Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1911-01-30
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 30 janvier 1911 30 janvier 1911
Description : 1911/01/30 (N14934). 1911/01/30 (N14934).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine commune
Description : Collection numérique : La Commune de Paris Collection numérique : La Commune de Paris
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/01/2013
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LUNDI 30 JANVIER 1911. — H" 149^4. '",u -
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AUGUSTE VACQUERIIt
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TRIBUNELIBRE 1
m
Les Jeunes-Turcs et nous
■
Devant l'auditoire de la
Mission laïque, Herriot, mai-
re de Lyon, a étudié, en une
belle conférence, la question
de nos relations avec la Tur-
quie rénovée. Notre -. ami,
après examen de la situation là-bas,
sur place, apporte devant l'opinion
française un jugement destiné à faire
revenir l'esprit public à de meilleurs
sentiments à l'égard des Jeunes-Turcs.
En somme, malgré des erreurs, des
fautes, des violences, le nouveau gou-
vernement ottoman a réussi à vivre, et
SI a vécu en réalisant de vrais progrès.
Son parlement travaille et ses minis-
tres opèrent des réformes. L'enthou-
siasme de la première heure est dissi-
pé, sans doute, mais les grands senti-
ments ne sont pas de mise tous les
tiours, et les collectivités, comme les
individus, n'ont pas le cœur en fête
toute l'année. Les Jeunes-Turcs, par la
nature même des choses, se trouvent
'dans une situation difficile et ils se ti-
rent d'affaire comme ils péuvent au
milieu -des embarras que leur créent
toutes les races et toutes les religions
de l'Empire. Est-ce si aisé que cela de
décider à vivre en bonne harmonie les
Grecs, les Bulgares, les Arméniens et les
iTurcs ? Faut-il proclamer la faillite
• du programme de Midhat pacha parce
"lu'un régime constitutionnel n'a pu
réaliser en deux ans une entente que
l'absolutisme ..du sultan ne s'est pas
trouvé suffisamment armé pour l'impo-
ser en cinq siècles ? Faut-il renoncer à
l'espoir de fondre en une même patrie
ottomane tant d'éléments disparates,
parce que l'œuvre n'est pas achevée dé-
jà, et parce que la nation turque, dans
son ensemble, reste passionnément ak
tachée à ses traditions et à sa religion ?
Devons-nous être très sévères pour là
génération actuelle, maîtresse des des-
tinées de la Turquie, parce -que, la Dé-
claration des Droits de l'Homme n'a
pas chassé du cœur des Musulmans les
préceptes du Coran :? '.n serait bien
étonnant qu'un peuple se rénovât en
quelques mois, en quelques années, et
atteignît à la pratique de la parfaite
vie civique, surtout lorsque des élé-
ments ethniques et religieux si divers
le conitiU'ent.
Est-ce à dire que des progrès n'aient
point été accomplis ? Ce serait mécon.
naître la réalité même. A l'ancien arbi-
traire financier, à l'ancienne irrégu-
larité du régime hamidien, les Jeunes-
Turcs, en adoptant un mécanisme à la
française, ont opposé un budget nor-
malement constitué et voté. Le nouveau
gouvernement est fier de la tâche ac-
plie ; il a fait des efforts pour
établir en Orient la régularité des
finances d'un régime constitutionnel et
parlementaire. Il pense avoir mérité
par là d'être traité en personne morale
fiable qui a le droit de se cabrer quani
:on lui propose, un jour d'emprunt, tout
un dispositif de garanties qui atteignent
sa fierté, la fierté naturelle des jeunes.
Les Jeunes-Turcs sont apparus aux
yeux de tous comme des militaristes à
outrance et des nationalistes véhé-
ments. Pouvait-on donc attendre d'eux
qu'ils « déposassent les armes » au
lendemain dès plus graves alertes qui
les inquiétaient à l'intérieur comme à
l'extérieur ? Pouvait-on imaginer qu'ils
se livreraient naïvement à l'agressioff
ficiujlurs imminente des Bulgajres, et
même qu'ils laisseraient, par leur fai-
blesse militaire, se propager ces fac-
tions de l'intérieur aussi dangereuses
par elles-mêmes que les périls du de-
hors ? Il ne faut s'étonner ni de l'or-
gueil ottoman, ni de la fierté ottomane,
ni du militarisme ottoman. La Jeune-
Turquie vient de vaincre : elle a les ca-
ractères vivaces des vainqueurs.
A l'heure actuelle, ces vainqueurs ne
sont plus beaucoup nos amis. Et pour-
tant, ils ont fait leur révolution aux
accents de la Marseillaise, ils ont accla-
mé les grandes nations libérales, la
France et l'Angleterre, devant les hô-
tels de leurs ambassadeurs. Ils ont at-
tendu de Londres et de Paris l'accueil
amical, l'appui réconfortant. Ils ont
été déçus' ; ils ont passé, par une évo-
lution psychologique assez normale, des
sentiments tendres aux sentiments hos-
tiles. Ils sont devenus les amis des Al-
lemands et des Autrichiens^ qu'après la
chute d'Abdul-Hamid ils 'détestaient
comme les partisans et les soutiens du
régime oochu.
A l'aurore de la révolution jeune-tur-
que, on pouvait imaginer que l'influen-
ce de la France et de l'Angleterre al-
lait dominer dans l'empire ottoman.
Hélas ! il n'en est rien. La diplomatie
habile, méthodique, persévérante, at-
tentive du baron Marchall von Bibers-
tein a profité de nos hésitations, de nos
bouderies, de nos « leçons » pédantes,
à l'adresse des politiciens néophytes
du Bosphore. La partie n'était pas éga.
le. La politique germanique a déplové.
tant de moyens habiles auxquels nous
n'avons opposé que des moyens. tout
autres ! ,
Dans la Turquie durope com-
me dans la péninsule des Balkans, tout
entière la Germanie géminée, austro-
allemande, a repris la place et la fa-
veur du temps où Abdul-Hamid était
le protégé officiel du kaiser. Et ce n'est
pas tout. Demain, à la faveur du che-
min de fer de Bagdad, l'Allemagne pro-
longera sa domination économique et
morale jusqu'au golfe Persique, grâce
à cette savante méthode diplomatique
qui lui a valu les succès de « Potsdam »
à notre détriment et à notre insu.
Il ne peut être question de résumer
ici toutes les impressions que nous a
suggérées la parole savante d'Herriot. Il
faut penser cependant avec lui, pour
conclure, que tout n'est pas perdu pour
l'avenir de notre action en Orient. La
France a toujours là-bas le concours de
ses écoles, le prestige que lui donnent
sa politique passée et son histoire, la
diffusion de sa langue. On pourra par
l'action morale travailler encore là-
bas en faveur de notre influence poli-
tique et économique.
En donnant cet espoir à la Mission
laïque, dont c'est le but de faire aimer
la France moderne au dehors, le mai-
re de Lyon a donné aussi confiance à
toius ceux qui souffrent quand notre
Pays perd dans le monde un peu de
son prestige ou quelques-uns de ses
amis.
Albert MILHAUD.
■ 1 1 11
LA POLITIQUE
Tir—n^ ift
M. BRilAND ET M. P. BEAUREGARD
Après le débat de l'autre se-
maine sur la C. G. 1'. à la
Chambre, on se souvient que
certains de nos amis disaient :
« Briand vient à gauche 1
Briand barre à gauche ! »
Déjà, les hommes qui ont le privilège
du. scrupule demandaient comment,
avec quels éléments, notre Premier
allait remplacer dans sa majorité les
défectionnaires du centre et de la droi-
te. Car si Briand barre à gauche.
C'était angoissant ! « Si Briand vient
à nous les progressistes le lâchent
Si les progressistes le ldchent, quelles
voix va-t-il gagner de l'autre côté ? »
Les choses se sont arrangées toutes
seules. Les progressistes n'ont pas lâ-
ché. M. Paul Beauregard a tendu au
président du Conseil une perche enve-
loppée de velours, que le clief du Gou-
vernement a saisie avec empressement.
« Si le Gouvernement est disposé à
remédier aux vices de la loi de 1884, a
dit le député du XVIe arrondissement,
nous nous rattacherons à l'ordre du
jour qu'il a accepté. »
Sous ce langage parlementaire se lit
une phrase qui n'a été ni écrite ni for-
mulée : « Quand on a M. Briand pour
président du Conseil, on peut bien sup-
porter le léger inconvénient de tolérer.
la C. G. T. Si le chef du Gouvernement
était un radical, ce serait autre chose. »
Ainsi pensent les républicains modérés
de l'école Beauregard.
A tec M. Briand,le s progressistes sont
en confiance et ils le soutiennent na
turellcment, aisément, comme un seul
homme. Il les mènerait où il voudrait.
Il leur fait accepter la C. G. T. 1 11 les
a en main. Ils l'aiment pour lui-même.
Son charme opère sur eux d'une façon
magique et, persistante.
Dans ces conditions, l'on se demande
vourauoi M. le vrésident du Conseil,
qui se dit un homme de gauche, ne fait
pas une vraie politique de gauche. Il
aurait avec lui unemaiorité compacte.
Les Paul Beauregard et les Lairolle
grogneraient un peu, mais le suivraient
quand même.
Cette fidélité est une occasion véri-
tablement rare, unique, exceptionnelle.
(i; A profiter », diraient les parents et
amis de Mlle Béulemans. Allons, Mon-
sieur le président du Conseil, un bon
mouvement 1 Après la politique de
droite avec les gauches, si vous tentiez
une politique de gauche avec les droi-
tes ? Ne serait-ce que pour voir s'ils
vous suivraient dans la défense de l'E-
cole laïque ? -
—————————— ——————-———'
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui dimanche :
Lever du soleil : 7 h. 38 du matin.
Coucher du soleil : 4 h- 49 du soir
Lever de la lune : 7 h- 41 du soir.
Coucher de la lune : 3 h. 30 du matin.
Courses à Vincennes.
AUTREFOII
Le Rappel du 30 janvier 1875 :
MM. Thiers et Jules Grévy prendront cer-
tainement part à la discussion du projet Ven-
tavon (Lois constitutionnelles). Ils parleront
sur les articles de ce projet-
AUJOURD'HUI
Sectarisme
Un « Echo » de la Liberté, annonçant que
l'officier commandant le détachement de
service au Palais-Bourbon, déjeûnerait dé-
sormais aux frais de la République, se ter-
mine par cette phrase :
« Cette petite réforme est donc excellen-
te ; nous ne regrettons qu'une chose, c'est
qu'elle a été proposée par M. Thalamas. »
Un Français eût évidemment écrit « qu'el-
le ait été », mais nous passons plus faci-
lement cette légère erreur à M. Beulemans.
que son sectarisme.
Si notre conffère regrette tant que la ré-
forme en question ait été proposée par M.
Thalamas, que n'a-t-il insufflé plus tôt à
l'un de ses amis réactionnaires du Parle-
ment la bonne idée d'en parler le premier ?
0.
L'Eijqtiéle farlerçeijlaiFe
sur l'Affaire Rochette
— .+-
M. de Folleville, député de la Seine-Infé-
rieure, chargé par la Commission pariemen-
taire de rédiger le rapport sur les diverses
opérations d.e l'enquête concernant l'affai-
re Rochette, a déclaré à l'agence Fournier
qu'il déposerait ce rapport entre le 10 et le
15 février prochain.
M. de Folleville n'est pas, dans ses cb-n-
clusions, aussi affirmatif sur l'abrogation
de l'article 10 que la Commission parlemen-
taire. L'article lui paraît « déplorable » en.
certains cas, mais e nd'autres « absolu-
ment légitime ».
M. de Folleville demande en revanche la
suppression de l'article 440 du Code de oom-
merce, prononçant la déclaration de failli-
te d'office. Il estime qu'un négociant ou
commerçant doit trouver dans la loi une
clause établissant qu'il ne peut être mis
en faillite sans avoir été préalablement en-
tendu.
1 -1 ——^0» ; * ———
Le Service actif des Douanes
——
Le groupe parisien de l'Union générale
des douanes actives organise pour mardi
prochain 31 janvier, à huit heures- et de-
mie du soir, salle Ludo, 86, avenue de Cli-
chy, un grand meeting qui sera présidé par
notre éminent collaborateur et ami Ferdi-
nand Buisson, député de Paris.
Cette réunion a pour but de provoquer
la réalisation de la réforme des traitements,
promise aux douaniers ; runification des
classes, le rétablissement du concours de
la sous-brigade et l'application aux colo-
nies du décret de 1908.
Elle prend une importance considérable
de ce que le moment approche où doivent
venir en discussion, les chapitres 90 et 91
du budget des finances qui ont été dis-
joints.
Nous reparlerons, en rendant compte de
ce meeting, des intéressantes questions qui
y seront traitées.
+
La Chasse aux Renards
-.-
Un de nos collaborateurs publiait récem-
ment urne notice très documentée sur
l'origine de la « chasse aux renards ». A
cette documentation peut s'ajouter cet ex-
trait d'un arrêt de la Cour du Parlement
du 9 septembre 1760. Souhaitons qu'en
fassent leur profit ceux dont la profession
consiste, à gémir sur le malheur des temps!
1 Vu par la chambrodes vacations, v est-
il dit, la requête du procureur général du
roi, concernant que dans la ville d'Etam-
pes, il s'est formé depuis plusieurs années
une société parmi les compagnons charpen-
tiers, laquelle ils appellent parmi eux com-
pagnons du devoir ou bons drilles ; que
ces compagnons s'assemblent chez le nom-
mé Jacques Sauvet, cabaretier dans cette
ville, lequel ils appellent leur mère ; que
ledit Sauvet tient un registre dans lequel
est inscrit le nom de tous les compagnons
charpentiers du devoir ; que ceux qui ne
sont point inscrits sur ledit registre sont
appelés par les compagnons du devoir, re-
nards ; que les compagnons du devoir sol-
licitent lesdits compagnons renards à en-
trer dans la société du devoir ou bons dril-
les, et lorsqu'ils ne veulent pas, les compa-
gnons du devoir les maltraitent et insultent
les maîtres charpentiers chez qui ils demeu-
rent, ce qui oblige les compagnons dési-
gnés sous le nom de renards de quitter le
pays ; que le procureur général du roi est
en o-utre informé que les compagnons for-
ment journellement des attroupements et
qu'ils sont armés de cannes et de .bâtons,
qu'ils troublent le repos public, insultent
et maltraitent les habitants de la ville d'E-
tampes. »
Tout cela n'est point fait pour servir —
dans la discussion — les braves confrères
qui s'ingénient à faire retomber la respon-
sabilité de 4ous les. méfaits, moitié sur la
République, moitié sur l'école laïque.
La République semble plutôt, en l'occur-
rence, avoir reçu en héritage de la monar-
chie des pratiques corporatives dans Inap-
plication desquelles tout le monde ne goû-
te pas un égal plaisir.
Et nous avions raison de reprocher à M.
Charles Dupuy de dissimuler trop soigneu-
sement ses connaissances sociologiques,
quand il expliquait gravement aux lecteurs
du Soleil que le citoyen Bousquet pouvait
très bien avoir puisé ses doctrines « dans
les petits livres distribués à l'école à sa
fi 11 et le :&.
A moins qu'il n'y ait eu parmi ces petits
livres une histoire du règne de Louis le
Bien-Aimé !.
— ;
La Religion Moralisatrice
--.:-t-.
Extrait d'un ouvrage pieux : La Vie de
Marie-Ange, par Martel :
« Dana la nuit du 16 octobre 1816, M. je
curé de Lignan et d'autres personnes élant
dans la chambre de Marie-Ange, qui était
en extase, entendirent les baisers que Nô-
tre-Seigneur et notre chère Mère faisaient
sur la bouche et s'aperçurent que chaque
baiser faisait une petite quantité de liqueur
que Marie-Ange avalait ; quan- elle en eût
avalé une certaine quantité, les baisers con-
tinuant, elle laissa échapper cette liqueur
par un coin de sa bouche. Alors, M. le cu-
ré, s'approchant, la recueillit avec son
doigt et l'avala ; quand il en eût avalé une
certaine quantité, les baisers continuant, il
en donna une léchée à chaque personne
qui était dans la chambre.
« Les baisers continuant et la liqueur
s'échappant toujours des lèvres de Marie-
Ange, M. le curé de Lignan fit monter les
personnes qui étaient dans la cuisine, oui
toutes en goûtèrent et la trouvèrent déli-
cieuse. La source n'étant pas encore tarie
et les baisers continuant, M. le curé rem-
plit de cette liqueur um mouchoir blanc
de toile de Rouen qwe j'ai avec les reliques
de Marie-Ange, enveloppé d'un papier sur
lequel M. le curé de Lignan avait écrit :
« Mouchoir imprégné de la liqueur des
baisers de Jésus et de Marie, recueillie pen-
dant la nuit du 25 octobre 1816. »
Allons, monsieur Bérenger, avouez que
la vie des saints est autrement immorale
que la vue du sein de Mme Régina Badet !
» *
LA N'COKO-SANCHA r
LeTorcIjot) brûle
M. Trouillot, dont la décision du Conseil
des ministres, lue à la -dernière séance de
la Commise ion du budget, désavoue si bru-
talement l'attitude et les actes, avait de,
mandé à être entendu par cette Commis-
sion qui -a recueilli hier ses déclarations.
L'ancien ministre des colonies, dans une
déposition appuyée par une correspoiidian-
ce qui ne laisse place à aucune équivoque,
a établi d'une façon irréfutable que c'est
M. Pichon qui est le véritable auteur du
compromis QU 5 avril. M. Tirouillot s'est
toujours opposé à toute indemnité, à tout
arbitrage et à tout consortium. Il ne céda
que sur les inlStances répétées de son col-
lègue des affaires étrangères, qui fit va-
loir à ses yeux la menace de graves compli-
cations européennes et invoqua le fait du
prince pour emporter son adhésion à une
combinaison contre laquelle il él-evait les
mêmes objections que son prédécesseur,
M. Milliès-Lacroix.
Il est donc absolument inexact, comme
17a fait la note communiquée à la presse
par le gouvernement, mercredi dernier, de
faire porter à M. Trouilloit la responsabili-
té des opérations engagées par le oompro-
mis du 5 avril. En réalité, toute l'adminis-
tration des colonies, depuis le gouverneur
général jusqu'au ministre, a combattu la
solution préconisée par M. Pichon à l'insti-
gation de M. Tardieu. Quant à la pression
de l'Allemagne et aux graves complications
européennes qu'invoquait M. Pichon, on
a pu en juger la réali par la coupure bru-
talement ironique où la Gazette de Cologne,
journal officieux, priait M. Tardieu de ne
pas tirer les choses de trop loin et de ne
pas mêler les frontières congolaises aux re-
lations européennes.
La déposition de M. Trouillot a vive-
ment ému la Commission, en mettant en
cause, d'une façon aussi précise qu'indubi-
table, la responsabilité personnelle de M.
Pichon, qui jusqu'à présent avait tenté de
se. dérober.
LA QUINZAINE SCIENTIFIQUE
—ëb'<'-—
Un Vote nécessaire
M i
Ces jours derniers, à la Chambre des
députés, au cours de la discussion du bud-
get du ministère de l'Intérieur, MM.Ghes-
quière, Vandamme et l'abbé Lemire, de-
mandaient que les têtes de pavot, que l'on
peut actuellement se procurer à volonté
chez tous les herboristes, voire même chez
le premier épicier venu, soient désormais
classés au nombre des produits toxiques
et, de ce chef, ne puissent plus être ven-
dues que par les pharmaciens et seulement
sur le vu d'une ordonnance signée d'un
médecin.
Pour n'avoir guère attiré l'attention du
grand public, ni même celle des membres
de la Chambre, cette proposition ne laisse
pas d'être d'une grande importance. Elle
touche, en effet, très directement au grave
problème de la dépopulation si intéressant
pour l'avenir de notre pays.
Mais, ici, une parenthèse explicative de-
vient nécessaire.
Il n'est aujourd'hui personne pour igno-
rer que trop souvent l'alimentation des
nourrissons est des plus défectueuses. Au
lieu de leur donner des tétées, régulière-
ment espacées, de lait de bonne qualité,
continuellement de jeunes bébés confiés
par leurs mères obligées de se rendre au
travail à des gardeuses plus ou moins ex-
pertes et attentives sont gavées de sou-
pes consistantes, de biberons trop abon-
dants, ou même reçoivent des aliments es-
sentiellement indigestes, tels que haricots,
pommes de terre, etc.
Le résultat d'un pareil régime ne se fait
pas attendre. En peu de jours, l'enfant est
atteint de gastro-entérite. La diarrhée
s'installe, il maigrit, et, comme il souffre,
il perd le sommeil et pousse des cris pro-
longés souvent durant des heures.
A ce fâcheux état de choses, le remède
serait aisé. Il suffirait de mieux régler l'a-
limentation de l'enfant. Mais, c'est ce à
quoi songent le moins les terribles soi-
gneuses. D'après elle, si le bébé crie c'est
qu'il est méchant.
Comment alors calmer ses clameurs qu
latiguent tout le monde et empêchent la
matrone de dormir 2
Le remède heureusement est connu. C'est
le dormant, comme on l'avait dit à Lille et
dans toute la région du Nord, en d'autres
termes la décoction de tête de pavot.
« Celle-ci, nous apprennent M. le docteur
Déléarde, professeur agrégé à la Faculté de
médecine de Lille, et M. Bonn, directeur
au laboratoire de Lille, est préparée er
mettant une tête de pavot, coupée en mor-
ceaux, dans une dose variable d'eau,dans
un demi-litre à un litre ; le tout est place
sur le feu jusqu'à ébullition et on laisse
concentrer à environ un quart de litre
on 'puise à -même dans ta icasserole la
quantité nécessaire pour calmer l'enfant ;
la macération dure plusieurs jours, m y
ajoute de l'eau au fur et à mesure que
celle-ci s'évapoçe. »
Une dose variable de cette piéparation
est donnée aux infortunéls petts. Oll
son action, l'enfant se calme el s'assou-
pit. La soigneuse peut dormir. Aussi a-t-
elle grand soin de recourir à nouveau au
calmant efficace. Durant plusieurs jours,
l'enfant reçoit une ration quotidienne d(
dormant. Il entre bientôt dans un état de
somnolence dont il ne sort plus ; sa fin
s'amaigrit, son teint devient terreux, se.
yeux s'encavent, ses pupilles rétrécies cor-
sent de réagir à la lumière, ses extrémités
se refroidissent et se cyanosent, son pouls
et sa respiration se ralentissent, et bientôt
son état général devrent manifestement si
mauvais que, malgré son indifférence, sa
soigneuse ne peut manquer de s'en aper-
cevoir et l'amène à l'hôpitaU
Mais le plus souvent, il est trop tard.
Le poison a fait son œuvre et, malgré
tous les efforts, l'enfant qui refuse toute
alimèntation ne sort point du coma où il
est plongé et succombe au bout de quel-
ques heures.
***
Rien dé moins surprenant qu'une- sem-
blable solution. C'est que la décoction de
pavot, que les mégères emploient si faci-
lement, est en réalité fort toxique.
Les analyses chimiques établissent sans
réplique qu'elle renferme en proportions
notables les divers alcaloïdes de l'opium et
l'examen pratiqué après la mort du conte-
nu intestinal ainsi que des viscères, esto-
mac, intestin, foie, rein, des enfants ayant
succombé dans les conditions que nous ve-
nons de rapporter, y révèle invariablement
la présence de la morphine.
Aussi bien y a-t-il déjà fort longtemps
que de nombreux auteurs ont signalé Jef
dangers graves de l'usage de la décoction
de tête de pavot.
Dès 1827, Louyer-Vifierman annonçait à
l'Académie de médecine un certain nombre
de cas d'intoxication mortelle causée par
ce remède et, entre autres, il-citait le cas
singulièrement impressionnant de l'infir-
mière d'une maternité qui, ayant à soigner
neuf enfants alors qu'elle venait de passer
plusieurs nuits sans sommeil, leur fit boire
du lait chaud et sucré où elle avait fait in-
fuser une tête de pavot. Des neuf enfants,
huit dormirent si bien que l'on eut beau-
coup de peine à les ranimer ; quant au
neuvième, il succomba.
Plus tard, en 1868, Chevallier, dans une
note sur la vente libre des capsules de pa.
vot et sur les dangers qui peuvent en ré-
sulter, rapporte de nombreuses observa-
tions {¡"empoisonnement par cette sub-
stance.
Il cite en particulier, notent MM. De-
léarde et Bonn dans un travail publié par
la Revue d'hygiène et de police sanitaire,
le cas d'une sage-femme inculpée de l'as-
sassinat d'un grand nombre d'enfants,dont
on avait trouvé les ossements dans son
domicilie, et aussi l'histoire d'une femme
suppliciée et dont le métier était de sevrer
les enfants qu'elle faisait périr insensible-
ment sans cris ni douleurs, en employant
les têtes de pavot-
Dans une étude médico-légale sur l'em-
poisonnement, étude publiée "en 1867, le cé-
lèbre médecin légiste Tardieu était non -
moins catégorique. « Les capsules de pavot
qui fournissent l'opium renferment à n'en
pas douter les alcaloïdes contenus dans
l'opium lui-même et ne doivent être em-
ployées qu'avec une extrême prudence ; la
science possède un très grand nombre
d'observations dans lesquelles de terribles
accidents et quelquefois la mort sont sur-
venus à la suite de l'administration im-
prudente de boissons ou de lavements pré-
parés avec des capsules de pavot : les
jeunes enfants sont fort souvent victimes
de l'abus qu'en font les nourrices pour les
endormir. »
Les auteurs modernes sont pareillement
d'accord à signaler le danger reioutable de
l'administration de la décoction de têtes
de pavots. Dans son traité de Chimie toxi-
cologique, M. Ogier, l'éminent directeur du
laboratoire de toxicologie, signale des cas
pe mort survenus chez de jeunes enfant&
et de même font, dans leurs ouvrages spé-
ciaux, les savants Lervin, Brouardel, Cha-
puis et Vibert, etc.
***
Ces témoignages si nombreux rendus par
tant de médecins et de chimistes distingués
justifient hautement l'initiative prise il y a
quelques jours au Parlement par MM.Ghes-
quière, Vandamme et Lemire.
Aussi bien, en pareille matière, ne S6-
rait-ce pas une nouveauté que de voir inter-
venir le législateur.
En certains pays étrangers, en Autrich.
notamment, le danger signalé est si bien
reconnu que des dispositions pénales sont
inscrites dans le code vis-à-vis de ceux qui
administrent à un enfant en bas âge une
décoction de pavot.
II y a là, on ne saurait le contestes, -ua •
excellent èxemple à suivre. Il importe fort, ,
en effet, pour" l'avenir même du pays,
qu'un terme immédiat soit apporté à des
pratiques coupables dont le résultat fatal
est de conadmner à une mort rapide de
jeunes enfants.
Or, pour cela, une simple mesure suffit,
à savoir, comme il vient d'être demandé à
la Chambre, qu'il soit décidé que les têtes
de pavots ne puissent plus être vendues à
tous librement, mais qu'elles soient clas-
sées parmi les substances toxiques que
les pharmaciens seuls ont la faculté de dé-
livrer sur la vue d'une ordonnance médi-
cale.
La réforme à accomplir est de celles
sur laquelle tout le monde est a priori d'ac-
cord ; elle n'entraîne à aucune dépense
budgétaire et ne comporte que des avan-
tages moraux et matériels î
Puissent toutes ces, raisons se trouver
suffisantes pour qu'elle soit rapidement
solutionnée.
D' GEORGES VITOUX.
NOS MINISTRES
»«i
Les Ministres et Sous-Secrétaires d'Etat
se sont réunis hier matin en Conseil, à l'E.
lysée, sous la présidence de M. Fallières.
Ils se sont entretenus des différentes
questions à l'ordre du jour des deux.
Chambres.
Mouvement judiciaire
Le Conseil a approuvé le mouvement jif
diciaire suivant :
Sont nommés conseillers à la Cour de
Cassation : MM. Ditte, président du Tri-
bunal civil de la Seine ; et Morellet, pro-
cureur général près la Cour de Poitiers, en
remplacement de MM. Faye et Marras, ad-
mis à la retraite et nommés conseillers ho-
noraires.
Président du Tribunal de la Seine : M.
Monnier, procureur de la République près
le même tribunal :
Procureur de la République à Paris :
M. Lescouvé, directeur des affaires crimi-
nelles et des grâces au Ministère de la
Justice ;
Directeur des Affaires Criminelles, M.-
Paul Boulloche. directeur du personnel et
de la comptabilité au Ministère de la Jus-
tice ;
Directeur du personnel et de la compta-
bilité, M. Monmoy, sous-directeur du per-
sonnel ;
Procureur général à Poitiers, M. Bour-
geon, procureur de la République à Tunis.
La protection des vins de Champagne
M. Klotz, Ministre des Finances, a fait
connaître le texte du projet de loi relatif
aux mesures particulières au régime fles
vins de la Champagne vilicole délimitée.
La nicotine dans l'agriculture
M. Raynaud, Ministre de l'Agricullure, a
communiqué au Conseil une liste de ré-
partitio-n des quantités de nicotine à livret
dans divers départements. Cette réuartitioa
est faite au prorata des surfaces de vignes
cultivées et attaquées par la cochylis, 1'
démis et les chenilles Causes.
- - 1 - i *-.-
LUNDI 30 JANVIER 1911. — H" 149^4. '",u -
.wÕ. - 1
Pmtfatevpt
AUGUSTE VACQUERIIt
ABONNEMENTS
Oomoii Troii moii Sil moii Ha ■
'me. 2 fr. 5 fr. 9 fr. 48 fri
Départèments 2 - 6 - t 1 - 20—
IJnion Postale 3 - 9 - t6 - 32 -'
Pondalelœ , ! --
'--.
AUGUSTE VACQUERIE
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF" C"
6, Place de la Bourse
èîf aux BUREAUX DU JOURNU
Adresser toutes les Communications sa Directeur] Adresser Lettres et Mandats au Directeur
f.
ADMINISTRATION & RÉDACTION : 53, rue du Château-d'Eau : Téléphone 438-14. - D 9 heures du soir à 2 heures du matin, 123, rue Montmartre : Téléphone 143-93
TRIBUNELIBRE 1
m
Les Jeunes-Turcs et nous
■
Devant l'auditoire de la
Mission laïque, Herriot, mai-
re de Lyon, a étudié, en une
belle conférence, la question
de nos relations avec la Tur-
quie rénovée. Notre -. ami,
après examen de la situation là-bas,
sur place, apporte devant l'opinion
française un jugement destiné à faire
revenir l'esprit public à de meilleurs
sentiments à l'égard des Jeunes-Turcs.
En somme, malgré des erreurs, des
fautes, des violences, le nouveau gou-
vernement ottoman a réussi à vivre, et
SI a vécu en réalisant de vrais progrès.
Son parlement travaille et ses minis-
tres opèrent des réformes. L'enthou-
siasme de la première heure est dissi-
pé, sans doute, mais les grands senti-
ments ne sont pas de mise tous les
tiours, et les collectivités, comme les
individus, n'ont pas le cœur en fête
toute l'année. Les Jeunes-Turcs, par la
nature même des choses, se trouvent
'dans une situation difficile et ils se ti-
rent d'affaire comme ils péuvent au
milieu -des embarras que leur créent
toutes les races et toutes les religions
de l'Empire. Est-ce si aisé que cela de
décider à vivre en bonne harmonie les
Grecs, les Bulgares, les Arméniens et les
iTurcs ? Faut-il proclamer la faillite
• du programme de Midhat pacha parce
"lu'un régime constitutionnel n'a pu
réaliser en deux ans une entente que
l'absolutisme ..du sultan ne s'est pas
trouvé suffisamment armé pour l'impo-
ser en cinq siècles ? Faut-il renoncer à
l'espoir de fondre en une même patrie
ottomane tant d'éléments disparates,
parce que l'œuvre n'est pas achevée dé-
jà, et parce que la nation turque, dans
son ensemble, reste passionnément ak
tachée à ses traditions et à sa religion ?
Devons-nous être très sévères pour là
génération actuelle, maîtresse des des-
tinées de la Turquie, parce -que, la Dé-
claration des Droits de l'Homme n'a
pas chassé du cœur des Musulmans les
préceptes du Coran :? '.n serait bien
étonnant qu'un peuple se rénovât en
quelques mois, en quelques années, et
atteignît à la pratique de la parfaite
vie civique, surtout lorsque des élé-
ments ethniques et religieux si divers
le conitiU'ent.
Est-ce à dire que des progrès n'aient
point été accomplis ? Ce serait mécon.
naître la réalité même. A l'ancien arbi-
traire financier, à l'ancienne irrégu-
larité du régime hamidien, les Jeunes-
Turcs, en adoptant un mécanisme à la
française, ont opposé un budget nor-
malement constitué et voté. Le nouveau
gouvernement est fier de la tâche ac-
plie ; il a fait des efforts pour
établir en Orient la régularité des
finances d'un régime constitutionnel et
parlementaire. Il pense avoir mérité
par là d'être traité en personne morale
fiable qui a le droit de se cabrer quani
:on lui propose, un jour d'emprunt, tout
un dispositif de garanties qui atteignent
sa fierté, la fierté naturelle des jeunes.
Les Jeunes-Turcs sont apparus aux
yeux de tous comme des militaristes à
outrance et des nationalistes véhé-
ments. Pouvait-on donc attendre d'eux
qu'ils « déposassent les armes » au
lendemain dès plus graves alertes qui
les inquiétaient à l'intérieur comme à
l'extérieur ? Pouvait-on imaginer qu'ils
se livreraient naïvement à l'agressioff
ficiujlurs imminente des Bulgajres, et
même qu'ils laisseraient, par leur fai-
blesse militaire, se propager ces fac-
tions de l'intérieur aussi dangereuses
par elles-mêmes que les périls du de-
hors ? Il ne faut s'étonner ni de l'or-
gueil ottoman, ni de la fierté ottomane,
ni du militarisme ottoman. La Jeune-
Turquie vient de vaincre : elle a les ca-
ractères vivaces des vainqueurs.
A l'heure actuelle, ces vainqueurs ne
sont plus beaucoup nos amis. Et pour-
tant, ils ont fait leur révolution aux
accents de la Marseillaise, ils ont accla-
mé les grandes nations libérales, la
France et l'Angleterre, devant les hô-
tels de leurs ambassadeurs. Ils ont at-
tendu de Londres et de Paris l'accueil
amical, l'appui réconfortant. Ils ont
été déçus' ; ils ont passé, par une évo-
lution psychologique assez normale, des
sentiments tendres aux sentiments hos-
tiles. Ils sont devenus les amis des Al-
lemands et des Autrichiens^ qu'après la
chute d'Abdul-Hamid ils 'détestaient
comme les partisans et les soutiens du
régime oochu.
A l'aurore de la révolution jeune-tur-
que, on pouvait imaginer que l'influen-
ce de la France et de l'Angleterre al-
lait dominer dans l'empire ottoman.
Hélas ! il n'en est rien. La diplomatie
habile, méthodique, persévérante, at-
tentive du baron Marchall von Bibers-
tein a profité de nos hésitations, de nos
bouderies, de nos « leçons » pédantes,
à l'adresse des politiciens néophytes
du Bosphore. La partie n'était pas éga.
le. La politique germanique a déplové.
tant de moyens habiles auxquels nous
n'avons opposé que des moyens. tout
autres ! ,
Dans la Turquie durope com-
me dans la péninsule des Balkans, tout
entière la Germanie géminée, austro-
allemande, a repris la place et la fa-
veur du temps où Abdul-Hamid était
le protégé officiel du kaiser. Et ce n'est
pas tout. Demain, à la faveur du che-
min de fer de Bagdad, l'Allemagne pro-
longera sa domination économique et
morale jusqu'au golfe Persique, grâce
à cette savante méthode diplomatique
qui lui a valu les succès de « Potsdam »
à notre détriment et à notre insu.
Il ne peut être question de résumer
ici toutes les impressions que nous a
suggérées la parole savante d'Herriot. Il
faut penser cependant avec lui, pour
conclure, que tout n'est pas perdu pour
l'avenir de notre action en Orient. La
France a toujours là-bas le concours de
ses écoles, le prestige que lui donnent
sa politique passée et son histoire, la
diffusion de sa langue. On pourra par
l'action morale travailler encore là-
bas en faveur de notre influence poli-
tique et économique.
En donnant cet espoir à la Mission
laïque, dont c'est le but de faire aimer
la France moderne au dehors, le mai-
re de Lyon a donné aussi confiance à
toius ceux qui souffrent quand notre
Pays perd dans le monde un peu de
son prestige ou quelques-uns de ses
amis.
Albert MILHAUD.
■ 1 1 11
LA POLITIQUE
Tir—n^ ift
M. BRilAND ET M. P. BEAUREGARD
Après le débat de l'autre se-
maine sur la C. G. 1'. à la
Chambre, on se souvient que
certains de nos amis disaient :
« Briand vient à gauche 1
Briand barre à gauche ! »
Déjà, les hommes qui ont le privilège
du. scrupule demandaient comment,
avec quels éléments, notre Premier
allait remplacer dans sa majorité les
défectionnaires du centre et de la droi-
te. Car si Briand barre à gauche.
C'était angoissant ! « Si Briand vient
à nous les progressistes le lâchent
Si les progressistes le ldchent, quelles
voix va-t-il gagner de l'autre côté ? »
Les choses se sont arrangées toutes
seules. Les progressistes n'ont pas lâ-
ché. M. Paul Beauregard a tendu au
président du Conseil une perche enve-
loppée de velours, que le clief du Gou-
vernement a saisie avec empressement.
« Si le Gouvernement est disposé à
remédier aux vices de la loi de 1884, a
dit le député du XVIe arrondissement,
nous nous rattacherons à l'ordre du
jour qu'il a accepté. »
Sous ce langage parlementaire se lit
une phrase qui n'a été ni écrite ni for-
mulée : « Quand on a M. Briand pour
président du Conseil, on peut bien sup-
porter le léger inconvénient de tolérer.
la C. G. T. Si le chef du Gouvernement
était un radical, ce serait autre chose. »
Ainsi pensent les républicains modérés
de l'école Beauregard.
A tec M. Briand,le s progressistes sont
en confiance et ils le soutiennent na
turellcment, aisément, comme un seul
homme. Il les mènerait où il voudrait.
Il leur fait accepter la C. G. T. 1 11 les
a en main. Ils l'aiment pour lui-même.
Son charme opère sur eux d'une façon
magique et, persistante.
Dans ces conditions, l'on se demande
vourauoi M. le vrésident du Conseil,
qui se dit un homme de gauche, ne fait
pas une vraie politique de gauche. Il
aurait avec lui unemaiorité compacte.
Les Paul Beauregard et les Lairolle
grogneraient un peu, mais le suivraient
quand même.
Cette fidélité est une occasion véri-
tablement rare, unique, exceptionnelle.
(i; A profiter », diraient les parents et
amis de Mlle Béulemans. Allons, Mon-
sieur le président du Conseil, un bon
mouvement 1 Après la politique de
droite avec les gauches, si vous tentiez
une politique de gauche avec les droi-
tes ? Ne serait-ce que pour voir s'ils
vous suivraient dans la défense de l'E-
cole laïque ? -
—————————— ——————-———'
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui dimanche :
Lever du soleil : 7 h. 38 du matin.
Coucher du soleil : 4 h- 49 du soir
Lever de la lune : 7 h- 41 du soir.
Coucher de la lune : 3 h. 30 du matin.
Courses à Vincennes.
AUTREFOII
Le Rappel du 30 janvier 1875 :
MM. Thiers et Jules Grévy prendront cer-
tainement part à la discussion du projet Ven-
tavon (Lois constitutionnelles). Ils parleront
sur les articles de ce projet-
AUJOURD'HUI
Sectarisme
Un « Echo » de la Liberté, annonçant que
l'officier commandant le détachement de
service au Palais-Bourbon, déjeûnerait dé-
sormais aux frais de la République, se ter-
mine par cette phrase :
« Cette petite réforme est donc excellen-
te ; nous ne regrettons qu'une chose, c'est
qu'elle a été proposée par M. Thalamas. »
Un Français eût évidemment écrit « qu'el-
le ait été », mais nous passons plus faci-
lement cette légère erreur à M. Beulemans.
que son sectarisme.
Si notre conffère regrette tant que la ré-
forme en question ait été proposée par M.
Thalamas, que n'a-t-il insufflé plus tôt à
l'un de ses amis réactionnaires du Parle-
ment la bonne idée d'en parler le premier ?
0.
L'Eijqtiéle farlerçeijlaiFe
sur l'Affaire Rochette
— .+-
M. de Folleville, député de la Seine-Infé-
rieure, chargé par la Commission pariemen-
taire de rédiger le rapport sur les diverses
opérations d.e l'enquête concernant l'affai-
re Rochette, a déclaré à l'agence Fournier
qu'il déposerait ce rapport entre le 10 et le
15 février prochain.
M. de Folleville n'est pas, dans ses cb-n-
clusions, aussi affirmatif sur l'abrogation
de l'article 10 que la Commission parlemen-
taire. L'article lui paraît « déplorable » en.
certains cas, mais e nd'autres « absolu-
ment légitime ».
M. de Folleville demande en revanche la
suppression de l'article 440 du Code de oom-
merce, prononçant la déclaration de failli-
te d'office. Il estime qu'un négociant ou
commerçant doit trouver dans la loi une
clause établissant qu'il ne peut être mis
en faillite sans avoir été préalablement en-
tendu.
1 -1 ——^0» ; * ———
Le Service actif des Douanes
——
Le groupe parisien de l'Union générale
des douanes actives organise pour mardi
prochain 31 janvier, à huit heures- et de-
mie du soir, salle Ludo, 86, avenue de Cli-
chy, un grand meeting qui sera présidé par
notre éminent collaborateur et ami Ferdi-
nand Buisson, député de Paris.
Cette réunion a pour but de provoquer
la réalisation de la réforme des traitements,
promise aux douaniers ; runification des
classes, le rétablissement du concours de
la sous-brigade et l'application aux colo-
nies du décret de 1908.
Elle prend une importance considérable
de ce que le moment approche où doivent
venir en discussion, les chapitres 90 et 91
du budget des finances qui ont été dis-
joints.
Nous reparlerons, en rendant compte de
ce meeting, des intéressantes questions qui
y seront traitées.
+
La Chasse aux Renards
-.-
Un de nos collaborateurs publiait récem-
ment urne notice très documentée sur
l'origine de la « chasse aux renards ». A
cette documentation peut s'ajouter cet ex-
trait d'un arrêt de la Cour du Parlement
du 9 septembre 1760. Souhaitons qu'en
fassent leur profit ceux dont la profession
consiste, à gémir sur le malheur des temps!
1 Vu par la chambrodes vacations, v est-
il dit, la requête du procureur général du
roi, concernant que dans la ville d'Etam-
pes, il s'est formé depuis plusieurs années
une société parmi les compagnons charpen-
tiers, laquelle ils appellent parmi eux com-
pagnons du devoir ou bons drilles ; que
ces compagnons s'assemblent chez le nom-
mé Jacques Sauvet, cabaretier dans cette
ville, lequel ils appellent leur mère ; que
ledit Sauvet tient un registre dans lequel
est inscrit le nom de tous les compagnons
charpentiers du devoir ; que ceux qui ne
sont point inscrits sur ledit registre sont
appelés par les compagnons du devoir, re-
nards ; que les compagnons du devoir sol-
licitent lesdits compagnons renards à en-
trer dans la société du devoir ou bons dril-
les, et lorsqu'ils ne veulent pas, les compa-
gnons du devoir les maltraitent et insultent
les maîtres charpentiers chez qui ils demeu-
rent, ce qui oblige les compagnons dési-
gnés sous le nom de renards de quitter le
pays ; que le procureur général du roi est
en o-utre informé que les compagnons for-
ment journellement des attroupements et
qu'ils sont armés de cannes et de .bâtons,
qu'ils troublent le repos public, insultent
et maltraitent les habitants de la ville d'E-
tampes. »
Tout cela n'est point fait pour servir —
dans la discussion — les braves confrères
qui s'ingénient à faire retomber la respon-
sabilité de 4ous les. méfaits, moitié sur la
République, moitié sur l'école laïque.
La République semble plutôt, en l'occur-
rence, avoir reçu en héritage de la monar-
chie des pratiques corporatives dans Inap-
plication desquelles tout le monde ne goû-
te pas un égal plaisir.
Et nous avions raison de reprocher à M.
Charles Dupuy de dissimuler trop soigneu-
sement ses connaissances sociologiques,
quand il expliquait gravement aux lecteurs
du Soleil que le citoyen Bousquet pouvait
très bien avoir puisé ses doctrines « dans
les petits livres distribués à l'école à sa
fi 11 et le :&.
A moins qu'il n'y ait eu parmi ces petits
livres une histoire du règne de Louis le
Bien-Aimé !.
— ;
La Religion Moralisatrice
--.:-t-.
Extrait d'un ouvrage pieux : La Vie de
Marie-Ange, par Martel :
« Dana la nuit du 16 octobre 1816, M. je
curé de Lignan et d'autres personnes élant
dans la chambre de Marie-Ange, qui était
en extase, entendirent les baisers que Nô-
tre-Seigneur et notre chère Mère faisaient
sur la bouche et s'aperçurent que chaque
baiser faisait une petite quantité de liqueur
que Marie-Ange avalait ; quan- elle en eût
avalé une certaine quantité, les baisers con-
tinuant, elle laissa échapper cette liqueur
par un coin de sa bouche. Alors, M. le cu-
ré, s'approchant, la recueillit avec son
doigt et l'avala ; quand il en eût avalé une
certaine quantité, les baisers continuant, il
en donna une léchée à chaque personne
qui était dans la chambre.
« Les baisers continuant et la liqueur
s'échappant toujours des lèvres de Marie-
Ange, M. le curé de Lignan fit monter les
personnes qui étaient dans la cuisine, oui
toutes en goûtèrent et la trouvèrent déli-
cieuse. La source n'étant pas encore tarie
et les baisers continuant, M. le curé rem-
plit de cette liqueur um mouchoir blanc
de toile de Rouen qwe j'ai avec les reliques
de Marie-Ange, enveloppé d'un papier sur
lequel M. le curé de Lignan avait écrit :
« Mouchoir imprégné de la liqueur des
baisers de Jésus et de Marie, recueillie pen-
dant la nuit du 25 octobre 1816. »
Allons, monsieur Bérenger, avouez que
la vie des saints est autrement immorale
que la vue du sein de Mme Régina Badet !
» *
LA N'COKO-SANCHA r
LeTorcIjot) brûle
M. Trouillot, dont la décision du Conseil
des ministres, lue à la -dernière séance de
la Commise ion du budget, désavoue si bru-
talement l'attitude et les actes, avait de,
mandé à être entendu par cette Commis-
sion qui -a recueilli hier ses déclarations.
L'ancien ministre des colonies, dans une
déposition appuyée par une correspoiidian-
ce qui ne laisse place à aucune équivoque,
a établi d'une façon irréfutable que c'est
M. Pichon qui est le véritable auteur du
compromis QU 5 avril. M. Tirouillot s'est
toujours opposé à toute indemnité, à tout
arbitrage et à tout consortium. Il ne céda
que sur les inlStances répétées de son col-
lègue des affaires étrangères, qui fit va-
loir à ses yeux la menace de graves compli-
cations européennes et invoqua le fait du
prince pour emporter son adhésion à une
combinaison contre laquelle il él-evait les
mêmes objections que son prédécesseur,
M. Milliès-Lacroix.
Il est donc absolument inexact, comme
17a fait la note communiquée à la presse
par le gouvernement, mercredi dernier, de
faire porter à M. Trouilloit la responsabili-
té des opérations engagées par le oompro-
mis du 5 avril. En réalité, toute l'adminis-
tration des colonies, depuis le gouverneur
général jusqu'au ministre, a combattu la
solution préconisée par M. Pichon à l'insti-
gation de M. Tardieu. Quant à la pression
de l'Allemagne et aux graves complications
européennes qu'invoquait M. Pichon, on
a pu en juger la réali par la coupure bru-
talement ironique où la Gazette de Cologne,
journal officieux, priait M. Tardieu de ne
pas tirer les choses de trop loin et de ne
pas mêler les frontières congolaises aux re-
lations européennes.
La déposition de M. Trouillot a vive-
ment ému la Commission, en mettant en
cause, d'une façon aussi précise qu'indubi-
table, la responsabilité personnelle de M.
Pichon, qui jusqu'à présent avait tenté de
se. dérober.
LA QUINZAINE SCIENTIFIQUE
—ëb'<'-—
Un Vote nécessaire
M i
Ces jours derniers, à la Chambre des
députés, au cours de la discussion du bud-
get du ministère de l'Intérieur, MM.Ghes-
quière, Vandamme et l'abbé Lemire, de-
mandaient que les têtes de pavot, que l'on
peut actuellement se procurer à volonté
chez tous les herboristes, voire même chez
le premier épicier venu, soient désormais
classés au nombre des produits toxiques
et, de ce chef, ne puissent plus être ven-
dues que par les pharmaciens et seulement
sur le vu d'une ordonnance signée d'un
médecin.
Pour n'avoir guère attiré l'attention du
grand public, ni même celle des membres
de la Chambre, cette proposition ne laisse
pas d'être d'une grande importance. Elle
touche, en effet, très directement au grave
problème de la dépopulation si intéressant
pour l'avenir de notre pays.
Mais, ici, une parenthèse explicative de-
vient nécessaire.
Il n'est aujourd'hui personne pour igno-
rer que trop souvent l'alimentation des
nourrissons est des plus défectueuses. Au
lieu de leur donner des tétées, régulière-
ment espacées, de lait de bonne qualité,
continuellement de jeunes bébés confiés
par leurs mères obligées de se rendre au
travail à des gardeuses plus ou moins ex-
pertes et attentives sont gavées de sou-
pes consistantes, de biberons trop abon-
dants, ou même reçoivent des aliments es-
sentiellement indigestes, tels que haricots,
pommes de terre, etc.
Le résultat d'un pareil régime ne se fait
pas attendre. En peu de jours, l'enfant est
atteint de gastro-entérite. La diarrhée
s'installe, il maigrit, et, comme il souffre,
il perd le sommeil et pousse des cris pro-
longés souvent durant des heures.
A ce fâcheux état de choses, le remède
serait aisé. Il suffirait de mieux régler l'a-
limentation de l'enfant. Mais, c'est ce à
quoi songent le moins les terribles soi-
gneuses. D'après elle, si le bébé crie c'est
qu'il est méchant.
Comment alors calmer ses clameurs qu
latiguent tout le monde et empêchent la
matrone de dormir 2
Le remède heureusement est connu. C'est
le dormant, comme on l'avait dit à Lille et
dans toute la région du Nord, en d'autres
termes la décoction de tête de pavot.
« Celle-ci, nous apprennent M. le docteur
Déléarde, professeur agrégé à la Faculté de
médecine de Lille, et M. Bonn, directeur
au laboratoire de Lille, est préparée er
mettant une tête de pavot, coupée en mor-
ceaux, dans une dose variable d'eau,dans
un demi-litre à un litre ; le tout est place
sur le feu jusqu'à ébullition et on laisse
concentrer à environ un quart de litre
on 'puise à -même dans ta icasserole la
quantité nécessaire pour calmer l'enfant ;
la macération dure plusieurs jours, m y
ajoute de l'eau au fur et à mesure que
celle-ci s'évapoçe. »
Une dose variable de cette piéparation
est donnée aux infortunéls petts. Oll
son action, l'enfant se calme el s'assou-
pit. La soigneuse peut dormir. Aussi a-t-
elle grand soin de recourir à nouveau au
calmant efficace. Durant plusieurs jours,
l'enfant reçoit une ration quotidienne d(
dormant. Il entre bientôt dans un état de
somnolence dont il ne sort plus ; sa fin
s'amaigrit, son teint devient terreux, se.
yeux s'encavent, ses pupilles rétrécies cor-
sent de réagir à la lumière, ses extrémités
se refroidissent et se cyanosent, son pouls
et sa respiration se ralentissent, et bientôt
son état général devrent manifestement si
mauvais que, malgré son indifférence, sa
soigneuse ne peut manquer de s'en aper-
cevoir et l'amène à l'hôpitaU
Mais le plus souvent, il est trop tard.
Le poison a fait son œuvre et, malgré
tous les efforts, l'enfant qui refuse toute
alimèntation ne sort point du coma où il
est plongé et succombe au bout de quel-
ques heures.
***
Rien dé moins surprenant qu'une- sem-
blable solution. C'est que la décoction de
pavot, que les mégères emploient si faci-
lement, est en réalité fort toxique.
Les analyses chimiques établissent sans
réplique qu'elle renferme en proportions
notables les divers alcaloïdes de l'opium et
l'examen pratiqué après la mort du conte-
nu intestinal ainsi que des viscères, esto-
mac, intestin, foie, rein, des enfants ayant
succombé dans les conditions que nous ve-
nons de rapporter, y révèle invariablement
la présence de la morphine.
Aussi bien y a-t-il déjà fort longtemps
que de nombreux auteurs ont signalé Jef
dangers graves de l'usage de la décoction
de tête de pavot.
Dès 1827, Louyer-Vifierman annonçait à
l'Académie de médecine un certain nombre
de cas d'intoxication mortelle causée par
ce remède et, entre autres, il-citait le cas
singulièrement impressionnant de l'infir-
mière d'une maternité qui, ayant à soigner
neuf enfants alors qu'elle venait de passer
plusieurs nuits sans sommeil, leur fit boire
du lait chaud et sucré où elle avait fait in-
fuser une tête de pavot. Des neuf enfants,
huit dormirent si bien que l'on eut beau-
coup de peine à les ranimer ; quant au
neuvième, il succomba.
Plus tard, en 1868, Chevallier, dans une
note sur la vente libre des capsules de pa.
vot et sur les dangers qui peuvent en ré-
sulter, rapporte de nombreuses observa-
tions {¡"empoisonnement par cette sub-
stance.
Il cite en particulier, notent MM. De-
léarde et Bonn dans un travail publié par
la Revue d'hygiène et de police sanitaire,
le cas d'une sage-femme inculpée de l'as-
sassinat d'un grand nombre d'enfants,dont
on avait trouvé les ossements dans son
domicilie, et aussi l'histoire d'une femme
suppliciée et dont le métier était de sevrer
les enfants qu'elle faisait périr insensible-
ment sans cris ni douleurs, en employant
les têtes de pavot-
Dans une étude médico-légale sur l'em-
poisonnement, étude publiée "en 1867, le cé-
lèbre médecin légiste Tardieu était non -
moins catégorique. « Les capsules de pavot
qui fournissent l'opium renferment à n'en
pas douter les alcaloïdes contenus dans
l'opium lui-même et ne doivent être em-
ployées qu'avec une extrême prudence ; la
science possède un très grand nombre
d'observations dans lesquelles de terribles
accidents et quelquefois la mort sont sur-
venus à la suite de l'administration im-
prudente de boissons ou de lavements pré-
parés avec des capsules de pavot : les
jeunes enfants sont fort souvent victimes
de l'abus qu'en font les nourrices pour les
endormir. »
Les auteurs modernes sont pareillement
d'accord à signaler le danger reioutable de
l'administration de la décoction de têtes
de pavots. Dans son traité de Chimie toxi-
cologique, M. Ogier, l'éminent directeur du
laboratoire de toxicologie, signale des cas
pe mort survenus chez de jeunes enfant&
et de même font, dans leurs ouvrages spé-
ciaux, les savants Lervin, Brouardel, Cha-
puis et Vibert, etc.
***
Ces témoignages si nombreux rendus par
tant de médecins et de chimistes distingués
justifient hautement l'initiative prise il y a
quelques jours au Parlement par MM.Ghes-
quière, Vandamme et Lemire.
Aussi bien, en pareille matière, ne S6-
rait-ce pas une nouveauté que de voir inter-
venir le législateur.
En certains pays étrangers, en Autrich.
notamment, le danger signalé est si bien
reconnu que des dispositions pénales sont
inscrites dans le code vis-à-vis de ceux qui
administrent à un enfant en bas âge une
décoction de pavot.
II y a là, on ne saurait le contestes, -ua •
excellent èxemple à suivre. Il importe fort, ,
en effet, pour" l'avenir même du pays,
qu'un terme immédiat soit apporté à des
pratiques coupables dont le résultat fatal
est de conadmner à une mort rapide de
jeunes enfants.
Or, pour cela, une simple mesure suffit,
à savoir, comme il vient d'être demandé à
la Chambre, qu'il soit décidé que les têtes
de pavots ne puissent plus être vendues à
tous librement, mais qu'elles soient clas-
sées parmi les substances toxiques que
les pharmaciens seuls ont la faculté de dé-
livrer sur la vue d'une ordonnance médi-
cale.
La réforme à accomplir est de celles
sur laquelle tout le monde est a priori d'ac-
cord ; elle n'entraîne à aucune dépense
budgétaire et ne comporte que des avan-
tages moraux et matériels î
Puissent toutes ces, raisons se trouver
suffisantes pour qu'elle soit rapidement
solutionnée.
D' GEORGES VITOUX.
NOS MINISTRES
»«i
Les Ministres et Sous-Secrétaires d'Etat
se sont réunis hier matin en Conseil, à l'E.
lysée, sous la présidence de M. Fallières.
Ils se sont entretenus des différentes
questions à l'ordre du jour des deux.
Chambres.
Mouvement judiciaire
Le Conseil a approuvé le mouvement jif
diciaire suivant :
Sont nommés conseillers à la Cour de
Cassation : MM. Ditte, président du Tri-
bunal civil de la Seine ; et Morellet, pro-
cureur général près la Cour de Poitiers, en
remplacement de MM. Faye et Marras, ad-
mis à la retraite et nommés conseillers ho-
noraires.
Président du Tribunal de la Seine : M.
Monnier, procureur de la République près
le même tribunal :
Procureur de la République à Paris :
M. Lescouvé, directeur des affaires crimi-
nelles et des grâces au Ministère de la
Justice ;
Directeur des Affaires Criminelles, M.-
Paul Boulloche. directeur du personnel et
de la comptabilité au Ministère de la Jus-
tice ;
Directeur du personnel et de la compta-
bilité, M. Monmoy, sous-directeur du per-
sonnel ;
Procureur général à Poitiers, M. Bour-
geon, procureur de la République à Tunis.
La protection des vins de Champagne
M. Klotz, Ministre des Finances, a fait
connaître le texte du projet de loi relatif
aux mesures particulières au régime fles
vins de la Champagne vilicole délimitée.
La nicotine dans l'agriculture
M. Raynaud, Ministre de l'Agricullure, a
communiqué au Conseil une liste de ré-
partitio-n des quantités de nicotine à livret
dans divers départements. Cette réuartitioa
est faite au prorata des surfaces de vignes
cultivées et attaquées par la cochylis, 1'
démis et les chenilles Causes.
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