Presse et revues
12 pages
Titre : La Vedette : politique, sociale et littéraire...
Éditeur : [s.n.] (Marseille)
Date d'édition : 1900-10-13
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32887046p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 26321 Nombre total de vues : 26321
Description : 13 octobre 1900 13 octobre 1900
Description : 1900/10/13 (A24,N1225). 1900/10/13 (A24,N1225).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG13 Collection numérique : BIPFPIG13
Description : Collection numérique : Fonds régional :... Collection numérique : Fonds régional : Provence-Alpes-Côte d'Azur
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5685280x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-LC11-635 (141)
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/01/2011
LA VEDETTE
5o5
THEATRES
ET CONCERTS
GRAND-THEATRE
LA JUIVE
L'ouverture de la saison a eu lieu jeudi avec La
Juive pour les débuts de la troupe de grand opéra.
Ce fut une véritable solennité artistique à laquelle
s'était rendu un très nombreux public. Quelle belle
salle, et combien MM. d'Albert et Lan seraient heu-
reux d'en voir souvent! Ils y comptent bien du reste
et, pour notre part, nous le leur souhaitons de tout.
coeur.
Revenons à La Juive, et à son interprétation. M.
Fonteix était naturellement celui que l'assistance
avait hâte de connaître. Un fort ténor, pensez-donc,
c'est un oiseau si rare ou plutôt. .. si cher, par les
temps qui courent ! Eh bien, sous la robe du juif
Elèzéar, M. Fonteix a bien vite donné la mesure de
son talent, malgré quelques faiblesses bien excusa-
bles un soir de premier début. La voix de l'artiste
est d'un joli timbre et d'une belle étendue. Notre
fort ténor s'est fait chaudement applaudir.
Le rôle, non moins important, de Rachel était
tenu par Mme Henriette Barety. Cette chanteuse
falcon était venue à Marseille précédée d'une excel-
lente réputation et il nous est agréable de constater
que personne n'a été déçu. C'est, en effet, une chan-
teuse de valeur possédant un organe très sympa-
thique et d'une grande justesse sans être d'une
puissance excessive. Les notes du registre élevé
sortent sans difficulté et sont d'une clarté qui font
plaisir à entendre.
Bon début aussi de Mme Legrand Loccc ( Eudoasie)
une charmante ire chanteuse, légère de grand opéra.
Elle a détaillé avec un charmé .exquis les pages
savantes de la partition d'Halévy. C'est certaine-
ment une des meilleures acquisitions tic la Direction.
M. Boussa, basse noble, se présentait dans le
rôle ingrat du cardinal Brogni et a obtenu un franc
succès, notamment au lerâcte, où il a fait entendre
de superbes notes graves. Conseillons lui, cepen-
dant, de chanter cet acte avec un peu moins de
lenteur.
Avant le spectacle, nous avons tait la connais-
sance du nouveau régisseur qui est venu demander
l'indulgence du public pour M. Audisio, premier
ténor d'opéra-comique, remplaçant au pied levé
M. Viviaud, 2e ténor, subitement indisposé. M.
Audisio fut un Léopold irréprochable, doué d'une
voix charmante.
Nous avons revu avec plaisir Mlle Emma de Con-
soli, ire danseuse noble — une ancienne connais-
sance — qui obtint un joli succès, en compagnie
de Mlle Rigolti, une ire danseuse demi-caractère
très remarquée.
Une mention spéciale au ballet, composé de jeu-
nes et jolies femmes évoluant avec une grâce et un
ensemble parfait.
Au pupitre, M. Duyssens dirigeait l'orchestre.
Ne lui ménageons pas nos compliments car il y a
droit pleinement. Ajoutons que les choeurs, bien
disciplinés, se sont distingués et ont chanté avec
une sûreté remarquable.
Comme on le voit par les lignes qui précèdent,
cette première soirée fut très bonne en son ensem-
ble et il convient d'adresser des compliments aux
habiles directeurs du Grand-Théâtre.
Au moment où nous mettons sous presse, la
troupe d'opéra-comique doit débuter dans Le Bar-
bier de Séville. Une bien belle soirée certaine-
ment dont nous parlerons dans notre prochain nu-
méro.
F. D'ATRIEU.
VARIÉTÉS
La Fille Ehsa:— Poil de Carotte.— Petit Chagrin.
Le Flibustier.
Semaine bien remplie par la tournée du théâtre
Antoine, la rentrée de M Mosnier dans, le Flibus-
tier, celles de Mme A. Méry et de M. Bonarel dans
Petit Chagrin.
Un public si nombreux qu'il rappelait les repré-
sentations de la Comédie Française en tournée, est
venu entendre la Fille Elisa. cette pièce originale
tirée par M. Ajalbert du roman de Concourt. Elle
a fait l'objet d'une discussion à la Chambre à cause
de son interdiction en 1 89 1. Malgré ses hardiesses
et son réalisme, elle impressionne fortement et sa
tendance est plutôt moralisatrice, à l'inverse de la
plupart de nos chansons de café-concert qui ne
doivent leur succès qu'à leur bagout graveleux et
aux dessous plus ou moins suggestifs de celles qui
les débitent.
Deux artistes admirables par leur jeu simple.,
serré et nerveux, se sont fait applaudir chaleureu-
sement: Mlle Eugénie Nau et M. Mévisto. La pre-
mière, créatrice du rôle, est une des meilleures
élèves d'Antoine, que nous avons pu apprécier avec
la troupe du Théâtre-Libre, il y a quelques années.
Elle incarne son rôle avec une virtuosité saisissante
et on ne peut guère concevoir une interprétation
plus parfaite. M. Mévisto a rendu avec une force et
une netteté incroyables le rôle de l'avocat. Son
organe coloré et vibrant, aux inflexions larges et
profondes, a, pendant une demi-heure, tenu le
spectateur haletant et oppressé dans ce fameux
plaidover du 2e acte, qui est un véritable chef-
d'oeuvre de logique et de vérité, et pour lequel la
pièce entière semble avoir été échafaudée.
La souplesse de son talent s'est manifestée dans
Poil de Carotte, ce chef-d'oeuvre d'observation pro-
fonde et d'ironie piquante sous l'amertume des
souffrances imméritées d'un enfant. Il a décoché à
la perfection ces traits incisifs et mordants sous leur
forme amusante du père Lepic répondant avec une
philosophie bonhomme et spirituelle aux propos
de son fils. Poil de Carotte. Ce dialogue révélateur
entre le père et le fils renferme tout un véritable
drame avec des moyens simples et si drolatiques
qu'ils provoquent instinctivement le rire.
Ce chef-d'oeuvre de Jules Renard atteint les pro-
portions d'une véritable satire morale, vigoureu-
sement frappée au coin d'un style nerveux et concis,
exprimant nettement les idées profondes d'un pen-
seur grave et juste.
Non moins remarquable que M. Mévisto, Mlle
Nau rend à la perfection le rôle de Poil de Carotte,
si délicat et si nuancé. La troupe entière du Théâ-
5o5
THEATRES
ET CONCERTS
GRAND-THEATRE
LA JUIVE
L'ouverture de la saison a eu lieu jeudi avec La
Juive pour les débuts de la troupe de grand opéra.
Ce fut une véritable solennité artistique à laquelle
s'était rendu un très nombreux public. Quelle belle
salle, et combien MM. d'Albert et Lan seraient heu-
reux d'en voir souvent! Ils y comptent bien du reste
et, pour notre part, nous le leur souhaitons de tout.
coeur.
Revenons à La Juive, et à son interprétation. M.
Fonteix était naturellement celui que l'assistance
avait hâte de connaître. Un fort ténor, pensez-donc,
c'est un oiseau si rare ou plutôt. .. si cher, par les
temps qui courent ! Eh bien, sous la robe du juif
Elèzéar, M. Fonteix a bien vite donné la mesure de
son talent, malgré quelques faiblesses bien excusa-
bles un soir de premier début. La voix de l'artiste
est d'un joli timbre et d'une belle étendue. Notre
fort ténor s'est fait chaudement applaudir.
Le rôle, non moins important, de Rachel était
tenu par Mme Henriette Barety. Cette chanteuse
falcon était venue à Marseille précédée d'une excel-
lente réputation et il nous est agréable de constater
que personne n'a été déçu. C'est, en effet, une chan-
teuse de valeur possédant un organe très sympa-
thique et d'une grande justesse sans être d'une
puissance excessive. Les notes du registre élevé
sortent sans difficulté et sont d'une clarté qui font
plaisir à entendre.
Bon début aussi de Mme Legrand Loccc ( Eudoasie)
une charmante ire chanteuse, légère de grand opéra.
Elle a détaillé avec un charmé .exquis les pages
savantes de la partition d'Halévy. C'est certaine-
ment une des meilleures acquisitions tic la Direction.
M. Boussa, basse noble, se présentait dans le
rôle ingrat du cardinal Brogni et a obtenu un franc
succès, notamment au lerâcte, où il a fait entendre
de superbes notes graves. Conseillons lui, cepen-
dant, de chanter cet acte avec un peu moins de
lenteur.
Avant le spectacle, nous avons tait la connais-
sance du nouveau régisseur qui est venu demander
l'indulgence du public pour M. Audisio, premier
ténor d'opéra-comique, remplaçant au pied levé
M. Viviaud, 2e ténor, subitement indisposé. M.
Audisio fut un Léopold irréprochable, doué d'une
voix charmante.
Nous avons revu avec plaisir Mlle Emma de Con-
soli, ire danseuse noble — une ancienne connais-
sance — qui obtint un joli succès, en compagnie
de Mlle Rigolti, une ire danseuse demi-caractère
très remarquée.
Une mention spéciale au ballet, composé de jeu-
nes et jolies femmes évoluant avec une grâce et un
ensemble parfait.
Au pupitre, M. Duyssens dirigeait l'orchestre.
Ne lui ménageons pas nos compliments car il y a
droit pleinement. Ajoutons que les choeurs, bien
disciplinés, se sont distingués et ont chanté avec
une sûreté remarquable.
Comme on le voit par les lignes qui précèdent,
cette première soirée fut très bonne en son ensem-
ble et il convient d'adresser des compliments aux
habiles directeurs du Grand-Théâtre.
Au moment où nous mettons sous presse, la
troupe d'opéra-comique doit débuter dans Le Bar-
bier de Séville. Une bien belle soirée certaine-
ment dont nous parlerons dans notre prochain nu-
méro.
F. D'ATRIEU.
VARIÉTÉS
La Fille Ehsa:— Poil de Carotte.— Petit Chagrin.
Le Flibustier.
Semaine bien remplie par la tournée du théâtre
Antoine, la rentrée de M Mosnier dans, le Flibus-
tier, celles de Mme A. Méry et de M. Bonarel dans
Petit Chagrin.
Un public si nombreux qu'il rappelait les repré-
sentations de la Comédie Française en tournée, est
venu entendre la Fille Elisa. cette pièce originale
tirée par M. Ajalbert du roman de Concourt. Elle
a fait l'objet d'une discussion à la Chambre à cause
de son interdiction en 1 89 1. Malgré ses hardiesses
et son réalisme, elle impressionne fortement et sa
tendance est plutôt moralisatrice, à l'inverse de la
plupart de nos chansons de café-concert qui ne
doivent leur succès qu'à leur bagout graveleux et
aux dessous plus ou moins suggestifs de celles qui
les débitent.
Deux artistes admirables par leur jeu simple.,
serré et nerveux, se sont fait applaudir chaleureu-
sement: Mlle Eugénie Nau et M. Mévisto. La pre-
mière, créatrice du rôle, est une des meilleures
élèves d'Antoine, que nous avons pu apprécier avec
la troupe du Théâtre-Libre, il y a quelques années.
Elle incarne son rôle avec une virtuosité saisissante
et on ne peut guère concevoir une interprétation
plus parfaite. M. Mévisto a rendu avec une force et
une netteté incroyables le rôle de l'avocat. Son
organe coloré et vibrant, aux inflexions larges et
profondes, a, pendant une demi-heure, tenu le
spectateur haletant et oppressé dans ce fameux
plaidover du 2e acte, qui est un véritable chef-
d'oeuvre de logique et de vérité, et pour lequel la
pièce entière semble avoir été échafaudée.
La souplesse de son talent s'est manifestée dans
Poil de Carotte, ce chef-d'oeuvre d'observation pro-
fonde et d'ironie piquante sous l'amertume des
souffrances imméritées d'un enfant. Il a décoché à
la perfection ces traits incisifs et mordants sous leur
forme amusante du père Lepic répondant avec une
philosophie bonhomme et spirituelle aux propos
de son fils. Poil de Carotte. Ce dialogue révélateur
entre le père et le fils renferme tout un véritable
drame avec des moyens simples et si drolatiques
qu'ils provoquent instinctivement le rire.
Ce chef-d'oeuvre de Jules Renard atteint les pro-
portions d'une véritable satire morale, vigoureu-
sement frappée au coin d'un style nerveux et concis,
exprimant nettement les idées profondes d'un pen-
seur grave et juste.
Non moins remarquable que M. Mévisto, Mlle
Nau rend à la perfection le rôle de Poil de Carotte,
si délicat et si nuancé. La troupe entière du Théâ-
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