À propos de l’œuvre Noëlle Benhamou

Femme à l’ombrelle tournée vers la gauche

Influencé par l’œuvre de Flaubert, Une vie est le premier roman de Guy de Maupassant paru en 1883 chez l’éditeur Havard, après avoir été publié en feuilleton dans Gil Blas du 27 février au 6 avril 1883. Il évoque la destinée de Jeanne Le Perthuis des Vauds, frêle jeune fille rêveuse et impréparée face à la dureté de l’existence. À peine sortie du couvent, la blonde héroïne épouse Julien de Lamare, hobereau normand, aussi séduisant que viveur. Confrontée à la mort de ses parents, d’abord sa mère puis son père Simon-Jacques, un baron libre-penseur et rousseauiste, au décès de son second enfant puis de Julien et de sa tante Lison, Jeanne aura subi les infidélités de son époux, affronté les secrets de famille trop longtemps tus, la trahison de sa sœur de lait Rosalie, séduite par son mari et mère d’un fils illégitime, puis de son fils Paul, aussi dépravé que son père, qui lui laisse sa fille nouveau-née à élever, fruit de ses amours avec une femme légère. La vieillesse de Jeanne s’avèrera plus douce, au côté de Rosalie.

 
Soleil couchant à Etretat
Etretat. Falaise d'aval
Ajaccio, vue prise de l'École normale
 

Roman salué par la critique et diffusé dans les gares, Une vie connut un succès public en raison du sujet traité : la condition des femmes dans la société de la Restauration, mais surtout des descriptions du Pays de Caux et de la Corse où Jeanne connaît le plaisir lors de son voyage de noces. La réception du roman fut donc plutôt bonne pour une œuvre dont la gestation fut longue, le manuscrit portant les traces de multiples corrections. Deux courants s’opposent dans la critique contemporaine. Les antinaturalistes saluèrent le naturalisme atténué et la puissance de l’œuvre, tandis que les naturalistes admirèrent la maîtrise du style et le sens de la vie se détachant des pages du roman. Ils y virent un chef-d’œuvre de l’écriture de la nouvelle école. D’autres critiques furent choqués par l’évocation parfois crue de la sexualité (nuit de noces, voyage en Corse, adultères de Julien, etc.) et des pulsions de mort de Jeanne. Mais ces passages évoqués comme s’il s’agissait d’une femme qui tenait la plume contribuèrent à rendre pérenne et actuelle l’histoire de Jeanne aux prises avec ses désillusions. Plusieurs adaptations cinématographiques du roman existent, la dernière étant celle de Stéphane Brizé, saluée en 2016.