Presse et revues
8 pages
Titre : La Jeunesse illustrée
Éditeur : A. Fayard (Paris)
Date d'édition : 1931-10-25
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327962868
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 25 octobre 1931 25 octobre 1931
Description : 1931/10/25 (N1464). 1931/10/25 (N1464).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k963311r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-55902
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 03/06/2013
Ro 1464 — 29* Armé©
35 Centimes
25 Octobre 1931
Zût Jeunesse illustrée
PAR
Devenu boiteux à la suite d'un accident, dès sa
plus tendre enfance, Sidoine avait eu beaucoup à
souffrir des railleries et des vexations de ses petits
camarades sans pitié. A l’école, on l’avait surnommé
« Banban ». Comme il était d’humeur batailleuse, fl
n’avait pas accepté sans protestations ces petites
avanies, et plusieurs fois, le maître avait dû s’inter
poser entre lui et ses persécuteurs.
li en avait conservé une certaine aigreur de carac
tère, qui l’avait rendu très chatouilleux. Au collège,
il voyait des allusions à son infirmité, même dans les
propos où il n’y en avait aucune; de sorte que ceux de
scs condisciples qui avaient tout d’abord de la sym
pathie pour lui finirent par s’en éloigner. 11 n’en
fallait pas plus pour que Sidoine devînt complète
ment misanthrope. Scs études finies, il se vit...
—un homme qui n'aurait pas fait son service militaire.
Sidoine fut piqué au vif par cette réponse. Et comme
la guerre venait d’éclater, il obtint de s'engager dans
l'aviation, où sa claudication ne pouvait le gêner que
fort peu. .11 prit part ù maints combats aériens et
gagna même la médaille militaire. Mais, lorsque la
guerre fut finie, la jeune fille à laquelle il avait pensé
venait justement de se marier.
Sidoine fut profondément attristé. Convaincu qu’elle
s’était, hâtée d’en épouser un autre pour éviter une
explication pénible, il devint plus bourru que jamais
et ne fréquenta plus que son notaire, maître Bombi-
gnard. 11 lui confia qu’il ne tenait nullement à laisser
plus tard sa fortune ù des petits-cousins et des petits-
neveux qui, sans doute, ne sc faisaient pas faute de
plaisanter son infirmité.
Les boiteux devaient passer un an dans son château,
sous la surveillance d'un docteur désigné par le notaire,
1° afin de pouvoir démasquer toute supercherie;
2° pour permettre d'éliminer ceux dont la conduite
ou la moralité auraient laissé à désirer. Le douzième
mois accompli, le notaire ferait lui-même une répar
tition égale. Sidoine avait un valet de chambre, nommé
Finot» lequel aimait beaucoup la musique et se
délectait à écouter les disques...
...enregistrés de la fabrication de son maître. Peu
discret de sa nature, il allait les chercher jusque dans
la discothèque de Sidoine, en l’absence du patron;
ce qui fait qu’il entendit le disque testamentaire,
avant que celui-ci fût entre les mains du notaire. 11
en conclut tout naturellement que s’il était lui-même
boiteux, il serait porté au rang des héritiers, étant
né dans la même ville que son maître. 11 simula un
accident....
Plusieurs passagers disparurent, enlevés par un coup de mer. La T. S. F. en premier lieu, le télégraphe
ensuite, vinrent apprendre au notaire que Sidoine était porté parmi les manquants. On laissa passer les délais
légaux avant de dresser l’acte de décès et d’ouvrir le testament à la lecture duquel tous les boiteux de la ville
furent individuellement convoqués, sans oublier Finot. Le phonographe expliqua ensuite aux Intéressés ce qu'on
attendait d'eux. A chacun, une chambre fut réservée dans le château de Sidoine, et les repas étaient pris en
commun. Ces boiteux appartenaient à toutes les classes de la société; il y avait là un professeur nu lycée, un camelot,
un laitier, un acteur comique et différents autres invidudus. Parmi ecux-ci, Finot flaira au moins deux...
VAL
...à la tête d’une fabrique de disques de phonographe.
C’était la fortune assurée; il eût pu prétendre aux plus
beaux partis, mais il s’imaginait que les jeunes filles
qu’on lui présentait n’en voulaient qu’à son argent
et méprisaient son infirmité. L'une d’elles, cependant,
qui était sans fortune, lui parut complètement désin
téressée; mais lorsqu’il la fit pressentir par un ami
commun, elle répondit qu’elle n’épouserait jamais...
« Je veux, dit-il, que mes biens reviennent au*
boiteux nés dans ma ville natale et qu’ils soient par
tagés également entre eux. » Il rédigea un testament
dans ce sens et confia de plus ses dernières volontés à
un disque phonographique, qu’il pria le notaire
de faire dérouler devant ses héritiers après la lecture
de son testament. Sur ce disque, il expliquait la manière
dont il entendait que fût distribué le legs.
...la chute du haut d’une échelle, à la suite de laquelle
SI se fit passer pour boiteux authentique, et reçut
même une forte indemnité de la compagnie des assu
rances des accidents du travail. A quelque temps de là,
Sidoine partit pour un grand voyage d’affaires ; il
voulait placer ses disques jusqu^ux antipodes et
comptait être absent pendant près d’une année.
Le navire qui le transportait des États-Unis en Aus
tralie échoua sur des récifs avant d’arriver à Melbourne.
...ou trois simulateurs, même après la visite du méde
cin, qui en avait déjà éliminé deux du premier coup.
L’ancien valet de chambre imagina un moyen de les
démasquer : il acheta un certain nombre de feux de
Bengale, qu’il disposa un beau soir aux quatre angles
de la vaste demeure. Il fit aussi l’acquisition d’un
appareil fumigène. (Voir la suite page 2.)
35 Centimes
25 Octobre 1931
Zût Jeunesse illustrée
PAR
Devenu boiteux à la suite d'un accident, dès sa
plus tendre enfance, Sidoine avait eu beaucoup à
souffrir des railleries et des vexations de ses petits
camarades sans pitié. A l’école, on l’avait surnommé
« Banban ». Comme il était d’humeur batailleuse, fl
n’avait pas accepté sans protestations ces petites
avanies, et plusieurs fois, le maître avait dû s’inter
poser entre lui et ses persécuteurs.
li en avait conservé une certaine aigreur de carac
tère, qui l’avait rendu très chatouilleux. Au collège,
il voyait des allusions à son infirmité, même dans les
propos où il n’y en avait aucune; de sorte que ceux de
scs condisciples qui avaient tout d’abord de la sym
pathie pour lui finirent par s’en éloigner. 11 n’en
fallait pas plus pour que Sidoine devînt complète
ment misanthrope. Scs études finies, il se vit...
—un homme qui n'aurait pas fait son service militaire.
Sidoine fut piqué au vif par cette réponse. Et comme
la guerre venait d’éclater, il obtint de s'engager dans
l'aviation, où sa claudication ne pouvait le gêner que
fort peu. .11 prit part ù maints combats aériens et
gagna même la médaille militaire. Mais, lorsque la
guerre fut finie, la jeune fille à laquelle il avait pensé
venait justement de se marier.
Sidoine fut profondément attristé. Convaincu qu’elle
s’était, hâtée d’en épouser un autre pour éviter une
explication pénible, il devint plus bourru que jamais
et ne fréquenta plus que son notaire, maître Bombi-
gnard. 11 lui confia qu’il ne tenait nullement à laisser
plus tard sa fortune ù des petits-cousins et des petits-
neveux qui, sans doute, ne sc faisaient pas faute de
plaisanter son infirmité.
Les boiteux devaient passer un an dans son château,
sous la surveillance d'un docteur désigné par le notaire,
1° afin de pouvoir démasquer toute supercherie;
2° pour permettre d'éliminer ceux dont la conduite
ou la moralité auraient laissé à désirer. Le douzième
mois accompli, le notaire ferait lui-même une répar
tition égale. Sidoine avait un valet de chambre, nommé
Finot» lequel aimait beaucoup la musique et se
délectait à écouter les disques...
...enregistrés de la fabrication de son maître. Peu
discret de sa nature, il allait les chercher jusque dans
la discothèque de Sidoine, en l’absence du patron;
ce qui fait qu’il entendit le disque testamentaire,
avant que celui-ci fût entre les mains du notaire. 11
en conclut tout naturellement que s’il était lui-même
boiteux, il serait porté au rang des héritiers, étant
né dans la même ville que son maître. 11 simula un
accident....
Plusieurs passagers disparurent, enlevés par un coup de mer. La T. S. F. en premier lieu, le télégraphe
ensuite, vinrent apprendre au notaire que Sidoine était porté parmi les manquants. On laissa passer les délais
légaux avant de dresser l’acte de décès et d’ouvrir le testament à la lecture duquel tous les boiteux de la ville
furent individuellement convoqués, sans oublier Finot. Le phonographe expliqua ensuite aux Intéressés ce qu'on
attendait d'eux. A chacun, une chambre fut réservée dans le château de Sidoine, et les repas étaient pris en
commun. Ces boiteux appartenaient à toutes les classes de la société; il y avait là un professeur nu lycée, un camelot,
un laitier, un acteur comique et différents autres invidudus. Parmi ecux-ci, Finot flaira au moins deux...
VAL
...à la tête d’une fabrique de disques de phonographe.
C’était la fortune assurée; il eût pu prétendre aux plus
beaux partis, mais il s’imaginait que les jeunes filles
qu’on lui présentait n’en voulaient qu’à son argent
et méprisaient son infirmité. L'une d’elles, cependant,
qui était sans fortune, lui parut complètement désin
téressée; mais lorsqu’il la fit pressentir par un ami
commun, elle répondit qu’elle n’épouserait jamais...
« Je veux, dit-il, que mes biens reviennent au*
boiteux nés dans ma ville natale et qu’ils soient par
tagés également entre eux. » Il rédigea un testament
dans ce sens et confia de plus ses dernières volontés à
un disque phonographique, qu’il pria le notaire
de faire dérouler devant ses héritiers après la lecture
de son testament. Sur ce disque, il expliquait la manière
dont il entendait que fût distribué le legs.
...la chute du haut d’une échelle, à la suite de laquelle
SI se fit passer pour boiteux authentique, et reçut
même une forte indemnité de la compagnie des assu
rances des accidents du travail. A quelque temps de là,
Sidoine partit pour un grand voyage d’affaires ; il
voulait placer ses disques jusqu^ux antipodes et
comptait être absent pendant près d’une année.
Le navire qui le transportait des États-Unis en Aus
tralie échoua sur des récifs avant d’arriver à Melbourne.
...ou trois simulateurs, même après la visite du méde
cin, qui en avait déjà éliminé deux du premier coup.
L’ancien valet de chambre imagina un moyen de les
démasquer : il acheta un certain nombre de feux de
Bengale, qu’il disposa un beau soir aux quatre angles
de la vaste demeure. Il fit aussi l’acquisition d’un
appareil fumigène. (Voir la suite page 2.)
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