Les Troyens de Berlioz : un manuscrit retrouvé

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15 mars 2018

La Bibliothèque nationale de France vient de mettre en ligne sur Gallica une partition manuscrite pour chant et piano des Troyens de Berlioz, que l'on croyait disparue depuis plus d'un siècle.

C’est en 1858 que Berlioz achève la composition des Troyens, qui s’affirmera comme le plus grand de ses opéras. Peu de temps après, il décide de reprendre sa partition d’orchestre et d’en rédiger une version réduite pour piano et chant, un travail qui l’occupera jusqu’en juin 1859. Ce second manuscrit, source capitale de l’œuvre puisqu’il contient notamment deux scènes absentes de toutes les partitions des Troyens éditées par la suite, s’est entouré d’une aura de légende : on le croyait en effet, jusqu’à récemment, irrémédiablement disparu.
 

Le finale original des Troyens (« Fuit Troja ! Stat Roma ! »), que Berlioz remplacera ensuite par une version raccourcie

 

Fin 2014, pourtant, le président de la Bibliothèque nationale de France Bruno Racine reçoit un coup de fil en provenance de Londres lui annonçant cette nouvelle : le manuscrit pour piano et chant des Troyens, dont la trace était perdue depuis un siècle, vient d’être retrouvé ! Il était passé pendant tout ce temps entre différentes mains, avant de se retrouver en la possession d’un collectionneur privé, qui ne se doutait guère de sa valeur.
Intégrer cette pièce exceptionnelle à ses collections et la rendre visible au public et aux musiciens après sa si longue disparition deviennent aussitôt une priorité pour la BnF. Après l’avoir fait classer Trésor national, l’établissement parvient à faire l’acquisition du manuscrit début 2016.
 
Duo Didon-Énée, « Nuit d’ivresse et d’extase infinie », acte IV

 
On ne saurait mesurer tout ce que ce manuscrit apporte à notre connaissance de Berlioz et des Troyens. Ce travail de transcription de l’orchestre au piano effectué par le musicien lui a par exemple permis, selon ses propres dires, de repérer des faiblesses dans l’orchestration d’origine, qu’il s’est empressé de rectifier dans la partition d’orchestre que nous connaissons. Il est également à noter que le manuscrit, fait rarissime, porte la trace d’une autre main que celle de Berlioz : celle de son amie la cantatrice Pauline Viardot (1821-1910). Il contient enfin deux scènes absentes de toutes les autres partitions connues de l’opéra, que nous découvrons pour la première fois dans leur intégralité : la « Scène de Sinon » de l’acte I, et le finale original de l’œuvre.
 

Le pantomime du début de l’acte IV, « Chasse royale et orage », est de la main de Pauline Viardot

 
Ce manuscrit, qui devrait sans aucun doute renouveler notre approche des Troyens et influencer la manière dont il sera représenté à l’avenir, est désormais consultable sur Gallica.