Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1921-11-14
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 14 novembre 1921 14 novembre 1921
Description : 1921/11/14 (A15,N3256). 1921/11/14 (A15,N3256).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7646429p
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 25/05/2015
4
COMŒDIA
W- lf*2ir
Critiques
et
Chefs d'Orchestres
Une pianiste très jeune et très blonde (deux
appréciables qllalité-s), Mlle Genovieffa d'Ar-
zens, dont les amateurs de Chopin villégiatu-
nmt sur la Riviéra, viennent d'applaudir la vir-
tuosité préeoee, fait dans la partition de Car-
men des découvertes qu'elle me prie de com-
muniquer aux lecteûrs de Comœdîa.
« figurez-vous, m'écrit-elle, qu'un des plus
délicieux morceaux d'orchestre de ce chet-d'oeu-
vre est un fragment inutilisé de l'AtÎésieftne,:, ii
Je me le figure d'autant mieux qu'autrefois j'at
déjà signalé cet emprunt. Et j'ai noté aussi que
ic célèbre « Quant aux douaniers, c'est notre
rffaire » est un autre laissé pour compte de
: Artésienne destiné à embellir les paroles cham-
Pl/res: (Í Pour récolter le vermillon.. »
Car ces agréables pages sont interchangeables :
h description musicale de la cuisine du Castelet
i devenue un « 0 salutaris » admissible et le
chœur en fa dièze mineur (rythme de boléro)
fut placé dans le recueil des « Vingt mélodies x
du Maître par un éditeur expert en l'art d'ac-
commoder les restes.
J'ai plaisir à vous l'apprendre, mignonne Ge-
novieffa, orgueil d'une « Ruche » où je fus jadis
malmené par des abeilles féministes, et inter-
prète brillante de la Grande Polonaise en la
bémol qui doit être bien fatigante pour vos mc.
nottes puériles.
Aussi bien ces particularités sont connues des
mélomanes avertis. Je ne compte point parmi
eux M. Pierre Médan, professeur au lycée d'Aix
i p,-Provence et critique musical à ses moment
jf'rdus !perdus pour ses lecteurs), qui Berceuse
rravement.dans le Feu, que, dans la Berceuse
ie Bizet, « Si l'enfant repose. » la basse ar-
tege un renversementTtiineu.r (1) sans se douter, le pendre, que (ie do
initial ne faisant plus fonction de dominante
mais devenant second degré de si bémol), elle
rcite deux accords de ce dernier ton: triton,
puis quinte et sixte. On peut être charge de
conférences et ignorer ces données musicuies
t'icmentaires.
Puisse cette petite mise au point dessiller les
veux d'un gaffeur appartenant à la catégorie des
ctumitifs d'aspect grave dont Erik Satie affirma
dans l 'Act;on , jadis, qu'ils sont des types dans le
gave du contrebasson.
De la jeune génération, il ne semble pus
qu'un chef .d'orchestre doive surgir, capable d'é-
galer les grands capellmcis-ter qui ont ttfnt fait
peur la gloire de Bayreuth: Hermann Lèvy,
juif mystique au regard pénétrant qui (Ilvelop-
pait Parsifai d'une ineffable atmosphère de dou-
ceur chrétienne; Félix Molli, infatigable propa-
gateur de la musique' française en Allemagne,
tans pareil dans la conduite de Tristan; enfin
flans Riclitei, le placide et le fort, qui faisait
comprendrc*aux plus obius ie Ring saboté avec
nne parricide inconscience, par le fils de H/agner,
boir siegfriedicule.
Néanmoins, ne regrettons pas trop le temps
m, à Paris, chaque dimanche, opéraient seuls
deux confrères ennemis: Lamdureux, 'irascible
et* autoritaire, ficr de ses. exécutions impecca-
Mes. mais souvent froides, auxquelles les im-
pulsifs habitués du Châtelet préféraient leur
Damnation de Faust où s'ébattait à l'aise le ro-
mantisme de Colonne, tout ensemble ardait et
flou. -
Applaudissons aujourd 'huiolnghelbredlt, exquis
dans la mise en valeur de certaines subtilités
modernistes; Rhené-Bâton, chercheur toujours
insatisfait dont la nervosité intéresse même
lorsqu'elle inquiète; Pierné, précis, poétique et
riilin; le Suisse Ansermet, habile à démèhr les
échevaux harmoniques habilement enchevêtrés
par l'école de Strawinsky; le Belge Georges
hauwereyns donc l'infçiligence lucide guidant un
tempérament fougueux, oblieiii. ile l'orchestre ie
IJLIlximum de rendement;'enfin le prestigieux
i'talien Toscanihi, que je proclamerais le premier
■de tous, si la crainte d'ètrc- haché menu comme
rhair à pâté par les autres « as >> du bjiiôn il ar-
fêtait au bout de ma' plume cette imprudente
iffirmation. -
WILLY.
PROPOS ORPHEONIQUES :
Virtuoses et Sociétés
musicales
Datas un articte fortement documente paru
dans le Courrier musical; notre confrère Louis-
Cœdes Batiaiiie montre combien l'existence des
virtuoses est devecue précaire.
Actuellement, dit-il, un interprète doit avoir
d'autres ressources que. sa profession puisqu'il
n'en peut vivre.
Il en est d'ailleurs ainsi à peu près de toute
les professions libérales, et la modification pro-
fonde, ie bouleversement plutôt d?- ~rr>,
de l'existence a transformé la mentalité de bien
du gens.
M. Battaille démontre que les musiciens qui se
contenteraient de vouloir se faire entendra en
public ne sauraient tirer aucun profit des au-
ditions qu'ils donneraient, et qu'ils en seraient
encore de leur poche,.. Et il énumère les dif-
férents cas qui peuvent se produire..
Il en est un sur lequel je désirerais dire un*
petit mot.
M. Battaille énonce : « Daas les sociétés mu-
sicales, cachet: néant. » -
Ceci n'est pas tout à fait exact, et les sociétés
musicales qui,, pour leurs concerts, font appel
à des artistes professionnels, leur allouent géné-
ralement, indépendamment de leurs frais de aé-
placement, le caahet qu'ils demandent. * -
Il est bien rare qu'une société musicale puis-
se à elle seule fournir tous les éléments d'un
programme, et, soit dans l'intention de ména-
#!,eT les forces de ses exécutants (chanteurs ou
instrumentistes). soit dans le but de procurer-à
ses auditeurs des I( numéros intéressants » une
société obtient presque toujours le concours d.e
quelques vedettes des « Concerts de Paris ».-
11 y a même des morceaux qu'on ne sort que
pour ces occasions-là : l'air de Benvenuto, le
Ésxo d'Hamlet, VArioso de Delibeg, les couplets
dt l'éclat de rire de la Manon Lescaut d'Auber,
l'air d'Hcrculanam, etc.
Si les sociétés musicales étaient encouragées'
d'une façon plus réelle, eUes pourraient aug- -
menter !e nombre des concerts qu'elles oxga-
lMSent, faire plus fréquemment appel aux inter-
prètes solistes, et leur offrir des cachets plus
levés.
Mais à l'heure actuelle, H y a en province
dés sociétés musicales d'amateurs qui cherchent
à faire entendre de grands virtuoses aux habi-
tues de leurs séances.
11 y a quelques "jours à peine, le président
d'une grande société chorale de l'Ouest me ma-
nifestait son intenfion d'organiser deux grands
concerta, l'un en janvier, l'autre en février,
f!tI faisant entendre à chacun de ces deux con-
certs deux solistes instrumentistes (piano .et vio-
lon, piano-et violoncelle), de manière que la
durée de la partie instrumentale de chacun des
deux programmes soit de une heure et demie.
Et naturellement, les artistes qui traiteront
;.vec cette société seront rémunérés comme il
convient. D'ailleurs, comme le propose juste-
ment M. Battaille, si les interprètes se grou-
paient en une association professionnelle, ils
obtiendrai en t bien vite la suppression' de la for-
mule du « gracieux concours ;) des manchettes
-fee' |rognàraëé. ':. ., -'' -:,', '-
Htnu BRoDY.
- 1
LA BELLE AU BOIS DORMANT
¡ --
Lettre ; a Serge de "Diaghilev
Cher ami,
Je suis heureux de fe .voir monter
celte œuvre capitale : La Belle au Bois
Dormant, de notre cher grand
Tchaïkowsky. j'en suis double-
ment heureux. Gela m'est d'a-
bord une joie personnelle, car
cette œuvre me semble être
l'expression la plus authenti-
que de l'époque de notre vie.
russe que nous appelons lie
« période de Petersbourg »,
gravée dans ma mémoire avec
la vision matinale des traîneauy
impériaux d'Alexandre III, l'é-
norme Empereur et son énor-
me cocher, et la joie immense
qui m'attendait le soir: le spec-
tacle de La Belle au Bois Dor-
mant. C'est ensuite ma grande
satisfaction de musicien de voir
présentée une œuvre d'un ca-
ractère si direct, à un moment
où tant de gens qui ns sont ni
simples, ni naïfs ,ni spontanés,
recherchent dans leur art, la
simplicité ,1a « pauvreté » et la
spontanéité. -
1 chaikowsky possédait la
grande puissance mélodique;-
centre de gravitation de chaque
symphonie, opéra ou ballet
qu'il composait. Il m'est abso-
lument indifférent que la quali-
té de sa mélodie soit parfois de
valeur inégale. Le fait est qu'il
fut créateur de mélodie. don
extrêmement rare et précieux.
Chez nous, Glinka le possé-
dait aussi; et pas autant, les
autres.
Et voilà qui n est pas allemand.
Les Allemands fabriquaient de la mu-
sique avec des thèmes et des Ieit-motifs,
les substituant à des mélodies.
La musique de Tchaïkowsky, ne pa-
raissant pas à tout le monde spécifique-
ment russe, est souvent plus profondé-
ment russe que- celle qui, depuis long-
-----------.. ,i.l: ..,
temps a reçu l'étiquette facile du pitto-
resque moscovite. ■ ;111,"";
Cette musique est tout autant ruSse'5
LA BELLE AU BOIS DORMANT ; 'i
5Decsiii inédit do Léon' BAKSTV
LC MEDECIN
que ie vers de Pouchkine, ou le chant
ds Glinka. Ne cultivant pas spéciale-
ment dans son art « l'âme paysanne
russe »,Tchaïkowsky puisait inconsciem-
ment dans les vraies sources pop.'iiaitfes
de notre race.
Et à. quel point ses préférencesBan«:
la musique ancienne et de son -nms
LA BELLE AU BOIS DORMANT M l'.
étaient-elles caractéristiques ! II adorait
Mozart, Couperin. Glinka, Bizet: voilà
'qui ne laisse nu] doute sur l,a qualité de
son goût. Chose étrange, cha-
que fois qu'un musicien russe
s'influençait de cette culture
latino-slave et voyait claire-
ment la - frontière' ènrre l'Au)
trichien catholique Mozart tour-
né vers Beaumarchais, et l'Al-
lemand protestant Beethoven,
incliné vers Gœthe, le résultat
était marquant.
L'exemple convaincant de la
grande puissance créatrice de
Tchaïkowsky est sans aucun
doute le ballet de La Belle au
Bois Dormant. Cet homme
cultivé, connaisseur de vieilles
chansons et de l'ancienne mu-
sique française, quand il s'agit
de présenter le siècle »e Louis
XIV, ne s'occupe aucunement
de recherches archéologiques
et recrée le caractère de l'épo-
que par son propre langage
musical, préférant les anachro-
nismes involontaires et vivants
aux pastiches conscients et tra-
vaillés : qualité propre aux
seuls grands créateurs.
Je viens de relire la parti-
tion de* ce ballet: j'en ai or-
chestré quelques morceaux,
qui étaient restés non instru-
mentés et jamais joués. J'ai
passé quelques journées de
plaisir extrême en y retrou-
vant toujours le même senti-
ment de fraîcheur, d'invention.
d ingéniosité et de puissance. Et je
souhaite vivement que cette œuvre soit
sentie par tes auditeurs de tous
pays, comme elle l'est par moi, musicien
tu s se.
: fikn à t;
Igor StravinsKy.
.1 {I."-:m¡ inédit '.le Léon BAKST). ,.
LA REINE ET UN PAGE
- Concerts Colonne. - Samedi 19 novem-
bre, à 4 h. 45 précises, 6e Concert -.Les Des-
criptifs (Paysages) : Impressions Pastorales. (E.
Fanelli), tableaux symphonique numéros 12 et'
13, 18, 19 et 20. -
Prélude à l'Après-Midi d'un Faune (CI. De-
bussy). -
Paysages Franciscains (Gabriel Pierné) :
-1. Le Gardien de Sainte-Claire (couvent de.
saint Damien) ; 2. Les Olivaies de la plaine
d'Assise (Crépuscule d'Automne); 3. Sur la
route de Poggio-Bastone (La Procession).
Symphonie Pastorale'.(Beethoven) : 1. Impres-
sion agréable à l'aspect de la nature; 2. Scène
au bord du ruisseau ; 3. Réunion joyeuse de
villageois, Orage, Tempête; 4. Chant des Ber-
gers, Hymne de-joie et de reconnaissance après
l'orage.
Sous la direction de M. Gabriel Pierné.
Dimanche 20 novembre, à 2 h. 30 très pré-
cises, 6e Concert :
Freyschutz, ouverture (Weber),
Deuxième Symphonie en ut (R. Schumann) :
1. Introduction et allegro; 2. Scherzo; 3. Ada-
gio; 4. Finale (allegro molto vivace).
Prélude à l'Après-Midi d'un 'Faune (Cl. De-
bussy).
Les Heures Dolentes (Gabriel Dupont :
1. Epigraphe, La Mort rôde; 2. Des Enfants
jouent dans le Jardin; 3. Nuit blanche, Hallu-
cinations.
Fête Polonaise (Le Roi malgré lui-) (Emm.
Chabrier).
Sous la direction de M. Gabriel Pietné.
Champs-Elysées, samedi Î9 et dimanche 20
novembre, à 3 heures, Concerts Pasdeloup :
Benvenuto Cellini (ouverture) (Berlioz) : Con-
certo pour violon (M. - Ch. Dorson) (Beetho-
ven); Symphonie en sol mineur (Lalo) ; Les
Sept Chants de Shéhérazade (première audition)
(Mario Versepuy), Mlle Fanny Heldy; Les
Maîtres Chanteurs (Wagner): a), Prélude du
3e acte; b) Danse des Apprentis; c) Marche
des Corporations.
Chef d'orchestre: Rhené Baten.
Mlle Jean Nolan chantera des vieilles chah-
sons irlandaises, des œuvres françaises, rus-
ses et anglaises, et Mlle Hélène Dolmetscîf
jouera des œuvres'anciennes pour viole de
gambe'et Suite de Bach et Variations sur
Thème Rococo de Tschaikowsky pour violon-
celle, à leur concert, salle Pleyel, mardi soir
15 novembre. 1
Billets de 5 à 12 francs à la salie, chez
Durand, au Bureau International de Concerts.
Micheline Kahn donnera un concert Salie
Erard vendredi soir 18 novembre, avec le con-
cours du Quatuor Poulet. Au programmer
Debussy-Ravel. Billets au Printemps (porte dit
Havre, Salle Erard, au 29 rue Tronchet, -et
chez Durand et de' Valrnalète (Marc. 23-26).
Mme R. Fierro de Antoine et M. A. ftrh"
toine donneront un concert samedi soir 19 dd,
vembre, Salle Erard. Programme et billets :
Salle Erard, au 29 rue Tronchet, chez Dii-
rand et de Valmalète (Marc. 23-26). 1 .;
Henry Moscovitz, le jeune et remarquable
violoniste, que Paris a déjà fêté la saison der-
nière, donnera un récital Salle Caveau, lutjdi]
21 novembre, à 21 heures. Billets: Salle Ou-
rand et chez M. de Valmalète (Marc. 23.26),..
Yves Nat et Gaston Poulet donneront dekix ',
séances de sonates, Salle Erard, les 21 ^èt4
29 novembre, à 21 heures. Billets et abonrtfc^
ments aux deux séances: Salle Durand, au 29
rué Tronchet et chez de Valmalète (Ma'ÍC.;
23-26)..
Mme Alice Daumas, de l'Opéra, qui nous*
revient de Belgique, où elle a été donner quel-
ques représentations, chantera dimanche 20 tien
vembre, aux Concerts Spirituels delà SorbonriSë*1
Les Béatitudes, de César Franck.
Plusieurs critiques ont rappelé, après lai :re-
prise de L'Enlèvement au Sérail, à l'Opéra,
un incident que nous avons raconté ici même
lundi dernier. L'un d'eux a écrit que la répon-
se un peu vive de Mozarr, qui faisait l'objet
de l'anecdote,s'adressait à l'empereur «Louis !}?>*
Vérification faite, c'est bien l'empereur «
seph Il » qui, ayant critiqué la musique.
L'Enlèvement, s'attira une amusante riposte jlë.
Mozart.
CHEZ LES ETUDIANTS
Les Conférences auditions
du Cercle Musical
Universitaire
Le Cercle Musical Universitaire va reprendre
ses conférences-auditions, à la Sorbonne. à
l'amphithéâtre Richelieu. La première soirée
sera présidée par M. Paul Appell, recteur
de l'Université de Paris.
Le programme de cette année, qui fait suite
à celui de l'an passé, comporte l'étude de l'his-
toire de la musique française, de la fin du
XVIIIc siècle à nos jours.
La première conférence aura lieu, le 22 no-
vembre, à 20 h. 30, elle sera faite par M. Lan-
dormy. sur Le Théâtre Musical en France à la
fin du XVIIIe siècle. Gliick et l'Opéra-Comique.
M. Tissot parlera ensuite de la Musique pen-
dant la Révolution. M. Ad. Boschot, de Ber-
lioz (6 décembre). M. Henri Busser, de L'Opé-
ra d'Auber à Meyerbeer (20 décemibre). M. Bel-
laigue, de Gounod (10 janvier. M. F. Kraener-
Raine, De Bizet à Saint-Saëns (24 janvier). M.
H. Lichtenberger, de L'Influence de Wagner en
France (7 février). M. Guignebert1, des Mélodis-
tes modernes (14 février). M. Vincent d'Indy,.
de César Franck (21 février). M. P. Landormy,
de Claude Debussy (14 mars). M. Roland Ma-
nuel. de Gabriel Fauré, Maurice Ravel, Florent
Schmitt et Albert Roussel (21 mars). M. A.
Pirro, des Musiciens * étrangers en France au
XIXe siècle (28 mars). M. H. Prunières, du
Mouvement musical contemporain (4 avril).
Félicitons le Cercle Musical Universitaire de
cette intéressante initiative et souhaitons que ses
conférences-auditions retrouvent, cette année,
le succès qu'elles eurent l'an passé.
A. R.
A Bordeaux, on a repris La Veuve Joyeuse.
Dans la crainte que ce premier contact avec
Jei public français ne fût l'occasion d'incidents,
de nombreux agents de la Sûreté avaient été
placés dans la salle, tout prêts à intervenir. Il
n'y eut ni sifflets ni protestations. La soirée
s'acheva dans un succès éclatant.
Les recettes de cette première série de repré-
çeàitations s'annoncent triomphales. On cite des
chiffres énormes. Et directeurs de province de
s'agiter et de se disputer pour s'assurer à
leur tour à bref délai l'exploitation de cette
njine dcg
\Les Grands
Concerts
Deux importantes séances sy m phoniq ues se
sont intercalées cette semaine en marge des
grands concerts du dimanche.
L'appétence des mélomanes eût eu de quoi
, être assouvie avec les mets classiques, accom-
modes à la roumaine de main de maître-chef par
M. Georgesco, et les friandises slaves que M.
Serge Koussevitzky excelle à présenter. Mais
une coïncidence déplorable, et dont on devrait
bien éviter le retour, a voulu que.-l'un et l'au-
tre festins fussent servis jeudi à la .même heijr
re. C'était mettre chacun,.,d£,, .nous dans ..la fà,-
cheuse obligation d'opter. Lès intéressés n'en
souffrirent point, il est vrai : la salle his-
torique du Conservatoire craqua d'un enthou-
siasme égal à celui qui emplit !e vaisseau de
l'Opéra. Car — contrairement à la coupable
indifférence témoignée aux artistes de France,
lors de leur passage en pays étranger, par ie
consulat et le cercle français de l'endroit —
la colonie russe et la roumaine étaient venues
fêter leur représentant respectif.
Il vous sera parlé ailleurs du mérite de M.
Georgesco. Cet artiste supérieur entraîne et
maintient à un rare degré de perfection le fa-
meux orchestre de. Bucarest. la FiIarmonica,
que l'un des nôtres, M. Henri Morin, a été ap-
pelé à diriger pendant l'absence de son chef.
Tandis que M. Georgesco triomphe ici, là-bas
M. Henri Morin remporte une suite de succès
magnifiques et tels qu'ils contrebalancent avec
éclat la propagande tentaculaire des plus réputés
kappelmeisters allemands.
M. Koussevitzky devient pour plus longtemps
notre hôte. Son programme inaugural ouvre le
cycle de six concerts. qui vont se dérouler heb-
domadairement jusqu'à la fin de l'automne. Ain-
si la symphonie voisinera encore avec le dra-
me dans l'hospitalière Académie Nationale.
Pareil à ce qu'il était apparu, la saison der-
nière, enthousiaste, exubérant -et persuasif,
nous revient aujourd'hui M. Koussevitzky. C'est
un prestigieux virtuose dde l'orchestre : il en
joue comme d'un instrument docile. Les vibra-
tions des chanterelles et des anches traduisent
ses moindres suggestions, épousent ses impul-
sions les plus dissemblables. Sa mimique, fas-
cinatrice et magnétique, déclanche le mouve-
ment, gradue l'amplitude des ondes, prolonge
ou brise leur résonance. Le visage est chez
lui aussi expressif que les mains : sés yeux
ordonnent, .ses lèvres murmurent la note, ses
bras s'agitent au gré des nuances les plus sub-
tiles. Côte extérieur que.; pour ma part, je juge
théâtral et excessif, .mais qui sait obtenir de la
trompe l'effet intensément recherché.
Dans les œuvres russes surtout, M. Kousse-
vitzky atteignit à une interprétation remarqua-
ble. L'ouverture d'Obéron, de Weber, et ia
Symphonie en ut mineur, de Beethoven, lui
permirent également de briller à l'aise. Par con-
tre. les deux Nocturnes, de Debussy, baignés
de langueur orientale, n'exaltèrent que faible-
ment leur nervosité frémissante. Question de
race. sans doute, puisque la voix de Mme Véra
Janacopulos distilla mollement la. capiteuse sen-
teur de Shélzérazade, de M. RaveiI. - -.
! Mais l'ouverture de Klwvantchina, de Mous-
sorgsky, La Bataille de Kèrjenietz et le scherzo
extrait de l'opéra Le Conte du Tzar Saltan, de
Rimskv-Korsakow, dégagèrent tour à tour la
poésie et le pittoresque enclos, et flamboyèrent
de tout le coloris délicat, tumultueux, étince-
lant, qui leur est propre. Les montagnards de
mon pays emploient une savoureuse onomatopée
pour qualifier le bruissement ailé de la mouche
à miel : l'abeille brounzine, disent-ils. De mê-
me. « brounzine » la voltigeante orchestration
par quoi Rimsky a décrit Le Vol du Bourdon.
Les traits de violon et de flûte fusent, bourdon-
nent. zigzaguent, semblables au' léger ronfle-
ment de vivaces élytres enivrés d'azur. L'audi-
toire charmé réclama aussitôt une audition sup-
plémentaire, que M. Koussevitzky accorda après
avoir consulté du regard son valeureux flûtiste
— lequel ne parut nullement essoufflé par cette
brève mais foudroyante envolée dans l'éther.
Nous n'en avons point fini avec les insectes.
Salle Gaveau, M. Camille Chevillard présida
aux essais d'un scarabée géant, dont les « mem-
brures d'acier et le halètement puissant et en-
flammé n ressortit plutôt à l'imagination d'un
Wells qu'à l'entomologie d'un Fabre. Le mons-
trueux appareil n'a certainement point trouvé
place au salon de l'aéronautique. Son construc-
teur, M. Jules Mangue, n'a pourtant rien négli-
gé pour le rendre plaisant d'aspect. Mais le mo-
teur a parfois des ratés qui impressionnent dé-
favorablement. Non loin de la plaine où le sca-
irabée tangue et s'épuise en efforts, plane un
vol de corbeaux croassant au-dessus d'une fon-
taine — la même source sûrement qui réflé-
chit naguère le mystère apeuré de Mélisande.
Ces Deux Episodes Légendaires, de M. Mangue,
sont gentiment impersonnels.
Au Châtelet, les fleurs elles-mêmes entrent
dans. la conjuration. M. Fumet, qui surprit. la
dispute lunaire et assista àw tournoi odorant,
proclame le lys vainqueur de la rose. En chro-
niqueur consciencieux il a soigneusement relaté
et commenté les diverses phases du Concilia-
bule. Et voici encore de la musique honnête,
sans plus. :
Différents spécialistes ayant participé aux
matinées, attendent maintenant que nous les
citions à l'ordre du jour. -
Mlle Henriette Renié arpégea sur les cordes
chromatiques le Co'ncerstuck,. pour harpe, de
M. Gabriel Pierné, et Deux Danses, die Debus-
sy. Séance du samedi entièrement consacrée à
la danse, qui emporta l'orchestre des Concerts-
Colonne dans une frénésie giratoire, rythmée
par les trois temps de la Fête Polonaise, de
Chabrier, : et de La Valse, de M. Ravel, par les
lamentations - funèbres de la Sarabande, de M.
Roger-Ducasse, et les .révélrences nobles de la
Pavane, de M. Gabriel Fauré.
Mme Suzanne Balguerie fut, aux Concerts
Lamoureux, l'interprète applaudie de Kaddisch
et d'un fragment de Rédemption, de Franck.
Cependant, l'air de l'archange réclame plus
d'ampleur vocale. Il est dommage que la voix
de Mme Balguerie ne réponde pas complète-
ment à la flamme qui l'anime.
Entre la Symphonie, de Chausson et Siegfried-
ldyll, de Wagner, M. Rhené- 'Bâton, donna la
parole au violoncelle. M. Dambois, accompa-
gné par l'orchestre des Concerts-Pasdeloup,
exécuta dans un style souple et une sûre tech-
nique le Concerto en la mineur, de l'auteur
d'Ascunio. ,', ,
Pour finir, si la Société des Concerts que
M. Philippe Gaubert dirige -r- tint les promes-
ses de son affiche, Mmes Ismardon et Lapeyret-
te, MM. Franz, Delmas', Rambaud, chanteurs
pissés maîtres, chantèrent Les Maîtres Chan-
teurs. -
JEAN POUEIGH.
On répète
À l'Opéra-Comique, les études de Pénélope
sont commencées. La reprise- duchef-dloeuvre de
Gabriel Fauré aurait lieu aussitôt après la créa-
tion du drame lyrique de M. Georges Hue, A
l'ombre de la Cathédrale. M. Louis Hasselmans,
qui, de même qu'au Théâtre des Champs-Ely-
sées ec à l'Opéra-Comique, lors de la première
reprise, dirigera l'orchestre, comptQ, sur une
belle interprétation, en tête de laquelle on trou-
vera, paraît-il, Mlle Mathieu et M. , Lapelle-
trie. ,
A la Gaîté-Lyrique, on mettra prochainement
sur le chantier l'opérette d'Albert Carré et
Claude Terrasse, Frétillone:
La Musique
.", chez soi
- xcv.
Un flot de musiques nouvelles nous est appo* >
té- par la première livraison de la Musique Ut:
Chambre (i). MM; Vuillermoz et Georges Ml-'
got ont dit comme moi l'intérêt de cette tentative
éditoriale que le patronage de M. Paul Lêcil!
représentant le ministre des Beaux-Arts, consa-
cre comme le premier effort national pour lif
propagation de notre musique. , 1
Les différentes séries : piano, chahut piano*
violon et piano, violortçelle et piano, ^musique-'
d'ensemble, contiennent beaucoup de musique
moderne et un peu de musique ancienne dont
l'édition est confiée à nos maîtres musicogra-
plies.
Dans la première série, pour piano, nous
avons la primeur de 12 petites pièces de Char-
les Koechlin où se réalise (sous des titres sé-
duisants), le miracle d'une musiaue pure donc
la rythmique et les rapports de tonalités sont une
nouveauté perpétuelle. Avec un profond savoir,;
M. Koechlin demeure simple, accessible, et, ce-
pendant peut à bon droit être considéré comme
un précurseur d'un art linéaire émancipé de
toute formule.
Les Scènes d'enfants de Frédéric Mompou, !e
« Debussy espagnol » constituent, dans leur
unifonalité populaire, l'apport le plus .spontané;
frais et vigoureux, de l'âme ibérique à la mu-
sique moderne internationale. La rythmique d'un
jeu hardi et svelte domine ces courtes pièces af-
franchies de la mesure et vivantes comme des ta-
bleaux catalans.
D'Opo-1; Ygouw, des Tableaux du CmMse du-
ne puissance évocatrice rarement atteinte. "Ir.
d'autres musiciens russes du piano. Da eavou-
reux frottements harmoniques, une bitonalité la-
tente, confèrent à ces tableaux le pittoresque
voulu, mais l'âme russe se révèle dans la char-
pente du .développement mélodique.
D'aimables et spirituelles pièces de Paul Ba-
zelaire : Portraits d'élèves ou plutôt peinture (<'"
leurs caractères tranchés, complètent avec de
délicieuses « enfantines J) de Jean Déré, de* :
pièces humoristiques de MM. Lévy et un air'
ce ballet de Fourdrain, la série « piano », Ph. E.
Bach, Le Bègue, Couperin et de la Guerre en
sont les auteurs « anciens ».
La série « chant et piano » contient un beau
poème de Max d'Ollone sur la Solitude de Sain-
te Beuve. Jean Déré nous offre quatre chants
arabes extraits du Jardin des Caresses de Franz
Toussaint et qui. mêlent sans pittoresque factice.
la grâce et la vigueur. Nul doute que le farou-
che Chant dçs Guerriers ne devienne rapide-
ment célèbre.
D'onduleuses mélodies de Grandjany sont su,- i
vies de quatre lieder de Jacques Pillois, d'une)
profonde originalité et d'une forme rare. Le senf ,
timent schumannien de Mon feu, l'accent poi-
gnant de tous ces .pauvres enfants contrastent
avec le doux récit de Quatrain et la grâce. de pa-
vane du Rondel Brisé. Le Calme des Jarditns :
d'A. Sauvrezis et la Nuit blanche de Marc Del-
mas sont simplement poétiques, tandis Quelles
fables de Mario .Versepuy et de Marcel Trjé'mois
s'efforcent à rendre musicaux des textes sur-
tout plastiques, et y réussissent. De charmantes ;
ariettes de Dalayrac et Philidor jettent leur note
archaïque dans ce concert ultra-moderne-
Les séries instrumentales sont dignes des pH-
cédentes. La sonate de Le Guillard pour violon
et piano, merveilleusement écrite pour, ces ins- j
truments apparaît d'une solide architecture et !
d'une musicalilté évidente. Mais je lui préfère'
l'étonnante sonate pour violon et piano d'Honeg-
ger, qui lui fait suite. Ici je ne puis qu'admirer
l'aisance inégalable d'un contrepoint si musicale- *^,
ment fleuri, la nerveuse rythmique de Vallegro,
l'austérité puissante de l'adagio, l'audace des
rapports des « décors linéaires », enfin la nou-
veauté de cette forme que déterminent les né-
cessités d'une eurythmie que l'auteur veut per-
sonnelle, et qu'il observe avec une énergique!
maîtrise. Deux concerti de Vivaldi et de Gemi-
niani reposeront les musciens de cette montée
sublime vers les régions honeggériennes.
, Une sonate pour violoncelle et piano de Mau-
rice Emmanuel, datée de 1890, fait regretter flue
l'auteur ait tant sacrifié par la suite à la musi-
cologie, car des dons de musicien s'y révèlent
qui n'ont eu que trop peu souvent l'occasion
de se manifester. L'œuvre est classique, bien
sonnante, de proportions moyennes, avec UR 1
larghetto expressif et .une vigoureuse Gigue
en guise d'allegro..
La même série contient une sonate, égale-
ment pour violoncelle, d'Alexandre Cellier, qui
séduira tous les virtuoses. Le duo agité du pia-
no et du cello dans le premier temps, l'oppo-
sition mélodique et rythmique du second, le
dialogue passionné du Nocturne, enfin la fou-
gue, l'enthousiasme, l'épanouissement sonore
du dernier temps, assurent à l'ouvrage une pla-
ce de choix parmi ceux — si rares — que les
compositeurs ont daigné offrir à la littérature
moderne du violoncelle. Et certes, le chroma-
tisme, la carrure mélodique, la construction
classique, ne sauraient faire de la sonate d'A.
Cellièr une œuvre d'avant-garde. Cela n'est jj
pas nécessaire. Il suffit qu'une œuvre soit sin- |
cère, personnelle _étoffée.' Or la sonate d'A. 1
Cellier présenté ces trois caractèms, qui it
rendront chère à tous ses lecteurs. La série ]'
est complétée par une magnifique sonate an-
cienne de San Martino,
Enfin, la cinquième et dernière série, M plus
importante, nous apporte des œuvres signifi-
catives: le premier quatuor à cordes de Koecli-
jin, le deuxième quatuor à cordes de Jean
Huré, les 5 Mouvements d'eau de Migot, le
Poème de Francis Bousquet et le trio du Cata-
lan Roberto Gerhard. En musique ancienne :
des quatuors de Dalayrac et un trio de Bail-
lot.
je reviendrai à loisir, dans une prochaine
étude, sur le quatuor de Huré. D'autre part,
j'ai dit dans un récent numéro du Guide du
Concert la valeur, dans le groupe des Quatre
espagnols de Roberto. Gerhard, dont le pré-
sent trio n'est pas sans rappeler le rythme de
celui de Maurice Rave!. Le Poème de Bous-
quet s'apparente à celui de Gabriel Dupont,
avec toutefois moins de puissance et de poé-
sie. Mais on peut tout attendre de ce jeune et
charmant prix de Rome. Le quatuor de Koech-
lin, vraie merveille de construction, de sono-
rités neuves, oppose à ses trois premiers temps
respectivement simple, rythmique et mystérieu-
sement chantant, la progression vigoureuse et
exultante de son final allegro con moto, vrai-
ment imprévu. Quant aux 5 Mouvements d'can
de Georges Migot, si difffférents de tout ce que
l'on écrit aujourd'hui, ils confirment le sys-
tème d' « écriture plura-linéaire-rythmique )
cher à l'auteur, et peuvent, quant à la forme.,
être synthétisés par les lignes indicatrices que,
nous devons au musicien lui-même: calme ou
légère, lente ou triste, l'onde, qui fuit sans ces-
se, égare mes pensées, lesquelles constituent,
ainsi qu'on voit, un véritable programme cons-
tructif. , ',",'
L'esemble ae toutes ces œuvres piaistiques,
vocales et instrumentales est un réconfort pour,
ceux que désespérait jusqu'ici cette sorte de
.torpeur où végétait (du fait d'une édition in-
suffisante) notre art français pourtant si admi-
ré. Que les promoteurs de la Musique de cham-
bré qui assurent ainsi l'avenir de tant d'oeuvres
marquantes de la jeune école soient publique-
ment remerciés., —
HENRI, COLLET,
(1) M. Sénart, éditeur. Paris.
COMŒDIA
W- lf*2ir
Critiques
et
Chefs d'Orchestres
Une pianiste très jeune et très blonde (deux
appréciables qllalité-s), Mlle Genovieffa d'Ar-
zens, dont les amateurs de Chopin villégiatu-
nmt sur la Riviéra, viennent d'applaudir la vir-
tuosité préeoee, fait dans la partition de Car-
men des découvertes qu'elle me prie de com-
muniquer aux lecteûrs de Comœdîa.
« figurez-vous, m'écrit-elle, qu'un des plus
délicieux morceaux d'orchestre de ce chet-d'oeu-
vre est un fragment inutilisé de l'AtÎésieftne,:, ii
Je me le figure d'autant mieux qu'autrefois j'at
déjà signalé cet emprunt. Et j'ai noté aussi que
ic célèbre « Quant aux douaniers, c'est notre
rffaire » est un autre laissé pour compte de
: Artésienne destiné à embellir les paroles cham-
Pl/res: (Í Pour récolter le vermillon.. »
Car ces agréables pages sont interchangeables :
h description musicale de la cuisine du Castelet
i devenue un « 0 salutaris » admissible et le
chœur en fa dièze mineur (rythme de boléro)
fut placé dans le recueil des « Vingt mélodies x
du Maître par un éditeur expert en l'art d'ac-
commoder les restes.
J'ai plaisir à vous l'apprendre, mignonne Ge-
novieffa, orgueil d'une « Ruche » où je fus jadis
malmené par des abeilles féministes, et inter-
prète brillante de la Grande Polonaise en la
bémol qui doit être bien fatigante pour vos mc.
nottes puériles.
Aussi bien ces particularités sont connues des
mélomanes avertis. Je ne compte point parmi
eux M. Pierre Médan, professeur au lycée d'Aix
i p,-Provence et critique musical à ses moment
jf'rdus !perdus pour ses lecteurs), qui Berceuse
rravement.dans le Feu, que, dans la Berceuse
ie Bizet, « Si l'enfant repose. » la basse ar-
tege un renversement
initial ne faisant plus fonction de dominante
mais devenant second degré de si bémol), elle
rcite deux accords de ce dernier ton: triton,
puis quinte et sixte. On peut être charge de
conférences et ignorer ces données musicuies
t'icmentaires.
Puisse cette petite mise au point dessiller les
veux d'un gaffeur appartenant à la catégorie des
ctumitifs d'aspect grave dont Erik Satie affirma
dans l 'Act;on , jadis, qu'ils sont des types dans le
gave du contrebasson.
De la jeune génération, il ne semble pus
qu'un chef .d'orchestre doive surgir, capable d'é-
galer les grands capellmcis-ter qui ont ttfnt fait
peur la gloire de Bayreuth: Hermann Lèvy,
juif mystique au regard pénétrant qui (Ilvelop-
pait Parsifai d'une ineffable atmosphère de dou-
ceur chrétienne; Félix Molli, infatigable propa-
gateur de la musique' française en Allemagne,
tans pareil dans la conduite de Tristan; enfin
flans Riclitei, le placide et le fort, qui faisait
comprendrc*aux plus obius ie Ring saboté avec
nne parricide inconscience, par le fils de H/agner,
boir siegfriedicule.
Néanmoins, ne regrettons pas trop le temps
m, à Paris, chaque dimanche, opéraient seuls
deux confrères ennemis: Lamdureux, 'irascible
et* autoritaire, ficr de ses. exécutions impecca-
Mes. mais souvent froides, auxquelles les im-
pulsifs habitués du Châtelet préféraient leur
Damnation de Faust où s'ébattait à l'aise le ro-
mantisme de Colonne, tout ensemble ardait et
flou. -
Applaudissons aujourd 'huiolnghelbredlt, exquis
dans la mise en valeur de certaines subtilités
modernistes; Rhené-Bâton, chercheur toujours
insatisfait dont la nervosité intéresse même
lorsqu'elle inquiète; Pierné, précis, poétique et
riilin; le Suisse Ansermet, habile à démèhr les
échevaux harmoniques habilement enchevêtrés
par l'école de Strawinsky; le Belge Georges
hauwereyns donc l'infçiligence lucide guidant un
tempérament fougueux, oblieiii. ile l'orchestre ie
IJLIlximum de rendement;'enfin le prestigieux
i'talien Toscanihi, que je proclamerais le premier
■de tous, si la crainte d'ètrc- haché menu comme
rhair à pâté par les autres « as >> du bjiiôn il ar-
fêtait au bout de ma' plume cette imprudente
iffirmation. -
WILLY.
PROPOS ORPHEONIQUES :
Virtuoses et Sociétés
musicales
Datas un articte fortement documente paru
dans le Courrier musical; notre confrère Louis-
Cœdes Batiaiiie montre combien l'existence des
virtuoses est devecue précaire.
Actuellement, dit-il, un interprète doit avoir
d'autres ressources que. sa profession puisqu'il
n'en peut vivre.
Il en est d'ailleurs ainsi à peu près de toute
les professions libérales, et la modification pro-
fonde, ie bouleversement plutôt d?- ~rr>,
de l'existence a transformé la mentalité de bien
du gens.
M. Battaille démontre que les musiciens qui se
contenteraient de vouloir se faire entendra en
public ne sauraient tirer aucun profit des au-
ditions qu'ils donneraient, et qu'ils en seraient
encore de leur poche,.. Et il énumère les dif-
férents cas qui peuvent se produire..
Il en est un sur lequel je désirerais dire un*
petit mot.
M. Battaille énonce : « Daas les sociétés mu-
sicales, cachet: néant. » -
Ceci n'est pas tout à fait exact, et les sociétés
musicales qui,, pour leurs concerts, font appel
à des artistes professionnels, leur allouent géné-
ralement, indépendamment de leurs frais de aé-
placement, le caahet qu'ils demandent. * -
Il est bien rare qu'une société musicale puis-
se à elle seule fournir tous les éléments d'un
programme, et, soit dans l'intention de ména-
#!,eT les forces de ses exécutants (chanteurs ou
instrumentistes). soit dans le but de procurer-à
ses auditeurs des I( numéros intéressants » une
société obtient presque toujours le concours d.e
quelques vedettes des « Concerts de Paris ».-
11 y a même des morceaux qu'on ne sort que
pour ces occasions-là : l'air de Benvenuto, le
Ésxo d'Hamlet, VArioso de Delibeg, les couplets
dt l'éclat de rire de la Manon Lescaut d'Auber,
l'air d'Hcrculanam, etc.
Si les sociétés musicales étaient encouragées'
d'une façon plus réelle, eUes pourraient aug- -
menter !e nombre des concerts qu'elles oxga-
lMSent, faire plus fréquemment appel aux inter-
prètes solistes, et leur offrir des cachets plus
levés.
Mais à l'heure actuelle, H y a en province
dés sociétés musicales d'amateurs qui cherchent
à faire entendre de grands virtuoses aux habi-
tues de leurs séances.
11 y a quelques "jours à peine, le président
d'une grande société chorale de l'Ouest me ma-
nifestait son intenfion d'organiser deux grands
concerta, l'un en janvier, l'autre en février,
f!tI faisant entendre à chacun de ces deux con-
certs deux solistes instrumentistes (piano .et vio-
lon, piano-et violoncelle), de manière que la
durée de la partie instrumentale de chacun des
deux programmes soit de une heure et demie.
Et naturellement, les artistes qui traiteront
;.vec cette société seront rémunérés comme il
convient. D'ailleurs, comme le propose juste-
ment M. Battaille, si les interprètes se grou-
paient en une association professionnelle, ils
obtiendrai en t bien vite la suppression' de la for-
mule du « gracieux concours ;) des manchettes
-fee' |rognàraëé. ':. ., -'' -:,', '-
Htnu BRoDY.
- 1
LA BELLE AU BOIS DORMANT
¡ --
Lettre ; a Serge de "Diaghilev
Cher ami,
Je suis heureux de fe .voir monter
celte œuvre capitale : La Belle au Bois
Dormant, de notre cher grand
Tchaïkowsky. j'en suis double-
ment heureux. Gela m'est d'a-
bord une joie personnelle, car
cette œuvre me semble être
l'expression la plus authenti-
que de l'époque de notre vie.
russe que nous appelons lie
« période de Petersbourg »,
gravée dans ma mémoire avec
la vision matinale des traîneauy
impériaux d'Alexandre III, l'é-
norme Empereur et son énor-
me cocher, et la joie immense
qui m'attendait le soir: le spec-
tacle de La Belle au Bois Dor-
mant. C'est ensuite ma grande
satisfaction de musicien de voir
présentée une œuvre d'un ca-
ractère si direct, à un moment
où tant de gens qui ns sont ni
simples, ni naïfs ,ni spontanés,
recherchent dans leur art, la
simplicité ,1a « pauvreté » et la
spontanéité. -
1 chaikowsky possédait la
grande puissance mélodique;-
centre de gravitation de chaque
symphonie, opéra ou ballet
qu'il composait. Il m'est abso-
lument indifférent que la quali-
té de sa mélodie soit parfois de
valeur inégale. Le fait est qu'il
fut créateur de mélodie. don
extrêmement rare et précieux.
Chez nous, Glinka le possé-
dait aussi; et pas autant, les
autres.
Et voilà qui n est pas allemand.
Les Allemands fabriquaient de la mu-
sique avec des thèmes et des Ieit-motifs,
les substituant à des mélodies.
La musique de Tchaïkowsky, ne pa-
raissant pas à tout le monde spécifique-
ment russe, est souvent plus profondé-
ment russe que- celle qui, depuis long-
-----------.. ,i.l: ..,
temps a reçu l'étiquette facile du pitto-
resque moscovite. ■ ;111,"";
Cette musique est tout autant ruSse'5
LA BELLE AU BOIS DORMANT ; 'i
5Decsiii inédit do Léon' BAKSTV
LC MEDECIN
que ie vers de Pouchkine, ou le chant
ds Glinka. Ne cultivant pas spéciale-
ment dans son art « l'âme paysanne
russe »,Tchaïkowsky puisait inconsciem-
ment dans les vraies sources pop.'iiaitfes
de notre race.
Et à. quel point ses préférencesBan«:
la musique ancienne et de son -nms
LA BELLE AU BOIS DORMANT M l'.
étaient-elles caractéristiques ! II adorait
Mozart, Couperin. Glinka, Bizet: voilà
'qui ne laisse nu] doute sur l,a qualité de
son goût. Chose étrange, cha-
que fois qu'un musicien russe
s'influençait de cette culture
latino-slave et voyait claire-
ment la - frontière' ènrre l'Au)
trichien catholique Mozart tour-
né vers Beaumarchais, et l'Al-
lemand protestant Beethoven,
incliné vers Gœthe, le résultat
était marquant.
L'exemple convaincant de la
grande puissance créatrice de
Tchaïkowsky est sans aucun
doute le ballet de La Belle au
Bois Dormant. Cet homme
cultivé, connaisseur de vieilles
chansons et de l'ancienne mu-
sique française, quand il s'agit
de présenter le siècle »e Louis
XIV, ne s'occupe aucunement
de recherches archéologiques
et recrée le caractère de l'épo-
que par son propre langage
musical, préférant les anachro-
nismes involontaires et vivants
aux pastiches conscients et tra-
vaillés : qualité propre aux
seuls grands créateurs.
Je viens de relire la parti-
tion de* ce ballet: j'en ai or-
chestré quelques morceaux,
qui étaient restés non instru-
mentés et jamais joués. J'ai
passé quelques journées de
plaisir extrême en y retrou-
vant toujours le même senti-
ment de fraîcheur, d'invention.
d ingéniosité et de puissance. Et je
souhaite vivement que cette œuvre soit
sentie par tes auditeurs de tous
pays, comme elle l'est par moi, musicien
tu s se.
: fikn à t;
Igor StravinsKy.
.1 {I."-:m¡ inédit '.le Léon BAKST). ,.
LA REINE ET UN PAGE
- Concerts Colonne. - Samedi 19 novem-
bre, à 4 h. 45 précises, 6e Concert -.Les Des-
criptifs (Paysages) : Impressions Pastorales. (E.
Fanelli), tableaux symphonique numéros 12 et'
13, 18, 19 et 20. -
Prélude à l'Après-Midi d'un Faune (CI. De-
bussy). -
Paysages Franciscains (Gabriel Pierné) :
-1. Le Gardien de Sainte-Claire (couvent de.
saint Damien) ; 2. Les Olivaies de la plaine
d'Assise (Crépuscule d'Automne); 3. Sur la
route de Poggio-Bastone (La Procession).
Symphonie Pastorale'.(Beethoven) : 1. Impres-
sion agréable à l'aspect de la nature; 2. Scène
au bord du ruisseau ; 3. Réunion joyeuse de
villageois, Orage, Tempête; 4. Chant des Ber-
gers, Hymne de-joie et de reconnaissance après
l'orage.
Sous la direction de M. Gabriel Pierné.
Dimanche 20 novembre, à 2 h. 30 très pré-
cises, 6e Concert :
Freyschutz, ouverture (Weber),
Deuxième Symphonie en ut (R. Schumann) :
1. Introduction et allegro; 2. Scherzo; 3. Ada-
gio; 4. Finale (allegro molto vivace).
Prélude à l'Après-Midi d'un 'Faune (Cl. De-
bussy).
Les Heures Dolentes (Gabriel Dupont :
1. Epigraphe, La Mort rôde; 2. Des Enfants
jouent dans le Jardin; 3. Nuit blanche, Hallu-
cinations.
Fête Polonaise (Le Roi malgré lui-) (Emm.
Chabrier).
Sous la direction de M. Gabriel Pietné.
Champs-Elysées, samedi Î9 et dimanche 20
novembre, à 3 heures, Concerts Pasdeloup :
Benvenuto Cellini (ouverture) (Berlioz) : Con-
certo pour violon (M. - Ch. Dorson) (Beetho-
ven); Symphonie en sol mineur (Lalo) ; Les
Sept Chants de Shéhérazade (première audition)
(Mario Versepuy), Mlle Fanny Heldy; Les
Maîtres Chanteurs (Wagner): a), Prélude du
3e acte; b) Danse des Apprentis; c) Marche
des Corporations.
Chef d'orchestre: Rhené Baten.
Mlle Jean Nolan chantera des vieilles chah-
sons irlandaises, des œuvres françaises, rus-
ses et anglaises, et Mlle Hélène Dolmetscîf
jouera des œuvres'anciennes pour viole de
gambe'et Suite de Bach et Variations sur
Thème Rococo de Tschaikowsky pour violon-
celle, à leur concert, salle Pleyel, mardi soir
15 novembre. 1
Billets de 5 à 12 francs à la salie, chez
Durand, au Bureau International de Concerts.
Micheline Kahn donnera un concert Salie
Erard vendredi soir 18 novembre, avec le con-
cours du Quatuor Poulet. Au programmer
Debussy-Ravel. Billets au Printemps (porte dit
Havre, Salle Erard, au 29 rue Tronchet, -et
chez Durand et de' Valrnalète (Marc. 23-26).
Mme R. Fierro de Antoine et M. A. ftrh"
toine donneront un concert samedi soir 19 dd,
vembre, Salle Erard. Programme et billets :
Salle Erard, au 29 rue Tronchet, chez Dii-
rand et de Valmalète (Marc. 23-26). 1 .;
Henry Moscovitz, le jeune et remarquable
violoniste, que Paris a déjà fêté la saison der-
nière, donnera un récital Salle Caveau, lutjdi]
21 novembre, à 21 heures. Billets: Salle Ou-
rand et chez M. de Valmalète (Marc. 23.26),..
Yves Nat et Gaston Poulet donneront dekix ',
séances de sonates, Salle Erard, les 21 ^èt4
29 novembre, à 21 heures. Billets et abonrtfc^
ments aux deux séances: Salle Durand, au 29
rué Tronchet et chez de Valmalète (Ma'ÍC.;
23-26)..
Mme Alice Daumas, de l'Opéra, qui nous*
revient de Belgique, où elle a été donner quel-
ques représentations, chantera dimanche 20 tien
vembre, aux Concerts Spirituels delà SorbonriSë*1
Les Béatitudes, de César Franck.
Plusieurs critiques ont rappelé, après lai :re-
prise de L'Enlèvement au Sérail, à l'Opéra,
un incident que nous avons raconté ici même
lundi dernier. L'un d'eux a écrit que la répon-
se un peu vive de Mozarr, qui faisait l'objet
de l'anecdote,s'adressait à l'empereur «Louis !}?>*
Vérification faite, c'est bien l'empereur «
seph Il » qui, ayant critiqué la musique.
L'Enlèvement, s'attira une amusante riposte jlë.
Mozart.
CHEZ LES ETUDIANTS
Les Conférences auditions
du Cercle Musical
Universitaire
Le Cercle Musical Universitaire va reprendre
ses conférences-auditions, à la Sorbonne. à
l'amphithéâtre Richelieu. La première soirée
sera présidée par M. Paul Appell, recteur
de l'Université de Paris.
Le programme de cette année, qui fait suite
à celui de l'an passé, comporte l'étude de l'his-
toire de la musique française, de la fin du
XVIIIc siècle à nos jours.
La première conférence aura lieu, le 22 no-
vembre, à 20 h. 30, elle sera faite par M. Lan-
dormy. sur Le Théâtre Musical en France à la
fin du XVIIIe siècle. Gliick et l'Opéra-Comique.
M. Tissot parlera ensuite de la Musique pen-
dant la Révolution. M. Ad. Boschot, de Ber-
lioz (6 décembre). M. Henri Busser, de L'Opé-
ra d'Auber à Meyerbeer (20 décemibre). M. Bel-
laigue, de Gounod (10 janvier. M. F. Kraener-
Raine, De Bizet à Saint-Saëns (24 janvier). M.
H. Lichtenberger, de L'Influence de Wagner en
France (7 février). M. Guignebert1, des Mélodis-
tes modernes (14 février). M. Vincent d'Indy,.
de César Franck (21 février). M. P. Landormy,
de Claude Debussy (14 mars). M. Roland Ma-
nuel. de Gabriel Fauré, Maurice Ravel, Florent
Schmitt et Albert Roussel (21 mars). M. A.
Pirro, des Musiciens * étrangers en France au
XIXe siècle (28 mars). M. H. Prunières, du
Mouvement musical contemporain (4 avril).
Félicitons le Cercle Musical Universitaire de
cette intéressante initiative et souhaitons que ses
conférences-auditions retrouvent, cette année,
le succès qu'elles eurent l'an passé.
A. R.
A Bordeaux, on a repris La Veuve Joyeuse.
Dans la crainte que ce premier contact avec
Jei public français ne fût l'occasion d'incidents,
de nombreux agents de la Sûreté avaient été
placés dans la salle, tout prêts à intervenir. Il
n'y eut ni sifflets ni protestations. La soirée
s'acheva dans un succès éclatant.
Les recettes de cette première série de repré-
çeàitations s'annoncent triomphales. On cite des
chiffres énormes. Et directeurs de province de
s'agiter et de se disputer pour s'assurer à
leur tour à bref délai l'exploitation de cette
njine dcg
\Les Grands
Concerts
Deux importantes séances sy m phoniq ues se
sont intercalées cette semaine en marge des
grands concerts du dimanche.
L'appétence des mélomanes eût eu de quoi
, être assouvie avec les mets classiques, accom-
modes à la roumaine de main de maître-chef par
M. Georgesco, et les friandises slaves que M.
Serge Koussevitzky excelle à présenter. Mais
une coïncidence déplorable, et dont on devrait
bien éviter le retour, a voulu que.-l'un et l'au-
tre festins fussent servis jeudi à la .même heijr
re. C'était mettre chacun,.,d£,, .nous dans ..la fà,-
cheuse obligation d'opter. Lès intéressés n'en
souffrirent point, il est vrai : la salle his-
torique du Conservatoire craqua d'un enthou-
siasme égal à celui qui emplit !e vaisseau de
l'Opéra. Car — contrairement à la coupable
indifférence témoignée aux artistes de France,
lors de leur passage en pays étranger, par ie
consulat et le cercle français de l'endroit —
la colonie russe et la roumaine étaient venues
fêter leur représentant respectif.
Il vous sera parlé ailleurs du mérite de M.
Georgesco. Cet artiste supérieur entraîne et
maintient à un rare degré de perfection le fa-
meux orchestre de. Bucarest. la FiIarmonica,
que l'un des nôtres, M. Henri Morin, a été ap-
pelé à diriger pendant l'absence de son chef.
Tandis que M. Georgesco triomphe ici, là-bas
M. Henri Morin remporte une suite de succès
magnifiques et tels qu'ils contrebalancent avec
éclat la propagande tentaculaire des plus réputés
kappelmeisters allemands.
M. Koussevitzky devient pour plus longtemps
notre hôte. Son programme inaugural ouvre le
cycle de six concerts. qui vont se dérouler heb-
domadairement jusqu'à la fin de l'automne. Ain-
si la symphonie voisinera encore avec le dra-
me dans l'hospitalière Académie Nationale.
Pareil à ce qu'il était apparu, la saison der-
nière, enthousiaste, exubérant -et persuasif,
nous revient aujourd'hui M. Koussevitzky. C'est
un prestigieux virtuose dde l'orchestre : il en
joue comme d'un instrument docile. Les vibra-
tions des chanterelles et des anches traduisent
ses moindres suggestions, épousent ses impul-
sions les plus dissemblables. Sa mimique, fas-
cinatrice et magnétique, déclanche le mouve-
ment, gradue l'amplitude des ondes, prolonge
ou brise leur résonance. Le visage est chez
lui aussi expressif que les mains : sés yeux
ordonnent, .ses lèvres murmurent la note, ses
bras s'agitent au gré des nuances les plus sub-
tiles. Côte extérieur que.; pour ma part, je juge
théâtral et excessif, .mais qui sait obtenir de la
trompe l'effet intensément recherché.
Dans les œuvres russes surtout, M. Kousse-
vitzky atteignit à une interprétation remarqua-
ble. L'ouverture d'Obéron, de Weber, et ia
Symphonie en ut mineur, de Beethoven, lui
permirent également de briller à l'aise. Par con-
tre. les deux Nocturnes, de Debussy, baignés
de langueur orientale, n'exaltèrent que faible-
ment leur nervosité frémissante. Question de
race. sans doute, puisque la voix de Mme Véra
Janacopulos distilla mollement la. capiteuse sen-
teur de Shélzérazade, de M. RaveiI. - -.
! Mais l'ouverture de Klwvantchina, de Mous-
sorgsky, La Bataille de Kèrjenietz et le scherzo
extrait de l'opéra Le Conte du Tzar Saltan, de
Rimskv-Korsakow, dégagèrent tour à tour la
poésie et le pittoresque enclos, et flamboyèrent
de tout le coloris délicat, tumultueux, étince-
lant, qui leur est propre. Les montagnards de
mon pays emploient une savoureuse onomatopée
pour qualifier le bruissement ailé de la mouche
à miel : l'abeille brounzine, disent-ils. De mê-
me. « brounzine » la voltigeante orchestration
par quoi Rimsky a décrit Le Vol du Bourdon.
Les traits de violon et de flûte fusent, bourdon-
nent. zigzaguent, semblables au' léger ronfle-
ment de vivaces élytres enivrés d'azur. L'audi-
toire charmé réclama aussitôt une audition sup-
plémentaire, que M. Koussevitzky accorda après
avoir consulté du regard son valeureux flûtiste
— lequel ne parut nullement essoufflé par cette
brève mais foudroyante envolée dans l'éther.
Nous n'en avons point fini avec les insectes.
Salle Gaveau, M. Camille Chevillard présida
aux essais d'un scarabée géant, dont les « mem-
brures d'acier et le halètement puissant et en-
flammé n ressortit plutôt à l'imagination d'un
Wells qu'à l'entomologie d'un Fabre. Le mons-
trueux appareil n'a certainement point trouvé
place au salon de l'aéronautique. Son construc-
teur, M. Jules Mangue, n'a pourtant rien négli-
gé pour le rendre plaisant d'aspect. Mais le mo-
teur a parfois des ratés qui impressionnent dé-
favorablement. Non loin de la plaine où le sca-
irabée tangue et s'épuise en efforts, plane un
vol de corbeaux croassant au-dessus d'une fon-
taine — la même source sûrement qui réflé-
chit naguère le mystère apeuré de Mélisande.
Ces Deux Episodes Légendaires, de M. Mangue,
sont gentiment impersonnels.
Au Châtelet, les fleurs elles-mêmes entrent
dans. la conjuration. M. Fumet, qui surprit. la
dispute lunaire et assista àw tournoi odorant,
proclame le lys vainqueur de la rose. En chro-
niqueur consciencieux il a soigneusement relaté
et commenté les diverses phases du Concilia-
bule. Et voici encore de la musique honnête,
sans plus. :
Différents spécialistes ayant participé aux
matinées, attendent maintenant que nous les
citions à l'ordre du jour. -
Mlle Henriette Renié arpégea sur les cordes
chromatiques le Co'ncerstuck,. pour harpe, de
M. Gabriel Pierné, et Deux Danses, die Debus-
sy. Séance du samedi entièrement consacrée à
la danse, qui emporta l'orchestre des Concerts-
Colonne dans une frénésie giratoire, rythmée
par les trois temps de la Fête Polonaise, de
Chabrier, : et de La Valse, de M. Ravel, par les
lamentations - funèbres de la Sarabande, de M.
Roger-Ducasse, et les .révélrences nobles de la
Pavane, de M. Gabriel Fauré.
Mme Suzanne Balguerie fut, aux Concerts
Lamoureux, l'interprète applaudie de Kaddisch
et d'un fragment de Rédemption, de Franck.
Cependant, l'air de l'archange réclame plus
d'ampleur vocale. Il est dommage que la voix
de Mme Balguerie ne réponde pas complète-
ment à la flamme qui l'anime.
Entre la Symphonie, de Chausson et Siegfried-
ldyll, de Wagner, M. Rhené- 'Bâton, donna la
parole au violoncelle. M. Dambois, accompa-
gné par l'orchestre des Concerts-Pasdeloup,
exécuta dans un style souple et une sûre tech-
nique le Concerto en la mineur, de l'auteur
d'Ascunio. ,', ,
Pour finir, si la Société des Concerts que
M. Philippe Gaubert dirige -r- tint les promes-
ses de son affiche, Mmes Ismardon et Lapeyret-
te, MM. Franz, Delmas', Rambaud, chanteurs
pissés maîtres, chantèrent Les Maîtres Chan-
teurs. -
JEAN POUEIGH.
On répète
À l'Opéra-Comique, les études de Pénélope
sont commencées. La reprise- duchef-dloeuvre de
Gabriel Fauré aurait lieu aussitôt après la créa-
tion du drame lyrique de M. Georges Hue, A
l'ombre de la Cathédrale. M. Louis Hasselmans,
qui, de même qu'au Théâtre des Champs-Ely-
sées ec à l'Opéra-Comique, lors de la première
reprise, dirigera l'orchestre, comptQ, sur une
belle interprétation, en tête de laquelle on trou-
vera, paraît-il, Mlle Mathieu et M. , Lapelle-
trie. ,
A la Gaîté-Lyrique, on mettra prochainement
sur le chantier l'opérette d'Albert Carré et
Claude Terrasse, Frétillone:
La Musique
.", chez soi
- xcv.
Un flot de musiques nouvelles nous est appo* >
té- par la première livraison de la Musique Ut:
Chambre (i). MM; Vuillermoz et Georges Ml-'
got ont dit comme moi l'intérêt de cette tentative
éditoriale que le patronage de M. Paul Lêcil!
représentant le ministre des Beaux-Arts, consa-
cre comme le premier effort national pour lif
propagation de notre musique. , 1
Les différentes séries : piano, chahut piano*
violon et piano, violortçelle et piano, ^musique-'
d'ensemble, contiennent beaucoup de musique
moderne et un peu de musique ancienne dont
l'édition est confiée à nos maîtres musicogra-
plies.
Dans la première série, pour piano, nous
avons la primeur de 12 petites pièces de Char-
les Koechlin où se réalise (sous des titres sé-
duisants), le miracle d'une musiaue pure donc
la rythmique et les rapports de tonalités sont une
nouveauté perpétuelle. Avec un profond savoir,;
M. Koechlin demeure simple, accessible, et, ce-
pendant peut à bon droit être considéré comme
un précurseur d'un art linéaire émancipé de
toute formule.
Les Scènes d'enfants de Frédéric Mompou, !e
« Debussy espagnol » constituent, dans leur
unifonalité populaire, l'apport le plus .spontané;
frais et vigoureux, de l'âme ibérique à la mu-
sique moderne internationale. La rythmique d'un
jeu hardi et svelte domine ces courtes pièces af-
franchies de la mesure et vivantes comme des ta-
bleaux catalans.
D'Opo-1; Ygouw, des Tableaux du CmMse du-
ne puissance évocatrice rarement atteinte. "Ir.
d'autres musiciens russes du piano. Da eavou-
reux frottements harmoniques, une bitonalité la-
tente, confèrent à ces tableaux le pittoresque
voulu, mais l'âme russe se révèle dans la char-
pente du .développement mélodique.
D'aimables et spirituelles pièces de Paul Ba-
zelaire : Portraits d'élèves ou plutôt peinture (<'"
leurs caractères tranchés, complètent avec de
délicieuses « enfantines J) de Jean Déré, de* :
pièces humoristiques de MM. Lévy et un air'
ce ballet de Fourdrain, la série « piano », Ph. E.
Bach, Le Bègue, Couperin et de la Guerre en
sont les auteurs « anciens ».
La série « chant et piano » contient un beau
poème de Max d'Ollone sur la Solitude de Sain-
te Beuve. Jean Déré nous offre quatre chants
arabes extraits du Jardin des Caresses de Franz
Toussaint et qui. mêlent sans pittoresque factice.
la grâce et la vigueur. Nul doute que le farou-
che Chant dçs Guerriers ne devienne rapide-
ment célèbre.
D'onduleuses mélodies de Grandjany sont su,- i
vies de quatre lieder de Jacques Pillois, d'une)
profonde originalité et d'une forme rare. Le senf ,
timent schumannien de Mon feu, l'accent poi-
gnant de tous ces .pauvres enfants contrastent
avec le doux récit de Quatrain et la grâce. de pa-
vane du Rondel Brisé. Le Calme des Jarditns :
d'A. Sauvrezis et la Nuit blanche de Marc Del-
mas sont simplement poétiques, tandis Quelles
fables de Mario .Versepuy et de Marcel Trjé'mois
s'efforcent à rendre musicaux des textes sur-
tout plastiques, et y réussissent. De charmantes ;
ariettes de Dalayrac et Philidor jettent leur note
archaïque dans ce concert ultra-moderne-
Les séries instrumentales sont dignes des pH-
cédentes. La sonate de Le Guillard pour violon
et piano, merveilleusement écrite pour, ces ins- j
truments apparaît d'une solide architecture et !
d'une musicalilté évidente. Mais je lui préfère'
l'étonnante sonate pour violon et piano d'Honeg-
ger, qui lui fait suite. Ici je ne puis qu'admirer
l'aisance inégalable d'un contrepoint si musicale- *^,
ment fleuri, la nerveuse rythmique de Vallegro,
l'austérité puissante de l'adagio, l'audace des
rapports des « décors linéaires », enfin la nou-
veauté de cette forme que déterminent les né-
cessités d'une eurythmie que l'auteur veut per-
sonnelle, et qu'il observe avec une énergique!
maîtrise. Deux concerti de Vivaldi et de Gemi-
niani reposeront les musciens de cette montée
sublime vers les régions honeggériennes.
, Une sonate pour violoncelle et piano de Mau-
rice Emmanuel, datée de 1890, fait regretter flue
l'auteur ait tant sacrifié par la suite à la musi-
cologie, car des dons de musicien s'y révèlent
qui n'ont eu que trop peu souvent l'occasion
de se manifester. L'œuvre est classique, bien
sonnante, de proportions moyennes, avec UR 1
larghetto expressif et .une vigoureuse Gigue
en guise d'allegro..
La même série contient une sonate, égale-
ment pour violoncelle, d'Alexandre Cellier, qui
séduira tous les virtuoses. Le duo agité du pia-
no et du cello dans le premier temps, l'oppo-
sition mélodique et rythmique du second, le
dialogue passionné du Nocturne, enfin la fou-
gue, l'enthousiasme, l'épanouissement sonore
du dernier temps, assurent à l'ouvrage une pla-
ce de choix parmi ceux — si rares — que les
compositeurs ont daigné offrir à la littérature
moderne du violoncelle. Et certes, le chroma-
tisme, la carrure mélodique, la construction
classique, ne sauraient faire de la sonate d'A.
Cellièr une œuvre d'avant-garde. Cela n'est jj
pas nécessaire. Il suffit qu'une œuvre soit sin- |
cère, personnelle _étoffée.' Or la sonate d'A. 1
Cellier présenté ces trois caractèms, qui it
rendront chère à tous ses lecteurs. La série ]'
est complétée par une magnifique sonate an-
cienne de San Martino,
Enfin, la cinquième et dernière série, M plus
importante, nous apporte des œuvres signifi-
catives: le premier quatuor à cordes de Koecli-
jin, le deuxième quatuor à cordes de Jean
Huré, les 5 Mouvements d'eau de Migot, le
Poème de Francis Bousquet et le trio du Cata-
lan Roberto Gerhard. En musique ancienne :
des quatuors de Dalayrac et un trio de Bail-
lot.
je reviendrai à loisir, dans une prochaine
étude, sur le quatuor de Huré. D'autre part,
j'ai dit dans un récent numéro du Guide du
Concert la valeur, dans le groupe des Quatre
espagnols de Roberto. Gerhard, dont le pré-
sent trio n'est pas sans rappeler le rythme de
celui de Maurice Rave!. Le Poème de Bous-
quet s'apparente à celui de Gabriel Dupont,
avec toutefois moins de puissance et de poé-
sie. Mais on peut tout attendre de ce jeune et
charmant prix de Rome. Le quatuor de Koech-
lin, vraie merveille de construction, de sono-
rités neuves, oppose à ses trois premiers temps
respectivement simple, rythmique et mystérieu-
sement chantant, la progression vigoureuse et
exultante de son final allegro con moto, vrai-
ment imprévu. Quant aux 5 Mouvements d'can
de Georges Migot, si difffférents de tout ce que
l'on écrit aujourd'hui, ils confirment le sys-
tème d' « écriture plura-linéaire-rythmique )
cher à l'auteur, et peuvent, quant à la forme.,
être synthétisés par les lignes indicatrices que,
nous devons au musicien lui-même: calme ou
légère, lente ou triste, l'onde, qui fuit sans ces-
se, égare mes pensées, lesquelles constituent,
ainsi qu'on voit, un véritable programme cons-
tructif. , ',",'
L'esemble ae toutes ces œuvres piaistiques,
vocales et instrumentales est un réconfort pour,
ceux que désespérait jusqu'ici cette sorte de
.torpeur où végétait (du fait d'une édition in-
suffisante) notre art français pourtant si admi-
ré. Que les promoteurs de la Musique de cham-
bré qui assurent ainsi l'avenir de tant d'oeuvres
marquantes de la jeune école soient publique-
ment remerciés., —
HENRI, COLLET,
(1) M. Sénart, éditeur. Paris.
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