Titre : La Jeunesse illustrée
Éditeur : A. Fayard (Paris)
Date d'édition : 1920-01-18
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327962868
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 18 janvier 1920 18 janvier 1920
Description : 1920/01/18 (N853). 1920/01/18 (N853).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9628501
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-55902
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/05/2013
N° 853. — 18 9 Année.
Pravlsolrementi aao Centimes
18 Janvier 1920.
La Jeunesse illustrée
L’ÉCUYER iNGE:NDIA.IF*E:, par quesnel
Lorsque mourut François T', nombre de gentils
hommes qui l’avaient suivi, à leurs frais, dans ses
guerres contre Charles-Quint, se trouvèrent à peu
près ruinés. Escomptant la générosité du roi, plus
d’un avait, sans hésiter, engagé ses domaines à des
usuriers, qui avaient profité de la éirconstance pour
faire signer aux emprunteurs dès reconnaissances
comportant des intérêts considérables et l’engage-
’ment de leur abandonner les biens hypothéqués, en
cas de non-remboursement dans un délai fixé. C’est
ainsi que, de retour en son manoir de Picardie..*
... et quûl en aurait peut-être bien pojur deux heures.
Puis il ajouta, avec un aimable sourire : « — Pour
que le temps vous semble moins long, voulez-vous
déjeuner ? » Une telle invitation, et dans un château
encore, ne se refuse jamais. L’homme accepta donc,,
en se confondant en salutations. Un instant après,
le créancier était attablé à l’office, et un valet, stylé
d’avance par l’écuyer, lui servait un repas copieux,
largement arrosé d’un joli vin blanc auquel le gail
lard fit le plus grand honneur. Lorsqu’il fut bien
rassasié, Hubertin, qui n’avait cessé de le couver
d’un regard narquois, lui dit...
... dont la restitution le libérait envers son créancier.
« — C'est fort bien joué ! ne put s’empêcher de dire
M. de Forsac ; mais cela ne me donne pas d’argent,
et je n’ai plus une maille. En attendant'qu’une chance
me vienne, ajouta-t-il en allant prendre dans un
bahut une missive soigneusement cachetée, tu vas
monter à cheval et porter cette lettre à Mlle Léonore
de Créquy, qui vit avec son père à Valonat ; ce n’est
qu’à une douzaine de lieues. Son oncle, le marquis
de Créquy, m’a chargé de cette commission avant
d’expirer, sur le dernier champ de bataille...
... il prêta l’oreille à un conseil que lui donna son
écuyer : d'attendre, pour fa,ire parvenir le testament,
qu’il eût pris de sérieux renseignements sur le
compte de la légataire du marquis. Si celle-ci n’avait
point de fortune, eh bien, il se ferait passer pour un
messager du baron, chargé de demander sa main.
Une fois le mariage accompli, on ferait remettre la
missive d’une façon détournée, et le baron, chef de
la communauté, se trouverait en mesure d’encaisser
l’héritage au nom de sa femme. M. de Forsac finit par
sourire. Bref, Hubertin, partit avec carte blanche...
... le baron de Forsac se demanda comment il
pourrait bien s’arranger pour éviter, de donner à
son créancier le domaine de ses ancêtres. Né sachant
à quel parti s’arrêter, le baron consulta son fidèle
écuyer Hubertin, qui l’avait sui vi depuis dix ans sur
tous les champs de bataille. A cette époque, les
nobles pouvaient se permettre à pieu près tout vis-
à-vis des vilains. De plus, Hubertin était un gaillard
sans scrupules, prêt à tout et que la perspective de
la ruine de son maître ne réjouissait pas le moins
du monde...
...comine une chose toute naturelle : « — Gomme
vous avez bien fait de déjeuner. A présent, vous
n’avez plus besoin d’attendre monseigneur, puisque
le, compte est réglé. — Je ne comprends pas, fit le
créancier, vaguement inquiet. — G est pourtant bien
simple ; mon maître vous devait dix mille écus,
vous, vous lui devez son repas. Vous voilà donc
quittes tous deux. — Dix mille écus pour un déjeuner,
et que vous m’avez offert! s'écria l’usurier en se dres
sant, indigné.— Je ne t’ai rien offert, je t’ai seulement
demandé si tu voulais déjeuner. Tu n’avais qu’à re
fuser. Et puis, l’honneur d’avoir mangé...
... où nous avons combattu côte à côte. — Hum ! dit
Hubertin, en feignant de flairer la mission, cela m’a
tout l’air d’un testament. Au reste, il est aisé de
nous en assurer; il n’y a qu’à l’ouvrir. — Drôle, fit
le baron, pour qui me prends-tu donc? — Pour un
brave et loyal gentilhomme, incapable d’une vilenie,
ricana Hubertin. Mais, moi, je ne suis qu’un roturier,
un homme d’épée brutal et sans principes. » Ceci
dit, il sortit et monta à sa chambre. Là, il chauffa à
la flamme d’une lampe la pointe de sa dague et,
doucement, la glissa sous le cachet de cire...
.c’est-à-dire libre d’agir au mieux des intérêts dé.
son maître, lequel avait, en son écuyer, la plus en
tière confiance, le gaillard lui qyant, en plus d’une
circonstance, donne des preuves de sa vive intelli
gence, Le frère du marquis de Créquy habitait, non
loin d’Amiens, avec sa fille, une modeste maison
entourée de quelques terres dont les revenus étaient
à peine suffisants pçur faire vivre le gentilhomme et
la demoiselle Léonore. L’écuyer, qui avait pris des
renseignements dans les environs, résolut de donner
suite au machiavélique projet...
Ht tajJ' ** PrïWf
m/âMm ^
ïljrmK
MiJmt\
P®mUf ïmm.
wÊSL\A..LmmsL
... puisqu’elle l’atteindrait lui-même forcément. Après
avoir réfléchi quelques instants, l’écuyer pria donc
simplement le baron de vouloir bien le laisser agir
et s’en rapporter entièrement à lui. Le lendemain, il
envoyait un varlet chez l’usurier à qui son maître
devait dix mille écus qu’il ne pouvait payer, pour
l’inviter à se rendre le jour même au manoir, en vue
d’un règlement de comptes. Comme on le pense bien,
le créancier fut enchanté et n’eut garde de manquer
au rendez-vous. Quand il se présenta au manoir,
l’écuyer lui apprit que monseigneur était en affaires...
ssi*
... dans lavaiselle de monseigneur ne vaut-il pas-les
dix mille écus qui t’étaient dus?...Monseigneur ayant,
sur ses terres, droit de haute et basse justice, je ne
sais ce qui me retient de te faire pendre pour ton
insolence ! » Comprenant enfin le piège qui lui avait été
tendu, ITisurier cessa de discuter et ne pensa plus
qu’à sauver sa peau. Tirant donc de sa poche la
reconnaissance naguère signée par le baron, il la
jeta sur la table, gagna la porte et fila vivement,
la rage au cœur, mais impuissant à se venger de
l’écuyer... Ce dernier, pendant que sa victime s’éloi
gnait, s’en allait remettre au baron la reconnaissance...
.« qui scellait le pli. Sous l’action de la chaleur, la
cire s’amollit et, peu à peu, se détacha du parchemin.
L’écuyer ouvrit alors la missive et en lut le contenu.
C’était bien, en effet, un testament, par lequel le mar
quis de Créquy, depuis longtemps brouillé avec son
frère, léguait à la fille de ce dernier toutes ses pro
priétés, valant plus d’un million ! Rouge d’émotion,
Hubertin replia le testament, chauffa le cachet et le
remit en place. Il alla ensuite faire part à son maître
de ce qu’il venait d’apprendre. Tout d’abord le baron
parut vouloir se fâcher, mais, peu à peu..
... de marier Léonore et le lîaron, avant de produire
lè fameux testament. Il faisait nuit lorsque l’écuyer
se présenta chez M. de Créquy. Tout de suite, après
les compliments d’usage et sa présentation, Hubertin
se dit envoyé par son maître, le baron de Forsac,
pour solliciter la main de damoiselle Léonore de
Créquy. Le baron, de même que tous les gentils
hommes qui avaient guerroyé avec François I",
était assez connu, au moins de nom. M. de Créquy
se montra donc très flatté de ce qu’il voulût bien
rechercher son alliance... (Voir la suite page 2.)
Pravlsolrementi aao Centimes
18 Janvier 1920.
La Jeunesse illustrée
L’ÉCUYER iNGE:NDIA.IF*E:, par quesnel
Lorsque mourut François T', nombre de gentils
hommes qui l’avaient suivi, à leurs frais, dans ses
guerres contre Charles-Quint, se trouvèrent à peu
près ruinés. Escomptant la générosité du roi, plus
d’un avait, sans hésiter, engagé ses domaines à des
usuriers, qui avaient profité de la éirconstance pour
faire signer aux emprunteurs dès reconnaissances
comportant des intérêts considérables et l’engage-
’ment de leur abandonner les biens hypothéqués, en
cas de non-remboursement dans un délai fixé. C’est
ainsi que, de retour en son manoir de Picardie..*
... et quûl en aurait peut-être bien pojur deux heures.
Puis il ajouta, avec un aimable sourire : « — Pour
que le temps vous semble moins long, voulez-vous
déjeuner ? » Une telle invitation, et dans un château
encore, ne se refuse jamais. L’homme accepta donc,,
en se confondant en salutations. Un instant après,
le créancier était attablé à l’office, et un valet, stylé
d’avance par l’écuyer, lui servait un repas copieux,
largement arrosé d’un joli vin blanc auquel le gail
lard fit le plus grand honneur. Lorsqu’il fut bien
rassasié, Hubertin, qui n’avait cessé de le couver
d’un regard narquois, lui dit...
... dont la restitution le libérait envers son créancier.
« — C'est fort bien joué ! ne put s’empêcher de dire
M. de Forsac ; mais cela ne me donne pas d’argent,
et je n’ai plus une maille. En attendant'qu’une chance
me vienne, ajouta-t-il en allant prendre dans un
bahut une missive soigneusement cachetée, tu vas
monter à cheval et porter cette lettre à Mlle Léonore
de Créquy, qui vit avec son père à Valonat ; ce n’est
qu’à une douzaine de lieues. Son oncle, le marquis
de Créquy, m’a chargé de cette commission avant
d’expirer, sur le dernier champ de bataille...
... il prêta l’oreille à un conseil que lui donna son
écuyer : d'attendre, pour fa,ire parvenir le testament,
qu’il eût pris de sérieux renseignements sur le
compte de la légataire du marquis. Si celle-ci n’avait
point de fortune, eh bien, il se ferait passer pour un
messager du baron, chargé de demander sa main.
Une fois le mariage accompli, on ferait remettre la
missive d’une façon détournée, et le baron, chef de
la communauté, se trouverait en mesure d’encaisser
l’héritage au nom de sa femme. M. de Forsac finit par
sourire. Bref, Hubertin, partit avec carte blanche...
... le baron de Forsac se demanda comment il
pourrait bien s’arranger pour éviter, de donner à
son créancier le domaine de ses ancêtres. Né sachant
à quel parti s’arrêter, le baron consulta son fidèle
écuyer Hubertin, qui l’avait sui vi depuis dix ans sur
tous les champs de bataille. A cette époque, les
nobles pouvaient se permettre à pieu près tout vis-
à-vis des vilains. De plus, Hubertin était un gaillard
sans scrupules, prêt à tout et que la perspective de
la ruine de son maître ne réjouissait pas le moins
du monde...
...comine une chose toute naturelle : « — Gomme
vous avez bien fait de déjeuner. A présent, vous
n’avez plus besoin d’attendre monseigneur, puisque
le, compte est réglé. — Je ne comprends pas, fit le
créancier, vaguement inquiet. — G est pourtant bien
simple ; mon maître vous devait dix mille écus,
vous, vous lui devez son repas. Vous voilà donc
quittes tous deux. — Dix mille écus pour un déjeuner,
et que vous m’avez offert! s'écria l’usurier en se dres
sant, indigné.— Je ne t’ai rien offert, je t’ai seulement
demandé si tu voulais déjeuner. Tu n’avais qu’à re
fuser. Et puis, l’honneur d’avoir mangé...
... où nous avons combattu côte à côte. — Hum ! dit
Hubertin, en feignant de flairer la mission, cela m’a
tout l’air d’un testament. Au reste, il est aisé de
nous en assurer; il n’y a qu’à l’ouvrir. — Drôle, fit
le baron, pour qui me prends-tu donc? — Pour un
brave et loyal gentilhomme, incapable d’une vilenie,
ricana Hubertin. Mais, moi, je ne suis qu’un roturier,
un homme d’épée brutal et sans principes. » Ceci
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la flamme d’une lampe la pointe de sa dague et,
doucement, la glissa sous le cachet de cire...
.c’est-à-dire libre d’agir au mieux des intérêts dé.
son maître, lequel avait, en son écuyer, la plus en
tière confiance, le gaillard lui qyant, en plus d’une
circonstance, donne des preuves de sa vive intelli
gence, Le frère du marquis de Créquy habitait, non
loin d’Amiens, avec sa fille, une modeste maison
entourée de quelques terres dont les revenus étaient
à peine suffisants pçur faire vivre le gentilhomme et
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et s’en rapporter entièrement à lui. Le lendemain, il
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devait dix mille écus qu’il ne pouvait payer, pour
l’inviter à se rendre le jour même au manoir, en vue
d’un règlement de comptes. Comme on le pense bien,
le créancier fut enchanté et n’eut garde de manquer
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l’écuyer lui apprit que monseigneur était en affaires...
ssi*
... dans lavaiselle de monseigneur ne vaut-il pas-les
dix mille écus qui t’étaient dus?...Monseigneur ayant,
sur ses terres, droit de haute et basse justice, je ne
sais ce qui me retient de te faire pendre pour ton
insolence ! » Comprenant enfin le piège qui lui avait été
tendu, ITisurier cessa de discuter et ne pensa plus
qu’à sauver sa peau. Tirant donc de sa poche la
reconnaissance naguère signée par le baron, il la
jeta sur la table, gagna la porte et fila vivement,
la rage au cœur, mais impuissant à se venger de
l’écuyer... Ce dernier, pendant que sa victime s’éloi
gnait, s’en allait remettre au baron la reconnaissance...
.« qui scellait le pli. Sous l’action de la chaleur, la
cire s’amollit et, peu à peu, se détacha du parchemin.
L’écuyer ouvrit alors la missive et en lut le contenu.
C’était bien, en effet, un testament, par lequel le mar
quis de Créquy, depuis longtemps brouillé avec son
frère, léguait à la fille de ce dernier toutes ses pro
priétés, valant plus d’un million ! Rouge d’émotion,
Hubertin replia le testament, chauffa le cachet et le
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de ce qu’il venait d’apprendre. Tout d’abord le baron
parut vouloir se fâcher, mais, peu à peu..
... de marier Léonore et le lîaron, avant de produire
lè fameux testament. Il faisait nuit lorsque l’écuyer
se présenta chez M. de Créquy. Tout de suite, après
les compliments d’usage et sa présentation, Hubertin
se dit envoyé par son maître, le baron de Forsac,
pour solliciter la main de damoiselle Léonore de
Créquy. Le baron, de même que tous les gentils
hommes qui avaient guerroyé avec François I",
était assez connu, au moins de nom. M. de Créquy
se montra donc très flatté de ce qu’il voulût bien
rechercher son alliance... (Voir la suite page 2.)
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