Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1876-01-05
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 05 janvier 1876 05 janvier 1876
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/03/2013
Sixième Année - N° 1489 Prix du Numéro à Paris : 15 Centimes - Départements : 20 Centimes
Mercredi 5 Janvier 1876
1E E SIÈCLE
rr N
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
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Les-lettres non affranchies seront refusées
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BULLETIN
Paris, 4 janvier 1876.
Toute l'attention et du gouvernement et
de l'opinion est concentrée à cette heure
sur les nominations des délégués des con-
le ils municipaux qui vont avoir lieu dans
une quinzaine de jours. Il y a longtemps,
sans doute, que le travail d'entraînement
a été commencé par le gouvernement et ses
agents. Mais, d'autre part, d'un très-grand
nombre de points, les renseignements tb
rivent, qui permettent d'affirmer que l'o-
pinion républicaine et libérale n'est point
en retard, et que le choix des délégués
sera fait dans les conditions les meilleu-
res pour assurer la liberté des élections
sénatoriales. Le pays comprend parfaite-
ment l'importance capitale du grand acte
qui va s'accomplir, et ne restera pas au-
dessous de la tâche qui lui eat confiée.
Les informations de Berlin nous appren-
nent que le célèbre projet de réformes éla-
boré par le ministère austro-hongrois et
approuvé par la Russie a été communiqué
aux puissances occidentales. L'analyse qui
est donnée de ce projet est incomplète en-
core, mais l'impression qu'on en reçoit est
satisfaisante. Ce que l'on peut remarquer,
c'est que toutes ces négociations diploma-
tiques vont bien lentement, en une affaire
si urgente. Puisque les grandes puissances
connaissent enfin la charte à proposer ou à
imposer au gouvernement turc, on ne peut
que leur recommander de se hâter d'en pro-
voquer l'application.Quand elle ne donnerait
qu'une demi-satisfaction aux vœux des po-
pulations si longtemps opprimées, ce serait
un grand progrès accompli, et un succès
dont M. Andrassy pourrait se féliciter à
bon droit,
Les Cortex portugaises se sont réunies le
2 janvier. Le discours du roi ne présente
aucune particularité de grande impor-
tance. Le souverain se félicite de l'état des
relations du Portugal avec les diverses
puissances. Il rend au président de la Ré-
publique française un flatteur et juste hom-
mage pour la décision qu'il a rendue au
sujet de la baie de Lagoa,et convie le parle-
ment à accomplir u&e série de réformes li-
bérales.
————————— ♦ -————————
Une première fois la commission de
permanence s'est réunie sous la prési-
dence de M. le duc d'Audiffret Pasquier.
Naturellement aucun ministre n'y assis-
tait, et c'est grand dommage. M. Buffet,
qui sait tant de choses, eût, à coup sûr,
fait son profit de certaine observation
de M. le président. On se rappelle, eu
effet, que, dans les nombreuses com-
missions de, permanence qui se sont
succédé du mois de février 1873 au
mois de février 1875, l'honorable M.
Buffet a constamment posé en principe
que les commissions n'avaient d'autre
droit que de convoquer l'Assemblée en
cas d'urgence. M. Buffet remplissait
alors les hautes fonctions dévolues au-
jourd'hui à M. le duc d'Audiffret, et l'on
n'a pas oublié avec quel dévoûment et
quelle dextérité il tirait les ministres
des plus mauvais pas. A tel point qu'on
pût craindre un instant de voir la ma-
lignité publique tourner en ridicule le
rôle un peu dérisoire des commissions
de permanence.
M. de Kerdrel a de qui tenir ; il l'a
prouvé hier, en essayant de remettre en
honneur la théorie de M. Buffet. Mais
M. le duc d'Audiffret lui a fait observer
qu'il ne fallait pas assigner de limite
trop étroite aux prérogatives de la com-
mission. Il est bien vrai, en effet,
qu'elle ne peut rien de plus, effective-
ment, que de convoquer l'Assemblée ;
mais sa force morale est considérable ;
car la commission résume en soi la
souveraineté tout entière de la repré-
sentation nationale, et c'est l'Assemblée
même qui s'exprime par sa voix.
C'es ainsi que l'ont compris tous les
Trais parlementaires, et l'on peut s'é-
tonner que M. Buffet ne partage pas,
sur ce point, l'opinion de M. Léon Fau-
cher. Il était ministre de la République
en 1848 ; un jour, il-4se trouva en dés-
accord avec la commission de perma-
nence, et, sans hésiter, il déposa son
portefeuille. M. le duc d'Audiffret a
rappelé fort à propos ce souvenir, en
ajoutant qu'il était tout à l'honneur du
ministre de 1848. On saura demain, par
les organes du cabinet, si M. le vice-
président du conseil entend la respon-
sabilité ou, pour parler plus exacte-
ment, la dignité ministérielle, de la
même façon que M. Léon Faucher et
M. le duc d'Audiffret-Pasquier.
Est-il besoin de faire ressortir l'im-
portance exceptionnelle du rôle que la
commission de permanence devra jouer
durant les deux mois qui nous séparent
, de la réunion des nouvelles Chambres?
Les 25 élus de l'Assemblée nationale
sont nos protecteurs naturels ; de même
que M. le président, dans son discours
d'adieu à ses collègues de la Chambre,
a eu raison de dire que la constitution
était confiée à la loyauté du maréchal
de Mac-Mahon, de même nous sommes
dans la vérité parlementaire en disant
que 1 indépendance des électeurs et la
liberté du suffrage universel sont con-
fiées à la vigilance des membres de la
commission instituée par l'Assemblée
nationale.
A ce point de vue, il nous semble re-
griette^^r'que la commission ait ajourné
jusqu'au .zu janvier la aate ne sa pro-
chaine séance. C'est le 16 que doit avoir
lieu la nomination des délégués des
conseils municipaux, et l'on n'a que
itrop de raisons de croire que le mims"-
tère pèsera de tout le poids de son au-
torité sur le choix des conseils. Il eût
été bon que la commission de perma-
nence se mît en mesure de réfréner les
excès de zèle, aussi bien dans cette cir-
constance que dans les autres. Au sur-
plus, s'il y avait urgence, M. le prési-
dent ne manquerait certainement pas
de convoquer la commission, sur la de-
mande d'un certain nombre de ses mem-
bres, et le corps électoral peut être as-
suré qu'il trouvera, Je cas échéant, des
juges à Versailles.
E. SCHNERB.
—
Nous ne nous étions pas trop avan-
cés en affirmant que M. Viellard-Mi-
geon n'opposerait jamais une ambition
personnelle à la candidature de M.
Thiers. Une dépêche de Belfort, datée
du 3 janvier, 3 heures 40 du soir, nous
annonce que ce bon Français, par une
déclaration publique, s'est spontané-
ment effacé devant le libérateur du ter-
ritoire. S'il reste quelque incertitude
sur les sentiments politiques de l'hono-
rable M. Viellard-Migeon, républicain
toujours hésitant, son patriotisme
éclate en cette occurrence.
On ne peut plus douter aujourd'hui
que le premier président de la Répu-
blique ne soit élu d'enthousiasme par
les électeurs sénatoriaux, dans ce dé-
bris d'Alsace, ce territoire sacré qu'il
a conservé à la France. Notre corres-
pondant nous écrit que l'unanimité des
voix est assurée. Il ne nous reste plus
qu'à déclarer demain, en toute con-
naissance de cause, que M. Thiers sera
fidèle à Belfort comme Belfort à M.
Thiers. -
ABOUT.
i : ♦
M. Thiers a adressé la lettre suivante à
MM. Albert Theulior, Vilotte et Bussiêre,
membres du bureau qui présidait la réunion
privés où sa candidature au Sénat pour le dé
pàrtement de la Dordogne fut acclamée :
Paris, 30 décembre 1875.
Messieurs,
J'ai reçu la lettre que vous m'avez adres-
sée, et je vous en remercie.
Je suis vivement touché du vote unani-
me par lequel la réunion dont vous faisiez
partie a bien voulu adopter ma candida-
ture au Sénat pour le département de la
Dordogne; mais j'ai le regret de ne pou-
voir accepter cette offre, quelque honora-
qa'elle soit pour moi.
La préférence que j'ai dû donner à l'ar-
rondissement de Belfort, pour le cas où je
siégerais au Sénat, vous expliquera cette
détermination, qui, en m'empêchant d'ac-
cepter vos suffrages, me laisse plein de
gratitude pour le beau département de la
Dordogne.
Veuillez agréer, messieurs, l'assurance
de mon affectueuse considération,
A. THIERS.
Le Soleil nous apprend que M. Buf-
fet est porté au Sénat par le comité
conservateur des Vosges. « Porté » ne
tire point à conséquence ; on ne peut
savoir s'il arrivera sans encombre à
destination. Toujours est-il que la nou-
velle, dont la feuille orléaniste a eu la
primeur, a été confirmée hier par le
Bulletin français, journal officiel du
soir. On y trouve tout au long la lettre
où le comité conservateur des Vosges
offre la candidature sénatoriale à M.
Buffet, en compagnie de MM. Mougeot
et Grandjean. Il y est dit que « les
» soussignés considèrent MM. Buffet,
» Grandjean et Mougeot, à cause de
» leurs opinions conservatrices et vrai-
» ment libérales (vraiment!), de la
» haute intelligence qui les distingue
» et des services qu'ils ont déjà ren-
» dus (?), comme dignes au plus haut
» degré de la confiance publique. Avec
* de tels choix, ajoutent-ils, les soussi-
» gnés sont certains d'atteindre le but
» patriotique auquel ils aspirent : un
» appui ferme et loyal au maréchal de
» Mac Mahon, président de la Républi-
» que, et l'exécution sincère de la
» constitution. *
Il faudra voir ce qu'en penseront les
délégués des communes vosgiennes.
Quant à nous, nous ferons deux remar-
ques, sans plus. La première, c'est que
M. Buffet a vraisemblablement conçu
des doutes sur le succès de sa candida-
dure à la députation dans l'arrondisse-
ment de Mirecourt, puisqu'il l'aban-
donne et qu'il lui préfère une candida-
ture sénatoriale éclose tout à point
pour la remplacer. La seeonde, c'est
que l'éminent vice-président du conseil
fait de graves concessions au radica-
lisme en acceptant que la candidature
lui soit offerte dans des termes que ne
désavouerait nul candidat républicain.
Il se laisse placer sous le patronage
de la constitution, des opinions « vrai-
ment libérales, » voire de la « Répu-
blique, » UB, mot qui,dans ses discours
de Versailles, lui a toujours paru si
difficile à prononcer qu'on ne l'a jamais
entendu sortir de sa bouche. Pourquoi ?
C'st qu'il convient apparemment de
distinguer le Buffet ministre et le Buf-
fet candidat. — Monsieur Buffet ? -
Est-ce au ministre ou bien au candidat
que vous voulez parler?- C'est au mi-
nistre. — 0 péril social ! monstre ra-
dical ! ô communeux du centre gauche,
dont jamais, jamais, au grand jamais,
je ne saurais être l'allié !. — Et le
candidat maintenant? - Souffrez que
j^aillë "changer de veste. M'y voici:
le but patriotique, le président de la
République, l'appui ferme et loyal, les
opinions vraiment libérales. — Mon-
sieur le candidat, merci ! Mais ayant,
avant vous, entendu le ministre, nous
sommes suffisamment édifiés.
Ah ! la littérature électorale! Elle
va refleurir, et, si l'on n'y prenait pas
garde, combien ne duperait-elle point
de braves gens! Pour nos candidats
conservateurs de tous acabits, il s'agira
surtout de pratiquer en grand l'art de
paraître ce que l'on n'est pas. L'élo-
quence politique a fait de ce côté là des
progrès immenses. On a si bien brouillé
les mots que maintenant, pour en trou-
ver le sens, il faut savoir préalable-
ment qui les a écrits. Jamais les élec-
teurs français n'outtant entendu parler
de liberté, de progrès, de démocratie
que par les candidats officiels du second
empire ; à tel point qu'en ce temps-là les
vrais libéraux ne savaient comment
faire pour distinguer leurs professions
de, foi de celles des mamclucks. Et vous
allez voir que les conservateurs de
l'heure présente se seront encore per-
fectionnés. Mettez, au bas de cette
lettre que nous citions plus haut, des
signatures républicaines, et supposez
qu'au lieu de M. Buffet ce soit à M.
Gambetta que la candidature y soit of-
ferte : vous ne trouverez point un mot
à changer. Est-ce à dire cependant que
la politique de M. Buffet et celle de
M. Gambetta soient la même, qu'ils
tendent au même but, et que ce qui
convient à l'un convienne à l'autre? Le
fin du fin, pour un conservateur, aspi-
rant au Sénat ou à la Chambre des dé-
putés, sera de se donner pour répu-
blicain, et de telle sorte que le plus
grand nombre possible d'électeurs puis-
sent s'y tromper. Il en est tant, de nos
bons paysans, qui n'ont point appris à
épiloguer sur les adjectifs et à peser sa-
vamment les virgules ! On eût jugé ja-
dis avec sévérité ce genre de superche-
rie; mais les mœurs s'adoucissent. La
conclusion, c'est qu'il importe que les
électeurs s'enquièrent moins des pro-
fessions de foi que des hommes, s'ils
tiennent, en effet, à être éclairés. Au-
tre conclusion, et celle-ci n'est point fâ-
cheuse : c'est que les idées libérales et
républicaines, si malmenées par M. Buf-
fet, demeurent pourtant assez puissan-
tes, puisqu'un candidat tel que M. le
vice-président du conseil ne trouve rien
de plus habile que de se servir de leur
crédit pour être nommé. -
BUG. LIÉBERT.
-♦ —————
COMMISSION DE PERMANENCE
Séance du 3 janvier.
PRÉSIDENCE DE M. LE DUC D'ÀUDIFFRET-PÀSQUIBR
La séance est ouverte à une heure et de-
mie
Tous les membres de la commission sont
présents, à l'tlxception de M. Tirard, qui
s'est fait excuser pour cause d'indisposition,
et de M. Cocsie; y.
Le burfau de rAsemb!ée est représenté
par MM. le duc d'Audift'rtH-PaSfluier, prési-
dent, DUclerc et deKerdre!, vice-présidents,
Félix Voisin, secrétaire, et BazEr) questeur.
M. Ricard vice-président, s'est fait excuser.
M. de Kerdrel, aa début de la séance, de-
mande que, contrairement à ce qui s'est
fait jusqu'à ce jour, les dorapUs-rendas des
séances de la commission de permanence ne
soient point livrés à la publicité.
Ceux que donnent les journaux ne peuvent
avoir, d'ailleurs, aucun caractère officiel,
puisqu'il n'est point dressé de procès-verbal,
et il semble préférable, dans ces conditions,
de s'ab-tenir da les publier.
M. Ernest Picard estime, au oontraire,
qu'il y a de rëeis avantages à cette publica-
tion. Il est certain d'ailleurs que les comptes-
rendus livrés jusqu'à ce jour à la presse ont
toujours eu, à défaut d'an caractère d'au-
thenticité offioi*ll0> une forme impartiale qui
n'a provoqué aucune réclamation.
D'ailleurs, la période électorale qui est ou-
verte peut donner lien à des questions impor-
tantes relatives aux faits qui se passeraient,
et qui soient de nature à vivement intéresser
l'opinion pabliaue. Il est bon qu'on sache que
la commission de p-rmanence remplit exac-
tement son jôle, qu'elle reste la gardienne
sévère des droits de l'Assemblée et la dépo-
sitaire flièle de son aatt-riié.
M Rameau appuie ces observations en
faisant remarquer que la question a été
maintes fois Soulevée et résolue, puisque
toujours après une proposition identique, h s
commissions précédentes n'ont pas cru de-
voie s'opposer à la publication des comptes
rendus.
M d" Kerdrel insiste; il croit que les ré-
clamations qui pourraient se proluire à pro-
pos de faits électoraux viendroat plus utile-
ment devant la proohaine Assemblée. La
commission n'a pas à connaître des quest eas
qui sont de véritables interpellations, et
pour lesquelles il ne saurait exister aucune
sanction.
M. Hamille, conformément à la pensée de
M. de Kertirel, demande que le secret des
délibérations soit exigé de chacun des mem-
bres de la commission.
M. de Kerdrel, revenant sur ce qu'il a
dit, pense qu'il faudra se garder d'apporter
aucune réclamation relative aux élections ;
ce serait étendre, eu dehors de tout droit,
les crérogatives de la commission.
M. Noël Parfait constate que les comptes-
rendus n'ont jamais fait l'objet d'aucune ré-
clamation. li bétonne, d'autre part, qu'on
pirissè nier l'évident intérêt qu'il peut y avoir
à poiter certaines questions devant la com-
mission.
- M. Lepère. — Il y a là, pour l'opinion
publique, une garantie nécessaire ; ce doat
il S'bglt est precisement du domaine de la
commission, représentant fAssombléesouve-
raine, gardienne des droits et des intérêts
publics. Le pays ne comprendrait pas qu'on
voulût lui taire ce qui se passe dans la eom-
mission, et ce qui l'intéresse au plus haut
point.
La commission, sans prendre de décision,
"laiss à chacun de ses membres la responsa-
bilité fIes communications qu'ils croiront
pouvoir faire à la presse.
M. Combier demande que la commission
fixe, dès à présent, la périodicité de ses
séauces.
< M. le président fait observer que le rè-
glement s'y oppose. Le règlement dit, en ef-
fet, qu'à chaque séance la commission fixe la
date de sa séance.
Revenant sur l'incident soulevé par M. Se-
bert, M. le président reconnaît, avec M. de
Kerdrel, qu'à s'en teuir à la lettre de la loi,
il est bien vrai que la commission n'a pas
d'autre droit que de convoquer l'Assemblée;
mais il ajoute qu'il est assez difficile d'assi-
gner une limite exacte aux investigations
auxquelles elle croit devoir se livrer, pour
Fe tenir en mesura d'exercer ce droit, le cas
échéant.
Il rappelle l'exemple de Léon Faucher, mi-
nistre de la République de 1848, qui, s'étant
trouvé en désaccord avec la commission de
permanence, n'hésita pas à donner sa démis-
sion, sans attendre le retour de la Cbambre,
ce dont, ajoute M. le président, ses contem-
porains l'ont grandement honoré.
La commission fixe au jeudi, 120 janvier, à
deux heures, la date de ?a prochaine séance.
La séance est levée à deux heures.
LES PETITS FRANÇAIS
Me permettra-t-on d'ouvrir cet ar-
ticle, qui sera peut-être suivi de quel-
ques autres, par cet extrait d'une lettre
que j'ai eu l'honneur de recevoir d'un
de nos conseillers municipaux :
« Monsieur,
» La lecture du rapport ci-joint a
soulevé une opposition très-vive au sein
du conseil municipal, et même, qui l'au-
rait cru? parmi les meilleurs démocra-
tes. De son côté M. le préfet ne se mon-
tre pas bien favorable à l'établissement
des caisses d'épargne dans nos écoles
communales.
» Dans ces conditions, la discussion
a été ajournée. En attendant, ne serait-
il pas utile que la délibération d'une
question si intéressante au point de vue
social fût préparée et facilitée par les
discussions de la presse républicaine,
de celle qui veut, comme nous, l'amé-
lioration progressive et constante du
peuple, sous le triple rapport intellec-
tuel, matériel et moral ; mais qui la
veut par l'instruction, par le travail,
par l'esprit d'ordre et de prévoyance,
et non par la violence et les révolu-
tions ?
» Agréez, monsieur, etc. »
Je pense, en effet, que la question
vaut la peine d'être exposée au public,
et que le conseil municipal de Paris
s'est trompé dans le jugement qu'il en
a porté une première fois. Elle revien-
dra sans doute devant lui l'année pro-
chaine ; il est donc nécessaire de peser
par avance sur l'opinion publique, au
moyen d'une enquête préalable.
Voici ce dont il s'agit.
Vous savez tous ce que c'est que la
caisse d'épargne, et dans quel but cette
institution à été fondée.
Je n'ai pas, j'imagine, à m'étendre
longuement sur les bienfaits que l'on
attend de son fonctionnement. Elle en-
seigne l'ordre et la prévoyance aux
travailleurs ; elle les dote des plus puis-
sants outils de régénération que l'on con-
naisse au monde, et qui sont l'épargne
et le capital ; elle resserre les liens de
la famille, unie autour de son chef, en
la mettant à l'abri des accidents quoti-
diens qui la dispersent ou la détrui-
sent.
Vous me dispenserez aisément de me
répandre en belles phrases sur un su-
jet épuisé. L'éloge dé la caisse d'épar-
gne n'est plus à faire depuis long-
temps
Elle n'a guère servi, jusqu'à ce jour,
qu'aux personnes en âge de gagner de
l'argent. Ouvriers, domestiques, com-
mis; petits bourgeois, rentiers médio-
cres, tout cet humble monde y vient
déposer chaque dimanche les petites
économies qu'il a faites dans la se-
maine, et voit avec plaisir s'enfler de
mois en mois son modeste trésor.
L'idée nouvelle, ce serait de la mettre
à la portée des enfants des écoles com
munales.
Ce n'est pas assurément que Pôn n'ait
pas déjà ouvert, à la caisse d'épargne,
bien des comptes à des écoliers- ou mê-
me à des bébés en bas âge. Il est tou-
jours permis à Un père, à un parent
quelconque, à un parrain, à un bienfai-
teur, de prendre un livret au nom d'un
enfant, de le nourrir et de l'amener à
la somme réglementaire, au-delà de
laquelle la loi commande d'acheter un
titre de rente.
C'est même un prix que l'on donne
assez souvent dans les écoles Commu-
nales, soit à Paris, soit ailleurs, et qui
excite le plus d'émotion parmi les
élèves : un livret de la caisse d'épar-
gne.
Mais dans ces cas, et dans tous les
cas semblables, ce n'est pas l'enfant
lui-même qui place un argent lui ap-
partenant à lui seul ; c'est un intermé-
diaire, agissant en son nom. Il y a, cer-
tes, profit pour le bénéficiaire dans ce
livret qui lui e&t donné; il y a aussi in-
vitation pressante, quoique indirecte, à
poursuivre plus tard, quand il sera de-
venu grand, l'œuvre commencée par
d'autres en sa faveur. Mais enfin, quel-
que impression que puisse faire sur son
jeune esprit cette pensée bienfaisante :
« J'ai un livret, je suis capitaliste ! » il
faut bien reconnaître qu'elle ne saurait
exercer le même empire sur sa tendre
imagination que si c'était lui-même qui,
sou à sou, prenant sur son argent de
poche, se fut constitué à force d'épar-
gnes et de privations son petit trésor.
Est-il possible d'admettre, d'appeler
l'enfant, le bébé à la connaissance et
à la pratique de l'épargne, en l'initiant
au mécanisme de la caisse qui en porte
le nom ?
La caisse d'épargne ne saurait, cela
est bien évident, recevoir des sommes
par trop petites. Un franc est le mini-
mum de l'argent qu'on y peut placer en
une fois. Mais pour l'enfant et pour
l'enfant pauvre, un franc, c'est une
somme : cela représente vingt fois un
sou, le sou du dimanche, le sou dont il
achètera soit un sucre d'orge, soit les
quatre bonshommes traditionnels en
pain d'épicë.
Jamais l'enfant ne réunira vingt sous.
Espérer qu'il enfouira dans quelque re-
coin ignoré, pendant une longue série
de semaines, ce tas grossissant d'es-
poirs rentrés, de friandises ôtées de la
bouche, c'est attendre de l'humaine
nature plus qu'elle ne peut donner. La
chair est faible, hélas !
Il faut donc s'arranger de façon que
l'écolier puisse déposer son sou à là
caisse d'épargne.
Par quel moyen :
Il est bien simple, le moyen, et il n'a
pas fallu, pour le trouver, grand effort
d'invention.
Il n'y a qu'à autoriser l'instituteur à
recevoir, sou par sou, l'épargne, de
chacun de ses élèves. Au premier sou
donné, il ouvrira un compte au dépo-
sant, et quand il aura atteint le chiffre
réglementaire d'un franc. il ira le por-
ter à la grande caisse d'épargne, qui
ouvrira aussitôt un livret,
La chose est si simple, que les orga-
nisateurs de cette œuvre admirable qui
a nom la Sainte-Enfance, l'ont trouvée
tout de suite.
Ils s'en vont ainsi dans les écoles
quêter, sou à sou, l'argent de poche
des pauvres enfants. La différence,
c'est qu'ils gardent l'argent pour eux,
je veux dire, pour les petits Chinois ;
ces petits Chinois que je me garderai
bien désormais d'appeler des Chinois
problématiques. Problématiques, les
petits Chinois!. Ils existent, et la
preuve, c'est que le journal leur fera
tenir, par le fidèle intermédiaire des
bons pères, un joli billet de mille francs.
S'il n'y avait pas de petits Chinois, que
ferait-on de nos mille francs ? Je vous
le demande.
Et que ferait-on de tous ces sous ré-
coltés, non sans quelque effort, par
ces messieurs dans les écoles, même
dans les écoles communales? Un de nos
conseillers municipaux nous a écrit,
l'autre jour, qu'il allait saisir le con-
seil d'une motion tendant à réprimer
le zèle des propagateurs de la Sainte-
Enfance dans les écoles primaires. Il
paraîtrait, nous dit l'honorable édile,
dont nous avons la lettre signée, que
ces messieurs, profitant de la nécessité
où les parents croient être de faire
faire la première communion à leurs
enfants, opposent des barrières plus
difficiles, et parfois même insurmonta-
bles, aux élèves des maîtres qui refu-
sent de laiâser payer chez eux l'impôt
de la Sainte-Enfance.
On pourrait, en écartant les collec-
teurs de cette œuvre plus envahissante
encore qu'tltile, trouver aux sous laissés
disponibles un emploi plus fructueux
par la création de ces caisses d'épar-
gne scolaires.
J'exposerai demain l'organisation
qu'elles ont revêtue dans la plupart des
pays d'Europe, qui en ont adopté l'in-
stitution; je conterai les difficultés
qu'en a rencontrées la propagation en
France, et je tâcherai de faire voir le
profit qu'il est permis d'en espérer.
FRANCISQUE SARCEY.
♦
INFORMATIONS
Le Journal officiel a promulgué hier la
loi du 29 décembre sur la répression des
délite qui peuvent être commid par la
voie de la presse ou par tout autre moyen
de publication, et sur la levée de l'état
de siège.
Voici les noms des membres du conseil
général de la Seine qui sont allés saluer
le président de la République à l'occasion
du renouvellement de l'année 2
MM. Tenaille Saligoy, Martial Bernard,
Charles Loiseau, Léveillé, Beudant, Bixio,
Delzlnt, de Garminy Potier, Binder, Wa-
tel, Riant, Prétet, Degouve-Denuncques,
Dujarrier, Denizot, Dumas, Jobbé-Dllval,
Dietz .MoDnin,DeligIly,Marmottu, Hérold,
Sueur, Moreau.
On voit que tous les groupes du conseil
général se trouvaient représentés.
La gauche avait porté M. La Serve, dé-
puté de la Réunion, sur la liste de eeux de
ses membres qu'elle voulait faire entrer
dans la commission dé permanence ; de
même que le centre gauche avait porté M.
l'amiral Pothuau sur la Mienne. Nous
croyons utile de faire connaitre que, si les
nom de cet deux députes ont été effacés
des listes présentées, c'est sur leur de-
mande. Nous constatons ce fait à la fois
pour rendre justice au dévouement de MM,
La Serve et Pothuau et pour éviter toute
faussé interprétation.
M. le ministre de l'intérieur élabore en
ce moment une circulaire aux préfets au
sujet de l'application de la nouvelle loi sur
la presse.
De son côté, M. le garde des sceaux
prépare une circulaire aux procureurs
généraux et aux présidents, relativement
à la même loi.
Ces instructions seront expédiées dans
quelques jours.
Le conseil municipal de Paris est convo-
qué pour la fin de la semaine prochaine.
La première séance de cette session doit
être consacrée à la nomination, dans cha-
cun des vingt arrondissements de Paris,
des délégués chargés de procéder; de con-
cert avec le maire, à la révision des listes
électorales.
L'ambassade marocaine, composée de
huit personnes, arrivera vers le 15 janvier
à Paris.
Parmi les nouveaux membres admis par
le Jockey-Club, on cite MM. Patrice de
Mac Mahon, le comte d'Alsace d'Hénin, le
prince Borys Galitzine, le comte Joseph
de Gontaut, le baron Christian deBerkheim,
le vicomte de Brigode et le comte de Rilly.
L'année qui vient de s'écouler aura été
particulièrement favorable aux recettes de
la ville de Paris. La plus importante d'en-
tre elles, celle de l'octroi, a doné tout ce
qu'elle promettait. On ne saurait enoCTe, à
cause même des vacances du jour de l'ail;
donner des chiffres absolument exacts pour
le total des droits encaissés. Mais, d'après
les propres déclarations de M. de Saint-
Jullien, directeur de ce service, le rende-
ment de 1875 dépassera certainement les
113 millions portés, par prévision, au bud-
get de l'année.
Le conseil d'Etat vient de terminer
l'examen d'un projet de règlement d'admi-
nistration publique sur la réorganisation
des corps de sapeurs-pompiers.
Les bureaux du ministère de l'intérieur
préparent en ce moment une circulaire
qui sera envoyée à tous les préfets, en
même temps que le nouveau règlement sur
la réorganisation des sapeurs-pompiers
dans toutes les communes de France. •
Le National signale deux nouvelles
améliorations dans le service scolaire de
la ville de Paris, qui viennent d'êtres mi-
ses à l'étude, et qui seront très-probable-
ment appliquées dans le courant de l'année
prochaine.
En premier lieu, on a remarqué que
beaucoup d'enfants des écoles de la ville
restent dans les rues de 7 à 8 heures du
matin, par la raison que les classes ne
s'ouvrent qu'à 8 heures, tandis que leurs
parents partent pour leur travail beaucoup
plus tôt. Il est question, pour remédier à
cet inconvénient, d'ouvrir dans toutes les
écoles communales des salles spéciales d'é-
tude et de récréation, où les enfants se-
raient reçus et surveillés, à partir de 7
heures du matin en hiver, et de 6 heures
en été.
La seconde amélioration réclamée de-
puis longtemps par l'industrie consiste
dans la création d'écoles centrales de des-
sin industriel, où les élèves, déjà instruits
dans les éléments à l'école communale,
pourront se perfectionner et acquérir des
connaissances artistiques aussi complètes
que possible. Ces établissements, qu'on
peut comparer à des écoles de beaux-arts
appliqués à l'industrie, contribueront évi-
demment à élever encore le niveau du
goût et de l'habileté spéciale qui distin-
guent la plupart de nos ouvriers parisiens.
M. Okounew, conseiller de l'ambassade
de Russie à Paris, est nommé au poste
d'envoyé extraordinaire et ministre pléni-
potentiaire à la cour de Stockholm.
M. Okounew est un homme vraiment
distingué et très-sympathique à la France,
qui a représenté, pendant la guerre, le
cabinet russe auprès du gouvernement
de Tours.
-4^
Chronique Étrangère
Les journaux étrangers nous apportent
quelques discours prononcés par divers
souverains à l'occasion du jour de l'an. Il
n'y à guère à remarquer que le discours
du roi d'Italie, et encore parce que la Fan.
fulla le reproduit avec un luxe de détails
inusité.
Victor-Emmanuel, répondant aux re-
présentants de l'armée à l'occasion des pré-
sentations du nouvel an, les a félicités des
progrès que l'armée avait faits et de la
bonne volonté dont elle faisait preuve. Il a
souhaité à l'armée gloire et honneur.
Le roi a ajouté qu'il avait, comme tou-
jours la certitude que si quelque événeM
ment nouveau en fournissait l'occasion,
l'armée ne manquerait pas de répondre à
sa confiance et à celle du pays.
L'ouverture des Cortès a eu lieu à Lis-
bonne le 2 janvier.
Le roi a, dans son discourt; constaté le
maintien des relations amicales du Portu-
gal avec les autres puissances.
La décision impartiale du maréchal de
Mac-Mahon, au sujet de la baie de Lagoa,
a heureusement terminé un différend, tout
pacifique d'ailleurs, avec l'Angleterre.
Le rei dit qu'il a manifesté au maréchal
président sa reconnaissance pour la haute
impartialité et le sentiment de justice qu'il
a montrés dans une affaire si délicate.
A propos du budget, le roi a dit que
l'état prospère du pays dispense de nou-
velles contributions.
: Le roi a mentionné les principaux tra-
vaux qui devront occuper la présente ses-
sion. Il faudra améliorer la situation des
Mercredi 5 Janvier 1876
1E E SIÈCLE
rr N
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
%, RÉDACTION
S'adresser au Secrétaire de la Rédaetlon
de 2 heures à minuit
i. 53, rue de Lafayette, 53
Les-lettres non affranchies seront refusées
ABONNEMENTS
PARIS
Trois mois 13 fr.
Six mois. 25
Un an 50
DÉPARTEMENTS
Trois mois. 16 fr.
Six mois. 32
Un an 62
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Rédacteur en chef-Gérant: E. ABOUT 1 .1.
ADMINISTRATION
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
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6, place de la Bourse, 6
Imp. A. CHAIX ET Cie, rue Bergère, to, à Paris
BULLETIN
Paris, 4 janvier 1876.
Toute l'attention et du gouvernement et
de l'opinion est concentrée à cette heure
sur les nominations des délégués des con-
le ils municipaux qui vont avoir lieu dans
une quinzaine de jours. Il y a longtemps,
sans doute, que le travail d'entraînement
a été commencé par le gouvernement et ses
agents. Mais, d'autre part, d'un très-grand
nombre de points, les renseignements tb
rivent, qui permettent d'affirmer que l'o-
pinion républicaine et libérale n'est point
en retard, et que le choix des délégués
sera fait dans les conditions les meilleu-
res pour assurer la liberté des élections
sénatoriales. Le pays comprend parfaite-
ment l'importance capitale du grand acte
qui va s'accomplir, et ne restera pas au-
dessous de la tâche qui lui eat confiée.
Les informations de Berlin nous appren-
nent que le célèbre projet de réformes éla-
boré par le ministère austro-hongrois et
approuvé par la Russie a été communiqué
aux puissances occidentales. L'analyse qui
est donnée de ce projet est incomplète en-
core, mais l'impression qu'on en reçoit est
satisfaisante. Ce que l'on peut remarquer,
c'est que toutes ces négociations diploma-
tiques vont bien lentement, en une affaire
si urgente. Puisque les grandes puissances
connaissent enfin la charte à proposer ou à
imposer au gouvernement turc, on ne peut
que leur recommander de se hâter d'en pro-
voquer l'application.Quand elle ne donnerait
qu'une demi-satisfaction aux vœux des po-
pulations si longtemps opprimées, ce serait
un grand progrès accompli, et un succès
dont M. Andrassy pourrait se féliciter à
bon droit,
Les Cortex portugaises se sont réunies le
2 janvier. Le discours du roi ne présente
aucune particularité de grande impor-
tance. Le souverain se félicite de l'état des
relations du Portugal avec les diverses
puissances. Il rend au président de la Ré-
publique française un flatteur et juste hom-
mage pour la décision qu'il a rendue au
sujet de la baie de Lagoa,et convie le parle-
ment à accomplir u&e série de réformes li-
bérales.
————————— ♦ -————————
Une première fois la commission de
permanence s'est réunie sous la prési-
dence de M. le duc d'Audiffret Pasquier.
Naturellement aucun ministre n'y assis-
tait, et c'est grand dommage. M. Buffet,
qui sait tant de choses, eût, à coup sûr,
fait son profit de certaine observation
de M. le président. On se rappelle, eu
effet, que, dans les nombreuses com-
missions de, permanence qui se sont
succédé du mois de février 1873 au
mois de février 1875, l'honorable M.
Buffet a constamment posé en principe
que les commissions n'avaient d'autre
droit que de convoquer l'Assemblée en
cas d'urgence. M. Buffet remplissait
alors les hautes fonctions dévolues au-
jourd'hui à M. le duc d'Audiffret, et l'on
n'a pas oublié avec quel dévoûment et
quelle dextérité il tirait les ministres
des plus mauvais pas. A tel point qu'on
pût craindre un instant de voir la ma-
lignité publique tourner en ridicule le
rôle un peu dérisoire des commissions
de permanence.
M. de Kerdrel a de qui tenir ; il l'a
prouvé hier, en essayant de remettre en
honneur la théorie de M. Buffet. Mais
M. le duc d'Audiffret lui a fait observer
qu'il ne fallait pas assigner de limite
trop étroite aux prérogatives de la com-
mission. Il est bien vrai, en effet,
qu'elle ne peut rien de plus, effective-
ment, que de convoquer l'Assemblée ;
mais sa force morale est considérable ;
car la commission résume en soi la
souveraineté tout entière de la repré-
sentation nationale, et c'est l'Assemblée
même qui s'exprime par sa voix.
C'es ainsi que l'ont compris tous les
Trais parlementaires, et l'on peut s'é-
tonner que M. Buffet ne partage pas,
sur ce point, l'opinion de M. Léon Fau-
cher. Il était ministre de la République
en 1848 ; un jour, il-4se trouva en dés-
accord avec la commission de perma-
nence, et, sans hésiter, il déposa son
portefeuille. M. le duc d'Audiffret a
rappelé fort à propos ce souvenir, en
ajoutant qu'il était tout à l'honneur du
ministre de 1848. On saura demain, par
les organes du cabinet, si M. le vice-
président du conseil entend la respon-
sabilité ou, pour parler plus exacte-
ment, la dignité ministérielle, de la
même façon que M. Léon Faucher et
M. le duc d'Audiffret-Pasquier.
Est-il besoin de faire ressortir l'im-
portance exceptionnelle du rôle que la
commission de permanence devra jouer
durant les deux mois qui nous séparent
, de la réunion des nouvelles Chambres?
Les 25 élus de l'Assemblée nationale
sont nos protecteurs naturels ; de même
que M. le président, dans son discours
d'adieu à ses collègues de la Chambre,
a eu raison de dire que la constitution
était confiée à la loyauté du maréchal
de Mac-Mahon, de même nous sommes
dans la vérité parlementaire en disant
que 1 indépendance des électeurs et la
liberté du suffrage universel sont con-
fiées à la vigilance des membres de la
commission instituée par l'Assemblée
nationale.
A ce point de vue, il nous semble re-
griette^^r'que la commission ait ajourné
jusqu'au .zu janvier la aate ne sa pro-
chaine séance. C'est le 16 que doit avoir
lieu la nomination des délégués des
conseils municipaux, et l'on n'a que
itrop de raisons de croire que le mims"-
tère pèsera de tout le poids de son au-
torité sur le choix des conseils. Il eût
été bon que la commission de perma-
nence se mît en mesure de réfréner les
excès de zèle, aussi bien dans cette cir-
constance que dans les autres. Au sur-
plus, s'il y avait urgence, M. le prési-
dent ne manquerait certainement pas
de convoquer la commission, sur la de-
mande d'un certain nombre de ses mem-
bres, et le corps électoral peut être as-
suré qu'il trouvera, Je cas échéant, des
juges à Versailles.
E. SCHNERB.
—
Nous ne nous étions pas trop avan-
cés en affirmant que M. Viellard-Mi-
geon n'opposerait jamais une ambition
personnelle à la candidature de M.
Thiers. Une dépêche de Belfort, datée
du 3 janvier, 3 heures 40 du soir, nous
annonce que ce bon Français, par une
déclaration publique, s'est spontané-
ment effacé devant le libérateur du ter-
ritoire. S'il reste quelque incertitude
sur les sentiments politiques de l'hono-
rable M. Viellard-Migeon, républicain
toujours hésitant, son patriotisme
éclate en cette occurrence.
On ne peut plus douter aujourd'hui
que le premier président de la Répu-
blique ne soit élu d'enthousiasme par
les électeurs sénatoriaux, dans ce dé-
bris d'Alsace, ce territoire sacré qu'il
a conservé à la France. Notre corres-
pondant nous écrit que l'unanimité des
voix est assurée. Il ne nous reste plus
qu'à déclarer demain, en toute con-
naissance de cause, que M. Thiers sera
fidèle à Belfort comme Belfort à M.
Thiers. -
ABOUT.
i : ♦
M. Thiers a adressé la lettre suivante à
MM. Albert Theulior, Vilotte et Bussiêre,
membres du bureau qui présidait la réunion
privés où sa candidature au Sénat pour le dé
pàrtement de la Dordogne fut acclamée :
Paris, 30 décembre 1875.
Messieurs,
J'ai reçu la lettre que vous m'avez adres-
sée, et je vous en remercie.
Je suis vivement touché du vote unani-
me par lequel la réunion dont vous faisiez
partie a bien voulu adopter ma candida-
ture au Sénat pour le département de la
Dordogne; mais j'ai le regret de ne pou-
voir accepter cette offre, quelque honora-
qa'elle soit pour moi.
La préférence que j'ai dû donner à l'ar-
rondissement de Belfort, pour le cas où je
siégerais au Sénat, vous expliquera cette
détermination, qui, en m'empêchant d'ac-
cepter vos suffrages, me laisse plein de
gratitude pour le beau département de la
Dordogne.
Veuillez agréer, messieurs, l'assurance
de mon affectueuse considération,
A. THIERS.
Le Soleil nous apprend que M. Buf-
fet est porté au Sénat par le comité
conservateur des Vosges. « Porté » ne
tire point à conséquence ; on ne peut
savoir s'il arrivera sans encombre à
destination. Toujours est-il que la nou-
velle, dont la feuille orléaniste a eu la
primeur, a été confirmée hier par le
Bulletin français, journal officiel du
soir. On y trouve tout au long la lettre
où le comité conservateur des Vosges
offre la candidature sénatoriale à M.
Buffet, en compagnie de MM. Mougeot
et Grandjean. Il y est dit que « les
» soussignés considèrent MM. Buffet,
» Grandjean et Mougeot, à cause de
» leurs opinions conservatrices et vrai-
» ment libérales (vraiment!), de la
» haute intelligence qui les distingue
» et des services qu'ils ont déjà ren-
» dus (?), comme dignes au plus haut
» degré de la confiance publique. Avec
* de tels choix, ajoutent-ils, les soussi-
» gnés sont certains d'atteindre le but
» patriotique auquel ils aspirent : un
» appui ferme et loyal au maréchal de
» Mac Mahon, président de la Républi-
» que, et l'exécution sincère de la
» constitution. *
Il faudra voir ce qu'en penseront les
délégués des communes vosgiennes.
Quant à nous, nous ferons deux remar-
ques, sans plus. La première, c'est que
M. Buffet a vraisemblablement conçu
des doutes sur le succès de sa candida-
dure à la députation dans l'arrondisse-
ment de Mirecourt, puisqu'il l'aban-
donne et qu'il lui préfère une candida-
ture sénatoriale éclose tout à point
pour la remplacer. La seeonde, c'est
que l'éminent vice-président du conseil
fait de graves concessions au radica-
lisme en acceptant que la candidature
lui soit offerte dans des termes que ne
désavouerait nul candidat républicain.
Il se laisse placer sous le patronage
de la constitution, des opinions « vrai-
ment libérales, » voire de la « Répu-
blique, » UB, mot qui,dans ses discours
de Versailles, lui a toujours paru si
difficile à prononcer qu'on ne l'a jamais
entendu sortir de sa bouche. Pourquoi ?
C'st qu'il convient apparemment de
distinguer le Buffet ministre et le Buf-
fet candidat. — Monsieur Buffet ? -
Est-ce au ministre ou bien au candidat
que vous voulez parler?- C'est au mi-
nistre. — 0 péril social ! monstre ra-
dical ! ô communeux du centre gauche,
dont jamais, jamais, au grand jamais,
je ne saurais être l'allié !. — Et le
candidat maintenant? - Souffrez que
j^aillë "changer de veste. M'y voici:
le but patriotique, le président de la
République, l'appui ferme et loyal, les
opinions vraiment libérales. — Mon-
sieur le candidat, merci ! Mais ayant,
avant vous, entendu le ministre, nous
sommes suffisamment édifiés.
Ah ! la littérature électorale! Elle
va refleurir, et, si l'on n'y prenait pas
garde, combien ne duperait-elle point
de braves gens! Pour nos candidats
conservateurs de tous acabits, il s'agira
surtout de pratiquer en grand l'art de
paraître ce que l'on n'est pas. L'élo-
quence politique a fait de ce côté là des
progrès immenses. On a si bien brouillé
les mots que maintenant, pour en trou-
ver le sens, il faut savoir préalable-
ment qui les a écrits. Jamais les élec-
teurs français n'outtant entendu parler
de liberté, de progrès, de démocratie
que par les candidats officiels du second
empire ; à tel point qu'en ce temps-là les
vrais libéraux ne savaient comment
faire pour distinguer leurs professions
de, foi de celles des mamclucks. Et vous
allez voir que les conservateurs de
l'heure présente se seront encore per-
fectionnés. Mettez, au bas de cette
lettre que nous citions plus haut, des
signatures républicaines, et supposez
qu'au lieu de M. Buffet ce soit à M.
Gambetta que la candidature y soit of-
ferte : vous ne trouverez point un mot
à changer. Est-ce à dire cependant que
la politique de M. Buffet et celle de
M. Gambetta soient la même, qu'ils
tendent au même but, et que ce qui
convient à l'un convienne à l'autre? Le
fin du fin, pour un conservateur, aspi-
rant au Sénat ou à la Chambre des dé-
putés, sera de se donner pour répu-
blicain, et de telle sorte que le plus
grand nombre possible d'électeurs puis-
sent s'y tromper. Il en est tant, de nos
bons paysans, qui n'ont point appris à
épiloguer sur les adjectifs et à peser sa-
vamment les virgules ! On eût jugé ja-
dis avec sévérité ce genre de superche-
rie; mais les mœurs s'adoucissent. La
conclusion, c'est qu'il importe que les
électeurs s'enquièrent moins des pro-
fessions de foi que des hommes, s'ils
tiennent, en effet, à être éclairés. Au-
tre conclusion, et celle-ci n'est point fâ-
cheuse : c'est que les idées libérales et
républicaines, si malmenées par M. Buf-
fet, demeurent pourtant assez puissan-
tes, puisqu'un candidat tel que M. le
vice-président du conseil ne trouve rien
de plus habile que de se servir de leur
crédit pour être nommé. -
BUG. LIÉBERT.
-♦ —————
COMMISSION DE PERMANENCE
Séance du 3 janvier.
PRÉSIDENCE DE M. LE DUC D'ÀUDIFFRET-PÀSQUIBR
La séance est ouverte à une heure et de-
mie
Tous les membres de la commission sont
présents, à l'tlxception de M. Tirard, qui
s'est fait excuser pour cause d'indisposition,
et de M. Cocsie; y.
Le burfau de rAsemb!ée est représenté
par MM. le duc d'Audift'rtH-PaSfluier, prési-
dent, DUclerc et deKerdre!, vice-présidents,
Félix Voisin, secrétaire, et BazEr) questeur.
M. Ricard vice-président, s'est fait excuser.
M. de Kerdrel, aa début de la séance, de-
mande que, contrairement à ce qui s'est
fait jusqu'à ce jour, les dorapUs-rendas des
séances de la commission de permanence ne
soient point livrés à la publicité.
Ceux que donnent les journaux ne peuvent
avoir, d'ailleurs, aucun caractère officiel,
puisqu'il n'est point dressé de procès-verbal,
et il semble préférable, dans ces conditions,
de s'ab-tenir da les publier.
M. Ernest Picard estime, au oontraire,
qu'il y a de rëeis avantages à cette publica-
tion. Il est certain d'ailleurs que les comptes-
rendus livrés jusqu'à ce jour à la presse ont
toujours eu, à défaut d'an caractère d'au-
thenticité offioi*ll0> une forme impartiale qui
n'a provoqué aucune réclamation.
D'ailleurs, la période électorale qui est ou-
verte peut donner lien à des questions impor-
tantes relatives aux faits qui se passeraient,
et qui soient de nature à vivement intéresser
l'opinion pabliaue. Il est bon qu'on sache que
la commission de p-rmanence remplit exac-
tement son jôle, qu'elle reste la gardienne
sévère des droits de l'Assemblée et la dépo-
sitaire flièle de son aatt-riié.
M Rameau appuie ces observations en
faisant remarquer que la question a été
maintes fois Soulevée et résolue, puisque
toujours après une proposition identique, h s
commissions précédentes n'ont pas cru de-
voie s'opposer à la publication des comptes
rendus.
M d" Kerdrel insiste; il croit que les ré-
clamations qui pourraient se proluire à pro-
pos de faits électoraux viendroat plus utile-
ment devant la proohaine Assemblée. La
commission n'a pas à connaître des quest eas
qui sont de véritables interpellations, et
pour lesquelles il ne saurait exister aucune
sanction.
M. Hamille, conformément à la pensée de
M. de Kertirel, demande que le secret des
délibérations soit exigé de chacun des mem-
bres de la commission.
M. de Kerdrel, revenant sur ce qu'il a
dit, pense qu'il faudra se garder d'apporter
aucune réclamation relative aux élections ;
ce serait étendre, eu dehors de tout droit,
les crérogatives de la commission.
M. Noël Parfait constate que les comptes-
rendus n'ont jamais fait l'objet d'aucune ré-
clamation. li bétonne, d'autre part, qu'on
pirissè nier l'évident intérêt qu'il peut y avoir
à poiter certaines questions devant la com-
mission.
- M. Lepère. — Il y a là, pour l'opinion
publique, une garantie nécessaire ; ce doat
il S'bglt est precisement du domaine de la
commission, représentant fAssombléesouve-
raine, gardienne des droits et des intérêts
publics. Le pays ne comprendrait pas qu'on
voulût lui taire ce qui se passe dans la eom-
mission, et ce qui l'intéresse au plus haut
point.
La commission, sans prendre de décision,
"laiss à chacun de ses membres la responsa-
bilité fIes communications qu'ils croiront
pouvoir faire à la presse.
M. Combier demande que la commission
fixe, dès à présent, la périodicité de ses
séauces.
< M. le président fait observer que le rè-
glement s'y oppose. Le règlement dit, en ef-
fet, qu'à chaque séance la commission fixe la
date de sa séance.
Revenant sur l'incident soulevé par M. Se-
bert, M. le président reconnaît, avec M. de
Kerdrel, qu'à s'en teuir à la lettre de la loi,
il est bien vrai que la commission n'a pas
d'autre droit que de convoquer l'Assemblée;
mais il ajoute qu'il est assez difficile d'assi-
gner une limite exacte aux investigations
auxquelles elle croit devoir se livrer, pour
Fe tenir en mesura d'exercer ce droit, le cas
échéant.
Il rappelle l'exemple de Léon Faucher, mi-
nistre de la République de 1848, qui, s'étant
trouvé en désaccord avec la commission de
permanence, n'hésita pas à donner sa démis-
sion, sans attendre le retour de la Cbambre,
ce dont, ajoute M. le président, ses contem-
porains l'ont grandement honoré.
La commission fixe au jeudi, 120 janvier, à
deux heures, la date de ?a prochaine séance.
La séance est levée à deux heures.
LES PETITS FRANÇAIS
Me permettra-t-on d'ouvrir cet ar-
ticle, qui sera peut-être suivi de quel-
ques autres, par cet extrait d'une lettre
que j'ai eu l'honneur de recevoir d'un
de nos conseillers municipaux :
« Monsieur,
» La lecture du rapport ci-joint a
soulevé une opposition très-vive au sein
du conseil municipal, et même, qui l'au-
rait cru? parmi les meilleurs démocra-
tes. De son côté M. le préfet ne se mon-
tre pas bien favorable à l'établissement
des caisses d'épargne dans nos écoles
communales.
» Dans ces conditions, la discussion
a été ajournée. En attendant, ne serait-
il pas utile que la délibération d'une
question si intéressante au point de vue
social fût préparée et facilitée par les
discussions de la presse républicaine,
de celle qui veut, comme nous, l'amé-
lioration progressive et constante du
peuple, sous le triple rapport intellec-
tuel, matériel et moral ; mais qui la
veut par l'instruction, par le travail,
par l'esprit d'ordre et de prévoyance,
et non par la violence et les révolu-
tions ?
» Agréez, monsieur, etc. »
Je pense, en effet, que la question
vaut la peine d'être exposée au public,
et que le conseil municipal de Paris
s'est trompé dans le jugement qu'il en
a porté une première fois. Elle revien-
dra sans doute devant lui l'année pro-
chaine ; il est donc nécessaire de peser
par avance sur l'opinion publique, au
moyen d'une enquête préalable.
Voici ce dont il s'agit.
Vous savez tous ce que c'est que la
caisse d'épargne, et dans quel but cette
institution à été fondée.
Je n'ai pas, j'imagine, à m'étendre
longuement sur les bienfaits que l'on
attend de son fonctionnement. Elle en-
seigne l'ordre et la prévoyance aux
travailleurs ; elle les dote des plus puis-
sants outils de régénération que l'on con-
naisse au monde, et qui sont l'épargne
et le capital ; elle resserre les liens de
la famille, unie autour de son chef, en
la mettant à l'abri des accidents quoti-
diens qui la dispersent ou la détrui-
sent.
Vous me dispenserez aisément de me
répandre en belles phrases sur un su-
jet épuisé. L'éloge dé la caisse d'épar-
gne n'est plus à faire depuis long-
temps
Elle n'a guère servi, jusqu'à ce jour,
qu'aux personnes en âge de gagner de
l'argent. Ouvriers, domestiques, com-
mis; petits bourgeois, rentiers médio-
cres, tout cet humble monde y vient
déposer chaque dimanche les petites
économies qu'il a faites dans la se-
maine, et voit avec plaisir s'enfler de
mois en mois son modeste trésor.
L'idée nouvelle, ce serait de la mettre
à la portée des enfants des écoles com
munales.
Ce n'est pas assurément que Pôn n'ait
pas déjà ouvert, à la caisse d'épargne,
bien des comptes à des écoliers- ou mê-
me à des bébés en bas âge. Il est tou-
jours permis à Un père, à un parent
quelconque, à un parrain, à un bienfai-
teur, de prendre un livret au nom d'un
enfant, de le nourrir et de l'amener à
la somme réglementaire, au-delà de
laquelle la loi commande d'acheter un
titre de rente.
C'est même un prix que l'on donne
assez souvent dans les écoles Commu-
nales, soit à Paris, soit ailleurs, et qui
excite le plus d'émotion parmi les
élèves : un livret de la caisse d'épar-
gne.
Mais dans ces cas, et dans tous les
cas semblables, ce n'est pas l'enfant
lui-même qui place un argent lui ap-
partenant à lui seul ; c'est un intermé-
diaire, agissant en son nom. Il y a, cer-
tes, profit pour le bénéficiaire dans ce
livret qui lui e&t donné; il y a aussi in-
vitation pressante, quoique indirecte, à
poursuivre plus tard, quand il sera de-
venu grand, l'œuvre commencée par
d'autres en sa faveur. Mais enfin, quel-
que impression que puisse faire sur son
jeune esprit cette pensée bienfaisante :
« J'ai un livret, je suis capitaliste ! » il
faut bien reconnaître qu'elle ne saurait
exercer le même empire sur sa tendre
imagination que si c'était lui-même qui,
sou à sou, prenant sur son argent de
poche, se fut constitué à force d'épar-
gnes et de privations son petit trésor.
Est-il possible d'admettre, d'appeler
l'enfant, le bébé à la connaissance et
à la pratique de l'épargne, en l'initiant
au mécanisme de la caisse qui en porte
le nom ?
La caisse d'épargne ne saurait, cela
est bien évident, recevoir des sommes
par trop petites. Un franc est le mini-
mum de l'argent qu'on y peut placer en
une fois. Mais pour l'enfant et pour
l'enfant pauvre, un franc, c'est une
somme : cela représente vingt fois un
sou, le sou du dimanche, le sou dont il
achètera soit un sucre d'orge, soit les
quatre bonshommes traditionnels en
pain d'épicë.
Jamais l'enfant ne réunira vingt sous.
Espérer qu'il enfouira dans quelque re-
coin ignoré, pendant une longue série
de semaines, ce tas grossissant d'es-
poirs rentrés, de friandises ôtées de la
bouche, c'est attendre de l'humaine
nature plus qu'elle ne peut donner. La
chair est faible, hélas !
Il faut donc s'arranger de façon que
l'écolier puisse déposer son sou à là
caisse d'épargne.
Par quel moyen :
Il est bien simple, le moyen, et il n'a
pas fallu, pour le trouver, grand effort
d'invention.
Il n'y a qu'à autoriser l'instituteur à
recevoir, sou par sou, l'épargne, de
chacun de ses élèves. Au premier sou
donné, il ouvrira un compte au dépo-
sant, et quand il aura atteint le chiffre
réglementaire d'un franc. il ira le por-
ter à la grande caisse d'épargne, qui
ouvrira aussitôt un livret,
La chose est si simple, que les orga-
nisateurs de cette œuvre admirable qui
a nom la Sainte-Enfance, l'ont trouvée
tout de suite.
Ils s'en vont ainsi dans les écoles
quêter, sou à sou, l'argent de poche
des pauvres enfants. La différence,
c'est qu'ils gardent l'argent pour eux,
je veux dire, pour les petits Chinois ;
ces petits Chinois que je me garderai
bien désormais d'appeler des Chinois
problématiques. Problématiques, les
petits Chinois!. Ils existent, et la
preuve, c'est que le journal leur fera
tenir, par le fidèle intermédiaire des
bons pères, un joli billet de mille francs.
S'il n'y avait pas de petits Chinois, que
ferait-on de nos mille francs ? Je vous
le demande.
Et que ferait-on de tous ces sous ré-
coltés, non sans quelque effort, par
ces messieurs dans les écoles, même
dans les écoles communales? Un de nos
conseillers municipaux nous a écrit,
l'autre jour, qu'il allait saisir le con-
seil d'une motion tendant à réprimer
le zèle des propagateurs de la Sainte-
Enfance dans les écoles primaires. Il
paraîtrait, nous dit l'honorable édile,
dont nous avons la lettre signée, que
ces messieurs, profitant de la nécessité
où les parents croient être de faire
faire la première communion à leurs
enfants, opposent des barrières plus
difficiles, et parfois même insurmonta-
bles, aux élèves des maîtres qui refu-
sent de laiâser payer chez eux l'impôt
de la Sainte-Enfance.
On pourrait, en écartant les collec-
teurs de cette œuvre plus envahissante
encore qu'tltile, trouver aux sous laissés
disponibles un emploi plus fructueux
par la création de ces caisses d'épar-
gne scolaires.
J'exposerai demain l'organisation
qu'elles ont revêtue dans la plupart des
pays d'Europe, qui en ont adopté l'in-
stitution; je conterai les difficultés
qu'en a rencontrées la propagation en
France, et je tâcherai de faire voir le
profit qu'il est permis d'en espérer.
FRANCISQUE SARCEY.
♦
INFORMATIONS
Le Journal officiel a promulgué hier la
loi du 29 décembre sur la répression des
délite qui peuvent être commid par la
voie de la presse ou par tout autre moyen
de publication, et sur la levée de l'état
de siège.
Voici les noms des membres du conseil
général de la Seine qui sont allés saluer
le président de la République à l'occasion
du renouvellement de l'année 2
MM. Tenaille Saligoy, Martial Bernard,
Charles Loiseau, Léveillé, Beudant, Bixio,
Delzlnt, de Garminy Potier, Binder, Wa-
tel, Riant, Prétet, Degouve-Denuncques,
Dujarrier, Denizot, Dumas, Jobbé-Dllval,
Dietz .MoDnin,DeligIly,Marmottu, Hérold,
Sueur, Moreau.
On voit que tous les groupes du conseil
général se trouvaient représentés.
La gauche avait porté M. La Serve, dé-
puté de la Réunion, sur la liste de eeux de
ses membres qu'elle voulait faire entrer
dans la commission dé permanence ; de
même que le centre gauche avait porté M.
l'amiral Pothuau sur la Mienne. Nous
croyons utile de faire connaitre que, si les
nom de cet deux députes ont été effacés
des listes présentées, c'est sur leur de-
mande. Nous constatons ce fait à la fois
pour rendre justice au dévouement de MM,
La Serve et Pothuau et pour éviter toute
faussé interprétation.
M. le ministre de l'intérieur élabore en
ce moment une circulaire aux préfets au
sujet de l'application de la nouvelle loi sur
la presse.
De son côté, M. le garde des sceaux
prépare une circulaire aux procureurs
généraux et aux présidents, relativement
à la même loi.
Ces instructions seront expédiées dans
quelques jours.
Le conseil municipal de Paris est convo-
qué pour la fin de la semaine prochaine.
La première séance de cette session doit
être consacrée à la nomination, dans cha-
cun des vingt arrondissements de Paris,
des délégués chargés de procéder; de con-
cert avec le maire, à la révision des listes
électorales.
L'ambassade marocaine, composée de
huit personnes, arrivera vers le 15 janvier
à Paris.
Parmi les nouveaux membres admis par
le Jockey-Club, on cite MM. Patrice de
Mac Mahon, le comte d'Alsace d'Hénin, le
prince Borys Galitzine, le comte Joseph
de Gontaut, le baron Christian deBerkheim,
le vicomte de Brigode et le comte de Rilly.
L'année qui vient de s'écouler aura été
particulièrement favorable aux recettes de
la ville de Paris. La plus importante d'en-
tre elles, celle de l'octroi, a doné tout ce
qu'elle promettait. On ne saurait enoCTe, à
cause même des vacances du jour de l'ail;
donner des chiffres absolument exacts pour
le total des droits encaissés. Mais, d'après
les propres déclarations de M. de Saint-
Jullien, directeur de ce service, le rende-
ment de 1875 dépassera certainement les
113 millions portés, par prévision, au bud-
get de l'année.
Le conseil d'Etat vient de terminer
l'examen d'un projet de règlement d'admi-
nistration publique sur la réorganisation
des corps de sapeurs-pompiers.
Les bureaux du ministère de l'intérieur
préparent en ce moment une circulaire
qui sera envoyée à tous les préfets, en
même temps que le nouveau règlement sur
la réorganisation des sapeurs-pompiers
dans toutes les communes de France. •
Le National signale deux nouvelles
améliorations dans le service scolaire de
la ville de Paris, qui viennent d'êtres mi-
ses à l'étude, et qui seront très-probable-
ment appliquées dans le courant de l'année
prochaine.
En premier lieu, on a remarqué que
beaucoup d'enfants des écoles de la ville
restent dans les rues de 7 à 8 heures du
matin, par la raison que les classes ne
s'ouvrent qu'à 8 heures, tandis que leurs
parents partent pour leur travail beaucoup
plus tôt. Il est question, pour remédier à
cet inconvénient, d'ouvrir dans toutes les
écoles communales des salles spéciales d'é-
tude et de récréation, où les enfants se-
raient reçus et surveillés, à partir de 7
heures du matin en hiver, et de 6 heures
en été.
La seconde amélioration réclamée de-
puis longtemps par l'industrie consiste
dans la création d'écoles centrales de des-
sin industriel, où les élèves, déjà instruits
dans les éléments à l'école communale,
pourront se perfectionner et acquérir des
connaissances artistiques aussi complètes
que possible. Ces établissements, qu'on
peut comparer à des écoles de beaux-arts
appliqués à l'industrie, contribueront évi-
demment à élever encore le niveau du
goût et de l'habileté spéciale qui distin-
guent la plupart de nos ouvriers parisiens.
M. Okounew, conseiller de l'ambassade
de Russie à Paris, est nommé au poste
d'envoyé extraordinaire et ministre pléni-
potentiaire à la cour de Stockholm.
M. Okounew est un homme vraiment
distingué et très-sympathique à la France,
qui a représenté, pendant la guerre, le
cabinet russe auprès du gouvernement
de Tours.
-4^
Chronique Étrangère
Les journaux étrangers nous apportent
quelques discours prononcés par divers
souverains à l'occasion du jour de l'an. Il
n'y à guère à remarquer que le discours
du roi d'Italie, et encore parce que la Fan.
fulla le reproduit avec un luxe de détails
inusité.
Victor-Emmanuel, répondant aux re-
présentants de l'armée à l'occasion des pré-
sentations du nouvel an, les a félicités des
progrès que l'armée avait faits et de la
bonne volonté dont elle faisait preuve. Il a
souhaité à l'armée gloire et honneur.
Le roi a ajouté qu'il avait, comme tou-
jours la certitude que si quelque événeM
ment nouveau en fournissait l'occasion,
l'armée ne manquerait pas de répondre à
sa confiance et à celle du pays.
L'ouverture des Cortès a eu lieu à Lis-
bonne le 2 janvier.
Le roi a, dans son discourt; constaté le
maintien des relations amicales du Portu-
gal avec les autres puissances.
La décision impartiale du maréchal de
Mac-Mahon, au sujet de la baie de Lagoa,
a heureusement terminé un différend, tout
pacifique d'ailleurs, avec l'Angleterre.
Le rei dit qu'il a manifesté au maréchal
président sa reconnaissance pour la haute
impartialité et le sentiment de justice qu'il
a montrés dans une affaire si délicate.
A propos du budget, le roi a dit que
l'état prospère du pays dispense de nou-
velles contributions.
: Le roi a mentionné les principaux tra-
vaux qui devront occuper la présente ses-
sion. Il faudra améliorer la situation des
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