Titre : La Jeunesse illustrée
Éditeur : A. Fayard (Paris)
Date d'édition : 1927-10-09
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327962868
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 09 octobre 1927 09 octobre 1927
Description : 1927/10/09 (N1253). 1927/10/09 (N1253).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9631025
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-55902
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 03/06/2013
N» 1253 — 25 e Année
35 Centimes
9 Octobre 1927
La Jeunesse illustrée
LE BLESSÉ DU REVERDE, par YMER
C’était du temps de la domination autrichienne en
Lombardie. Vers la frontière piémontoise, dans la région
dépeuplée et montagneuse du Revcrde, habitait le ménage
Capramonte, de pauvres paysans vivant de pâturages
et d’une petite exploitation charbonnière, bien humbles
industries qui leur permettaient de subsister à force
d’épargne et do privations. Le père, Luigi, et la mère,
Carolina, vivaient heureux, néanmoins...
...rien qu’à contempler leur fille, la gracieuse Alietta ;
et c’était bien une joie, en vérité, que de la voir rire et
de l’entendre chanter, non sans s’occuper activement,
tout le jour durant. Un soir de fin d’hiver — et Dieu
sait si les frimas s’attardent sur ces âpres hauteurs —
pendant que les Capramonte sc chauffaient tout en som
nolant on attendant d’aller se coucher, Alietta, plus alerte,
affairée silencieusement sur un ravaudage, tressaillit...
...tout à coup, tandis que le chien dressait vivement les
oreilles. Une détonation avait retenti, lointaine, maiB
nettement perceptible dans le silence nocturne de la vaste
solitude. Alietta écouta, l’aiguille en suspens, et voici
que, plus près, cette fois, un autre coup de feu éclata,
suivi d’un cri étouffé, d’un bruit de pas précipités, puis
ralentis... puis plus rien. « Père, mère ! cria la jeune fille.
N’avez-vous pas entendu î Deux coups de fusil...
...des cris, une fuite, non loin ? — Bah ! tu rêvais !
marmottèrent les parents, brusquement arrachés à leurs
propres songes. — «i, si ! Et voyez Dite, comme il braque
les oreilles vers la porto on grondant. Je vous dis que
quelqu’un se trouve en péril là dehors. — Par ce temps,
h cette heure ! — Il n’en est que plus urgent de le secourir.
Allons, père, venez ! — Allons ! » dit le bonhomme en se
levant pour complaire à sa fille. Et, ouvrant la porte...
Aussitôt, ses yeux effarés se portèrent sur son entou
rage pour se rassurer bien vite à l’air honnête de ses
hôtes n’exprimant que l’intérêt et la commisération les
plus attentifs, fuis, comme s’il cherchait quelqu’un autre
dans la maison : « Suis-je seul ? dit-il. — Oui, signore.
Mais, que vous est-il donc arrivé ? — Oh ! rien : un acci
dent de chasse. Mais, commo je n’ai pas do permis et que
je suis Piémontais, j’ai jeté mon arme de crainte des
carabiniers qui rôdent par là...
...par où s’élança Ardito à grande course, Capramonte
et Alietta suivirent le chien bientôt hors de vue. Soudain
un éclat de voix de la bête les remit sur sa trace, et, con
tournant la maison vers le bois, ils viront Dito en arrêt
devant une forme vague allongée sans mouvement sur
le sol et d’où venaient de sourdes plaintes. Us pressent
le pas, anxieux : un homme est là, étendu sanglant, exha
lant des gémissements inconscients, car...
...il a perdu connaissance. En hâte et grande compassion,
le père et la fille le transportent à la maison où, tandis
que Carolina s’empressait à la recherche de quelque vul
néraire, Alietta débarrassa le blessé de son manteau et de
son sac de voyage. L’inconnu était jeune et paraissait
de condition distinguée d’après sa mise soignée et ses
mains fines autant que ses traits pâlis par la syncope.
Quelques gouttes de cordial le ranimèrent.
...Je vous demanderai même de me cacher tout de suite,
par grâce. Je vous jure que vous n’abritez pas un
malhonnête homme ! Vite, vite ! » Ses paroles s’ani
maient car, au dehors, un bruit de pas se rapprochant
semblait annoncer vers la maiBon une visite imminente
que l’étranger paraissait redouter. Vivement, et sans
même consulter son père, Alietta avait déjà ouvert une
porte au fond de la pièce, et, bien que chancelant, le
blessé courut pour...
...se dissimuler dans le refuge qui lui était implicite
ment offert. Cependant, du dehors, la porte fut heurtée
et l’on cria : « Ouvrez ! # d’un ton impérieux. « Atten
dez ! Mon sac ! » dit avec inquiétude, avant de s’enfer
mer, le jeune voyageur en désignant son bagage, laissé
sur une chaise. Alietta s’élança vers l’objet, mais, à
cet instant, la porte, trop lente à s’ouvrir au gré des
visiteurs impatients, fut poussée d’autorité, livrant pas
sage à deux carabiniers autrichiens.
I^a jeune fille n’eut que le temps de ieter la sacçxhe
souh la table, tandis que la pièco où s’était réfugié le
blessé se refermait sans bruit, restant entre-baillée.
« Brr ! quel temps ! fit un des soldats. 11 fait meilleur se
chauffer que courir sur les malfaiteurs ! Nous avons vu
«le la lumière ici, alors j’ai dit à Weber : Entrons 1 —
Kt vous avez bien fait, Signori. Buvez donc un coup
«!«• cette aexpuirrita, cela vous ravigotera, — C’est pas de
refus, hein, Sforzani ?
— Pour sûr, Weber! » Tout en causant, les deux surve
nants inspectaient gens et locaux d’un regard profes
sionnellement soupçonneux, et le désarroi des Capramonte
leur apparut sans qu’ils eussent l’air d’y faire attention.
Puis, tout à coup : « Où est l’homme qui est entré ici î
demanda Weber en fixant Luigi. — Quel homme ?
balbutia celui-ci, démonté. — Un damné proscrit qui
peut rapporter mille couronnes à qui le fera prendre...
ou la prison, peut-être la mort...
...à qui l’aura caché ! » Les Capramonte tremblèrent, et
Carolina t«>urna instinctivement la tête vers le réduit
où se tenait l’inconnu. Les gendarmes s’étaient attablés
et la botte de Sforzani rencontra sous la table un objet
volumineux. « Qu’est-ceci î fit-il. — C’est le chien ! hasarda
précipitamment Alietta. — Que non, la belle ! il est là
a se chauffer, rétorqua le carabinier en se baissant. Tiens !
mais, c’est un sac, et cossu, ma foi, et bourré de lettres 1
Voyons ça ! (Voir la suite page 2.)
35 Centimes
9 Octobre 1927
La Jeunesse illustrée
LE BLESSÉ DU REVERDE, par YMER
C’était du temps de la domination autrichienne en
Lombardie. Vers la frontière piémontoise, dans la région
dépeuplée et montagneuse du Revcrde, habitait le ménage
Capramonte, de pauvres paysans vivant de pâturages
et d’une petite exploitation charbonnière, bien humbles
industries qui leur permettaient de subsister à force
d’épargne et do privations. Le père, Luigi, et la mère,
Carolina, vivaient heureux, néanmoins...
...rien qu’à contempler leur fille, la gracieuse Alietta ;
et c’était bien une joie, en vérité, que de la voir rire et
de l’entendre chanter, non sans s’occuper activement,
tout le jour durant. Un soir de fin d’hiver — et Dieu
sait si les frimas s’attardent sur ces âpres hauteurs —
pendant que les Capramonte sc chauffaient tout en som
nolant on attendant d’aller se coucher, Alietta, plus alerte,
affairée silencieusement sur un ravaudage, tressaillit...
...tout à coup, tandis que le chien dressait vivement les
oreilles. Une détonation avait retenti, lointaine, maiB
nettement perceptible dans le silence nocturne de la vaste
solitude. Alietta écouta, l’aiguille en suspens, et voici
que, plus près, cette fois, un autre coup de feu éclata,
suivi d’un cri étouffé, d’un bruit de pas précipités, puis
ralentis... puis plus rien. « Père, mère ! cria la jeune fille.
N’avez-vous pas entendu î Deux coups de fusil...
...des cris, une fuite, non loin ? — Bah ! tu rêvais !
marmottèrent les parents, brusquement arrachés à leurs
propres songes. — «i, si ! Et voyez Dite, comme il braque
les oreilles vers la porto on grondant. Je vous dis que
quelqu’un se trouve en péril là dehors. — Par ce temps,
h cette heure ! — Il n’en est que plus urgent de le secourir.
Allons, père, venez ! — Allons ! » dit le bonhomme en se
levant pour complaire à sa fille. Et, ouvrant la porte...
Aussitôt, ses yeux effarés se portèrent sur son entou
rage pour se rassurer bien vite à l’air honnête de ses
hôtes n’exprimant que l’intérêt et la commisération les
plus attentifs, fuis, comme s’il cherchait quelqu’un autre
dans la maison : « Suis-je seul ? dit-il. — Oui, signore.
Mais, que vous est-il donc arrivé ? — Oh ! rien : un acci
dent de chasse. Mais, commo je n’ai pas do permis et que
je suis Piémontais, j’ai jeté mon arme de crainte des
carabiniers qui rôdent par là...
...par où s’élança Ardito à grande course, Capramonte
et Alietta suivirent le chien bientôt hors de vue. Soudain
un éclat de voix de la bête les remit sur sa trace, et, con
tournant la maison vers le bois, ils viront Dito en arrêt
devant une forme vague allongée sans mouvement sur
le sol et d’où venaient de sourdes plaintes. Us pressent
le pas, anxieux : un homme est là, étendu sanglant, exha
lant des gémissements inconscients, car...
...il a perdu connaissance. En hâte et grande compassion,
le père et la fille le transportent à la maison où, tandis
que Carolina s’empressait à la recherche de quelque vul
néraire, Alietta débarrassa le blessé de son manteau et de
son sac de voyage. L’inconnu était jeune et paraissait
de condition distinguée d’après sa mise soignée et ses
mains fines autant que ses traits pâlis par la syncope.
Quelques gouttes de cordial le ranimèrent.
...Je vous demanderai même de me cacher tout de suite,
par grâce. Je vous jure que vous n’abritez pas un
malhonnête homme ! Vite, vite ! » Ses paroles s’ani
maient car, au dehors, un bruit de pas se rapprochant
semblait annoncer vers la maiBon une visite imminente
que l’étranger paraissait redouter. Vivement, et sans
même consulter son père, Alietta avait déjà ouvert une
porte au fond de la pièce, et, bien que chancelant, le
blessé courut pour...
...se dissimuler dans le refuge qui lui était implicite
ment offert. Cependant, du dehors, la porte fut heurtée
et l’on cria : « Ouvrez ! # d’un ton impérieux. « Atten
dez ! Mon sac ! » dit avec inquiétude, avant de s’enfer
mer, le jeune voyageur en désignant son bagage, laissé
sur une chaise. Alietta s’élança vers l’objet, mais, à
cet instant, la porte, trop lente à s’ouvrir au gré des
visiteurs impatients, fut poussée d’autorité, livrant pas
sage à deux carabiniers autrichiens.
I^a jeune fille n’eut que le temps de ieter la sacçxhe
souh la table, tandis que la pièco où s’était réfugié le
blessé se refermait sans bruit, restant entre-baillée.
« Brr ! quel temps ! fit un des soldats. 11 fait meilleur se
chauffer que courir sur les malfaiteurs ! Nous avons vu
«le la lumière ici, alors j’ai dit à Weber : Entrons 1 —
Kt vous avez bien fait, Signori. Buvez donc un coup
«!«• cette aexpuirrita, cela vous ravigotera, — C’est pas de
refus, hein, Sforzani ?
— Pour sûr, Weber! » Tout en causant, les deux surve
nants inspectaient gens et locaux d’un regard profes
sionnellement soupçonneux, et le désarroi des Capramonte
leur apparut sans qu’ils eussent l’air d’y faire attention.
Puis, tout à coup : « Où est l’homme qui est entré ici î
demanda Weber en fixant Luigi. — Quel homme ?
balbutia celui-ci, démonté. — Un damné proscrit qui
peut rapporter mille couronnes à qui le fera prendre...
ou la prison, peut-être la mort...
...à qui l’aura caché ! » Les Capramonte tremblèrent, et
Carolina t«>urna instinctivement la tête vers le réduit
où se tenait l’inconnu. Les gendarmes s’étaient attablés
et la botte de Sforzani rencontra sous la table un objet
volumineux. « Qu’est-ceci î fit-il. — C’est le chien ! hasarda
précipitamment Alietta. — Que non, la belle ! il est là
a se chauffer, rétorqua le carabinier en se baissant. Tiens !
mais, c’est un sac, et cossu, ma foi, et bourré de lettres 1
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