Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1873-12-04
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 04 décembre 1873 04 décembre 1873
Description : 1873/12/04 (A3,N749). 1873/12/04 (A3,N749).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7558107q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/03/2013
3» Année. — N° 749 PRIX DU NUMÉRO: PARIS 15 CENTIMES — DÉPARTEMENTS 20 CENrnfEs.
Jeudi 4 Décembre 1873.
I JUlF i E CTÈTT F
AlÀ dlJjuljJj
JOURNAL ROOUBLICAIN CONSERVATEUR ; ;'
RÉDACTION
8radresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
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DÉPARTEMENTS/
DÉPARTEMENTiS
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On s'abonne à Londres, ehez M. A. MAURICÊ général
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JOURNÉE FOLiTIQtlE
Paris, 3 décembre 1873.
Hier, dans les bureaux, nomination dès
commissaires chargés d'examiner le projet
du gouvernement sur la nomination des
maires; nous renvoyons, pour tes détails,
au compte-rendu spécial que nous publions
un peu plus loin. En séance publique, con-
tinuation du scrutin qui doit compléter la
commission constitutionnelle. Deux com-
missaires seulement ont été nommés, et
avec quelle peine ! Eafln, M. le comte de.
Ségur a été élu secrétaire de l'Assemblée,
en remplacement de M. Desjardins.
Si Boiis citons souventdes notes et des arti-
cles du Français, ce n'est pas, on le sait, que
nous ayons conçu pour ce journal une par-
ticulière estime, mais c'est qu'il est un des
organes officieux de M. le duc de Broglie
et du ministère. Il est donc curieux d'y
observer tantôt de certaines tendances,
tantôt la trace de certains soucis. Nous y
trouvons aujourd'hui des avis, des con-
seils et de paternelles semonces à la ma-
jorité qui se désagrége et qui laisse voir
a une indiscipline fâcheuse. » La note se
termine airni : « Il y a là un mal sur le-
quel tous les membres de la majorité, à
quelque groupe qu'ils appartiennent, doi-
vent faire leur - examen de conscience, - car
il faut y remédier sans retard. »
On aura deviné qu'il s'agit des légitimis-
tes fidèles, c'est-à-dire d'une partie de la
droite et de toute l'extrême droite, qui me-
nacent de plus en plus de se détacher.
Nous leur devons la justice de déclarer
qu'ils tiennent à honneur de ne pas s'enga-
ger plus avant dans la politique de palino-
dies et d'équivoques où s'enfoncent le cabi-
net et les députés du centre droit. Il y a des
points qu'ils ne sauraient admettre, et la
plupart d'entre eax ne voteront ni , la loi
sur les maires, ni la loi contre la presse
ni les autres lois dictatoriales qui sont at-
tendues. On pourra lire, à cet égard, une
lettre de M. de la Rochette que l'Union re-
produit avec de vifs éloges. Mais la défec-
tion que le ministère redoute, ne se borne
pas ici à I extrême droite et auX intrânsi-
geants de l'Union; dans la droite modé-
rée, chez les politiques et les sages, on
commence à montrer des sentiments aussi
vifs, aussi nets, à l'égard des mesures ex-
ceptionnelles. La Gazette de France les
condamne, après s'être tenu tous ces der-
niers jours dans une réservé qui avait été
remarquée.
C'est donc sur la droite que le ministère
porte des regards inquiets ; il la gronde
doucsment, la flatte, la rassure, lui re-
proche de le défier de ses plus sincères
anris ; lorsqu'il se trouve à bout d'argu-
ments, c'est l'ombre même de M. Ernoul,
le garde des sceaux déchu, qu'il fait appa-
raître, et nous lisons encore dans le Fran-
çais : Certains journaux de gauche J ou
d'extrême droite continuent à vouloir équi-
voquer sur la signification du dernier
changement de cabinet. Nous l'avons dit
et HOUS la répétons, des questions de per-
sonnes ont été agitées. Il n'y a pas eu de
dissidence &ur la politique à suivre entre
ceux dont les Doms ont été prononcés à
cette occasion. Le programme du gouver-
nement sé trotrvBirrêrÉie, assure-t-on, avoir
£ té rédigé par M. Ernoul, auquel les jour-
naud'extrême droite cherchent en ce mo-
ment à prêter un rôle si complètement en
contradiction avec la sage modération de
ses opinions et l'élévation de son carac-
tère." Si M. tërnoul peut avoir son appré-
ciation particulière sur telle question de
personne, il est absolument décidé à soute-
nir la politique du nouveau ministore, qui
n'est autrie que celle dont il avait formulé
lui-même la programme. » Mais, s'il ré-
glait un si parfait accord entre M. Ernoul
et M. le duc de Broglie, pourquoi M. Er-
aiotil est-il parti f
Voici maintenant quelque chose de
caractéristique et qui mérite encore plus
d'attention. Pour rallier à tout prix ce que
l'on pourra de voix ultramontaines et clé*
ricales, on prend dans lés affaires italien-
nes une attitude qui jusqu'ici n'avait pas
encore été prise. En tête du Français
d'hier le public a pu lire un long article-
manifeste auquel la récente encyclique.
sert de prétexte. L'auteur s'est appliqué
à imiter le style, à copier parfois les
expressions de l'Univers. Pie IX est « pri-
sonnier de l'Italie. » L'Eglise est Ge oppri-
mée comme elle le fut aux premiers siècles
par les empereurs romains. » Mais « les
promesses de Jésus-Christ, réalisées pen-
dant dix-huit siècles, ne trahiront .pas la
noî-re (noire siècle); nous est-il même défen-
du de croire que déjà nous en possédons
quelques effets ? » L'article se termine par
une phrase qu'on a faite à dessein obscure
et vague ; « Dieu a donné à ceux qui dé-
fendent aujourd'hui l'Eglise des armes que
leurs devanciers n'avaient pas. »
Combiea ces déclarations du plus offi-
cieux des journaux ministériels vaudront-
elles de voix dans la Chambre au gouver-
nement qui les a dictées ? Bien peu, sans
doute car les ultramoatains, comme, les
simples légitimistes, demanderont des gages
lus certains à un cabinet dont ils se dé-
fient. Mais, jusqu'où M, le duc de Broglie
et M. le duc Decazes, son nouveau collègue
et son successeur aux affaires étrangères,
voudraient-ils aller dans ce chemin-là?
C'est ce qu'il importerait de savoir, et l'un
trouvera que, par ce seul article du Fran-
fais, s'ils ne le désavouent, les a menés déjà
beaucoup trop loin. Depuis le 24 mai, par
les folles manifestations dont l'ancien mi-
nistère s'était rendu complice, nous avons
bien mal à propos inquiété l'Italie, nous
nous sommes à demi brouillés avec elle.
Est ce que M. lo duc Decazes aurait l'in-
tention d'achever l'œuvre et de faire tour-
ner en rupture ce qui n'était jusqu'ici que
froideur ? Il prépare, dans tous les cas, un
rôle ingrat et difficile au diplomate, quel
qu'il soit, qui doit aller remplacer à Rome
M. Fournier.
Quand le cabinet fait publier dans les
feuilles qui sont à sa dévotion de pareils
articles, de n'est plus seulement sur sa
politique intérieure, mais sur la politique
qu'il compte suivre au dehors, qu'il de-
vient. nécessaire du l'interroger. Où en
sommes-nous, en Europe, avec les puis-
sances ? On distribuait autrefois, au com-
encement des sessions, un Livre jaune,
Où figuraient toutës^les pièces diplomati-
ques qui pouvaient sans inconvénient être
imprimées. Il serait te caps de revenir à ce £
usage. Il serait temps de se rappeler que
peut-être les questions extérieures ne sont
pas pour nous les moins importantes et
lcs moins graves. Quoi! c'est dans un in-
térêt parlementaire, dans un. mesquin in-
térêt de majorité, que le cabinet actuel ne
craindrait pas de jouer ainsi avec le feu et
— pour dire le mot- avec la guerre? On
laisserait soupçonner des desseins d'inter-
vention en Italie pour conquérir la voix
de M. Dahirel ou de M. Martin d'Auray ?
C'est de la folie. Que le ministère désa-
youe ou fasse taire du moins ses officieux.
EUCK LIÉBERT.
-
Ainsi qu'on l'avait annoncé hier, le mi-
nistre de la guerre est venU. aujourd'hui
déclarer à la commission du budget que le
gouvernement était décidé y à appeler eu
1874 la 2e partie du contingent. La dépensé
nécessitée par cet appel sera d'enviroll 13
millions.
La commission du budget a repris en
hâte la discussion des propositions fi-
nancières de MM. Léon Say.et Keller.
ille ne votera définitivement sur la > pro-
position de M. Léon Say qu'après avoir
éntendu ,1e ministre des finances. Quant à
la proposition Relier, elle a été repoussée..
- ,---+-_.--:----
Silence au peuple ! Assez et trop sou-
vent il a eu la parole depuis le mois de
février 1871; c'est un scandale que les
gens de bien entendènt faire cesser. De-
puis tantôt trois ans il ne s'est guère
passé plus d'un trimestre sans qu'un ou
deux départements eussent à faire une
élection. C'était la loi, on s'y résignait ;
mais en maugréant, car il n'est point
agréable de recevoir des semonces, et le
suffrage universel n'a jamais perdu l'oc-
casion d'en adresser, et de vertes, à
PAssemblée natiomile: A la fin cela de-
venait intblérabl, et quelques députés
de la droite ont résolu de clore la bouche
à l'importun. Voici, ornée de ses consi-
dérants, la proposition de loi que MM.
Courcelle, Amédée Lefèvre-Pontalis, de
Meaux et autres viennent de soumettre
à. leurs collègues :
Considérant que le scrutia da liste a pour
mérite et pour objet principal de permettre une
transaction entre les diverses nuances de l'opi-
nion publique et de consacrer un accord sur des
noms qui les représentent ;
Considérantque e e, régime appliqué à des
élections isolées est une anomalie ;
Considérant, en outre, qu?à raison des vacan-
cèsjpuljipliées qui se produisent dans une As-
semblée nombreuse, il a. le grave ineonvéoient
de créer, sur les différents points du territoire,
une agitation électorale presque p^rmaiaente ;
Ont l'honneur de soumettre à l'Assemblée
nationale une proposition de loi ainsi conçue :
Article unique. — A l'avenir et jusqu'à la
promulgation de la prochaine loi électorale,
aucun collège électoral ne sera convoqué
pour élire des dépistés à l'Assemblée na-
tionale que si la députation du départe-
ment se trouve réduite de plus d'un quart.
Il est toujours temps de bien faire,
nous le savons ; toutefois l'opinion pu-
blique ne manquera point d'observer,
que l'on s'est avisé bien tard des incon-
vénients d'une loi qui fonctionne depuis
près de trois années. On examinera les
motifs invoqués, on scrutera les inten-
tions, et finalement il pourrait arriver
que le pays jugeât non sans quelque sé-
vérité cette sorte de mise en interdit
dont il est menacé.
Los auteurs du projet en question
parlent bien à leur aise du scrutin de
liste ; sans doute plusieurs d'entre eux,
et à coup sûr un grand nombre de leurs
collègues de la droite en sont les éton-
nants produits. C'est à la faveur du scru-
tin de liste, « qui permet une transac-
tion entre les diverses nuances de l'opi-
nion publique, » que beaucoup de mo-
narchistes ont pu trouver place, en
1871, sur des listes républicaines. Les
ingrats ! Mais le scrutin de liste n'a pas
seulement pour objet de permettre et
souvent de rendre trop faciles des in-
trusions de cette nature ; il a été imagi-
né aussi pour supprimer ce qu'on appe-
lait autrefois les bourgs pourris. Les lé-
gislateurs ont voulu que désormais les
marquis do Carabas pe fussent plus les
grands électeurs ou les élus obligatoires
d'une circonscription ; ils ont décidé que
pour être admis à l'honneur de siéger
dans les Assemblées, il faudrait être
l'homme de tout un département, et
non plus I) seigneur et maître d'un
canton. -
A ce point de vue, qu'il s'agisse de nom-
mer un, ou deux, ou vingt députés dans
un département, le scrutin de liste peut
fonctionner sans nulle anomalie ; quant
au danger de créer, sur les différents
points du territoire, une agitation électo-
rale presque permanente, à raison de la
fréquence des élections partielles, nous
répondrons, comme le faisait un jour
M. le duc d'Audiffret-Pasquier, que les
citoyens ne s'occupent jamais trop de la
chose publique et que notre pays ne sera
véritablement grand, prospère, et à tout
jamais débarrassé des despotismes, d'où
qu'ils viennent, que le; jour où tous les
citoyens seront bien pénétrés do cette-
vérité que la politique, c'est leur hon-
pour, c'est leur argent, et qu'ils ne sau-
raient trop s'en préoccuper. 8
Voilà pour les arguments invoqués en
faveur du projet de loi.
;, Passons à l'examen des intentions
qu'il révèle. Il est clair aujourd'hui pour
tout le monde que l'Assemblée élue en
février 1871 n'est point le portrait frap-
pant du pays; jusqu'à ce jour toutefois
les membres de la majorité n'avaient
point voulu en convenir; mais voilà
qu'enfin ils l'avouent, par la crainte qu'ils
montrent de voir le suffrage universel se
livrer à des retouches trop fréquentes.
Autre aveu contenu dans la proposition
de M. Courcelle : c'est tout juste-
ment à l'heure où l'Assemblée se pré-
pare aux grandes résolutions, qui doi-
vent sortir des lois constitutionnelles,
qu'elle ferme la'bouche au pays. C'est
donc qu'elle est bien sûre de ne point
mériter son approbation, car autrement
il n'est pas téméraire de supposer
qu'au lieu de restreindre les élections
partielles, la majorité eût été désireuse
de les voir se multiplier.
Notons aussi que parmi les signatai-
res de la proposition il se trouve, à no-
tre connaissance, au moins un député
appartenant à l'un des départements où
les électeurs, aux termes de la loi, sont
sur le point d'être convoqués. Ne craint-
il pas qu'on le soupçonne, comme on
pourrait soupçonner ceux qui voteront
ce projet, de n'avoir point voulu risquer
de voir le suffrage universel démentir,
par une élection partielle, les élections
hâtives et mal renseignées de 1871 ?
Telles sont, à première vue, les ré-
flexions que- fait naître le projet dont nous
avons donné le texte. M. Baragnon, le
nouveau sous-secrétaire d'État, disait
l'autre jour : Il faudra que la France mar-
che avec nous. Si la loi municipale de
M. de Broglie et la loi électorale de M. j
Courcelle ont pour but d'aider à l'ac-
complissement de ce miracle, nous crai-
gnons fort que M. Baragnon se soit
vanté. -
E. SCHNERB.
Chez un peuple qui s'appartient, qui
le sait et qui tient à son droit, une as-
semblée petite ou grande n'acceptera
jamais la présidepee d'un homiÈie qu'elle
n'a point élu.
Il suit de là que si notre gouvernement
se décidait à nommer les maires, il pro-
voquerait par cela seul autant de conflits
municipaux qu'il y a de communes en
France.
Le remède de ce mal est connu.
Quand un maire ne s'accorde pas avec
ses conseillers élus, on met le conseil à
la porte,. et le gouvernement Deus ex
machind, le remplace par une commis-
sion, triée sur le volet par le maire lui-
même. ','-
Mais comme il est impossible que les
citoyens d'une commune, électeurs,
hommes libres, souverains dans leur
sphère, subissent de plein gré l'autorité
d'une municipalité imposée, le gouver-
nement, s'il persiste, sera conduit fatale-
ment à nommer les électeurs.
On y songe. Nous le savons. Mais
qu'on y pense ! Ce n'est pas une petite
affaire que l'organisation du monde ren-
versé.
ABOUT.
*
COUPIER MLEMEmiM
• n
Versailles, 2 décembre 4873.
Aujourd'hui, deux décembre, M. le duc
du Broglie faisant le bonheur de la
France, il a été procédé à la nomination
de la commission chargée de faire revivre
les Ipis impériales relatives LUX municipa-
lités, ces mêmes lois qui permettaient ja-
dis à cemme duc de Broglie de faire
montre de tant de libéralisme. Pour chan-
ger, c'est toujours la même chose.
M. Biiffèfc lui-même, pour faire mieux,
ne trouve rien de supérieur aux anciens
.errements ; les boules folichonnes ont dû
cascader au chevet de son lit présidentiel,
et, afin de mettre un terme à leurs dé-
bordements, il a été décidé que l'urne aux
bulletins resterait sur la tribune, mais. que
l'urne aux boules serait transportée sur le
bureau. Ainsi le-décrètent d'ailleurs les;
vieux us parlementaires. Un des six secrétai-
res, aimable dragon, est chargé de garder,
nuit et jour, l'urne des Hespérides ; il n'en
défend pas l'entrée, au contraire il oblige
chaque boule à ne point faire l'école buis -
sonnière,
Espérons qu'une si noble constance va
être enfin couronnée de succès. Et pour-
tant, rien n'est moins sûr : la droite pu-
re tient à la nomination de MM. de La-
bassetière et de la Rochette, que le centre
,droit refuse de porter sur sa liste.
Ce n'est pas 14 d'ailleurs le seul symp-
tôme de la dissension qui s'accentue en*
tre les sœurs monarchistes. Dans le scru-
tin d'hier, on a pu constater que le can-
didat du centre droit, M. de Ségur, avait
accumulé contre lui, sous la forme de
bulletins Besson, vingt-quatre protesta-
tions de la droite pure. Aujouid hui M. de
Ségur est nommé, mais les protestations
n'en existeront pas moins; les dissidences
s'ébauchent d'abord sur les individualités
pour se dessiner nettement plus tard sur
les généralités.
Déjà, ce matin, dans les bureaux, des
droitiers, tels que MM. Chaurand, Bidard,
ee Franclieu, de Rodez-Bénavant, se sont
prononcés; contre la nouvelle loi munici-
pale, et avec une telle netteté que les
députés républicaius ont porté leurs suf-
frages sur quelques-uns des orateurs de la
droite. En apparence, le gouvernement a le
dessus dans la lutte d'aujourd'hui, puis-
qu'il tient neuf commissaires sur quinze;
au fond, le Cabinet ne doit éprouver qu'u-
ne confiance craintive dans sa victoire. Le
chiffre des abstentions est gros de menaces.
j Si le gouvernement réfléchit un instant
au peu qu'il fait, il doit être effrayé de ce
qu'il ne peut pas faire.
Quatre heures un quart.— Le résultat
du scrutin pour les commissaires est entre
les mains du président. Il lit : •
^Nombre de bulletins, 627.
Nombre de boules, 624.
Le rire est étouffé, il se dissimule, n'o-
sant- éclater et faire scandale. Malgré le
dragon en surveillance, il y a trok boules
en moins, ou plutôt il y a trois bulletins
en trop. Décidément, il faudrait une urne
à ressort, comme les caisses, qui appré-
hendàt au collet le fraudeur et le traînât
aux pieds de M. le président. Et encore,
cela n'est pas possible ; la mécanique
a'oserait jamais, 1- tous les votmts sont
inviolables !
Mais ce début n'est que peu de chose en
comparaison de la suite ; d'un ton navré,
u Buffet continue : M. d'Haussouville,
309 voix ; M. Laurier, 299.. La majorité
absolue est de 313. Il n'y a pas de candi-
dat de nommé 1 Pas un, pas uni
Quelle crâne idée ce résultat donne de
la majorité !
A droite, on sent tout le ridicule de la
situation ; il est des gens qai semblent
écrasés. D'aucuns demandent le renvoi du
vote à demain pour avoir le temps de pié-
parer une combinaison, un arraugement.
Demain ? Mais ces messieurs se suicident
lentement aux yeux du pays 1
Le vieux M. Crémieux s'écrie avec sa
voix aigrelette. : a Il faut terminer ; le
pays dira que nous sommes de grands en-
fants qui n'en finissons pas. AUons-nous-
ep, alors! » Cette harangue est dénuée l'ar-
tifices oratoires et dépourvue d'éloquence ;
nous y applaudissons néanmoins de tout
côenr. Nous ne l'aurions pas prononcée,
mais nous la répétons, nonsans plaisir.
Le renvoi au lendemain n'est pas voté,
mais la suspension d'une demi-heure est
admise. Les suspensions tendent à jouer
un grand rôle dans cette Chambre : ce
n'est que lorsque l'Assemblée ne siège
plus qu'elle peut arriver à faire quelque
chose.
: M. de la Rochette se désiste pour son
compte et pour celui de M. de Labasse-
tièré ; la liste de conciliation est arrêtée
avec les Bonis de MM. Batbie, Delsol,
Tpéry, Desbassyns de Richemond, quatre
nouveaux. MM. d'Haussonviîle et Laurier,
qui tenaient la tête de la colonne, sont
sacrifiés sur l'autel deLle, concorde.
.M. Batbie est nommé par 303 voix et
ML Delsol par 299. Enfin! mais non ; cela
n'est pas fiai.
< PAUL LAFARGUE.
Nous sommes autorisés à démentir
formellement la démission de M. Four-
mer, ministre de France à Rome. M.
Fournier avait signé sa démission au
lendemain du 24 mai ; il ne l'a pas
envoyée à cette époque, il a cédé aux
instances du gouvernement italien, qui
voyait e'n lui le gage vivant, sinon d'une
alliance, au moins d'une intelligente et
amicale neutralité.
A-t-il bien fait alors de revenir sur
son premier mouvement ? Les faits sem-
blent lui donner tort, car le ministère de
l'ordre moral, après l'avoir maintenu
officiellement à son poste, lui donna bien-
tôt un congé temporaire, qui, après le 19
novembre, ést devenu définitif. On s'est
imaginé à Versailles que le rappel d'un
diplomate honoré de la haine des cléri-
caux rachèterait dans une certaine me-
sure l'élimination de MM. Ernoul et de
la Bouillerio.
M. do Broglie a cru, dans sa malice un
peu myope, que les Veoillots lui sau-
raient un gré infini de remplacer M.
Fournier par M. le marquis de Noailles :
il se tropipait. U Univers d'hier soir in
dique clairement que rien n'est fait tant
qu'il reste quelque chose à faire. Peu lui
importe la destitution de M. Fournier si
l'on ne destitue pas Victor-Emmanuel
de toute communication diplomatique
avec la France, en supprimant la léga-
tion.
« Lo moment est favorable. Le gou-
» vernement peut, sans relirer l'ambas-
» sadeur, ne pas remplacer le démission-
» naire, »
Oui, parbleu! le moment est favo-
rable. C'est l'occasion ou jamais de rom-
pre, ouvertement avec l'Italie, mainte-
nant que le 24 mai l'a jetée dans 1;t8 bras
de la Pressa. Si nous voulons attirer sur
nous une double invasion, nous n'avons
qu'à nous rendre aux conseils de VUni-
vers. Il est vrai que la France est encore
sans armée, sans canons et sans argent;
mais Mario Alacoquo ne suffit-elle pas à
tout?
La légation de Washington a été offerte
à M. Fournier ; il l'a refusée,
ABOUT.
! LE STYLE ÉPISCOPAL
Monseigneur l'évêqu de Poitiers vient
de célébrer le 24e anniversaire de son
sacre, et pour fêter cet anniversaire, il a
prononcé à l'issue de la messe, célébrée
par lui dans la chapelle du grand sémi-
naire, un de ces discours familiers qui
portent dans la langue des sermonnai-
res le nom d'homélies.
L Univers le donne tout au long, en
première page, et M. Louis Veuillot le.
fait précéder d'une appréciation, que je
crois devoir également reproduire in
extenso.
« C'est, dit le rédacteur en chef de
l'Univers, une homélie parfaite, un mor-
ceau exquis de littérature sacrée; et dont
le rang est marqué parmi les chefs'-:-d'œu-
vres de la chaire, i nombreux dans les
trésors de notre langue. Nos grands an-
ciens n'ont pas laissé un modèle plus
charmant, dans un art où la littérature
française a particulièrement excellé. On
y remarque à un égal degré la science,
l'éloquence, la simplicité, la bonne grâce
de l'esprit et du style. Mais ce n'est
pas tout; cette pièce, si complétement
celle, digno d'un grand évêque et d'un
grand écrivain, est-encore un discours
politique absolument supérieur à tout ce
que nous avons coutume d'entendre. Il
va au fond des choses présentes ; il
soude le mal, il en décrit la cause, il en
indique le remède. »
Je sais combien il faut rabattre de ces
compliments officiels, où l'on est obligé
envers les ecclésiastiques d'un haut rang,
lorsqu'on appartient au parti clérical.
Mais la louange passait si fort la banalité
des éloges communs que je me sentis
un vrai, désir de connaître ce chef-d,'œu-
vre si rare. Ce ne serait pas, il est vrai,
une grande affaire que de lire un dis-
cours politique absolument supérieur à
tout ce que nous avons coutume d'en-
tendre ; cette supériorité-là ne dit pas
encore grand chose. Mais songez que
M. Veuillot évoquait le souvenir de tous
nos illustres sermonnaires, de Bourda-
loue, de Bossuet, pour leur comparer
monseigneur de Poitier et son homélie;
nous n'oserions pas, nous, rappeler le
nom de Molière en parlant d'Augier ou
de Dumas.
Eh bien! j'ai lu le chif-d'œuvre, et là,
sérieusement, je n'en suis pas fâché. Je
me suis fait, 'comme disaient nos pères,
une pinte de bon sang.
-Le vénérable prélat prend pour texte
de son homélie » l'histoire d'un épilepti-
que qui fut guéri par Jésus-Christ. Or,
l'épilepsie se nomme en latin morbus co-
mitialis, comme qui dirait un mal d'as-
semblée populaire. Ce nom avait été donné
à l'épilepsie pour une raison assez bi-
zarre. Les anciens croyaient que voir un
homme tombant du haut mal était un
mauvais présage, en jsorie que si, par
hasard, le jour des comices assemblés,
un citoyen venait à être pris d'une atta-
que, on était tenu de lever la séance et
de là renvoyer à une autre jour.
L'Évangile, dans le récit qu'il fait de
cette gJiérison surnaturelle, voulant dé-
sijgner la sorte de maladie dont souffrait
le malheureux qui fut présente à Jésus,
l'appelle naturellement du nom qui lui
est attribué dans la langue latine : mor-
bus comitialis, ce que monseigneur de
Poitiers traduit spirituellement par le
mal p'arlementaire.
Cet homme qui est amené aux pieds
du Sauveur pour qu'il lui impose les
mains et chasse le démon de son corps,
c'est donc la figure de la France, qui,
elle aussi, souffre et tombe du haut mal
parlementaire.
,VQUS voyez que rien n'est plus ingé-
nieux. Bossuet lui-même n'aurait pas
trouvé .ce rapprochement si fécond- en
allusions piquantes.
Ne croyez pas que Mgr Pie jette en
passant un trait d'esprit. Non, c'est son
point de départ, le fond même de sa
hraDgue. Il va prendre l'un après l'au-
tre tous les membres de phrase de la
narration évangélique, et les appliquer
à la malade qu'il a dite.
Ainsi saint Mathieu représente le pau-
vre épileptiqué qui écume et se tord, et
Mgr de Poitiers transporte cette descrip-
tion à notre pays : ce sont, dit-il, dos
cris, des renversements à terre, des con-
torsions et des convulsions avec écume
à la bouche et grincement de dents ; et
si la mort ne suit pas ces accès de rage,
il y a toujours perturbation profonde des
intérêts, dessèchement des sources de
la vie sociale et de la fortune publique.
L'évan^éSisto croit pieusement que ce
sont des déinons, logés dans le corps de
ce malheureux, qui le tourmentent de la
sorte. Mgr Pie les connaît bien, ces dé-
mons-là, ou plutôt il les reconnaît, et
pour un peu, il les désignerait par leurs
nomgf. Mais il remarque que Jésus-Christ
en vint à bout, en leur parlant d'une
voix haute et ferme ; qu'il les effraya de
sa menace et qu'ils disparurent, et il
ajoute :
« Quand on a en faco de soi le génio
de la destruction et du carnage, c'est
perdre son temps, que d'user de formules
modérées et courtoises. Il ne sied point
à l'exorciste de tenir l'aspersoir d'une
main gantée de velours. En définitive,-
devant l'imprécation et la mellaco, l'es-
prit immonde sortit pour ne plus ren-
trer: I
Il paraît que cet esprit immonde, qui,
sur un mot du Christ, s'était empressé
de fuir, avait résisté auparavant aux ob-
jurgations de ses disciples, et l'évangé-
liste explique leur peu de pouvoir en
cette circonstance par la tiédeur de la
foi, et Mgr Pie en tire cette leçon ;
« Le grand péril, le grand mal de nos
sociétés, c'est que dans l'ordre des cho-
ses publiques et sociales, les fidèles et
trop souvent les prêtres de notre géné-
ration ont cru que, même en pays de
christianisme, on pouvait obsèrver la
neutralité et l'abstention vis-à-vis de la
foi chrétienne. Or, quiconque professe
et pratique une pareille théorie se con-
damne à ne rien pouvoir absolument
poux le salut de la société. Elever une
telle maxime à la hauteur d'une doctrine
d'Etat, c'est préconiser la politique du'
néant. »
Voilà qui est déjà assez clair; mais
écoutez la suite : elle est bien plus extra-
ordinaire.
« Dites tant qu'il vous plaira que ce
point (la tolérance) est un de ceux qui
constituent depuis quatre-vingts ans no-
tre droit public français. J'aurai la dou-
leur de parler comme l'histoire, en vous
répondant que le droit dont ce pays a
joui, dont il a usé depuis quatre-vingts
ans, c'est le droit do tombsr du haut
mal. »
Morbus comitialis 1
Quel est le remède ? il n'y en a pas
d'autre que le retour aux doctrines du
Syllabus ; le glaive séculier mis au ser-
vice des prétentions ultramontaines.
Et dire que Mgr Pie a vu toutes ces
choses et bien d'autres dans un récit de
dix lignés, où il s'agit d'un pauvre diable
d'épileptigue qui fut, il y a dix neuf
siècles, guéri ou soulagé par un Naza-
réen !
reen.
Est-ce cette richesse et cette ingénio-
sité d'imagination qui ont séduit M. Louis
Veuillot ?
Est-ce la péroraison qui l'a transpor-
té d'enthousiasme ? Elle est bien éton-
nante, cette péroraison.
« Pour nous, en le 24e anniversaire (le
notre élévation à l'épiscopat, il nous ap-
partient d'avoir devant les yeux ces
24 sièges rangés autour du trône de l'A-
gneau, et sur lesquels sont assis les 24
vieillards vêtus de vêtements blancs, et
portant sur leurs têtes des couronnes
d'or. La tradition nous enseigne que ces
24 sièges figurent, dans l'ancienne loi,
les 24 princes du sanctuaire, chefs des
24 familles, -etc., etc. -»
Je frémis en pensant que si les noces
d'or se célébraient dans l'église, comme
dans les mariages ordinaires, à la vingt-
cinquième année, nous perdions toutes
ces belles comparaisons, et que Mgr Pie
n'aurait plus su par où finir son dis-
cours.. ,
FRANCISQUE SARCEY.
;
On lit dans le Journal des Débats :
Un journal annonce ce soir que le cabi-
net, voulant parer à la détection de l'ex-
trême droite, cherche depuis deux jours à
te créer une majorité avec la partie mo-
dérée du centre gauche. Il parle de négo-
ciations en ce sens qui seraient menées
avec la plus grande activité. Il ajoute enfin
q-ie le centre gauche aurait même poaé ses
conditions.
Notre confrère a été renseigné inexac-
tement.
Nous ignorons si dans les sphères gou- ,.
vernementales on se préoccupe d'entamer
avec le centre gauche des négociations ;
mais nous pouvons déclarer que jusqu'ici
ce groupe parlementaire n'a point eu
connaissance des projets dont parle notre
confrère.
—♦ — -
LES BUREAUX
La discussion qui a eu lieu dass les bu-
reaux pour la nomination des commissaires
chargés d'examiner le projet de loi de M.
de Broglie a présenté un certain intérêt.
Dans le premier bureau M. Pelletan a
exposé que tout le monde devait s'entendre
sur une loi municipale. La loi, a-t-il
dit, est le salut du pays. Elle doit être res-
pectée au point de vue moral. Dans le cas
particulier on donne le spectacle d'inno-
vations qui ne sont pas jusafiées par des
raisons morales. Le gouvernement veut
tout nommer par lui ou par-ses préfets.
M. le ministre de l'intérieur veut être le
seul maire en France. Les préfets connais-
sent mal leurs départements, parce qu'ils
y séjourrent peu. Les choix seront une af-
faire non pas même de parti, mais de co-
terie. La loi actuelle, selon lui, est faih
contre le suffrage universel. Elle créera UDe
guerre de cotêries qui affaiblira le gouver-
nement. l.e maire a une juridiction pa-
ternelle, une puissance morale qui ré-
sulte de sa situation, et on veut la dé-
truire provisoirement. M. Pelletan," en ter-
minant démontre que le projet veut met-
irelaîrance sous la surveillance de la
haute police,
M. Lenoël prend ensuite la parole Et
combat lé projet de loi, il cite à l'appui da
son direrautoritô de MM. Ilenrion de Pan-
say, de Vatimesnil, de Meaux, Rover-
Coiiar et Vivien. Il reproche à ceux qUI
ôtaient autrefois décentralisateurs à ou-
trance de vouloir revenir sur leurs pas.
Cetie loi, a dit M. Lenoël en terminant
est essentiellement révolutionnaire. Il ne
suffit pas de se dire conservateurs, c'est
comme si on attentait à la famille et à la
propriété,
Après des observations de M. Max-Ri-
^usU'i» jji. Uanivet prend la parole et sou-
tient le projet. Il ne faut pas, selon lui,
désorganiser la.machine administraiive. Il
il a pas voté pour l'élection des maires DÎT
les conseils municipaux. Il veuL tenir 1br
Jeudi 4 Décembre 1873.
I JUlF i E CTÈTT F
AlÀ dlJjuljJj
JOURNAL ROOUBLICAIN CONSERVATEUR ; ;'
RÉDACTION
8radresser au Secrétaire de la Rédaction
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JOURNÉE FOLiTIQtlE
Paris, 3 décembre 1873.
Hier, dans les bureaux, nomination dès
commissaires chargés d'examiner le projet
du gouvernement sur la nomination des
maires; nous renvoyons, pour tes détails,
au compte-rendu spécial que nous publions
un peu plus loin. En séance publique, con-
tinuation du scrutin qui doit compléter la
commission constitutionnelle. Deux com-
missaires seulement ont été nommés, et
avec quelle peine ! Eafln, M. le comte de.
Ségur a été élu secrétaire de l'Assemblée,
en remplacement de M. Desjardins.
Si Boiis citons souventdes notes et des arti-
cles du Français, ce n'est pas, on le sait, que
nous ayons conçu pour ce journal une par-
ticulière estime, mais c'est qu'il est un des
organes officieux de M. le duc de Broglie
et du ministère. Il est donc curieux d'y
observer tantôt de certaines tendances,
tantôt la trace de certains soucis. Nous y
trouvons aujourd'hui des avis, des con-
seils et de paternelles semonces à la ma-
jorité qui se désagrége et qui laisse voir
a une indiscipline fâcheuse. » La note se
termine airni : « Il y a là un mal sur le-
quel tous les membres de la majorité, à
quelque groupe qu'ils appartiennent, doi-
vent faire leur - examen de conscience, - car
il faut y remédier sans retard. »
On aura deviné qu'il s'agit des légitimis-
tes fidèles, c'est-à-dire d'une partie de la
droite et de toute l'extrême droite, qui me-
nacent de plus en plus de se détacher.
Nous leur devons la justice de déclarer
qu'ils tiennent à honneur de ne pas s'enga-
ger plus avant dans la politique de palino-
dies et d'équivoques où s'enfoncent le cabi-
net et les députés du centre droit. Il y a des
points qu'ils ne sauraient admettre, et la
plupart d'entre eax ne voteront ni , la loi
sur les maires, ni la loi contre la presse
ni les autres lois dictatoriales qui sont at-
tendues. On pourra lire, à cet égard, une
lettre de M. de la Rochette que l'Union re-
produit avec de vifs éloges. Mais la défec-
tion que le ministère redoute, ne se borne
pas ici à I extrême droite et auX intrânsi-
geants de l'Union; dans la droite modé-
rée, chez les politiques et les sages, on
commence à montrer des sentiments aussi
vifs, aussi nets, à l'égard des mesures ex-
ceptionnelles. La Gazette de France les
condamne, après s'être tenu tous ces der-
niers jours dans une réservé qui avait été
remarquée.
C'est donc sur la droite que le ministère
porte des regards inquiets ; il la gronde
doucsment, la flatte, la rassure, lui re-
proche de le défier de ses plus sincères
anris ; lorsqu'il se trouve à bout d'argu-
ments, c'est l'ombre même de M. Ernoul,
le garde des sceaux déchu, qu'il fait appa-
raître, et nous lisons encore dans le Fran-
çais : Certains journaux de gauche J ou
d'extrême droite continuent à vouloir équi-
voquer sur la signification du dernier
changement de cabinet. Nous l'avons dit
et HOUS la répétons, des questions de per-
sonnes ont été agitées. Il n'y a pas eu de
dissidence &ur la politique à suivre entre
ceux dont les Doms ont été prononcés à
cette occasion. Le programme du gouver-
nement sé trotrvBirrêrÉie, assure-t-on, avoir
£ té rédigé par M. Ernoul, auquel les jour-
naud'extrême droite cherchent en ce mo-
ment à prêter un rôle si complètement en
contradiction avec la sage modération de
ses opinions et l'élévation de son carac-
tère." Si M. tërnoul peut avoir son appré-
ciation particulière sur telle question de
personne, il est absolument décidé à soute-
nir la politique du nouveau ministore, qui
n'est autrie que celle dont il avait formulé
lui-même la programme. » Mais, s'il ré-
glait un si parfait accord entre M. Ernoul
et M. le duc de Broglie, pourquoi M. Er-
aiotil est-il parti f
Voici maintenant quelque chose de
caractéristique et qui mérite encore plus
d'attention. Pour rallier à tout prix ce que
l'on pourra de voix ultramontaines et clé*
ricales, on prend dans lés affaires italien-
nes une attitude qui jusqu'ici n'avait pas
encore été prise. En tête du Français
d'hier le public a pu lire un long article-
manifeste auquel la récente encyclique.
sert de prétexte. L'auteur s'est appliqué
à imiter le style, à copier parfois les
expressions de l'Univers. Pie IX est « pri-
sonnier de l'Italie. » L'Eglise est Ge oppri-
mée comme elle le fut aux premiers siècles
par les empereurs romains. » Mais « les
promesses de Jésus-Christ, réalisées pen-
dant dix-huit siècles, ne trahiront .pas la
noî-re (noire siècle); nous est-il même défen-
du de croire que déjà nous en possédons
quelques effets ? » L'article se termine par
une phrase qu'on a faite à dessein obscure
et vague ; « Dieu a donné à ceux qui dé-
fendent aujourd'hui l'Eglise des armes que
leurs devanciers n'avaient pas. »
Combiea ces déclarations du plus offi-
cieux des journaux ministériels vaudront-
elles de voix dans la Chambre au gouver-
nement qui les a dictées ? Bien peu, sans
doute car les ultramoatains, comme, les
simples légitimistes, demanderont des gages
lus certains à un cabinet dont ils se dé-
fient. Mais, jusqu'où M, le duc de Broglie
et M. le duc Decazes, son nouveau collègue
et son successeur aux affaires étrangères,
voudraient-ils aller dans ce chemin-là?
C'est ce qu'il importerait de savoir, et l'un
trouvera que, par ce seul article du Fran-
fais, s'ils ne le désavouent, les a menés déjà
beaucoup trop loin. Depuis le 24 mai, par
les folles manifestations dont l'ancien mi-
nistère s'était rendu complice, nous avons
bien mal à propos inquiété l'Italie, nous
nous sommes à demi brouillés avec elle.
Est ce que M. lo duc Decazes aurait l'in-
tention d'achever l'œuvre et de faire tour-
ner en rupture ce qui n'était jusqu'ici que
froideur ? Il prépare, dans tous les cas, un
rôle ingrat et difficile au diplomate, quel
qu'il soit, qui doit aller remplacer à Rome
M. Fournier.
Quand le cabinet fait publier dans les
feuilles qui sont à sa dévotion de pareils
articles, de n'est plus seulement sur sa
politique intérieure, mais sur la politique
qu'il compte suivre au dehors, qu'il de-
vient. nécessaire du l'interroger. Où en
sommes-nous, en Europe, avec les puis-
sances ? On distribuait autrefois, au com-
encement des sessions, un Livre jaune,
Où figuraient toutës^les pièces diplomati-
ques qui pouvaient sans inconvénient être
imprimées. Il serait te caps de revenir à ce £
usage. Il serait temps de se rappeler que
peut-être les questions extérieures ne sont
pas pour nous les moins importantes et
lcs moins graves. Quoi! c'est dans un in-
térêt parlementaire, dans un. mesquin in-
térêt de majorité, que le cabinet actuel ne
craindrait pas de jouer ainsi avec le feu et
— pour dire le mot- avec la guerre? On
laisserait soupçonner des desseins d'inter-
vention en Italie pour conquérir la voix
de M. Dahirel ou de M. Martin d'Auray ?
C'est de la folie. Que le ministère désa-
youe ou fasse taire du moins ses officieux.
EUCK LIÉBERT.
-
Ainsi qu'on l'avait annoncé hier, le mi-
nistre de la guerre est venU. aujourd'hui
déclarer à la commission du budget que le
gouvernement était décidé y à appeler eu
1874 la 2e partie du contingent. La dépensé
nécessitée par cet appel sera d'enviroll 13
millions.
La commission du budget a repris en
hâte la discussion des propositions fi-
nancières de MM. Léon Say.et Keller.
ille ne votera définitivement sur la > pro-
position de M. Léon Say qu'après avoir
éntendu ,1e ministre des finances. Quant à
la proposition Relier, elle a été repoussée..
- ,---+-_.--:----
Silence au peuple ! Assez et trop sou-
vent il a eu la parole depuis le mois de
février 1871; c'est un scandale que les
gens de bien entendènt faire cesser. De-
puis tantôt trois ans il ne s'est guère
passé plus d'un trimestre sans qu'un ou
deux départements eussent à faire une
élection. C'était la loi, on s'y résignait ;
mais en maugréant, car il n'est point
agréable de recevoir des semonces, et le
suffrage universel n'a jamais perdu l'oc-
casion d'en adresser, et de vertes, à
PAssemblée natiomile: A la fin cela de-
venait intblérabl, et quelques députés
de la droite ont résolu de clore la bouche
à l'importun. Voici, ornée de ses consi-
dérants, la proposition de loi que MM.
Courcelle, Amédée Lefèvre-Pontalis, de
Meaux et autres viennent de soumettre
à. leurs collègues :
Considérant que le scrutia da liste a pour
mérite et pour objet principal de permettre une
transaction entre les diverses nuances de l'opi-
nion publique et de consacrer un accord sur des
noms qui les représentent ;
Considérantque e e, régime appliqué à des
élections isolées est une anomalie ;
Considérant, en outre, qu?à raison des vacan-
cèsjpuljipliées qui se produisent dans une As-
semblée nombreuse, il a. le grave ineonvéoient
de créer, sur les différents points du territoire,
une agitation électorale presque p^rmaiaente ;
Ont l'honneur de soumettre à l'Assemblée
nationale une proposition de loi ainsi conçue :
Article unique. — A l'avenir et jusqu'à la
promulgation de la prochaine loi électorale,
aucun collège électoral ne sera convoqué
pour élire des dépistés à l'Assemblée na-
tionale que si la députation du départe-
ment se trouve réduite de plus d'un quart.
Il est toujours temps de bien faire,
nous le savons ; toutefois l'opinion pu-
blique ne manquera point d'observer,
que l'on s'est avisé bien tard des incon-
vénients d'une loi qui fonctionne depuis
près de trois années. On examinera les
motifs invoqués, on scrutera les inten-
tions, et finalement il pourrait arriver
que le pays jugeât non sans quelque sé-
vérité cette sorte de mise en interdit
dont il est menacé.
Los auteurs du projet en question
parlent bien à leur aise du scrutin de
liste ; sans doute plusieurs d'entre eux,
et à coup sûr un grand nombre de leurs
collègues de la droite en sont les éton-
nants produits. C'est à la faveur du scru-
tin de liste, « qui permet une transac-
tion entre les diverses nuances de l'opi-
nion publique, » que beaucoup de mo-
narchistes ont pu trouver place, en
1871, sur des listes républicaines. Les
ingrats ! Mais le scrutin de liste n'a pas
seulement pour objet de permettre et
souvent de rendre trop faciles des in-
trusions de cette nature ; il a été imagi-
né aussi pour supprimer ce qu'on appe-
lait autrefois les bourgs pourris. Les lé-
gislateurs ont voulu que désormais les
marquis do Carabas pe fussent plus les
grands électeurs ou les élus obligatoires
d'une circonscription ; ils ont décidé que
pour être admis à l'honneur de siéger
dans les Assemblées, il faudrait être
l'homme de tout un département, et
non plus I) seigneur et maître d'un
canton. -
A ce point de vue, qu'il s'agisse de nom-
mer un, ou deux, ou vingt députés dans
un département, le scrutin de liste peut
fonctionner sans nulle anomalie ; quant
au danger de créer, sur les différents
points du territoire, une agitation électo-
rale presque permanente, à raison de la
fréquence des élections partielles, nous
répondrons, comme le faisait un jour
M. le duc d'Audiffret-Pasquier, que les
citoyens ne s'occupent jamais trop de la
chose publique et que notre pays ne sera
véritablement grand, prospère, et à tout
jamais débarrassé des despotismes, d'où
qu'ils viennent, que le; jour où tous les
citoyens seront bien pénétrés do cette-
vérité que la politique, c'est leur hon-
pour, c'est leur argent, et qu'ils ne sau-
raient trop s'en préoccuper. 8
Voilà pour les arguments invoqués en
faveur du projet de loi.
;, Passons à l'examen des intentions
qu'il révèle. Il est clair aujourd'hui pour
tout le monde que l'Assemblée élue en
février 1871 n'est point le portrait frap-
pant du pays; jusqu'à ce jour toutefois
les membres de la majorité n'avaient
point voulu en convenir; mais voilà
qu'enfin ils l'avouent, par la crainte qu'ils
montrent de voir le suffrage universel se
livrer à des retouches trop fréquentes.
Autre aveu contenu dans la proposition
de M. Courcelle : c'est tout juste-
ment à l'heure où l'Assemblée se pré-
pare aux grandes résolutions, qui doi-
vent sortir des lois constitutionnelles,
qu'elle ferme la'bouche au pays. C'est
donc qu'elle est bien sûre de ne point
mériter son approbation, car autrement
il n'est pas téméraire de supposer
qu'au lieu de restreindre les élections
partielles, la majorité eût été désireuse
de les voir se multiplier.
Notons aussi que parmi les signatai-
res de la proposition il se trouve, à no-
tre connaissance, au moins un député
appartenant à l'un des départements où
les électeurs, aux termes de la loi, sont
sur le point d'être convoqués. Ne craint-
il pas qu'on le soupçonne, comme on
pourrait soupçonner ceux qui voteront
ce projet, de n'avoir point voulu risquer
de voir le suffrage universel démentir,
par une élection partielle, les élections
hâtives et mal renseignées de 1871 ?
Telles sont, à première vue, les ré-
flexions que- fait naître le projet dont nous
avons donné le texte. M. Baragnon, le
nouveau sous-secrétaire d'État, disait
l'autre jour : Il faudra que la France mar-
che avec nous. Si la loi municipale de
M. de Broglie et la loi électorale de M. j
Courcelle ont pour but d'aider à l'ac-
complissement de ce miracle, nous crai-
gnons fort que M. Baragnon se soit
vanté. -
E. SCHNERB.
Chez un peuple qui s'appartient, qui
le sait et qui tient à son droit, une as-
semblée petite ou grande n'acceptera
jamais la présidepee d'un homiÈie qu'elle
n'a point élu.
Il suit de là que si notre gouvernement
se décidait à nommer les maires, il pro-
voquerait par cela seul autant de conflits
municipaux qu'il y a de communes en
France.
Le remède de ce mal est connu.
Quand un maire ne s'accorde pas avec
ses conseillers élus, on met le conseil à
la porte,. et le gouvernement Deus ex
machind, le remplace par une commis-
sion, triée sur le volet par le maire lui-
même. ','-
Mais comme il est impossible que les
citoyens d'une commune, électeurs,
hommes libres, souverains dans leur
sphère, subissent de plein gré l'autorité
d'une municipalité imposée, le gouver-
nement, s'il persiste, sera conduit fatale-
ment à nommer les électeurs.
On y songe. Nous le savons. Mais
qu'on y pense ! Ce n'est pas une petite
affaire que l'organisation du monde ren-
versé.
ABOUT.
*
COUPIER MLEMEmiM
• n
Versailles, 2 décembre 4873.
Aujourd'hui, deux décembre, M. le duc
du Broglie faisant le bonheur de la
France, il a été procédé à la nomination
de la commission chargée de faire revivre
les Ipis impériales relatives LUX municipa-
lités, ces mêmes lois qui permettaient ja-
dis à cemme duc de Broglie de faire
montre de tant de libéralisme. Pour chan-
ger, c'est toujours la même chose.
M. Biiffèfc lui-même, pour faire mieux,
ne trouve rien de supérieur aux anciens
.errements ; les boules folichonnes ont dû
cascader au chevet de son lit présidentiel,
et, afin de mettre un terme à leurs dé-
bordements, il a été décidé que l'urne aux
bulletins resterait sur la tribune, mais. que
l'urne aux boules serait transportée sur le
bureau. Ainsi le-décrètent d'ailleurs les;
vieux us parlementaires. Un des six secrétai-
res, aimable dragon, est chargé de garder,
nuit et jour, l'urne des Hespérides ; il n'en
défend pas l'entrée, au contraire il oblige
chaque boule à ne point faire l'école buis -
sonnière,
Espérons qu'une si noble constance va
être enfin couronnée de succès. Et pour-
tant, rien n'est moins sûr : la droite pu-
re tient à la nomination de MM. de La-
bassetière et de la Rochette, que le centre
,droit refuse de porter sur sa liste.
Ce n'est pas 14 d'ailleurs le seul symp-
tôme de la dissension qui s'accentue en*
tre les sœurs monarchistes. Dans le scru-
tin d'hier, on a pu constater que le can-
didat du centre droit, M. de Ségur, avait
accumulé contre lui, sous la forme de
bulletins Besson, vingt-quatre protesta-
tions de la droite pure. Aujouid hui M. de
Ségur est nommé, mais les protestations
n'en existeront pas moins; les dissidences
s'ébauchent d'abord sur les individualités
pour se dessiner nettement plus tard sur
les généralités.
Déjà, ce matin, dans les bureaux, des
droitiers, tels que MM. Chaurand, Bidard,
ee Franclieu, de Rodez-Bénavant, se sont
prononcés; contre la nouvelle loi munici-
pale, et avec une telle netteté que les
députés républicaius ont porté leurs suf-
frages sur quelques-uns des orateurs de la
droite. En apparence, le gouvernement a le
dessus dans la lutte d'aujourd'hui, puis-
qu'il tient neuf commissaires sur quinze;
au fond, le Cabinet ne doit éprouver qu'u-
ne confiance craintive dans sa victoire. Le
chiffre des abstentions est gros de menaces.
j Si le gouvernement réfléchit un instant
au peu qu'il fait, il doit être effrayé de ce
qu'il ne peut pas faire.
Quatre heures un quart.— Le résultat
du scrutin pour les commissaires est entre
les mains du président. Il lit : •
^Nombre de bulletins, 627.
Nombre de boules, 624.
Le rire est étouffé, il se dissimule, n'o-
sant- éclater et faire scandale. Malgré le
dragon en surveillance, il y a trok boules
en moins, ou plutôt il y a trois bulletins
en trop. Décidément, il faudrait une urne
à ressort, comme les caisses, qui appré-
hendàt au collet le fraudeur et le traînât
aux pieds de M. le président. Et encore,
cela n'est pas possible ; la mécanique
a'oserait jamais, 1- tous les votmts sont
inviolables !
Mais ce début n'est que peu de chose en
comparaison de la suite ; d'un ton navré,
u Buffet continue : M. d'Haussouville,
309 voix ; M. Laurier, 299.. La majorité
absolue est de 313. Il n'y a pas de candi-
dat de nommé 1 Pas un, pas uni
Quelle crâne idée ce résultat donne de
la majorité !
A droite, on sent tout le ridicule de la
situation ; il est des gens qai semblent
écrasés. D'aucuns demandent le renvoi du
vote à demain pour avoir le temps de pié-
parer une combinaison, un arraugement.
Demain ? Mais ces messieurs se suicident
lentement aux yeux du pays 1
Le vieux M. Crémieux s'écrie avec sa
voix aigrelette. : a Il faut terminer ; le
pays dira que nous sommes de grands en-
fants qui n'en finissons pas. AUons-nous-
ep, alors! » Cette harangue est dénuée l'ar-
tifices oratoires et dépourvue d'éloquence ;
nous y applaudissons néanmoins de tout
côenr. Nous ne l'aurions pas prononcée,
mais nous la répétons, nonsans plaisir.
Le renvoi au lendemain n'est pas voté,
mais la suspension d'une demi-heure est
admise. Les suspensions tendent à jouer
un grand rôle dans cette Chambre : ce
n'est que lorsque l'Assemblée ne siège
plus qu'elle peut arriver à faire quelque
chose.
: M. de la Rochette se désiste pour son
compte et pour celui de M. de Labasse-
tièré ; la liste de conciliation est arrêtée
avec les Bonis de MM. Batbie, Delsol,
Tpéry, Desbassyns de Richemond, quatre
nouveaux. MM. d'Haussonviîle et Laurier,
qui tenaient la tête de la colonne, sont
sacrifiés sur l'autel deLle, concorde.
.M. Batbie est nommé par 303 voix et
ML Delsol par 299. Enfin! mais non ; cela
n'est pas fiai.
< PAUL LAFARGUE.
Nous sommes autorisés à démentir
formellement la démission de M. Four-
mer, ministre de France à Rome. M.
Fournier avait signé sa démission au
lendemain du 24 mai ; il ne l'a pas
envoyée à cette époque, il a cédé aux
instances du gouvernement italien, qui
voyait e'n lui le gage vivant, sinon d'une
alliance, au moins d'une intelligente et
amicale neutralité.
A-t-il bien fait alors de revenir sur
son premier mouvement ? Les faits sem-
blent lui donner tort, car le ministère de
l'ordre moral, après l'avoir maintenu
officiellement à son poste, lui donna bien-
tôt un congé temporaire, qui, après le 19
novembre, ést devenu définitif. On s'est
imaginé à Versailles que le rappel d'un
diplomate honoré de la haine des cléri-
caux rachèterait dans une certaine me-
sure l'élimination de MM. Ernoul et de
la Bouillerio.
M. do Broglie a cru, dans sa malice un
peu myope, que les Veoillots lui sau-
raient un gré infini de remplacer M.
Fournier par M. le marquis de Noailles :
il se tropipait. U Univers d'hier soir in
dique clairement que rien n'est fait tant
qu'il reste quelque chose à faire. Peu lui
importe la destitution de M. Fournier si
l'on ne destitue pas Victor-Emmanuel
de toute communication diplomatique
avec la France, en supprimant la léga-
tion.
« Lo moment est favorable. Le gou-
» vernement peut, sans relirer l'ambas-
» sadeur, ne pas remplacer le démission-
» naire, »
Oui, parbleu! le moment est favo-
rable. C'est l'occasion ou jamais de rom-
pre, ouvertement avec l'Italie, mainte-
nant que le 24 mai l'a jetée dans 1;t8 bras
de la Pressa. Si nous voulons attirer sur
nous une double invasion, nous n'avons
qu'à nous rendre aux conseils de VUni-
vers. Il est vrai que la France est encore
sans armée, sans canons et sans argent;
mais Mario Alacoquo ne suffit-elle pas à
tout?
La légation de Washington a été offerte
à M. Fournier ; il l'a refusée,
ABOUT.
! LE STYLE ÉPISCOPAL
Monseigneur l'évêqu de Poitiers vient
de célébrer le 24e anniversaire de son
sacre, et pour fêter cet anniversaire, il a
prononcé à l'issue de la messe, célébrée
par lui dans la chapelle du grand sémi-
naire, un de ces discours familiers qui
portent dans la langue des sermonnai-
res le nom d'homélies.
L Univers le donne tout au long, en
première page, et M. Louis Veuillot le.
fait précéder d'une appréciation, que je
crois devoir également reproduire in
extenso.
« C'est, dit le rédacteur en chef de
l'Univers, une homélie parfaite, un mor-
ceau exquis de littérature sacrée; et dont
le rang est marqué parmi les chefs'-:-d'œu-
vres de la chaire, i nombreux dans les
trésors de notre langue. Nos grands an-
ciens n'ont pas laissé un modèle plus
charmant, dans un art où la littérature
française a particulièrement excellé. On
y remarque à un égal degré la science,
l'éloquence, la simplicité, la bonne grâce
de l'esprit et du style. Mais ce n'est
pas tout; cette pièce, si complétement
celle, digno d'un grand évêque et d'un
grand écrivain, est-encore un discours
politique absolument supérieur à tout ce
que nous avons coutume d'entendre. Il
va au fond des choses présentes ; il
soude le mal, il en décrit la cause, il en
indique le remède. »
Je sais combien il faut rabattre de ces
compliments officiels, où l'on est obligé
envers les ecclésiastiques d'un haut rang,
lorsqu'on appartient au parti clérical.
Mais la louange passait si fort la banalité
des éloges communs que je me sentis
un vrai, désir de connaître ce chef-d,'œu-
vre si rare. Ce ne serait pas, il est vrai,
une grande affaire que de lire un dis-
cours politique absolument supérieur à
tout ce que nous avons coutume d'en-
tendre ; cette supériorité-là ne dit pas
encore grand chose. Mais songez que
M. Veuillot évoquait le souvenir de tous
nos illustres sermonnaires, de Bourda-
loue, de Bossuet, pour leur comparer
monseigneur de Poitier et son homélie;
nous n'oserions pas, nous, rappeler le
nom de Molière en parlant d'Augier ou
de Dumas.
Eh bien! j'ai lu le chif-d'œuvre, et là,
sérieusement, je n'en suis pas fâché. Je
me suis fait, 'comme disaient nos pères,
une pinte de bon sang.
-Le vénérable prélat prend pour texte
de son homélie » l'histoire d'un épilepti-
que qui fut guéri par Jésus-Christ. Or,
l'épilepsie se nomme en latin morbus co-
mitialis, comme qui dirait un mal d'as-
semblée populaire. Ce nom avait été donné
à l'épilepsie pour une raison assez bi-
zarre. Les anciens croyaient que voir un
homme tombant du haut mal était un
mauvais présage, en jsorie que si, par
hasard, le jour des comices assemblés,
un citoyen venait à être pris d'une atta-
que, on était tenu de lever la séance et
de là renvoyer à une autre jour.
L'Évangile, dans le récit qu'il fait de
cette gJiérison surnaturelle, voulant dé-
sijgner la sorte de maladie dont souffrait
le malheureux qui fut présente à Jésus,
l'appelle naturellement du nom qui lui
est attribué dans la langue latine : mor-
bus comitialis, ce que monseigneur de
Poitiers traduit spirituellement par le
mal p'arlementaire.
Cet homme qui est amené aux pieds
du Sauveur pour qu'il lui impose les
mains et chasse le démon de son corps,
c'est donc la figure de la France, qui,
elle aussi, souffre et tombe du haut mal
parlementaire.
,VQUS voyez que rien n'est plus ingé-
nieux. Bossuet lui-même n'aurait pas
trouvé .ce rapprochement si fécond- en
allusions piquantes.
Ne croyez pas que Mgr Pie jette en
passant un trait d'esprit. Non, c'est son
point de départ, le fond même de sa
hraDgue. Il va prendre l'un après l'au-
tre tous les membres de phrase de la
narration évangélique, et les appliquer
à la malade qu'il a dite.
Ainsi saint Mathieu représente le pau-
vre épileptiqué qui écume et se tord, et
Mgr de Poitiers transporte cette descrip-
tion à notre pays : ce sont, dit-il, dos
cris, des renversements à terre, des con-
torsions et des convulsions avec écume
à la bouche et grincement de dents ; et
si la mort ne suit pas ces accès de rage,
il y a toujours perturbation profonde des
intérêts, dessèchement des sources de
la vie sociale et de la fortune publique.
L'évan^éSisto croit pieusement que ce
sont des déinons, logés dans le corps de
ce malheureux, qui le tourmentent de la
sorte. Mgr Pie les connaît bien, ces dé-
mons-là, ou plutôt il les reconnaît, et
pour un peu, il les désignerait par leurs
nomgf. Mais il remarque que Jésus-Christ
en vint à bout, en leur parlant d'une
voix haute et ferme ; qu'il les effraya de
sa menace et qu'ils disparurent, et il
ajoute :
« Quand on a en faco de soi le génio
de la destruction et du carnage, c'est
perdre son temps, que d'user de formules
modérées et courtoises. Il ne sied point
à l'exorciste de tenir l'aspersoir d'une
main gantée de velours. En définitive,-
devant l'imprécation et la mellaco, l'es-
prit immonde sortit pour ne plus ren-
trer: I
Il paraît que cet esprit immonde, qui,
sur un mot du Christ, s'était empressé
de fuir, avait résisté auparavant aux ob-
jurgations de ses disciples, et l'évangé-
liste explique leur peu de pouvoir en
cette circonstance par la tiédeur de la
foi, et Mgr Pie en tire cette leçon ;
« Le grand péril, le grand mal de nos
sociétés, c'est que dans l'ordre des cho-
ses publiques et sociales, les fidèles et
trop souvent les prêtres de notre géné-
ration ont cru que, même en pays de
christianisme, on pouvait obsèrver la
neutralité et l'abstention vis-à-vis de la
foi chrétienne. Or, quiconque professe
et pratique une pareille théorie se con-
damne à ne rien pouvoir absolument
poux le salut de la société. Elever une
telle maxime à la hauteur d'une doctrine
d'Etat, c'est préconiser la politique du'
néant. »
Voilà qui est déjà assez clair; mais
écoutez la suite : elle est bien plus extra-
ordinaire.
« Dites tant qu'il vous plaira que ce
point (la tolérance) est un de ceux qui
constituent depuis quatre-vingts ans no-
tre droit public français. J'aurai la dou-
leur de parler comme l'histoire, en vous
répondant que le droit dont ce pays a
joui, dont il a usé depuis quatre-vingts
ans, c'est le droit do tombsr du haut
mal. »
Morbus comitialis 1
Quel est le remède ? il n'y en a pas
d'autre que le retour aux doctrines du
Syllabus ; le glaive séculier mis au ser-
vice des prétentions ultramontaines.
Et dire que Mgr Pie a vu toutes ces
choses et bien d'autres dans un récit de
dix lignés, où il s'agit d'un pauvre diable
d'épileptigue qui fut, il y a dix neuf
siècles, guéri ou soulagé par un Naza-
réen !
reen.
Est-ce cette richesse et cette ingénio-
sité d'imagination qui ont séduit M. Louis
Veuillot ?
Est-ce la péroraison qui l'a transpor-
té d'enthousiasme ? Elle est bien éton-
nante, cette péroraison.
« Pour nous, en le 24e anniversaire (le
notre élévation à l'épiscopat, il nous ap-
partient d'avoir devant les yeux ces
24 sièges rangés autour du trône de l'A-
gneau, et sur lesquels sont assis les 24
vieillards vêtus de vêtements blancs, et
portant sur leurs têtes des couronnes
d'or. La tradition nous enseigne que ces
24 sièges figurent, dans l'ancienne loi,
les 24 princes du sanctuaire, chefs des
24 familles, -etc., etc. -»
Je frémis en pensant que si les noces
d'or se célébraient dans l'église, comme
dans les mariages ordinaires, à la vingt-
cinquième année, nous perdions toutes
ces belles comparaisons, et que Mgr Pie
n'aurait plus su par où finir son dis-
cours.. ,
FRANCISQUE SARCEY.
;
On lit dans le Journal des Débats :
Un journal annonce ce soir que le cabi-
net, voulant parer à la détection de l'ex-
trême droite, cherche depuis deux jours à
te créer une majorité avec la partie mo-
dérée du centre gauche. Il parle de négo-
ciations en ce sens qui seraient menées
avec la plus grande activité. Il ajoute enfin
q-ie le centre gauche aurait même poaé ses
conditions.
Notre confrère a été renseigné inexac-
tement.
Nous ignorons si dans les sphères gou- ,.
vernementales on se préoccupe d'entamer
avec le centre gauche des négociations ;
mais nous pouvons déclarer que jusqu'ici
ce groupe parlementaire n'a point eu
connaissance des projets dont parle notre
confrère.
—♦ — -
LES BUREAUX
La discussion qui a eu lieu dass les bu-
reaux pour la nomination des commissaires
chargés d'examiner le projet de loi de M.
de Broglie a présenté un certain intérêt.
Dans le premier bureau M. Pelletan a
exposé que tout le monde devait s'entendre
sur une loi municipale. La loi, a-t-il
dit, est le salut du pays. Elle doit être res-
pectée au point de vue moral. Dans le cas
particulier on donne le spectacle d'inno-
vations qui ne sont pas jusafiées par des
raisons morales. Le gouvernement veut
tout nommer par lui ou par-ses préfets.
M. le ministre de l'intérieur veut être le
seul maire en France. Les préfets connais-
sent mal leurs départements, parce qu'ils
y séjourrent peu. Les choix seront une af-
faire non pas même de parti, mais de co-
terie. La loi actuelle, selon lui, est faih
contre le suffrage universel. Elle créera UDe
guerre de cotêries qui affaiblira le gouver-
nement. l.e maire a une juridiction pa-
ternelle, une puissance morale qui ré-
sulte de sa situation, et on veut la dé-
truire provisoirement. M. Pelletan," en ter-
minant démontre que le projet veut met-
irelaîrance sous la surveillance de la
haute police,
M. Lenoël prend ensuite la parole Et
combat lé projet de loi, il cite à l'appui da
son direrautoritô de MM. Ilenrion de Pan-
say, de Vatimesnil, de Meaux, Rover-
Coiiar et Vivien. Il reproche à ceux qUI
ôtaient autrefois décentralisateurs à ou-
trance de vouloir revenir sur leurs pas.
Cetie loi, a dit M. Lenoël en terminant
est essentiellement révolutionnaire. Il ne
suffit pas de se dire conservateurs, c'est
comme si on attentait à la famille et à la
propriété,
Après des observations de M. Max-Ri-
^usU'i» jji. Uanivet prend la parole et sou-
tient le projet. Il ne faut pas, selon lui,
désorganiser la.machine administraiive. Il
il a pas voté pour l'élection des maires DÎT
les conseils municipaux. Il veuL tenir 1br
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