Presse et revues
8 pages
Titre : La Jeunesse illustrée
Éditeur : A. Fayard (Paris)
Date d'édition : 1932-05-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327962868
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 11188 Nombre total de vues : 11188
Description : 01 mai 1932 01 mai 1932
Description : 1932/05/01 (N1491). 1932/05/01 (N1491).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k963369h
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-55902
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/05/2013
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N° 1491 — 30° Année
3S Centim
(73?
le? Mai 1932
Zcr Jeunesse illustrée
. MIRLITON, MIRLITAINE, par S. PANIA
Dubois, l’artiste peintre, pénètre dans la chambre
de son ami Durand, le poète chansonnier, une espèce
de monomane de la versification facile. Celui-ci
l’accueille par ces vers ? classiques :
Prends un siège, Cinna, prends et sur toute chose
Observe exactement ta loi que je t’impose.
* D’abord, s’écrie Dupont, je ne suis pas Cinna et
puis tu n’as pas à m’imposer de loi. »
...seulement, Je crois que ce sçra difficile dans les
circonstances les plus prosaïques de la vie courante.
Pour parler à ta bonne, pour commander ton déjeuner
(auquel tu m’as du reste convié), etc., etc. Mais,
puisque nous devons passer la journée ensemble
dehors fc’est la lettre du pari), n’hésitons pas à sortir,
habille-toi. » Pour toute réponse, Durand appuie sur
le bouton électrique.
...d’éclater de rire, car Durand avait parié de s’ex
primer en vers et dans son idée, c’était seulement
de façon orale, il le faisait aussi graphiquement, c’était
encore mieux. Mais l'écueil que ledit Dubois espérait
infranchissable, allait se présenter. Il s'agissait de la
séance chez le coiffeur où Durand avait l’habitude
de se faire raser chaque matin.
...Monsieur va mettre pour s’habiller. Durand déclame:
Je mettrai mon veston à taille.
Pantalon clair et, par-dessus.
J’enfilerai mon pardessus.
Comme coiffure ? chapeau de paille !
Un peu étonnée de voir son patron coiffer un
chapeau de paille en plein mois de décembre, Céline
se dit qu’avec les fous et les poètes, il n’y a...
Mais Durand
fauteuil à son ami :
Assieds-toi donc, mon vieux Dubois,
Sur ce fauteuil, peluche et bois,
El permets qu’avant toute chose,
Je m’habille, cela s’impose t
« Ah ! ah 1 s’écria Dubois en s'asseyant, alors, tu
CS décidé à observer le pari que tu m'as proposé hier,...
...pari qui consiste à passer la journée entière en ne
parlant qu’en vers ? # Durand alors, déclame :
Foin du langage terre à terre
Fleurant poireau, pomme de terre ;
Vive le vers I parler des dieux,
Qui me transporte dans les deux t
« Bien 1 bien 1 fait Dubois, nous allons voir si tu
vas tenir le coup toute la journée,...
Les deux amis entrent dans le salon-lavatory.
Durand s'assied. M. Eugène s'empresse auprès de
son client habituel. Alors Durand :
Aimable artiste capillaire,
Veuillez, je vous prie, sans phraser,
Vous occuper de me raser...
...de me raser, de me raser... Euh I c’est la rime à
capillaire qui est rétive...
Durand est assez embarrassé. Voyons la rime ù
capillaire... dromadaire ?... non ! lampadaire ? non.
Mais Eugène qui a l’habitude des fantaisies poétiques
de son client et qui, lui aussi, se pique de rimailler,
a trouvé. Il déclame, à son tour : « Allez donc vous faire
lan-laire / » « Réflexion vraiment trop vulgaire ! » observe
Durand qui renonce à sa barbe et sort avec dignité
suivi de Dubois. Les deux amis... (Voir la suit* p. a.)
La fidèle d$ine paraît, souhaite le bonjour et
demande comment Monsieur a dormi. Alors, Durand :
Salut, modèle des servantes.
J’ai bien dormi, cela t’enchante ?
Mais finissons de babiller
Car il s’agit de s’habiller.
Mais la figure de Céline s'empourpre de colère,
t Monsieur m’a tutoyée, je crois ? » s’indigne-t-elle.
...pas à raisonner. Elle apporte donc les objets deman
dés. Durand fait sa toilette et s’habille tout en récitant
à son ami Dubois (que cela n’amuse que médiocre
ment) des tirades de tragédies, légèrement périmées.
Enfin le voilà prêt, les deux amis sortent dans la
rue. « Je te rappelle, fait Dubois à Durand, que tu as
une lettre recommandée à envoyer à M. Veyre, ton
tailleur ! »
Durand se rend à la poste, accompagné de son ami,
il prend dans sa poche une lettre qu’il a préparée pour
son tailleur et inscrit sur l’enveloppe... en vers :
Ami facteur, d’un pied léger,
Rends-toi, 107, rue de la Douane,
Pour remettre ce pli chargé,
A Monsieur Veyre, Jean-Louis-Antoine
Dubois ne peut s'empêcher...
Dubois s’interpose. Il fait comprendre à Céline
que ce tutoiement patronal n’est qu’une licence
poétique, que dans la poésie, on se permet de tutoyer
les dieux, les déesses, les princes et princesses. Le
visage de Céline, alors, se détend, elle sourit... d’au
tant plus que Durand lui tend un billet de dix francs,
don gracieux. Céline s’enquiert de ce que...
N° 1491 — 30° Année
3S Centim
(73?
le? Mai 1932
Zcr Jeunesse illustrée
. MIRLITON, MIRLITAINE, par S. PANIA
Dubois, l’artiste peintre, pénètre dans la chambre
de son ami Durand, le poète chansonnier, une espèce
de monomane de la versification facile. Celui-ci
l’accueille par ces vers ? classiques :
Prends un siège, Cinna, prends et sur toute chose
Observe exactement ta loi que je t’impose.
* D’abord, s’écrie Dupont, je ne suis pas Cinna et
puis tu n’as pas à m’imposer de loi. »
...seulement, Je crois que ce sçra difficile dans les
circonstances les plus prosaïques de la vie courante.
Pour parler à ta bonne, pour commander ton déjeuner
(auquel tu m’as du reste convié), etc., etc. Mais,
puisque nous devons passer la journée ensemble
dehors fc’est la lettre du pari), n’hésitons pas à sortir,
habille-toi. » Pour toute réponse, Durand appuie sur
le bouton électrique.
...d’éclater de rire, car Durand avait parié de s’ex
primer en vers et dans son idée, c’était seulement
de façon orale, il le faisait aussi graphiquement, c’était
encore mieux. Mais l'écueil que ledit Dubois espérait
infranchissable, allait se présenter. Il s'agissait de la
séance chez le coiffeur où Durand avait l’habitude
de se faire raser chaque matin.
...Monsieur va mettre pour s’habiller. Durand déclame:
Je mettrai mon veston à taille.
Pantalon clair et, par-dessus.
J’enfilerai mon pardessus.
Comme coiffure ? chapeau de paille !
Un peu étonnée de voir son patron coiffer un
chapeau de paille en plein mois de décembre, Céline
se dit qu’avec les fous et les poètes, il n’y a...
Mais Durand
fauteuil à son ami :
Assieds-toi donc, mon vieux Dubois,
Sur ce fauteuil, peluche et bois,
El permets qu’avant toute chose,
Je m’habille, cela s’impose t
« Ah ! ah 1 s’écria Dubois en s'asseyant, alors, tu
CS décidé à observer le pari que tu m'as proposé hier,...
...pari qui consiste à passer la journée entière en ne
parlant qu’en vers ? # Durand alors, déclame :
Foin du langage terre à terre
Fleurant poireau, pomme de terre ;
Vive le vers I parler des dieux,
Qui me transporte dans les deux t
« Bien 1 bien 1 fait Dubois, nous allons voir si tu
vas tenir le coup toute la journée,...
Les deux amis entrent dans le salon-lavatory.
Durand s'assied. M. Eugène s'empresse auprès de
son client habituel. Alors Durand :
Aimable artiste capillaire,
Veuillez, je vous prie, sans phraser,
Vous occuper de me raser...
...de me raser, de me raser... Euh I c’est la rime à
capillaire qui est rétive...
Durand est assez embarrassé. Voyons la rime ù
capillaire... dromadaire ?... non ! lampadaire ? non.
Mais Eugène qui a l’habitude des fantaisies poétiques
de son client et qui, lui aussi, se pique de rimailler,
a trouvé. Il déclame, à son tour : « Allez donc vous faire
lan-laire / » « Réflexion vraiment trop vulgaire ! » observe
Durand qui renonce à sa barbe et sort avec dignité
suivi de Dubois. Les deux amis... (Voir la suit* p. a.)
La fidèle d$ine paraît, souhaite le bonjour et
demande comment Monsieur a dormi. Alors, Durand :
Salut, modèle des servantes.
J’ai bien dormi, cela t’enchante ?
Mais finissons de babiller
Car il s’agit de s’habiller.
Mais la figure de Céline s'empourpre de colère,
t Monsieur m’a tutoyée, je crois ? » s’indigne-t-elle.
...pas à raisonner. Elle apporte donc les objets deman
dés. Durand fait sa toilette et s’habille tout en récitant
à son ami Dubois (que cela n’amuse que médiocre
ment) des tirades de tragédies, légèrement périmées.
Enfin le voilà prêt, les deux amis sortent dans la
rue. « Je te rappelle, fait Dubois à Durand, que tu as
une lettre recommandée à envoyer à M. Veyre, ton
tailleur ! »
Durand se rend à la poste, accompagné de son ami,
il prend dans sa poche une lettre qu’il a préparée pour
son tailleur et inscrit sur l’enveloppe... en vers :
Ami facteur, d’un pied léger,
Rends-toi, 107, rue de la Douane,
Pour remettre ce pli chargé,
A Monsieur Veyre, Jean-Louis-Antoine
Dubois ne peut s'empêcher...
Dubois s’interpose. Il fait comprendre à Céline
que ce tutoiement patronal n’est qu’une licence
poétique, que dans la poésie, on se permet de tutoyer
les dieux, les déesses, les princes et princesses. Le
visage de Céline, alors, se détend, elle sourit... d’au
tant plus que Durand lui tend un billet de dix francs,
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