Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-08-02
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 02 août 1863 02 août 1863
Description : 1863/08/02 (Numéro 214). 1863/08/02 (Numéro 214).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
48* ANNEE#--N» 214.
A ÎONNEMENS DES DÉPARTEMENS -g
TROIS MOIS.... ; .ï ÎB^FR.
six mois ;.s 32 fb.
UN AN ....'ï
64;fr.
êôpb les pays étrangers, voir le tableau
publié les 5' et 20 de chaque mois,
(mp. t. bonifack , r. des Bons-Eafara, 18.
JOURNAL POLITIQUE, LITTERAIRE, UNIVERSEL.
DIMANCHE 2 AOUT 1863.
XfiONNEMENS DE" PARIS.
trois mois.-; $3 fr.
a six mois 26 fr;
dn an... 7. 52 fr.
un numéro w centimes; "
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Paris, à l'ordre de l'administrateur du journal, rue de Valoist n° 10. I Les articles déposés-ne, sont .pas v reïKius,* # !
, rue de Yaloisj n° 10.
Les articles déposés : ne.. sont pas-rendus*
(Place de la Bourse).
PARIS , 1" AOUT-.
Le télégraphe signale un nouvel article
Àu Morning Post, qui déclare persister dans
l'espérance du maintien de la paix, espé
rance fondée sur la conviction que la Rus
sie réserverait aux nouvelles notes des
puissances un accueil bien différent de
celui qu'ont reçu les premières.
Un autre article, extrait du Times, et éga
lement analysé par le télégraphe, semble,
comme beaucoup d'autres articles publiés
par le môme journal dans ces derniers
leinps, n'avoir aucun sens déterminé.
.<•' L'article de la Gazette de la Croix qui
^donnait le conseil, fort inattendu de sa
part, d'un rapprochement avec les puis
sances occidentales, fait naître des com-
imentaires nombreux, mais pour la plupart
'ironiques, dans les journaux de toutes les
"parties de-1'Allemagne. La Presse de Vien
ne y voit l'indice d'un extrême affaiblisse
ment dans la situation du cabinet prus
sien ; les journaux libéraux de Berlin y
recherchent on ne sait quelle arrière-
pensée; quoi qu'il en Boit, une cor
respondance particulière, adressée à l'a
gence Ilavas, nous paraît apprécier judi
cieusement l'incidenten question, lorsque,
'le groupant avec quelques autm symptô
mes, elle donne à entendre que la politi
que de M. de Bismark paraît avoir subi fin
échec dont la portée précise n'est pas en
core connue. •
- Si l'on en croit le Czas, une circulaire
aurait été adressée aux 'autorités du
royaume de Pologne, disant que « le désir
de S. M. est, que l'ordre, tant en ce qui
concerne l'organisation des autorités que
|es affaires eourantes, doit être le même
.que celui qui existait cuvant la publication
•ide l'ukase établissant un gouvernement
r civil dans le royaume. -> Ainsi l'une des
réformes introduites il y a un an à peine
.en • Pologne et présentée par le prince
.Gortschakoff comme l'accomplissement
anticipé du vœu. des puissances, aurait
déjà disparu.
^ Le gouverneur général de Finlande, ba-
îon Rok'assowski, vient de'signifier à la
"presse finlandaise la défense de s'occuper
des affaires de Pologne.
L'ordre a été donné, "au dire de la
Gazette de Breslau , d'établir des télégra
phes aériens le long de la côte finlandaise,
Coifinle on lavait fait pendant la "guerre
ide 1834. ? *
■ On écrit d'Athènes au Courrier du Diman
che, que le seul navire de guerre russe qui
se trouvât dans les eaux du Piréc, venait
de recevoir l'ordre de' rallier l'escadre de
la Baltique. En conséquence, le détache-:
nient russe qui gardait la Banque d'Athè
nes conjointement avec des détachemens
"français et anglais s'est immédiatement
embarqué.
On annonce de Bombay l'arrestation de
Kana-Saïb, au moment où il préparait de
Nouveaux complots.
La môme dépêche porte que Èérat a dé
cidément été pris par les Afghans, mais
'Une Dost-Moliammed est morL
A uguste V itc.
TELEGRAPHIE PRI\EE
Londres, 31 juillet.
La Gazette de Londres publie une dépêche du
marquis de Mirallores à M. lïdwards, chargé
d'affaires britanniques à Madrid. Répondant à
une demande de l'Angleterre, le chef du gou
vernement espagnol dit : l'Espagne adopte
aussi je principe de ne pas permettre à un na
vire fédéral ou confédéré" de quitter un port
espagnol moins .Me 24-heures avant le dopait
d'un navire ennemi du même port.
■ ■ Londres, 1 er aoûh
Le Mm'ninçf-Posl dit qu 'il espère taujours le
maintien de lii paix. Les trois mobiles dé l'in-
terventio^ anglaise sont l'humanité , l'inté
rêt -de la paix générale etgàes traités violé*.
Voilà ce.qui a déterminé nos démarches qui
ont été repousséss avec iriépriSi II y a eu rila-
leritendu. Ce malentendu venant à cesser, tout
danger de guerre avec la Russie serait écarté.
Le Post pense que de sérieuses représentations à
la Russie dissiperont ce malentendu et que le
cabinet de Saint-Pétersboiirg fera cette fo's une
répohse d'un tout autre genre. Que la Russie
revienne seulement à une politique conformo
aux traités et l'orage sera conjuré. Nous atten
dons avec confiance l'effet des nouvelles notes.
Le Post termine en exprimant l'espérance
que la Russie cédera à des demandes que les
puissances pourraient être prêtes à soutenir!
Londres, 1 er août.
On lit dans le ïimes :
« Notis avons abandonné le terrain des re
montrances générales ; nous avons formulé.six
^demandes que la Russie a nettement refusées :
que faire maintenant? Accepter notre défaite
ou réitérer nos demandes eJ rendre ainsi une
•retraite et.une solution pacifique presque im
possibles? Telle est la question à résoudre. Pour
.y répondre, nous devons constater la porlée de
nos demandes.
» Ici, nous appelons en témoignage le mar
quis Wielopolski, qui a donné sa démission
à cause de la non acceptation des deman
des sages et modérées des puissances. Cela prou
ve l'arrogance et la folie do la Russie rejetant
nos propositions, mais cela prouve aussi que
jnos demandes ont- peu de valeur, et que, mê
me acceptées, elles seraient peu avantageuses
à la Pologne. Citons encore notre correspon
dant de Leinberg, qui constate que les Polo
nais n'accepteront pas les six points. Ce qu'ils
verïleift; c'e^t l'indépendance de leur pays. Mais
alors, nos négociations sont une perte de temps,
nos" demandes sont saris valeur, puisqu'elles
sont limitées au royaume de Pologne. Pour
leur donner de la valeur, il- faudrait les éten
dre aux anciennes provinces polonaises. Nos
prémisses sont tirées de la situation de l'an
cienne Pologne, tandis que nos conclusions
sont restreintes à cette petite partie de la Polo
gne mentionnée par les traités de iSl.'i. »
• . . Posen, 31 juillet.
On lit dans Y Ost-deutschc-zeitung :
Le 29, à midi, 600 Polonais ont battu 1.000
Russes près de Wielun. La ville do NYieiun a
été ensuite occupée par les insurgés.
Tous les Polonais accusés de crime d'Etat qui
se trouvaient ici ont été expédiés aujourd'hui
à l'erlinjjar un train spécial.
Cracovio, 31 juillet, 8 h. du soir.
Les Polonais, commandés par Callier, ont re
poussé, le 22, les Russes près de Dohrzyce. Le
24, ils ont détruit deux compagnies et une sot-
nia de cosaques près de Walewicc, cliàteau du
comte Walewski, que les Russes ont pillé. Des
renforts sont arrivés le lendemain, aux tr-ou-
jies impériales; mais Callier a su échapper à
l'ennemi devenu beaucoup supérieur en nom
bre.
- L'Invalide russe constate l'avantage remporté
par les insurgés de la Lithuanie à Kozlowa-llu-
da, le 22.
Ghojawski a été fusillé à Zytomir, en Wolhy-
nie, par ordre du général Aiinenliolf.
Hreslau, 31 juillet.
On lit 4axis la û.azztte- de Jlu&Lat-: ~
I/empereur Alexandre a ordonné au colonel
Melau d'établir des télégraphes optiques (aé
riens) le long de la côte finlandaise' ainsi que
cela a eu lieu pendant la guerre de Crimée.
Trois régimens de cosaques du step ont fait
leur- entrée à Varsovie. .
Trompczynski, que les bu^etins' russes ont
fait périr dans la bataille qe Hozaw, a battu-
près Xalenzc une colonne russe commandée par
le colonel Wâlonieff.
Turin, 31 juillet.
La Chambre des députés s'est occupée au
jourd'hui du projet de loi sur la répression du
"brigandage.
" La municipalité de Trapani a adressé des re-
méreimens au ministère au sujet du projet do
loi de sûreté publique en Sicile.
Emprunt italien,-71.70.
Alexandrie, 27 juillet.
; Les avis de la Réunion sont du 4 juillet. Il
n'y a pas de ventes de sucre ; la manipulation
est commencée, mais les nouveaux sucres n'ont
pas encore paru sur le marché. La récolte est
médiocre cette année à cause de-la maladie de
là canne. Les vanilles sont recherchées.®
Le commandant Dupré et M. Lambert étaient
arrivés à la Réunion, après une courte escale
à Maurice. Le consul de France leur a fait con
naître les évènemens de Madagascar. Us ont eu
à Saint-Denis une entrevue avec le gouverneur
pour aviser à la conduite à suivre. On dit que
le commandant Dupré et M. Lambert sont ré
solus d'aller à Tananarive pour demandera
ratification du traité.
Shanghaï, 5 juin.
Le colonel Gordon s'est empâté de Quinsang.
On n'a pas do nouvelles du Japon. La situa
tion paraît y être' devenue plus pacifique.
,Un 'horïible tremblement de terre a eù. lieu ;f
à Manille.-Trois villes ont été détruites. Dix .1
mille indigènes ont été ensevelis sous leur*
, ruines. ' ; s
" " * - - Bcfribay, 9 juillet. >
Le fanieux Nana-Sdhib a été pris par le oa*
pitaine Urodigan dans le temple d'Àimere. Les
papiers trouvés sur lui montrent qu'il prépa
rait uu grand complût et qu'il avait beaucoup
d'argent à sa diâposilions
Le bruit court que , ! i,ôô0 cipayes du Bengale
sont réunis à Saloomba sous les ordres de'ian-
tia-Topee.
" Le pays est partout tranquille.
Hérat"a été pris par les Allghans. On assura
que Dost-Moharnmed est mort.'
MMndj 3i juillet;
Là Correspondencià assuré que le conseil des
nimistres est hautement satisfait des services
du général Dulce, et qu'il n'est nullement
question de donner un- successeur à ce peiy
sonnagçj,
. * LiBhenné, 30 jùilleii
Le paquebot anglais Hagdalena vient d'arri
ver du Brésil, et repart qe soir pour South-
hampton. .
Il n'apporte aucune nouvelle importante.
Change à Rio, le 9 juillet : Londres., 26 3/4 à
27; Paris, 3o'3 à 356; Hambourg, 668 à C66i
Cafés. — Marché inactif.— Le goodfirst vaut
7,100 à 7,300. — Stock, 23,000 sacs.
(Uavas-Hullier.)
Voici les dépêches que nous 'recevons
soir : • •'
Stockholm, 31 juillet.
Le roi de Suède est rentré à Stockholm le 29.
Il avait quitté le roi de Danemarck à Malmœ.
: Le prince Oscar de Suède, qui était parti pour
Copenhaffiie^a dû y arrivflp.-te- SO. De là -Û i® 1
rejoindre la princesse sa femme en Bavière.'- r '
Copenhague, 31 juillet.
Le départ du -roi Georges de Grèce est fixé au
20 août. Le roi de Danemarck se dispose à par-»
tir pour le Jutland.
-, Cracovie; 1" août.
M. Merhel, chef de Ladininistration de Cra-
covie, vient d être décoré de l'ordre do Léo-*.
pold.
Lé corps d insurgés, commandé par Wis-
nieswski, a combattu, le 29, à Mielatyn, en
Volhvnie. Une partie au détachement a"été re
foulée en Gallicie ; l'autre partie s'est avaùcée
dans l'intérieur du pays.
(Juatrc exécutions capitales ont eu lieu le 2i>
à- Varsovie : ce sont celles de Stefapski, Pv'owic-
lci, Zawistowski et Mejne qui ont été pendus
sur les glacis de la.citadelle.
[Berne, 1 " août. '
Les Chambres fédérales ont clos aujourd'hui
la dernière session de leur législature. 1
La nouvelle session s'ouvrira 'en novembre
pour le renouvellement des autorités fédé
rales.
- | Turin, 1^ août.
•La chambre des,députés a approuvé p.arl4Ç
voix contre 54 le.projet do loi relatif à l'impôt-
de consommation. Le produit des droits'sur
les boissons .et denrées est réservé à l'Etat i le
produit des- droits sur les autres objets imposés
reste acquis aux octrois municipaux.
. Turin, 1 er aoûf> ' s-
La Chambre a\ajourné au mois de Novembre-
l'examen du projet de loi sur la répression tlu
-brijra^niagîr." Kîr^nîfîre pro.iet^OTPT&iff'aa 'mîhïiè ■
but a été adopté par la Chambre. ■ -f
- Parmi les autres projets votés aujourd'hui se
trouve la convention passée avec M: Charles-
Laffitte pour le rachat du chemin de fer Vie-*
tor-limmanuel et la cession du réseau calabro-;
sicilien. * • , • . v
La séanpe d'aujourd'hui est la" dernière de
la session. Le décret royal de clôture est inces
samment attendu.
COÏIKS DE LA BOURSE.
COURS DE CLOTURE, le 31 16,1 er H1USSE. BA1SSB.
3 0/0aucompt. 6(5.90 66.70 » » m 20
—Fin du mois. 66.85 .66.75 » ■» » .10
4I/2aucompt. 96. » 9o.7Ù » » h 3Q
—l? , iirdu mois. 97.20 96. » u » 1 20
UN AVOCAT DE LA RUSSIE A PARIS.
La chancellerie russe n'aurait, pas pu
trouver un avocat plus conciliant que ta
Presse; mais il eût été bon pour le prince
Gortchakoff d'en trouver un plus concis,
plus logique et plus inventif.
' M. - de Girardin, qui a l'habitude de pren-.
dre les paragraphes pour des raisons, dé
clare en avoir trouvé vingt-deux dans la
réponse russe au cabinet français ; et,
après en avoir, dit-il, lu, relu, pesé et.sou
ligné tous les mots, sanp excepter lè para
graphe où il est prescrit de laisser copie de
Ja dép'écîie à M. Drouvn-de Lhuy§, il a eu
l'art d'en tirer à là fois deux conclusions
ment opposées et coutr'adictoifess,;
; anf' mi blanc-,' : Fâtrtf«» i dàt- noir-;-4esJi. , oîci-
. ipiues deux. •
1® Conclusion négative : « Les trois puis
sances avaient Jïosé dë telle façon la tjucs»
lidii- â là Russie que .le prince Gortchakoff
n'y pouvait répondre que par un refus. »
presse du 25 juillet.
2° Conclusion affirmative : « Si les trois
puissances -n'ont voulu que la réalisation
• Hes «ùe -points *-'la' réponse dix prince Gort
chakoff iëur donné hhsfaëtion.u Pfesse du
30 juillet.
Il est incontestable que les puissances
ont résumé leurs vues sur les affaires d«
~ FcildgnC dans be qu'on appelle les six points,
et que leurs désirs se sont bornés à faire
accepter cette base par la Russie. '
: Si donc il était vrai que le prince Gort
chakoff donnât satisfaction aux puissances
.Bdf les six points, il leur accorderait ce
qu'elles demandent ; et, s'il leur accordait
ce qu'elles .demandent, la question aurait
donc été-posée par elles de façon à mériter
'âutfe ckosè qu'un rdfus;
^ Voilà pourtant ce que M. de .Girardin,
■après avoir lu, relu, pesé et souligné les 22
paragraphes de la dépêche russe, y a trouvé
■?i} est vrai, que son auteur.y reconnaisse
-ses idées» s'il iient, edmme cela doit être,
A paraître logique et conséquent ûvec lui^
même.
Ce n'est pas tout : craignant sans doute
-qu'on n'attribuât les deux conclusions
contradictoires qu'il a tirées des vingt-deux"
paragraphes de la dépêche rhsse à tine dis
traction de la Presse , M. de Girardin les à
justifiées toutes deux par les considéra-
--iions qu'il a crues les plus puissantes.
1° Preuves à l'appui de sa conclusion
négative. « Ltfs six points no constituent
qu'une ingérence inadmissible dans le ré
gime intérieur et administratif d'un Etat
étranger; les trois puissances no sauraient
avoir le droit d'aller s'assurer à quel-degré
la liberté de conscience existe ou n'existe
pas en Pologne ; si la langue polonaise y
■lest admise on exclue; si l'administration y
Lest nationale ou russe. Accorder les six
points eût donc été créer des complications
sans nombre et des difficultés sans fin,
d'où la guerre serait infailliblement sortie.
Ï® prince Gortchakoff a sagement fait de
repousser ces prétentions ; il a épargné à
la France les plus graves embarras, et agi
UiHv p«id$Bee-q .. » —^Presse,
du 28 juillet :
: 2" Preuves à l'appui de la conclusion af-
' firmative : « Si les^puissances n'ont réelle-
inent voulu que les six points , le prince
Gortchakoff leur a donné satisfaction. Les
■six points ne rentrent-ils pas, comme le fait
observer la dépêche russe, dans la direction
.'des intentions de l'empereur Alexandre? Le
gouvernement russe ne veut-il pas sincè
rement, fermement , pacifier d'une maniè
re morale, les provinces polonaises? Ne
s'associe-t-il pas aux sentimens de sym
pathie et d'humanité de l'Angleterre et de
la France? Ces réformes que les puissan
ces sollicitent, ce recrutement légal, cette
lib'erté de conscience, cette administra
tion autonome , l'empereur de Russie
n'en a-t-il pas prfè l'initiative ? N'a-t-il
pas blâmé Y acte infâmant par lequel
le marquis Wielopolski a changé la cons
cription en proscription ?. N'avons - nous
pas horreur des confiscations et des pen
daisons? Quelle différence y a-t-il entre
les six points et les réformes déjà opérées ?
— de pures nuances / Ainsi, la Russie a dé
jà accordé ce que vous demandez, et nos
*seittiniens sont les mêmes sur les violen
ces. Flétrissons Wielopolski ! flétrissons
Mourawieff I » — Presse du 25, du 28, et du
29 juillet. ï
M. de Girardin constate, avec un certain
contentement de lui-môme, qu'il est le seul
Juap|1^clts£..ks réponso du princfl 'Gortcba-
kolî ainsi qu'il le fait. Personne .autre en
effet n'avait eu' le talent d'y trouver la
preuve que les demandés des trois puis- \
sttnccs méritaient à'ia fois d'être repoussées
6t d'être accueillies.
L'opinîoii fiùbliquej de laquelle M. de
Girardin aime', dit-il, à s 'isolei^ ajugé plus 1 ;
sainement la question qui se débat entre |
les trois puissances et la Russie, . ;
Elle y a vu nettement deux choses :elle
-y à vii premièrement, que les puissances
étaient dans la féi'ité ôt daftô Ife droite en ;
réclamant les six.points comme base d'tinë |
pacification morale et matérielle de la Po.- ?
log'nè; 6ll0 y avu ensuite que la Russie!
sortait de la vérité, eii àtflr'iriàiit que les ré
formes formulées dans les six potiils éUtiént !
(Tefà réalisées et s'étaient trouvées impuis- ;
santés, et "qu'elle essayait de sortir du
droit, eif déniant à la France et à l'Angle
terre la.faculté d'appl'écief l'exécution d'un
traité qu'elles ont signé, et dont elles sont
•garantes. . .
Qùd l'ensemble des réformes considéra^
Jbles, embrassant le principe religieux, le
principe politique et le. 1 principe adirîi-
nistratif, formulées dans les six points,
fût la base sérieuse, efficace, pour"
une organisation nationale de la Pologne,
et donnât satisfaction à l'immense majo
rité des Polonais, les trois puissances
l'ont pensé et aucuii hdmmê sensé n en
doute. M. de Girardin assure que M î
dislas Mickievicz et M. André Zamoyski
ne se se contenteraient pas de ces re
formes. Eh! moil Dieu, il s'est toujours
trouvé, en tous pays, des esprits excessif-,
qui ne savent se contenter de rien; ces es
prits agitent les nations, ils ne les mènent
pas. Que la Pologne soit libre, maîtresse
d'elle-même, heureuse, et les utopistes y
perdront peu à peu leur influence.
Le, sentiment général de l'Europe est
donc en faveur des puissances. Cette cons
cience universelle , s'exprimant par les
assemblées politiques et par la presse., est
d'avis que les réformes formulées dans lés
six points pacifieraient moralement et ma
tériellement la Pologne, et o'ie appuie les
trois - puissances dans l'attitude qu'elles
ont-prise.
Quant à la Russie, si tout' le mondé
rend justice aux sentimens de l'empe
reur Alexandre et à l'initiative qu'il a
1-peraenne- tktpe lungager
I du prince Gortchakoff, quand il" dit qu'en
tre les réformes déjà opérées et les six
points, il n'y a que des nuances. Il se
peut bien que les intentions du gouverne
ment russe soient dans la direction des
propositions des puissances; mais il arrive
tous les jours qu'on est dans la direction
d'un but r sans l'atteindre. Entre les réfor
mes réalisées et les propositions des puis
sances , il n'y a pas une nuance; il y a un
long .chemin à parcourir. "L 'inefficacité
prouvée de ce qui a été fait,ne sauraitdonc
être opposée à ce qui reste à faire. Si sub
til qu'on puisse être, on ne fera jamais
croire à personne que la confiscation et
l'exil dans les mines sont la nuance d'une
administration nationale, ou que le géné
ral Mourawieff est la nuance de l'amnistie!
En somme, la conscience universelle
donne, raison aux puissances et tort à la
Russie. Au nom de l'humanité et au nom
des traités, les puissances prient le gouver
nement russe de donner la paix et la sécu
rité l'Europe. Si ses intentions sont, com
me il l'assure, dans la direction de celles
qu'expriment^ France, l'Autriche et l'An
gleterre ; s'il est sincèrement et fermement
résolu à pacifier la Pologne, çe n'est pas la
prière de ces trois grandes nations qui doit
l'en détourner. - ' *
Toute proportion gardée, le gouvç
ment russe est donc aujourd'hui ;
iso lé en Europe, que M. 'de Girard?
dans la pressé êt dmfl'ôpïpion pu'
Celui-ci, il est. vrai, prise fort cet isol
dans lequel il.est convairrcu qu"'
une grande autorité. Peut-être aura-t-^
quelque peine à faire partager cette con
fiance au prince Gortchakoff, surtout si lo ^
prince se rappelle que M. de Girardin!
mit le prestige de son isolement au serviceq
de la république, sans qu'elle en fût plusU
forte, et qu'il le refuse à l'Empire, sans-
qu'il en soit plus faible.
• L, R oniface.
Le Moniteur publie aujourd'hui, d'après
Je Moniteur franco-mexicain du- 25 .juin, les
proclamations adressées parle maréchal Fo-
rey aux Mexicains, l'une à la suite de sop
entrée dans la capitale, l'autre à l'occasion
de l'Installation des membres du pouvoir
exécutif choisis par la junte supérieure,
éiue eljé-même par les notables. L'ample
sTifrlvsp nue" tiT us avons donnée .hier de la
profère de ces proc ^matipns nous dis-
-penae de la reproduire.' } 01C1 ^ ^utie pio-
clamation : .
Mexicains! -
La nation a prononcé par la voix d« ses to
présentans institués par mon décret du lt>
■jttiflj " "• • ' -.
Le ffénôr.tî Aimante, le vénérable archevê-
que de Mexico et le général Salas ont été él-us^
dans la journée d'hier, par la j unte supérieure»
pour être chargés du pouvoir exécutif et din-\
ger les destinées du pays jusqu'à l'établisse
ment d'un pouvoir définitif.
Les*ïloms que ]0 viens de citer vous sont
connus. Us .]ouïssent le l'estime publique 1 et
de la considération qui s attache aux services
rendus et à I Donoramiite du caractère. Vous
pouvez donc être tranquilles, comme je le suis
moi-meme. sur 1 avenir qui va vous être pré
paré par co triumvirat, qui prendra les rêne»
du pouvoir à partir du 24 juin.
Mexicains! en résignant entre-les mains de
ces trois chefs provisoires de la nation les pou
voirs, que las circonstances m'avaient donnés
pour les exercer à votre profit, je veux vous
remercier encore du'concours actif et intelli
gent que j'ai trouvé, en vous. Je conserverai
toujours un souvenir précieux de ces relations
qui m'ont donné une juste mesure de votre
patriotisme et de votre ;dévoûmeiit à l'ordre*,
qui vous rendent si dignes de l'intérêt de m
la France et de l'Empereur.^
Mexico, le 23 juin 1863.
Le général de division, sénateur^
commandant en chef le corps
expéditionnaire du Mexique,
FOREY.
RADAJMA II.
Ls roi de Madagascar Radama II, dont
on vient d'apprendre la mort, tragique, n a
■régné que vin^' ino^ et cinq .jours;
Son>-royaume est unt? îl e lointaine de 1 or
ccan Indien ; ses sujets 5ont de pauvres
populations livree^iux grossi? r ®tes et aux
vices de l'ignorance alncames. U peut
sembler que la gravité de l'histoire' Q , a
rien à voir dans ce règne si court, termi
né violemment par un de ces drames dont
les nations barbares ne s'étonnent pas, et-
dont les • peuples civilisés détournent les
regards avec dégoût.
Mais, si on considère de près ce jeune
roi, les Sentimens qui l'élevaient si fort
au-dessus de sa race, l'inépuisable généro
sité de son caractère, sa mansuétude, qui
no se démentit jamais, ses efforts passion
nés pour relever son peuple, sa sympathie
enthousiaste "pour les splendeurs des so
ciétés chrétiennes, on se persuadera peut-
être que l'assassinat de Radama II mérite
la pitié et les regrets, et que, toute Vu. e P°*
litique à part, un souvenir est bien du £
ce prince. La grandeur de la cause, non le
théâtre, fait les héros; et lp drapeau de là
civilisation ennoblit tous ceux qui, obs?
curs ou illustres, meurent pour le dé- 1
fendre.
Le prince Rafcoto, mort roi'de Madagas
car, le 12 mai dernier, sous le norft de Ra
dama II, était né à Tananarive, capitale do
l'île, le 27 septembre 1829. Il était fils uni
que de la reine Ranavolo, dont le triste rè
gne n'a été qu'une longue^ série de cruau^
tés.. '
Au milieu d'une atmosphère tout im-
Fcuiiletôn du Constitutionnel, 2 août.
EN PROVINCE
IY.
(Suite).
■ Saint -Wandrille- n 'eût pas demandé
mieux que de rejoindre l'inconnue; mais
le sacristain le prévint qu'une place d'hon-
heur lui était reserveê dans lechœar, à-cô
té de MM.les marguiiliers *.'il fallut sé rosir
gner et le suivre. Une' fois dans l'église,
son regard inquisiteur en fouiila tous les
coins pour retrouver celle qu'il n'avait en
core fait que d'entrevoir, et qui pourtant
préoccupait déjà sa pensée. Sa recherche
fut vaine. L'église était remplie de paysan
nes aux robustes appas, le teint haut en
couleur, larges de taille, carrées d épau
les, et portant fièrement leur grande coif
fure pyramidale, haute de deux pieds, ten-«
due sur une calotte de carton bleu, suréle
vé par de milices fils ue fer, et agitant de
chaque côté de la tête, comme des voiles
de navire, deux longues ailes en dentelle de
Bayeux. Dans cette foule de bonnets, il n'y
avait'.qu'un seul chapeau, et encore un
chapeau bourgeois, lourd, prosaïque, à
rubâns multicolores, chargé d'une botte
de fleurs et d'un plat de fruits, plus capa
ble de couvrir une-tète que de la parer, et
ne-rappelant en rien l'élégante fantaisie
admirée par le jeune homme quelques ins-
tans auparavant. Do guerre lasse, Philippe
prit un gros h vie que maître Jcan'ivait
déposé devant lui, et il essaya de lire les
prières de la messe, dont ses yeux étaient
déshabitues. .
Un buffet d'orgues occupait le tond de
l'église, protégé contre les regards curieux
par*un grandrideau qui, de chaque côté,
allait rejoindre la muraille. C'est à quoi,
tout d'abord, Philippe n'avait pas pris gar
de. Mais au kyrie életson , quelques accords
hardiment attaqués lui firent relever la tê
te ; il vit l'orgue, et n'apercevant son in
connue nulle part ailleurs, il se dit qu'elle
devait être dans la tribune. Mais ses yeux,
si clairvoyans qu'ils fussent, ne parvinrent
point à percer le mystère opaque du ri
deau, qui dérobait tout derrière ses grands
plis sombres. .
— Une artiste! pensa Philippe. Eh bien!
tant mieux! je suis du moins certain d'a
voir affaire à une femme intelligente. Mais
comment donc se trouve t : il une artiste à
Hauteville? Que ces prêtres sont discrets !
depuis tantôt quinze jours que je viens
chez Gabriel, — mon ami , après tout, —•
il n'a pas encore trouvé le moyen de me
dire qu'il avait, parmi ses paroissiennes,
line femme comme celle-là. ,
Cependant le chanoine venait d'entonner
d'une voix tremblante et cassée le beau
chant ûe triomphe et de paix emprunté
par l'Eglise aux anges et aux bergers de
Bethléem : Gloria in cxcelsis Dco f — Gloire
à Dieu, au plus haut des cieux '.—dans le
quel l'orgue alternait avec le chœur des fi
dèles.
« On ne'peut pas lui refuser d'avoir
beaucoup de sentiment, pensa Philippe ;
mais toutes les femmes en ont... quand
elles jouent de l'orgue; son harmonie a de
l'ampleur;, voici desbroderies charmantes,
et qu'un maître ne désavouerait pas...
Cette phrase est adorable! —Les affreux
chantres ! ils feraient bien mieux de la
laisser jouer toute seule !
L'office avançait toujours.
Quand on en vint à cette partie^ plus
intimé, si j'ose dire, et plus recueillie, où
s'accomplissent les grands mystères-de la
foi .chrétienne, les chantres du village qui
avaient usé et abusé de toutes les ressour
ces vocales que leur avait prodiguées une
nature trop généreuse, consentirent à se
taire; le serpent lui-jnême fit silence, at
l'orgue parla seul, plus attendri, plus hu
main, si j'ose dire, et remplissant la nef
d'une ineffable mélodie. Bientôt, ceperH
dant, il suspendit ses accords, et un si
lence auguste plana sur l'assemblée, et
tous les cœurs s'unirent dans la même
invocation pieuse. Mais une voix.jeune,
pure et suave, une voix céleste s'éleva,
emportant avec elle jusqu'aux pieds de
Dieu les âmes charmées.
Philippe ne pouvait se tromper à de
tels accens; dès les premières notes, H
avait reconnu celle que plusieurs fois déjà
il avait entendue à la cathédrale dans les
chœurs du mois de Marie.
— Cette lois, se dit-il, je la verrai bien
quand elle sortira. .?.• J
Il attendit la fin de la messe, non point
peut-être sans quelque impatience. Lors
que la foule en s'écoulant eut peu à peu
dégagé l'église, lapQrte .de la tribune s'ou
vrit, et Philippe aperçut un petit grôupe
de cinq à six femmes descendant lentement
l'escalier. Elles étaient toutes sans beauté
de tournure assez vulgaire, et aucune ne
répondait à cet idéal qu'un homme ne man-,
que jamais de se faire de la femme qu'il ne
connaît point, mais à laquelle il a pensé.
Il eût voulu attendre encore, car il ne par-,
venait point à se persuader que l'étrani
gère se trouvât parmi ces femmes, trop
évidemment originaires du pays : mais le
curé qui vint 1e chercher jusqu'à sa place
ne lui laissa point Je temps de faire de plus
longues réflexions.
« La famille a du bon, pensa-t-il, et l'a
mitié aussi! mais je ne sais pourquoi cela
m'ennuie, aujourd'hui, de dîner en tête-à- "
tète avec deux soutanes !»
Aussi ne put-il retenir une exclamation
en entrant dans la salle à manger, lors
qu'il aperçut cinq couverts.
— Nous ne sommes donc pas seuls! s'é-t
cria-t-il, trop joyeusement peut-être. Nous
avons sans douté too maire et son adjoint?
— Mieux que cela! répondit ôabriel.
— Mieux qu'un maire et un adjoint !
qui donc cela peut-il être ?
— Regarde !
Au moment même où le curé pronon
çait* ces mots, la grille de la petite couf,
toute plantée de pommiers, alors en fleurs,
et qui avaient l'air de gros bouquets de ma
riés, s'ouvrit et tourna en grinçant sur ses
gonds rouillés. .
Philippe vit entrer deux femmes : l'une
était vieille, et ne rappela s aucun souvenir
au baron de Saint-Wandrille; l'autre était
jeune, et il suffit d'un regard à Philippe
pour reconnaître en elle celle-que son on-
t$e avait.saluée le matin même à la porte
de l'église. Les deux femmes s'avançaient
lentement en causant, sans lëver les yeux,
parce qu'èlles se sentaient examinées, et
que sans doute elles étaient timides.' Le
curé alla au devant d'elles jusqu'au milieu
de la cour, et les ramenant dans la bi
bliothèque qui lui servait de salon :
,. Mesdames; Delaunay, dit-il en prenant
: ^-jPhilipp'e par la main, permettez-moi de
ï ous . présenter mon meilleur ami, M. le
baron de Saint-Wandrille.
Après le salut, toujours un peu cérémo
nieux; qui^suit une présentation, le cha
noine serra cordialement la main des deux
femmes, ce qui permit à Philippe de les re
garder avec quelque attention.
La plus âgée des deux n'avait de remar
quable que les rubans capucinp d'un bon
net à fleurs, assez prétentieux, qui avait
été exposé pendant huit jours comme
échantillon de mauvais goût chez la pre
mière modiste de Coutances. Elle avait cin
quante ans et l'œil rusé. Sa compagne
pouvait être de moitié plus jeune; elle n'atti
rait point l'attention tout d'abord,>et l'on
pouvait passer près d'elle sans la voir: elle
n'était ni grande ni petite, plutôt grande
cependant, svfeltë et presque maigre. Un
sculpteur eût reproché peut-être à l'ovale
de son visage d-'êtréun peu trop aminci par
le bas, comme il arrive -parfois dans cer
tains types de race juive, voisins, pourtant*
de la beauté ; sa bouche, d'un dessin cor
rect et fin, n'avait pas le vif carmin de la
santé. C'était la bouche d'une femme qui
avait dû souffrir; on ne devinait point
sous le satin dte sa joue le sang chaud
et généreux de là jeunesse; sa pâleur Sa
vait point le ton chaud et vigoureux que
le Midi donne'à ses femmes; c'était une fil
le rïu Nord, blanche comme le marbre et non
comme l'ivoire. Au moment où elle mit
sa main longue et fluette dans la main du
chanoine, elle releva les yeux, et Philippe
s'étonna de leur grandeur : ils n'étaient ni
bleus ni noirs, mais d'un gris velouté ex
trêmement doux,, frangés de longs cils
bruns ontrecroisés par les bouts, qui don
naient à son regard quelque chose de pro
fond et d'étrange ; le nez petit, un peu
pincé des narines, révélait à l'observateur
la femme qui a plus d'âme que de tempé
rament, plus de pensées que de désir, plus
de tendresse que de passion. Elle ôtâ son
chapeau et lissa du bout de ses doigts
deux bandeaux épais qui descendaient
jusqu'au bas de ses joues, souples, molle
ment ondulés, et de cette nuance indécise
à laquelle il est difficile de donnèr un nom
précis, qui paraît brune à' l'ombre, blonde
au soleil, et dont les fauves reflets font
involontairement songer aux feuilles mor
dorées et aux après-midi d'automne,
Phiiippo,debout, droitetimmobile corri-
me une statue, s'était, après la présenta
tion, adossé à un grand meuble, faisant
tout à la fois office de dressoir et de biblio
thèque, car il y avait à son rez-de-chaus
sée une collection des Pères de l'Eglise, et,,
aux étages supérieurs, une pile d'assiettes
et des rangées de verres.-Le curé s'appro
cha de lui, et, le prenant par lamain, ii l'a
mena vers la plu» jeune des dames Delau
nay-, en lui disant, j
— Ma chère Edmée, permettez à M. d«
Saint-Wandrille de .vous offrir son bras ; ;
nous allons dîner.
_ -—Jean, qui cumulaitce jour-là les fonc
tions de maître d'hôtel avec sa charge da
sacristain, venait en effet d'ouvrir à deux,
battans les portes de la salle à manger.
— Philippe s'inclina, avec une gravité
un peu cérémonieuse, et celle qu'on appe
lait Edmée posa légèrement lamain ou
plutôt le bout des doigts sur son bras,
avec je ne sais quelle grâce timide.
Saint-Wandrille, lorsqu'il regardait une
femme, a vait une certaine façon d'appuyer
l'œil, si j'ose ainsi parler, qui l'avertissait
tout d'abord qu'elle avait en face d'elle uû
hommè avec qui, tôt ou tard,, il lui fau
drait compter. Mais ce ne fut point ce re
gard qu'il eul» pour Edmée. Il comprit
qu'il rencontrait une de ces créatures dé
licates devant lesquelles l'homme doit tout
d'abord adoucir l'âpreté de ses prétentions
et l'ardeur de sa poursuite, s'il ne veut
point froisser cruellement je ne sais quelle
pudeur instinctive et discrète, qui fait
pour ainsi dire, le fond de leur nature: Sa
réserve, empreinte de respect, fut le pre
mier hommage qu'il lui offrit. "
Quel effet, de son côté, Philippe produi- *
sit-il sur celle que l'on appelait Edmée ?
C'est ce qu'il eût été bien difficile de dire •
car, malgré la grâce sympathique de sà
personne, rien d'elle ne se communiquait
et pour peu qu'elle le voulût, elle pouvait
être impénétrable. L'Isis égyptienne est
moins cachée, au fond du sanctuaire, sous
ses triples voiles.
Le maître de la maison plaça tout, na
turellement la vieille daine à sa droite.
— Vous, à ma gauche, ma chère Edniée
dit-il à l'autre. '
Philippe, si maître qu'il fût de. lui-mê
me, ne put répl-imer un léger mouvement
de surprise en entendant, pour la seconde
fois, son jimi appeler ainsi tout simplement
par son petit hom une femmë aussi jeune
A ÎONNEMENS DES DÉPARTEMENS -g
TROIS MOIS.... ; .ï ÎB^FR.
six mois ;.s 32 fb.
UN AN ....'ï
64;fr.
êôpb les pays étrangers, voir le tableau
publié les 5' et 20 de chaque mois,
(mp. t. bonifack , r. des Bons-Eafara, 18.
JOURNAL POLITIQUE, LITTERAIRE, UNIVERSEL.
DIMANCHE 2 AOUT 1863.
XfiONNEMENS DE" PARIS.
trois mois.-; $3 fr.
a six mois 26 fr;
dn an... 7. 52 fr.
un numéro w centimes; "
Les abonnemens datent des 1" et 16
de chaque mois. . -i
«/
Le mode
sur
le d'abonnement le plus simple est l'envol d'un bon de poste oujld'un effet f Lis lettres où envois d'argent jfos àfcflrancbts sotit refUiSs» i Les A nnonces sont Reçues chez M. P anis , tue Kotre-Dame-des-Yiçtoires, n* 40
Paris, à l'ordre de l'administrateur du journal, rue de Valoist n° 10. I Les articles déposés-ne, sont .pas v reïKius,* # !
, rue de Yaloisj n° 10.
Les articles déposés : ne.. sont pas-rendus*
(Place de la Bourse).
PARIS , 1" AOUT-.
Le télégraphe signale un nouvel article
Àu Morning Post, qui déclare persister dans
l'espérance du maintien de la paix, espé
rance fondée sur la conviction que la Rus
sie réserverait aux nouvelles notes des
puissances un accueil bien différent de
celui qu'ont reçu les premières.
Un autre article, extrait du Times, et éga
lement analysé par le télégraphe, semble,
comme beaucoup d'autres articles publiés
par le môme journal dans ces derniers
leinps, n'avoir aucun sens déterminé.
.<•' L'article de la Gazette de la Croix qui
^donnait le conseil, fort inattendu de sa
part, d'un rapprochement avec les puis
sances occidentales, fait naître des com-
imentaires nombreux, mais pour la plupart
'ironiques, dans les journaux de toutes les
"parties de-1'Allemagne. La Presse de Vien
ne y voit l'indice d'un extrême affaiblisse
ment dans la situation du cabinet prus
sien ; les journaux libéraux de Berlin y
recherchent on ne sait quelle arrière-
pensée; quoi qu'il en Boit, une cor
respondance particulière, adressée à l'a
gence Ilavas, nous paraît apprécier judi
cieusement l'incidenten question, lorsque,
'le groupant avec quelques autm symptô
mes, elle donne à entendre que la politi
que de M. de Bismark paraît avoir subi fin
échec dont la portée précise n'est pas en
core connue. •
- Si l'on en croit le Czas, une circulaire
aurait été adressée aux 'autorités du
royaume de Pologne, disant que « le désir
de S. M. est, que l'ordre, tant en ce qui
concerne l'organisation des autorités que
|es affaires eourantes, doit être le même
.que celui qui existait cuvant la publication
•ide l'ukase établissant un gouvernement
r civil dans le royaume. -> Ainsi l'une des
réformes introduites il y a un an à peine
.en • Pologne et présentée par le prince
.Gortschakoff comme l'accomplissement
anticipé du vœu. des puissances, aurait
déjà disparu.
^ Le gouverneur général de Finlande, ba-
îon Rok'assowski, vient de'signifier à la
"presse finlandaise la défense de s'occuper
des affaires de Pologne.
L'ordre a été donné, "au dire de la
Gazette de Breslau , d'établir des télégra
phes aériens le long de la côte finlandaise,
Coifinle on lavait fait pendant la "guerre
ide 1834. ? *
■ On écrit d'Athènes au Courrier du Diman
che, que le seul navire de guerre russe qui
se trouvât dans les eaux du Piréc, venait
de recevoir l'ordre de' rallier l'escadre de
la Baltique. En conséquence, le détache-:
nient russe qui gardait la Banque d'Athè
nes conjointement avec des détachemens
"français et anglais s'est immédiatement
embarqué.
On annonce de Bombay l'arrestation de
Kana-Saïb, au moment où il préparait de
Nouveaux complots.
La môme dépêche porte que Èérat a dé
cidément été pris par les Afghans, mais
'Une Dost-Moliammed est morL
A uguste V itc.
TELEGRAPHIE PRI\EE
Londres, 31 juillet.
La Gazette de Londres publie une dépêche du
marquis de Mirallores à M. lïdwards, chargé
d'affaires britanniques à Madrid. Répondant à
une demande de l'Angleterre, le chef du gou
vernement espagnol dit : l'Espagne adopte
aussi je principe de ne pas permettre à un na
vire fédéral ou confédéré" de quitter un port
espagnol moins .Me 24-heures avant le dopait
d'un navire ennemi du même port.
■ ■ Londres, 1 er aoûh
Le Mm'ninçf-Posl dit qu 'il espère taujours le
maintien de lii paix. Les trois mobiles dé l'in-
terventio^ anglaise sont l'humanité , l'inté
rêt -de la paix générale etgàes traités violé*.
Voilà ce.qui a déterminé nos démarches qui
ont été repousséss avec iriépriSi II y a eu rila-
leritendu. Ce malentendu venant à cesser, tout
danger de guerre avec la Russie serait écarté.
Le Post pense que de sérieuses représentations à
la Russie dissiperont ce malentendu et que le
cabinet de Saint-Pétersboiirg fera cette fo's une
répohse d'un tout autre genre. Que la Russie
revienne seulement à une politique conformo
aux traités et l'orage sera conjuré. Nous atten
dons avec confiance l'effet des nouvelles notes.
Le Post termine en exprimant l'espérance
que la Russie cédera à des demandes que les
puissances pourraient être prêtes à soutenir!
Londres, 1 er août.
On lit dans le ïimes :
« Notis avons abandonné le terrain des re
montrances générales ; nous avons formulé.six
^demandes que la Russie a nettement refusées :
que faire maintenant? Accepter notre défaite
ou réitérer nos demandes eJ rendre ainsi une
•retraite et.une solution pacifique presque im
possibles? Telle est la question à résoudre. Pour
.y répondre, nous devons constater la porlée de
nos demandes.
» Ici, nous appelons en témoignage le mar
quis Wielopolski, qui a donné sa démission
à cause de la non acceptation des deman
des sages et modérées des puissances. Cela prou
ve l'arrogance et la folie do la Russie rejetant
nos propositions, mais cela prouve aussi que
jnos demandes ont- peu de valeur, et que, mê
me acceptées, elles seraient peu avantageuses
à la Pologne. Citons encore notre correspon
dant de Leinberg, qui constate que les Polo
nais n'accepteront pas les six points. Ce qu'ils
verïleift; c'e^t l'indépendance de leur pays. Mais
alors, nos négociations sont une perte de temps,
nos" demandes sont saris valeur, puisqu'elles
sont limitées au royaume de Pologne. Pour
leur donner de la valeur, il- faudrait les éten
dre aux anciennes provinces polonaises. Nos
prémisses sont tirées de la situation de l'an
cienne Pologne, tandis que nos conclusions
sont restreintes à cette petite partie de la Polo
gne mentionnée par les traités de iSl.'i. »
• . . Posen, 31 juillet.
On lit dans Y Ost-deutschc-zeitung :
Le 29, à midi, 600 Polonais ont battu 1.000
Russes près de Wielun. La ville do NYieiun a
été ensuite occupée par les insurgés.
Tous les Polonais accusés de crime d'Etat qui
se trouvaient ici ont été expédiés aujourd'hui
à l'erlinjjar un train spécial.
Cracovio, 31 juillet, 8 h. du soir.
Les Polonais, commandés par Callier, ont re
poussé, le 22, les Russes près de Dohrzyce. Le
24, ils ont détruit deux compagnies et une sot-
nia de cosaques près de Walewicc, cliàteau du
comte Walewski, que les Russes ont pillé. Des
renforts sont arrivés le lendemain, aux tr-ou-
jies impériales; mais Callier a su échapper à
l'ennemi devenu beaucoup supérieur en nom
bre.
- L'Invalide russe constate l'avantage remporté
par les insurgés de la Lithuanie à Kozlowa-llu-
da, le 22.
Ghojawski a été fusillé à Zytomir, en Wolhy-
nie, par ordre du général Aiinenliolf.
Hreslau, 31 juillet.
On lit 4axis la û.azztte- de Jlu&Lat-: ~
I/empereur Alexandre a ordonné au colonel
Melau d'établir des télégraphes optiques (aé
riens) le long de la côte finlandaise' ainsi que
cela a eu lieu pendant la guerre de Crimée.
Trois régimens de cosaques du step ont fait
leur- entrée à Varsovie. .
Trompczynski, que les bu^etins' russes ont
fait périr dans la bataille qe Hozaw, a battu-
près Xalenzc une colonne russe commandée par
le colonel Wâlonieff.
Turin, 31 juillet.
La Chambre des députés s'est occupée au
jourd'hui du projet de loi sur la répression du
"brigandage.
" La municipalité de Trapani a adressé des re-
méreimens au ministère au sujet du projet do
loi de sûreté publique en Sicile.
Emprunt italien,-71.70.
Alexandrie, 27 juillet.
; Les avis de la Réunion sont du 4 juillet. Il
n'y a pas de ventes de sucre ; la manipulation
est commencée, mais les nouveaux sucres n'ont
pas encore paru sur le marché. La récolte est
médiocre cette année à cause de-la maladie de
là canne. Les vanilles sont recherchées.®
Le commandant Dupré et M. Lambert étaient
arrivés à la Réunion, après une courte escale
à Maurice. Le consul de France leur a fait con
naître les évènemens de Madagascar. Us ont eu
à Saint-Denis une entrevue avec le gouverneur
pour aviser à la conduite à suivre. On dit que
le commandant Dupré et M. Lambert sont ré
solus d'aller à Tananarive pour demandera
ratification du traité.
Shanghaï, 5 juin.
Le colonel Gordon s'est empâté de Quinsang.
On n'a pas do nouvelles du Japon. La situa
tion paraît y être' devenue plus pacifique.
,Un 'horïible tremblement de terre a eù. lieu ;f
à Manille.-Trois villes ont été détruites. Dix .1
mille indigènes ont été ensevelis sous leur*
, ruines. ' ; s
" " * - - Bcfribay, 9 juillet. >
Le fanieux Nana-Sdhib a été pris par le oa*
pitaine Urodigan dans le temple d'Àimere. Les
papiers trouvés sur lui montrent qu'il prépa
rait uu grand complût et qu'il avait beaucoup
d'argent à sa diâposilions
Le bruit court que , ! i,ôô0 cipayes du Bengale
sont réunis à Saloomba sous les ordres de'ian-
tia-Topee.
" Le pays est partout tranquille.
Hérat"a été pris par les Allghans. On assura
que Dost-Moharnmed est mort.'
MMndj 3i juillet;
Là Correspondencià assuré que le conseil des
nimistres est hautement satisfait des services
du général Dulce, et qu'il n'est nullement
question de donner un- successeur à ce peiy
sonnagçj,
. * LiBhenné, 30 jùilleii
Le paquebot anglais Hagdalena vient d'arri
ver du Brésil, et repart qe soir pour South-
hampton. .
Il n'apporte aucune nouvelle importante.
Change à Rio, le 9 juillet : Londres., 26 3/4 à
27; Paris, 3o'3 à 356; Hambourg, 668 à C66i
Cafés. — Marché inactif.— Le goodfirst vaut
7,100 à 7,300. — Stock, 23,000 sacs.
(Uavas-Hullier.)
Voici les dépêches que nous 'recevons
soir : • •'
Stockholm, 31 juillet.
Le roi de Suède est rentré à Stockholm le 29.
Il avait quitté le roi de Danemarck à Malmœ.
: Le prince Oscar de Suède, qui était parti pour
Copenhaffiie^a dû y arrivflp.-te- SO. De là -Û i® 1
rejoindre la princesse sa femme en Bavière.'- r '
Copenhague, 31 juillet.
Le départ du -roi Georges de Grèce est fixé au
20 août. Le roi de Danemarck se dispose à par-»
tir pour le Jutland.
-, Cracovie; 1" août.
M. Merhel, chef de Ladininistration de Cra-
covie, vient d être décoré de l'ordre do Léo-*.
pold.
Lé corps d insurgés, commandé par Wis-
nieswski, a combattu, le 29, à Mielatyn, en
Volhvnie. Une partie au détachement a"été re
foulée en Gallicie ; l'autre partie s'est avaùcée
dans l'intérieur du pays.
(Juatrc exécutions capitales ont eu lieu le 2i>
à- Varsovie : ce sont celles de Stefapski, Pv'owic-
lci, Zawistowski et Mejne qui ont été pendus
sur les glacis de la.citadelle.
[Berne, 1 " août. '
Les Chambres fédérales ont clos aujourd'hui
la dernière session de leur législature. 1
La nouvelle session s'ouvrira 'en novembre
pour le renouvellement des autorités fédé
rales.
- | Turin, 1^ août.
•La chambre des,députés a approuvé p.arl4Ç
voix contre 54 le.projet do loi relatif à l'impôt-
de consommation. Le produit des droits'sur
les boissons .et denrées est réservé à l'Etat i le
produit des- droits sur les autres objets imposés
reste acquis aux octrois municipaux.
. Turin, 1 er aoûf> ' s-
La Chambre a\ajourné au mois de Novembre-
l'examen du projet de loi sur la répression tlu
-brijra^niagîr." Kîr^nîfîre pro.iet^OTPT&iff'aa 'mîhïiè ■
but a été adopté par la Chambre. ■ -f
- Parmi les autres projets votés aujourd'hui se
trouve la convention passée avec M: Charles-
Laffitte pour le rachat du chemin de fer Vie-*
tor-limmanuel et la cession du réseau calabro-;
sicilien. * • , • . v
La séanpe d'aujourd'hui est la" dernière de
la session. Le décret royal de clôture est inces
samment attendu.
COÏIKS DE LA BOURSE.
COURS DE CLOTURE, le 31 16,1 er H1USSE. BA1SSB.
3 0/0aucompt. 6(5.90 66.70 » » m 20
—Fin du mois. 66.85 .66.75 » ■» » .10
4I/2aucompt. 96. » 9o.7Ù » » h 3Q
—l? , iirdu mois. 97.20 96. » u » 1 20
UN AVOCAT DE LA RUSSIE A PARIS.
La chancellerie russe n'aurait, pas pu
trouver un avocat plus conciliant que ta
Presse; mais il eût été bon pour le prince
Gortchakoff d'en trouver un plus concis,
plus logique et plus inventif.
' M. - de Girardin, qui a l'habitude de pren-.
dre les paragraphes pour des raisons, dé
clare en avoir trouvé vingt-deux dans la
réponse russe au cabinet français ; et,
après en avoir, dit-il, lu, relu, pesé et.sou
ligné tous les mots, sanp excepter lè para
graphe où il est prescrit de laisser copie de
Ja dép'écîie à M. Drouvn-de Lhuy§, il a eu
l'art d'en tirer à là fois deux conclusions
ment opposées et coutr'adictoifess,;
; anf' mi blanc-,' : Fâtrtf«» i dàt- noir-;-4esJi. , oîci-
. ipiues deux. •
1® Conclusion négative : « Les trois puis
sances avaient Jïosé dë telle façon la tjucs»
lidii- â là Russie que .le prince Gortchakoff
n'y pouvait répondre que par un refus. »
presse du 25 juillet.
2° Conclusion affirmative : « Si les trois
puissances -n'ont voulu que la réalisation
• Hes «ùe -points *-'la' réponse dix prince Gort
chakoff iëur donné hhsfaëtion.u Pfesse du
30 juillet.
Il est incontestable que les puissances
ont résumé leurs vues sur les affaires d«
~ FcildgnC dans be qu'on appelle les six points,
et que leurs désirs se sont bornés à faire
accepter cette base par la Russie. '
: Si donc il était vrai que le prince Gort
chakoff donnât satisfaction aux puissances
.Bdf les six points, il leur accorderait ce
qu'elles demandent ; et, s'il leur accordait
ce qu'elles .demandent, la question aurait
donc été-posée par elles de façon à mériter
'âutfe ckosè qu'un rdfus;
^ Voilà pourtant ce que M. de .Girardin,
■après avoir lu, relu, pesé et souligné les 22
paragraphes de la dépêche russe, y a trouvé
-ses idées» s'il iient, edmme cela doit être,
A paraître logique et conséquent ûvec lui^
même.
Ce n'est pas tout : craignant sans doute
-qu'on n'attribuât les deux conclusions
contradictoires qu'il a tirées des vingt-deux"
paragraphes de la dépêche rhsse à tine dis
traction de la Presse , M. de Girardin les à
justifiées toutes deux par les considéra-
--iions qu'il a crues les plus puissantes.
1° Preuves à l'appui de sa conclusion
négative. « Ltfs six points no constituent
qu'une ingérence inadmissible dans le ré
gime intérieur et administratif d'un Etat
étranger; les trois puissances no sauraient
avoir le droit d'aller s'assurer à quel-degré
la liberté de conscience existe ou n'existe
pas en Pologne ; si la langue polonaise y
■lest admise on exclue; si l'administration y
Lest nationale ou russe. Accorder les six
points eût donc été créer des complications
sans nombre et des difficultés sans fin,
d'où la guerre serait infailliblement sortie.
Ï® prince Gortchakoff a sagement fait de
repousser ces prétentions ; il a épargné à
la France les plus graves embarras, et agi
UiHv p«id$Bee-q .. » —^Presse,
du 28 juillet :
: 2" Preuves à l'appui de la conclusion af-
' firmative : « Si les^puissances n'ont réelle-
inent voulu que les six points , le prince
Gortchakoff leur a donné satisfaction. Les
■six points ne rentrent-ils pas, comme le fait
observer la dépêche russe, dans la direction
.'des intentions de l'empereur Alexandre? Le
gouvernement russe ne veut-il pas sincè
rement, fermement , pacifier d'une maniè
re morale, les provinces polonaises? Ne
s'associe-t-il pas aux sentimens de sym
pathie et d'humanité de l'Angleterre et de
la France? Ces réformes que les puissan
ces sollicitent, ce recrutement légal, cette
lib'erté de conscience, cette administra
tion autonome , l'empereur de Russie
n'en a-t-il pas prfè l'initiative ? N'a-t-il
pas blâmé Y acte infâmant par lequel
le marquis Wielopolski a changé la cons
cription en proscription ?. N'avons - nous
pas horreur des confiscations et des pen
daisons? Quelle différence y a-t-il entre
les six points et les réformes déjà opérées ?
— de pures nuances / Ainsi, la Russie a dé
jà accordé ce que vous demandez, et nos
*seittiniens sont les mêmes sur les violen
ces. Flétrissons Wielopolski ! flétrissons
Mourawieff I » — Presse du 25, du 28, et du
29 juillet. ï
M. de Girardin constate, avec un certain
contentement de lui-môme, qu'il est le seul
Juap|1^clts£..ks réponso du princfl 'Gortcba-
kolî ainsi qu'il le fait. Personne .autre en
effet n'avait eu' le talent d'y trouver la
preuve que les demandés des trois puis- \
sttnccs méritaient à'ia fois d'être repoussées
6t d'être accueillies.
L'opinîoii fiùbliquej de laquelle M. de
Girardin aime', dit-il, à s 'isolei^ ajugé plus 1 ;
sainement la question qui se débat entre |
les trois puissances et la Russie, . ;
Elle y a vu nettement deux choses :elle
-y à vii premièrement, que les puissances
étaient dans la féi'ité ôt daftô Ife droite en ;
réclamant les six.points comme base d'tinë |
pacification morale et matérielle de la Po.- ?
log'nè; 6ll0 y avu ensuite que la Russie!
sortait de la vérité, eii àtflr'iriàiit que les ré
formes formulées dans les six potiils éUtiént !
(Tefà réalisées et s'étaient trouvées impuis- ;
santés, et "qu'elle essayait de sortir du
droit, eif déniant à la France et à l'Angle
terre la.faculté d'appl'écief l'exécution d'un
traité qu'elles ont signé, et dont elles sont
•garantes. . .
Qùd l'ensemble des réformes considéra^
Jbles, embrassant le principe religieux, le
principe politique et le. 1 principe adirîi-
nistratif, formulées dans les six points,
fût la base sérieuse, efficace, pour"
une organisation nationale de la Pologne,
et donnât satisfaction à l'immense majo
rité des Polonais, les trois puissances
l'ont pensé et aucuii hdmmê sensé n en
doute. M. de Girardin assure que M î
dislas Mickievicz et M. André Zamoyski
ne se se contenteraient pas de ces re
formes. Eh! moil Dieu, il s'est toujours
trouvé, en tous pays, des esprits excessif-,
qui ne savent se contenter de rien; ces es
prits agitent les nations, ils ne les mènent
pas. Que la Pologne soit libre, maîtresse
d'elle-même, heureuse, et les utopistes y
perdront peu à peu leur influence.
Le, sentiment général de l'Europe est
donc en faveur des puissances. Cette cons
cience universelle , s'exprimant par les
assemblées politiques et par la presse., est
d'avis que les réformes formulées dans lés
six points pacifieraient moralement et ma
tériellement la Pologne, et o'ie appuie les
trois - puissances dans l'attitude qu'elles
ont-prise.
Quant à la Russie, si tout' le mondé
rend justice aux sentimens de l'empe
reur Alexandre et à l'initiative qu'il a
1-peraenne- tktpe lungager
I du prince Gortchakoff, quand il" dit qu'en
tre les réformes déjà opérées et les six
points, il n'y a que des nuances. Il se
peut bien que les intentions du gouverne
ment russe soient dans la direction des
propositions des puissances; mais il arrive
tous les jours qu'on est dans la direction
d'un but r sans l'atteindre. Entre les réfor
mes réalisées et les propositions des puis
sances , il n'y a pas une nuance; il y a un
long .chemin à parcourir. "L 'inefficacité
prouvée de ce qui a été fait,ne sauraitdonc
être opposée à ce qui reste à faire. Si sub
til qu'on puisse être, on ne fera jamais
croire à personne que la confiscation et
l'exil dans les mines sont la nuance d'une
administration nationale, ou que le géné
ral Mourawieff est la nuance de l'amnistie!
En somme, la conscience universelle
donne, raison aux puissances et tort à la
Russie. Au nom de l'humanité et au nom
des traités, les puissances prient le gouver
nement russe de donner la paix et la sécu
rité l'Europe. Si ses intentions sont, com
me il l'assure, dans la direction de celles
qu'expriment^ France, l'Autriche et l'An
gleterre ; s'il est sincèrement et fermement
résolu à pacifier la Pologne, çe n'est pas la
prière de ces trois grandes nations qui doit
l'en détourner. - ' *
Toute proportion gardée, le gouvç
ment russe est donc aujourd'hui ;
iso lé en Europe, que M. 'de Girard?
dans la pressé êt dmfl'ôpïpion pu'
Celui-ci, il est. vrai, prise fort cet isol
dans lequel il.est convairrcu qu"'
une grande autorité. Peut-être aura-t-^
quelque peine à faire partager cette con
fiance au prince Gortchakoff, surtout si lo ^
prince se rappelle que M. de Girardin!
mit le prestige de son isolement au serviceq
de la république, sans qu'elle en fût plusU
forte, et qu'il le refuse à l'Empire, sans-
qu'il en soit plus faible.
• L, R oniface.
Le Moniteur publie aujourd'hui, d'après
Je Moniteur franco-mexicain du- 25 .juin, les
proclamations adressées parle maréchal Fo-
rey aux Mexicains, l'une à la suite de sop
entrée dans la capitale, l'autre à l'occasion
de l'Installation des membres du pouvoir
exécutif choisis par la junte supérieure,
éiue eljé-même par les notables. L'ample
sTifrlvsp nue" tiT us avons donnée .hier de la
profère de ces proc ^matipns nous dis-
-penae de la reproduire.' } 01C1 ^ ^utie pio-
clamation : .
Mexicains! -
La nation a prononcé par la voix d« ses to
présentans institués par mon décret du lt>
■jttiflj " "• • ' -.
Le ffénôr.tî Aimante, le vénérable archevê-
que de Mexico et le général Salas ont été él-us^
dans la journée d'hier, par la j unte supérieure»
pour être chargés du pouvoir exécutif et din-\
ger les destinées du pays jusqu'à l'établisse
ment d'un pouvoir définitif.
Les*ïloms que ]0 viens de citer vous sont
connus. Us .]ouïssent le l'estime publique 1 et
de la considération qui s attache aux services
rendus et à I Donoramiite du caractère. Vous
pouvez donc être tranquilles, comme je le suis
moi-meme. sur 1 avenir qui va vous être pré
paré par co triumvirat, qui prendra les rêne»
du pouvoir à partir du 24 juin.
Mexicains! en résignant entre-les mains de
ces trois chefs provisoires de la nation les pou
voirs, que las circonstances m'avaient donnés
pour les exercer à votre profit, je veux vous
remercier encore du'concours actif et intelli
gent que j'ai trouvé, en vous. Je conserverai
toujours un souvenir précieux de ces relations
qui m'ont donné une juste mesure de votre
patriotisme et de votre ;dévoûmeiit à l'ordre*,
qui vous rendent si dignes de l'intérêt de m
la France et de l'Empereur.^
Mexico, le 23 juin 1863.
Le général de division, sénateur^
commandant en chef le corps
expéditionnaire du Mexique,
FOREY.
RADAJMA II.
Ls roi de Madagascar Radama II, dont
on vient d'apprendre la mort, tragique, n a
■régné que vin^' ino^ et cinq .jours;
Son>-royaume est unt? îl e lointaine de 1 or
ccan Indien ; ses sujets 5ont de pauvres
populations livree^iux grossi? r ®tes et aux
vices de l'ignorance alncames. U peut
sembler que la gravité de l'histoire' Q , a
rien à voir dans ce règne si court, termi
né violemment par un de ces drames dont
les nations barbares ne s'étonnent pas, et-
dont les • peuples civilisés détournent les
regards avec dégoût.
Mais, si on considère de près ce jeune
roi, les Sentimens qui l'élevaient si fort
au-dessus de sa race, l'inépuisable généro
sité de son caractère, sa mansuétude, qui
no se démentit jamais, ses efforts passion
nés pour relever son peuple, sa sympathie
enthousiaste "pour les splendeurs des so
ciétés chrétiennes, on se persuadera peut-
être que l'assassinat de Radama II mérite
la pitié et les regrets, et que, toute Vu. e P°*
litique à part, un souvenir est bien du £
ce prince. La grandeur de la cause, non le
théâtre, fait les héros; et lp drapeau de là
civilisation ennoblit tous ceux qui, obs?
curs ou illustres, meurent pour le dé- 1
fendre.
Le prince Rafcoto, mort roi'de Madagas
car, le 12 mai dernier, sous le norft de Ra
dama II, était né à Tananarive, capitale do
l'île, le 27 septembre 1829. Il était fils uni
que de la reine Ranavolo, dont le triste rè
gne n'a été qu'une longue^ série de cruau^
tés.. '
Au milieu d'une atmosphère tout im-
Fcuiiletôn du Constitutionnel, 2 août.
EN PROVINCE
IY.
(Suite).
■ Saint -Wandrille- n 'eût pas demandé
mieux que de rejoindre l'inconnue; mais
le sacristain le prévint qu'une place d'hon-
heur lui était reserveê dans lechœar, à-cô
té de MM.les marguiiliers *.'il fallut sé rosir
gner et le suivre. Une' fois dans l'église,
son regard inquisiteur en fouiila tous les
coins pour retrouver celle qu'il n'avait en
core fait que d'entrevoir, et qui pourtant
préoccupait déjà sa pensée. Sa recherche
fut vaine. L'église était remplie de paysan
nes aux robustes appas, le teint haut en
couleur, larges de taille, carrées d épau
les, et portant fièrement leur grande coif
fure pyramidale, haute de deux pieds, ten-«
due sur une calotte de carton bleu, suréle
vé par de milices fils ue fer, et agitant de
chaque côté de la tête, comme des voiles
de navire, deux longues ailes en dentelle de
Bayeux. Dans cette foule de bonnets, il n'y
avait'.qu'un seul chapeau, et encore un
chapeau bourgeois, lourd, prosaïque, à
rubâns multicolores, chargé d'une botte
de fleurs et d'un plat de fruits, plus capa
ble de couvrir une-tète que de la parer, et
ne-rappelant en rien l'élégante fantaisie
admirée par le jeune homme quelques ins-
tans auparavant. Do guerre lasse, Philippe
prit un gros h vie que maître Jcan'ivait
déposé devant lui, et il essaya de lire les
prières de la messe, dont ses yeux étaient
déshabitues. .
Un buffet d'orgues occupait le tond de
l'église, protégé contre les regards curieux
par*un grandrideau qui, de chaque côté,
allait rejoindre la muraille. C'est à quoi,
tout d'abord, Philippe n'avait pas pris gar
de. Mais au kyrie életson , quelques accords
hardiment attaqués lui firent relever la tê
te ; il vit l'orgue, et n'apercevant son in
connue nulle part ailleurs, il se dit qu'elle
devait être dans la tribune. Mais ses yeux,
si clairvoyans qu'ils fussent, ne parvinrent
point à percer le mystère opaque du ri
deau, qui dérobait tout derrière ses grands
plis sombres. .
— Une artiste! pensa Philippe. Eh bien!
tant mieux! je suis du moins certain d'a
voir affaire à une femme intelligente. Mais
comment donc se trouve t : il une artiste à
Hauteville? Que ces prêtres sont discrets !
depuis tantôt quinze jours que je viens
chez Gabriel, — mon ami , après tout, —•
il n'a pas encore trouvé le moyen de me
dire qu'il avait, parmi ses paroissiennes,
line femme comme celle-là. ,
Cependant le chanoine venait d'entonner
d'une voix tremblante et cassée le beau
chant ûe triomphe et de paix emprunté
par l'Eglise aux anges et aux bergers de
Bethléem : Gloria in cxcelsis Dco f — Gloire
à Dieu, au plus haut des cieux '.—dans le
quel l'orgue alternait avec le chœur des fi
dèles.
« On ne'peut pas lui refuser d'avoir
beaucoup de sentiment, pensa Philippe ;
mais toutes les femmes en ont... quand
elles jouent de l'orgue; son harmonie a de
l'ampleur;, voici desbroderies charmantes,
et qu'un maître ne désavouerait pas...
Cette phrase est adorable! —Les affreux
chantres ! ils feraient bien mieux de la
laisser jouer toute seule !
L'office avançait toujours.
Quand on en vint à cette partie^ plus
intimé, si j'ose dire, et plus recueillie, où
s'accomplissent les grands mystères-de la
foi .chrétienne, les chantres du village qui
avaient usé et abusé de toutes les ressour
ces vocales que leur avait prodiguées une
nature trop généreuse, consentirent à se
taire; le serpent lui-jnême fit silence, at
l'orgue parla seul, plus attendri, plus hu
main, si j'ose dire, et remplissant la nef
d'une ineffable mélodie. Bientôt, ceperH
dant, il suspendit ses accords, et un si
lence auguste plana sur l'assemblée, et
tous les cœurs s'unirent dans la même
invocation pieuse. Mais une voix.jeune,
pure et suave, une voix céleste s'éleva,
emportant avec elle jusqu'aux pieds de
Dieu les âmes charmées.
Philippe ne pouvait se tromper à de
tels accens; dès les premières notes, H
avait reconnu celle que plusieurs fois déjà
il avait entendue à la cathédrale dans les
chœurs du mois de Marie.
— Cette lois, se dit-il, je la verrai bien
quand elle sortira. .?.• J
Il attendit la fin de la messe, non point
peut-être sans quelque impatience. Lors
que la foule en s'écoulant eut peu à peu
dégagé l'église, lapQrte .de la tribune s'ou
vrit, et Philippe aperçut un petit grôupe
de cinq à six femmes descendant lentement
l'escalier. Elles étaient toutes sans beauté
de tournure assez vulgaire, et aucune ne
répondait à cet idéal qu'un homme ne man-,
que jamais de se faire de la femme qu'il ne
connaît point, mais à laquelle il a pensé.
Il eût voulu attendre encore, car il ne par-,
venait point à se persuader que l'étrani
gère se trouvât parmi ces femmes, trop
évidemment originaires du pays : mais le
curé qui vint 1e chercher jusqu'à sa place
ne lui laissa point Je temps de faire de plus
longues réflexions.
« La famille a du bon, pensa-t-il, et l'a
mitié aussi! mais je ne sais pourquoi cela
m'ennuie, aujourd'hui, de dîner en tête-à- "
tète avec deux soutanes !»
Aussi ne put-il retenir une exclamation
en entrant dans la salle à manger, lors
qu'il aperçut cinq couverts.
— Nous ne sommes donc pas seuls! s'é-t
cria-t-il, trop joyeusement peut-être. Nous
avons sans douté too maire et son adjoint?
— Mieux que cela! répondit ôabriel.
— Mieux qu'un maire et un adjoint !
qui donc cela peut-il être ?
— Regarde !
Au moment même où le curé pronon
çait* ces mots, la grille de la petite couf,
toute plantée de pommiers, alors en fleurs,
et qui avaient l'air de gros bouquets de ma
riés, s'ouvrit et tourna en grinçant sur ses
gonds rouillés. .
Philippe vit entrer deux femmes : l'une
était vieille, et ne rappela s aucun souvenir
au baron de Saint-Wandrille; l'autre était
jeune, et il suffit d'un regard à Philippe
pour reconnaître en elle celle-que son on-
t$e avait.saluée le matin même à la porte
de l'église. Les deux femmes s'avançaient
lentement en causant, sans lëver les yeux,
parce qu'èlles se sentaient examinées, et
que sans doute elles étaient timides.' Le
curé alla au devant d'elles jusqu'au milieu
de la cour, et les ramenant dans la bi
bliothèque qui lui servait de salon :
,. Mesdames; Delaunay, dit-il en prenant
: ^-jPhilipp'e par la main, permettez-moi de
ï ous . présenter mon meilleur ami, M. le
baron de Saint-Wandrille.
Après le salut, toujours un peu cérémo
nieux; qui^suit une présentation, le cha
noine serra cordialement la main des deux
femmes, ce qui permit à Philippe de les re
garder avec quelque attention.
La plus âgée des deux n'avait de remar
quable que les rubans capucinp d'un bon
net à fleurs, assez prétentieux, qui avait
été exposé pendant huit jours comme
échantillon de mauvais goût chez la pre
mière modiste de Coutances. Elle avait cin
quante ans et l'œil rusé. Sa compagne
pouvait être de moitié plus jeune; elle n'atti
rait point l'attention tout d'abord,>et l'on
pouvait passer près d'elle sans la voir: elle
n'était ni grande ni petite, plutôt grande
cependant, svfeltë et presque maigre. Un
sculpteur eût reproché peut-être à l'ovale
de son visage d-'êtréun peu trop aminci par
le bas, comme il arrive -parfois dans cer
tains types de race juive, voisins, pourtant*
de la beauté ; sa bouche, d'un dessin cor
rect et fin, n'avait pas le vif carmin de la
santé. C'était la bouche d'une femme qui
avait dû souffrir; on ne devinait point
sous le satin dte sa joue le sang chaud
et généreux de là jeunesse; sa pâleur Sa
vait point le ton chaud et vigoureux que
le Midi donne'à ses femmes; c'était une fil
le rïu Nord, blanche comme le marbre et non
comme l'ivoire. Au moment où elle mit
sa main longue et fluette dans la main du
chanoine, elle releva les yeux, et Philippe
s'étonna de leur grandeur : ils n'étaient ni
bleus ni noirs, mais d'un gris velouté ex
trêmement doux,, frangés de longs cils
bruns ontrecroisés par les bouts, qui don
naient à son regard quelque chose de pro
fond et d'étrange ; le nez petit, un peu
pincé des narines, révélait à l'observateur
la femme qui a plus d'âme que de tempé
rament, plus de pensées que de désir, plus
de tendresse que de passion. Elle ôtâ son
chapeau et lissa du bout de ses doigts
deux bandeaux épais qui descendaient
jusqu'au bas de ses joues, souples, molle
ment ondulés, et de cette nuance indécise
à laquelle il est difficile de donnèr un nom
précis, qui paraît brune à' l'ombre, blonde
au soleil, et dont les fauves reflets font
involontairement songer aux feuilles mor
dorées et aux après-midi d'automne,
Phiiippo,debout, droitetimmobile corri-
me une statue, s'était, après la présenta
tion, adossé à un grand meuble, faisant
tout à la fois office de dressoir et de biblio
thèque, car il y avait à son rez-de-chaus
sée une collection des Pères de l'Eglise, et,,
aux étages supérieurs, une pile d'assiettes
et des rangées de verres.-Le curé s'appro
cha de lui, et, le prenant par lamain, ii l'a
mena vers la plu» jeune des dames Delau
nay-, en lui disant, j
— Ma chère Edmée, permettez à M. d«
Saint-Wandrille de .vous offrir son bras ; ;
nous allons dîner.
_ -—Jean, qui cumulaitce jour-là les fonc
tions de maître d'hôtel avec sa charge da
sacristain, venait en effet d'ouvrir à deux,
battans les portes de la salle à manger.
— Philippe s'inclina, avec une gravité
un peu cérémonieuse, et celle qu'on appe
lait Edmée posa légèrement lamain ou
plutôt le bout des doigts sur son bras,
avec je ne sais quelle grâce timide.
Saint-Wandrille, lorsqu'il regardait une
femme, a vait une certaine façon d'appuyer
l'œil, si j'ose ainsi parler, qui l'avertissait
tout d'abord qu'elle avait en face d'elle uû
hommè avec qui, tôt ou tard,, il lui fau
drait compter. Mais ce ne fut point ce re
gard qu'il eul» pour Edmée. Il comprit
qu'il rencontrait une de ces créatures dé
licates devant lesquelles l'homme doit tout
d'abord adoucir l'âpreté de ses prétentions
et l'ardeur de sa poursuite, s'il ne veut
point froisser cruellement je ne sais quelle
pudeur instinctive et discrète, qui fait
pour ainsi dire, le fond de leur nature: Sa
réserve, empreinte de respect, fut le pre
mier hommage qu'il lui offrit. "
Quel effet, de son côté, Philippe produi- *
sit-il sur celle que l'on appelait Edmée ?
C'est ce qu'il eût été bien difficile de dire •
car, malgré la grâce sympathique de sà
personne, rien d'elle ne se communiquait
et pour peu qu'elle le voulût, elle pouvait
être impénétrable. L'Isis égyptienne est
moins cachée, au fond du sanctuaire, sous
ses triples voiles.
Le maître de la maison plaça tout, na
turellement la vieille daine à sa droite.
— Vous, à ma gauche, ma chère Edniée
dit-il à l'autre. '
Philippe, si maître qu'il fût de. lui-mê
me, ne put répl-imer un léger mouvement
de surprise en entendant, pour la seconde
fois, son jimi appeler ainsi tout simplement
par son petit hom une femmë aussi jeune
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