Titre : Les Belles images
Éditeur : A. Fayard (Paris)
Date d'édition : 1926-07-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327110547
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 11090 Nombre total de vues : 11090
Description : 01 juillet 1926 01 juillet 1926
Description : 1926/07/01 (N1137). 1926/07/01 (N1137).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k961437g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-55958
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/03/2013
Juillet 1926
Pour .Joanto on espérait que son âge l’exempterait de
l’affiéuse tourmente. Mais la guerre durant et le jeune
homme se voyant sur le point d’y partir aussi, faillit
lâchement, et passa eu Espagne, ce qtli fut fait en quel
ques sauts parmi les escarpements non fréquentés des
gendarmes et douaniers. Pendant ce temps l'honnête
Alberritz, combattant, blessé, cité, médaille, se condui
sait en brave. Et lorsque, en divers congés de permission
naire ou convalescent, il venait se refaire à la Na\ arraise,
il trouvait chaque fois Luiza...
...grandie et embellie et même quelque peu émue de sa-
présence. Mais les parents lui semblaient vieillis, honteux,
et le père comme aigri et jaloux de son honorable con
duite. A chaque départ, Luiza et sa mère bourraient la
musette du soldat, puis, après, lui multipliaient les envois
de vivres et gâteries. Du déserteur, aucune nouvelle, mais
la honte dévorait les parents, et la mère, minée, finit par
y succomber. Luiza avait alors dix-huit ans, et forte,
adroite, laborieuse, elle sut la remplacer à la maison com
me aux champs. Cependant ses efforts et...
...ceux du père ne pouvaient suffire aux besoins de la
culture, et Ton aspirait après la paix qui ramènerait, s’il
était épargné et valide, Ramon aux travaux. Ce jour vint,
et le brave Alberritz réintégra la Navarraise, possesseur
d’un bon pécule grossi des économies réalisées eur son
prêt de sergept. Auréolé du prestige de ses galons, de
ses blessures, de sa vaillante conduite, l’impression qu’il
avait déjà produite sur la sensible Luiza s’accrut. Lui-
même sentait naître en son cœur un sentiment qu’il
s’efforçait de combattre, ou tout au moins de cacher.
Mais la jeune fille, devinant néanmoins cette affection
secrète et voyant la trop grande réserve d’Alberrtiz, prit
le parti d’avouer au père l’état de leur cœur, confiante que
J osé ne mettrait point obstacle à leur penchant. Or, le vieux
Navarrez avait fait d’autres rêves pour l’établissement de
sa fille, et âprement attaché à l’argent, ne souhaitait qu’un
gendre riche. Il le signifia sèchement à Luiza et, au risque
défaire péricliter son domaine, congédia durement Ramon.
C’est alors que le pauvre garçon revint au logis délabré
ds ses pères dont il s’accommoda industrieusement.
De ses économies, il acheta douze chèvres, et il vécut
de la vente de leurs fromages et d’un peu de culture dans
son maigre héritage. Bien qu’il déplorât la rigueur du père
Navarrez, il n’osait le désapprouver d’avoir ambitionné
pour une fille aussi riche de biens et de qualités que Luiza,
un parti moins misérable que celui qu’offrait le pauvre hère
qu’il était, et il lui restait profondément reconnaissant
encore d’avoir abrité sa jeunesse. Il se tint à l’écart de la
Navarraise, se gardant d y apporter le trouble ; mais son
cœur y demeurait tout entier. A quelque temps de là...
...qu’il cacha sous le foin de l’étable tandis que les doua
niers et leurs molosses pistaient aux alentours et jusqu’au
seuil de la demeure. Mais l’honnête Alberritz ne pouvait
être soupçonné, et gens et bêtes poussèrent plus loin leur
requête. Joanto sort it alors de son abii et raconta à Ramon
ses lamentables aventures depuis sa honteuse désertion.
En dernier lieu, acoquiné à des contrebandiers, leyr convoi
surpris par des gabelous, il avait dû abandonner son
chargement et... (.Voir la suite pege 2.)
...une nuit, on frappa vivement chez les Navarrez endor
mis. « Qui est là ? demanda José, surpris. — Moi, père.
Ouvre ! — Toi, malheureux ! s’écria le fermier en devi
nant son fils. — Ouvre vite, vite : on me poursuit ! »
G’était bien Joanto qui, adonné à la contrebande et sur
pris dans ce coupable trafic, s’était sauvé, éperdu, vers le
refuge paternel. Le père descend ouvrir, secrètement atten
dri, peut-être, maistremblant de colère. « Je consens àt’abri-
ter un instant, dit-il. Mais, le péril passé, tu partiras, et
que je ne te revoie plus, déshonneur de ma maison ! »
La'porte se referma sur les deux hommes qui, palpi
tant dans l’obscurité, entendirent passer les douaniers
et leurs chiens haletants, qui s’éloignèrent enfin. Le père
alors rouvrit sa porte. « Va-t-en ! dit-il. Je ne saurais me
faire plus longtemps le complice et recéleur d’un déser
teur doublé d’un contrebandier ! — Ma sœur ? -— Tu
ne la verras pas ! — Ma mère ? — Malheureux ! Tu ne
sais donc pas qu’elle est morte ? Morte du chagrin d’avoir
un tel fils! Va-t-en, te dis-je! » Et le vieillard ayant...
DU
Ramon Alberritz vivait au pays banque, haut vers
l’Espagne, en un endroit des Pyrénées dit le Val d’Aran,
non loin du village d’Estabel. Tout son avoir consistait
en un troupeau de chèvres alertes et une vieille masure,
seul héritage paternel, en laquelle il s’était réfugié après
sa douloureuse rupture avec ses voisins et anciens maîtres,
les Navarrez, propriétaires de la ferme dite la Navarraise.
Ceux-là étaient *des gens riches, par exemple, mais le
bonheur n’habitait point leur confortable demeure.
...bien qu’avec moins de désintéressement. Et le brave
Ramon, confondu de reconnaissance et de dévouement
envers les maîtres, ne se rendait même pas compte com
bien José exploitait sa bonne volonté dont profitait sur
tout le fils de la maison, Joanto, solide gars de c|pux
ans plus jeune, qui songeait plus au plaisir qu’au travail.
Au reste, le bon Alberritz était le premier à témoigner
d’une affectueuse faiblesse pour l’enfant chéri de ses
maîtres. Puis vint la guerre qui priva la maison de Ramon,
d’abord, lequel avait alors vingt ans.
...poussé son fils, referma violemment sa porte sur le cou-
pable. Joanto se remit à errer dans la nuit. Et voilà qu’il
entendit marcher non loin. Les douaniers encore ! Il
hâte sa course, arrive en vue d’une pauvre maison et la
reconnaît pour celle, qu’il croit toujours inhabitée, de
Ramon Alberritz. Il veut s’y blottir, mais le loquet résiste
à sa poussée. A ce bruit quelqu’un vient, du dedans, et
ouvre. « Toi ici, Joanto ! — Oui, Ramon, cache-moi vite,
ou je suis perdu ! » En hâte, le chevriei remisa le fuyard...
LE CHEVRIER
VAL D’ARAN, par YMER
*-
Avant la guerre ses habitants se composaient du père,
José, homme probe, rigoureux, mais trop intéresse ; de
la mère, morte depuis ; d’un fils — hélas ! — et d’une fille,
Luiza, guère plus qu’une enfant alors, mais déjà tout
plein gracieuse. Et la famille s’augmentait de Ramon
Alberritz qui, orphelin à quinze ans, avait été recueilli à la
Navarraise grâce surtout à la bonne défunte qui chéris
sait ce garçon. Et son mari, évaluant le parti qu’on pou
vait déjà tirer de celui-ci, travailleur, robuste et honnête
comme pas un, s’y était aussi attaché...
N» 1L37 — 23* Année
30 CENTIMES
1. RD et t”, Editeurs
18 et 20
roB du St-Gothard, PARIS (14 e )
Chèque postal 388-84
30 CENTIMES
ABONNEMENTS:
France : Un an... 15 fr;
— Six mois 8 Ir.
Étranger: Un an. 22 fr.
Chèque postal 388-84
Pour .Joanto on espérait que son âge l’exempterait de
l’affiéuse tourmente. Mais la guerre durant et le jeune
homme se voyant sur le point d’y partir aussi, faillit
lâchement, et passa eu Espagne, ce qtli fut fait en quel
ques sauts parmi les escarpements non fréquentés des
gendarmes et douaniers. Pendant ce temps l'honnête
Alberritz, combattant, blessé, cité, médaille, se condui
sait en brave. Et lorsque, en divers congés de permission
naire ou convalescent, il venait se refaire à la Na\ arraise,
il trouvait chaque fois Luiza...
...grandie et embellie et même quelque peu émue de sa-
présence. Mais les parents lui semblaient vieillis, honteux,
et le père comme aigri et jaloux de son honorable con
duite. A chaque départ, Luiza et sa mère bourraient la
musette du soldat, puis, après, lui multipliaient les envois
de vivres et gâteries. Du déserteur, aucune nouvelle, mais
la honte dévorait les parents, et la mère, minée, finit par
y succomber. Luiza avait alors dix-huit ans, et forte,
adroite, laborieuse, elle sut la remplacer à la maison com
me aux champs. Cependant ses efforts et...
...ceux du père ne pouvaient suffire aux besoins de la
culture, et Ton aspirait après la paix qui ramènerait, s’il
était épargné et valide, Ramon aux travaux. Ce jour vint,
et le brave Alberritz réintégra la Navarraise, possesseur
d’un bon pécule grossi des économies réalisées eur son
prêt de sergept. Auréolé du prestige de ses galons, de
ses blessures, de sa vaillante conduite, l’impression qu’il
avait déjà produite sur la sensible Luiza s’accrut. Lui-
même sentait naître en son cœur un sentiment qu’il
s’efforçait de combattre, ou tout au moins de cacher.
Mais la jeune fille, devinant néanmoins cette affection
secrète et voyant la trop grande réserve d’Alberrtiz, prit
le parti d’avouer au père l’état de leur cœur, confiante que
J osé ne mettrait point obstacle à leur penchant. Or, le vieux
Navarrez avait fait d’autres rêves pour l’établissement de
sa fille, et âprement attaché à l’argent, ne souhaitait qu’un
gendre riche. Il le signifia sèchement à Luiza et, au risque
défaire péricliter son domaine, congédia durement Ramon.
C’est alors que le pauvre garçon revint au logis délabré
ds ses pères dont il s’accommoda industrieusement.
De ses économies, il acheta douze chèvres, et il vécut
de la vente de leurs fromages et d’un peu de culture dans
son maigre héritage. Bien qu’il déplorât la rigueur du père
Navarrez, il n’osait le désapprouver d’avoir ambitionné
pour une fille aussi riche de biens et de qualités que Luiza,
un parti moins misérable que celui qu’offrait le pauvre hère
qu’il était, et il lui restait profondément reconnaissant
encore d’avoir abrité sa jeunesse. Il se tint à l’écart de la
Navarraise, se gardant d y apporter le trouble ; mais son
cœur y demeurait tout entier. A quelque temps de là...
...qu’il cacha sous le foin de l’étable tandis que les doua
niers et leurs molosses pistaient aux alentours et jusqu’au
seuil de la demeure. Mais l’honnête Alberritz ne pouvait
être soupçonné, et gens et bêtes poussèrent plus loin leur
requête. Joanto sort it alors de son abii et raconta à Ramon
ses lamentables aventures depuis sa honteuse désertion.
En dernier lieu, acoquiné à des contrebandiers, leyr convoi
surpris par des gabelous, il avait dû abandonner son
chargement et... (.Voir la suite pege 2.)
...une nuit, on frappa vivement chez les Navarrez endor
mis. « Qui est là ? demanda José, surpris. — Moi, père.
Ouvre ! — Toi, malheureux ! s’écria le fermier en devi
nant son fils. — Ouvre vite, vite : on me poursuit ! »
G’était bien Joanto qui, adonné à la contrebande et sur
pris dans ce coupable trafic, s’était sauvé, éperdu, vers le
refuge paternel. Le père descend ouvrir, secrètement atten
dri, peut-être, maistremblant de colère. « Je consens àt’abri-
ter un instant, dit-il. Mais, le péril passé, tu partiras, et
que je ne te revoie plus, déshonneur de ma maison ! »
La'porte se referma sur les deux hommes qui, palpi
tant dans l’obscurité, entendirent passer les douaniers
et leurs chiens haletants, qui s’éloignèrent enfin. Le père
alors rouvrit sa porte. « Va-t-en ! dit-il. Je ne saurais me
faire plus longtemps le complice et recéleur d’un déser
teur doublé d’un contrebandier ! — Ma sœur ? -— Tu
ne la verras pas ! — Ma mère ? — Malheureux ! Tu ne
sais donc pas qu’elle est morte ? Morte du chagrin d’avoir
un tel fils! Va-t-en, te dis-je! » Et le vieillard ayant...
DU
Ramon Alberritz vivait au pays banque, haut vers
l’Espagne, en un endroit des Pyrénées dit le Val d’Aran,
non loin du village d’Estabel. Tout son avoir consistait
en un troupeau de chèvres alertes et une vieille masure,
seul héritage paternel, en laquelle il s’était réfugié après
sa douloureuse rupture avec ses voisins et anciens maîtres,
les Navarrez, propriétaires de la ferme dite la Navarraise.
Ceux-là étaient *des gens riches, par exemple, mais le
bonheur n’habitait point leur confortable demeure.
...bien qu’avec moins de désintéressement. Et le brave
Ramon, confondu de reconnaissance et de dévouement
envers les maîtres, ne se rendait même pas compte com
bien José exploitait sa bonne volonté dont profitait sur
tout le fils de la maison, Joanto, solide gars de c|pux
ans plus jeune, qui songeait plus au plaisir qu’au travail.
Au reste, le bon Alberritz était le premier à témoigner
d’une affectueuse faiblesse pour l’enfant chéri de ses
maîtres. Puis vint la guerre qui priva la maison de Ramon,
d’abord, lequel avait alors vingt ans.
...poussé son fils, referma violemment sa porte sur le cou-
pable. Joanto se remit à errer dans la nuit. Et voilà qu’il
entendit marcher non loin. Les douaniers encore ! Il
hâte sa course, arrive en vue d’une pauvre maison et la
reconnaît pour celle, qu’il croit toujours inhabitée, de
Ramon Alberritz. Il veut s’y blottir, mais le loquet résiste
à sa poussée. A ce bruit quelqu’un vient, du dedans, et
ouvre. « Toi ici, Joanto ! — Oui, Ramon, cache-moi vite,
ou je suis perdu ! » En hâte, le chevriei remisa le fuyard...
LE CHEVRIER
VAL D’ARAN, par YMER
*-
Avant la guerre ses habitants se composaient du père,
José, homme probe, rigoureux, mais trop intéresse ; de
la mère, morte depuis ; d’un fils — hélas ! — et d’une fille,
Luiza, guère plus qu’une enfant alors, mais déjà tout
plein gracieuse. Et la famille s’augmentait de Ramon
Alberritz qui, orphelin à quinze ans, avait été recueilli à la
Navarraise grâce surtout à la bonne défunte qui chéris
sait ce garçon. Et son mari, évaluant le parti qu’on pou
vait déjà tirer de celui-ci, travailleur, robuste et honnête
comme pas un, s’y était aussi attaché...
N» 1L37 — 23* Année
30 CENTIMES
1. RD et t”, Editeurs
18 et 20
roB du St-Gothard, PARIS (14 e )
Chèque postal 388-84
30 CENTIMES
ABONNEMENTS:
France : Un an... 15 fr;
— Six mois 8 Ir.
Étranger: Un an. 22 fr.
Chèque postal 388-84
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 87.87%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 87.87%.
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/8
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k961437g/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k961437g/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k961437g/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k961437g/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k961437g
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k961437g
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k961437g/f1.image × Aide