Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-08-12
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 12 août 1863 12 août 1863
Description : 1863/08/12 (Numéro 224). 1863/08/12 (Numéro 224).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
;ee.— n,
BUREAUX A PARIS : rue de Valois (Palais-jRoyaJ),' hî 10 j
ABONN
MERCREDI 12 AOUT 1865.
ABONNEMENS DE PARIS.
trois mois;..;"-.':'.;
'six mois..r.
dn
rocs tKS PATSETBiNGEBS, VOÎT le tabtâ£Ù
publié les 5 et 20 de |Soh.aque mois.
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min, îo *
Les derniers évènemens de Mexico sont
diversement jugés par la presse anglaise.
Le Times y voit l'indice d'une allian
ce de plus en plus étroite entre la
France et l'Autriche. Le Daily-News se livre
contre la politique française à d'injustes
attaques , et le Globe à d'inconvenantes
bouffonneries.
L'Evening-Star se demande si l'archiduc
Maximilien acceptera la couronne du Mexi
que, et il craint que lorsque la question sera
vidée entre les Etats du Nord et du Sud de
l'Amérique, ces Etats ne contestent à la
France le droit d'établir un empire « sur
un sol que- le républicanisme américain
considère comme sa patrie. » Cette appré
hension nous paraît assez mal fondée, par
la double raison que les fédéraux et les
confédérés nous semblent séparés pour ja
mais et que, dussent-ils reformer l'Union,
ils n'auraient rien à voir dans un état de
choses créé au Mexiqu& par le libre vœu
des populations, et noà imposé par l'épée
de la France.
"Le Stto témoigne^- ^îisVîçstfeiçaes^rsui-
cette réunion, ce qui se passe aujourd'hui
doit lui prouver qu'il s'est trompé dans
son calcul. Le Congrès ne fait plus l'objet
d'un doute. On sait déjà que les principaux
souverains allemands ont -accepté l'in
vitation de l'empereur François-Joseph;
les autres très certainement s'empres
seront de les imite». C'est le roi de Saxe
qui, le premier, a envoyé son adhésion;
puis sont venues les réponses favorables
des rois de Wurtemberg et de Bavière.
Celle du grand-duc de Mecklembourg-
Strelitz a été surtout remarquée par la vi
vacité des sentimens dont elle est em
preinte. Les deux princes hessois n'ont
pas hésité un seul instant, et l'on pouvait
tenir pour certain l'assentiment du duc
Ernest de Saxe-Cobourg-Gotha, qu'un
journal.appelle «legrand connétable de
l'Allemagne. »
Des invitations ont été également adres
sées aux rois de Danemark et des Pays-
Bas comme membres de la Confédération
germanique. On prétend en outre que le
cabinet de Vienne aurait expédié des dé
pêches aux puissances non allemandes
pour leur faire connaître l'objet de la réu
nion de Francfort.
soutenir
vanSj la satisfaction que lui" causent la
proclamation de l'empire au Mexique et
le choix.de l'archiduc Maximilien comme
souverain :
«En élisant ce prince, le Mexique catho
lique s'est assuré un souverain catholi
que. Un prince autrichien a été élu par le
Mexique au moment même où le gouver
nement de Vienne commence à être re
gardé avec une grande faveur en Eu
rope, parmi les partisans les plus ar-
dôns de la monarchie constitutionnel
le, comme la- meilleure de toutes les
formes de gouvernement. Pour les insti
tutions républicaines, déchirées de l'Amé
rique du Nord, la nouv&lle de la transfor
mation du Mexique en empire, sous le
sceptrejde S. M. Maximilien I er , ne peut pas
être regardée autrement que comme un
coup terrible et un grand dé'couragemènt.
Quant à l'Autriche elle-même, l'effet de ce
choix de l'un des archiducs pour empereur
futur d'un Etat conquis par l'épée de la
France, ne peut que tendre à resserrer da
vantage et avec plus d'harmonie l'Autri
ché et là France. Résultat très propice- as
surément pour les Polonais! Voilà les
principales raisons (et il y . en a. encore
beaucoup d'autres) pour lesquelles nous
croyons être en droit d'envisager avec sa
tisfaction l'élection par le Mexique de
l'empereur Maximilien !»
Si le Sun envisage l'élection de l'archiduc
Maximilien comme une chose heureuse
pour lai cause de la Pologne, le journal
Y Italie pense de son côté qu'elle pourra
servir lei intérêts italiens. En parlant de
l'indépendance de Venise «quisait, dit-il,
si ce c'est pas son aurore qui vient de se
lever en Amérique avec le duc Maximilien
proclamé empereur au Mexique.» ■ ■ . . '
On pensera sans doute que c'est' aller. )
bien vite et bien loin, d'autant plus que
l'Italie déclare, dans le même numéro, que
des renseignemens dignes de foi la portent
à douter de l'acceptatioii du prince autri
chien. Nous plaçons ces renseignemens de
l'Italie sur le même rang que ses conjectu
res;: il faut attendre que le Mexique se soit
prononcé définitivement pour savoir si
l'archiduc acceptera et pour apprécier les
conséquences de son acceptation.
La presse espagnole n'est qu a moitié sa
tisfaite : il lui aurait convenu qu'un prin
ce espagnol fût appelé au trône du Mexi
que. Toutefois les espérances qu'elle avait
pu nourrir à ce sujet, lorsque l'expédition
fut entreprise, ont eu le temps de se dis
siper; aussi donne-t-elle Son approbation
au nouveau régime politique proclamé à
Mexico. «Il ne reste plus, dit le Télégra
phe de Barcelone , qu'à faire des vœux pour
l'empire et l'empereur du Mexique. »
La Prusse restera-t-elle à l'écart de ce
mouvement qui paraît général en Allema
gne? Suivant le Botschafter , la réponse du
roi est conçue de telle façon qu'elle ne sau
rait être considérée comme son dernier
mot. Il se pourrait donc que Guillaume
I er se décidât, au dernier moment, à . sè
à se faire représenter à Francfort. Une dé
pêche nous annonce, en effet, qu'hier le
prince royal a été appelé à Gastein, par un
télégramme du roi, et la Gazette allemande
du Nord , en annonçant cette nouvelle, ajou
te que le voyage du prince royal a une
haute portée politique. Selon toute proba
bilité, il s'agirait de l'envoi du prince au
Congrès des souverains. S'il en est ainsi,
une faute grave sera épargnée au gouver
nement prussien, car, ainsi que le dit le
Vaterland, l'Autriche et les autres souve
rains allemands verraient un acte de dé
fiance au plus haut degré dans le refus
du roi Guillaume, et les conseillers de ce
prince encourraient une grave responsa
bilité devant l'Allemagne entière.
, JONCIKRES.
Si le roi de Prusse, en refusant ou en
réservant son adhésion au Congrès prin
cier de Francfort^ a cru pouvoir empêcher
Feuilleton dii Constitutionnel, 12 août.
EN- PROVINCE
^ TELEGRAPHIE PRIVEE
Londres, 11 août.
Le Horning-Post dit que le comte Edouard
Gapski, l'un des grands propriétaires de Litliua-
nie, condamné à mort par MourawlefF, n'avait
pas pris une part active à l'insurrection.
La reine Victoria part aujourd'hui pour l'Al
lemagne. Elle sera de retour en Angleterre le
10 septembre."
Londres, 11 août.
Le Daily -News attaque la politique française
au Mexique. Il croit que l'archiduc Maximilien
n'acceptera pas Je trône qui lui est offert.
Londres, 11 août. »
Le Times attache une grande importance à
l'arrangement qui vient de se produire au
Mexique. Il aura suivant lui deux conséquen
ces importantes : il tondra constamment, en ef
fet à unir la France et l'Autriche,, et à désunir,
la France et le' gouvernement fédéral d'Améri
que. Cet événement ne peut pas manquer de
rapprocher la France et l'Autriche.
autorités militaires doiven
qu'au bout.
Une bataille est attendue sur le Rappahan
nock.
Le siège de Charleston continue.
Les confédérés ont été battus dans le Ken
tucljy et le Tennessee.
Les fédéraux se sont emparés de la ville de
.Braslieur, ils marchent sur Mobile.
Berlin, 10 août.
La Gazette de la Croix annonce que le prince
royal a été appelé à Gastein par un télégram
me du roi. Il est parti samedi soir.
La Gazette allemande du Nord dit que le voya
ge du prince royal à Gastein a une haute por
tée politique.
Berlin, H août.
Une lettre particulière de Varsovie, en date
du 10 août, annonce que deux pelotons de lan
ciers et cinquante cosaques escortant deux four
gons chargés de numéraire, ont été attaqués et
dispersés par les insurgés dans les environs de
Lublin. La lutte a duré deux heures. Les In
surgés se sont emparés de trois millions.de
roubles en argent et d'une certaine quantité
d'armes et de munitions.
Francfort, 11 août.
La Gazette d'Allemagne du Sud dit" que l'ac
ceptation du trône du Mexique par l'archiduc
Maximilien prouverait une entente préalable
entre l'Autriche et la France sur cette question
et sur d'autres.
Cracovie, 11 août, 6 h. du matin.
Les deux détachemens de Krysinski et de
Wierzbicki (ce dernier commandé par Wagner)
ont attaqué les Russes à l'imppeviste-, *te t»,- à,
Polichna, les ont poursuivis sur un parcours
de deux lieues et leur ont fait éprouver des
pertes sensibles.
Les Russes concentrent de toutes parts des
forces aux environs de Janow. Les détache
mens polonais reçoivent de leur côté des ren
forts.
Vienne, 10 août.
On a reçu la nouvelle que les ducs de Bruns
wick et de Saxe-Cobourg ont formellement
promis de participer au congrès du 16 août.
Vienne, 11 août.
L'archiduc Maximilien arrive demain pour
assister à un conseil de famille.
Turin, 10 août.
La Chambre des députés et le Sénat sont
convoqués pour entendre demain la lecture
du décret royal d'ajournement de la session
parlementaire.
Emprunt italien, 71.93.
Emprunt nouveau,'72.33.
Marseille, 11 août.
Le Péluse, des messageries impériales, dont
l'arrivée à Messine avec les malles, les passa
gers et les colis de l'Indo-Chine avait eu lieu le
8, est arrivé ici ce matin à quatre heures.
Shanghaï, 22 .juin.
La tranquillité règne dans les environs.
L'armée impériale est devant Nankin. •
Les affaires du Japon sont provisoirement
arrangées. •
L'hôtel de l'ambassade américaine a été
brûlé.
On mande de Melbourne (Australie), le 23
juin, que les insurgés ont été mis en déroute
à Taranaki par le colonel Cameron.
Madrid, 10 août.
On ouvre partout des souscriptions en fa
veur dos victimes de Manille.
Le gouvernement a.envoyé par le télégraphe
l'ordre de secourir, par tous les moyens pos
sibles, les familles des victimes.
La Época regrette qu'on n'ait pas appelé un
prince espagnol au trône du Mexique, mais
elle approuve l'établissement de l'empiie dans
ce pays. | [llavas-Bullkr.)
New-York, 30 juillet.
L'armée de Meade est sur le Rappahannock,
dans" le voisinage de Falmouth.
Lee est campé entre Culpepper et Gordons-
ville dans une attitude défensive. Le corps
confédéré d'Ewell s'avanee par la vallée de la
Shenandoah, dans la direction de Frêdéricks-
burg. •
Meade ne semble pas disposé à une attaque -
contre les confédérés.
Le maire de Savannah a ordonné aux ci
toyens de cette ville de s'organiser pour la dé
fense. .•
' Le bruit court que Rosencranz s'est emparé
de Chattanoga.
Le corsaire confédéré Florida est à Bermude.
Depuis le 17 juin, la Florida a détruit douze
bàtimens.
Change 1|0, agio sur l'or 29 3/4, coton 62.
New-York, 1" août.
(Par le City ofLondon.)
Le général Burnside a proclamé l'état de siè
ge dans le Ken tucky.
Les commandans'militaires sont invités à
aider les autorités fédérales pour le maintien
des prescriptions légales et de l'iatégrité du
suffrage dans l'élection du 3 septembre. Les
juges présens aux élections doivent empêcher
tout individu du parti confédéré de voter ; lès
Voici les dépêches que nous recevons ce
soir :
Liverpool, 11 août.
Le City of London a apporté i 62/000 dollars.
New-York, 31 juillet.
Le gouvernement fédéral a décidé que la
conscription serait effectuée de vive force à
New-York. D'après le Times les opérations
commenceront le 3.
Change 141, agio sur l'or, 28 7/8; coton 62
1/2 à 63.
New-York, 1 er août.
Le bombardement du fort Wagner continue.
Le 29 juillet, les fédéraux ont élevé des batte
ries à la distance de 2o0 yards du fort. Ils ont'
aussi élevé une batterie à un peu plus d'un
mille du fort Sumter. - :
Le général Lee se trouve avec des forces conr
sidérables à Culpepper, se disposant'à la lutte.
On dit que les confédérés sous les ordres de
Johnston battent en retraite dans la direction
de Mobile, et qu'une division fédéralè est en
marche sur cette ville. Des patrouilles de ca
valerie font le service le long du Misslssipi
pour protéger la navigation jusqu'à la Nou
velle-Orléans. 0
Les confédérés ont évacué Lexington dans le
Kentucky.
New-York, 1" août.
L'armée de Lee est concentrée à Culpepper
où elle se prépare à livrer bataille. Un régi
ment confédéré garde le Rappahannock de
puis Frédéricksburg jusqu'à Eleys.
On assure que les fédéraux se sont emparés,
des hauteurs qui sont derrière Frédéricksburg.
Bragg se serait séparé de Johnston qui pren
dra pour ligne de défense le chemin de fer de
Mobile à l'Ohio entre Okolona et Mobile au sud.
VIII.
Quoique ma famille appartienne à la
plus ancienne raee de ce pays, — car je
suis une Hauteviile, et j'ai dans toutes les
Croisades des aïeux que les poètes ont
chantés, je suis née pauvre. — La révolu
tion qui a ruiné tant de maisons, n'épar
gna point la nôtre. Quand vinrent les mau
vais jours, mon grand-père suivit sur la
terre d'exil les maîtres qu'il avait aimés et
servis dans leur prospérité.. Ce courtisan du
malheur ne devait point revoir sa patrie ;
il mourut jeune et sans gloire à l'armée de
Condé, laissant en France un fils unique
en bas âge, qui fut mon père. Une fois
rendus à leur trône, et livrés aux sou
cis d'un règne orageux, nos princes ou
blièrent facilement ceux qu'ils ne voyaient
plus. Leurs grâces ne vinrent point nous
chercher jusqu'à Coutances, et mon père,
en mourant, nous laissa, ma mère et moi,
dans une médiocrité de fortune qui n'était
pas dorce.Ma mère, dont j'étais désormais 1
l'unique bonheur, m'éleva avec un soin et
un dévoûment qui furent toute sa vie. Sa
tendresse et son amour furent long-temps
toute la mienne, et elle m'aima tant que
je ne m'aperçus jamais que rien me man
quât; tout le bonheur qu'une jeune fille
peut avoir, je le trouvais près d'elle. Il y a
cinq ans, — j'en 'avais dix-neuf, — après
être allée rendre visite à des parens de
mon père, qui demeurent en Bretagne, ma
mère voulut me conduire aux bains du
Croisic. Ce fut là ma première échappée
vers le monde : j e n'étais pas encore s or tie de
l'intimité discrète de la famille, et le res
te de l'univers m'était inconnu. Vous savez
mieux que moice quesontlesvilles d'eaux,
et ces réunions de tous les luxes et de tou
tes les élégances, où les femmes font as
saut de coquetterie et de beauté, où les
hommes, qui n'ontquele plaisirpour but,
-les entourent des hommages les plus em
pressés, et les plus vifs.
Vous devez comprendre quelle impres
sion un tpl spectacle dut produire sur une
jeune créature pour laquelle tout était
nou veau, et chez qui rien n'avait encore
émoussé la puissance ni la fraîcheur de
l'émotion. Je vécus là dans une atmosphè
re excitante, pleine d'enivrement, et qui
me donnait le vertige. Il me semblait qu'il
y avait en moi comme un autre moi qui
me regardait vivre. Ce que j'éprouvai la
première fois que j'assistai à un bal, je ne
vous le dirai pas ; je ne pourrais pas vous
le dire. Un tourbillon m'emportait, et j'al
lais sans savoir où. Mais, loin de me char
mer, cotte fièvre du plaisir me devint bien
tôt douloureuse. Si jeune et si inexpéri
mentée que je fusse, je comprenais déjà
que le plaisir n'est pas le bonheur. J'a
vais, j'ai toujours eu, j'ai* encore une sorte
de timidité qui me tient éloignée de la
foule et du bruit, et si ma mère m'eût
écoutée, nous serions revenues bien vite à
Coutances.
Cette année-là, il y avait au Croisic, à ce.
que l'on m'a dit, une société choisie. Elle
se recrutait principalement dans les châ
teaux du voisinage ; les meilleures famil
les de Nantes et d'Angers fournissaient
aussi leur contingent. Jeunes hommes et
jeunes femmes s'étaient déjà groupés et
formaient de petites sociétés, c'est-à-dire
de petites coteries, dès avant notre arri
vée. Nous né cherchâmes point à nous y
mêler; ma mère savait trop bien quelle
réserve doivent s'imposer deux femmes
qu'aucun homme n'accompagne et ne pro
tège.
Aussi, après les trois ou quatre premiers,
bals, que ma mère avait voulu me faire con
naître, nous vécûmes à peu près seules.
Quand j'avais pris mon bain matinal,
nous rentrions dans nos chambres, et
nous y passions presque toutes nos jour
nées, tantôt travaillant à nos fenêtres, tan
tôt regardant la mer qui, dès lors, me
plaisait, et qui depuis m'a plu bien davan
tage encore. Parfois aussi nous- allions
nous promener le long de ces salines, dont
la teinte blanchâtre et la monotone unifor
mité donnent à tout ce paysage du Croisic
je ne sais quel caractère de morne tristesse.
Je n'avais point d'autre plaisir.
Il se trouvait parmi ].es baigneurs du
Croisic une famille suédoise, dont le chef,
qui jouissait de l'estime de tout le monde,
remplissait à Nantes les fonctions de con
sul de sa nation. Grave et sérieuse, comme
le sont, dit-on, les geîis du Nord, cette fa-
Les avis de Charleston vont jusqu'au 29 juil
let. Les fédéraux avaient construit des batte
ries à 350 mètres du fort Wagner et avaient
monté trois canons de siège à la distance d'un
mille et quart du fort Sumter. Les fédéraux
ont perdu en trois jours 983 hommes,'
Berlin, 11 août.
Le prince royal est arrivé à Gastein hier soir
à sept heures.
La Gazette allemande du Nord se dit en mesu
re de déclarer dénuée de fondement la nou
velle, répandue de divers côtés, que le prince
royal a été appelé par le roi à Gastein pour y
recevoir la mission d'aller représenter S. M. au
congrès de Francfort,
Madrid, 11 août..
On lit dans la Gazette de Madrid :
« Le gouvernement espagnol envoie à Ma
nille 40 millions de réaux. La Banque a sous
crit pour 8,000 piastres.
» L'importation des objets de construction
à Manille est libre. » {Havas-Bullier.)
COURS DE LA BOURSE.
cocus de clôture . * le 10 le il hausse, baisse.
3 0/0aucompt. 67.20 67.40
—Fin du mois. 67.15 67.45
•41/2 au compt. 96.20 96.40
—Fin du mois. 96. » ». »
20
30
20
»
Mes jeunes amis,
Une affectueuse insistance, à laquelle j'ai cé
dé sans effort, mappelle à l'honneur de prési
der cette cérémonie. L'an dernier, j'inspectais
la jeune garde du petit Collège et je décorais
son colonel Hervau ; cette année, monté en
grade, je passe en revue les vétérans et la
grande armée du lycée. Votre émineijt provi
seur a pensé, et je le remercie d'avoir ainsi de
viné mes faiblesses, que le ministre de l'Em
pereur serait heureux de redevenir, no fût-ce
que pour quelques instans, l'ancien élève du
lycée Louis-le-Grand, de se rajeunir à votre
contact, d'applaudir à vos succès dans cette
enceinte où se sont écoulés les premiers, j'al
lais dire les meilleurs jours de sa vie, et dont
l'aspect, si sévère qu'il soit, réveille dans son
cœur les plus douces émotions. Oui, c'est bien
toujours mon cher et vieux collège avec ses
sombres murailles qui jettent à la gaîté de vo
tre âge un impuissant défi.
Le voyage de l'Empereur au Pin laissera
un vif souvenir dans ces contrées, centre
■d'unenrûduction chevali ne,si importante!,
^éT^Sfrfernonte aux temps les plus reculés;
le Perche, le Cotentin, le Merlerault, sur
tout, qui donne des produits.'si renom
més, avaient de nombreux et importans
représentans dans cette fête hippique, et
l'on a appris avec reconnaissance que
l'Empereur avait ordonné la création d'un
village avec église, mairie et école, ce qui
fera cesser l'isolement du haras, établis
sement important, mais éloigné de toute
commune et n'ayant pour voisinage que
quelques hameaux.
Boniface-Demaret,
Lycée Lonis -lc -Graud.
Nous venons d'assister à la distribution
des prix du lycée Louis-le-Grand.
C'était S. Exc. M. Drouyn de Lhuys qui
présidait la séance,—M. Drouyn de Lhuys,
ancien élève de Louis-le-Grand, prix d'hon
neur au concours général de 1823, aujour
d'hui ministre des affaires étrangères.
Cette fête universitaire, cette fête de la
jeunesse et du travail, qui, dans cette se
maine chère aux familles,se reproduit dans
^ toutes les- villes de l'Empire, offrait ici un
caractère particulier. Leprésident,en effet,
est une des gloires de l'ancien lycée, qui
est resté pour lui comme une famille de la
quelle ne s'est jamais détachée sa solli
citude , môme dans les fonctions les plus
élevées, et au milieu des plus graves
préoccupations de la vie publique.
Aussi les applaudis&emens semblaient
partir de l'ame et avaient une émotion
qu'on pourrait appeler fraternelle; on sen
tait'que cette jeunesse saluait un de ses
aînés les, plus illustres et les plus aimés.
Aces touchans témoignages d'affection,
M. Drouyn de Lhuys a répondu par un
discours que nous sommes heureux de re
produire, et qui obtiendra auprès de l'im
mense public l'éclatant succès de sympa
thie qu'il a obtenu auprès de son jeune au
ditoire.
Elévation de pensées, distinction litté
raire, haute intelligence de la vie de son
temps, telles sont les principales qualités
qui distinguent cette allocution d'une élo
quence à la fois si aimable et si noble.
Le dernier trait surtout enlèvera tous les
/
suffrages comme il a enlevé tous les ap-
plaudissemens de ces recrues de la géné
ration nouvelle : « Chacun de vous, a
dit M. Drouyn de Lhuys, peut trouver
» au fond de son pupitre un bâton de ma»
réchal, »
Dans la bouche de M. Drouyn de Lhuys,
cette belle parole . avait l'autorité d'un
exemple.
Paulin Limayrac.
«Tou t change autour de lui, lui seul ne change pas. »
Et n'était la coupe plus élégante de vos uni
formes, je me croirais encore en 1823, lors
que j'attendais comme vous, avec la même
joie et la même impatience, ces couronnes
qu'aucune autre palme ne fait oublier.
N'allez pourtant pas croire, mes jeunes amis,
que mon culte pour le passé me rende l'en
nemi .de toute inriovation^qui réalise un pro
grès. Ma voix dénonça la première à l'Empe
reur la vétusté de ces murailles qui menacènt
ruine, et supplia le cœur maternel de l'Impé
ratrice, au nom du Prince Impérial, de ne pas
souffrir plus longtemps que l'Université retînt
votre jeunesse captive dans une aussi téné
breuse demeure.
Tout à l'heure encore, lorsque j'admirais
dans votre voisinage le lycée Saint-Louis dé
veloppant sa somptueuse façade sur la magni
fique voie qui a remplacé l'étroite et tortueuse
rue de La Harpe, j'ai éprouvé un sentiment de
jalousie et j'ai appelé de mes vœux le moment
. désormais prochain où les vénérables voûtes
de notre lycée tomberont à leur tour pour faire
place à des constructions plus en harmonie avec
la splendeur de ces quartiers renouvelés parle
zèle infatigable de nos Ediles sous l'inspiration
d'une volonté auguste. Et cependant je ne vous
promets pas de voir d'un œil stoïque l'impi
toyable marteau profaner mes souvenirs. Com
me ce-matelot congédié qui, assis sur lerivage,
fondait en larmes en fixant ses regards sur son
vieux navire dont la hache déchirait les flancs
délabrés, moi aussi je sentirai défaillir mon
courage en contemplant les débris du vaisseau
qui porta ma jeunesse sur une mer paisible.
Mais, comme le disait l'an passé une des
gloires de nos Académies, M. Dumas : « Votre
» lycée sera rajeuni, il ne sera pas transfor-
•» mé : ses traditions seront respectées , car
» cette maison a son histoire. » Cette histoire,
vous venez de l'entendre racontée en termes
aussi judicieux qu'é!oquen3 par le savant pro
fesseur qui vous a parlé avant moi.
Ce qui ne changera pas du lycée Louis-le-
Grand, c'est sa vigoureuse discipline, c'est cette
tradition d'un enseignement élevé, à la fois
religieux et libéral, qui, pour rappeler une
parole célèbre, fait des hommes et non des
bacheliers ; c'est cet esprit de noble émulation
qui se perpétue comme l'honneur d'un régiment
dont lo drapeau a été glorifié par la victoire;
c'est enfin cette virilité de caractère et de sen
timens que nous retrouvons,' en dehors de cet
te enceinte, au service do toutes les grandes
idées, de toutes les grandes causes, au milieu
de toutes les crises qui agitent les sociétés mo
dernes et quQ le génie do l'Empire traverse
avec sérénité.
Voilà, Messieurs, ce qui fait la force de Louis-
le-Grand et notre confiance dans ses destinées.
Aussi son expansive énergie ne reste pas confi
née dans ces murs. Louis-le-Grand est une mé
tropole qui fonde des colonies. Déjà, sous les
beaux ombrages de son splendido parc de Van-
ves, s'est élevée une succursale qui abrite l'es
saim de ses plus jeunes nourrissons; Vanves,
oasis de l'Université, délicieuse retraite où se
trouvent réunies, à la grande joie des mères
de famille, toutes les conditions de bien-être
que peut rêver pour ces chers enfans Ta plus
soucieuse tendresse !
Ces soins délicats, ces ménagemens prodi
gués à la jeunesse répondent à un besoin gé
néral de notre époque, et je ne crains pas
d'ajouter.à un progrès réel de notre état social.
En effet, à l'autorité sévère et quelquefois ru
de des aïeux, a succédé une familiarité affec
tueuse qui n'exclut point le respect. N'ai-jepas
tout près de moi, sous vos 3 r eux même, le
modèle, ainsi que la justification de cette mé
thode, et ne puis-je pas vous montrer com-
meat un Directeur habile sait unir à la ferme
té de la raison les sentimens d'une bienveil- i
lance paternelle, et réussit, par cette heu
reuse alliance, à augmenter chaque jour la
renommée de Louis-le-Grand ? Non , malgré,
les modernes délicatesses d'une civilisation'
plus raffinée, vos mâles courages ne se sont'
point énervés dans les délices de Capoue! J'en
atteste les lauriers qu'hier encore vous avez
cueillis dans le champ du concours général, et
ces 30 prix, ces 120 nominations que vous avez
inscrits sous cette date dans les glorieuses an
nales de notre lycée !
En avant donc, mes jeunes amis ! Comme
ces coureurs an ligues dont parle Lucrèce, trans-,
mettez, brillant d'un nouvel éclat aux mai.ijs
de la génération qui va vous suivre, le flam- ',
beau des fortes études que nous avions déposé
dans les vôtres. Sous ces favorables auspjggs,.
venez prendre dans l'arsenal qui vous est ou
vert, les armes dont vous aurez besoin pour
soutenir la lutte de la vie. Faites voir au
monde, suivant l'heureuse expression d'Ho- -
race : ' :
Quid meus ritè, quid indoles
Nu tri ta faustis sub penetralibus
Possit. n
Marchez la tête haute, la main posée sur vo
tre cœur tranquille, l'œil fixé sur ces astres
lumineux qu'on nomme Vérité, Justi<9f> Hon
neur, et rappelez-vous que, grâce aux institu
tions sagement et sincèrement démocratiques
qui régTssënt la Frâne^-ehactfBi de-veiw^pètrt *
trouvër.auXoiid.jle son pupitre un bâton de
maréchal 1
naissant ,
son caractè-
Le discours d'usage a été prononcé par
M. Hatzfeldt, professeur de rhétorique;
nous empruntons à ce remarquable dis
cours le passage suivant :
«Au milieu de tant de souvenirs qui meuren
en nous, que chaque année semble emporter
un à un, s'il en est un qui ne vieillisse pas,
c'est celui-là, jeunes élèves. On ne l'oublie
guère, cette patrie de l'enfance, même lors
qu'on est devenu membre de la grande patrie.
Voyez, le jour de la saint Cliarlemagne, se réu
nir autour de la table de votre banquet; voyez
aujourd'hui se presser dans cette enceinte tant
d'hommes supérieurs, comme vous élevés ja
dis dans les murs de ce lycée.
«Voyez le plus éminent de tous, ce ministre
dont le regard vigilant embrasse les intérêts du
monde entier, oubliant un moment, pour pré
sider cette fête de la jeunesse, et l'Amérique dé
chirée par une guerre fratricide, et 2e Mexique
où l'anarchie vaincuepar nosarmes a laissé tant
dé ruines à réparer, et la Pologne frémissante.
Qui peut valoir cette insigne honneur à votre
lycée? Comment un des premiers de l'Etat,
s'est-il détourné des graves intérêts qui le ré
clament pour venir au milieu de vous? Pour
quoi veut-il vous adresser, de cette voix élo— -
quente qui-vous est chère, quelques-unes de
ces paroles q-u'oii n'oublie pas?
»D'où vient qu'il aime votre jeune génération,
qu'il s'intéresse à vos travaux, à vos succès, a
votre avenir? C'est qu'il a comme vous grandi
dans cette demeure! C'est qu'il n'a pas oublié
cette première patrie où il apprit à servir glo
rieusement la patrie de l'âge viril ; c'est qu'il,
garde pieusement dans son cœur le souvenir
de ce lycée qu'honora sou mérite
comme aujourd'hui son talent et
re illustrent la France. »
Louis-le-Grand a obtenu au Concours géné
ral 30 prix et 90 accessits, en tout 120 nomi-'
nations. Le lycée Charlemague, qui le suit de
plus près, a eu 22 prix et 58 accessits. Le grand ;
prix d'histoire de rhétorique a été obtenu par
un élève de Louis-le-Grand.
fLyci-e Oiarlcaiagac.
La distribution des prix a eu lieu aujour
d'hui au lycée Cliarlemagne, sous la prési
dence de M. Dumas, sénateur.
' 'Le discours d'usage, prononcé par M. Tliié-
not, professeur d'histoire, traitait de la Critique
historique. C'est une œuvre bien sérieuse et forte'
qui a été écoutée avec le plus vif intérêt. Le:
passage où sont appréciés les plus célèbres his
toriens de notre temps a été surtout fort re
marqué.
Le président s'est levé ensuite et a félicité le
lycée de ses beaux succès de la veille au con
cours général : les prix d'honneur, de philoso
phie et de rhétorique, le 2° prix et le 1" acces
sit de mathématiques spéciales, le 1" prix de
discours français, le 1" prix de dissertation la
tine ; en tout 23 prix et un grand nombre de.
nominations.
Après ''allocution de M., le président, fré
quemment interrompue par des applaudisse-
înens chaleureux, M. Broca, censeur des étu
des, a proclamé les prix et l'es accessits.' Voici
les noms des élèves qui ont été le plus souvent:'
nommés : Mathématiques spéciales : Brisse,
Amigue, Narschère. — Philosophie : Maréchal,
Lablauhe, Didon.— Clauses supérieures : Diefz,
Lantoine, Lallier, Bertagne, de la Condarnine,
Mallet, Marquisan, Piehou, Jallifler, Pierredon,
Delair, Talayrach, Hobineau, Du val, Buzy,Réco-
pé, Friquet.— Classes de grain maire : Henriet,
Magne, Guedencv, Sclilegel, Dlaniho, Profillet, ■
N'ast, Babin, Rourgeois, Noé.— Classes éie'men-
taires : Edv, de Fréville, Legendre, Lévy,
Huiilard, Leroy, Lannay, Louis, David, Des-
mille,'qhi ne se mêlait guère aux joies
bruyantes, occupait dans un quartier pai
sible et à l'écart une petite maison voisine
de la nôtre. Les Backmann, — c'était leur
nom,*—se lièrent peu à peu avec nous. La
famille se composait du mari et de lafem-
me, qui s'adoraient, et de deux enfans
-beaux comme des anges, et qui s'étaient
pris pour moi d'une de ces belles pas
sions sans cause et sans raison, qui sont
le propre de leur âge. Presque toujours
chez nous, ils ne pouvaient me quitter saas
larmes, et ils devenaient ainsi comme le
trait d'union vivant et charmant entre nos
deux familles.
Cette intimité, qui nous était chère à
tous, durait depuis un mois, lorqu'un soir,
en prenant le thé, M. Backmann nous an
nonça qu'un de ses proches parens, son
grand oncle maternel, un M. de Fersen,
qui revenait d'Algérie, voulait bien se dé
ranger de sa
devait, du rest
route pour les visiter. Il ne
<, passer auprès d'eux que
quelques jours; "car il tenait à rentrer
dans son pays avant les froids de l'hiver
et les tempêtes de l'automne, si terribles
dans la Baltique.
— Il arrive demain , ajouta Mme Back
mann, et comme nous tenons à fêter son
arrivée, il faut que. nos aimables voisines
viennent dîner avec nous sans façon.
Nous acceptâmes. Ma pauvre mère ,
qui aimait à se parer de moi, comme du
seul joyau qui lui restât, prit plaisir à me
faire belle. Aussi, quand nous entrâmes
dans la chambre du pêcheur, arrangée en
salon par Mme Backmann. avec le goût
qu'elle apportait-à toute chose, le galant
consul, jetant un coup-d'œil satisfait sur
ma robe blanche, mes rubans bleus , et
deux ou trois brins de bruyère sauvage
que ma mère avait fourrés, je ne sais pour
quoi, dans mes.cheveux, me demanda si
j'avais juré de faire la conquête de toute
la Suède.
— Les Suédoises gardent trop bien ce
qui leur appartient ! répondis-je eu em
brassant Mme Backmann.
Je crois que je parlais encore lorsque je
vis.apparaître, — je me sers à dessein de
ce mot, car sa vue eut pour moi tout le
caractère d'une apparition,—celui qui, de
puis lors, n'a plus cessé d'habiter ma pen
sée.
— Permettez-moi, Mesdames, fit le con
sul en se tournant vers nous, de vous pré
senter un de nos meilleurs amis et de nos
plus proches parens,M. Hérald de Fersen.
— Il est un peu jeune pour un grand
oncle, murmura ma mère à l'oreille de
Mme Backmann, après avoir répondu au
salut profond de l'étranger.
— Oh ! celui-ci n'est qu'un simple cou
sin ! Mais patience, l'oncle va venir.
Pour moi j'étais restée sans paroles.
Je contemplais Hérald de Fersen comme
j'eusse fait d'un archange, dans un étonne-
ment muet et plein de charme. Non point,
certes que je fusse sous l'empire de sa - re
marquable beauté : ces sortes de fascina
tions sont, grâce à Dieu ! assez rares chez
la femme, plus rares encore chez la jeune
fille : c'est par l'âme que nous aimons, et
ce que nous aimons avant tout, c'est l'âme!
Mais c'était l'âme qui rayonnait en lui et
qui le faisait si beau ! M. de Fersen res
semblait ' si peu aux jeunes gens qui si
trouvaient alors au Croisic, ou , pour
mieux dire, il ressemblait si peu à tous
les hommes, qu'en le voyant je crus me
trouver en face d'an être d'un inonde su
périeur.
Ne riez point de moi, mon ami, conti
nua Mme Delaunay après s'être arrêtée un
instant et comme recueillie en elle -même,
ces souvenirs sont bien lointains déjà, et
je les ai arrosés de tant de larmes quo leur
prestige a dû pâlir... Eh ! cependant, au
jourd'hui encore, je retrouve en moi mes
impressions aussi puissantes et aussi vi
ves que je les éprouvais il y a cinq ans
bientôt... Vous l'avez sans doute remar
qué : les hommes, à présent, ne sont plus
} £ . v vy.-- 1JU
jeunes en France : tantôt des passions trop
' ont .flétris; tantôt les préoccu-
prêcoees les — mut-ut ic-a pi euecu-
pations d'une vie difficile ont projeté sur
euv je ne sais quelle ombremorose. Lui, au
contraire, il était jeune, vraiment jeune,—
la jeunesse éclatait, et bri lait sur son vi-.
sage;,on ne pouvait lo voir sourire sans
penser à une fleur qui s'entrouvre; sur
son front pur, élevé, trop blanc peut -être
pour un iront d'homme, il me semblait re- „
connaître l'empreinte encore vierge du *
doigt de Dieu. Un toi front ne pouvait abri-'
ter néreuses; des cheveux blonds couronnaient
ses tempes transparentes, et s'alliaient har
monieusement à cette délicatesse de teint
inconnue dans nos climats , privilège ex
clusif de ceux qui' vivent dans l'éternelle
fraîcheur des régions boréales, et qui ré
fléchissent ainsi' sur leurs traits la blan
cheur immaculée des neiges de leurs mon •
BUREAUX A PARIS : rue de Valois (Palais-jRoyaJ),' hî 10 j
ABONN
MERCREDI 12 AOUT 1865.
ABONNEMENS DE PARIS.
trois mois;..;"-.':'.;
'six mois..r.
dn
rocs tKS PATSETBiNGEBS, VOÎT le tabtâ£Ù
publié les 5 et 20 de |Soh.aque mois.
.Imp. l; eoijifacs , r. des Bons-Çnfans, 19.
Le mode d'abonnement leuplus simple est l'envol d'an bon de poste ou d'un effet
sur Paris, à l'ordre d&4' administrateur du journal, rue de Valois, n° 10.
JOURNAL POLITIQUE, LÏTTÉUA.IEE, UNIVERSEL.
. . ~
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I Les articles déposés ne sont pas rendu&i .. I
trois mois.ï...'.y; 43 e&
six mois... v." 26 fr.
dn an/...., t. fr.
dn numéro m centimes;
Les abonnemana datent des i" et 16-
de chaque mois.
Annonces sont reçues chez M. Paris , rue Notre-liame-des-Victoires, n* 40
min, îo *
Les derniers évènemens de Mexico sont
diversement jugés par la presse anglaise.
Le Times y voit l'indice d'une allian
ce de plus en plus étroite entre la
France et l'Autriche. Le Daily-News se livre
contre la politique française à d'injustes
attaques , et le Globe à d'inconvenantes
bouffonneries.
L'Evening-Star se demande si l'archiduc
Maximilien acceptera la couronne du Mexi
que, et il craint que lorsque la question sera
vidée entre les Etats du Nord et du Sud de
l'Amérique, ces Etats ne contestent à la
France le droit d'établir un empire « sur
un sol que- le républicanisme américain
considère comme sa patrie. » Cette appré
hension nous paraît assez mal fondée, par
la double raison que les fédéraux et les
confédérés nous semblent séparés pour ja
mais et que, dussent-ils reformer l'Union,
ils n'auraient rien à voir dans un état de
choses créé au Mexiqu& par le libre vœu
des populations, et noà imposé par l'épée
de la France.
"Le Stto témoigne^- ^îisVîçstfeiçaes^rsui-
cette réunion, ce qui se passe aujourd'hui
doit lui prouver qu'il s'est trompé dans
son calcul. Le Congrès ne fait plus l'objet
d'un doute. On sait déjà que les principaux
souverains allemands ont -accepté l'in
vitation de l'empereur François-Joseph;
les autres très certainement s'empres
seront de les imite». C'est le roi de Saxe
qui, le premier, a envoyé son adhésion;
puis sont venues les réponses favorables
des rois de Wurtemberg et de Bavière.
Celle du grand-duc de Mecklembourg-
Strelitz a été surtout remarquée par la vi
vacité des sentimens dont elle est em
preinte. Les deux princes hessois n'ont
pas hésité un seul instant, et l'on pouvait
tenir pour certain l'assentiment du duc
Ernest de Saxe-Cobourg-Gotha, qu'un
journal.appelle «legrand connétable de
l'Allemagne. »
Des invitations ont été également adres
sées aux rois de Danemark et des Pays-
Bas comme membres de la Confédération
germanique. On prétend en outre que le
cabinet de Vienne aurait expédié des dé
pêches aux puissances non allemandes
pour leur faire connaître l'objet de la réu
nion de Francfort.
soutenir
vanSj la satisfaction que lui" causent la
proclamation de l'empire au Mexique et
le choix.de l'archiduc Maximilien comme
souverain :
«En élisant ce prince, le Mexique catho
lique s'est assuré un souverain catholi
que. Un prince autrichien a été élu par le
Mexique au moment même où le gouver
nement de Vienne commence à être re
gardé avec une grande faveur en Eu
rope, parmi les partisans les plus ar-
dôns de la monarchie constitutionnel
le, comme la- meilleure de toutes les
formes de gouvernement. Pour les insti
tutions républicaines, déchirées de l'Amé
rique du Nord, la nouv&lle de la transfor
mation du Mexique en empire, sous le
sceptrejde S. M. Maximilien I er , ne peut pas
être regardée autrement que comme un
coup terrible et un grand dé'couragemènt.
Quant à l'Autriche elle-même, l'effet de ce
choix de l'un des archiducs pour empereur
futur d'un Etat conquis par l'épée de la
France, ne peut que tendre à resserrer da
vantage et avec plus d'harmonie l'Autri
ché et là France. Résultat très propice- as
surément pour les Polonais! Voilà les
principales raisons (et il y . en a. encore
beaucoup d'autres) pour lesquelles nous
croyons être en droit d'envisager avec sa
tisfaction l'élection par le Mexique de
l'empereur Maximilien !»
Si le Sun envisage l'élection de l'archiduc
Maximilien comme une chose heureuse
pour lai cause de la Pologne, le journal
Y Italie pense de son côté qu'elle pourra
servir lei intérêts italiens. En parlant de
l'indépendance de Venise «quisait, dit-il,
si ce c'est pas son aurore qui vient de se
lever en Amérique avec le duc Maximilien
proclamé empereur au Mexique.» ■ ■ . . '
On pensera sans doute que c'est' aller. )
bien vite et bien loin, d'autant plus que
l'Italie déclare, dans le même numéro, que
des renseignemens dignes de foi la portent
à douter de l'acceptatioii du prince autri
chien. Nous plaçons ces renseignemens de
l'Italie sur le même rang que ses conjectu
res;: il faut attendre que le Mexique se soit
prononcé définitivement pour savoir si
l'archiduc acceptera et pour apprécier les
conséquences de son acceptation.
La presse espagnole n'est qu a moitié sa
tisfaite : il lui aurait convenu qu'un prin
ce espagnol fût appelé au trône du Mexi
que. Toutefois les espérances qu'elle avait
pu nourrir à ce sujet, lorsque l'expédition
fut entreprise, ont eu le temps de se dis
siper; aussi donne-t-elle Son approbation
au nouveau régime politique proclamé à
Mexico. «Il ne reste plus, dit le Télégra
phe de Barcelone , qu'à faire des vœux pour
l'empire et l'empereur du Mexique. »
La Prusse restera-t-elle à l'écart de ce
mouvement qui paraît général en Allema
gne? Suivant le Botschafter , la réponse du
roi est conçue de telle façon qu'elle ne sau
rait être considérée comme son dernier
mot. Il se pourrait donc que Guillaume
I er se décidât, au dernier moment, à . sè
à se faire représenter à Francfort. Une dé
pêche nous annonce, en effet, qu'hier le
prince royal a été appelé à Gastein, par un
télégramme du roi, et la Gazette allemande
du Nord , en annonçant cette nouvelle, ajou
te que le voyage du prince royal a une
haute portée politique. Selon toute proba
bilité, il s'agirait de l'envoi du prince au
Congrès des souverains. S'il en est ainsi,
une faute grave sera épargnée au gouver
nement prussien, car, ainsi que le dit le
Vaterland, l'Autriche et les autres souve
rains allemands verraient un acte de dé
fiance au plus haut degré dans le refus
du roi Guillaume, et les conseillers de ce
prince encourraient une grave responsa
bilité devant l'Allemagne entière.
, JONCIKRES.
Si le roi de Prusse, en refusant ou en
réservant son adhésion au Congrès prin
cier de Francfort^ a cru pouvoir empêcher
Feuilleton dii Constitutionnel, 12 août.
EN- PROVINCE
^ TELEGRAPHIE PRIVEE
Londres, 11 août.
Le Horning-Post dit que le comte Edouard
Gapski, l'un des grands propriétaires de Litliua-
nie, condamné à mort par MourawlefF, n'avait
pas pris une part active à l'insurrection.
La reine Victoria part aujourd'hui pour l'Al
lemagne. Elle sera de retour en Angleterre le
10 septembre."
Londres, 11 août.
Le Daily -News attaque la politique française
au Mexique. Il croit que l'archiduc Maximilien
n'acceptera pas Je trône qui lui est offert.
Londres, 11 août. »
Le Times attache une grande importance à
l'arrangement qui vient de se produire au
Mexique. Il aura suivant lui deux conséquen
ces importantes : il tondra constamment, en ef
fet à unir la France et l'Autriche,, et à désunir,
la France et le' gouvernement fédéral d'Améri
que. Cet événement ne peut pas manquer de
rapprocher la France et l'Autriche.
autorités militaires doiven
qu'au bout.
Une bataille est attendue sur le Rappahan
nock.
Le siège de Charleston continue.
Les confédérés ont été battus dans le Ken
tucljy et le Tennessee.
Les fédéraux se sont emparés de la ville de
.Braslieur, ils marchent sur Mobile.
Berlin, 10 août.
La Gazette de la Croix annonce que le prince
royal a été appelé à Gastein par un télégram
me du roi. Il est parti samedi soir.
La Gazette allemande du Nord dit que le voya
ge du prince royal à Gastein a une haute por
tée politique.
Berlin, H août.
Une lettre particulière de Varsovie, en date
du 10 août, annonce que deux pelotons de lan
ciers et cinquante cosaques escortant deux four
gons chargés de numéraire, ont été attaqués et
dispersés par les insurgés dans les environs de
Lublin. La lutte a duré deux heures. Les In
surgés se sont emparés de trois millions.de
roubles en argent et d'une certaine quantité
d'armes et de munitions.
Francfort, 11 août.
La Gazette d'Allemagne du Sud dit" que l'ac
ceptation du trône du Mexique par l'archiduc
Maximilien prouverait une entente préalable
entre l'Autriche et la France sur cette question
et sur d'autres.
Cracovie, 11 août, 6 h. du matin.
Les deux détachemens de Krysinski et de
Wierzbicki (ce dernier commandé par Wagner)
ont attaqué les Russes à l'imppeviste-, *te t»,- à,
Polichna, les ont poursuivis sur un parcours
de deux lieues et leur ont fait éprouver des
pertes sensibles.
Les Russes concentrent de toutes parts des
forces aux environs de Janow. Les détache
mens polonais reçoivent de leur côté des ren
forts.
Vienne, 10 août.
On a reçu la nouvelle que les ducs de Bruns
wick et de Saxe-Cobourg ont formellement
promis de participer au congrès du 16 août.
Vienne, 11 août.
L'archiduc Maximilien arrive demain pour
assister à un conseil de famille.
Turin, 10 août.
La Chambre des députés et le Sénat sont
convoqués pour entendre demain la lecture
du décret royal d'ajournement de la session
parlementaire.
Emprunt italien, 71.93.
Emprunt nouveau,'72.33.
Marseille, 11 août.
Le Péluse, des messageries impériales, dont
l'arrivée à Messine avec les malles, les passa
gers et les colis de l'Indo-Chine avait eu lieu le
8, est arrivé ici ce matin à quatre heures.
Shanghaï, 22 .juin.
La tranquillité règne dans les environs.
L'armée impériale est devant Nankin. •
Les affaires du Japon sont provisoirement
arrangées. •
L'hôtel de l'ambassade américaine a été
brûlé.
On mande de Melbourne (Australie), le 23
juin, que les insurgés ont été mis en déroute
à Taranaki par le colonel Cameron.
Madrid, 10 août.
On ouvre partout des souscriptions en fa
veur dos victimes de Manille.
Le gouvernement a.envoyé par le télégraphe
l'ordre de secourir, par tous les moyens pos
sibles, les familles des victimes.
La Época regrette qu'on n'ait pas appelé un
prince espagnol au trône du Mexique, mais
elle approuve l'établissement de l'empiie dans
ce pays. | [llavas-Bullkr.)
New-York, 30 juillet.
L'armée de Meade est sur le Rappahannock,
dans" le voisinage de Falmouth.
Lee est campé entre Culpepper et Gordons-
ville dans une attitude défensive. Le corps
confédéré d'Ewell s'avanee par la vallée de la
Shenandoah, dans la direction de Frêdéricks-
burg. •
Meade ne semble pas disposé à une attaque -
contre les confédérés.
Le maire de Savannah a ordonné aux ci
toyens de cette ville de s'organiser pour la dé
fense. .•
' Le bruit court que Rosencranz s'est emparé
de Chattanoga.
Le corsaire confédéré Florida est à Bermude.
Depuis le 17 juin, la Florida a détruit douze
bàtimens.
Change 1|0, agio sur l'or 29 3/4, coton 62.
New-York, 1" août.
(Par le City ofLondon.)
Le général Burnside a proclamé l'état de siè
ge dans le Ken tucky.
Les commandans'militaires sont invités à
aider les autorités fédérales pour le maintien
des prescriptions légales et de l'iatégrité du
suffrage dans l'élection du 3 septembre. Les
juges présens aux élections doivent empêcher
tout individu du parti confédéré de voter ; lès
Voici les dépêches que nous recevons ce
soir :
Liverpool, 11 août.
Le City of London a apporté i 62/000 dollars.
New-York, 31 juillet.
Le gouvernement fédéral a décidé que la
conscription serait effectuée de vive force à
New-York. D'après le Times les opérations
commenceront le 3.
Change 141, agio sur l'or, 28 7/8; coton 62
1/2 à 63.
New-York, 1 er août.
Le bombardement du fort Wagner continue.
Le 29 juillet, les fédéraux ont élevé des batte
ries à la distance de 2o0 yards du fort. Ils ont'
aussi élevé une batterie à un peu plus d'un
mille du fort Sumter. - :
Le général Lee se trouve avec des forces conr
sidérables à Culpepper, se disposant'à la lutte.
On dit que les confédérés sous les ordres de
Johnston battent en retraite dans la direction
de Mobile, et qu'une division fédéralè est en
marche sur cette ville. Des patrouilles de ca
valerie font le service le long du Misslssipi
pour protéger la navigation jusqu'à la Nou
velle-Orléans. 0
Les confédérés ont évacué Lexington dans le
Kentucky.
New-York, 1" août.
L'armée de Lee est concentrée à Culpepper
où elle se prépare à livrer bataille. Un régi
ment confédéré garde le Rappahannock de
puis Frédéricksburg jusqu'à Eleys.
On assure que les fédéraux se sont emparés,
des hauteurs qui sont derrière Frédéricksburg.
Bragg se serait séparé de Johnston qui pren
dra pour ligne de défense le chemin de fer de
Mobile à l'Ohio entre Okolona et Mobile au sud.
VIII.
Quoique ma famille appartienne à la
plus ancienne raee de ce pays, — car je
suis une Hauteviile, et j'ai dans toutes les
Croisades des aïeux que les poètes ont
chantés, je suis née pauvre. — La révolu
tion qui a ruiné tant de maisons, n'épar
gna point la nôtre. Quand vinrent les mau
vais jours, mon grand-père suivit sur la
terre d'exil les maîtres qu'il avait aimés et
servis dans leur prospérité.. Ce courtisan du
malheur ne devait point revoir sa patrie ;
il mourut jeune et sans gloire à l'armée de
Condé, laissant en France un fils unique
en bas âge, qui fut mon père. Une fois
rendus à leur trône, et livrés aux sou
cis d'un règne orageux, nos princes ou
blièrent facilement ceux qu'ils ne voyaient
plus. Leurs grâces ne vinrent point nous
chercher jusqu'à Coutances, et mon père,
en mourant, nous laissa, ma mère et moi,
dans une médiocrité de fortune qui n'était
pas dorce.Ma mère, dont j'étais désormais 1
l'unique bonheur, m'éleva avec un soin et
un dévoûment qui furent toute sa vie. Sa
tendresse et son amour furent long-temps
toute la mienne, et elle m'aima tant que
je ne m'aperçus jamais que rien me man
quât; tout le bonheur qu'une jeune fille
peut avoir, je le trouvais près d'elle. Il y a
cinq ans, — j'en 'avais dix-neuf, — après
être allée rendre visite à des parens de
mon père, qui demeurent en Bretagne, ma
mère voulut me conduire aux bains du
Croisic. Ce fut là ma première échappée
vers le monde : j e n'étais pas encore s or tie de
l'intimité discrète de la famille, et le res
te de l'univers m'était inconnu. Vous savez
mieux que moice quesontlesvilles d'eaux,
et ces réunions de tous les luxes et de tou
tes les élégances, où les femmes font as
saut de coquetterie et de beauté, où les
hommes, qui n'ontquele plaisirpour but,
-les entourent des hommages les plus em
pressés, et les plus vifs.
Vous devez comprendre quelle impres
sion un tpl spectacle dut produire sur une
jeune créature pour laquelle tout était
nou veau, et chez qui rien n'avait encore
émoussé la puissance ni la fraîcheur de
l'émotion. Je vécus là dans une atmosphè
re excitante, pleine d'enivrement, et qui
me donnait le vertige. Il me semblait qu'il
y avait en moi comme un autre moi qui
me regardait vivre. Ce que j'éprouvai la
première fois que j'assistai à un bal, je ne
vous le dirai pas ; je ne pourrais pas vous
le dire. Un tourbillon m'emportait, et j'al
lais sans savoir où. Mais, loin de me char
mer, cotte fièvre du plaisir me devint bien
tôt douloureuse. Si jeune et si inexpéri
mentée que je fusse, je comprenais déjà
que le plaisir n'est pas le bonheur. J'a
vais, j'ai toujours eu, j'ai* encore une sorte
de timidité qui me tient éloignée de la
foule et du bruit, et si ma mère m'eût
écoutée, nous serions revenues bien vite à
Coutances.
Cette année-là, il y avait au Croisic, à ce.
que l'on m'a dit, une société choisie. Elle
se recrutait principalement dans les châ
teaux du voisinage ; les meilleures famil
les de Nantes et d'Angers fournissaient
aussi leur contingent. Jeunes hommes et
jeunes femmes s'étaient déjà groupés et
formaient de petites sociétés, c'est-à-dire
de petites coteries, dès avant notre arri
vée. Nous né cherchâmes point à nous y
mêler; ma mère savait trop bien quelle
réserve doivent s'imposer deux femmes
qu'aucun homme n'accompagne et ne pro
tège.
Aussi, après les trois ou quatre premiers,
bals, que ma mère avait voulu me faire con
naître, nous vécûmes à peu près seules.
Quand j'avais pris mon bain matinal,
nous rentrions dans nos chambres, et
nous y passions presque toutes nos jour
nées, tantôt travaillant à nos fenêtres, tan
tôt regardant la mer qui, dès lors, me
plaisait, et qui depuis m'a plu bien davan
tage encore. Parfois aussi nous- allions
nous promener le long de ces salines, dont
la teinte blanchâtre et la monotone unifor
mité donnent à tout ce paysage du Croisic
je ne sais quel caractère de morne tristesse.
Je n'avais point d'autre plaisir.
Il se trouvait parmi ].es baigneurs du
Croisic une famille suédoise, dont le chef,
qui jouissait de l'estime de tout le monde,
remplissait à Nantes les fonctions de con
sul de sa nation. Grave et sérieuse, comme
le sont, dit-on, les geîis du Nord, cette fa-
Les avis de Charleston vont jusqu'au 29 juil
let. Les fédéraux avaient construit des batte
ries à 350 mètres du fort Wagner et avaient
monté trois canons de siège à la distance d'un
mille et quart du fort Sumter. Les fédéraux
ont perdu en trois jours 983 hommes,'
Berlin, 11 août.
Le prince royal est arrivé à Gastein hier soir
à sept heures.
La Gazette allemande du Nord se dit en mesu
re de déclarer dénuée de fondement la nou
velle, répandue de divers côtés, que le prince
royal a été appelé par le roi à Gastein pour y
recevoir la mission d'aller représenter S. M. au
congrès de Francfort,
Madrid, 11 août..
On lit dans la Gazette de Madrid :
« Le gouvernement espagnol envoie à Ma
nille 40 millions de réaux. La Banque a sous
crit pour 8,000 piastres.
» L'importation des objets de construction
à Manille est libre. » {Havas-Bullier.)
COURS DE LA BOURSE.
cocus de clôture . * le 10 le il hausse, baisse.
3 0/0aucompt. 67.20 67.40
—Fin du mois. 67.15 67.45
•41/2 au compt. 96.20 96.40
—Fin du mois. 96. » ». »
20
30
20
»
Mes jeunes amis,
Une affectueuse insistance, à laquelle j'ai cé
dé sans effort, mappelle à l'honneur de prési
der cette cérémonie. L'an dernier, j'inspectais
la jeune garde du petit Collège et je décorais
son colonel Hervau ; cette année, monté en
grade, je passe en revue les vétérans et la
grande armée du lycée. Votre émineijt provi
seur a pensé, et je le remercie d'avoir ainsi de
viné mes faiblesses, que le ministre de l'Em
pereur serait heureux de redevenir, no fût-ce
que pour quelques instans, l'ancien élève du
lycée Louis-le-Grand, de se rajeunir à votre
contact, d'applaudir à vos succès dans cette
enceinte où se sont écoulés les premiers, j'al
lais dire les meilleurs jours de sa vie, et dont
l'aspect, si sévère qu'il soit, réveille dans son
cœur les plus douces émotions. Oui, c'est bien
toujours mon cher et vieux collège avec ses
sombres murailles qui jettent à la gaîté de vo
tre âge un impuissant défi.
Le voyage de l'Empereur au Pin laissera
un vif souvenir dans ces contrées, centre
■d'unenrûduction chevali ne,si importante!,
^éT^Sfrfernonte aux temps les plus reculés;
le Perche, le Cotentin, le Merlerault, sur
tout, qui donne des produits.'si renom
més, avaient de nombreux et importans
représentans dans cette fête hippique, et
l'on a appris avec reconnaissance que
l'Empereur avait ordonné la création d'un
village avec église, mairie et école, ce qui
fera cesser l'isolement du haras, établis
sement important, mais éloigné de toute
commune et n'ayant pour voisinage que
quelques hameaux.
Boniface-Demaret,
Lycée Lonis -lc -Graud.
Nous venons d'assister à la distribution
des prix du lycée Louis-le-Grand.
C'était S. Exc. M. Drouyn de Lhuys qui
présidait la séance,—M. Drouyn de Lhuys,
ancien élève de Louis-le-Grand, prix d'hon
neur au concours général de 1823, aujour
d'hui ministre des affaires étrangères.
Cette fête universitaire, cette fête de la
jeunesse et du travail, qui, dans cette se
maine chère aux familles,se reproduit dans
^ toutes les- villes de l'Empire, offrait ici un
caractère particulier. Leprésident,en effet,
est une des gloires de l'ancien lycée, qui
est resté pour lui comme une famille de la
quelle ne s'est jamais détachée sa solli
citude , môme dans les fonctions les plus
élevées, et au milieu des plus graves
préoccupations de la vie publique.
Aussi les applaudis&emens semblaient
partir de l'ame et avaient une émotion
qu'on pourrait appeler fraternelle; on sen
tait'que cette jeunesse saluait un de ses
aînés les, plus illustres et les plus aimés.
Aces touchans témoignages d'affection,
M. Drouyn de Lhuys a répondu par un
discours que nous sommes heureux de re
produire, et qui obtiendra auprès de l'im
mense public l'éclatant succès de sympa
thie qu'il a obtenu auprès de son jeune au
ditoire.
Elévation de pensées, distinction litté
raire, haute intelligence de la vie de son
temps, telles sont les principales qualités
qui distinguent cette allocution d'une élo
quence à la fois si aimable et si noble.
Le dernier trait surtout enlèvera tous les
/
suffrages comme il a enlevé tous les ap-
plaudissemens de ces recrues de la géné
ration nouvelle : « Chacun de vous, a
dit M. Drouyn de Lhuys, peut trouver
» au fond de son pupitre un bâton de ma»
réchal, »
Dans la bouche de M. Drouyn de Lhuys,
cette belle parole . avait l'autorité d'un
exemple.
Paulin Limayrac.
«Tou t change autour de lui, lui seul ne change pas. »
Et n'était la coupe plus élégante de vos uni
formes, je me croirais encore en 1823, lors
que j'attendais comme vous, avec la même
joie et la même impatience, ces couronnes
qu'aucune autre palme ne fait oublier.
N'allez pourtant pas croire, mes jeunes amis,
que mon culte pour le passé me rende l'en
nemi .de toute inriovation^qui réalise un pro
grès. Ma voix dénonça la première à l'Empe
reur la vétusté de ces murailles qui menacènt
ruine, et supplia le cœur maternel de l'Impé
ratrice, au nom du Prince Impérial, de ne pas
souffrir plus longtemps que l'Université retînt
votre jeunesse captive dans une aussi téné
breuse demeure.
Tout à l'heure encore, lorsque j'admirais
dans votre voisinage le lycée Saint-Louis dé
veloppant sa somptueuse façade sur la magni
fique voie qui a remplacé l'étroite et tortueuse
rue de La Harpe, j'ai éprouvé un sentiment de
jalousie et j'ai appelé de mes vœux le moment
. désormais prochain où les vénérables voûtes
de notre lycée tomberont à leur tour pour faire
place à des constructions plus en harmonie avec
la splendeur de ces quartiers renouvelés parle
zèle infatigable de nos Ediles sous l'inspiration
d'une volonté auguste. Et cependant je ne vous
promets pas de voir d'un œil stoïque l'impi
toyable marteau profaner mes souvenirs. Com
me ce-matelot congédié qui, assis sur lerivage,
fondait en larmes en fixant ses regards sur son
vieux navire dont la hache déchirait les flancs
délabrés, moi aussi je sentirai défaillir mon
courage en contemplant les débris du vaisseau
qui porta ma jeunesse sur une mer paisible.
Mais, comme le disait l'an passé une des
gloires de nos Académies, M. Dumas : « Votre
» lycée sera rajeuni, il ne sera pas transfor-
•» mé : ses traditions seront respectées , car
» cette maison a son histoire. » Cette histoire,
vous venez de l'entendre racontée en termes
aussi judicieux qu'é!oquen3 par le savant pro
fesseur qui vous a parlé avant moi.
Ce qui ne changera pas du lycée Louis-le-
Grand, c'est sa vigoureuse discipline, c'est cette
tradition d'un enseignement élevé, à la fois
religieux et libéral, qui, pour rappeler une
parole célèbre, fait des hommes et non des
bacheliers ; c'est cet esprit de noble émulation
qui se perpétue comme l'honneur d'un régiment
dont lo drapeau a été glorifié par la victoire;
c'est enfin cette virilité de caractère et de sen
timens que nous retrouvons,' en dehors de cet
te enceinte, au service do toutes les grandes
idées, de toutes les grandes causes, au milieu
de toutes les crises qui agitent les sociétés mo
dernes et quQ le génie do l'Empire traverse
avec sérénité.
Voilà, Messieurs, ce qui fait la force de Louis-
le-Grand et notre confiance dans ses destinées.
Aussi son expansive énergie ne reste pas confi
née dans ces murs. Louis-le-Grand est une mé
tropole qui fonde des colonies. Déjà, sous les
beaux ombrages de son splendido parc de Van-
ves, s'est élevée une succursale qui abrite l'es
saim de ses plus jeunes nourrissons; Vanves,
oasis de l'Université, délicieuse retraite où se
trouvent réunies, à la grande joie des mères
de famille, toutes les conditions de bien-être
que peut rêver pour ces chers enfans Ta plus
soucieuse tendresse !
Ces soins délicats, ces ménagemens prodi
gués à la jeunesse répondent à un besoin gé
néral de notre époque, et je ne crains pas
d'ajouter.à un progrès réel de notre état social.
En effet, à l'autorité sévère et quelquefois ru
de des aïeux, a succédé une familiarité affec
tueuse qui n'exclut point le respect. N'ai-jepas
tout près de moi, sous vos 3 r eux même, le
modèle, ainsi que la justification de cette mé
thode, et ne puis-je pas vous montrer com-
meat un Directeur habile sait unir à la ferme
té de la raison les sentimens d'une bienveil- i
lance paternelle, et réussit, par cette heu
reuse alliance, à augmenter chaque jour la
renommée de Louis-le-Grand ? Non , malgré,
les modernes délicatesses d'une civilisation'
plus raffinée, vos mâles courages ne se sont'
point énervés dans les délices de Capoue! J'en
atteste les lauriers qu'hier encore vous avez
cueillis dans le champ du concours général, et
ces 30 prix, ces 120 nominations que vous avez
inscrits sous cette date dans les glorieuses an
nales de notre lycée !
En avant donc, mes jeunes amis ! Comme
ces coureurs an ligues dont parle Lucrèce, trans-,
mettez, brillant d'un nouvel éclat aux mai.ijs
de la génération qui va vous suivre, le flam- ',
beau des fortes études que nous avions déposé
dans les vôtres. Sous ces favorables auspjggs,.
venez prendre dans l'arsenal qui vous est ou
vert, les armes dont vous aurez besoin pour
soutenir la lutte de la vie. Faites voir au
monde, suivant l'heureuse expression d'Ho- -
race : ' :
Quid meus ritè, quid indoles
Nu tri ta faustis sub penetralibus
Possit. n
Marchez la tête haute, la main posée sur vo
tre cœur tranquille, l'œil fixé sur ces astres
lumineux qu'on nomme Vérité, Justi<9f> Hon
neur, et rappelez-vous que, grâce aux institu
tions sagement et sincèrement démocratiques
qui régTssënt la Frâne^-ehactfBi de-veiw^pètrt *
trouvër.auXoiid.jle son pupitre un bâton de
maréchal 1
naissant ,
son caractè-
Le discours d'usage a été prononcé par
M. Hatzfeldt, professeur de rhétorique;
nous empruntons à ce remarquable dis
cours le passage suivant :
«Au milieu de tant de souvenirs qui meuren
en nous, que chaque année semble emporter
un à un, s'il en est un qui ne vieillisse pas,
c'est celui-là, jeunes élèves. On ne l'oublie
guère, cette patrie de l'enfance, même lors
qu'on est devenu membre de la grande patrie.
Voyez, le jour de la saint Cliarlemagne, se réu
nir autour de la table de votre banquet; voyez
aujourd'hui se presser dans cette enceinte tant
d'hommes supérieurs, comme vous élevés ja
dis dans les murs de ce lycée.
«Voyez le plus éminent de tous, ce ministre
dont le regard vigilant embrasse les intérêts du
monde entier, oubliant un moment, pour pré
sider cette fête de la jeunesse, et l'Amérique dé
chirée par une guerre fratricide, et 2e Mexique
où l'anarchie vaincuepar nosarmes a laissé tant
dé ruines à réparer, et la Pologne frémissante.
Qui peut valoir cette insigne honneur à votre
lycée? Comment un des premiers de l'Etat,
s'est-il détourné des graves intérêts qui le ré
clament pour venir au milieu de vous? Pour
quoi veut-il vous adresser, de cette voix élo— -
quente qui-vous est chère, quelques-unes de
ces paroles q-u'oii n'oublie pas?
»D'où vient qu'il aime votre jeune génération,
qu'il s'intéresse à vos travaux, à vos succès, a
votre avenir? C'est qu'il a comme vous grandi
dans cette demeure! C'est qu'il n'a pas oublié
cette première patrie où il apprit à servir glo
rieusement la patrie de l'âge viril ; c'est qu'il,
garde pieusement dans son cœur le souvenir
de ce lycée qu'honora sou mérite
comme aujourd'hui son talent et
re illustrent la France. »
Louis-le-Grand a obtenu au Concours géné
ral 30 prix et 90 accessits, en tout 120 nomi-'
nations. Le lycée Charlemague, qui le suit de
plus près, a eu 22 prix et 58 accessits. Le grand ;
prix d'histoire de rhétorique a été obtenu par
un élève de Louis-le-Grand.
fLyci-e Oiarlcaiagac.
La distribution des prix a eu lieu aujour
d'hui au lycée Cliarlemagne, sous la prési
dence de M. Dumas, sénateur.
' 'Le discours d'usage, prononcé par M. Tliié-
not, professeur d'histoire, traitait de la Critique
historique. C'est une œuvre bien sérieuse et forte'
qui a été écoutée avec le plus vif intérêt. Le:
passage où sont appréciés les plus célèbres his
toriens de notre temps a été surtout fort re
marqué.
Le président s'est levé ensuite et a félicité le
lycée de ses beaux succès de la veille au con
cours général : les prix d'honneur, de philoso
phie et de rhétorique, le 2° prix et le 1" acces
sit de mathématiques spéciales, le 1" prix de
discours français, le 1" prix de dissertation la
tine ; en tout 23 prix et un grand nombre de.
nominations.
Après ''allocution de M., le président, fré
quemment interrompue par des applaudisse-
înens chaleureux, M. Broca, censeur des étu
des, a proclamé les prix et l'es accessits.' Voici
les noms des élèves qui ont été le plus souvent:'
nommés : Mathématiques spéciales : Brisse,
Amigue, Narschère. — Philosophie : Maréchal,
Lablauhe, Didon.— Clauses supérieures : Diefz,
Lantoine, Lallier, Bertagne, de la Condarnine,
Mallet, Marquisan, Piehou, Jallifler, Pierredon,
Delair, Talayrach, Hobineau, Du val, Buzy,Réco-
pé, Friquet.— Classes de grain maire : Henriet,
Magne, Guedencv, Sclilegel, Dlaniho, Profillet, ■
N'ast, Babin, Rourgeois, Noé.— Classes éie'men-
taires : Edv, de Fréville, Legendre, Lévy,
Huiilard, Leroy, Lannay, Louis, David, Des-
mille,'qhi ne se mêlait guère aux joies
bruyantes, occupait dans un quartier pai
sible et à l'écart une petite maison voisine
de la nôtre. Les Backmann, — c'était leur
nom,*—se lièrent peu à peu avec nous. La
famille se composait du mari et de lafem-
me, qui s'adoraient, et de deux enfans
-beaux comme des anges, et qui s'étaient
pris pour moi d'une de ces belles pas
sions sans cause et sans raison, qui sont
le propre de leur âge. Presque toujours
chez nous, ils ne pouvaient me quitter saas
larmes, et ils devenaient ainsi comme le
trait d'union vivant et charmant entre nos
deux familles.
Cette intimité, qui nous était chère à
tous, durait depuis un mois, lorqu'un soir,
en prenant le thé, M. Backmann nous an
nonça qu'un de ses proches parens, son
grand oncle maternel, un M. de Fersen,
qui revenait d'Algérie, voulait bien se dé
ranger de sa
devait, du rest
route pour les visiter. Il ne
<, passer auprès d'eux que
quelques jours; "car il tenait à rentrer
dans son pays avant les froids de l'hiver
et les tempêtes de l'automne, si terribles
dans la Baltique.
— Il arrive demain , ajouta Mme Back
mann, et comme nous tenons à fêter son
arrivée, il faut que. nos aimables voisines
viennent dîner avec nous sans façon.
Nous acceptâmes. Ma pauvre mère ,
qui aimait à se parer de moi, comme du
seul joyau qui lui restât, prit plaisir à me
faire belle. Aussi, quand nous entrâmes
dans la chambre du pêcheur, arrangée en
salon par Mme Backmann. avec le goût
qu'elle apportait-à toute chose, le galant
consul, jetant un coup-d'œil satisfait sur
ma robe blanche, mes rubans bleus , et
deux ou trois brins de bruyère sauvage
que ma mère avait fourrés, je ne sais pour
quoi, dans mes.cheveux, me demanda si
j'avais juré de faire la conquête de toute
la Suède.
— Les Suédoises gardent trop bien ce
qui leur appartient ! répondis-je eu em
brassant Mme Backmann.
Je crois que je parlais encore lorsque je
vis.apparaître, — je me sers à dessein de
ce mot, car sa vue eut pour moi tout le
caractère d'une apparition,—celui qui, de
puis lors, n'a plus cessé d'habiter ma pen
sée.
— Permettez-moi, Mesdames, fit le con
sul en se tournant vers nous, de vous pré
senter un de nos meilleurs amis et de nos
plus proches parens,M. Hérald de Fersen.
— Il est un peu jeune pour un grand
oncle, murmura ma mère à l'oreille de
Mme Backmann, après avoir répondu au
salut profond de l'étranger.
— Oh ! celui-ci n'est qu'un simple cou
sin ! Mais patience, l'oncle va venir.
Pour moi j'étais restée sans paroles.
Je contemplais Hérald de Fersen comme
j'eusse fait d'un archange, dans un étonne-
ment muet et plein de charme. Non point,
certes que je fusse sous l'empire de sa - re
marquable beauté : ces sortes de fascina
tions sont, grâce à Dieu ! assez rares chez
la femme, plus rares encore chez la jeune
fille : c'est par l'âme que nous aimons, et
ce que nous aimons avant tout, c'est l'âme!
Mais c'était l'âme qui rayonnait en lui et
qui le faisait si beau ! M. de Fersen res
semblait ' si peu aux jeunes gens qui si
trouvaient alors au Croisic, ou , pour
mieux dire, il ressemblait si peu à tous
les hommes, qu'en le voyant je crus me
trouver en face d'an être d'un inonde su
périeur.
Ne riez point de moi, mon ami, conti
nua Mme Delaunay après s'être arrêtée un
instant et comme recueillie en elle -même,
ces souvenirs sont bien lointains déjà, et
je les ai arrosés de tant de larmes quo leur
prestige a dû pâlir... Eh ! cependant, au
jourd'hui encore, je retrouve en moi mes
impressions aussi puissantes et aussi vi
ves que je les éprouvais il y a cinq ans
bientôt... Vous l'avez sans doute remar
qué : les hommes, à présent, ne sont plus
} £ . v vy.-- 1JU
jeunes en France : tantôt des passions trop
' ont .flétris; tantôt les préoccu-
prêcoees les — mut-ut ic-a pi euecu-
pations d'une vie difficile ont projeté sur
euv je ne sais quelle ombremorose. Lui, au
contraire, il était jeune, vraiment jeune,—
la jeunesse éclatait, et bri lait sur son vi-.
sage;,on ne pouvait lo voir sourire sans
penser à une fleur qui s'entrouvre; sur
son front pur, élevé, trop blanc peut -être
pour un iront d'homme, il me semblait re- „
connaître l'empreinte encore vierge du *
doigt de Dieu. Un toi front ne pouvait abri-'
ter
ses tempes transparentes, et s'alliaient har
monieusement à cette délicatesse de teint
inconnue dans nos climats , privilège ex
clusif de ceux qui' vivent dans l'éternelle
fraîcheur des régions boréales, et qui ré
fléchissent ainsi' sur leurs traits la blan
cheur immaculée des neiges de leurs mon •
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