Titre : La Jeunesse illustrée
Éditeur : A. Fayard (Paris)
Date d'édition : 1925-08-16
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327962868
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 16 août 1925 16 août 1925
Description : 1925/08/16 (N1141). 1925/08/16 (N1141).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k962990q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-55902
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
N° 1141. — 23 e Année.
30 Centimes
16 Août 1925.
La Jeunesse illustrée
Le comte do Morgan, qui vivait sous Louis XV,
mourut en laissant un fils complètement ruiné, car il
avait dissipé en fêtes tout ce qu’il possédait. Etant
veuf, il s’ôtait effrayé de laisser seul au monde un
jeune garçon de seize ans; aussi avait-il écrit à son
cousin. Hilaire de Tourtal, qui avait émigré ù la Nou
velle-Orléans, dans l’Amérique du Nord, et y dirigeait
une plantation de coton, de vouloir bien recueillir
son nls.< Le Icousin accepta, et sa lettre arriva peu
après la mort du comte.
Florimont fut conliô au capitaine d’un brick qui
allait appareiller pour l’Amérique. Les marins furent
très bons pour lui pendant le voyage, aussi fut-il
d’autant plus saisi do la froide réception do son
cousin, qui avait en plus une femme peu aimable et
deux fils fort mal élevés. Florimont fut, tout de suite,
mal vu de la famille, pour sa franchise et son bon
cœur. Les nègres esclaves, qui cultivaient le coton,
étaient fort maltraités par ses cousins.
Il y eut des disputes violentes, où Florimont témoi
gna son indignation. Les jeunes vauriens le battirent,
Florimont les rossa à son tour, et le père, furieux, ne
craignit pas d’envoyer le jeune garçon travailler aux
champs avec les noirs. Ce travail était épuisant, et
quand il n’avait pas rapporté le sac de coton régle
mentaire, il se couchait, commo les autres, sans sou
per. Le pauvre garçon, outré de ce traitement, résolut
de s’évader. Il irait n’importe où, mais il partirait!
...des tigos do bambou. Je connais un des marins du
bateau, un noir aussi. Je te confierai à lui, il te portora
à manger. Une fois à l’usine de Louisvüle, tu te
débrouilleras, car tu auras ton couteau pour te frayer
une issue. » Us entendirent à ce moment une excla
mation consternée derriôro eux : c’était un jeune
esclave do l’ftge du jeune Français, qui était particu
lièrement maltraité par les cousins de ce dernier. Il
avait tout entendu et se désespérait do voir partir
Florimont.
...dans leur trou! Enfin, ils arrivèrent et furent
débarqués. Un chariot mena les cent balles du plan
teur h l’usine. On les entassa dans un hangar, et|le
matelot nègre veilla ft ce quo les deux balles confiées
t\ ses soins fussont encore placées sur les autres. Le
soir venait; les ouvriers partirent, et un gardien fit sa
ronde avec une lanterne, puis |s’en alla. 11 ne s’aperçut
f ias que, le verre de sa lanterne étant brisé, le vent fit
aillir une étincelle...
1
J
77
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lx n
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< c; C
« V \
« *
Il lui semblait qu’il serait encore plus molesté
quand les | garnements n’auraient* plus ün tefnoin
réprobateur de leurs cruautés. Ce pauvre garçon s’ap
pelait Elias. Il ne se consola que lorsque le jeune
Français lui eut proposé de s’évader avec lui, dans
une seconde balle de coton. Le nègre inventeur de ce
moyen d’évasion y consentit et prépara en secret les
balles. Le jour de rembarquement, avant l’aube, les
deux fugitifs se placèrent dans leurs nids douillets...
...qui s’attacha à l’une des balles les plus près du sol.
Peu après, une fumée jaunfttre monta, et les deux
jeunes garçons comprirent l’affreux péril. Il était
temps, du reste, de s’esquiver... Ils étaient seuls.
Florimont chercha son couteau... hélas! il avait glissé
de sa poche et s’était perdu dans l’épaisseur du
coton. Quant à Elias, il n’en avait pas. Florimont se
démena comme un beau diable, mais les balles avaient
été bien liées...
« Jo dovrais vous renvoyer au planteur, mais vous
avez, sauvé mon usine par votre présence. Je vous
gardo comme ouvriers si vous voulez, car vous n’avez
pas un cent... Vous logerez pour rien chez mon contre
maître, un honnête quakor appelé Samuel Hammer. »
Les doux jounos gens se mirent au travail avec cou
rage, mais ils no restèrent pas longtemps à Louis-
villo... M. de Tourtal, le cousin de Florimont, apprit
l’incendie. 11 apprit aussi qu’on n’avait pas compté et
vérifié les balles à l’arrivée. (Voir la suite page 2.)
...mais terriblement chauds... Et, peu après, les balles
bion ficelées étaient chargées sur le bateau, car la
plantation était riveraine du lleuvo. Le noir eut soin
de faire mottro les doux balles truquées sur les
autres et prévint son ami le matelot noir. Pondant le
trajet, ce dernior fora un ussez largo trou dans
chacune des ballos; les mains des fugitifs y pouvaient
passer et recevoir du pain et des bouteilles de tafia
mêlé d’eau. Mais à peine pouvaient-ils se retourner...
Ils no pouvaient plus fuir assez vite, mais un vaste
abreuvoir, destiné aux chevaux de l’usine, les sauva:
ils s'y roulèrent et flottèrent, poussant en même
temps dos cris si terribles que le personnel do l’usine
accourut et commença à combattro le fou. Beaucoup
do balles furent brûlées, mais la plus grande partie
fut sauvée. Cependant, le directeur avait fait délier les
ballos des fugitifs, et, après avoir entendu leur his
toire, il leur dit :
par ASY
Un des nègres qu’il avait défendus lui dit: « Tu no
peux pus rester dans le pays, massa, parce quo ton
E aront te reprendra. Mais, écoute: on va onvoyor cent
ailes de coton a un manufacturier do Louisvüle.
C’est assoz loin d’ici. Les ballos seront embarquées
dans un bateau qui romontoru lo Mississipi. Jo peux
préparer une ballo avoc un grand trou au miliou pour
te cacher. Je te ménagerai des trous pour respirer,
mais, comme lo coton so tasserait, jo passerai dedans...
..et il no put que sortir ses bras et ses jambes, ainsi
du reste qu’Elias. Alors, do plus en plus suffoqués
pur la fumée, ils prirent une résolution; ils s’arc-bou
tèrent nu mur du hangar nveo leurs plods pour se
lancer do haut en bas do la pile : leur chute fut douce,
étant donné lo cnpitonnuge do leur prison. Uno fois ù
terre, ils se mirent à ramper comme d’immenses
tortuos, mais derriôro eux lo feu éclatait soudain,
uprôs avoir couvé un moment.
30 Centimes
16 Août 1925.
La Jeunesse illustrée
Le comte do Morgan, qui vivait sous Louis XV,
mourut en laissant un fils complètement ruiné, car il
avait dissipé en fêtes tout ce qu’il possédait. Etant
veuf, il s’ôtait effrayé de laisser seul au monde un
jeune garçon de seize ans; aussi avait-il écrit à son
cousin. Hilaire de Tourtal, qui avait émigré ù la Nou
velle-Orléans, dans l’Amérique du Nord, et y dirigeait
une plantation de coton, de vouloir bien recueillir
son nls.< Le Icousin accepta, et sa lettre arriva peu
après la mort du comte.
Florimont fut conliô au capitaine d’un brick qui
allait appareiller pour l’Amérique. Les marins furent
très bons pour lui pendant le voyage, aussi fut-il
d’autant plus saisi do la froide réception do son
cousin, qui avait en plus une femme peu aimable et
deux fils fort mal élevés. Florimont fut, tout de suite,
mal vu de la famille, pour sa franchise et son bon
cœur. Les nègres esclaves, qui cultivaient le coton,
étaient fort maltraités par ses cousins.
Il y eut des disputes violentes, où Florimont témoi
gna son indignation. Les jeunes vauriens le battirent,
Florimont les rossa à son tour, et le père, furieux, ne
craignit pas d’envoyer le jeune garçon travailler aux
champs avec les noirs. Ce travail était épuisant, et
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mentaire, il se couchait, commo les autres, sans sou
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de s’évader. Il irait n’importe où, mais il partirait!
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à manger. Une fois à l’usine de Louisvüle, tu te
débrouilleras, car tu auras ton couteau pour te frayer
une issue. » Us entendirent à ce moment une excla
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Florimont.
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Florimont chercha son couteau... hélas! il avait glissé
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« Jo dovrais vous renvoyer au planteur, mais vous
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