Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1870-12-24
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 24 décembre 1870 24 décembre 1870
Description : 1870/12/24 (N560). 1870/12/24 (N560).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine commune
Description : Collection numérique : La Commune de Paris Collection numérique : La Commune de Paris
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7533229j
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 11/10/2012
S, 560. à;;. Samedi 24 décembre 1670.
Le naméro : 10 o. 8 Départements ; 15 c.
8 nivôse an 79. N 560.
RÉDACTION
S'adrelser au Secrétaire de la Rédaction
De 5 à 7 heures du soir
18, BtT* DE VALOIS, 18
Les maunscrits non insérés ne seront pas rendus
ANNONCES
*M. Ch. LAGRANGE, CfïRF et ce
1, place de la Bourse, f
¡
ADMINISTRATION
J5, BOULEVARD UOhTlUftrU | 15
1
AB61IIIEMin«
MMS 1
Troitmois..<. lia
Six Inois 2-1 »
DÉPABTEMBNTS
Frois mois. fi d
Six moi? 27 »
adresser les réclamions et marullCÎ!.
A M. ALBERT BARBIEUX
-.. 1 -: 7.
11 FAILLI SOMlilIffi
, :
- "-..J'{l\it.-.J>./
Quelle que soit l'issue des opérations mi-
litaires reprises depuis deux jours sous nos
murs, soit qu'un succès décisif nous déli-
vra enfin du blocus, soit "qu'un échec mo-
mentané nous ramène encore dans Paris,
non pour nous désarmer, mais pour nous re-
tremper au contraire dans la conscience de
notre invincible-union et de notre indomp.
table patriotisme — un fait est acquis, c'est
qu'une nouvelle force, la plus vivace et la
plus solide de toutes peut-être,est désormais
--au service non plus seulement l'armée régulière, non
plus seulement la mobile, mais la garde
nationale enrôlée, enrégimentée, et, quoi-
qu'on dise M. Clément Thomas, admira-
blement disciplinée. Après avoir pendant
quatre-vingts ans donné, sans sortir pour
ainsi dire de ses foyers, le signal des
révolutions politiques qui ont émancipé
le monde et inauguré la liberté, voici
que la bourgeoisie parisienne se révèle
tout-à-coup sur le champ de bataille et
prouve, rien que pcir la rapidité de son
apprentissage militaire, que le soldat,
chez elle, est digne du citoyen. Les
bulletins d'hier et d'avant-hier proclament
en effet que, partout où elle a combattu,
la garde nationale a été intrépide et qu'ap-
pelée la dernière sous le drapeau, elle a
été la première au feu. On peut donc dire
qu'en ce moment, la landwer prussienne
et la landwer parisienne étant aux prises
gous le rempart de Paris, les deux pères
de famille des deux nations, le père de
famille prussien et le père de famille
français, sont en présence dans les
deux armées.
Spectacle tragique ! ,,'
Qu'est-ce que le père de famille prus-
4en ? Un brigand.
Et qu'est-ce que le père de famille
français ? Un héros.
L'un fait une guerre hideuse; Fautre
une guerre sainte. ','
Toas deux sont face à face et se jettent
le défi d'un duel à mort.
- Le père de famille prussien nous fait la
guerre qui incendie, la guerre qui massa-
cre, ki guerre qui pille. Il nous fait la
guerre qui vole les montres, qui vide les
caves, qui empaquète les vins et qui dé-
ménage les meubles. Il nous fait la guerre
qui organise le pillage, estampille le bu-
tin fet numérote les colis de la con-
quête. Il nous fait la guerre qui dévaste
et qui expédie ensuite la dévastation,
via Berlin, par petite vitesse. Il nous
fait la guerre qui brûle la maison et
qui dévalise l'incendie ; la guerre qui fu-
sille le village et qui incorpore le paysan ;
.la guerre qui arrête les voyageurs ; la
guerre qui bombarde les villes ouvertes,
qui, sans avis préalable, lance les projec-
tiles explosibles en manière d'avertisse-
ment, qui tue de loin les vieillards et les
femmes, et qui mitraille les petits enfants,
endormis à une lieue de la bouche des
canons ; la guerre qui traite en place miti-
taire toute cité, qu'elle se défende ou non,
et la prend d'assaut, non du droit du vain-
queur, mais du droit de l'incendiaire ; la
guerre qui inonde de pétrole les portes et
les boiseries des maisons ; la guerre qui
veut des ôtages et qui, pour un convoi cou-
pé, met à mort trente habitants paisibles;
la guerre enfin qui, après avoir violé le
droit dans la patrie, égorge et dépouille
l'humanité dans la famille ; la guerre de
Schinderannes après la guerre d'Arioviste,
la guerre de Robért-Macaire après la
guerre d'Attila, la guerre qui prend pêle-
mêlé notre artillerie et notre argenterie,
nos drapeaux et nos mouchoirs et qui,
si la résistance de Paris n'eût décon-
certé ses victoires, - se faisait une fête
de célébrer, ce mois-ci même, à Berlin,
l'Austerlitz des assassins et le Marengo
des filous ! ",
En face du père de famille prus-
sien, l'autre père de famille, le père de
famille parisien, c'est le droit et c'est
la justice. Menacé dans ses foyers, il
est apparu tout-à-coup sur le champ
de bataille, l'arme au bras, le sac
au dos, la haine et la rage et la paternité
au coeur. Il a crié à l'infâme pèrè de fa-
mille prussien :— « A nous deux 1» Il n'a
pas voulu qu'on l'envahit et qu'on l'as-
servit, et que sa défaite fût sa honte, et que
son malheur fût sa domesticité, et il a
rugi! Il a signifié au canon allemand
la fermeture à triple verrou du seuil
parisien! Il a déclaré à ces Papavoines
de la choucroûte que, lui, le bon
citoyen de 89, il entendait se défendre,
et se battre, et mourir, et vaincre, et re-
prendre la Lorraine et l'Abaèe, et sauvèr
Paris, et protéger ses palais, ses maisons,
ses rues, — et garder sa montre ! Il a
refusé à ces Mandrins de la pipe en
porcelaine l'entrée de sa capitale, et l'ap-
proche de sa femme, et l'effroi de son en-
fant, et la clef du monde — et le passe-
partout de sa cave! Il a surgi, lui, le pro-
priétaire formidable de la rue Saint-Denis
et de la Révolution française ! Etil a appris
la manœuvre, l'école dè bataillon, le ma-
niement du chassepot, le feu de peloton, la
marché forcée, la fatigue, l'endurcisse-
ment au vent d'hiver, la résistance à la
bise, le sommeil snr la terre glacée, la
sévérité dans l'épreuve, la discipline du
soldat, la consigne de la sentinelle, et,
devant la mort possible, la magnifique
bonhommie de la bourgeoisie indignée!
Et depuis deux jours il verse son sang
sous le rempart, tranquille de sentir
baissé derrière lui le pont-levis de ses
foyers ! Et c'est beau ! Et notre garde
nationale parisienne, quoi qu'il arrive et
quoi que puisse nous réserver le sort des
combats, a bien mérité de la France!
Car elle s'est révoltée devant l'affront et
devant la honte ! Car elle, la landwher
française, elle venge la famille humaine
des crimes et des souillures de la landwher
prussienne ! Car, dans ses rangs, tous, jeu-
nes et vieux, ont pris les armes ! Car tous
veulent, soit au bastion, soit dans la
tranchée, lutter jusqu'à ce qu'on ait
vaincu et chassé ces bandits et ces lâches 1
Car, si Home avait les légionnaires, si la
i3rêce avait les argyraspides, Paris a
maintenant le bataillon sacré dés pères
et des fils, des maris et des frères, et
combat, non plus seulement avec sa
grande âme, mais avec nos cent mille
cœurs, avec le cri de nos mères, avec l'hon-
neur de nos femmes, de nos filles et de
nos sœurs, avec la sainte intimité de la
maison menacée — et avec les joies de la
famille devenues les Furies de la patrie!
CHARLES HUGO.
JOURNAL DU SIÈGE
22 DÉCEMBRE. - 97e JOURNÉE.
/{apport militaire.
; 22 décembre, soir.
La nuit dernière, des soldats ennemis,
restés dans les caves de Ville-Évrard, ont
fait une attaque sur les postes occupés par
les troupes; nos hommes ayant riposté vi-
goureusement ont tué ou fait prisonniers
la plus grande partie des assaillants.
Malheureusement, le général Blaise qui
s'était porté en toute hâte à la tête de ses
troupes, a été mortellement atteint. Il est
l'objet des plus vifs regrets dans la brigada
qu'il commandait depuis le commencement
du siège, et l'armée perd en lui un de ses
chefs les plus vigoureux.
Les pertes de l'ennemi ont été des plus
sérieuses aux affaires d'hier ; elles sont con-
firmées par les prisonniers qui ont été faits
sur les différenis points.
P. 0. Le génital, chef d'état-major génèral,
SCHMITZ.
Le vice-amiral commandant fil chef au gou-
verneur de Paris au fort d'Aubervilliers.
Conformément à vos ordres nous avons
attaqué le Boùrget ce matin. Le bataillon
dè marins èt lé 138e, sous l'énergique di-
rection < du capitaine de frégate Lamothe-
Tenet à enlevé la partie nord du village,
en même qu'une attaque poussée vigou-
reusement par le capitaine Lavoignet dans
la partie sud se voyait arrêté, malgré ses
efforts, par de fortes barricades et des
murs crénelés qui l'empêchaient de dépas-
ser les prémières maisons, dont on s'était
emparé.
Pendant près de trois heures les troupes
se sont maintenues dans le nord du Boùr-
get, jusqu'au delà de l'église, luttant pour
conquérir les maisons une à une, sous les
feux tirés, des caves et des fenêtres et sous
une grêle de projectiles. Elles ont dû se
retirer, leur retraite s'est faite avec calme.
Simultanément, une diversion impor-
tante était effectuée par les 40e, 12e, 136 et
U8 bataillons des gardes mobiles de la
Seine et une partie du 62e bataillon de la
garde nationale mobilisée de Saint-Denis,
sous le commandement supérieur du colo-
nel d'Autremont. Enfin, au même moment,
le 68 bataillon de la garde nationale mo-
bilisée de Saint-Denis se présentait devant
Êpinay, tandis que les deux batteries flot-
tantes nes 1 et 4 consumaient lç village ainsi
qu'Orgemont et le Cygne-d'Engbien qui ri-
postaient vigoureusement.
Nos pertes sont sérieuses, surtout parmi
le 134e et le 138°.
Bien que notre but n'ait pas été atteint,
je ne saurais trop louer la vaillante éner-
gie dont nos troupes ont fait preuve.
100 prisonniers prussiens ont été ramenés
du Bourget.
Signé : ltE LA roscièue.
On lit dans le Journal officiel :
La journée d'hier n'est que le commen-
cement d'une série d'opérations. Elle n'a
pas eu, elle ne pouvait guère avoir de ré-
sultats définitifs; mais elle peut servir à
établir deux points importants : l'excel-
lente tenue de nos bataillons de marche
engagés pour la première fois, qui se sont
montrés dignes de leurs camarades de l'ar-
mée et de la mobile, et la supériorité de
notre nouvelle artillerie, qui a éteint com-
plètement les feux de l'ennemi.
Si nous n'avions pas été contrariés par
l'état de l'atmosphère, il n'est pas douteux
que le village du Bourget serait resté entre
nos mains. A l'heure où nous écrivons, le
général gouverneur de Paris a réuni les
chefs de corps, pour sé concerter avec eux
sur les opérations ultérieures.
La note que nous reproduisons d'après
le Journal officiel prétend expliquer le
temps d'arrêt qu'ont subi, dans la journée
d'hier, les opérations militaires, en allé-
guant « que, le gouverneur de Paris a
réuni les chefs de corps pour se concerter
avec eux sur les opérations militaires. »
Cette allégation n'est évidemment qu'un
prétexte. Il nous est impossible d'admettre
que le général Trochu, qui pendant dix-
huit longues journées d'inaction a eu tout
le temps de méditer et d'arrêter le plan
stratégique duquel dépend la délivrance de
Paris, ait éprouvé sérieusement le besoin
de remettre ce plan en discussion, après
une journée qui, en somme, a été favo-
rable à nos armes.
Si, comme nous le croyons, le contre-
ordre subitement imposé à l'élan de la
garde nationale et de l'armée n'est qu'une
feinte destinée à donner le change à l'en-
nemi et à masquer la direction véritable
d'un effort immédiat et décisif, nous ren-
drons pleine justice à l'habileté du com-
mandant en chef. Si, au contraire, le
temps d'arrêt du 22 décembre, comme
celui du 1er décembre, n'avait pour effet
que de permettre à l'ennemi de concentrer
toutes ses forces sur le point qui est notre
objectif réel, si la journée du Bourget
devait, comme la journée de Villiers,
aboutir à une retraite en bon ordre,
suivie d'une nouvelle période d'inaction,
nous ne pouvons dissimuler au général
Trochu qu'il assumerait devant la nation
entière une redoutable responsabilité.
Au Bourget.
Nous recevons d'un sous-officier d'artil-
lerie une lettre qui contient d'intéressants
détails sur l'affaire du 21 décembre. La
batterie à laquelle est attaché ce sous-
officier s'était transportée, dans la soirée
du 20, du campement de Levallois-Perret
au fort d'Aubervilliers, devant les fossés
duquel elle bivouaqua avant de prendre
purt à l'action. Le signal du combat fut
donné, avant l'aube, par une bordée des
forts, de Rosny et de Romainville. Le mur
blanc crénelé qui couvre le Bourget s'é-
croula bientôt sous les obus. C'est alors
que les francs-tireurs s'élancèrent à la
bayonnette et débusquèrent l'ennemi qui
se retira précipitamment, laissant entre
nos mains un certain nombre de prison-
niers. Mais le feu combiné des mitrailleu-
ses prussiennes et des redoutes de Blanc-
mesnil et de Pont-Iblon rendit bientôt la
position intenable, et il fallut renoncer à
l'occupation du Bourget. La retraite s'o-
péra sans pertes sérieuses.
Un prisonnier prussien, interrogé par ce
sous-officier, estimait à quatre-vingt mille
hommes les forces massées de ce côté par
l'ennemi. Ces hommes qui forment l'élite
de l'armée allemande, appartenaient pour
la plupart à la garde royale, commandée
par le prince royal en personne. Un batail-
lon placé à l'avant-garde de ce corps a
perdu deux compagnies tout entières.
c Le même prisonnier prétendait que les
Prussiens avaient été massés au Nord Est
de Paris, par un brusque mouvement opé-
ré dans la nuit du 20 au 21. Il ajoutait
qu'ils avaient été informés, la veille du com-
bat, à onze heures du soir, de la direc-
tion vers laquelle l'armée de Paris porte-
rait son effort principal.
Un de nos amis, qui est ambulancier, a
assisté, avant-hier, à tout le combat du
Bourget.
11 était parti, avec son ambulance, à
quatre heures du matin. Il arrivait, à neuf
heures, au fort d'Aubervilliers, - en nom-
breuse compagnie, du reste, car il évalue
à deux mille le nombre des voitures d'am-
bulance qui s'étaient réunies au lieu de
rendez-vous, à la Villette.
Derrière le fort d'Aubervilliers, on se
massa tout près de ce champ Langlois où
Troppmann n'a immolé que cinq victimes,
— ce qui doit paraître bien mesquin au
roi de Prusse.
Tout près de là, un brancardier devenait
le premier client de sa propre ambulance.
Il avait eu le tort de boire de l'eau-de-vie ;
le froid survint; une congestion cérébrale
le frappa, et on le ramena, sur son propre
brancard, dans le plus triste état.
Vers dix heures et demie, le canon du
fort d'Aubervilliers commença à tonner.
Dès huit heures, la fusillade s'était fait en-
tendre devant le Bourget. Les marins, le
120e de ligne et les mobiles de la Loire In
iérieure étaient là.
Du petit chemin qui va de la Courneuve
à Bondy, notre ami vit toute l'affaire : le
petit Bourget emporté sans résistance, le
grand Bonrget occupé d'abord, puis éva-,
cué devant la fusillade et la mitraille, l'im-
pétuosité terrible des marins, l'ardeur de
toutes les troupes, les coups incessants de
l'artillerie. Tout cela à travers une brume
qui voilait à demi l'action et ne la rendait
que plus tragique.
En somme, si nous n'avons pas conservé
le Bourget, il paraît qu'au moins nos sol- •
dats s'y sont admirablement conduits, et
il paraît aussi qu'on n'en avait engagé
qu'un petit nombre.
Une grande partie de l'artillerie, la plus
grande partie akissi de l'infanterie, n'ont
pas donné. -" oj'-- -- .-
A cinq heures, tout était fini. Le canon
et le chassepot s'étaient tus. Les ambu.
lances franchirent la barricade qui est en
avant du fort d'Aubervilliers, et allèrent
relever les blessés.
Ils allèrent ainsi jusqu'au milieu du che-
min qui conduit de la station du Bourget
à Drancy. Mais là, la fusillade prussienne,
qui continuait sans qu'on s'expliquât pour-
quoi, les arrêta net.
A dix pas de notre ami, un brancardier
eut sa gamelle traversée par une balle.
Force fut bien alors de revenir sur ses
pas.
Hier, quand on y retourna, il n'y avait
plus un seul blessé. Les Prussiens, pendant
la nuit, les avaient tous relevés.
Le combat du 21 a été surtout une af-
faire d'artillerie.
Stains et le Bourget ont été canonnés
par l'artillerie de tous nos forts et de tou-
tes nos redoutes. Pièces de 4, de t2 et
même pièces courtes de 24, locomotives
blindées ont battu en brèche avec un effet
foudroyant les murs et les ouvrages enne-
mis.
Là, comme au plateau d'Avron; notre
artillerie, décidément supérieure à celle de
l'ennemi, a démonté toutes ses pièces.
C'est cette formidable intervention de
l'artillerie qui a emprisonné les Prussiens
derrière leurs retranchements et assuré
notre mouvement en avant.
1 Ce mouvement en avant ne pourra mal-
heureuremant pas donner, au moins du
côté du Bourget, une base d'opération
bien solide. Nous n'avons pas gagné une
position, nous avons fait une étape. Mais
on nous dit qu'il faut attendre, attendons!
La part considérable que l'artillerie, à
prise à l'action du 21 est ainsi constatée
par le récit du Soir.
t Vers midi commença sur le Bourget un feu
terrible. Le fort de l'Est (3,500 m.), le fort
d'Aubervilliers (3,100 m.), nos batteries éta-
blies au Drancy (1,500 m.), tiraient sans re-
lâche. Une véritable pluie d'obus tombait
sur*4e village. A l'aide de la lorgnette, on
voyait les murs, les maisons s'écrouler. Les
Prussiens étaient enfermés là comme dans un
cercle de feu. Ils ne pouvaient ni avancer ni
reculer : partout nos canons tonnaient, et sur
toutes les routes, le bruit strident, horrible,
de nos mitrailleuses leur prouvait assez qu'il
n'y avait pas d'issue.
L'ennemi a dû faire là des pertes considé-
rables qu'il est d'ailleurs impossible d'évaluer.
Cependant sur la droite du Bourget, nos
troupes s'avancent le long du chemin de fer de
Soissons.
1 Dans cette plaine déchirée, ravagée, nos sol-
dats s'alignent en bataille et marchent en
avant à la rencontre des Prussiens qui débou-
chent de Blanc-Mesnil et d'Aunay.
Une vive fusillade s'engage sur toute la ligne;
à quelques cents mètres, on l'entend à peine,
car pendant plus de deux heures les mitrail-
leuses ne cessent de rouler.
Sur la gauche du Grand-Drancy, de nom-
breuses batteries d'artillerie tirent sans inter-
ruption : ce sont des pièces de 12 dont la por-
tée est énorme: elles battent en brèche le
Blanc-Mesnil (3,000 mètres environ) et toute la
plaine, criblant ainsi d'obus les troupes enne-
mies qui sont directement exposées à notre feu
meurtrier.
Ihelles.
On communique à la Presse les détails
suivants sur la position de Chelles, en
avant de laquelle s'est déroulé le gros de
l'action d'hier.
Cette position, achevai sur les routes de
l'Est et du Nord, est d'une haute importance
stratégique et a été tout particulièrement for-
tifiée par l'ennemi.
Elle est défendue par une triple ligne de.
batteries armées de plus de soixante canons.
Au-dessous passe le chemin de fer de Stras-
bourg qui forme, à cet endroit, un talus de
12 mètres devenu dn formidable ouvrage de
défense. En outre, les Prussiens, comprenant
que la posilion ne peut guère être attaquée de
front, et redoutant uil mouvement tournant
de notre part, ont coupé le ponf de Gournay-
sur-Marne, massant le gros de leurs forces
à Villemonble et au Raincy. Mais d'autre
part la Marne débordée un peu au delà les
empêche de faire arriver des secours par le
sud.
De notre côté, nos batteries du plateau d'A-
vron, récemment armées des pièces qui étaient
à Montmartre, atteignent facilement jusqu'à
Chelles, distant seulement de 0,000 mètres, et
peuvent très bien protéger notre attaque, en
même temps que nos locomotives blindées,
dont on distinguait hier très bien la marche,
peuvent s'avancer par le chemin de Stras-
bourg jusqu'à une petite distance de Chelles.
—
1 Ca et là.
I On a la presque certitude que le roi de
Prusse aurait décidément quitté Versailles.
r On a vu distinctement, à l'ouest, seize
calèches se diriger vers le nord. Les calè-
ches étaient escortés.
C'est à l'aide d'une lorgnette et d'un de
nos forts qu'on a aperçu ce cortège signi-
ficatif.
L'état-major prussien persiste à répan-
dre dans son armée cette èalornnie à la
fois cruelle et stupide, - que nous empoi-
sonnons nos prisonniers de guerre.
Les soldats de la garde royale prussien-
ne que nous avons pris au Bourget et qui
ont été amenés à Saint Denis, n'ont con-
senti à boire et à manger qu'après qu'on
eût à plusieurs reprises goûté devant eux
aux aliments qu'on leur offrait.
à.
Ce n'est pas une batterie, mais deux, que
les artilleurs de la garde nationale ont es-
sayées mercredi, avec une vingtaine d'ar-
tilleurs du corps Pothiert, à la redoute du
Moulin-Joly.
Les douze pièces ont tiré environ quatre
cents obus, dont le plus grand nombre ont
passablement endommagé quelques mai-
sons d'Argenteuil.
Le pointage très facile de ces pièces a
émerveillé les canonniers de la légion
Schcelchcr. Le capitaine Laprade, délégué
par le commandant Pothier, a fait un
grand éloge des artilleurs de la garde na-
tionale à leur capitaine le citoyen Long-
champ. -,
Dans ces derniers temps, on s'est beau-
coup plamt, non sans quelque raison, du
général Clément Thomas. Mais sait-on bien
par qui il est question de le remplacer dans
le commandement de la garde nationale?
Par son second, par le véritable auteur des
fautes qui lui sont imputées, par le général
Montaigu I J
, C'est comme si, voulant décidément
nommer, à la place du général Trochu, un
chef plus capable et plus sûr, oh choisis.
sait. le général Schmitz.
LA MEILLEURE MONARCHIE
Les orléanistes nous vantent perpé-
tuellement la monarchie anglaise comme
« la meilleure desrrépubliques » et com-
me une forme idéale de gouvernement où
la royauté n'est qu'un nom et que la si-
gnature de la volonté nationale.
Et, dès qu'ils s'oublient un moment,
ils écrivent des phrases comme celle-ci,
que nous lisons dans le Journal des lM-
bats.
En réponse à un Anglais, M. J. Bow-
les, qui essayait de défendre son pays et
son gouvernement contre l'accusation de
s'être réjouis de nos défaites, la feuille or-
léaniste ne s'aperçoit pas qu'elle répond
ceci :
« Notre correspondant croit pouvoir
dire que le gouvernement anglais a fait
tous ses efforts pour mettre fin à la
guerre. Nous ne saurions être de son
avis. Quant à la politique extérieure, le
ministre qui en est chargé n'a d'autre
souci que de complaire à une femme soli-
taire, laquelle, de son côté, est plus Alle-
mande qu'Anglaise, et ne vit par la pensée
que dans le monde des Cobourg, morts ou
vivants. »
Ainsi, la voilà, de l'aveu de ses soute-
neurs, cette monarchie où la royauté n'est
que nominale et où c'est, en réalité, le
pays qui règne! Un duel à mort entre-
heurte les deux grandes nations militai-
res, l'histoire anxieuse assiste à un des
chocs les plus terribles dont ait tremblé
l'Europe, on entend des craquements par-
tout, l'Angleterre elle-même se sent frap-
pée à Constantinople, - mais il y a « une
femme solitaire », une veuve d'un Co-
bourg à laquelle il serait désagréable qu'on
fût mal pour les compatriotes de son Co-
bourg. Et dès lors, l'équilibre de l'Europe
et du monde, l'intérêt de l'humanité, et,
ce qui touche l'Angleterre bien autrement,
l'intérêt de l'Angleterre, qu'est-ce que
tout cela? Les ministres de cette monar-
chie peur rire « n'ont plus d'autre souci
que de complaire à la reine jt. C'est de
cette façon que la reine d'Angleterre ne
gouverne pas.
Ce n'est pas même la reine qui gou-
verne, c'est son Cobourg. Le ministre
veut complaire à sa reine, la reine veut
complaire à son défunt. C'est cet Allemand
qui, du fond de son tombeau, interdit au
peuple anglais de rien faire contre les
Allemands. Cet ex-mari de la reine fait
de l'Angleterre ce qu'il veut, et le pays
où l'on voudrait nous faire croire que la
royauté ne gouverne pas est gouverné par
l'ombre de ce qui n'a pas même été un
roi.
Auguste Vacquerie.
LES PLEUTRES
J'ai dit : les « drôles », j'aurais dû dire :
les « pleutres ». Je me suis trompé. Voilà
qu'ils répondent, et ils prétendent ne
point m'avoir vu chez eux. J'y suis allé,
cependant, mardi, à trois heures de
l'après-midi, accompagné de mon ami M.
Philippe Burty, rédacteur du Rappel. —
Nous n'avons trouvé qu'un journaliste,
caché derrière une grille, — à l'abri de la
main des visiteurs — ce qui prouve une
sage prudence. Ces gens prétendent ne
m'avoir point vu et, selon leur habitude,
ils mentent.
Ce qui me plaît, c'est le ton de leur en-
trefilet. Il est presque poli et cette politesse
inusitée témoigne suffisamment qu'ils ont
appris ma visite. Je ne suis plus : « le
Simon ». Je deviens « Monsieur » et
« Monsieur Edouard LÓckroy». Je ne dis
plus « le contraire de la vérité ». Je « me
trompe » tout simplement. Je tais erreur.
C'est-à-dire que j'ai cru aller chez eux et
n'y suis point allé. Evidemment je me
suis trompé de porte. Je suis entré che le mannezintjue, croyant entrer chez M.
Veuillot.
C'est a peine ils risquent unrppinte. Us -
se défendent d'avoir injurié ma famille, e!^
pour ce qui regarde la commission des pa-
piers, ils sont prêts à reconnaître îeuift
torts. Qu'une personne « autorisée »
prenne la plume, et ce sera fait. Dans
quelques jours, ils deviendront très gen-
tils.
Le plus joli, c'est la façon dont ils a kiJ
client » le colonel. Car, il est « lâché »
le colonel! complètement « lâché ) ! Ce
colonel n'est plus un rédacteur du jour-
nal. C'est un « correspondant » qui en-
voie « des communications intéressantes»
-- et pas tous les jours encore! C'est un
passant, un monsieur qu'on connaît à
peine. On l'a vu dans le monde!. Rien
de plus. On ne veut pas endosser la res-
ponsabilité du colonel. Je le comprends.
Mais il ne doit être ni flatté ni content, lè
colonel !
Quant à « communications intéressan-
tes », c'est un chef-d'œuvre! Cet homme
insulte, injurie, bave, crache, vomit, sans
français, sans grammaire, sans style, sans
esprit, sans raison, sans bon sens; il écrit
comme un Auvergnat et il ment comme
un imbécile, et c'est ce ragoût que vous
appelez une u communication M ! ,
Ali ! monsieur Veuillot!. monsieur
Veuillot !.
Mais c'est encore la tactique de l'Uni-
vers d'employer je ne sais quels gens vé-
reux qui ne craignent point de calomnier
à tort et à travers, et de les desavouer,
de les jeter par dessus bord, sitôt que la
situation devient dangereuse. Si la ca-
lomnie réussit, tant mieux! Si elle
échoue, on a toujours cette ressource ;
on dit ; Nous ne Connaissons point cet
homme là !. Nous ne savons qui il est !.
C'est un monsieur quelconque que le
garçon de bureau a rencontré dans la
rue.
Et quels hommes, d'ailleurs, a em-
ployés ïUnivers ! Je ne parle pas de ce co-
lonel, que la police utilisait, le 13 juin,
ainsi qu'il appert du procès (Procès des
accusés du V; juin, Jlordeaux, 1849, Im-
primerie des ouvriers associés) ; docteur
en médecine sans diplôme, agent diplo-
matique louche, autour dramatique ob-
scène, co-associé d'une artiste peu drama-
tique et « correspondant, intéressant » au-
jourd'hui. Je ne parle pas de lui, je parle
des autres aussi, et en particulier de ce gî-
crétaire de la rédaction, M. B'*% qui avait
été, disait-on, chassé d'une île un peu trop
chaude pour des mœurs un peu trop an-
tiques.
il y a deux ans à peine de cela. Ce
collaborateur de M. Veuilîot était allé
enseigner la morale chrétienne au delà
des tropiques. Un jeune garçon, violem-
ment catéchisé, se plaignit à sa famille.
.Et la famille indignée ameuta l'île et l'on
chassa le professeur. En moins de deux
ans, ce brave homme et le colonel, c'est
trop. Et encore sont-ce là les gens, qui
osent lever la tête et faire parler d'eux.
Jugez de ce que peuvent être ceux qui
restent dans la pénombre et le demi-
jour !
Ah 1 malheureux ! Et vous avez toujours
le nom du Christ à la bouche !
Le Christ et ce colonel, quel assembla-
ge ! La Vierge et ce professeur de morale,
et tout cela dans la même gamelle ! Et
j'ai eu la naïveté de l'attendre deux jours,
ce colonel!. Jei eu la bonté de rester
chez moi, pour lui, et, quand je sortais, de
laisser, pour lui, un mot au concierge !.
Edouard Lockroy.
Dénonciation du trailé du Laxembonrg
La Russie a dénoncé le traité sur la mer
Noire. V Electeur libre affirme que la
Prusse vient de dénoncer le traité sur le
Luxembourg.
Pourquoi pas? Qui est-ce qui pourrait
s'opposer maintenant à la belle association
des bandes du panslavisme et des bandes
du pangermanisme? Ce ne serait pas à coup
sûr la petite Belgique ni la petite Hollande.
Ce ne serait même plus ce qui fnt la grande
Angleterre.
PIÈCES TROliVÉES AUX TUIUMIS
(Tonte II.) il %7 a
Nous avons analysé d'avance, il y a
quelques jours, la livraison des Papiers
impériaux qui paraît aujourd'hui. voici
le texte des deux lettres de Joséphine Bo.
naparte au citoyen Botot, secrétaire de
Barras :
t.
Bonaparte est arrivé cette nuit; je vous prie,
mon cher Botot, de témoigner mes regrets à
Barras de ne pouvoir pas aller dîner chez lui ;
dites-lui de ne point m'oublier. Vous connaie..
sez mieux que personae, mon cher Botot, lita
pOfition.
Adieu. Amitié sincère.
L-APAGEBII BONAPARTE.
2.
Ce 23 floréal an vi (12 mai 1708).
J'ai écrit avant-hier, citoyen, au directeur
Barras pour lui demander une lettre de recom-
mandation auprès du ministre de la marine
pour mon mari. Il l'attend avec impatience
Le naméro : 10 o. 8 Départements ; 15 c.
8 nivôse an 79. N 560.
RÉDACTION
S'adrelser au Secrétaire de la Rédaction
De 5 à 7 heures du soir
18, BtT* DE VALOIS, 18
Les maunscrits non insérés ne seront pas rendus
ANNONCES
*M. Ch. LAGRANGE, CfïRF et ce
1, place de la Bourse, f
¡
ADMINISTRATION
J5, BOULEVARD UOhTlUftrU | 15
1
AB61IIIEMin«
MMS 1
Troitmois..<. lia
Six Inois 2-1 »
DÉPABTEMBNTS
Frois mois. fi d
Six moi? 27 »
adresser les réclamions et marullCÎ!.
A M. ALBERT BARBIEUX
-.. 1 -: 7.
11 FAILLI SOMlilIffi
, :
- "-..J'{l\it.-.J>./
Quelle que soit l'issue des opérations mi-
litaires reprises depuis deux jours sous nos
murs, soit qu'un succès décisif nous déli-
vra enfin du blocus, soit "qu'un échec mo-
mentané nous ramène encore dans Paris,
non pour nous désarmer, mais pour nous re-
tremper au contraire dans la conscience de
notre invincible-union et de notre indomp.
table patriotisme — un fait est acquis, c'est
qu'une nouvelle force, la plus vivace et la
plus solide de toutes peut-être,est désormais
--au service
plus seulement la mobile, mais la garde
nationale enrôlée, enrégimentée, et, quoi-
qu'on dise M. Clément Thomas, admira-
blement disciplinée. Après avoir pendant
quatre-vingts ans donné, sans sortir pour
ainsi dire de ses foyers, le signal des
révolutions politiques qui ont émancipé
le monde et inauguré la liberté, voici
que la bourgeoisie parisienne se révèle
tout-à-coup sur le champ de bataille et
prouve, rien que pcir la rapidité de son
apprentissage militaire, que le soldat,
chez elle, est digne du citoyen. Les
bulletins d'hier et d'avant-hier proclament
en effet que, partout où elle a combattu,
la garde nationale a été intrépide et qu'ap-
pelée la dernière sous le drapeau, elle a
été la première au feu. On peut donc dire
qu'en ce moment, la landwer prussienne
et la landwer parisienne étant aux prises
gous le rempart de Paris, les deux pères
de famille des deux nations, le père de
famille prussien et le père de famille
français, sont en présence dans les
deux armées.
Spectacle tragique ! ,,'
Qu'est-ce que le père de famille prus-
4en ? Un brigand.
Et qu'est-ce que le père de famille
français ? Un héros.
L'un fait une guerre hideuse; Fautre
une guerre sainte. ','
Toas deux sont face à face et se jettent
le défi d'un duel à mort.
- Le père de famille prussien nous fait la
guerre qui incendie, la guerre qui massa-
cre, ki guerre qui pille. Il nous fait la
guerre qui vole les montres, qui vide les
caves, qui empaquète les vins et qui dé-
ménage les meubles. Il nous fait la guerre
qui organise le pillage, estampille le bu-
tin fet numérote les colis de la con-
quête. Il nous fait la guerre qui dévaste
et qui expédie ensuite la dévastation,
via Berlin, par petite vitesse. Il nous
fait la guerre qui brûle la maison et
qui dévalise l'incendie ; la guerre qui fu-
sille le village et qui incorpore le paysan ;
.la guerre qui arrête les voyageurs ; la
guerre qui bombarde les villes ouvertes,
qui, sans avis préalable, lance les projec-
tiles explosibles en manière d'avertisse-
ment, qui tue de loin les vieillards et les
femmes, et qui mitraille les petits enfants,
endormis à une lieue de la bouche des
canons ; la guerre qui traite en place miti-
taire toute cité, qu'elle se défende ou non,
et la prend d'assaut, non du droit du vain-
queur, mais du droit de l'incendiaire ; la
guerre qui inonde de pétrole les portes et
les boiseries des maisons ; la guerre qui
veut des ôtages et qui, pour un convoi cou-
pé, met à mort trente habitants paisibles;
la guerre enfin qui, après avoir violé le
droit dans la patrie, égorge et dépouille
l'humanité dans la famille ; la guerre de
Schinderannes après la guerre d'Arioviste,
la guerre de Robért-Macaire après la
guerre d'Attila, la guerre qui prend pêle-
mêlé notre artillerie et notre argenterie,
nos drapeaux et nos mouchoirs et qui,
si la résistance de Paris n'eût décon-
certé ses victoires, - se faisait une fête
de célébrer, ce mois-ci même, à Berlin,
l'Austerlitz des assassins et le Marengo
des filous ! ",
En face du père de famille prus-
sien, l'autre père de famille, le père de
famille parisien, c'est le droit et c'est
la justice. Menacé dans ses foyers, il
est apparu tout-à-coup sur le champ
de bataille, l'arme au bras, le sac
au dos, la haine et la rage et la paternité
au coeur. Il a crié à l'infâme pèrè de fa-
mille prussien :— « A nous deux 1» Il n'a
pas voulu qu'on l'envahit et qu'on l'as-
servit, et que sa défaite fût sa honte, et que
son malheur fût sa domesticité, et il a
rugi! Il a signifié au canon allemand
la fermeture à triple verrou du seuil
parisien! Il a déclaré à ces Papavoines
de la choucroûte que, lui, le bon
citoyen de 89, il entendait se défendre,
et se battre, et mourir, et vaincre, et re-
prendre la Lorraine et l'Abaèe, et sauvèr
Paris, et protéger ses palais, ses maisons,
ses rues, — et garder sa montre ! Il a
refusé à ces Mandrins de la pipe en
porcelaine l'entrée de sa capitale, et l'ap-
proche de sa femme, et l'effroi de son en-
fant, et la clef du monde — et le passe-
partout de sa cave! Il a surgi, lui, le pro-
priétaire formidable de la rue Saint-Denis
et de la Révolution française ! Etil a appris
la manœuvre, l'école dè bataillon, le ma-
niement du chassepot, le feu de peloton, la
marché forcée, la fatigue, l'endurcisse-
ment au vent d'hiver, la résistance à la
bise, le sommeil snr la terre glacée, la
sévérité dans l'épreuve, la discipline du
soldat, la consigne de la sentinelle, et,
devant la mort possible, la magnifique
bonhommie de la bourgeoisie indignée!
Et depuis deux jours il verse son sang
sous le rempart, tranquille de sentir
baissé derrière lui le pont-levis de ses
foyers ! Et c'est beau ! Et notre garde
nationale parisienne, quoi qu'il arrive et
quoi que puisse nous réserver le sort des
combats, a bien mérité de la France!
Car elle s'est révoltée devant l'affront et
devant la honte ! Car elle, la landwher
française, elle venge la famille humaine
des crimes et des souillures de la landwher
prussienne ! Car, dans ses rangs, tous, jeu-
nes et vieux, ont pris les armes ! Car tous
veulent, soit au bastion, soit dans la
tranchée, lutter jusqu'à ce qu'on ait
vaincu et chassé ces bandits et ces lâches 1
Car, si Home avait les légionnaires, si la
i3rêce avait les argyraspides, Paris a
maintenant le bataillon sacré dés pères
et des fils, des maris et des frères, et
combat, non plus seulement avec sa
grande âme, mais avec nos cent mille
cœurs, avec le cri de nos mères, avec l'hon-
neur de nos femmes, de nos filles et de
nos sœurs, avec la sainte intimité de la
maison menacée — et avec les joies de la
famille devenues les Furies de la patrie!
CHARLES HUGO.
JOURNAL DU SIÈGE
22 DÉCEMBRE. - 97e JOURNÉE.
/{apport militaire.
; 22 décembre, soir.
La nuit dernière, des soldats ennemis,
restés dans les caves de Ville-Évrard, ont
fait une attaque sur les postes occupés par
les troupes; nos hommes ayant riposté vi-
goureusement ont tué ou fait prisonniers
la plus grande partie des assaillants.
Malheureusement, le général Blaise qui
s'était porté en toute hâte à la tête de ses
troupes, a été mortellement atteint. Il est
l'objet des plus vifs regrets dans la brigada
qu'il commandait depuis le commencement
du siège, et l'armée perd en lui un de ses
chefs les plus vigoureux.
Les pertes de l'ennemi ont été des plus
sérieuses aux affaires d'hier ; elles sont con-
firmées par les prisonniers qui ont été faits
sur les différenis points.
P. 0. Le génital, chef d'état-major génèral,
SCHMITZ.
Le vice-amiral commandant fil chef au gou-
verneur de Paris au fort d'Aubervilliers.
Conformément à vos ordres nous avons
attaqué le Boùrget ce matin. Le bataillon
dè marins èt lé 138e, sous l'énergique di-
rection < du capitaine de frégate Lamothe-
Tenet à enlevé la partie nord du village,
en même qu'une attaque poussée vigou-
reusement par le capitaine Lavoignet dans
la partie sud se voyait arrêté, malgré ses
efforts, par de fortes barricades et des
murs crénelés qui l'empêchaient de dépas-
ser les prémières maisons, dont on s'était
emparé.
Pendant près de trois heures les troupes
se sont maintenues dans le nord du Boùr-
get, jusqu'au delà de l'église, luttant pour
conquérir les maisons une à une, sous les
feux tirés, des caves et des fenêtres et sous
une grêle de projectiles. Elles ont dû se
retirer, leur retraite s'est faite avec calme.
Simultanément, une diversion impor-
tante était effectuée par les 40e, 12e, 136 et
U8 bataillons des gardes mobiles de la
Seine et une partie du 62e bataillon de la
garde nationale mobilisée de Saint-Denis,
sous le commandement supérieur du colo-
nel d'Autremont. Enfin, au même moment,
le 68 bataillon de la garde nationale mo-
bilisée de Saint-Denis se présentait devant
Êpinay, tandis que les deux batteries flot-
tantes nes 1 et 4 consumaient lç village ainsi
qu'Orgemont et le Cygne-d'Engbien qui ri-
postaient vigoureusement.
Nos pertes sont sérieuses, surtout parmi
le 134e et le 138°.
Bien que notre but n'ait pas été atteint,
je ne saurais trop louer la vaillante éner-
gie dont nos troupes ont fait preuve.
100 prisonniers prussiens ont été ramenés
du Bourget.
Signé : ltE LA roscièue.
On lit dans le Journal officiel :
La journée d'hier n'est que le commen-
cement d'une série d'opérations. Elle n'a
pas eu, elle ne pouvait guère avoir de ré-
sultats définitifs; mais elle peut servir à
établir deux points importants : l'excel-
lente tenue de nos bataillons de marche
engagés pour la première fois, qui se sont
montrés dignes de leurs camarades de l'ar-
mée et de la mobile, et la supériorité de
notre nouvelle artillerie, qui a éteint com-
plètement les feux de l'ennemi.
Si nous n'avions pas été contrariés par
l'état de l'atmosphère, il n'est pas douteux
que le village du Bourget serait resté entre
nos mains. A l'heure où nous écrivons, le
général gouverneur de Paris a réuni les
chefs de corps, pour sé concerter avec eux
sur les opérations ultérieures.
La note que nous reproduisons d'après
le Journal officiel prétend expliquer le
temps d'arrêt qu'ont subi, dans la journée
d'hier, les opérations militaires, en allé-
guant « que, le gouverneur de Paris a
réuni les chefs de corps pour se concerter
avec eux sur les opérations militaires. »
Cette allégation n'est évidemment qu'un
prétexte. Il nous est impossible d'admettre
que le général Trochu, qui pendant dix-
huit longues journées d'inaction a eu tout
le temps de méditer et d'arrêter le plan
stratégique duquel dépend la délivrance de
Paris, ait éprouvé sérieusement le besoin
de remettre ce plan en discussion, après
une journée qui, en somme, a été favo-
rable à nos armes.
Si, comme nous le croyons, le contre-
ordre subitement imposé à l'élan de la
garde nationale et de l'armée n'est qu'une
feinte destinée à donner le change à l'en-
nemi et à masquer la direction véritable
d'un effort immédiat et décisif, nous ren-
drons pleine justice à l'habileté du com-
mandant en chef. Si, au contraire, le
temps d'arrêt du 22 décembre, comme
celui du 1er décembre, n'avait pour effet
que de permettre à l'ennemi de concentrer
toutes ses forces sur le point qui est notre
objectif réel, si la journée du Bourget
devait, comme la journée de Villiers,
aboutir à une retraite en bon ordre,
suivie d'une nouvelle période d'inaction,
nous ne pouvons dissimuler au général
Trochu qu'il assumerait devant la nation
entière une redoutable responsabilité.
Au Bourget.
Nous recevons d'un sous-officier d'artil-
lerie une lettre qui contient d'intéressants
détails sur l'affaire du 21 décembre. La
batterie à laquelle est attaché ce sous-
officier s'était transportée, dans la soirée
du 20, du campement de Levallois-Perret
au fort d'Aubervilliers, devant les fossés
duquel elle bivouaqua avant de prendre
purt à l'action. Le signal du combat fut
donné, avant l'aube, par une bordée des
forts, de Rosny et de Romainville. Le mur
blanc crénelé qui couvre le Bourget s'é-
croula bientôt sous les obus. C'est alors
que les francs-tireurs s'élancèrent à la
bayonnette et débusquèrent l'ennemi qui
se retira précipitamment, laissant entre
nos mains un certain nombre de prison-
niers. Mais le feu combiné des mitrailleu-
ses prussiennes et des redoutes de Blanc-
mesnil et de Pont-Iblon rendit bientôt la
position intenable, et il fallut renoncer à
l'occupation du Bourget. La retraite s'o-
péra sans pertes sérieuses.
Un prisonnier prussien, interrogé par ce
sous-officier, estimait à quatre-vingt mille
hommes les forces massées de ce côté par
l'ennemi. Ces hommes qui forment l'élite
de l'armée allemande, appartenaient pour
la plupart à la garde royale, commandée
par le prince royal en personne. Un batail-
lon placé à l'avant-garde de ce corps a
perdu deux compagnies tout entières.
c Le même prisonnier prétendait que les
Prussiens avaient été massés au Nord Est
de Paris, par un brusque mouvement opé-
ré dans la nuit du 20 au 21. Il ajoutait
qu'ils avaient été informés, la veille du com-
bat, à onze heures du soir, de la direc-
tion vers laquelle l'armée de Paris porte-
rait son effort principal.
Un de nos amis, qui est ambulancier, a
assisté, avant-hier, à tout le combat du
Bourget.
11 était parti, avec son ambulance, à
quatre heures du matin. Il arrivait, à neuf
heures, au fort d'Aubervilliers, - en nom-
breuse compagnie, du reste, car il évalue
à deux mille le nombre des voitures d'am-
bulance qui s'étaient réunies au lieu de
rendez-vous, à la Villette.
Derrière le fort d'Aubervilliers, on se
massa tout près de ce champ Langlois où
Troppmann n'a immolé que cinq victimes,
— ce qui doit paraître bien mesquin au
roi de Prusse.
Tout près de là, un brancardier devenait
le premier client de sa propre ambulance.
Il avait eu le tort de boire de l'eau-de-vie ;
le froid survint; une congestion cérébrale
le frappa, et on le ramena, sur son propre
brancard, dans le plus triste état.
Vers dix heures et demie, le canon du
fort d'Aubervilliers commença à tonner.
Dès huit heures, la fusillade s'était fait en-
tendre devant le Bourget. Les marins, le
120e de ligne et les mobiles de la Loire In
iérieure étaient là.
Du petit chemin qui va de la Courneuve
à Bondy, notre ami vit toute l'affaire : le
petit Bourget emporté sans résistance, le
grand Bonrget occupé d'abord, puis éva-,
cué devant la fusillade et la mitraille, l'im-
pétuosité terrible des marins, l'ardeur de
toutes les troupes, les coups incessants de
l'artillerie. Tout cela à travers une brume
qui voilait à demi l'action et ne la rendait
que plus tragique.
En somme, si nous n'avons pas conservé
le Bourget, il paraît qu'au moins nos sol- •
dats s'y sont admirablement conduits, et
il paraît aussi qu'on n'en avait engagé
qu'un petit nombre.
Une grande partie de l'artillerie, la plus
grande partie akissi de l'infanterie, n'ont
pas donné. -" oj'-- -- .-
A cinq heures, tout était fini. Le canon
et le chassepot s'étaient tus. Les ambu.
lances franchirent la barricade qui est en
avant du fort d'Aubervilliers, et allèrent
relever les blessés.
Ils allèrent ainsi jusqu'au milieu du che-
min qui conduit de la station du Bourget
à Drancy. Mais là, la fusillade prussienne,
qui continuait sans qu'on s'expliquât pour-
quoi, les arrêta net.
A dix pas de notre ami, un brancardier
eut sa gamelle traversée par une balle.
Force fut bien alors de revenir sur ses
pas.
Hier, quand on y retourna, il n'y avait
plus un seul blessé. Les Prussiens, pendant
la nuit, les avaient tous relevés.
Le combat du 21 a été surtout une af-
faire d'artillerie.
Stains et le Bourget ont été canonnés
par l'artillerie de tous nos forts et de tou-
tes nos redoutes. Pièces de 4, de t2 et
même pièces courtes de 24, locomotives
blindées ont battu en brèche avec un effet
foudroyant les murs et les ouvrages enne-
mis.
Là, comme au plateau d'Avron; notre
artillerie, décidément supérieure à celle de
l'ennemi, a démonté toutes ses pièces.
C'est cette formidable intervention de
l'artillerie qui a emprisonné les Prussiens
derrière leurs retranchements et assuré
notre mouvement en avant.
1 Ce mouvement en avant ne pourra mal-
heureuremant pas donner, au moins du
côté du Bourget, une base d'opération
bien solide. Nous n'avons pas gagné une
position, nous avons fait une étape. Mais
on nous dit qu'il faut attendre, attendons!
La part considérable que l'artillerie, à
prise à l'action du 21 est ainsi constatée
par le récit du Soir.
t Vers midi commença sur le Bourget un feu
terrible. Le fort de l'Est (3,500 m.), le fort
d'Aubervilliers (3,100 m.), nos batteries éta-
blies au Drancy (1,500 m.), tiraient sans re-
lâche. Une véritable pluie d'obus tombait
sur*4e village. A l'aide de la lorgnette, on
voyait les murs, les maisons s'écrouler. Les
Prussiens étaient enfermés là comme dans un
cercle de feu. Ils ne pouvaient ni avancer ni
reculer : partout nos canons tonnaient, et sur
toutes les routes, le bruit strident, horrible,
de nos mitrailleuses leur prouvait assez qu'il
n'y avait pas d'issue.
L'ennemi a dû faire là des pertes considé-
rables qu'il est d'ailleurs impossible d'évaluer.
Cependant sur la droite du Bourget, nos
troupes s'avancent le long du chemin de fer de
Soissons.
1 Dans cette plaine déchirée, ravagée, nos sol-
dats s'alignent en bataille et marchent en
avant à la rencontre des Prussiens qui débou-
chent de Blanc-Mesnil et d'Aunay.
Une vive fusillade s'engage sur toute la ligne;
à quelques cents mètres, on l'entend à peine,
car pendant plus de deux heures les mitrail-
leuses ne cessent de rouler.
Sur la gauche du Grand-Drancy, de nom-
breuses batteries d'artillerie tirent sans inter-
ruption : ce sont des pièces de 12 dont la por-
tée est énorme: elles battent en brèche le
Blanc-Mesnil (3,000 mètres environ) et toute la
plaine, criblant ainsi d'obus les troupes enne-
mies qui sont directement exposées à notre feu
meurtrier.
Ihelles.
On communique à la Presse les détails
suivants sur la position de Chelles, en
avant de laquelle s'est déroulé le gros de
l'action d'hier.
Cette position, achevai sur les routes de
l'Est et du Nord, est d'une haute importance
stratégique et a été tout particulièrement for-
tifiée par l'ennemi.
Elle est défendue par une triple ligne de.
batteries armées de plus de soixante canons.
Au-dessous passe le chemin de fer de Stras-
bourg qui forme, à cet endroit, un talus de
12 mètres devenu dn formidable ouvrage de
défense. En outre, les Prussiens, comprenant
que la posilion ne peut guère être attaquée de
front, et redoutant uil mouvement tournant
de notre part, ont coupé le ponf de Gournay-
sur-Marne, massant le gros de leurs forces
à Villemonble et au Raincy. Mais d'autre
part la Marne débordée un peu au delà les
empêche de faire arriver des secours par le
sud.
De notre côté, nos batteries du plateau d'A-
vron, récemment armées des pièces qui étaient
à Montmartre, atteignent facilement jusqu'à
Chelles, distant seulement de 0,000 mètres, et
peuvent très bien protéger notre attaque, en
même temps que nos locomotives blindées,
dont on distinguait hier très bien la marche,
peuvent s'avancer par le chemin de Stras-
bourg jusqu'à une petite distance de Chelles.
—
1 Ca et là.
I On a la presque certitude que le roi de
Prusse aurait décidément quitté Versailles.
r On a vu distinctement, à l'ouest, seize
calèches se diriger vers le nord. Les calè-
ches étaient escortés.
C'est à l'aide d'une lorgnette et d'un de
nos forts qu'on a aperçu ce cortège signi-
ficatif.
L'état-major prussien persiste à répan-
dre dans son armée cette èalornnie à la
fois cruelle et stupide, - que nous empoi-
sonnons nos prisonniers de guerre.
Les soldats de la garde royale prussien-
ne que nous avons pris au Bourget et qui
ont été amenés à Saint Denis, n'ont con-
senti à boire et à manger qu'après qu'on
eût à plusieurs reprises goûté devant eux
aux aliments qu'on leur offrait.
à.
Ce n'est pas une batterie, mais deux, que
les artilleurs de la garde nationale ont es-
sayées mercredi, avec une vingtaine d'ar-
tilleurs du corps Pothiert, à la redoute du
Moulin-Joly.
Les douze pièces ont tiré environ quatre
cents obus, dont le plus grand nombre ont
passablement endommagé quelques mai-
sons d'Argenteuil.
Le pointage très facile de ces pièces a
émerveillé les canonniers de la légion
Schcelchcr. Le capitaine Laprade, délégué
par le commandant Pothier, a fait un
grand éloge des artilleurs de la garde na-
tionale à leur capitaine le citoyen Long-
champ. -,
Dans ces derniers temps, on s'est beau-
coup plamt, non sans quelque raison, du
général Clément Thomas. Mais sait-on bien
par qui il est question de le remplacer dans
le commandement de la garde nationale?
Par son second, par le véritable auteur des
fautes qui lui sont imputées, par le général
Montaigu I J
, C'est comme si, voulant décidément
nommer, à la place du général Trochu, un
chef plus capable et plus sûr, oh choisis.
sait. le général Schmitz.
LA MEILLEURE MONARCHIE
Les orléanistes nous vantent perpé-
tuellement la monarchie anglaise comme
« la meilleure desrrépubliques » et com-
me une forme idéale de gouvernement où
la royauté n'est qu'un nom et que la si-
gnature de la volonté nationale.
Et, dès qu'ils s'oublient un moment,
ils écrivent des phrases comme celle-ci,
que nous lisons dans le Journal des lM-
bats.
En réponse à un Anglais, M. J. Bow-
les, qui essayait de défendre son pays et
son gouvernement contre l'accusation de
s'être réjouis de nos défaites, la feuille or-
léaniste ne s'aperçoit pas qu'elle répond
ceci :
« Notre correspondant croit pouvoir
dire que le gouvernement anglais a fait
tous ses efforts pour mettre fin à la
guerre. Nous ne saurions être de son
avis. Quant à la politique extérieure, le
ministre qui en est chargé n'a d'autre
souci que de complaire à une femme soli-
taire, laquelle, de son côté, est plus Alle-
mande qu'Anglaise, et ne vit par la pensée
que dans le monde des Cobourg, morts ou
vivants. »
Ainsi, la voilà, de l'aveu de ses soute-
neurs, cette monarchie où la royauté n'est
que nominale et où c'est, en réalité, le
pays qui règne! Un duel à mort entre-
heurte les deux grandes nations militai-
res, l'histoire anxieuse assiste à un des
chocs les plus terribles dont ait tremblé
l'Europe, on entend des craquements par-
tout, l'Angleterre elle-même se sent frap-
pée à Constantinople, - mais il y a « une
femme solitaire », une veuve d'un Co-
bourg à laquelle il serait désagréable qu'on
fût mal pour les compatriotes de son Co-
bourg. Et dès lors, l'équilibre de l'Europe
et du monde, l'intérêt de l'humanité, et,
ce qui touche l'Angleterre bien autrement,
l'intérêt de l'Angleterre, qu'est-ce que
tout cela? Les ministres de cette monar-
chie peur rire « n'ont plus d'autre souci
que de complaire à la reine jt. C'est de
cette façon que la reine d'Angleterre ne
gouverne pas.
Ce n'est pas même la reine qui gou-
verne, c'est son Cobourg. Le ministre
veut complaire à sa reine, la reine veut
complaire à son défunt. C'est cet Allemand
qui, du fond de son tombeau, interdit au
peuple anglais de rien faire contre les
Allemands. Cet ex-mari de la reine fait
de l'Angleterre ce qu'il veut, et le pays
où l'on voudrait nous faire croire que la
royauté ne gouverne pas est gouverné par
l'ombre de ce qui n'a pas même été un
roi.
Auguste Vacquerie.
LES PLEUTRES
J'ai dit : les « drôles », j'aurais dû dire :
les « pleutres ». Je me suis trompé. Voilà
qu'ils répondent, et ils prétendent ne
point m'avoir vu chez eux. J'y suis allé,
cependant, mardi, à trois heures de
l'après-midi, accompagné de mon ami M.
Philippe Burty, rédacteur du Rappel. —
Nous n'avons trouvé qu'un journaliste,
caché derrière une grille, — à l'abri de la
main des visiteurs — ce qui prouve une
sage prudence. Ces gens prétendent ne
m'avoir point vu et, selon leur habitude,
ils mentent.
Ce qui me plaît, c'est le ton de leur en-
trefilet. Il est presque poli et cette politesse
inusitée témoigne suffisamment qu'ils ont
appris ma visite. Je ne suis plus : « le
Simon ». Je deviens « Monsieur » et
« Monsieur Edouard LÓckroy». Je ne dis
plus « le contraire de la vérité ». Je « me
trompe » tout simplement. Je tais erreur.
C'est-à-dire que j'ai cru aller chez eux et
n'y suis point allé. Evidemment je me
suis trompé de porte. Je suis entré che
Veuillot.
C'est a peine ils risquent unrppinte. Us -
se défendent d'avoir injurié ma famille, e!^
pour ce qui regarde la commission des pa-
piers, ils sont prêts à reconnaître îeuift
torts. Qu'une personne « autorisée »
prenne la plume, et ce sera fait. Dans
quelques jours, ils deviendront très gen-
tils.
Le plus joli, c'est la façon dont ils a kiJ
client » le colonel. Car, il est « lâché »
le colonel! complètement « lâché ) ! Ce
colonel n'est plus un rédacteur du jour-
nal. C'est un « correspondant » qui en-
voie « des communications intéressantes»
-- et pas tous les jours encore! C'est un
passant, un monsieur qu'on connaît à
peine. On l'a vu dans le monde!. Rien
de plus. On ne veut pas endosser la res-
ponsabilité du colonel. Je le comprends.
Mais il ne doit être ni flatté ni content, lè
colonel !
Quant à « communications intéressan-
tes », c'est un chef-d'œuvre! Cet homme
insulte, injurie, bave, crache, vomit, sans
français, sans grammaire, sans style, sans
esprit, sans raison, sans bon sens; il écrit
comme un Auvergnat et il ment comme
un imbécile, et c'est ce ragoût que vous
appelez une u communication M ! ,
Ali ! monsieur Veuillot!. monsieur
Veuillot !.
Mais c'est encore la tactique de l'Uni-
vers d'employer je ne sais quels gens vé-
reux qui ne craignent point de calomnier
à tort et à travers, et de les desavouer,
de les jeter par dessus bord, sitôt que la
situation devient dangereuse. Si la ca-
lomnie réussit, tant mieux! Si elle
échoue, on a toujours cette ressource ;
on dit ; Nous ne Connaissons point cet
homme là !. Nous ne savons qui il est !.
C'est un monsieur quelconque que le
garçon de bureau a rencontré dans la
rue.
Et quels hommes, d'ailleurs, a em-
ployés ïUnivers ! Je ne parle pas de ce co-
lonel, que la police utilisait, le 13 juin,
ainsi qu'il appert du procès (Procès des
accusés du V; juin, Jlordeaux, 1849, Im-
primerie des ouvriers associés) ; docteur
en médecine sans diplôme, agent diplo-
matique louche, autour dramatique ob-
scène, co-associé d'une artiste peu drama-
tique et « correspondant, intéressant » au-
jourd'hui. Je ne parle pas de lui, je parle
des autres aussi, et en particulier de ce gî-
crétaire de la rédaction, M. B'*% qui avait
été, disait-on, chassé d'une île un peu trop
chaude pour des mœurs un peu trop an-
tiques.
il y a deux ans à peine de cela. Ce
collaborateur de M. Veuilîot était allé
enseigner la morale chrétienne au delà
des tropiques. Un jeune garçon, violem-
ment catéchisé, se plaignit à sa famille.
.Et la famille indignée ameuta l'île et l'on
chassa le professeur. En moins de deux
ans, ce brave homme et le colonel, c'est
trop. Et encore sont-ce là les gens, qui
osent lever la tête et faire parler d'eux.
Jugez de ce que peuvent être ceux qui
restent dans la pénombre et le demi-
jour !
Ah 1 malheureux ! Et vous avez toujours
le nom du Christ à la bouche !
Le Christ et ce colonel, quel assembla-
ge ! La Vierge et ce professeur de morale,
et tout cela dans la même gamelle ! Et
j'ai eu la naïveté de l'attendre deux jours,
ce colonel!. Jei eu la bonté de rester
chez moi, pour lui, et, quand je sortais, de
laisser, pour lui, un mot au concierge !.
Edouard Lockroy.
Dénonciation du trailé du Laxembonrg
La Russie a dénoncé le traité sur la mer
Noire. V Electeur libre affirme que la
Prusse vient de dénoncer le traité sur le
Luxembourg.
Pourquoi pas? Qui est-ce qui pourrait
s'opposer maintenant à la belle association
des bandes du panslavisme et des bandes
du pangermanisme? Ce ne serait pas à coup
sûr la petite Belgique ni la petite Hollande.
Ce ne serait même plus ce qui fnt la grande
Angleterre.
PIÈCES TROliVÉES AUX TUIUMIS
(Tonte II.) il %7 a
Nous avons analysé d'avance, il y a
quelques jours, la livraison des Papiers
impériaux qui paraît aujourd'hui. voici
le texte des deux lettres de Joséphine Bo.
naparte au citoyen Botot, secrétaire de
Barras :
t.
Bonaparte est arrivé cette nuit; je vous prie,
mon cher Botot, de témoigner mes regrets à
Barras de ne pouvoir pas aller dîner chez lui ;
dites-lui de ne point m'oublier. Vous connaie..
sez mieux que personae, mon cher Botot, lita
pOfition.
Adieu. Amitié sincère.
L-APAGEBII BONAPARTE.
2.
Ce 23 floréal an vi (12 mai 1708).
J'ai écrit avant-hier, citoyen, au directeur
Barras pour lui demander une lettre de recom-
mandation auprès du ministre de la marine
pour mon mari. Il l'attend avec impatience
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