Titre : La Guêpe : journal paraissant le dimanche / directeur Ch. Riaux
Éditeur : [s.n.] (Alger)
Date d'édition : 1891-10-04
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32896221v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 04 octobre 1891 04 octobre 1891
Description : 1891/10/04 (N2). 1891/10/04 (N2).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k964463t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-6803
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 25/06/2013
7
Première Année. N° 2.
JOURNAL PARAISSANT LE DIMANCHE
BUREAUX DU JOURNAL : 7, rue Joinville, Alger
PRIX DÊ L’ABONNEMENT :
Un an : 6 fr. : Six mois : 4 fr. ; Trois mois : 2 fr. 50
Les abonnements sont payables d’avance.
SOMMA IRE
Un Suicide sensationnel. — Cil Riaux.
Curieuse Exhibition. — Scharl.
Au Palais de Justice. — Saute-Ruisseau.
Courses de Blida, —Jeannot.
Projections électriques. — Tristan-d’Ahcuna.
Un Scandale militaire. —
Parades Vélocipédiques. — S. Vray,
Les Sauterelles à Alger. — Criquet.
L'enquête Algérienne. — Mercier.
LES ANNONCES SONT REÇUES :
Au bureau du journal. 7. rue Joinville, Alger, où l’on
pourra s’adresser pour tout ce qui concerne
la Rédaction et l’Administration.
Pour les annonces, on traitera de gré à gré.
UN
L
H
A
SENSATIONNEL
Le général Boulanger est mort ! Que la paix
et l’oubli soient sur sa tombe !
Une balle de revolver a tranché à jamais
celte existence qui aurait pu être glorieuse et
utile à sa patrie, mais qu’un moment de toile
ambition avait irrémédiablement gâchée.
Pourquoi s'est-il tué ? Est-ce par un déses
poir d’amour; est-ce par l’insupportable pers
pective d’une vie de tristesse et de remords
qu’a été armé le bras de cet homme, un mo
ment objet de la passion de tous les Français ?
C’est sur la tombe d’une femme adorée et
amèrement pleurée que le coup fatal est venu
briser les dernières espérances d’un parti que
le nom seul de celui qui en fut le chef mainte
nait uni. L’âme de celle créature a dû tressail
lir d’aise en voyant venir à elle cette autre
âme éprouvée par tant cio déceptions e! de fa- !
ligues en ce mondé.
Boulanger est mort 1 Ces trois mots sont ar
rivés comme la foudre sur la France, vibrante
encore de ses exaltations non oubliées. Ses
pires ennemis Font plaint, cet homme, parti
de la terre comme en partent tous les désespé
rés; pas une voix ne s’est élevée pour se ré
jouir de sa disparition : applaudi tant qu’il
resta honnête, conspué quand il se laissa en
traîner par des intrigants dont il fut abandon
né alors que l’abandonna la fortune, oublié
sur la terre d’exil, il est pardonné à présent
que l’on ne peut plus le craindre.
Celte mort ne changera rien à la situation
actuelle. Elle ne saurait donc être envisagée
au point de vue de ses conséquences probables.
Rochefort, qui passe son temps à donner de
grands coups d’épée dans l’eau, conseille à
M. Constans de ne pas trop se réjouir de cet
événement. Pourquoi M. Constans s’en réjoui
rait-il? Il avait su réduire Boulanger à l'iin-
O11 avait coupé ainsi la tête du serpent qui
voulait enserrer la France dans ses anneaux,
mais si la tête n’était plus là, le. corps y était
toujours, il n’a pas cessé de s’agiter convulsi
vement et de tenir dans l’inquiétude par sa
hideuse agonie les manifestations contre
l’opéra de Wagner viennent encore de prouver
sa ténacité vitale.
Boulanger est mort ! Que va faire le corps
du serpent? Se chercher une autre tête, c’est
certain, car en vérité il lui importe peu d’avoir
l’une ou l’autre, pourvu qu’elle lui procure
l’existence et satisfasse à son propre détriment
à des appétits inconsidérés. Tous ces pêcheurs
en eau trouble que l ou qualifie encore de
boulan ts tes, ce qui équivaut pour eux à la
llétrbsure, vont profiter du regain d’actua
lité que donne à leur cause la mort de son
fondateur, pour sefaire distribuer des bravos
et des pièces de cent sous, puis, dans l’ombre
ils se remettront en quête d’un nouveau féti
che. Puisse la France ne plus contenir de
Boulanger.
Je inc souviens encore du lormidable éclat
de rire qui secoua Alger, lorsqu’on vit des
camelots se promenant avec d’immenses en
seignes sur lesquelles on voyait le portrait du
général en costume de fantaisie avec ces mots
écrits au-dessus de sa tête :
SA MAJESTÉ BOULANGER F r
Empereur des Français
Cette réclame promenée dans toute la
France, ressemblait trop à celle que l’on
Fiez-vous donc aux gens qui se redressent en dog-cart
et qui jouent au Cercle,
On annonce le prochain mariage d’un de nos plus
charmants viveurs, surnommé l’Enfant de choeur, avec
la richissime héritière d’une marchande de corsets pa
risienne. Bonne chance aux futurs époux. Mais que va
penser de ce lâchage la jeune danseuse du National qui
se croyait indissolublement unie à son protecteur. Heu
reusement pour elle que la réouverture est proche et
que plus d’un adorateur va briguer la succession.
Allons ! messieurs les abonnés, il y a là une timbale à
décrocher,
*
# *
Je serais curieuse de savoir si nos sociétés de musique
doivent être maintenant considérées comme des troimes
de. tliéàtro O.-’. ■ Joule jiuisqucliLj donnent des
soirées au bénéfice de . -ms directeurs, en attendant
celui des élèves. Le directeur d’une société de musique a
généralement un emploi et c’est à ses heures libres qu’il
s’occupe de ses fonctions gratuites. Pourquoi alors im
plorer la charité publique. S’il n’a pas d’emploi, c’est à
qu’elle pratiqua avec ardeur, donne de torts bons
conseils aux débutantes qui l'aiment beaucoup.
Vit très à son aise sur son ancienne réputation et
sur les économies qu'elle a su faire quand elle tou
chait des rentes fixes de deux adorateurs, sans
compter le casuel. Deviendra honnête femme
sur ses vieux jours.
portait à croire que les serments sont faits
pour être tenus : on disait pourtant déjà
à leur époque : prêter un serment, or,
les choses prêtées ne doivent-elles pas
toujours être rendues ?
Mais de ces maris tragiques — ainsi les
désignait-on — il n’y en a plus. A peine
dans ces dernières années, en surgissail-
il de temps à autre, quelqu’un que Ton se
montrait du doigt comme un animal cu
rieux et sanguinaire, excessivement rare,
Beaucoup d'amateurs aux Iransat, pour assister au
débarquement de la troupe qui doit faire nos délices
cet hiver sous la direction de M. Guillicn. Les hommes
sont tous plus laids que le fort ténor, mais il y avait j que l'heureuse transformation des mœurs
parmi les femmes quelques échantillons pas trop j rendrait doits lllie époque prochaine tout
mal. Remarqué entre autres une délicieuse petite brune j a fait introuvable.
bien plantée, à l’allure troublante qu’elle n’aurait pas! Eh hieil, mesdames ainsi que IFIOS-
bcsoin do changer si elle devait faire la Carmencita. Le sieurs, ce que nous prétendons aujour-
m,Iah a failli I. r-.. : *i i. -i ! /Fini! vnnn T’ ’] * ' T ’l Y
■s spectateurs. O Alger ! Alger, tes parfums spermali-, Vivant, OUI, le dentier de CCtle IdCe dnSOl-
dques vont bientôt aromatiser ton alhinosphcre.
bée par les nouvelles couches humaines.
Entrez, entrez, il y aura de la place pour
tout le monde.
Vous verrez chez nous la plus extraor
dinaire de curiosités terrestres ; un mari
Des propositions très avantageuses ont déjà été laites
aux plus charmantes pensionnaires de M. Fromant.
la Société qui l’a clu qu’il appartient de ie payer. R 1 L’une d’elles, dont on a beaucoup admiré la plastiquedans 'ayant tué sa femme parce qil il l’a trouvée
me semble que de pareilles représentations doivent por- les Dragons de Villars, serait même engagée pour toute j côucllée aVCC 1111 de ses amis ! VOUS fl’is-
ter une rude atteinte à l’amour-propre du bénéficiaire. . ,a saison. Que l’on se dépêche si l’on ne veut pas en sonnez, mesdames, VOUS êtes ébahis,
En dehors de ces considérations, on peut encore faire ! être réduit à la portion congrue. Il est vrai que les baux messieurs, et tous VOUS VOUS demandez
valoir celle-ci : les soirées à bénéfice sont habituelle
ment organisées pour sortir d’embarras un malheureux
que la misère est venue surprendre. Si ceux .qui ne
soûl pas dans le besoin sc mettent à faire concurrence
aux pauvres, cela pourrait entraîner bien loin. On se
plaint déjà assez des appels incessants faits à la bourse
du public, par des sociétés de toute sorte, sans que des
particuliers viennent encore se mêler aux quémandeurs.
La charité aux vrais pauvres, s’il vous plail !
*
* %
Il y a eu au concert de mercredi un simulacre de ba
garre entre deux de nos plus grasses dégrafées. Le plus
risible est qu’elles se sont mutuellement jeté leur pro
contractés n’interdisent pas les sous-locations : tout le
monde pourra donc se loger.
*
* *
Un gros procès à scandale va probablement nous être
offert cet hiver. Un fonctionnaire haut placé de notre
ville aurait surpris sa douce moitié prenant d’amoureu
ses leçons avec un valet do chambre des mieux faits.
Le mari se serait peut-être contenté de flanquer le valet
à la porte s’il avait élé seul à découvrir la déchirure
faite à son contrat, mais deux amis l’accompagnaient
et il est obligé de saisir la justice de son affaire. Si saisie
qu’elle soit, ce 11e sera pourtant jamais au même point
que l’un des deux amis qui lui aussi servait de profes-
fait pour les mauvais produits industriels pour fession à la figure. Ce que la galerie s’amusait, ce n’est 1 scur a ^ a prosélyte de 1 amour. !■ iez vous a la fidélité des
que quiconque la prit au sérieux. On s’en
amusa, on en rit, et dès lors, celui qui fut un
rien de le dire. On est arrivé à séparer les belliqueuses 1 daines. apres celle-là.
prêtresses de Vénus avant qu’elles n’en soient venues à I
La Guêpe.
1 . . . se rayer
Dieu pour ta France, en devint ie comique ! t r .a|t
l’épaisse couche de fard qui masquai! lpnr<
courroucés, l es . an fiais ftvs bacchantes ivre;
:W
il était perdu, — Les dieux 11e doivent j a-j étaient cepchdant très courus dans l’antiquité.
puissance et 11e le craignait plus, car il l’avait
réduit par le ridicule, dont on ne sc relève ja
mais en France.
Je ne suis pas boulangiste, je 11e l’ai jamais
élé, mais pas un seul instant je n'ai pensé pour
cela devoir ajouter foi à toutes les accusations
portées contre ce malheureux dévoyé de la
ligne droite, qui fut un grand coupable
certes, mais qui le fut moins que
qui le poussèrent à le devenir. Nous nous
laissons, du reste, un peu trop facilement al
ler à considérer comme des gredins ceux qui
ne sont pas de notre opinion, d’autant mieux
qu’avec la versatilité qui nous distingue, nous
sommes absolument capables, du jour au len
demain, d’embrasser l’opinion de nos enne
mis, et, par conséquent, de passer sous le dra
peau des gredins.
Boulanger était un irresponsable atteint de
la folie des grandeurs. C’est une maladie qui
n’atteint généralement que les faibles d’esprit,
elle leur est donnée par des ambitieux qui tra
vaillent pour leur intérêt sous le couvert d'un
nom aimé et respecté. Boulanger a eu le tort de sc
laisser persuader qu’il élaitun grand homme, ap
pelé aux plus hautes destinées, alorsqu il n était
qu’un bon soldat, comme la France en compte
beaucoup ; il s’est pris pour un Napoléon lT
quand il 11’avail pas même l’envergure de
canaillerie d’un Napoléon III; il n’était, du
reste, pas convaincu de la réalisation du
splendide avenir qu’on lui prédisait, puis
que, à la première menace, il a pru
demment passé à l’étranger. O11 en a im
médiatement profité pour lui interdire le re
tour dans son pays qu’il avait troublé jusque
dans ses convictions les plus ardentes.
mais être ridicules.
On voulait bien de lui comme minis
tre de la guerre, mais eu toute autre qua
lilé ; non ! je ne parle ici que des gens con
vaincus. 11 est évident que celte perspective
n’était pas suffisante pour les prétendus répu
blicains, les royalistes, les impérialistes qui
comptaient sur cet homme pour parvenir ou
revenir à la puissance.
Mais encore une fois, Boulanger est mort !
Est-il alors utile de revenir sur les douloureux
évènements qui firent tant souffrir la France
et plongèrent dans l’inquiétude l’Europe
entière ?
Boulanger était amoureux, d’un de ces
amours qui étreignent quelquefois le cœur
d’un homme sur. sa maturité, et qui ne des
serrent plus leur étreinte qu’à venue de la
mort. 11 fut infiniment plus heureux, avec
la femme qu’il adorait, que sans doute, il
CURIEUSE EXHIBITION
ne l’aurait élé s’il avait pu atteindre son but
d’ambition. Celte femme disparue, la patrie
interdite, l'honneur entaché, il n’avait plus
que la ressource de mourir et il l’a épuisée.
Celte mort laissera son souvenir bien meilleur
dans l’histoire que s’il avait essayé de renou
veler les stériles agitations d’antan. Ceux
qu’elle aura trompés dans leurs honteuses
ceux eS pérances lui adresseront des reproches, mais
s qui les écoutera.
Un parfum de poésie et de mystère enve
loppera toujours la fin de celle victime d’une
fausse ambition et d’un amour vrai. O11 sc
rappellera toujours que c’est sur le marbre
d’une tombe qu’il s’est frappé et si l’on ne
plaint pas l'ambitieux déchu, 011 conservera
doucement sympathique et troublé peut-être
d'un vague regret le souvenir de celui qui ne
put pas survivre à celle qui partit avant lui,
puisqu’enmourant elle emporta son cœur et
son âme.
Ch. Riaux.
INSTANTANES
M. LETELLIER
Le candidat des daines, plus connu sous le nom
d’Alfred.
L’évocation de sa personne est toujours accom
pagnée de cette interrogation : A quoi peut-il donc
servir ? Sauf la multitude de jolies femmes qu’il
rend heureux et le nombre incalculable des qué
mandeurs assez naïfs encore pour avoir toi dans
ses promesses, personne encore n’a pu trouver
d’autre réponse que celle-ci : A rien ! S'est fait
raser la barbe et se teint les moustaches pour faire
durer quelques années de plus ses qualités irrésis
tibles de séduction auprès du sexe enchanteur.
Comme à la Madeleine du Christ, il lui sera beau
coup pardonné parce qu’il aura beaucoup aimé.
A fortement délaissé son étude de la rue Littré, à
Alger, pour mieux s'occuper d’ailaires dans la rue
de Rotrou, à Paris. S’est créé là une clientèle sé
rieuse qui l empèche de surveiller activement les
intérêts de ses électeurs. Se moque du reste par
faitement de ceux-ci et de ceux-là. A la certitude
de son inamovibilité, se sachant soutenu comme
son sénateur, par tous ceux qu’il a casés. A pour
les autres un fonds inépuisable de promesses ma
gnifiques qui s’évaporent en arrivant à l’air libre.
Se fait vieux et commence à devenir digne du Lu
xembourg. Néglige absolument de rendre compte
de son mandat, ou se fait souiller ce qu'il doit dire
quand il se décide à provoquer une réunion. Très
Iroussard, garnit son pantalon d'un fonds imper
méable quand il parle au public. La suppression
de son mandat serait sa ruine, et cette perspective
rend plus charitables les bulletins de vote. Com
mence à beaucoup ressemblera M. Mauguin le
quel commence à se momifier. Ayant une certaine
intelligence, aurait pu rendre de réels services à
l'Algérie s'il n'en avait été empêché par ses maî
tres-électeurs.
Fait partie à la Chambre du groupe des inu
tiles !
LA GRANDE MARGOT
Pourrait grandement être la mère de quelques-
îs des adorateurs de ses ex-charmes. 1 rès bien
uns
partagée sous le rapport des chairs molles, emploie
des corsets perfectionnés pour pallier au manque
de consistance de ses excroissances charnues supé
rieures. Diffère totalement de cette reine de Na
varre dont la transpiration embaumait l’Iris et qui
donna au conteur Perrault l'idée d'attribuer à sa
Cendrillon les plus petits pieds du monde. A cette
spécialité de se donner à tous les mâles d’une
même famille l’un après l'autre, de père en fils.
Fut une très belle femme, grande, forte et bé...
bète : n’a plus que ces trois dernières qualités. Est
une victime de la forte baisse de prix qu’occasionne
la grande affluence de dégrafées. L'ait parfois
preuve d’un goût déplorable dans le choix de ses
hôtes passagers, mais assure à ses amies que Par
lent n’a pas d'odeur. Au demeurant, une très
bonne fille qui ne laisse que d'excellents souve
nirs à ceux quelle admet dans son lit, célèbre il y
■s a quelques années par la finesse et l’originalité dû
- linge. C
A la foire aux Vices, à Paris... ou ailleurs...
en l’an 2.000.
Un immense palaisd exhibitions. m mté sur
roi laites disparaissant sous L s dorures
et tes draperie s. Sur l'estrade, se tient le
diseur de boniments absolum nt correct
et impassible il transmet une volonté à
l'orchestre invisible qui cesse de jouer :
Nous ne sommes pas ici. mesdames
ainsi que messieurs, pour exploiter votre
crédulité non plus que votre porte-mon
naie, nous ne sommes pas ici pour vous
la faire Notre maître, l’illustre Barntun
129, roi des Pufïistes, promu à cette haute
dignité a l’unanimité des voix de ses
sujets qui forment aujourd’hui les quatre
cinquièmes de la population du globe,
notre maître, de passage en cette ville,
où il restera vingt quatre heures seule
ment, est assez connu de vous pour que
vous n’ayez pas à craindre d’être trom
pés.
11 ne vous exhibera pas, comme des
concurrents déloyaux, de prétendues cu
riosités ramassées de ci de là : outils pour
avortements servant à rendre stériles les
femmes fécondes, verges cantharidées ou
courroies de suspension graissées de
philtres aphrodisiaques destinées à ren
dre aux hommes une virilité qu’ils ou
blient presque toujours dans le sein de
leur mère. Non. Ces objets, peu employés
autrefois vous sont devenus d'un usage
trop fréquent et ne peuvent pas vous in
téresser.
Il ne vous montrera pas non plus la
femme austère qui résiste à la séduction
ni la jeune fille chaste et naïve. Ces spéci
mens de races depuis longtemps éteintes
ne se trouvent plus que conservés dans
des bocaux d’alcool ou reproduits en cire.
Non. Vous n’avez pas. mesdames ainsi
que messieurs, affaire a un exploiteur
Notre maître, de passage en cette ville,
où il restera vingt-quatre heures seule-
si, vraiment, il peut encore y avoir de
par le monde des créatures aussi terri
bles 1 Oui il y en a une encore, la der
nière, et elle est là, vivante, palpable.
Entrez, entrez ! Cette bète unique, que
rien en apparence ne fait différer d’avec
vous, messieurs, a cette faculté merveil
leuse de se mettre en fureur chaque fois
que l’on touche à une fibre secrète et
extrêmement sensible qu’elle seule pos
sède, scientifiquement désignée sous ce
nom incompréhensible pour les non ini
tiés : la fibre de l’honneur conjugal.
Cet animal sans pareil, que nous avons
pu trouver après de longues et fasti
dieuses recherches dans cette forêt vierge
fie toute pudeur, hérissée de préjugés et
de manies, que l’on appelle la bonne so
ciété, est une preuve vivante des énormes
progrès accomplis par la race humai te
qui, l’une après l’autre, abandonne sur
sa route vertigineusement ascendante,
toutes les entraves connues jadis sous le
nom de vertus et bons sentunents, entra
ves qui seules l’empêchent d’arriver
promptement à ce point culminant d’ab-
i solu égoïsme et de préocupation de son
moi f but suprême de l’évolutionde la
créature pensante.
Et nous devons le reconnaître, mes
sieurs, tous nos ancêtres la possédaient
cette fibre unique que 1 illustré Barnum
129, fera tout à l’heure vibrer devant
vous.
Il fut une époque ou les hommes étaient
assez ignorants et obtus pour s’imaginer
qu’un dommage quelconque pouvait leur
survenir du fait que leurs femmes accor
daient leurs faveurs à tous ceux qui les
sollicitaient.
ÉCHOS DE LA SEMAINE
Il n’est bruit dans le haut monde espagnol d’Alger,
que de la disparition d’un élégant vice-consul qui se fit
tant remarquer par son luxe et ses allures aristocrati
ques. En même temps que M. de X..., ont disparu les
fonds déposés dans une maison de banque pour les be
soins du Consulat. On parle de dettes véreuses, de pro
cédés malpropres, de gogos exploités. Le pot-aux-rôses
aurait élé découvert par le Consul d’Espagne à son rc- fjnye. (Connaissant à fond tous les moyens d’utili-
tour, lorsqu’ayant besoin d’une partie de son argent en j sation de la volupté, ne recule devant aucun raffi
Mais avec cette intelligence subtile et
raffinée qui nous distingue des autres
bêtes, nous sommes enfin arrivés - et
nous devons en être glorieux — à com
prendre que le mariage a été spéciale
ment inventé pour permettre à la femme
de se livrer à tous les écarts possibles
sous le couvert d’un nom qu’on lui a com
plaisamment prêté, et pour mettre le
mari à même de parvenir à une honorable
situation, ou de mener là vie à grandes
guides que sa fortune relativement mo
deste lui interdit, et que par le moyen des
écarts de sa femme, il pourra continuer
jusqu’à extinction de beauté et de fraî
cheur de celle ci.
De même que nos ancêtres s’étaient
débarrassés de cet appendice disgracieux
et incommode que les autres bêtes balan
cent à l’extrémité de leur colonne verté
brale, de même nous avons su nous dé
faire de la libre gênante de l’honneur con
jugal. Et de plus mesdames ainsi que
messieurs, ne devons-nous pas espérer,
avec une joyeuse et morale impatience,de
voir arriver bientôt le jour où les pères
et mères, se défaisant à leur tour d’une
autre fibre non moins gênante qui les
enchaîne, pourront, en toute tranquilitô
de conscience se livrer au commerce de
ja vertu de leurs filles, voire de leurs fils,
et acquérir ainsi une fortune irréprocha
ble. L’exemple n’est-il pas donné chaque
ment, prétend mettre devant vos yeux j jour, par des personnes d une supériorité
stupéfaits une curiosité vivante, unique j d’intelligence etde morale incontestables?
sur la terre. Vous savez, certainement, Notre maître corrige à ses moments de
mesdames ainsique messieurs, qu’il y loisir les épreuves d’un livre qui fera
avait autrefois des hommes d’une singu-j fureur à son apparition. Son titre sera :
hère complexion : indulgents à l’extrême Du m yen de / arremr par (exploitation
tant qu’l fs étaient célibataires, le mariage de l innocence dus < n fa ts des deux sexes,
les rendait féroces. Par le seul fait du
changement de leur situation sociale, ces
hommes devenaient farouches et égoïstes
au point de ne pas vouloir se laisser
tromper par la femme qui s’était libre
ment donnée à eux et leur avait juré fldé-
spécial aux chefs de famille.
Entre/, entrez, nous allons vous faire
voir un mari ayant tué sa femme parce
qu’il l’a trouvée couchée avec un de ses
amis ! Notre illustre maître, avec une sû
reté de main incomparable, fera vibrer
banque, ou lui apprit que le fringant vice-consul avait nement, possédé un cœur blindé contre le dégoût., lité et amour éternels. t j devant \ ous la fameuse fibre de 1 honneur
tout pria. Peu attrayante pour les débauches féminines, ! Admirez cette inconséquence qui les conjugal. Plusieurs procédés seront em»
s
■B
i:
Première Année. N° 2.
JOURNAL PARAISSANT LE DIMANCHE
BUREAUX DU JOURNAL : 7, rue Joinville, Alger
PRIX DÊ L’ABONNEMENT :
Un an : 6 fr. : Six mois : 4 fr. ; Trois mois : 2 fr. 50
Les abonnements sont payables d’avance.
SOMMA IRE
Un Suicide sensationnel. — Cil Riaux.
Curieuse Exhibition. — Scharl.
Au Palais de Justice. — Saute-Ruisseau.
Courses de Blida, —Jeannot.
Projections électriques. — Tristan-d’Ahcuna.
Un Scandale militaire. —
Parades Vélocipédiques. — S. Vray,
Les Sauterelles à Alger. — Criquet.
L'enquête Algérienne. — Mercier.
LES ANNONCES SONT REÇUES :
Au bureau du journal. 7. rue Joinville, Alger, où l’on
pourra s’adresser pour tout ce qui concerne
la Rédaction et l’Administration.
Pour les annonces, on traitera de gré à gré.
UN
L
H
A
SENSATIONNEL
Le général Boulanger est mort ! Que la paix
et l’oubli soient sur sa tombe !
Une balle de revolver a tranché à jamais
celte existence qui aurait pu être glorieuse et
utile à sa patrie, mais qu’un moment de toile
ambition avait irrémédiablement gâchée.
Pourquoi s'est-il tué ? Est-ce par un déses
poir d’amour; est-ce par l’insupportable pers
pective d’une vie de tristesse et de remords
qu’a été armé le bras de cet homme, un mo
ment objet de la passion de tous les Français ?
C’est sur la tombe d’une femme adorée et
amèrement pleurée que le coup fatal est venu
briser les dernières espérances d’un parti que
le nom seul de celui qui en fut le chef mainte
nait uni. L’âme de celle créature a dû tressail
lir d’aise en voyant venir à elle cette autre
âme éprouvée par tant cio déceptions e! de fa- !
ligues en ce mondé.
Boulanger est mort 1 Ces trois mots sont ar
rivés comme la foudre sur la France, vibrante
encore de ses exaltations non oubliées. Ses
pires ennemis Font plaint, cet homme, parti
de la terre comme en partent tous les désespé
rés; pas une voix ne s’est élevée pour se ré
jouir de sa disparition : applaudi tant qu’il
resta honnête, conspué quand il se laissa en
traîner par des intrigants dont il fut abandon
né alors que l’abandonna la fortune, oublié
sur la terre d’exil, il est pardonné à présent
que l’on ne peut plus le craindre.
Celte mort ne changera rien à la situation
actuelle. Elle ne saurait donc être envisagée
au point de vue de ses conséquences probables.
Rochefort, qui passe son temps à donner de
grands coups d’épée dans l’eau, conseille à
M. Constans de ne pas trop se réjouir de cet
événement. Pourquoi M. Constans s’en réjoui
rait-il? Il avait su réduire Boulanger à l'iin-
O11 avait coupé ainsi la tête du serpent qui
voulait enserrer la France dans ses anneaux,
mais si la tête n’était plus là, le. corps y était
toujours, il n’a pas cessé de s’agiter convulsi
vement et de tenir dans l’inquiétude par sa
hideuse agonie les manifestations contre
l’opéra de Wagner viennent encore de prouver
sa ténacité vitale.
Boulanger est mort ! Que va faire le corps
du serpent? Se chercher une autre tête, c’est
certain, car en vérité il lui importe peu d’avoir
l’une ou l’autre, pourvu qu’elle lui procure
l’existence et satisfasse à son propre détriment
à des appétits inconsidérés. Tous ces pêcheurs
en eau trouble que l ou qualifie encore de
boulan ts tes, ce qui équivaut pour eux à la
llétrbsure, vont profiter du regain d’actua
lité que donne à leur cause la mort de son
fondateur, pour sefaire distribuer des bravos
et des pièces de cent sous, puis, dans l’ombre
ils se remettront en quête d’un nouveau féti
che. Puisse la France ne plus contenir de
Boulanger.
Je inc souviens encore du lormidable éclat
de rire qui secoua Alger, lorsqu’on vit des
camelots se promenant avec d’immenses en
seignes sur lesquelles on voyait le portrait du
général en costume de fantaisie avec ces mots
écrits au-dessus de sa tête :
SA MAJESTÉ BOULANGER F r
Empereur des Français
Cette réclame promenée dans toute la
France, ressemblait trop à celle que l’on
Fiez-vous donc aux gens qui se redressent en dog-cart
et qui jouent au Cercle,
On annonce le prochain mariage d’un de nos plus
charmants viveurs, surnommé l’Enfant de choeur, avec
la richissime héritière d’une marchande de corsets pa
risienne. Bonne chance aux futurs époux. Mais que va
penser de ce lâchage la jeune danseuse du National qui
se croyait indissolublement unie à son protecteur. Heu
reusement pour elle que la réouverture est proche et
que plus d’un adorateur va briguer la succession.
Allons ! messieurs les abonnés, il y a là une timbale à
décrocher,
*
# *
Je serais curieuse de savoir si nos sociétés de musique
doivent être maintenant considérées comme des troimes
de. tliéàtro O.-’. ■ Joule jiuisqucliLj donnent des
soirées au bénéfice de . -ms directeurs, en attendant
celui des élèves. Le directeur d’une société de musique a
généralement un emploi et c’est à ses heures libres qu’il
s’occupe de ses fonctions gratuites. Pourquoi alors im
plorer la charité publique. S’il n’a pas d’emploi, c’est à
qu’elle pratiqua avec ardeur, donne de torts bons
conseils aux débutantes qui l'aiment beaucoup.
Vit très à son aise sur son ancienne réputation et
sur les économies qu'elle a su faire quand elle tou
chait des rentes fixes de deux adorateurs, sans
compter le casuel. Deviendra honnête femme
sur ses vieux jours.
portait à croire que les serments sont faits
pour être tenus : on disait pourtant déjà
à leur époque : prêter un serment, or,
les choses prêtées ne doivent-elles pas
toujours être rendues ?
Mais de ces maris tragiques — ainsi les
désignait-on — il n’y en a plus. A peine
dans ces dernières années, en surgissail-
il de temps à autre, quelqu’un que Ton se
montrait du doigt comme un animal cu
rieux et sanguinaire, excessivement rare,
Beaucoup d'amateurs aux Iransat, pour assister au
débarquement de la troupe qui doit faire nos délices
cet hiver sous la direction de M. Guillicn. Les hommes
sont tous plus laids que le fort ténor, mais il y avait j que l'heureuse transformation des mœurs
parmi les femmes quelques échantillons pas trop j rendrait doits lllie époque prochaine tout
mal. Remarqué entre autres une délicieuse petite brune j a fait introuvable.
bien plantée, à l’allure troublante qu’elle n’aurait pas! Eh hieil, mesdames ainsi que IFIOS-
bcsoin do changer si elle devait faire la Carmencita. Le sieurs, ce que nous prétendons aujour-
m,Iah a failli I. r-.. : *i i. -i ! /Fini! vnnn T’ ’] * ' T ’l Y
■s spectateurs. O Alger ! Alger, tes parfums spermali-, Vivant, OUI, le dentier de CCtle IdCe dnSOl-
dques vont bientôt aromatiser ton alhinosphcre.
bée par les nouvelles couches humaines.
Entrez, entrez, il y aura de la place pour
tout le monde.
Vous verrez chez nous la plus extraor
dinaire de curiosités terrestres ; un mari
Des propositions très avantageuses ont déjà été laites
aux plus charmantes pensionnaires de M. Fromant.
la Société qui l’a clu qu’il appartient de ie payer. R 1 L’une d’elles, dont on a beaucoup admiré la plastiquedans 'ayant tué sa femme parce qil il l’a trouvée
me semble que de pareilles représentations doivent por- les Dragons de Villars, serait même engagée pour toute j côucllée aVCC 1111 de ses amis ! VOUS fl’is-
ter une rude atteinte à l’amour-propre du bénéficiaire. . ,a saison. Que l’on se dépêche si l’on ne veut pas en sonnez, mesdames, VOUS êtes ébahis,
En dehors de ces considérations, on peut encore faire ! être réduit à la portion congrue. Il est vrai que les baux messieurs, et tous VOUS VOUS demandez
valoir celle-ci : les soirées à bénéfice sont habituelle
ment organisées pour sortir d’embarras un malheureux
que la misère est venue surprendre. Si ceux .qui ne
soûl pas dans le besoin sc mettent à faire concurrence
aux pauvres, cela pourrait entraîner bien loin. On se
plaint déjà assez des appels incessants faits à la bourse
du public, par des sociétés de toute sorte, sans que des
particuliers viennent encore se mêler aux quémandeurs.
La charité aux vrais pauvres, s’il vous plail !
*
* %
Il y a eu au concert de mercredi un simulacre de ba
garre entre deux de nos plus grasses dégrafées. Le plus
risible est qu’elles se sont mutuellement jeté leur pro
contractés n’interdisent pas les sous-locations : tout le
monde pourra donc se loger.
*
* *
Un gros procès à scandale va probablement nous être
offert cet hiver. Un fonctionnaire haut placé de notre
ville aurait surpris sa douce moitié prenant d’amoureu
ses leçons avec un valet do chambre des mieux faits.
Le mari se serait peut-être contenté de flanquer le valet
à la porte s’il avait élé seul à découvrir la déchirure
faite à son contrat, mais deux amis l’accompagnaient
et il est obligé de saisir la justice de son affaire. Si saisie
qu’elle soit, ce 11e sera pourtant jamais au même point
que l’un des deux amis qui lui aussi servait de profes-
fait pour les mauvais produits industriels pour fession à la figure. Ce que la galerie s’amusait, ce n’est 1 scur a ^ a prosélyte de 1 amour. !■ iez vous a la fidélité des
que quiconque la prit au sérieux. On s’en
amusa, on en rit, et dès lors, celui qui fut un
rien de le dire. On est arrivé à séparer les belliqueuses 1 daines. apres celle-là.
prêtresses de Vénus avant qu’elles n’en soient venues à I
La Guêpe.
1 . . . se rayer
Dieu pour ta France, en devint ie comique ! t r .a|t
l’épaisse couche de fard qui masquai! lpnr<
courroucés, l es . an fiais ftvs bacchantes ivre;
:W
il était perdu, — Les dieux 11e doivent j a-j étaient cepchdant très courus dans l’antiquité.
puissance et 11e le craignait plus, car il l’avait
réduit par le ridicule, dont on ne sc relève ja
mais en France.
Je ne suis pas boulangiste, je 11e l’ai jamais
élé, mais pas un seul instant je n'ai pensé pour
cela devoir ajouter foi à toutes les accusations
portées contre ce malheureux dévoyé de la
ligne droite, qui fut un grand coupable
certes, mais qui le fut moins que
qui le poussèrent à le devenir. Nous nous
laissons, du reste, un peu trop facilement al
ler à considérer comme des gredins ceux qui
ne sont pas de notre opinion, d’autant mieux
qu’avec la versatilité qui nous distingue, nous
sommes absolument capables, du jour au len
demain, d’embrasser l’opinion de nos enne
mis, et, par conséquent, de passer sous le dra
peau des gredins.
Boulanger était un irresponsable atteint de
la folie des grandeurs. C’est une maladie qui
n’atteint généralement que les faibles d’esprit,
elle leur est donnée par des ambitieux qui tra
vaillent pour leur intérêt sous le couvert d'un
nom aimé et respecté. Boulanger a eu le tort de sc
laisser persuader qu’il élaitun grand homme, ap
pelé aux plus hautes destinées, alorsqu il n était
qu’un bon soldat, comme la France en compte
beaucoup ; il s’est pris pour un Napoléon lT
quand il 11’avail pas même l’envergure de
canaillerie d’un Napoléon III; il n’était, du
reste, pas convaincu de la réalisation du
splendide avenir qu’on lui prédisait, puis
que, à la première menace, il a pru
demment passé à l’étranger. O11 en a im
médiatement profité pour lui interdire le re
tour dans son pays qu’il avait troublé jusque
dans ses convictions les plus ardentes.
mais être ridicules.
On voulait bien de lui comme minis
tre de la guerre, mais eu toute autre qua
lilé ; non ! je ne parle ici que des gens con
vaincus. 11 est évident que celte perspective
n’était pas suffisante pour les prétendus répu
blicains, les royalistes, les impérialistes qui
comptaient sur cet homme pour parvenir ou
revenir à la puissance.
Mais encore une fois, Boulanger est mort !
Est-il alors utile de revenir sur les douloureux
évènements qui firent tant souffrir la France
et plongèrent dans l’inquiétude l’Europe
entière ?
Boulanger était amoureux, d’un de ces
amours qui étreignent quelquefois le cœur
d’un homme sur. sa maturité, et qui ne des
serrent plus leur étreinte qu’à venue de la
mort. 11 fut infiniment plus heureux, avec
la femme qu’il adorait, que sans doute, il
CURIEUSE EXHIBITION
ne l’aurait élé s’il avait pu atteindre son but
d’ambition. Celte femme disparue, la patrie
interdite, l'honneur entaché, il n’avait plus
que la ressource de mourir et il l’a épuisée.
Celte mort laissera son souvenir bien meilleur
dans l’histoire que s’il avait essayé de renou
veler les stériles agitations d’antan. Ceux
qu’elle aura trompés dans leurs honteuses
ceux eS pérances lui adresseront des reproches, mais
s qui les écoutera.
Un parfum de poésie et de mystère enve
loppera toujours la fin de celle victime d’une
fausse ambition et d’un amour vrai. O11 sc
rappellera toujours que c’est sur le marbre
d’une tombe qu’il s’est frappé et si l’on ne
plaint pas l'ambitieux déchu, 011 conservera
doucement sympathique et troublé peut-être
d'un vague regret le souvenir de celui qui ne
put pas survivre à celle qui partit avant lui,
puisqu’enmourant elle emporta son cœur et
son âme.
Ch. Riaux.
INSTANTANES
M. LETELLIER
Le candidat des daines, plus connu sous le nom
d’Alfred.
L’évocation de sa personne est toujours accom
pagnée de cette interrogation : A quoi peut-il donc
servir ? Sauf la multitude de jolies femmes qu’il
rend heureux et le nombre incalculable des qué
mandeurs assez naïfs encore pour avoir toi dans
ses promesses, personne encore n’a pu trouver
d’autre réponse que celle-ci : A rien ! S'est fait
raser la barbe et se teint les moustaches pour faire
durer quelques années de plus ses qualités irrésis
tibles de séduction auprès du sexe enchanteur.
Comme à la Madeleine du Christ, il lui sera beau
coup pardonné parce qu’il aura beaucoup aimé.
A fortement délaissé son étude de la rue Littré, à
Alger, pour mieux s'occuper d’ailaires dans la rue
de Rotrou, à Paris. S’est créé là une clientèle sé
rieuse qui l empèche de surveiller activement les
intérêts de ses électeurs. Se moque du reste par
faitement de ceux-ci et de ceux-là. A la certitude
de son inamovibilité, se sachant soutenu comme
son sénateur, par tous ceux qu’il a casés. A pour
les autres un fonds inépuisable de promesses ma
gnifiques qui s’évaporent en arrivant à l’air libre.
Se fait vieux et commence à devenir digne du Lu
xembourg. Néglige absolument de rendre compte
de son mandat, ou se fait souiller ce qu'il doit dire
quand il se décide à provoquer une réunion. Très
Iroussard, garnit son pantalon d'un fonds imper
méable quand il parle au public. La suppression
de son mandat serait sa ruine, et cette perspective
rend plus charitables les bulletins de vote. Com
mence à beaucoup ressemblera M. Mauguin le
quel commence à se momifier. Ayant une certaine
intelligence, aurait pu rendre de réels services à
l'Algérie s'il n'en avait été empêché par ses maî
tres-électeurs.
Fait partie à la Chambre du groupe des inu
tiles !
LA GRANDE MARGOT
Pourrait grandement être la mère de quelques-
îs des adorateurs de ses ex-charmes. 1 rès bien
uns
partagée sous le rapport des chairs molles, emploie
des corsets perfectionnés pour pallier au manque
de consistance de ses excroissances charnues supé
rieures. Diffère totalement de cette reine de Na
varre dont la transpiration embaumait l’Iris et qui
donna au conteur Perrault l'idée d'attribuer à sa
Cendrillon les plus petits pieds du monde. A cette
spécialité de se donner à tous les mâles d’une
même famille l’un après l'autre, de père en fils.
Fut une très belle femme, grande, forte et bé...
bète : n’a plus que ces trois dernières qualités. Est
une victime de la forte baisse de prix qu’occasionne
la grande affluence de dégrafées. L'ait parfois
preuve d’un goût déplorable dans le choix de ses
hôtes passagers, mais assure à ses amies que Par
lent n’a pas d'odeur. Au demeurant, une très
bonne fille qui ne laisse que d'excellents souve
nirs à ceux quelle admet dans son lit, célèbre il y
■s a quelques années par la finesse et l’originalité dû
- linge. C
A la foire aux Vices, à Paris... ou ailleurs...
en l’an 2.000.
Un immense palaisd exhibitions. m mté sur
roi laites disparaissant sous L s dorures
et tes draperie s. Sur l'estrade, se tient le
diseur de boniments absolum nt correct
et impassible il transmet une volonté à
l'orchestre invisible qui cesse de jouer :
Nous ne sommes pas ici. mesdames
ainsi que messieurs, pour exploiter votre
crédulité non plus que votre porte-mon
naie, nous ne sommes pas ici pour vous
la faire Notre maître, l’illustre Barntun
129, roi des Pufïistes, promu à cette haute
dignité a l’unanimité des voix de ses
sujets qui forment aujourd’hui les quatre
cinquièmes de la population du globe,
notre maître, de passage en cette ville,
où il restera vingt quatre heures seule
ment, est assez connu de vous pour que
vous n’ayez pas à craindre d’être trom
pés.
11 ne vous exhibera pas, comme des
concurrents déloyaux, de prétendues cu
riosités ramassées de ci de là : outils pour
avortements servant à rendre stériles les
femmes fécondes, verges cantharidées ou
courroies de suspension graissées de
philtres aphrodisiaques destinées à ren
dre aux hommes une virilité qu’ils ou
blient presque toujours dans le sein de
leur mère. Non. Ces objets, peu employés
autrefois vous sont devenus d'un usage
trop fréquent et ne peuvent pas vous in
téresser.
Il ne vous montrera pas non plus la
femme austère qui résiste à la séduction
ni la jeune fille chaste et naïve. Ces spéci
mens de races depuis longtemps éteintes
ne se trouvent plus que conservés dans
des bocaux d’alcool ou reproduits en cire.
Non. Vous n’avez pas. mesdames ainsi
que messieurs, affaire a un exploiteur
Notre maître, de passage en cette ville,
où il restera vingt-quatre heures seule-
si, vraiment, il peut encore y avoir de
par le monde des créatures aussi terri
bles 1 Oui il y en a une encore, la der
nière, et elle est là, vivante, palpable.
Entrez, entrez ! Cette bète unique, que
rien en apparence ne fait différer d’avec
vous, messieurs, a cette faculté merveil
leuse de se mettre en fureur chaque fois
que l’on touche à une fibre secrète et
extrêmement sensible qu’elle seule pos
sède, scientifiquement désignée sous ce
nom incompréhensible pour les non ini
tiés : la fibre de l’honneur conjugal.
Cet animal sans pareil, que nous avons
pu trouver après de longues et fasti
dieuses recherches dans cette forêt vierge
fie toute pudeur, hérissée de préjugés et
de manies, que l’on appelle la bonne so
ciété, est une preuve vivante des énormes
progrès accomplis par la race humai te
qui, l’une après l’autre, abandonne sur
sa route vertigineusement ascendante,
toutes les entraves connues jadis sous le
nom de vertus et bons sentunents, entra
ves qui seules l’empêchent d’arriver
promptement à ce point culminant d’ab-
i solu égoïsme et de préocupation de son
moi f but suprême de l’évolutionde la
créature pensante.
Et nous devons le reconnaître, mes
sieurs, tous nos ancêtres la possédaient
cette fibre unique que 1 illustré Barnum
129, fera tout à l’heure vibrer devant
vous.
Il fut une époque ou les hommes étaient
assez ignorants et obtus pour s’imaginer
qu’un dommage quelconque pouvait leur
survenir du fait que leurs femmes accor
daient leurs faveurs à tous ceux qui les
sollicitaient.
ÉCHOS DE LA SEMAINE
Il n’est bruit dans le haut monde espagnol d’Alger,
que de la disparition d’un élégant vice-consul qui se fit
tant remarquer par son luxe et ses allures aristocrati
ques. En même temps que M. de X..., ont disparu les
fonds déposés dans une maison de banque pour les be
soins du Consulat. On parle de dettes véreuses, de pro
cédés malpropres, de gogos exploités. Le pot-aux-rôses
aurait élé découvert par le Consul d’Espagne à son rc- fjnye. (Connaissant à fond tous les moyens d’utili-
tour, lorsqu’ayant besoin d’une partie de son argent en j sation de la volupté, ne recule devant aucun raffi
Mais avec cette intelligence subtile et
raffinée qui nous distingue des autres
bêtes, nous sommes enfin arrivés - et
nous devons en être glorieux — à com
prendre que le mariage a été spéciale
ment inventé pour permettre à la femme
de se livrer à tous les écarts possibles
sous le couvert d’un nom qu’on lui a com
plaisamment prêté, et pour mettre le
mari à même de parvenir à une honorable
situation, ou de mener là vie à grandes
guides que sa fortune relativement mo
deste lui interdit, et que par le moyen des
écarts de sa femme, il pourra continuer
jusqu’à extinction de beauté et de fraî
cheur de celle ci.
De même que nos ancêtres s’étaient
débarrassés de cet appendice disgracieux
et incommode que les autres bêtes balan
cent à l’extrémité de leur colonne verté
brale, de même nous avons su nous dé
faire de la libre gênante de l’honneur con
jugal. Et de plus mesdames ainsi que
messieurs, ne devons-nous pas espérer,
avec une joyeuse et morale impatience,de
voir arriver bientôt le jour où les pères
et mères, se défaisant à leur tour d’une
autre fibre non moins gênante qui les
enchaîne, pourront, en toute tranquilitô
de conscience se livrer au commerce de
ja vertu de leurs filles, voire de leurs fils,
et acquérir ainsi une fortune irréprocha
ble. L’exemple n’est-il pas donné chaque
ment, prétend mettre devant vos yeux j jour, par des personnes d une supériorité
stupéfaits une curiosité vivante, unique j d’intelligence etde morale incontestables?
sur la terre. Vous savez, certainement, Notre maître corrige à ses moments de
mesdames ainsique messieurs, qu’il y loisir les épreuves d’un livre qui fera
avait autrefois des hommes d’une singu-j fureur à son apparition. Son titre sera :
hère complexion : indulgents à l’extrême Du m yen de / arremr par (exploitation
tant qu’l fs étaient célibataires, le mariage de l innocence dus < n fa ts des deux sexes,
les rendait féroces. Par le seul fait du
changement de leur situation sociale, ces
hommes devenaient farouches et égoïstes
au point de ne pas vouloir se laisser
tromper par la femme qui s’était libre
ment donnée à eux et leur avait juré fldé-
spécial aux chefs de famille.
Entre/, entrez, nous allons vous faire
voir un mari ayant tué sa femme parce
qu’il l’a trouvée couchée avec un de ses
amis ! Notre illustre maître, avec une sû
reté de main incomparable, fera vibrer
banque, ou lui apprit que le fringant vice-consul avait nement, possédé un cœur blindé contre le dégoût., lité et amour éternels. t j devant \ ous la fameuse fibre de 1 honneur
tout pria. Peu attrayante pour les débauches féminines, ! Admirez cette inconséquence qui les conjugal. Plusieurs procédés seront em»
s
■B
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