. Tout n'est pas louable,
à coup sûr, dans le journalisme contempo-
rain. Mais l'orateur a paru faire une place
plus large que de raison à cette presse de
diffamations, de scandales et de chantage
qu'il a d'ailleurs si justement flétrie. Collillie
si le public ne savait pas mettre à la place
qui leur convient certaines feuilles qui, par
l'odieux de leurs pratiques quotidiennes,
ne déshonorent qu'elles-mêmes,—sans par-
venir à salir l'exercice d'une profession
honorable entre toutes !
«—Ce sont lesexcès commis par ces tristes
journaux qui ont fait naitre l'idée de modi-
fications à apporter à la loi de 1881, a pour-
suivi l'orateur. Cette idée se peut-elle ap-
prouver en principe? Grave problème pour
tout homme impartial et soucieux de s'éle-
ver au-dessus de l'esprit de parti! En tous
cas, s'il y a quelque chose à faire, c'est le
gouvernement qui devrait prendre l'initia-
tive de le proposer, au lieu de se laisser
trainer à la remorque de l'initiative parle-
mentaire.
"On nous demande aujourd'hui de ren-
dre aux tribunaux correctionnels la con-
naissance des délits d'inj ure, outrage et
diffamation commis envers les fonction-
naires. Pour quelles raisons? Examinons-
les, en tàchant de les réfuter.
On reproche à la cour d'assises d'être
trop lente. Or, à Paris au moins, la cour
d'assises siège tous les quinze jours. Et
quant aux départements, la loi de 1881 n'ad-
met-elle pas des réunions extraordinaires
du jury? Il est facile d'user de cette faculté,
ou mieux encore, peut-être, de porter un
procès de presse devant lé jury d'un dé-
partement voisin et du ressort de la même
cour.
» On dit en second lieu que le jury ne
rend pas de jugements motivés, ce qui est
très fâcheux en matière de diffamation. Or,
qui empêche de poser aux jurés une dou-
ble question, à laquelle il répondra par oui
ou par non, et de lui demander : 1° Si le
fait de diffamation est vrai, s'il considère
que la preuve en a été faite; UO Si, dans ce
cas, le journaliste qui l'a produit était de
bonne foi? Dès lors, une réponse négative
sur le premier point et affirmative sur le
second permettrait l'acquittement du jour-
naliste sans qu'il en résultât une condam-
nation morale du fonctionnaire attaqué.»
Les juges correctionnels sont-ils
indépendants?
Enfin, on déclare que le jury est trop
souvent partial et passionné, a poursuivi
M. Deschanel. Et nous lui empruntons une
partie de sa réponse à cet argument, qui
est en somme l'argument essentiel et capi-
tal du débat :
SI. Paul Desehanel. — Eh oui 1 le jury est
faillible, parce qu'il est composé d'hommes
qui partagent les entraînements de l'opinion
publique. Mais c'est ici que de deux maux il
faut choisir te moindre. Le jury dépend de
l'opinion publique, mais le tribunal correc-
tionnel, de qui dépend-il donc? (Très bien!
très bien !)
Entre le gouvernement et l'écrivain, vous
ne pouvez pas prendre pour arbitres des juges
nommés par le gouvernement, des juges qui
sont dans sa main et qui attendent de lui la
récompense de leurs services. (Applaudisse-
ments.)
Vous dites : Mais si un simple particulier
peut aller devant la police correctionnelle,
pourquoi le fonctionnaire public ne le pour-
rait-il pas, à raison même de sa fonction?
Vous faites ici une double confusion. C'est, en
effet, une erreur juridique que d'assimiler
ainsi la diffamation contre un particulier à la
diffamation contre un fonctionnaire public.
Vous n'avez pas le droit d'alléguer un fait,
même vrai, contre un particulier, tandis que
c'est un droit et même un devoir que de dé-
noncer le fonctionnaire qui a abusé de ses
pouvoirs, l'agent infidèle ou prévaricateur.
C'est même là le noble rôle qui appartient à
la presse. (Très bien ! très bien ! sur divers
bancs.)
Il est donc inadmissible que le gouverne-
ment fasse juger par la police correction-
nelle les procès dirigés contre les hauts fonc-
tionnaires, les miuistres, les sénateurs et les
| députés. Voyez-vous d'ici le ministre prenant
pour arbitre le juge qu'il décorera au 1A juil-
let? (On rit.) Voyez-vous le sénateur, le dépu-
té implorant la même justice?
Et voilà pourquoi, même en 1822, quand
tous les procès de presse étaient déférés à la
police correctionnelle, on décida que le Par-
lement connaîtrait des délits commis contre
lui, et que l'école libérale a toujours identifié
la liberté de la-presse avec l'institution du
jury. (Très bien J très bien ! à gauche.)
Si, en regard de cette tradition libérale,
vous mettez la police correctionnelle, que
voyez-vous?
Partout l'abus de la répression, aboutissant
à l'arbitraire, à la négation de la liberté, et en
même temps une absolue impuissance à ré-
primer les écarts de la presse.
En effet, de deux choses : ou le tribunal
correctionnel acquitte, et alors quelle humi-
liation pour le pouvoir; ou le tribunal cor-
rectionnel condamne, et comment cette con-
damnation ne serait-elle pas suspecte?
M. Deschanel a ensuite rappelé l'édifiant
exemple des magistrats du 16 Mai qui par-
vinrent à découvrir ce fameux délit d'in-
jure dans le fameux dilemme de Gambetta:
« Se soumettre ou se démettre. »
Considérations politiques
Puis, après avoir indiqué que l'idée pre-
mière des mesures restrictives de la liberté
de la presse date de l'époque où le césa-
risme menaçait nos institutions libres, il
s'est demandé si cet état d'esprit doit du-
rer encore aujourd'hui, quand, suivant
son expression, « la situation est net-
toyée »:
Il s'agit maintenant de savoir si la politique
qui pouvait convenir pendant la lutte est en-
core la meilleure au lendemain de la victoire,
si des lois d'exception que pouvait expliquer
le péril national doivent devenir le régime
normal de l'établissement républicain.
Eh bien, non ! Un gouvernement personnel
peut vivre un temps d'expédients, de mesures
de rigueur, de lois de compression.
Nous savons ce que cela vaut et où cela
mène. Et c'est pour cela que nous avons voulu
réaliser l'idéal de nos pères et faire un gou-
vernement libre (Très bien ! très bien J eur les
mêmes bancs.)
L'avons--nous fait, ce gouvernement-là? le
faisons-nous? (Mouvements divers.)
La proposition qu'on vous apporte et qui
n'est pas seule de son espèce, qui se rallie à
d'autres lois analogues, qui n'est qu'un an-
neau d'une chaîne, le système général dont
elle fait partie, l'état d'esprit qu'elle révèle
sont-ils de nature à enra iner la liberté pu-
blique dans ce pays? (Très bien! très bien I à
gauche.)
Si quelque chose m'étonne, m'effraye, c'est
de voir que, vingt ans après que la République
a été établie, toutes les institutions adminis-
tratives, judiciaires, fiscales du premier em-
pire sont encore debout. (Applaudissements à
gauche.)
Et c'est au moment où, éclairés par cette
grande épreuve, nous devrions nous efforcer
plus que jamais de délivrer, d'affranchir l'Etat
de tous les fardeaux inutiles, de toutes les
responsabilités compromettantes, sous les-
quelles il chancelle, sous lesquelles il suc-
combe. (Interruptions au centre et sur di-
vers bancs.)
Je suis étonné de ces interruptions, car je
défends la doctrine libérale de tous nos maî-
tres depuis un siècle. (Très bien! très bien !
à gauche.)
M. Ciolterora. — Précisez
■M. Paul Deschanel. — Que je précise 1
Mais cet amas de centralisation et de bureaux
qui date de l'an VIII, qu'en faites-vous ? (Vifs
applaudissements sur un grand nombre de
bancs. — Mouvements divers.)
M. Deschanel a conclu, — et cette partie
de son discours était tout à fait hors du
sujet en même temps quelle a été médio-
cre en soi, — par l'exposé de la politique
qu'il préconise, politique « véritablement
nationale », a-t-il dit. Il s'est autorisé du
précédent de Raoul Duval et a fait, en som-
me, de larges avances à la Droite. Toujours
la politique des Débats! M. Deschanel a,
d'ailleurs, appartenu à la rédaction de ce
journal, comme chacun sait.
La réplique de M. Reinach
C'est M. Joseph Reinach qui, répondant à
M. Deschanel, est venu soutenir la loi Mar-
cel Barthe.
Le député des Basses-Alpes a pu voir
qu'il ne suffit pas d'avoir du talent pour dé-
fendre une aussi mauvaise cause.
Nous n'analyserons pas il discours de M.
Reinach. Les arguments dont il s'est servi
ne sont-ils pas depuis longtemps connus ?
— La liberté de la presse n'a rien de
commun avec la liberté de l'injure et de
l'outrage. La presse ne saurait bénéficier
d'une législation spéciale : elle doit être
soumise au droit commun. Le gouverne-
ment a le devoir de faire respecter ses
fonctionnaires. Sans doute, nous avons
vaincu le boulangisme ; mais est-ce une
raison pour oublier un passé si récent et
nous endormir, désarmés, dans notre vic-
toire?
Ces quelques phrases suffisent à résumer
l'argumentation de M. Reinach : « Nous de-
mandons une loi efficace et prompte, s'est-
il encore écrié. Le jury est ondoyant et mo-
bile. Pour mieux armer la République, il
nous faut les magistrats de la police cor-
rectionnelle. Eux seuls sauront faire justice
des injures et des diffamations commises
contre nos fonctionnaires. »
A voir l'accueil que la Chambre a fait à
ces théories, on peut juger bien compro-
mise dès maintenant la fortune de la pro-
position Barthe.
La clôture a été réclamée après le discours
de M. Reinach. Mais elle a été repoussée à.
la demande de M. Maxime Leconte, qui se
propose de soutenir le système mixte de la
diffamation maintenue au jury et de l'injure
déférée à la police correctionnelle.
M. Henri de Lacretelle a donc pu faire
entendre une brève allocution en faveur de
la liberté. Après quoi, la suite de la discus-
sion générale a été renvoyée à jeudi.
Il parait que dix-huit orateurs sont en-
core inscrits pour prend part au débat ; mais
la plupart renonceront évidemment à leur
tour de parole.
Ce qui est le plus curieusement attendu
maintenant, c'est l'opinion du gouverne-
ment, opinion que doit faire connaître M.
Faliières.
M. COSTA ELU
(D'UN CORRESPONDANT)
Rome, 20 mai.
M. Andréa Costa, candidat socialiste, réfu-
gié en France, a été élu à la Chambre des dé-
putés par la ville de Bologne, avec 300 voix
de majorité.
RETOUR DU COMMANDANT HUE
Souvenirs récents. — Un maquignon
allemand contre notre attaché -
militaire à Berlin.
On dit que le commandant Hue, premier
attaché militaire de France à Berlin, va
être prochainement rappelé, sur sa de-
mande.
On se rappelle les voies de fait commi-
ses, il y a quelques mois, sur cet officier
supérieur par un maquignon allemand, et
la condamnation dérisoire infligée à ce
dernier par les tribunaux de Berlin.
Cet incident n'est probablement pas
étrahgér à la demande de rappel du com-
mandant Hue.
Le choix, assez délicat, de son succes-
seur, retarde seul, paraît-il, son retour en
France.
M. CAMILLE SAINT-SAENS
Arrivée à Paris. — M. Saint-Saëns et
« Ascanio ». — Les débuts d'un ba-
ryton. — Une faillite de qua-
rante sous. -
Ainsi que nous l'annoncions hier, M. Ca-
mille Saint-Saëns est arrivé à Paris hier
matin à neuf heures, par le rapide venant
de Marseille.
Il est descendu à l'hôtel Terminus, où, à
peine installé, il a été assailli par une nuée
de reporters, auxquels il n'a pu échapper
qu'à grand'peine pour se rendre chez son
collaborateur, M. Louis Gallet, qui l'atten-
dait pour déjeuner. Là encore il a dû con-
signer rigoureusement sa porte afin de se
dérober aux interviews.
Un.de.nos collaborateurs attendaitM. Saint-
Saëns à l'Opéra, où sa visite était annoncée,
et a pu causer longuement avec l'éminent
compositeur.
M. Saint-Saëns à l'Opéra
Tout a été dit, ou à peu près, sur le sé-
jour à Las Palmas de M. Saint-Saëns, qui
n'a fait, à ce sujet, que confirmer à notre
collaborateur les nouvelles que nous avons
données ici-même.
Il est parfaitement exact que l'auteur
d'Ascanio ignorait complètement où en
étaient les études de son ouvrage ; les jour-
naux français arrivent difficilement a Las
Palmas et c'est seulement quand la presse
européenne tout entière s'est préoccupée
de la mystérieuse disparition du composi-
teur, et que son incognito a été dévoilé, que
M. Saint-Saëns a appris que son œuvre
avait été représentée avec un immense
succès.
Il s'est d'ailleurs largement rattrapé
hier, et il a passé une partie de l'après-
midi à lire les comptes rendus d'Ascanio,
que M. Gallet avait mis de côté à son inten-
tion.
Il a approuvé sans restriction toutes les
coupures qu'on avait jugées nécessaires, et
il a remercié avec la plus vive effusion
M. Gailhard, qui a monté son œuvre avec
tant d'activité et de dévouement.
Ce soir seulement il pourra remercier
les excellents interprètes d'Ascanio. Il as-
sistera à la représentation; une troisième
loge de face est reten ue.
Détail curieux : M. Saint-Saëns a été tris
surpris en apprenant l'effet produit par la
belle phrase de Lassalle : <* 0 beauté, j'ai
compris ta puissance », que le public rede-
mande chaque soir avec enthousiasme; le
compositeur considérait cette page comme
la plus mauvaise de la partition.
Un impresario dans l'embarras
Encore un détail, très piquant, pour
finir :
Les journaux de Las Palmas avaient ra-
conté que, pendant son séjour dans cette
ville, M. Saint-Saëns avait prié le directeur
d u théâtre de lui laisser chanter le rôle de
Monterone dans Rigoletto. Nous n'avions
pas osé reproduire cette anecdote, la ju-
geant par trop fantaisiste. Elle est absolu-
ment exacte, et M. Saint-Saëns riait aux
larmes en contant cette amusante aventure
à notre collaborateur.
Tout était décidé: le baryton improvisé
avait répété son rôle, en italien, à la satis-
faction générale ; il attendait avec impa-
tience l'heure de lancer l'anathème contre
le duc de Mantoue, lorsqu'on vint lui an-
noncer que la représentation n'aurait pas
lieu. Le directeur avait mis la clef sous la
porte, ne pouvant payer les appointements
de sa première chanteuse, qui devait tou-
cher deux francs par représentation î
Heureux pays, où les compositeurs im-
plorent la faveur de chanter gratis des
rôles qu'ils n'ont pas écrits et où les direc-
teurs font faillite pour quarante sous 1
Le a XIX" Siècle a publiera demain la
« Chronique » par M. Francisque Sarcey.
L'ARMÉE ALLEMANDE
ET L'ARMÉE FRANÇAISE
Les déclarations du ministre de la
guerre. — Une comparaison.
(DE NOTRE CORRESPONDANT PARTICULIER)
Berlin, 20 mai.
On assure,dans les cercles militaires,que
l'effectif de paix de l'armée allemande sera
porté à 5A0,000 hommes, sur la base de
1 1/8 0/0 de la population recensée au der-
nier dénombrement en 1885. Cette augmen-
tation nécessitera la création de deux corps
d'armée nouveaux, portant à vingt-deux le
nombre total des corps d'armée.
A la commission chargée d'examiner la
demande de crédits militaires, le ministre
de la guerre a déclaré que la France est en
avance sur l'Allemagne et fait tous les jours
de nouveaux efforts. La France a 561 ba-
taillons, tandis que l'Allemagne n'en a que
53h.
De plus, tous ceux qui sont au courant
de la situation savent que l'armée française
de 1890 est tout autre que l'armée de 1870;
en outre, l'esprit de l'armée est plus mili-
taire et enfin l'armement est beaucoup
meilleur.
LI Allemagne et la triple alliance
Ce matin, la commission militaire a reçu
communication du tableau comparatif des
forces militaires de l'Autriche et de l'Ita-
lie.
Le président de la commission n ilitairs
du Parlement allemand, ayant fait savoir
au chancelier de l'empire que plusieurs
membres de cette commission désiraient
obtenir des informations concernant la si-
tuation politique, le général de Caprivi a
écrit qu'en ce qui concerne la triple al-
liance, il pouvait seulement constater de
nouveau un fait connu de tout le monde, à
savoir que cette alliance existait toujours
et n'avait pas éprouvé de changement, et
qu'il ne s'était produit aucune modification
dans les relations que les puissances alliées
entretienijent les unes avec les autres.
LA VIEDE PARIS
Le théâtre est certainement une préoc-
cupation de tous les Parisiens,. riches, de
moyenne aisance ou même pauvres. Il
est la distraction, la mode, la passion, la
source d'oubli pour les uns et pour les
autres. Chacun s'intéresse à ce qui le
touche. C'est pourquoi, quitte à y reve-
nir avec plus de détails à mesure que les
questions se débattront une à une, je
dois signaler la brochure que M. Antoine
a fait paraître aujourd'hui, et qui est
une source féconde de réflexions sur bien
des su jets divers touchant aux théâtres.
Dans cette brochure, M. Antoine fait
l'historique du Théâtre-Libre qu'il dirige
depuis quatre ou cinq ans, historique
que nos lecteurs connaissent, car nous
avons suivi, au jour le jour le dévelop-
pement de cette entreprise.
Modeste en ses débuts, inaugurée en
un véritable « boui-boui » des hauteurs
de Montmartre, elle émigra à Montpar-
nasse et, depuis un an, elle s'est trans-
portée dans les régions moins lointaines
du boulevard de Strasbourg. Je ne re-
viens pas sur ces migrations. Je ne m'ar-
rête pas davantage, pour l'heure, à ce
que M. Antoine appelle son programme -
littéraire. Il ne fait guère que résumer
des choses que nous savons ici. Mais ce
qui doit toucher les ParisienS; c'est le
plan de ïïéformes qam propose et qu'il
s'engage à accomplir, si on lui en donne
les moyens, ce que je souhaite de grand
cœur.
Dans ce plan de réformes, il y a deux
parties distinctes. Certaines nouveautés
sont d'ordre moral, certaines d'ordre
matériel. Les premières consistent sur-
tout à rompre avec le système des « étoi-
les » dramatiques, c'est-à-dire avec l'ha-
bitude des directeurs rs- mettre en ve-
dette sur l'affiche le nom II! qédien,
d'un chanteur, à qui on fait, dans la
pièce, la part du lion. Les auteurs, quand
un interprète a l'oreille du public, ne se
défendent pas d'écrire un rôle pour lui,
pour lui seul, tirant parti de sa « nature M,
comme on dit, et même de ses défauts
physiques. Les acteurs s'habituent de la
sorte, non à entrer dans la peau des per-
sonnages qu'ils jouent, mais à voir ces
personnages entrer dans leur propre
peau.
- C'est incontestablement là une cause
de décadence pour le théâtre, et, malgré
l'apparence, une cause de la crise que
l'on traverse. Oui, certes, il y a un pu-
blic pour aller voir tel ou tel acteur à la
mode, et quand cet acteur joue, le théâ-
tre fait des recettes. Mais, tout d'abord,
cette.« étoile » charge le budget du théâ-
tre de prétentions énormes ; et quand
elle disparaît, pour une raison ou pour
une autre, le vide se fait dans les salles
où jadis on avait un public d'amateurs
qui, tous les mois, allait au moins une
fois au théâtre, et constituait un public
très supérieur à celui d'aujourd'hui.
Mais ce sont surtout les améliorations
matérielles que les Parisiens , vous ou
moi, nous réclamons avec le plus de rai-
son. Elles tiennent, d'ailleurs, de près
aux réformes d'ordre moral, artistique.
Car la première chose que nous voulons,
c'est aller au théâtre pour un prix rai-
sonnable. Or, le spectacle, aujourd'hui,
est infiniment trop cher, et une des rai-
sons de cette cherté est le système des
étoiles.
Je ne veux citer ni un théâtre ni un ar-
tiste ; mais il est des maisons où un seul
interprète coûte, à lui seul, autant que le
reste de la troupe. Cherté des acteurs, dé-
veloppement absurde de la mise en scène,
voilà les raisons qui font que le théâtre
coûte trop cher, sans que cette élé-
vation des prix soit une garantie de for-
tune pour les directeurs, écrasés d'ail-
leurs par cet inique droit des pauvres.
Nous voulons aller au théâtre à meilleur
marché, ce qui nous permettra d'y aller
plus souvent, de devenir meilleurs juges,
d'y trouver un élément d'instruction po-
pulaire et de distraction familiale. Et
nous voulons, ce qui est aussi très pos-
sible, y aller dans des conditions meil-
leures de confortable. Il est singulier que
le pays de France, égalitaire et démocra-
tique, soit celui où l'on fait le moins
pour que le peuple ait les commodités
ou les plaisirs auxquels il a droit et qui
ont sur lui la plus salutaire influence.
Les troisièmes classes, en chemin de fer,
sont abominables. Les places à bon
marché, dans les théâtres, sont impos-
sibles à occuper sans y risquer toutes
sortes de maux.
On ne parquerait pas des chevaux de
prix là où on entasse des hommes..
Sans dégagements, sans confortable, sans
circulation intérieure, sans aucun des
services nécessaires, les théâtres sont des
endroits de gehenne et on comprend que
les petits bourgeois, que les ouvriers
aillent de préférence aux cafés-concerts,
qui offrent cependant des spectacles bien
inférieurs à tous les points de vue. Il est
grand temps que nous profitions, pour
l'aération, pour l'éclairage, pour la sûreté
comme pour la commodité des specta-
teurs, des progrès qui ont été accomplis,.
j'ai le regret de le dire, dans les pays
étrangers.
Parisiens, mes amis, qui aimez le
théâtre à la passion, vous ne l'avez pas
tel que vous mériteriez de l'avoir. L'es-
prit de routine pèse lourdement sur tout
ce qui touche aux choses de la scène. Je
ne prétends pas que M. Antoine ait, d'un
coup, apporté remède à tout, que ses
projets soient tous parfaits ou tous éga-
lement réalisables. Mais il me semble quoi
c'est quelque chose d'avoir posé la ques-
tion, d'avoir établi que la lassitude du
public ne vient pas d'un refroidissement
de sa part pour une noble distraction et
qu'on lui doit de s'associer à son effort
Henry Fouquier.
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