Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-01-12
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32747578p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 124053 Nombre total de vues : 124053
Description : 12 janvier 1852 12 janvier 1852
Description : 1852/01/12 (Numéro 12). 1852/01/12 (Numéro 12).
Description : Collection numérique : Grande collecte... Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail
Description : Collection numérique : La Grande Collecte Collection numérique : La Grande Collecte
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k669528d
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NUMERO 12.
• - 1F. T ^. i.rti? rf r* « If IWw'fel' («Wknnu»! VnWi'î 10;
lSS2.^iUi\DI 14-JANVIER.
PÏSLÎ^ T!E S,' A ZCll^Cr.TS.^T
pour Paris et les népu.ï'trj.ieiVi :
trois mois. J2 *. j SIX sotsi. ï'i k.
i es A.y . 4$. F.
i pock lks i'ats ètranfikîis , se reporter
au tableau qui sera publié danslejoui iirti,"
es 16 et 35 de chaque mois.
Les' abonnemens datent des i m el i6
de ch'ioue mois. ■
rpi wnii
t x nÉfig fLBG;VV
ao
&S $ ! *>\
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
S'adresser, franco, pour 1% rêdaetion T , à MJ B onifa.œ S |
i Les-articles déposés ne sckt pas rendus;
On j'aJonne, dans iet départemens, r aux Messageries et auxDirections depastel—A Londres, eJiez,MA'S Covrrs et Pir>;
— A Strasbourg, ck n z M, ALE\A>nnr, fw r l'Allco-a;, e.
S'adresser, franco, pour l'administration, à M. D knàis, directeur.
Les annonces sont reçues au bureau du journal ; et chez M. PAN1S, tégisscur, l0;-plac9 de la Bourse
*I*A1STS X ^ W ÏÏStf /
Le Moniteur contiendra demain un décret
du Président de la République sur la rébrga-
nisalion.de la garde nationale.
Nous croyons savoir que ce décret attein
dra le double but d'assurer la défense de
l'ordre et de reconnaître le concours que la
garde nationale a souvent' prêté au maintien
de la tranquillité publique.
Le service de la garde nationale ne sera
pas facultatif.- On ne sera tenu à ce service
que jusqu'à l'âge de cinquante ans.
Dans le département de la Seine, les offi
ciers seront nommés par le Président de la
République.
Dans les autres départemens, les officiers
seront nommes par les préfets.
L. B0KIFACE.
!. A propos des mesures de sûreté publique,
prises par ls gouvernement, on a rappelé le
souvenir du 18.fructidor et le jugement
qu'un historien célèbre, M. Thiers, a porté
sur le coup d'Etat du Directoire. Nous citons
les paroles de M. Thiers:
« Telles devaient être les conséquences du coup
d'Etat du 18 fructidor. On a dit qu'il était devenu
inutileà l'instant où il fut exécuté ; que le Direc
toire, en effrayant la faction royaliste, avait déjà
réussi à lui imposer ; qu'en s'obstinant à faire le
coup d'Etat, il avait préparé l'usurpation militai
re par l'exemple de la violation des J lois. Mais,
comme nous l'avons déjà dit, la faction royalis
te n'était intimidée que pour un moment; à l'arri
vée du prochain tiers, elle aurait infailliblement
tout renversé et emporté le Directoire ; la guerre ci
vile eût alors été rétablie entre elle et les armées.
Le Directoii^ en prévenant-ce "moment et en le
réprimant à. propos, empêcha la guerre civile ; et
il ge mit par là sous l'égide de la puissance mili
taire : il subit une triste, mais inévitable nécessité.
La légalité était une illusion à la suite d'une ré
volution comme la nôtre ; ce n'est pas à l'abri de
la puissance légale que tous les partis pouvaient
venir se soumettre et te reposer ; il fallait une
puissance pl'ifè-forte pour les réprimer, les rappro
cher, les fondre, et pou,r les protéger contre l'Eu
rope marmes ; et cette puissance, c'était la puis
sance militaire. '
i-'» Le -Dircctoire, par le 18 fructidor, prévint donc
la guerre civile", et lui substitua un coup d'Etat
exécuté'avec force, mais avec tout le calme et la
modération possibles dans les temps de révolution .»
Le journal qui cite ce passage fait obser
ver avec raison que les mesures adoptées par
le Directoire, et approuvées par ftT. Thiers,
ont été bien plus sévères qeie celles du gou
vernement de Louis-Napoléon. En effet, le
Directoire avait frappé de la peine de la dé
portation 45 çeprésentans, 11 membres du
conseil des Anciens, -2 directeurs , Carnot
et Barthélémy, le ministre de la police, le
chef de la garde législative et les propriétai
res, éditeurs et rédacteurs de quarante-deux
j ournaux. Le gouvernement actuel n'a appli
qué que l'expulsion du territoire ou l'éloi-
gnement temporaire là où le Directoire avait
employé la peine de la déportation effective.
v l. boniface.
Il paraît que lord John Russell a renon
cé, pour le moment, à modifier son ca
binet -, un membre de 4 la chambre 'des
communes , M. James Wilson , prendrait
provisoirement les fonctions laissées vacan
tes par lord Granville; et l'ouverture du
parlement précéderait tout changement mi-
nistérifel. C'est là la seule conclusion possi
ble d'un article fort nébuleux et fort entortil
lé, dans .lequel le Kmes laisse échapper quel
ques aveux qu'il importe de relever. Le 1 i' nes
reconnaîtque lord John Russell a fait sonder
indirectement les membres d'un parti auquel
il s'était déjà adressé deux fois, c'est-à-dire
les Peelites ; que le but du premier ministre '
était de remplacer trois ou quatre de ses col
lègues par des ministres nouveaux ; mais que
•ses a^^f^r^orîf ~èt(ironies avec un médio
cre empressement et n'ont produit aucun
résultat; enfin, que le mil libère est résolu à
affronter avec ses seules forces l'ouverture
"de la session.
Le Times ne croit pas que le cabinet puisse
sortir avec succès de celte épreuve redouta
ble, et il ne lui semble pas que l'opposition
soit plus eu état que l'année dernière de
prendre le pouvoir. Les whigs lui parais
sent encore le seul parti en état de gouver
ner, mais à la condition'd'ouvrir leurs
rangs, sans trop de peine, à des recrues nou
velles. Tons ces beaux raisonnemens nous
préparenCà un renouvellement de la comé-
-die de février dernier. Lord John Russell
donnera sa démission après le premier éeliec;
lord Stanley déclinera la tâche de for
mer un cabinet, et le chef des whigs,
se laissant fléchir, consentira à revenir
aux affaires : mais, comme il sera libre
de tout engagement vis-à-vis de ses anciens
collègues, comme la question catholique
' ne le séparera plus de sir James Graliam, •
il se flatte de composer aisément un minis
tore de conciliation; dans lequel entreraient à
la'fois quelques-uns des Peelites, et deux
ou trois des artiis les moins exigeans et les
moins compromis de M. Cob'den, sinon M.
Cobden lui-même. Cette conjecture nous pa
raît la seule explication des conseils peu
spontanés que le Times donne à lord John
Russell, en l'engageant à élargir la base de
son gouvernement, à briser tout lien de
coterie, et à comprendre, dans une com-
j maison qui n'est pas immédiatement né
cessaire , tous les élémens modérés- et
libres-échangiste de la chambre des commu
nes? Ilv à là une avance évidente à l'école
de Manchester. Que signifieraient d'ailleurs les
doléances hypocrites exprimées, il y a deux
jours à peine, çur le joug que subissent*
les hommes distingués do cette école,
qui, liés par les discours-de leurs sectateurs
plus que par leurs propres paroles et leurs
•propres actes, ne sont plus toul-à-fait libres
de suivre les inspirations de leur bon sens,
et se laissent entraîner, par leur clien
tèle, plus loin qu'ils ne voudraient aller ?
Tout ce patelinage, fort inusité dans les
journaux qui l'emploient, veut dire en bon
anglais, que si M. Cobden et M. Milner Gib-
son voulaient bien renoncer à leurs exer
cices oratoires , et abandonner les succè.s
de meetings à MM. Fox, WahnslejL £t.
Thompson, lord John Russell serait char
mé de leur faire une petite place dans
le cabinet, afin de se servir d'eux pour tenir
en échec sir James Grahametleduc de New-
castle. Le système de bascule que le premier
ministre a pratiqué dans le parlement de
puis trois ans, il est prêt à le pratiquer au
sein de son propre ministère'; et il se fiait :
que les deux fractions dont le concours lui
est nécessaire accorderont plus facilemmi a
des membres du cabinet l'appui qu'elles mu ■
chandaient l'année dernière à des co-reii-
gionnaires en libre-échange.
Maintenant, ce Calcul réussira-t-il, ci la
perspective d'avoir dpux ou trois amis au
pouvoir déterminera-t-elle les partis à abdi
quer leur existence indépendante, et à met
tre leur popularité, leur influence et leurs
votes au service des whigs? Ces partis
ne. préféreront- ils pas essayer leurs for
ces dpxis' une élection générale où tou
tes les chances sont en ce moment contre
le ministère. et conquérir le pouvoir sur les
ruines des whigs, au lieu de se laisser mesu
rer par ceux-ci leur part d'action dans le
gouvernement? Lord John Russell est-il bien
sûr que les,événemens du continent, qui lui
paraissentunç garantie deson propre maintien
au pouvoir, ne soiént pas,aux yeux des tories,
une raison d'accepter cette année la tâche
devant laquelle ils ont reculé l'année der
nière? Du reste, comme le parlement doit se
réunir le 1 er février, nous ne tarderons pas
à savoir quelles sont, les chances de vitalité
que le ministère actuel conserve encore.
CXJCUEVAL-CLAXUGNT.
w
Un de nos correspondais du , Midi nous
adresse quelques renseign mens au sujet des
inculpés qui sont l'objet de poursuites judi
ciaires dans le département des Pyrénées-
Orientales. Si les socialistes de cette partie de
la France n'ont pas pris une part matérielle
à l'insurrection, ce n'a certes, pas été faute
de bonne volonté ou de préparatifs de leur
part. Il faut uniquement attribuer leur
inaction à la promptitude et à la vigueur de
la répression, qui a paralysé les plus fiers
courages, et aussi au refus de concours qui
a été opposé presque unanimement aux me-v
neurs par les populations du département,
dès qu'elles ont su qu'il s'agissait de mar
cher contre le gouvernement tie Louis -Napo
léon.
Le département des. Pyrénées-Orientales
était l'un de ceux qui avaient le triste privi
lège de comptçr le plus grand nombre de
sociétés secrètes. Elles s'étaient surtout mul
tipliées dans les arrondissemens de Prades et
de Perpignan, et les scènes sanglantes qui
ont eu lieu à diverses époques dans cette der
nière cité, attestent douloureusement l'in
fluence de leurs horribles eùseignemens' sur
les esprits faibles et les imaginations ar
dentes.
A la date du 3 du courant, 138 mandats
d'arrêt avaient déjà été lancés pour le seul
arrondissement de Perpignan, et 116 avaient
reçu. leur exécy.ti^au, La .gendarmerie n'a,
cessé depuis de se livrer aux plus actives re
cherches pour s'emparer des fuyards : ~ Ces
'jours derniers/ de nouveaux mandats d'ar-
..rèt au nombre de 6, et 14 mandats d'amener 1
ont encore été décernés par les magistrats
instructeurs. En somme, pour les trois ar
rondissemens de'Perpignan, dej-'rades et de
Ceret, le nombre des arrestations opérées
s'élève aujourd'hui au chiffre de 20G.
. Tout en respectant le secret de l'instruc
tion, nous croyons pouvoir livrer à'nos lec
teurs quelques détails, que nous transmet
notre correspondant, sur ce qui a transpiré
dans le pays, des révélations faites pendant le
cours des interrogatoires.
« Les aveux se pressent; nous écrit-il, sur
,les lèvres de~la plupart des inculpés; ils
montrent généralement du repentir, et de la
haine pour ceu-x qui les ont entraînés en les
trompant,idaps. la voie de la conspiration et
de la révolte^ Rais ils racontent franchement
et naïvemeât'cè qu'ils ont appris à leurs dé
pens. *
» Voici, par exemple, une information vrai
ment instructive et que nous recommandons .
à ces incorrigibles incrédules qui s'obstinent
à qualifier d'inventiôn&afftcirllcsune cev-taïue
nature de honteux excèsque la publicité a dû
enregistrer pendant les derniers événemens
il existait de» sociétés dans lesquelles les af
filies se prêtaient réciproquement le serment
de ne point viotwles ûnsTes femmciHTês autres,"
quand viendrait le jour du- pillage et du
biar.le-bts' ... » '
aveux de plusieurs détenus, la démagogie
employait pour se créer- 'une armée a son
image," une armée capablç-de tout à "un mo
ment donné, la mK> eu scène que a oici mé
rite-une mention spéciale.
Quand un nouveau candidat se présentait
poui aieadmisdansune société secrète, après
les sermens et épreuves d'usagé, on lui fai
sait culi r une dernière et décisive épreuve.
On h 11 tndait les yeux, on l'armait d'unpoi-
gu u 1 i îis oQilui 'disait, en mettant sous sa
ma u une pièce de bois ou un mannequin :
Tu as juré tout à l'heure d'être sans pi
tié pour les ennemis du peuple,; pour
les blancs; eh bien! voici devant toi un
ennemi du peuple, un Blanc ; frappe ! — Le
récipiendaire,selon son tempérament ou son
degré d'ivresse, frappaitou né frappait pas.
S'il frappait, l'un des affiliés présens simulait
les gémissemen&d'im hbmme qu'on égorge,
et le récipiendaire était immédiatement dé
claré bon pour le service., S'il ne frappait
pas, op emportait l'appareil, le blanc, et la
réception était ajournée jusqu'à ce .que le ca
téchumène eût le cœur plus ferme et la .main ,
plus sûre. D enain.
' i——
Des militaires appartenant à tous les corps
de l'armée ont été tués ou blessés en combat
tant pour la défense de l'ordre et de la société.
De tous les points dê la France, des cotisations
volontaires ont été destinées aux familles des
soldats morts glorieusémei^t pour la cause de
la civilisation, et à ceux d'entre eux qui sont
désormais hors d'état de -servir. Nous avons
annoncé qu'une commission officielle avait
été instituée pour régulariser l'emploi des
fonds provenant de ces cotisations "volontai
res. Le ministre de la guerre a souscrit pour
une somme de riOO fr. Tous les amis de l'or
dre voudront s'associer à cette œuvre de re
connaissance et de justice. ?ious ouvrons
une souscription dans les bureaux du Consti
tutionnel.
L'administration du Constitutionnel
souscrit pour - ' " 500 fr.
Un chasseur à cheval d'une garni
son de la Meuse, 20 fr.
Jules Lecœur, docteur-médecin ) à *
Caen, , 25 fr.
"Godeïroy aîné, cultivateur, à Cléry-
sur-Somme, 2b fr.
■ ——————
Le Président de la République, pour hono
rer la mémoire de M. le maréchal-général
Soult, duc de Dalmatie , a ordonné qu'un
service funèbre serait célébré àsonintention,
•mardi prochain, 13 de ce mois, à onze heu
res, daûs l'église des Invalides.
Là famille du maréchal se trouvant dans
l'impossibilité de faire parvenir, en temps
utile, les lettres d'invitation à toutes les per
sonnes qu'èlle désirerait voir se réunir à elle
dans cette pieuse solennité, a l'honneur de
les prier de vouloir bien considérer le pré
sent avis comme une invitation. •
Nous lisons dans la Gazette d'Augsbourg,
du 7: - '
u Un document intéressant nous arrive concer
nant le projet d'union entre le Zollverein et l'Au
triche. 11 contient les propositions de cette dernière
puissance, faites.d'une manière large et positive.
L 'Autriche se soumet, sauf quelques modifications
indispensables, à tous les règlemens du. Zollverein.
Elle propose u ne représentation consulaire commu
ne à l'étranger, en Orient par l'Autriche, en Améri
que par la i'russe et les villes anscatiques. Elle pro
pose un pied monétaire commun qui pourrait se
réduire sur le pied de florin, de thaler et de la pièce
française de 5 francs. Mais la proposition.la plus
importante est une nouvelle organisation de l'u
nion d'après laquelle ta questions seraient ré
solues à la majorité des voix des Etats,et, seule
ment dans quelques, cas très importans, auraient
besoin de -la ratification de l'Autriche et de la
Prusse.
»La répartit ion du revenu des douanes de l'union
serait faite d'après les données statistiques réunies
à la fin de l'année 1858.»
naufrage de l'amazone.
- Une enquête a été ouverte à Southampton pour
arriver à'connaître les causes qui ont amené la
perte du bateau à vapeur l'Amazone, et pour dé
terminer la responsabilité des assureurs. Toutes
les personnes sauvées ont été-successiveroent in-
teno es p r la commission d'enquête. On lira
. avec un douloureux intérêt la déposition de James
Ho lui un d n cille^urs marins^de l'"Amazbne. .
«J'étais de garde en vigie, la nuit du sinistre.
Mowait un di rutelots qui ont été sauvés, était
de srarde avec moi à l'autre bout du navire, et nous
euons sous la surveillance du second officier. A une
heure moins un quart j'entendis la cloche d'alarme
que sonnait Passmore, un des marins sauvés. Je me
retournai, et voyant par où sortait le feu, je cou
rus'immédiatement-à l'enflroit où étaient des
seaux qui avaient été remplis d'c-au pour laver le
pont le dimanche matin avant la prière, et je les
vidai par l'ëcoutille par où sortait la flamme. Avec
le secours d'un autre hftmrae, je lançai aussi par
dessus bofd des bottes de foin qui avaient pris feu.
» A ce moment, le capitaine parut sur le pont en
chemWc ; et avçc'son-pantalon, maissarisbas ni sou
liers, et je l'aidai à jeter de l'eau dans la cabine
de l'avant. Le capitaine était parfaitement calme et
maître de luf r même, et quoique travaillant de tou
te son énergie, il donnait encore des ordres aux di-
versis .personnes qui étaient autour de-lai. Une
scène ds terreur et d'indescriptible confusion sui-
. vit. ; et j'entends encore résonner à mes oreilles les
clamçursde désespoir, les crisd'agonie des passagers
1 et lesmugisSSmensdes aninjaux que le feu empri
sonnait. J'ai vu nombre de personnes se précipiter
sur le pont/frappées de terreur et quelques-unes
' horriblement-brûlées. Plusieurs titubaient mortes
parle feu et* l'asphyxie ou s'évanouissaient de
frayeur ou par l'excès delà souffrance. Je me sou
viens avoir vu apparaître sur le pont un enfant
couvert seulement d'un manteau de toile eirée et
la figure tonte brûlée.
» Pendant-què j'aidais à descendre et à disposer
la chaloupe dans laquelle nous nous sommes sau
vés, une des passagères se précipita sur le pont.
Elle n'avait sur elle que sa chemise de nuit, elle
avait le ventre et les cuisses fort brûlés. Trois lois
elle a été placée dans la chaloupe, une.fois par le
quartier-maitre Dunford : mais elle refusa d'y
rester. J'ai entèndu plusieurs personne? lui dire
en toute hâté qu'ils lui donneraient dés vètemens
de j;este et sans tarder, dès que la chaloupe serait
en mer; mais la pudeur l'emporta chez elle sur
l'amour de la vie, elle est demeurée en arrière
et elle a dû périr. Les derniers mots que j'ai en
tendu dire au capitaine ~ Symons sont ceux-ci :
«C'est fait de nous, il n'y a plus d'espoir, mes en-
fans; tenezles-"chaloupcs prêtes.» Je l'ai vu alors
pour la dernière fois, il quittait l'avant pour se
porter à l'arrière. A ce même, moment je'fus ren
versé sur le pont, et je me fis une grave contusion
au genou.
■ « Ce qui a ajouté beaucoup aux désastreuses con
séquences de l'incendie , c'est l'impossibilité où
l'on a été d'arrêter la machine à cause de l'affreuse
chaleur de la chambre du chauffeur. La rapidité
effrayante avec laquelle le navire était lancé sur
l'eau rendait à peu près impossible de mettre les
chaloupes à la mer sans les.-submerger. C'est par
un hasard presque miraculeux que la nôtre n'a
pas sombré. Quand j'ai quitté le navire, je n'ai
plus vu un seul vivant à bord-; tous les-autres
doivent s'être noyés en essayant de se sauver, ou
avoir péri dans les flammes. Le jour s'était
levé avant que l'Amazone sombrât ; je la voyais
distinctement quand la sainte-barbe fit ^explo
sion , lançant en l'air une quantité énorme
de projectiles et de débris. Nous avions ramé
l'espace de vingt-cinq à trente'milles quand nous
aperçûmes un bâtiment, que nous' hélâmes cfe
toutes nos forces. Je suis certain qu'on nous a en
tendus, car j'ai vu une lanterne mise en mouve
ment comme si on cherchait à reconnaître'de quel
côté partaient nos cris. Mais aucune tentative ne
fut faite pour venir à notre secours quoique le ca
pitaine et son équipage n'aientpu manquer dé voir
l'Amazone, qui était toute en flammes. »
Une lettre adressée de Brest au Chroniele, con-
tiént^d'intéressans détails sur le sort de ceux des
passagers de l'Amazone, au nombre de vingt-„cinq,
qui ont été-, recueillis en mer par la goélette hol
landaise Gertriàda. Après avoir dit que les autori
tés françaises se sont hâtées d'expédier le bâtiment
à vapeur le ' Souffleter à la recherche de l'autre
chaloupe', cette lettre continue ainsi.
« On a amené à terre les naufragés de VAma
zone. On ne saurait imaginer un plus triste spec
tacle. Parmi eux se trouvent deux femmes et un
enfant, et on se fera une idée de leurs souffrances
quand on sav.ra qu'outre l'horrible danger qu'elles
ont traversé, elles ont été exposées à toutes les ri
gueurs de l'hiver pendant quarante-huit heures,
dans un bateau découvert et dans une nudité-
presque complète.
»Le feu a éclaté après que les passagers s'étaient
retirés pour dormir, et il s'est déclaré avec une si
effrayante rapidité , que personne n'a eu le temps
de sauver la moindre chose et même de s'habiller.
Les dames de la ville et la temme du consul anglais
se sont hâtées d'envoyer à ces malheureuses les
vètemens dont elle avait si grand besoin. Une de
ces dames, Mme Maclennan, cït erue'lement brû
lée, mais pas au point de mettre si vie en danger.
Pendant tout le temps qui s'est écoulé entre le tin
tement de la cloche d'alarme et son embarquement,
elle a tenu serré contre son sein avec une obstination
maternelle son fils, un enfant de dix-huit mois,
et elle a réussi à lé sauver avec elle, lorsque tant
d'autres ont péri.-Son mari, fonctionnaire du gou
vernement à Démerari, était aussi à bord. Elle
ignore encore sa mort, et s'imagine qu'il a réussi à
se sauver dans une autre chaloupe, mais ses com
pagnons d'infortune s'ont convaincus queMaclennan
a été tué par l'explosion de la sainte-barbe. L'autre
dame qui a été sauvée, miss Maria Smith, vènait de
Dublin, et se rendait à Porlo-Rico pour être institu-
trice. dans une famille. Tous ces naufragés sont
également dépourvus de vêiemens et d'argent;
mais le consul anglais leur a fait donner le néces
saire, et il a-pris des-mesam-peer les transporter
sans délai à Morlaix, d'où ils seront rapatriés en
Angleterre. »
ACTES OFFICIELS.
v
RSPUBZ.ZÇUS £ H.i?JÇû.ïSE.
AU NOM, DD PEUPLE FRANÇAIS.
Louis-Napoléon, Président de la République,
Considérant qu'il est urgent d'assurer, dans les
ports et à la Guyane française l'exécution des pre
mières mesures relatives à la transportation ;
Yu le décret du 20 décembre, qui ouvre à cet
effet un premier crédit de 638,000 fr. :
Sur le rapport du ministre secrétaire d'Etat au
département de la marine et des colonies, et de
l'avis du conseil des ministres ; *
Décrète :
Art. 1 er . Il est ouvert au ministre de la marine
et des colonies, sur l'exercice- 1852, un crédit de
8,587,000 fr. pour les mesures nécessaires à la for
mation d'un établissement à la Guyane française.
Art. 2. Ce crédit sera, réparti ainsi qu'il suit :
SERVICE MAH1NE. — Service général.
Chap. V. Solde et habillement des
équipages et des troupes
Chap. VII. Vivres
Chap. X. Approvisionnemens géné
raux de la flotte
Chap. XIV. Affrétemens et trans
ports par mer
Chap. XVII-'Frais de voyages, vaca
tions et 'dépenses diverses
524.400
389.500
722.600
70.000
10.500
Service eoionial.
1.717.000
( Chap. I er . Dépenses des services mi
litaires des colonies (personnel) 392.000
Chap. II. Dépenses des services mi
litaires des colonies (matériel) 50.000
Chap. IV 1er. Formation d'un éta
blissement â la Guyane ....... 1.428.0Ô0
Total 3.587.000
Art.'3 1 . Les ministres'dô'ia'inarine et des colo
nies et des finances sont chargés, chacun en ce
qui le concerne, de l'exécution du présent décret,
qui sera inséré au Bulletin dn lois.
Fait au palais des Tuileries, le 9 janvier 1852.
LOUIS-NAPOLÉON.
Le ministre de la marine
et des colonies, •
THÉODORE DUCOS.
Le njinistre des finances,
ACHILLE FOULU.
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS.
Le Président "de la République,
Vu la loi du 9 août 1849 ;
Vu le décret «lu 26 décembre 1851, concernant
la délimitation des nouvelles circonscriptions des
divisions et subdivisions militaires ;
Considérant que le dépax-tement des Hautes-
Alpes se trouve aujourd'hui compris dans la cir
conscription delà 8 e division militaire, et que tous
les départemens qui l'avùisinent ayant été le théâ
tre d'agitations graves ont été mis successivement
en état de siégs ;
, Considérant que l'unité d'action de l'autorité
militaire serait paralysée sur ce point de la 8 e di
vision, si le département des Ilauîes-Alpes se
trouvait seul placé en dehors des conditions de la
loi du 9 août 18 ±9 ;
Considérant qu'à la suite des événemens qui
ont ensanglanté les départemens voisins, le dé-
paitement des Hautes-Alpes a été sur quelques
points agité par des scènes de désordre qui ont
révélé l'existence dç projets anarchiq.ues ;
Attendu que cette situation constitué l'état de pé
ril imminent prévu par la loi du 9.août 1849 ;
Le conseil dès ministres entendu,
Décrète :
Art. 1 er . Le département des Hautes-Alpes est
déclaré en état de siège.
Art. 2. Les ministres de l'intérieur et de la guer
re sont chargés, chacun cri ce qui le concerne , de
l'exécutioil du présent décret.
Fait-au palais des Tuileries, le 4 janvier-1852.
♦ Le Président de la République,
LOUIS-NAPOLÉON.
Le ministre de l'intérieur,
A. DE MOUNY.
^ ' ClP.CULAiaE. • ■
Monsieur le préfet, d'après l'art. 2 du règlement
du 10 février 1835, sur le service des cantonniers
employés à l'entretien des routes, ces ouvriers sont
nommés et congédiés par l'ingénieur en chef, sur
la proposition de l'ingénieur ordinaire. Le préfet
peut seulement exiger le renvoi et le remplace
ment de ceux sur lesquels il aurait reçu des ren-
seignemens défavorables.
Ce mode dénomination des cantonniers adonné
lieu, dans ces derniers temps surtout, à des récla
mations qui m'ont paru fondées. S'il est néces
saire, en etlet, que les ingénieurs interviennent
dans le choix d'agens inférieurs placés sous leur
direction immédiate, il n'est pas moins convenable*
que l'administration départementale ait de sérieux
moyens de contrôler la conduite et la moralité de
ces agens. Or, c'est surtout au moment de leur ad
mission que ce contrôle peut être exercé d'une ma
nière efficace.
J'ai décidé, en conséquence, par l'arrêté dont
je vous envoie une ampliation, que les canton
niers seront à l'avenir nommés et congédiés par
le préfet.
Il n'est rien changé d'ailleurs aux conditions
d'admission établies par l'article 3 du règlement
du 10 février 183o.
. Je vous prie, Monsieur le préfet, de m'a-xuser
réception de la présente circulaire, dont j'adresse
copie à MM. les ingénieurs en chef.
Recevez, Monsieur le préfet, l'assurance de ma
considération la plus dtetinguéev
Le ministre des travaux publics,
magne.
ARRETE.
Le ministre des travaux publics
Arrête : -
L'article 2 du règlement du 10 février 1835 sur
le service des cantonniers employés à l'entretien
des mutes sera-modifié comme il suit :
Les cantonniers sont nommés par le préfet sur
une liste de proposition présentée par l'ingénieur
en chef et contenant un nombre de candidats tri
ple ou au moins double-du nombre d'emplois à
remplir.
, Ils sont congédiés par le préfet sur l.i proposi
tion ou sur l'avis de l'ingénieur en chef.
Paris, le 10 janvier 1852.
MAGNE.
Le Momleur publie aujourd'hui un décret sur la
pèche côtière, que nous reproduirons.
WOOTEUL3SS tTUAtm^WEB.
■ ANGLETERRE.
Des ordres sont donnés pour la construction
d'une batterie de iOOcandfts à Nah-Light, près de
Spithead; ainsi que d'une batterie provisoire à
Lum ps, près de Spithead sur la côté de Portsmouth,
aussi de 100 canons, et dans le plus bref délai.
Un nouveau fort est en cours de construction à
Browndown, en face de Rydes (île de Wight),sur
la côte de Gosport. On y'emploie deux compagnies
FEUILLETON DU C^SWriJTîONNËL,\î MNV.
THÉÂTRES.
théatre-françai& : La Diplomatie en Ménage, co
médie en un acte, de Mme Berton. — vaudeville :
" Les 'ftêvss de Matheus, comédie fantastique en
cinq actes, dé MM. Mélesville et Carmouche. —
' Mlle Déjazet. -
Je -vous dirai que Mme de Pange, — .Ah !
Yoilà un l )ien beau nom dans une petite fan
taisie bourgeoise — que. Mme de Pange, la
belle Madame de Pange, femme d'un cer
tain de Pange, gentilhomme qui fait dés af
faires à la bourse, un huitième d'ageiit de
çiïange peut-être honorable d'ailleurs et
bien élevé,.e't bien fidèle, ut bien aima
ble au fond, quoique maussade les jours
de [hausse s'il a joué à la baisse; au
demeurant, parfait mari, ainsi que vous'
le verrez, —je vous dirai donc que Mme de
Pange est modestement .assise au coin
de son feu, dans un salon-boudoir qui
sent, sa Chaussée-d Antin, et qu'elle s'oc
cupe, pour l'instant, de divers petits ou
vrages d'aiguille, après avoir donné son
coupd'œil à la cuisine ; et qu'elle est. soi
gneuse comme une
ménagère, et habillée
Qnmme une dame de la Chaussée-d'Antin,—
à Dieu ne plaise que j'en veuille médire, de
cet élégant quartier!—avec une robe de soie
noire, corsage à la Suissesse, coiffée en che
veux, et fraîche à laissée croire .qu'elle a des
engelures aux joues.
Si nous ne savions d'avance qu'il s'agit
d'un proverbe, le décor, la dame et le mo
nologue , nous le révéleraient suffisamment.
Pour peu qu'une dame, en grande toilette
d'intérieur, soit seule au lever du rideau ,
brodant, se parlant, philosophant et tirant
(le sa'table à ouvrage , ainsi que des autres
petits meubles, et de son féminin caquetage,
tout le parti possible : des effets de pied, de
bras, de col, de lèvre et d'esprit ; dites sans
hésiter : Proverbe 1 Et si les dames l'empor
tent dans la pièce , par une morale douce,
par une inconcevable aménité de caraclère,
par un talent supérieur à préparer-les" con
fitures. joint aux autres vertus qui peuvent
faire d'une simple femme la déesse de la vie
privée, dites que le proverbe est d'une dame!
Les jeunes dames ne se con tentent plus de
jouer du piano, de chanter des cavatines, ni
même d'être mères,—un touchant emploi de
leurs loisirs cependant—, grâce aux hautes
études qu'on lpur fait t'aire, maintenant
qu'on les traite comme de petits hommes,
destinés à la poésie, à !a chimie, à la diplo
matie, et qu'on les élève dans de véritables
collèges de demoiselles; grâce à leurs pro
grès dans la narration, l'amplification et les
belles-lettres... à l'usage d'Emilie, k'sjeunes
d.imes croiraient manquer à leurs plus saints
devoirs si elles ne se signalaient dès les
premières années de mariage par quelque
opuscule qui prouve leur fécondité.
-Nonobstant, je respecte tous les lalens sans
m'inquiéter de leur sexe, et ne prétends ju
ger que les ouwages.
Le proverbe, par lui-même, nj .-erait pas
"autrement désagréable à huis-clos, et, com
me exercice grammatical d'une personne
studieuse que les soins cle sa petite .famille ,
n'absorbent pas. En public, le proverbe a le
tort de tenir de la place,— pou de place, di rc-z-
vous; mais c'est trop encore. Ensuite, admet
tez que le proverbe, venant de jeunes dames
aussi intéressantes par Ieur.position que par
leur caractère soit un cri personnel-, un™*
expansion de l'amè; à quoi bon s'af-fieher ? A
quoi bon mettre le publie dan» la confidence
de sa vertu? La modestie \ i si 4 i j l hon
nêteté ! Sauf l'irrésistible nuioi q m ira-
hit par autre chose qu d s j iu\ il s;-et
sauf meilleur avis que ls nu y t | unes
dames auraient raison d « runt ni i du
gi'nreépistolaire, quiestkuicoqlid nu 1 où
bien si Sa plume leur en dit, de vaquer en ca
chette à leurs devoirs de littérature.
Mais, revenons-en à Madame, à la belle
Mme de Pange.
Mme de Pange est. une femme qui. pour
rait. bien avoir quarante ans; donc, le soin
qu'elle apporte à sa toilette est de légitime
préeautiou. La chasteté, la pudeur, les bon
nes m'œurs ont conservé à cette vertueuse
épouse beaucoup de son premier èharme.
Ajoutons qu'il ne paraît pas dans la pièce
qu'elle ait jamais eu d'enfans ; elle est pour-!
tant mariée depuis quinze ans. Malgré la
vertu ,1a réserve et la pureté des sentimens,
on se forme toujours un peu en quinze ans
de ménage ; aussi voit-on, dès les premières
phrases, que Mme de Pange ujiit la ruse du
renard à la naïveté très bien conservée de.
l'ancienne jeune fille. Elle a des couleurs su
perbes: elle soupire, elle frissonne, son cœur
bat, mais tout cela intérieurement; le corsa
ge à la Suissesse n'en'dit rien,— tant l'expé
rience de la femme, mariée l'emporte sur"la
nature. Bref, cette, Mme de Pange, ave£ son
air candide et toute sa quarantaine en fleur,
est un diplomate accompli.
Jugez-en. ' ,
Mme de Fange s'est rfiariée sans passion
et a fiai par aimer son/mari. Le mari est
charmant comme les autres quand on sait
les prendre. Le tout est de les prendre. Ah! si
vous voulez l'es gouverner desp'otiquement,
vous ne régnerez pas long-temps sur eux !
les plus timides, les plus soumis, îès plus
abrutis, les plus aimans se révoltent 1 tôt ou
tard, et s'ils n'osent se révolter ouvertement
par respect humain ou par un- reste do
terreur, ils ont la ressource de l'hypocrisie;
— d'où tant d'affranchissemens pernicieux ,
doubles ménages, dilapidation sectète et per
pétuel mensonge. Sur ce sujet, on a déjà dé
veloppé au théâtre et ailleurs, un grand nom
bre de thèses en des termes à peu près con
formes à ceux-ci : « C'est par la douceur
qu'on prend les maris et les mouches ;
mieux vaut une cuillerée de miel qu'un ba
ril de vinaigre. » "•
Ne soyez donc ni volontaires, ni acariâtres,
.ni jalouses, ni capricieuses, ni injustes, ni
exigeantes,si vous voulez tenir les maris. Tel
qui a d'abord subi la force vous met ensuite
le pied sur ja gorge. Mais la tendresse sou
mise, mais la prévenance, le bon visage, les
soins assidus, l'égalité d'hunïeur, forcent les
plus bourrus aux égards, les plus égoïstes à
la reconnaissance, et finalement les moins
tendres à l'amour,' ou du moins à la douce
habitude qui en tient lieu.
Ainsi raisonne Mme de Pange, et tels sont,
suivant elle, les meilleurs principes de la
diplomatie en ménage. Cette dame, en-se
mariant par rais.on, avec raison, et dans toute
la force de sa raison et de ses charmes, s'est
composé une figure inamovible et un ca
ractère soutenu... touj ours le même , to uj ours
égal, Si son mari sort, elle sourit; si son
mari rentre, elle sourit encore. Boude-t-ii,
elle feint de ne pas s'en apercevoir ; gronde-
t-il, elle l'appelle : «mou cher ami »; veut-il
rester seul, elle s'en va; être deux, elle
revient: toujours contente, toujours aima
ble, toujours tendre, toujours raisonnable,
et avec cela fort soignée de sa personne; mê
me un peu coquette, — car un corsage à la
Suissesse; ie gâtegrien, — et attentive au dî
ner, aux cravates, aux moindres goûts de
son époux. Ah 1 quelle femme! quelle perfec
tion 1 quel idéal !
J.'avoue qu'il y a des hommes que ce mo
dèle, ce beau-fixe et l'invariable retenue fe
raient fuir; -qui prendraient ce sourire en
horreur autant que celui des danseurs sur
leurs pointes; qui imploreraient dans ce doux
ménage, dans cette inébranlable tranquillité,
quelque trépignement, quelque petite fu
reur, ou seulement l'ombre d'une résis
tance, comme un présent de la bonté céles
te. Mais ces hommes sont certainement des
disgraciés ou des dépravés. Il leur faut des
^motions, des contradictions; ils prétendent
qu'on ne peut être vraiment aimable sans
naturel, et qu'on n'est naturelle qu'à la condi
tion ide ne point se contraindre. Que ne di
sent-ils pas encore? Que la fierté de la femme
est un ragoût déplus; que la femme doit
toujours céder et toujours rester vertueuse,
à la condition de faire payer le prix de sa
soumission et de sa vertu ; enfin, ces maris
font les philanthropes, les philosophes, les
esprits forts et les connaisseurs du cœur
des femmes, — auquel personne n'a jamais
rien connu !
M. de Pange n'est point de cette espèce
légèrement pervertie par le raisonnement et
le tempérament. Je n'affirmerai pas que,M.
de Pange soit un brutal; 'mais il aurait py,
l'être; que ce soit un mauvais mari; mais
il le serait, devenu facilement ; ni qu'il ait
des torts vis-à-vis de sa femme; à quoi ce
pendant! sa bonne conduite a-t-elle tenu?
Aux précautions, aux attentions, à la diplo
matie de aime de Pange.
Emportez-vous donc contre une femme
qui vous donne toujours raison, qui ferme
la fenêtre si vous avez froid, et l'ouvre
quand vous avez chaud ; qui , lorsqu'il
vous.plaît"de dormir, vous dit douce
ment : « Bonne nuit, mon cher mari, »
et s§ réveille pour causer si vous ne dormez
pasl —Dieu sait qu'elle doit avoir la conver
sation facile, notre Mme de Pange, ainsi; que
toutes celles qui se taisent à propos. — M.
de Pange veut-il aller dîner en ville, on
lui met' sa cravate; veut - il'rester chez
lui, on approche le-grand fauteuil, on
apporte sa robe de chambre , on prépare
quelque pudding incomparable dont on
s'est procuré la recette mystérieuse.,Ce M. de
Pange est fêté, choyé, dorloté, sucré, servi
à toute heure du jour et de la nuit, tant et si
bien, que partout hors de-chez lui il se
trouve mal à l'aise, malmené, irrité, et qu'il,
s'est pris insensiblement d'une passion véri
table pour le coin de son feu, pour sa robe
de çhambre, pour le pudding, pouf sa
femme,, pour toutes ses habitudes. Le ta
lent consistait à lui créer ces habitudes-là;
et c'est en quoi Mme de Pange a excellé.
Beaucoup d'autres auraient l'amour-pro-
pre de ne pas vouloir être aimées ainsi.
Fi donc l'habitude ! est-ce l'amour, cela? Si ce
n'est lui-même, c'estdu moins ce qui en tient
lieu agréablement, et dure plus long-temps
que lui. Vous allez rompre avec un ainânt,
disant que vous on mourrez, et vous vous
portez bien trois mois après ; mais renoncez
à une habitude, la consomption vous mine!
Enfin,la diplomatie et l'habitude aidant, le
ménage de Mme de Pange est plus beau que
nature. Rien n'y manque, pas même le con
traste. Le contraste s'appelle Mme Renaud.
Yoilà, par exemple, une maîtrese-femme;
cette Mme Renaud ! Elle est plus jeune que
son amie Mme de Pange; son mari est dans
toute la force de l'âge ; mais il n'y a point
de force qui tiènne, il faut que M. Renaud
cède les hommes sont, dit-elle,'faits pour
çela.—Ah ! parlons un peu de diplomatie à
Mme Renaud! Sa diplomatie c'est de comman
der, de crier et de tempêter : ordre à M. Re
naud de ceci, défense de cela! Il ferait beau
voir qu'il y manquât. On comprend le mé-
• - 1F. T ^. i.rti? rf r* « If IWw'fel' («Wknnu»! VnWi'î 10;
lSS2.^iUi\DI 14-JANVIER.
PÏSLÎ^ T!E S,' A ZCll^Cr.TS.^T
pour Paris et les népu.ï'trj.ieiVi :
trois mois. J2 *. j SIX sotsi. ï'i k.
i es A.y . 4$. F.
i pock lks i'ats ètranfikîis , se reporter
au tableau qui sera publié danslejoui iirti,"
es 16 et 35 de chaque mois.
Les' abonnemens datent des i m el i6
de ch'ioue mois. ■
rpi wnii
t x nÉfig fLBG;VV
ao
&S $ ! *>\
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL.
S'adresser, franco, pour 1% rêdaetion T , à MJ B onifa.œ S |
i Les-articles déposés ne sckt pas rendus;
On j'aJonne, dans iet départemens, r aux Messageries et auxDirections depastel—A Londres, eJiez,MA'S Covrrs et Pir>;
— A Strasbourg, ck n z M, ALE\A>nnr, fw r l'Allco-a;, e.
S'adresser, franco, pour l'administration, à M. D knàis, directeur.
Les annonces sont reçues au bureau du journal ; et chez M. PAN1S, tégisscur, l0;-plac9 de la Bourse
*I*A1STS X ^ W ÏÏStf /
Le Moniteur contiendra demain un décret
du Président de la République sur la rébrga-
nisalion.de la garde nationale.
Nous croyons savoir que ce décret attein
dra le double but d'assurer la défense de
l'ordre et de reconnaître le concours que la
garde nationale a souvent' prêté au maintien
de la tranquillité publique.
Le service de la garde nationale ne sera
pas facultatif.- On ne sera tenu à ce service
que jusqu'à l'âge de cinquante ans.
Dans le département de la Seine, les offi
ciers seront nommés par le Président de la
République.
Dans les autres départemens, les officiers
seront nommes par les préfets.
L. B0KIFACE.
!. A propos des mesures de sûreté publique,
prises par ls gouvernement, on a rappelé le
souvenir du 18.fructidor et le jugement
qu'un historien célèbre, M. Thiers, a porté
sur le coup d'Etat du Directoire. Nous citons
les paroles de M. Thiers:
« Telles devaient être les conséquences du coup
d'Etat du 18 fructidor. On a dit qu'il était devenu
inutileà l'instant où il fut exécuté ; que le Direc
toire, en effrayant la faction royaliste, avait déjà
réussi à lui imposer ; qu'en s'obstinant à faire le
coup d'Etat, il avait préparé l'usurpation militai
re par l'exemple de la violation des J lois. Mais,
comme nous l'avons déjà dit, la faction royalis
te n'était intimidée que pour un moment; à l'arri
vée du prochain tiers, elle aurait infailliblement
tout renversé et emporté le Directoire ; la guerre ci
vile eût alors été rétablie entre elle et les armées.
Le Directoii^ en prévenant-ce "moment et en le
réprimant à. propos, empêcha la guerre civile ; et
il ge mit par là sous l'égide de la puissance mili
taire : il subit une triste, mais inévitable nécessité.
La légalité était une illusion à la suite d'une ré
volution comme la nôtre ; ce n'est pas à l'abri de
la puissance légale que tous les partis pouvaient
venir se soumettre et te reposer ; il fallait une
puissance pl'ifè-forte pour les réprimer, les rappro
cher, les fondre, et pou,r les protéger contre l'Eu
rope marmes ; et cette puissance, c'était la puis
sance militaire. '
i-'» Le -Dircctoire, par le 18 fructidor, prévint donc
la guerre civile", et lui substitua un coup d'Etat
exécuté'avec force, mais avec tout le calme et la
modération possibles dans les temps de révolution .»
Le journal qui cite ce passage fait obser
ver avec raison que les mesures adoptées par
le Directoire, et approuvées par ftT. Thiers,
ont été bien plus sévères qeie celles du gou
vernement de Louis-Napoléon. En effet, le
Directoire avait frappé de la peine de la dé
portation 45 çeprésentans, 11 membres du
conseil des Anciens, -2 directeurs , Carnot
et Barthélémy, le ministre de la police, le
chef de la garde législative et les propriétai
res, éditeurs et rédacteurs de quarante-deux
j ournaux. Le gouvernement actuel n'a appli
qué que l'expulsion du territoire ou l'éloi-
gnement temporaire là où le Directoire avait
employé la peine de la déportation effective.
v l. boniface.
Il paraît que lord John Russell a renon
cé, pour le moment, à modifier son ca
binet -, un membre de 4 la chambre 'des
communes , M. James Wilson , prendrait
provisoirement les fonctions laissées vacan
tes par lord Granville; et l'ouverture du
parlement précéderait tout changement mi-
nistérifel. C'est là la seule conclusion possi
ble d'un article fort nébuleux et fort entortil
lé, dans .lequel le Kmes laisse échapper quel
ques aveux qu'il importe de relever. Le 1 i' nes
reconnaîtque lord John Russell a fait sonder
indirectement les membres d'un parti auquel
il s'était déjà adressé deux fois, c'est-à-dire
les Peelites ; que le but du premier ministre '
était de remplacer trois ou quatre de ses col
lègues par des ministres nouveaux ; mais que
•ses a^^f^r^orîf ~èt(ironies avec un médio
cre empressement et n'ont produit aucun
résultat; enfin, que le mil libère est résolu à
affronter avec ses seules forces l'ouverture
"de la session.
Le Times ne croit pas que le cabinet puisse
sortir avec succès de celte épreuve redouta
ble, et il ne lui semble pas que l'opposition
soit plus eu état que l'année dernière de
prendre le pouvoir. Les whigs lui parais
sent encore le seul parti en état de gouver
ner, mais à la condition'd'ouvrir leurs
rangs, sans trop de peine, à des recrues nou
velles. Tons ces beaux raisonnemens nous
préparenCà un renouvellement de la comé-
-die de février dernier. Lord John Russell
donnera sa démission après le premier éeliec;
lord Stanley déclinera la tâche de for
mer un cabinet, et le chef des whigs,
se laissant fléchir, consentira à revenir
aux affaires : mais, comme il sera libre
de tout engagement vis-à-vis de ses anciens
collègues, comme la question catholique
' ne le séparera plus de sir James Graliam, •
il se flatte de composer aisément un minis
tore de conciliation; dans lequel entreraient à
la'fois quelques-uns des Peelites, et deux
ou trois des artiis les moins exigeans et les
moins compromis de M. Cob'den, sinon M.
Cobden lui-même. Cette conjecture nous pa
raît la seule explication des conseils peu
spontanés que le Times donne à lord John
Russell, en l'engageant à élargir la base de
son gouvernement, à briser tout lien de
coterie, et à comprendre, dans une com-
j maison qui n'est pas immédiatement né
cessaire , tous les élémens modérés- et
libres-échangiste de la chambre des commu
nes? Ilv à là une avance évidente à l'école
de Manchester. Que signifieraient d'ailleurs les
doléances hypocrites exprimées, il y a deux
jours à peine, çur le joug que subissent*
les hommes distingués do cette école,
qui, liés par les discours-de leurs sectateurs
plus que par leurs propres paroles et leurs
•propres actes, ne sont plus toul-à-fait libres
de suivre les inspirations de leur bon sens,
et se laissent entraîner, par leur clien
tèle, plus loin qu'ils ne voudraient aller ?
Tout ce patelinage, fort inusité dans les
journaux qui l'emploient, veut dire en bon
anglais, que si M. Cobden et M. Milner Gib-
son voulaient bien renoncer à leurs exer
cices oratoires , et abandonner les succè.s
de meetings à MM. Fox, WahnslejL £t.
Thompson, lord John Russell serait char
mé de leur faire une petite place dans
le cabinet, afin de se servir d'eux pour tenir
en échec sir James Grahametleduc de New-
castle. Le système de bascule que le premier
ministre a pratiqué dans le parlement de
puis trois ans, il est prêt à le pratiquer au
sein de son propre ministère'; et il se fiait :
que les deux fractions dont le concours lui
est nécessaire accorderont plus facilemmi a
des membres du cabinet l'appui qu'elles mu ■
chandaient l'année dernière à des co-reii-
gionnaires en libre-échange.
Maintenant, ce Calcul réussira-t-il, ci la
perspective d'avoir dpux ou trois amis au
pouvoir déterminera-t-elle les partis à abdi
quer leur existence indépendante, et à met
tre leur popularité, leur influence et leurs
votes au service des whigs? Ces partis
ne. préféreront- ils pas essayer leurs for
ces dpxis' une élection générale où tou
tes les chances sont en ce moment contre
le ministère. et conquérir le pouvoir sur les
ruines des whigs, au lieu de se laisser mesu
rer par ceux-ci leur part d'action dans le
gouvernement? Lord John Russell est-il bien
sûr que les,événemens du continent, qui lui
paraissentunç garantie deson propre maintien
au pouvoir, ne soiént pas,aux yeux des tories,
une raison d'accepter cette année la tâche
devant laquelle ils ont reculé l'année der
nière? Du reste, comme le parlement doit se
réunir le 1 er février, nous ne tarderons pas
à savoir quelles sont, les chances de vitalité
que le ministère actuel conserve encore.
CXJCUEVAL-CLAXUGNT.
w
Un de nos correspondais du , Midi nous
adresse quelques renseign mens au sujet des
inculpés qui sont l'objet de poursuites judi
ciaires dans le département des Pyrénées-
Orientales. Si les socialistes de cette partie de
la France n'ont pas pris une part matérielle
à l'insurrection, ce n'a certes, pas été faute
de bonne volonté ou de préparatifs de leur
part. Il faut uniquement attribuer leur
inaction à la promptitude et à la vigueur de
la répression, qui a paralysé les plus fiers
courages, et aussi au refus de concours qui
a été opposé presque unanimement aux me-v
neurs par les populations du département,
dès qu'elles ont su qu'il s'agissait de mar
cher contre le gouvernement tie Louis -Napo
léon.
Le département des. Pyrénées-Orientales
était l'un de ceux qui avaient le triste privi
lège de comptçr le plus grand nombre de
sociétés secrètes. Elles s'étaient surtout mul
tipliées dans les arrondissemens de Prades et
de Perpignan, et les scènes sanglantes qui
ont eu lieu à diverses époques dans cette der
nière cité, attestent douloureusement l'in
fluence de leurs horribles eùseignemens' sur
les esprits faibles et les imaginations ar
dentes.
A la date du 3 du courant, 138 mandats
d'arrêt avaient déjà été lancés pour le seul
arrondissement de Perpignan, et 116 avaient
reçu. leur exécy.ti^au, La .gendarmerie n'a,
cessé depuis de se livrer aux plus actives re
cherches pour s'emparer des fuyards : ~ Ces
'jours derniers/ de nouveaux mandats d'ar-
..rèt au nombre de 6, et 14 mandats d'amener 1
ont encore été décernés par les magistrats
instructeurs. En somme, pour les trois ar
rondissemens de'Perpignan, dej-'rades et de
Ceret, le nombre des arrestations opérées
s'élève aujourd'hui au chiffre de 20G.
. Tout en respectant le secret de l'instruc
tion, nous croyons pouvoir livrer à'nos lec
teurs quelques détails, que nous transmet
notre correspondant, sur ce qui a transpiré
dans le pays, des révélations faites pendant le
cours des interrogatoires.
« Les aveux se pressent; nous écrit-il, sur
,les lèvres de~la plupart des inculpés; ils
montrent généralement du repentir, et de la
haine pour ceu-x qui les ont entraînés en les
trompant,idaps. la voie de la conspiration et
de la révolte^ Rais ils racontent franchement
et naïvemeât'cè qu'ils ont appris à leurs dé
pens. *
» Voici, par exemple, une information vrai
ment instructive et que nous recommandons .
à ces incorrigibles incrédules qui s'obstinent
à qualifier d'inventiôn&afftcirllcsune cev-taïue
nature de honteux excèsque la publicité a dû
enregistrer pendant les derniers événemens
il existait de» sociétés dans lesquelles les af
filies se prêtaient réciproquement le serment
de ne point viotwles ûnsTes femmciHTês autres,"
quand viendrait le jour du- pillage et du
biar.le-bts' ... » '
employait pour se créer- 'une armée a son
image," une armée capablç-de tout à "un mo
ment donné, la mK> eu scène que a oici mé
rite-une mention spéciale.
Quand un nouveau candidat se présentait
poui aieadmisdansune société secrète, après
les sermens et épreuves d'usagé, on lui fai
sait culi r une dernière et décisive épreuve.
On h 11 tndait les yeux, on l'armait d'unpoi-
gu u 1 i îis oQilui 'disait, en mettant sous sa
ma u une pièce de bois ou un mannequin :
Tu as juré tout à l'heure d'être sans pi
tié pour les ennemis du peuple,; pour
les blancs; eh bien! voici devant toi un
ennemi du peuple, un Blanc ; frappe ! — Le
récipiendaire,selon son tempérament ou son
degré d'ivresse, frappaitou né frappait pas.
S'il frappait, l'un des affiliés présens simulait
les gémissemen&d'im hbmme qu'on égorge,
et le récipiendaire était immédiatement dé
claré bon pour le service., S'il ne frappait
pas, op emportait l'appareil, le blanc, et la
réception était ajournée jusqu'à ce .que le ca
téchumène eût le cœur plus ferme et la .main ,
plus sûre. D enain.
' i——
Des militaires appartenant à tous les corps
de l'armée ont été tués ou blessés en combat
tant pour la défense de l'ordre et de la société.
De tous les points dê la France, des cotisations
volontaires ont été destinées aux familles des
soldats morts glorieusémei^t pour la cause de
la civilisation, et à ceux d'entre eux qui sont
désormais hors d'état de -servir. Nous avons
annoncé qu'une commission officielle avait
été instituée pour régulariser l'emploi des
fonds provenant de ces cotisations "volontai
res. Le ministre de la guerre a souscrit pour
une somme de riOO fr. Tous les amis de l'or
dre voudront s'associer à cette œuvre de re
connaissance et de justice. ?ious ouvrons
une souscription dans les bureaux du Consti
tutionnel.
L'administration du Constitutionnel
souscrit pour - ' " 500 fr.
Un chasseur à cheval d'une garni
son de la Meuse, 20 fr.
Jules Lecœur, docteur-médecin ) à *
Caen, , 25 fr.
"Godeïroy aîné, cultivateur, à Cléry-
sur-Somme, 2b fr.
■ ——————
Le Président de la République, pour hono
rer la mémoire de M. le maréchal-général
Soult, duc de Dalmatie , a ordonné qu'un
service funèbre serait célébré àsonintention,
•mardi prochain, 13 de ce mois, à onze heu
res, daûs l'église des Invalides.
Là famille du maréchal se trouvant dans
l'impossibilité de faire parvenir, en temps
utile, les lettres d'invitation à toutes les per
sonnes qu'èlle désirerait voir se réunir à elle
dans cette pieuse solennité, a l'honneur de
les prier de vouloir bien considérer le pré
sent avis comme une invitation. •
Nous lisons dans la Gazette d'Augsbourg,
du 7: - '
u Un document intéressant nous arrive concer
nant le projet d'union entre le Zollverein et l'Au
triche. 11 contient les propositions de cette dernière
puissance, faites.d'une manière large et positive.
L 'Autriche se soumet, sauf quelques modifications
indispensables, à tous les règlemens du. Zollverein.
Elle propose u ne représentation consulaire commu
ne à l'étranger, en Orient par l'Autriche, en Améri
que par la i'russe et les villes anscatiques. Elle pro
pose un pied monétaire commun qui pourrait se
réduire sur le pied de florin, de thaler et de la pièce
française de 5 francs. Mais la proposition.la plus
importante est une nouvelle organisation de l'u
nion d'après laquelle ta questions seraient ré
solues à la majorité des voix des Etats,et, seule
ment dans quelques, cas très importans, auraient
besoin de -la ratification de l'Autriche et de la
Prusse.
»La répartit ion du revenu des douanes de l'union
serait faite d'après les données statistiques réunies
à la fin de l'année 1858.»
naufrage de l'amazone.
- Une enquête a été ouverte à Southampton pour
arriver à'connaître les causes qui ont amené la
perte du bateau à vapeur l'Amazone, et pour dé
terminer la responsabilité des assureurs. Toutes
les personnes sauvées ont été-successiveroent in-
teno es p r la commission d'enquête. On lira
. avec un douloureux intérêt la déposition de James
Ho lui un d n cille^urs marins^de l'"Amazbne. .
«J'étais de garde en vigie, la nuit du sinistre.
Mowait un di rutelots qui ont été sauvés, était
de srarde avec moi à l'autre bout du navire, et nous
euons sous la surveillance du second officier. A une
heure moins un quart j'entendis la cloche d'alarme
que sonnait Passmore, un des marins sauvés. Je me
retournai, et voyant par où sortait le feu, je cou
rus'immédiatement-à l'enflroit où étaient des
seaux qui avaient été remplis d'c-au pour laver le
pont le dimanche matin avant la prière, et je les
vidai par l'ëcoutille par où sortait la flamme. Avec
le secours d'un autre hftmrae, je lançai aussi par
dessus bofd des bottes de foin qui avaient pris feu.
» A ce moment, le capitaine parut sur le pont en
chemWc ; et avçc'son-pantalon, maissarisbas ni sou
liers, et je l'aidai à jeter de l'eau dans la cabine
de l'avant. Le capitaine était parfaitement calme et
maître de luf r même, et quoique travaillant de tou
te son énergie, il donnait encore des ordres aux di-
versis .personnes qui étaient autour de-lai. Une
scène ds terreur et d'indescriptible confusion sui-
. vit. ; et j'entends encore résonner à mes oreilles les
clamçursde désespoir, les crisd'agonie des passagers
1 et lesmugisSSmensdes aninjaux que le feu empri
sonnait. J'ai vu nombre de personnes se précipiter
sur le pont/frappées de terreur et quelques-unes
' horriblement-brûlées. Plusieurs titubaient mortes
parle feu et* l'asphyxie ou s'évanouissaient de
frayeur ou par l'excès delà souffrance. Je me sou
viens avoir vu apparaître sur le pont un enfant
couvert seulement d'un manteau de toile eirée et
la figure tonte brûlée.
» Pendant-què j'aidais à descendre et à disposer
la chaloupe dans laquelle nous nous sommes sau
vés, une des passagères se précipita sur le pont.
Elle n'avait sur elle que sa chemise de nuit, elle
avait le ventre et les cuisses fort brûlés. Trois lois
elle a été placée dans la chaloupe, une.fois par le
quartier-maitre Dunford : mais elle refusa d'y
rester. J'ai entèndu plusieurs personne? lui dire
en toute hâté qu'ils lui donneraient dés vètemens
de j;este et sans tarder, dès que la chaloupe serait
en mer; mais la pudeur l'emporta chez elle sur
l'amour de la vie, elle est demeurée en arrière
et elle a dû périr. Les derniers mots que j'ai en
tendu dire au capitaine ~ Symons sont ceux-ci :
«C'est fait de nous, il n'y a plus d'espoir, mes en-
fans; tenezles-"chaloupcs prêtes.» Je l'ai vu alors
pour la dernière fois, il quittait l'avant pour se
porter à l'arrière. A ce même, moment je'fus ren
versé sur le pont, et je me fis une grave contusion
au genou.
■ « Ce qui a ajouté beaucoup aux désastreuses con
séquences de l'incendie , c'est l'impossibilité où
l'on a été d'arrêter la machine à cause de l'affreuse
chaleur de la chambre du chauffeur. La rapidité
effrayante avec laquelle le navire était lancé sur
l'eau rendait à peu près impossible de mettre les
chaloupes à la mer sans les.-submerger. C'est par
un hasard presque miraculeux que la nôtre n'a
pas sombré. Quand j'ai quitté le navire, je n'ai
plus vu un seul vivant à bord-; tous les-autres
doivent s'être noyés en essayant de se sauver, ou
avoir péri dans les flammes. Le jour s'était
levé avant que l'Amazone sombrât ; je la voyais
distinctement quand la sainte-barbe fit ^explo
sion , lançant en l'air une quantité énorme
de projectiles et de débris. Nous avions ramé
l'espace de vingt-cinq à trente'milles quand nous
aperçûmes un bâtiment, que nous' hélâmes cfe
toutes nos forces. Je suis certain qu'on nous a en
tendus, car j'ai vu une lanterne mise en mouve
ment comme si on cherchait à reconnaître'de quel
côté partaient nos cris. Mais aucune tentative ne
fut faite pour venir à notre secours quoique le ca
pitaine et son équipage n'aientpu manquer dé voir
l'Amazone, qui était toute en flammes. »
Une lettre adressée de Brest au Chroniele, con-
tiént^d'intéressans détails sur le sort de ceux des
passagers de l'Amazone, au nombre de vingt-„cinq,
qui ont été-, recueillis en mer par la goélette hol
landaise Gertriàda. Après avoir dit que les autori
tés françaises se sont hâtées d'expédier le bâtiment
à vapeur le ' Souffleter à la recherche de l'autre
chaloupe', cette lettre continue ainsi.
« On a amené à terre les naufragés de VAma
zone. On ne saurait imaginer un plus triste spec
tacle. Parmi eux se trouvent deux femmes et un
enfant, et on se fera une idée de leurs souffrances
quand on sav.ra qu'outre l'horrible danger qu'elles
ont traversé, elles ont été exposées à toutes les ri
gueurs de l'hiver pendant quarante-huit heures,
dans un bateau découvert et dans une nudité-
presque complète.
»Le feu a éclaté après que les passagers s'étaient
retirés pour dormir, et il s'est déclaré avec une si
effrayante rapidité , que personne n'a eu le temps
de sauver la moindre chose et même de s'habiller.
Les dames de la ville et la temme du consul anglais
se sont hâtées d'envoyer à ces malheureuses les
vètemens dont elle avait si grand besoin. Une de
ces dames, Mme Maclennan, cït erue'lement brû
lée, mais pas au point de mettre si vie en danger.
Pendant tout le temps qui s'est écoulé entre le tin
tement de la cloche d'alarme et son embarquement,
elle a tenu serré contre son sein avec une obstination
maternelle son fils, un enfant de dix-huit mois,
et elle a réussi à lé sauver avec elle, lorsque tant
d'autres ont péri.-Son mari, fonctionnaire du gou
vernement à Démerari, était aussi à bord. Elle
ignore encore sa mort, et s'imagine qu'il a réussi à
se sauver dans une autre chaloupe, mais ses com
pagnons d'infortune s'ont convaincus queMaclennan
a été tué par l'explosion de la sainte-barbe. L'autre
dame qui a été sauvée, miss Maria Smith, vènait de
Dublin, et se rendait à Porlo-Rico pour être institu-
trice. dans une famille. Tous ces naufragés sont
également dépourvus de vêiemens et d'argent;
mais le consul anglais leur a fait donner le néces
saire, et il a-pris des-mesam-peer les transporter
sans délai à Morlaix, d'où ils seront rapatriés en
Angleterre. »
ACTES OFFICIELS.
v
RSPUBZ.ZÇUS £ H.i?JÇû.ïSE.
AU NOM, DD PEUPLE FRANÇAIS.
Louis-Napoléon, Président de la République,
Considérant qu'il est urgent d'assurer, dans les
ports et à la Guyane française l'exécution des pre
mières mesures relatives à la transportation ;
Yu le décret du 20 décembre, qui ouvre à cet
effet un premier crédit de 638,000 fr. :
Sur le rapport du ministre secrétaire d'Etat au
département de la marine et des colonies, et de
l'avis du conseil des ministres ; *
Décrète :
Art. 1 er . Il est ouvert au ministre de la marine
et des colonies, sur l'exercice- 1852, un crédit de
8,587,000 fr. pour les mesures nécessaires à la for
mation d'un établissement à la Guyane française.
Art. 2. Ce crédit sera, réparti ainsi qu'il suit :
SERVICE MAH1NE. — Service général.
Chap. V. Solde et habillement des
équipages et des troupes
Chap. VII. Vivres
Chap. X. Approvisionnemens géné
raux de la flotte
Chap. XIV. Affrétemens et trans
ports par mer
Chap. XVII-'Frais de voyages, vaca
tions et 'dépenses diverses
524.400
389.500
722.600
70.000
10.500
Service eoionial.
1.717.000
( Chap. I er . Dépenses des services mi
litaires des colonies (personnel) 392.000
Chap. II. Dépenses des services mi
litaires des colonies (matériel) 50.000
Chap. IV 1er. Formation d'un éta
blissement â la Guyane ....... 1.428.0Ô0
Total 3.587.000
Art.'3 1 . Les ministres'dô'ia'inarine et des colo
nies et des finances sont chargés, chacun en ce
qui le concerne, de l'exécution du présent décret,
qui sera inséré au Bulletin dn lois.
Fait au palais des Tuileries, le 9 janvier 1852.
LOUIS-NAPOLÉON.
Le ministre de la marine
et des colonies, •
THÉODORE DUCOS.
Le njinistre des finances,
ACHILLE FOULU.
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS.
Le Président "de la République,
Vu la loi du 9 août 1849 ;
Vu le décret «lu 26 décembre 1851, concernant
la délimitation des nouvelles circonscriptions des
divisions et subdivisions militaires ;
Considérant que le dépax-tement des Hautes-
Alpes se trouve aujourd'hui compris dans la cir
conscription delà 8 e division militaire, et que tous
les départemens qui l'avùisinent ayant été le théâ
tre d'agitations graves ont été mis successivement
en état de siégs ;
, Considérant que l'unité d'action de l'autorité
militaire serait paralysée sur ce point de la 8 e di
vision, si le département des Ilauîes-Alpes se
trouvait seul placé en dehors des conditions de la
loi du 9 août 18 ±9 ;
Considérant qu'à la suite des événemens qui
ont ensanglanté les départemens voisins, le dé-
paitement des Hautes-Alpes a été sur quelques
points agité par des scènes de désordre qui ont
révélé l'existence dç projets anarchiq.ues ;
Attendu que cette situation constitué l'état de pé
ril imminent prévu par la loi du 9.août 1849 ;
Le conseil dès ministres entendu,
Décrète :
Art. 1 er . Le département des Hautes-Alpes est
déclaré en état de siège.
Art. 2. Les ministres de l'intérieur et de la guer
re sont chargés, chacun cri ce qui le concerne , de
l'exécutioil du présent décret.
Fait-au palais des Tuileries, le 4 janvier-1852.
♦ Le Président de la République,
LOUIS-NAPOLÉON.
Le ministre de l'intérieur,
A. DE MOUNY.
^ ' ClP.CULAiaE. • ■
Monsieur le préfet, d'après l'art. 2 du règlement
du 10 février 1835, sur le service des cantonniers
employés à l'entretien des routes, ces ouvriers sont
nommés et congédiés par l'ingénieur en chef, sur
la proposition de l'ingénieur ordinaire. Le préfet
peut seulement exiger le renvoi et le remplace
ment de ceux sur lesquels il aurait reçu des ren-
seignemens défavorables.
Ce mode dénomination des cantonniers adonné
lieu, dans ces derniers temps surtout, à des récla
mations qui m'ont paru fondées. S'il est néces
saire, en etlet, que les ingénieurs interviennent
dans le choix d'agens inférieurs placés sous leur
direction immédiate, il n'est pas moins convenable*
que l'administration départementale ait de sérieux
moyens de contrôler la conduite et la moralité de
ces agens. Or, c'est surtout au moment de leur ad
mission que ce contrôle peut être exercé d'une ma
nière efficace.
J'ai décidé, en conséquence, par l'arrêté dont
je vous envoie une ampliation, que les canton
niers seront à l'avenir nommés et congédiés par
le préfet.
Il n'est rien changé d'ailleurs aux conditions
d'admission établies par l'article 3 du règlement
du 10 février 183o.
. Je vous prie, Monsieur le préfet, de m'a-xuser
réception de la présente circulaire, dont j'adresse
copie à MM. les ingénieurs en chef.
Recevez, Monsieur le préfet, l'assurance de ma
considération la plus dtetinguéev
Le ministre des travaux publics,
magne.
ARRETE.
Le ministre des travaux publics
Arrête : -
L'article 2 du règlement du 10 février 1835 sur
le service des cantonniers employés à l'entretien
des mutes sera-modifié comme il suit :
Les cantonniers sont nommés par le préfet sur
une liste de proposition présentée par l'ingénieur
en chef et contenant un nombre de candidats tri
ple ou au moins double-du nombre d'emplois à
remplir.
, Ils sont congédiés par le préfet sur l.i proposi
tion ou sur l'avis de l'ingénieur en chef.
Paris, le 10 janvier 1852.
MAGNE.
Le Momleur publie aujourd'hui un décret sur la
pèche côtière, que nous reproduirons.
WOOTEUL3SS tTUAtm^WEB.
■ ANGLETERRE.
Des ordres sont donnés pour la construction
d'une batterie de iOOcandfts à Nah-Light, près de
Spithead; ainsi que d'une batterie provisoire à
Lum ps, près de Spithead sur la côté de Portsmouth,
aussi de 100 canons, et dans le plus bref délai.
Un nouveau fort est en cours de construction à
Browndown, en face de Rydes (île de Wight),sur
la côte de Gosport. On y'emploie deux compagnies
FEUILLETON DU C^SWriJTîONNËL,\î MNV.
THÉÂTRES.
théatre-françai& : La Diplomatie en Ménage, co
médie en un acte, de Mme Berton. — vaudeville :
" Les 'ftêvss de Matheus, comédie fantastique en
cinq actes, dé MM. Mélesville et Carmouche. —
' Mlle Déjazet. -
Je -vous dirai que Mme de Pange, — .Ah !
Yoilà un l )ien beau nom dans une petite fan
taisie bourgeoise — que. Mme de Pange, la
belle Madame de Pange, femme d'un cer
tain de Pange, gentilhomme qui fait dés af
faires à la bourse, un huitième d'ageiit de
çiïange peut-être honorable d'ailleurs et
bien élevé,.e't bien fidèle, ut bien aima
ble au fond, quoique maussade les jours
de [hausse s'il a joué à la baisse; au
demeurant, parfait mari, ainsi que vous'
le verrez, —je vous dirai donc que Mme de
Pange est modestement .assise au coin
de son feu, dans un salon-boudoir qui
sent, sa Chaussée-d Antin, et qu'elle s'oc
cupe, pour l'instant, de divers petits ou
vrages d'aiguille, après avoir donné son
coupd'œil à la cuisine ; et qu'elle est. soi
gneuse comme une
ménagère, et habillée
Qnmme une dame de la Chaussée-d'Antin,—
à Dieu ne plaise que j'en veuille médire, de
cet élégant quartier!—avec une robe de soie
noire, corsage à la Suissesse, coiffée en che
veux, et fraîche à laissée croire .qu'elle a des
engelures aux joues.
Si nous ne savions d'avance qu'il s'agit
d'un proverbe, le décor, la dame et le mo
nologue , nous le révéleraient suffisamment.
Pour peu qu'une dame, en grande toilette
d'intérieur, soit seule au lever du rideau ,
brodant, se parlant, philosophant et tirant
(le sa'table à ouvrage , ainsi que des autres
petits meubles, et de son féminin caquetage,
tout le parti possible : des effets de pied, de
bras, de col, de lèvre et d'esprit ; dites sans
hésiter : Proverbe 1 Et si les dames l'empor
tent dans la pièce , par une morale douce,
par une inconcevable aménité de caraclère,
par un talent supérieur à préparer-les" con
fitures. joint aux autres vertus qui peuvent
faire d'une simple femme la déesse de la vie
privée, dites que le proverbe est d'une dame!
Les jeunes dames ne se con tentent plus de
jouer du piano, de chanter des cavatines, ni
même d'être mères,—un touchant emploi de
leurs loisirs cependant—, grâce aux hautes
études qu'on lpur fait t'aire, maintenant
qu'on les traite comme de petits hommes,
destinés à la poésie, à !a chimie, à la diplo
matie, et qu'on les élève dans de véritables
collèges de demoiselles; grâce à leurs pro
grès dans la narration, l'amplification et les
belles-lettres... à l'usage d'Emilie, k'sjeunes
d.imes croiraient manquer à leurs plus saints
devoirs si elles ne se signalaient dès les
premières années de mariage par quelque
opuscule qui prouve leur fécondité.
-Nonobstant, je respecte tous les lalens sans
m'inquiéter de leur sexe, et ne prétends ju
ger que les ouwages.
Le proverbe, par lui-même, nj .-erait pas
"autrement désagréable à huis-clos, et, com
me exercice grammatical d'une personne
studieuse que les soins cle sa petite .famille ,
n'absorbent pas. En public, le proverbe a le
tort de tenir de la place,— pou de place, di rc-z-
vous; mais c'est trop encore. Ensuite, admet
tez que le proverbe, venant de jeunes dames
aussi intéressantes par Ieur.position que par
leur caractère soit un cri personnel-, un™*
expansion de l'amè; à quoi bon s'af-fieher ? A
quoi bon mettre le publie dan» la confidence
de sa vertu? La modestie \ i si 4 i j l hon
nêteté ! Sauf l'irrésistible nuioi q m ira-
hit par autre chose qu d s j iu\ il s;-et
sauf meilleur avis que ls nu y t | unes
dames auraient raison d « runt ni i du
gi'nreépistolaire, quiestkuicoqlid nu 1 où
bien si Sa plume leur en dit, de vaquer en ca
chette à leurs devoirs de littérature.
Mais, revenons-en à Madame, à la belle
Mme de Pange.
Mme de Pange est. une femme qui. pour
rait. bien avoir quarante ans; donc, le soin
qu'elle apporte à sa toilette est de légitime
préeautiou. La chasteté, la pudeur, les bon
nes m'œurs ont conservé à cette vertueuse
épouse beaucoup de son premier èharme.
Ajoutons qu'il ne paraît pas dans la pièce
qu'elle ait jamais eu d'enfans ; elle est pour-!
tant mariée depuis quinze ans. Malgré la
vertu ,1a réserve et la pureté des sentimens,
on se forme toujours un peu en quinze ans
de ménage ; aussi voit-on, dès les premières
phrases, que Mme de Pange ujiit la ruse du
renard à la naïveté très bien conservée de.
l'ancienne jeune fille. Elle a des couleurs su
perbes: elle soupire, elle frissonne, son cœur
bat, mais tout cela intérieurement; le corsa
ge à la Suissesse n'en'dit rien,— tant l'expé
rience de la femme, mariée l'emporte sur"la
nature. Bref, cette, Mme de Pange, ave£ son
air candide et toute sa quarantaine en fleur,
est un diplomate accompli.
Jugez-en. ' ,
Mme de Fange s'est rfiariée sans passion
et a fiai par aimer son/mari. Le mari est
charmant comme les autres quand on sait
les prendre. Le tout est de les prendre. Ah! si
vous voulez l'es gouverner desp'otiquement,
vous ne régnerez pas long-temps sur eux !
les plus timides, les plus soumis, îès plus
abrutis, les plus aimans se révoltent 1 tôt ou
tard, et s'ils n'osent se révolter ouvertement
par respect humain ou par un- reste do
terreur, ils ont la ressource de l'hypocrisie;
— d'où tant d'affranchissemens pernicieux ,
doubles ménages, dilapidation sectète et per
pétuel mensonge. Sur ce sujet, on a déjà dé
veloppé au théâtre et ailleurs, un grand nom
bre de thèses en des termes à peu près con
formes à ceux-ci : « C'est par la douceur
qu'on prend les maris et les mouches ;
mieux vaut une cuillerée de miel qu'un ba
ril de vinaigre. » "•
Ne soyez donc ni volontaires, ni acariâtres,
.ni jalouses, ni capricieuses, ni injustes, ni
exigeantes,si vous voulez tenir les maris. Tel
qui a d'abord subi la force vous met ensuite
le pied sur ja gorge. Mais la tendresse sou
mise, mais la prévenance, le bon visage, les
soins assidus, l'égalité d'hunïeur, forcent les
plus bourrus aux égards, les plus égoïstes à
la reconnaissance, et finalement les moins
tendres à l'amour,' ou du moins à la douce
habitude qui en tient lieu.
Ainsi raisonne Mme de Pange, et tels sont,
suivant elle, les meilleurs principes de la
diplomatie en ménage. Cette dame, en-se
mariant par rais.on, avec raison, et dans toute
la force de sa raison et de ses charmes, s'est
composé une figure inamovible et un ca
ractère soutenu... touj ours le même , to uj ours
égal, Si son mari sort, elle sourit; si son
mari rentre, elle sourit encore. Boude-t-ii,
elle feint de ne pas s'en apercevoir ; gronde-
t-il, elle l'appelle : «mou cher ami »; veut-il
rester seul, elle s'en va; être deux, elle
revient: toujours contente, toujours aima
ble, toujours tendre, toujours raisonnable,
et avec cela fort soignée de sa personne; mê
me un peu coquette, — car un corsage à la
Suissesse; ie gâtegrien, — et attentive au dî
ner, aux cravates, aux moindres goûts de
son époux. Ah 1 quelle femme! quelle perfec
tion 1 quel idéal !
J.'avoue qu'il y a des hommes que ce mo
dèle, ce beau-fixe et l'invariable retenue fe
raient fuir; -qui prendraient ce sourire en
horreur autant que celui des danseurs sur
leurs pointes; qui imploreraient dans ce doux
ménage, dans cette inébranlable tranquillité,
quelque trépignement, quelque petite fu
reur, ou seulement l'ombre d'une résis
tance, comme un présent de la bonté céles
te. Mais ces hommes sont certainement des
disgraciés ou des dépravés. Il leur faut des
^motions, des contradictions; ils prétendent
qu'on ne peut être vraiment aimable sans
naturel, et qu'on n'est naturelle qu'à la condi
tion ide ne point se contraindre. Que ne di
sent-ils pas encore? Que la fierté de la femme
est un ragoût déplus; que la femme doit
toujours céder et toujours rester vertueuse,
à la condition de faire payer le prix de sa
soumission et de sa vertu ; enfin, ces maris
font les philanthropes, les philosophes, les
esprits forts et les connaisseurs du cœur
des femmes, — auquel personne n'a jamais
rien connu !
M. de Pange n'est point de cette espèce
légèrement pervertie par le raisonnement et
le tempérament. Je n'affirmerai pas que,M.
de Pange soit un brutal; 'mais il aurait py,
l'être; que ce soit un mauvais mari; mais
il le serait, devenu facilement ; ni qu'il ait
des torts vis-à-vis de sa femme; à quoi ce
pendant! sa bonne conduite a-t-elle tenu?
Aux précautions, aux attentions, à la diplo
matie de aime de Pange.
Emportez-vous donc contre une femme
qui vous donne toujours raison, qui ferme
la fenêtre si vous avez froid, et l'ouvre
quand vous avez chaud ; qui , lorsqu'il
vous.plaît"de dormir, vous dit douce
ment : « Bonne nuit, mon cher mari, »
et s§ réveille pour causer si vous ne dormez
pasl —Dieu sait qu'elle doit avoir la conver
sation facile, notre Mme de Pange, ainsi; que
toutes celles qui se taisent à propos. — M.
de Pange veut-il aller dîner en ville, on
lui met' sa cravate; veut - il'rester chez
lui, on approche le-grand fauteuil, on
apporte sa robe de chambre , on prépare
quelque pudding incomparable dont on
s'est procuré la recette mystérieuse.,Ce M. de
Pange est fêté, choyé, dorloté, sucré, servi
à toute heure du jour et de la nuit, tant et si
bien, que partout hors de-chez lui il se
trouve mal à l'aise, malmené, irrité, et qu'il,
s'est pris insensiblement d'une passion véri
table pour le coin de son feu, pour sa robe
de çhambre, pour le pudding, pouf sa
femme,, pour toutes ses habitudes. Le ta
lent consistait à lui créer ces habitudes-là;
et c'est en quoi Mme de Pange a excellé.
Beaucoup d'autres auraient l'amour-pro-
pre de ne pas vouloir être aimées ainsi.
Fi donc l'habitude ! est-ce l'amour, cela? Si ce
n'est lui-même, c'estdu moins ce qui en tient
lieu agréablement, et dure plus long-temps
que lui. Vous allez rompre avec un ainânt,
disant que vous on mourrez, et vous vous
portez bien trois mois après ; mais renoncez
à une habitude, la consomption vous mine!
Enfin,la diplomatie et l'habitude aidant, le
ménage de Mme de Pange est plus beau que
nature. Rien n'y manque, pas même le con
traste. Le contraste s'appelle Mme Renaud.
Yoilà, par exemple, une maîtrese-femme;
cette Mme Renaud ! Elle est plus jeune que
son amie Mme de Pange; son mari est dans
toute la force de l'âge ; mais il n'y a point
de force qui tiènne, il faut que M. Renaud
cède les hommes sont, dit-elle,'faits pour
çela.—Ah ! parlons un peu de diplomatie à
Mme Renaud! Sa diplomatie c'est de comman
der, de crier et de tempêter : ordre à M. Re
naud de ceci, défense de cela! Il ferait beau
voir qu'il y manquât. On comprend le mé-
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 79.83%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 79.83%.
- Collections numériques similaires Henrichs Paul Henrichs Paul /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Henrichs Paul" or dc.contributor adj "Henrichs Paul")Lamy Charles Lamy Charles /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Lamy Charles" or dc.contributor adj "Lamy Charles") Firmin Didot Ambroise Firmin Didot Ambroise /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Firmin Didot Ambroise" or dc.contributor adj "Firmin Didot Ambroise") Firmin Didot Hyacinthe Firmin Didot Hyacinthe /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Firmin Didot Hyacinthe" or dc.contributor adj "Firmin Didot Hyacinthe")
- Auteurs similaires Henrichs Paul Henrichs Paul /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Henrichs Paul" or dc.contributor adj "Henrichs Paul")Lamy Charles Lamy Charles /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Lamy Charles" or dc.contributor adj "Lamy Charles") Firmin Didot Ambroise Firmin Didot Ambroise /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Firmin Didot Ambroise" or dc.contributor adj "Firmin Didot Ambroise") Firmin Didot Hyacinthe Firmin Didot Hyacinthe /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Firmin Didot Hyacinthe" or dc.contributor adj "Firmin Didot Hyacinthe")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k669528d/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k669528d/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k669528d/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k669528d/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k669528d
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k669528d
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k669528d/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest