Titre : L'Homme libre : journal quotidien du matin / rédacteur en chef, Georges Clemenceau ; directeur, Fr. Albert
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1928-10-19
Contributeur : Clemenceau, Georges (1841-1929). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 19 octobre 1928 19 octobre 1928
Description : 1928/10/19 (A16,N4471). 1928/10/19 (A16,N4471).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-230
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 07/03/2014
v , Y L'Homme Libre
GRAND JOURNAL QUOTIDIEN DU MATIN A. .B ERNIER
A fîERNIER
Rédacteur en Chef: EUGÈNE LAUTIER 1)1recteur-Admilli.traf
F
Seizième année Ne 4471
Rédaction et Administration
13, rue Marivaux, PARIS
TÉLÉPHONE
Gut. 54.07. - Gut. 54.08
Après 20 heures : CENTRAL 43-71
ADRESSE TÉLÉGR : LHOMLIBRE-PARIS
r lVENDREDI
19
OCTOBRE 1928
25 centimes le numéro
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3 mois 6 mois lan
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Départements. 12 Ir. 22 Ir. 4C fr.
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Zi-m pays. 35 Ir. 69 Ir. 136 tr.
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LA POLITIQUE INTERIEURE
En attendant partie
r Un mot encore sur l'affaire des arti-
cles 70 et 71. Nous aurons, la semaine
prochaine, à commenter le résultat défi-
nitif des élections cantonales et à poser
une question assez importante à la veille
du congrès d'Angers.
Il ne servirait à rien de dissimuler
Ique l'incident de ces derniers jours
baisse dans le monde politique une vive
[impression de malaise. Léon Blum, qui
est demeuré spectateur impartial de la
'controverse récente, l'a décrite dans le
''Populaire d'hier matin avec sa précision
jet sa finesse coutumières.
J'avais comparé, mercredi dernier, la
journée du conseil des ministres à. la
fameuse Journée des Dupes, bien con-
nue dans l'histoire.
Nul ne se sentait complètement vain-
queur, au soir de ce grand jour. Certains
conservateurs trop excités avaient som-
lIDé M. Poincaré de tenir bon et de lais-
ser partir, au besoin, M. Ijldouard Hor-
riot, M. Queuille, M. Léon terrier, etc.
D'autre part, les radicaux socialistes at-
tendaient le retrait pur et simple des
articles 70 et 71,' ou bien la rupture de
j a'union nationale par la démission de
iM. Edouard Herriot et de ses amis.
La déception a été très grande des
deux côtés de la barricade : il en faut
convenir.
M. Poincaré ne s'est pas laissé étran-
gler entre deux portes. Il a rédigé une
note qui est un chef-d'œuvre de rosserie
douce ou tiède, car il a mis eu lumière,
impitoyableement, toutes les initiatives
vraiment républicaines qui se sont pro-
duites en faveur des missionnaires au
cours des dernières années.
Les services intérieurs du ministère
des 'affaires étrangères ont-ils passé la
mesure ? Qu'à cela ne tienne ! Les tex-
tes. que l'opinion radicale socialiste n'a
pas voulu avaler, on les retirera bien
gentiment de son gosier. On les enver-
ra aux commissions qui sont, paraît-il,
chargées uniquement de raboter, à
moins ql"e ce ne. soit de rebouter.
Désormais, chers collègues des gran-
des commissions, n'oubliez pas qu'avant
ttout vous êtes plus ou moins orthopé-
distes. Sans mauvais esprit, je vois d'ici
ie nez de mes camarades de. la commis-
sion des affaires étrangères quand on
•leur apportera ces deux articles 70 et 71
que leurs pères naturels (imitant des
exemples illustres) ont mis bel et bien
aux Enfants trouvés !
On sait que je ne souhaite pas qu'il
farrive un accident au ministère pendant
la discussion du budget. Je l'ai a&sez dit.
Je suis pourtant obligé de constater
que les incidents de ces derniers jours
ont donné d'assez fortes raisons d'espé-
rer aux adversaires les plus ardents et
les plus impatients du, cabinet.
Je sais bien que personne n'est res-
ponsable de cet imbroglio politique.
On a découvert dans les bureaux du
Quai d'Orsay un très digne fonctionnai-
re que nous avions déjà vu au Palais-
Bourbon pendant l discussion de l'am-
bassade du Vatican, et qui nous inspi-
rait à tous la plus grande estime et la
plus vive sympathie. C'est lui qui a
préparé, paraît-il, les textes !
Il s'appelle Canet. Comme tout le
monde, il peut réciter la fable des Ani-
maux malades de la peste. Il n'y a rien
pe mieux dans La Fontaine :
L« A ces mots, on cria: Haro sur le
[Canet »
L'humanité n'a pas beaucoup d'ima-
gination. La politique tourne toujours
dans le même cercle, hélas ! Nous di-
rons, si vous voulez : un cercle vicieux.
Quelle aubaine pour les orateurs vé-
héments du congrès d'Angers ! J'en-
tends leurs discours ;
« Ou bien les articles 70 et 71 s'im-
posaient dans l'intérêt national, et, alors,
,il fallait les défendre. Ou bien l'on pou-
,vait s'en passer; et ce nétait peut-être
pas la peine de compromettre d'avance
la discussion du budget en truffant la
loi de finances de ces articles malen-
contreux ».
Ce dilemme va sévir dans les pre-
miers jours de novembre. Il est, d'ail-
leurs, assez embarrassant. Vous verrez
es ravages de l'argument cornu.
Ce n'est pas que mes amis radicaux
(socialistes soient tous très échauffés
pour reprendre la lutte anticléricale.
Dans mon parti, l'on ne peut évidem-
ment recruter que parmi les républi-
cains de gauche un peu timorés. Il se-
rait imprudent de les effrayer.
A sa gauche, du côté des socialistes,
mon parti n'a rien à gagner au point
de vue électoral. Il ne saurait espérer
de mondre sur les contingents purement
ocialistes.
Il résulte de cette situation que le
parti radical socialiste va sans doute
utiliser fortement les fautes de détail
et de tactique commises par, le gouver-
nement; mais j'en connais un grand
nombre qui trouvent qu'on aurait bien
mieux fait de laisser dormir cette af-
faire.
Ce mécontentement n'est pas favo-
rable au cabinet. Les radicaux socialis-
ées, néanmoins, seront contraints, au
congrès d'Angers, d'acclamer la t dé-
claration de guerre à la Congrégation;
Pendant ce temps, les socialistes lais-
seront faire. Lisez l'article de Léon
Blum. S'il y avait à la Chambre un vote
sur les articles 70 et 71, le parti socia-
liste soutiendrait les radicaux socialisa
tes. Puisque nous avons, paraît-il, la
manie anticléricale, les socialistes re-
garderont nos exercices de trapèze laï-
que avec une indifférence mêlée d'un
certain mépris, comme je l'ai remarqué
et marqué il y a quatre années quand
il s'agissait de l'ambassade du Vatican.
Léon Blum recommande à ses amis
de réserver leurs, forces pour des ob-
jets plus vastes et plua sérieux : « Il ne
serait pas très raisonnable, de notre
part, dit Léon Blum, au moment où
nous nous trouvons engagés dans une
lutte de caractère nettement social, de
nous en laisser divertir par d'autres ba-
tailles ».
On ne saurait donner trop d'impor-
tance à cet avertissement.
Nous allons consacrer à des traditions
inéluctables nos vacances de la Tous-
saint.
Et M. Poincaré, qui a su redresser
le franc, a trois bonnes semaines pour
préparer un redressement d'un autre
genre. Mais fose lui dire, en toute res-
pectueuse amitié, que îa semaine ne fut
pas une bonne préface pour une se'ssion
qui doit être laborieuse.
EUGENE LAUTIER
Conseil des ministres
Les membres du gouvernement se sont
réunis en conseil des ministres, hier ma-
tin, à l'Elysée, sous la présidence de M.
Gaston Doumergue. La délibération s'est
poursuivie jusqu'à 12 h. 30.
M. Louis Barthou, garde des sceaux, a
soumis à la signature du président de
la République un décret nommant prési-
dent de chambre à la cour de cassation
M. Matter, avocat général à ladite cour.
M. Louis Marin, ministre des pensions,
a entretenu le conseil de la cérémonie du
11 novembre et des conditions dans les-
quelles les mutilés participeront au défilé.
Il a été décidé que la cérémonie de la
minute de silence auraty lieu, comme les
années précédentes, à 11 heures, et la re-
vue des troupes et le défilé des mutilés
à 13 h. 30.
Nomination au ministère de l'air
M. Laurent Eynac, ministre de l'air, a
fait signer par le président de la Répu-
blique un décret nOIDm'ant M. Caquot, di-
recteur des services techniques et indus-
triels de l'aéronautique.
M. Laurent Eynac a déclaré que les cré-
dits du ministère de l'air ne dépasseraient
pas ceux qui ont été précédemment ré-
partis entre les ministères de la guerre,
de la marine, du commerce et des colo-
nies et qu'ils seraient même légèrement
inférieurs à ces derniers.
Les ministres se réuniront en conseil à
l'Elysée le mardi 30 octobre.
I a retrouv ni iis [Énlis
'n[e u latam
Oslo, 18 octobre. — Le bateau de pêche
Leif vient d'arriver à Waldersund, sur la
côte de Norvège. Il avait à bord le réser-
voir d'essence du Latham.
Ce réservoir a été trouvé à 60°52' de
latitude nord et 8°50' de longitude est.
Il flottait.
Le réservoir est en aluminium, peint en
gris bleuâtre. Il a une forme allongée et
son volume est de 500 litres. Il contenait
encore 30 litres d'essence. Sa longueur est
de 1 m. 05, sa largeur de 60 à 70 centimè-
tres et sa hauteur de 75 centimètres.
Au réservoir est fixée une plaque de
cuivre portant cette inscription : « Es-
sence, contenance 600 litres. Hydravion
Latham. » Le réservoir est intact et est
muni de quelques boucles d'attache.
Sur un côté du réservoir se trouve une
inscription au crayon, mais la peinture
ayant disparu, cette inscription est pres-
que illisible. On avait cru un moment que
cette inscription avait pu être faite par un
survivant de l'équipage, mais un examen
ultérieur a permis de découvrir une série
de lettres et de chiffes détachés n'ayant
probablement aucun rapport avec l'acci-
dent survenu à l'appareil.
Ces lettres et ces chiffres semblent plu-
tôt avoir été inscrits au moment du mon-
tage du réservoir sur l'hydravion.
Un vapeur français
coule après avoir heurté des rochers
Le vi f eur Yser, de 3000 tonneaux. s'est
échoué la nuit dernière au sud de Belle-
Ile, à la pointe de l'Echelle.
Le bâtiment, dont la coque était crévée;
a coulé. Le remorqueur de sauvetage, qui'
avait appareillé pour porter assistance à
l'Yser, apprit, au Raz de Sein, que le va-
peur avait sombré, et rentra à Brest. Tout
l'équipage est sauvé.
LE DRAME QUOTIDIEN
Délaissé par sa jeune femme — ce qui
arrive, et qui peut n'être point toujours
un mal — Marcel Couléon, de Saint-Cyr-
en-Bourg, s'est vengé — et non point de
cette façon banale qui consiste simple-
ment à tuer la femme, mais d'u'ne façon
plus éclatante : il a tué d'abord la femme,
évidemment. Puis il s'est rendu dans un
petit village voisin, où était son fils, âgé
de vingt mois. Et il l'a assassiné d'une
balle en plein cœur.
Ceci fait, il est allé boire un coup de
rouge sur le zinc, dams le bistro d'en face.
C'est là qu'on a arrêté cet homme à la
page. - R. D.
*
La résistance des bouchers
UN ARGUMENT QUI TOMBE
Les exportations françaises de bétail
vont se trouver réduites de plus de moitié
Pour une fois il se pourrait
que M. Mussolini fût utile sinon
à la France, du moins au consom-
mateur français. Encore n'est-ce
pas très sûr.
A la veille de l'hiver les prix montent,
comme d'habitude. Le gouvernement ayant
tenté cette année de s'opposer à la hausse
par une offensive oratoire de grand style,
les prix ont monté un peu plus vite et un
peu plus fort. Pour la viande de boucherie,
en particulier, puisque c'était elle qui se trou-
vait visée particulièrement, la hausse a été,
en deux semaines, d'environ quatre-vingts
centimes par kilo.
bur ce, les bouchers conscients de la néces-
sité de prendre les devants pour empêcher le
mécontentement, ont immédiatement clamé
que la hausse venait du barème, appliqué
selon eux, trop rigoureusement et, aussi, de
la liberté rendue depuis six mois cependant
à l'exportation du bétail.
On pouvait s'y attendre. Le coupable, en
principe, se décharge toujours sur un voisin.
En l'occurrence l'intermédiaire accuse le pro-
ducteur.
Ce dernier, on le sait, n'a pas besoin d'être
défendu. Il peut répondre facilement à l'ac-
cusation des bouchers que le prix de la vian-
de n'a pas baissé lorsque l'exportation étant
interdite il y avait abondance de bêtes et
baisse de prix sur les marchés.
Mais c'est ici qu'intervient presque provi-
dentiellement M. Mussolini.
Soit qu'il ait en vue de protéger les pro-
ducteurs italiens, soit qu'il ait cherché à
favoriser en Italie d'autres exportateurs que
les nôtres, soit enfin qu'il ait craint une in-
vasion belliqueuse de bœufs français, il a
purement et simplement interdit l'entrée en
Italie du bétail français.
Et tout de suite nous avons appris des in-
téressés que l'Italie, étant notre principale
cliente pour le bétail, nos exportations al-
laient se trouver en fait, réduites de plus de
onoitié.
Du coup les bouchers vont avoir satisfac-
tion. La viande va abonder de nouveau —
et donc les prix vont baisser. Ce sont ces
messieurs eux-mêmes qui nous l'ont promis.
Qu'une promesse puisse n'être pas tous
jQmr terme, nous ne le savons que trop. Du
moins les bouchers ne pourront-ils plus re-
jeter sur le producteur la responsabilité de la
vie chère. Et si celle-ci persiste, en ce qui
concerne la viande tout au moins, il faudra
bien, alors, que le gouvernement se décide
à passer des circulaires aux actes et que l'on
applique sans rémission ni restriction le ba-
rème de M. le Préfet.
Qu'on étudie en même temps les moyens
de réconcilier le Il Duce » avec les bœufs
de France, nous n'y voyons pas d'inconvé-
nient. Mais en attendant d'obtenir cette ré-
conciliation il importe, et sans retard, de
réconcilier d'abord MM. les bouchers avec la
logique et avec leurs promesses.
A Vincennes
une maison en construction
s'effondre
Trois morts et plusieurs blessés
ont été retirés des décombres
Dans l'après-midii d'hier, vers 15 heu-
res, un immeuble de sept étages s'est
écroulé à Vincennes, 140, rue de la Garry,
ensevelissant sous les décombres 23 ou-
vriers.
Ce bâtiment avait été commencé il y
a 6 mois, environ, par M. Antoine Provinil,
29, rue des Granges, à Montreuil, qui en
était à la fois le propriétaire et l'entrepre-
neur. Les travaux étaient presque complè-
tement terminés et on procédait à la pose
des croisées au dernier étage.
Trente ouvriers travaillaient, hier, sur
le chantier. Sept d'entre eux parvinrent,
lorsque les premiers matériaux tombèrent,
à s'échapper en sautant par les fenêtres.
Mme Provini put se sauver elle aussi, mais,
lorsque le nuage de poussière produit par
l'écroulement se dissiipa, 23 malheureux
gisaient ensevelis.
Aussitôt alertés, les pompiers de Mon-
treuil, suivis bientôt par ceux de CharoIl-
ne, arœilyèrent sur les lieux et' s'employè-
rent au déblaiement.
A 20 heures, trois morts étaient retirés
des décombres. Après bien des efforts, on
réussissait à dégager 4 blessés qui furent
immédiatement transportés à l'hôpital
Saint-Antoine. Assez tard dans la nuit, on
espérait sauver deux ouvriers dont les
appels étaient entendus depuis un long
moment.
Le préfet de police s'est rendu sur les
lieux, accompagné du directeur général
de la police municipale.
ON EST SANS NOUVELLE
DE L'AVIATEUR
MAC DONALD
Sa provision d'essence lui permet
de tenir l'air
jusqu'à la fin de cet après-midi
Londres, 18 octobre. — On n'avait encore-
reçu, à 1 heure du matin, aucune nou-
velle, à Londres ou à Dublin, de l'aviateur
britannique Mac Donald quii avait quitté
Harbour-Grâce (Terre Neuve) mercredi
après-midi à 16 h. 51, pour tenter d'at-
teindre, d'une seule traite, l'Irlande ou la
Grande-Bretagne.
Au service central météorologique de
l'air ministry à Londres, on déclare que,
d'une façon générale, les conditions at-
mosphériques au-dessus de l'Atlantique,
au cours de ces dernières 24 heures, ont
été favorables à une telle tentative et que
l'aviateur a dû rencontrer un vent arrière
d'une vitesse d'environ 48 kilomètres à
l'heure, qui devait nécessairement aug-
menter sa vitesse.
Par ailleurs, la pluie violente et le fort
vent qui étaient signalés hier matin tout
le long de la côte ouest de l'Irlande, ont
maintenant disparu pour faire place à des
conditions atmosphériques normales.
Si tout avait bien marché, Mac Donald
aurait dû, comme il le comptait bien,
avant son départ de Harbour-Grâce, sur-
voler la côte irlandaise hier après-midi
entre 13 et 14 heures, car le ministère de
l'air britannique lui avait bien recomman-
dé de suivre une route située bien plus
au nord que celle généralement empruntée
par les aviateurs qui tentent, la traversée
de l'Atlantique de l'ouest à l'est.
En fait, Mac Donald était attendu à Gal-
way, côte irlandaise, vers 13 heures hiler
après-midi.
De toute façon, l'intrépide aviateur bri-
tannique avait suffisamment d'essence
pour tenir l'air pendant 35 heures et il n'y
a par conséquent pas lieu de s'alarmer à 1
son sujet avant la fin de raprès-mildi i
d aujourd'hui»
Les mémoires
du maréchal
Joffre
Ce dernier déplore le bruit
fait autour de leur publication
Refaire l'historique des deux batailles
de la Marne ? De celle qui, en 1914, re-
foula les armées allemandes; de celle
qui, en 1918, les repoussa, définitivement
cette fois, à quoi bon ? Qui ne le con-
naît ?
Aussi bien le maréchal Joffre, dans un
petit livre retentissant, a tenu en per-
sonne, et en accord parfait avec l'état-ma-
jor britannique, à reconstituer le panorama
stratégique du champ de bataille. Il a
tenu à faire justice des .légendes, à dé-
blayer le terrain des interprétations fan-
taisistes qui l'encombraient, à restituer à
l'Histoire le visage intact des chefs de la
Marne.
Et non seulement il l'a. fait dans un
petit livre retentissant, mais encore dans
un éclatant article de presse, tiré d'ail-
leurs de ce livre.
L'article fit un certain bruit, comme il
sied, et comme le maréchal, sans doute,
s'y attendait. En tout cas il ne protesta
pas.
Ou du moins il a tenu à ne protester
qu'à retardement : l'Agence Havas, il y
a quarante-huit heures, publiait de lui une
note récusant la paternité de l'article, et
toute responsabilité dans les allégations
du petit livre.
Or, ce livre, traduit de l'anglais, a été
connu du maréchal Joffre. La partie
qui contient le récit du vainqueur de la
Marne a été, après traduction en fran-
çais, soumise à son état-major, qui, après
ratures, après corrections, après revi-
sion, après addenda, deleatur, a donné à
l'éditeur, son imprimatur, en quelque
sorte.
Pourquoi, dès lors, et si tardivement,
le maréchal Joffre proteste-t-il ?
Nous l'avons demandé à l'éditeur.
— Je n'en sais, ma foi, rien, nous Sl-t-il
répondu.
— Mais encore ?
— Lion, vous dis-je.
— Cependant.
— Si le maréchal Joffre a ses raisons
d'avoir publié ce démenti, j'ignore absolu-
ment ces raisons.
— Pourtant, quand la presse entière
parla de ce récit par Joffre lui-même, de
la bataillé de la Marne.
- Et peut-être est-ce parce que la
presse entière, justement, a parlé de ce
récit, et en a parlé comme étant tiré des
mémoires du maréchal, que celui-ci a pro-
testé.
— Ah ! bah.
— Mais oui, le maréchal ayant l'inten-
tion de publier, un jour ou l'autre, ces
mémoires, n'est-ce pas, en quelque sorte,
les déflorer, que de les présenter comme
étant déjà publiés, sortis ?
— En somme, le maréchal Joffre se ré-
serve le droit d'avoir, à son heure, le lan-
cement de presse qui convient à un ou-
vrage d'une aussi vaste envergure ?
— Ne nous en faites pas dire plus que
je ne vous en ai dit.
— Rassurez-vous.
— Je ne sais, je vous le répète, qu'une
chose : c'est que la relation de la double
bataille de la Marne, telle que nous
l'avons publiée, a été connue du maré-
c'- ! et de son état-major.
— En somme, et pour nous résumer, une
phrasé, une seule.
— Laquelle ?
- Ne cherchez pas à comprendre.
- Je ne vous en ai pas tant dit. — R. D.
VOIR EN DEUXIEME PAGE :
La Revue de la Prejsse
Les nouvelles brèves
LE PROBLEME NAVAL
Les inquiétudes allemandes
sur l'accord franco - britannique
-- ne sont justifiées en rien
Si la publication des documents rela-
tifs et l'accord naval franco-britannique
a soulevé tant d'émotion, c'est moins en
raison des aspects techniques de cet
accord, que de sa signification politique
présumée. Londres et Paris se sont con-
tentés, en effet, de dégager les principes
sur lesquels, en commun, les représen-
tants des deux pays pourront agir à Ge-
nève au cours des travaux préparatoires
sur la réduction des annements. Ces
principes peuvent très bien — et ce sera
probablement le cas — ne pas rempor-
ter l'approbation des autres intéressés.
Dans ces conditions, ils devront se plier
devant la nécessité d'une transaction
générale, si tant est que pareille tran-
saction soit possible. En fait, les com-
missions compétentes de la Société des
Nations demeurent entièrement maî-
tresses des conclusions auxquelles il
leur plaira d'aboutir, conclusions que
la conférence plénière pourra à son tour
rejeter lorsqu'elle se réunira. C'est dire
que l'accord franco-britannique n'est
que le préliminaire d'autres préliminai-
res, et ne comporte aucune conséquence
technique irrévoofible..
Il n'aurait donc jamais soulevé l'orage
dont les échos retentissent encore si les
Etats-Unis, l'Alle-magne et l'Italie no-
tamment ne l'avaient considéré comme
la manifestation d'une entente politique
beaucoup plus vaste et riche en consé-
quences de tous ordres.
La Gazette de Francfort, organe mo-
déré, démocrate, favorable au rappro-
chement franco-allemand, nous apporte
à ce sujet une réaction fort instructive,
dont il n'est pas inutile de prendre Ii
tentivement connaissance, en nous di-
sant que la plupart des autres commen-
taires étrangers ont été et demeurent
beaucoup plus vifs.
Voici comment s'exprime notre con-
frère d'oulre-Rhin :
Quoi qu'il advienne, l'accord naval en-
tre Londres et Paris demeure un symp-
tôme de l'évolution politique générale. La
politique française a été visiblement beau-
coup plus active que la politique anglaise,
qui, avec la maladie de Chamberlain, est
devenue plus flottante et s'est trouvée en
opposition avec l'opinion publique anglaise
ellIe-même. Dans ce qu'on a nommé la
« nouvelle Entente », la direction échoit
à la France. La France a utilisé à son pro-
fit l'état de faiblesse qui règne au Foreign
Office, et en l'espèce il importe vraiment
peu que telle ou telle initiative soit venue
de Paris ou de Londres. Aucune diploma-
tie ne travaille aussi méthodiquement,
avec une telle portée de vues et avec tant
d'énergie dans les détails, que la diploma-
tie française..Le but est la sécurité de la
France. Pour cela, il faut les bons rap-
ports avec l'Allemagne, par conséquent
Locarno, il faut aussi les traités avec tous
les jeunes Etats qui ne sont pas précisé-
ment nos amis déclarés. Il y a deux ans,
Briand diLsai t au Parlement: « J'ai la con-
viction ferme que, sans un rapprochement
entre l'Allemagne et la France, il est im-
possible de rétablir l'équilibre en Europe.»
C'est là, aujourd'hui encore, une des prin-
cipales idées directrices de sa politique.
Cette idée a été déjà approuvée par la,
majorité du peuple français aux élections
de 1924, qui mirent fin à la politique de la
Ruhr menée par Poincaré. Elle a donc déjà
suffisamment pris de force pour qu'il ne
soit pas facile de l'éliminer. Mais il y a
toujours les nuances Briand et Poincaré,
et peut-être encore quelques nuances in-
termédiaires. Après le discours de Briand
à Genève, on a dit en plaisantant que le
« briandisme était poincarisé ».- Il y a
quelque chose de cela. Quand Briand vit
que l'Allemagne allait soulever la question
de l'évacuation rhénane, et que des négo-
ciations difficiles se préparaient, au sujet
des réparations, il aura trouvé sans dotte
que, pour la lutte diplomatique, sa note
ne serait pas aussi avantageuse que le ton
plus distant, plus « homme d'affaires n,
qui est celui de son président du conseil.
Les discours que nous entendons de ce
dernier laissent, en effet, soupçonner qu'il,
ne veut pas se laisser entraîner par la
sympathie pour l'Allemagne. Il était con
forme à ce système de ramener l'Angleter-j
re plus étroitement au rôle de la France.
.La concession faite par l'Angleterre à
la France au sujet des réserves militaires
françaises dans la question du désarme-
ment, a mis en lumière l'intérêt énorme
qui s'attache, pour la France, à une en-t
tente avec l'Angleterre. Ainsi la garant ie,
militaire se renforce d'une garantie di-»
plomatique.
Quand on se rend compte de ces iiit
terprélations et de ces craintes, on com-i
prend alors, avec facilité, l'accueil tu-
multueux qui a été fait à l'accord naval
franco-britannique. Et l'on ne s'étonne,
plus des commentaires sensationnels et
amers que l'on continue à lire, sur cette,
affaire, dans la presque totalité des jour-
naux américains, allemands, italiens ee
anglais. Car un très grand nombre de,
nos voisins d'outre-Manche sont réso
lument hostiles à une entente cordiale,
conçue comme nous venons de l'aper-
cevoir. Les. toutes récentes déclarations,
faites à Berlin par M. Ramsay Mac Do..,
nald, chef du parti travailliste, nous en-*
lèveraient le moindre doute à cet égardt
si nous pouvions en conserver.
Les Français au courant des projets
et des. vues du. Quai d'Orsay tel qu'il
est dirigé par M. Aristide Briand et par.
M. Philippe Berthelot, savent très bien
que ces interprétations ne correspondent,
nullement à la réalité. S'il a pu être,
question d'harmoniser les plans de dé-,
fense nationale français et britannique,
les gouvernements de Paris et de Ion.
dres, si désireux queii4 soient de s'ap-
puyer l'un sur l'autre, n'ont pas songé
un seul instant à régenter les destinées,
du vieux monde. Ils savent également,
que notre ministre des affaires étran-
gères se garderait bien de prendre une.
initiative qui puisse compromettre, l'œu-i
vre de Locamo — dont il est si légitime-
ment fier — ou élever un obstacle tan-
gible sur la route qui conduit au rappro-
chement franco-allemand, jugé plus queÀ
jamais nécessaire. -,.
Trop souvent, on oppose la politique,
de l'entente cordiale à celle du rappro
chement franco-allemand. C'est là eri,
même temps une sottise et une mala,
dresse. Les deux politiques, au contrai
re, se complètent mutuellement. L'une,
sans l'autre, c'est la sujétion à la Gran-.
de-Bretagne ou l'asservissement à l'Al
lemagne. L'une jointe à l'autre de*
vient — non point un puéril jeu de ban
lance — mais les deux bras d'un même
corps.
C'est ce qu'on devrait se dire à Berliri.
et ailleurs pour ne pas se méprendre,
sur la politique française d'aujourd'hui,
qui tend, sans ambition impérialiste,
à organiser lEurope sur la base du statu
quo territorial de 1919.
Jean-L. DAURIAC.
NOTE DU JOUR
Du général au particulier
Il ne faut pas conclure, dit-on, du par-
ticulier au général. D'accord. Mais il faut
encore moins conclure du général au par-
ticulier.
L'Angleterre, pour tout le monde, est
une grande et forte nation, puissante et
riche. Son industrie est magnitiaue, Elle
a la maitrise des mers. Les grosses fortu-
nes y abondent. Et, par-dessus tout cela,
le signe du sterling plane comme le
signe même de la fortune que rien ne peut
entamer, Du haut de sa terre, si je peux
dire, l'Anglais peut contempler insolem-
ment la misère des autres peuples.
C'est le général. Et l'on en pourrait
déduire que le particulier, en Angleterre,
lui aussi, est riche, plus riche que partout
ailleurs..
Or les journaux de Londres racontent
l'histoire lamentable d'un Anglais qui a
déclaré ceci :
cc Je consens a me laisser inoculer les
germes du cancer, de la typhoïde, de la
malaria et à me livrer à n'importe quelle
opération chirurgicale pourvu qu'elle ne
me rende pas totalement aveugle. »
Cet Anglais est-il un condamné à mort ?
Non pas. C'est beaucoup plus simplement
un ouvrier mineur du pays de Galles qui
ne peut plus nourrir ses cinq enfanls.
Il a quarante-deux ans, il est en pleine
santé mais. il ne peut trouver de travail
nulle part et sa femme et ses petits n'ont
plus que la peau sur les os. Aussi ferait-il
n'importe quoi pour trouver quelques res-
sources.
Voilà. ;
Du général n'allez pas conclure que tous
les Anglais sont riches: Ne concluez pas
davantage dit particulier que l'Angleterre
est L.I pays pauvre.
La vérité est que l'Angleterre est un
pays riche dont la fortune est payée de la
misère de beaucoup d'Anglais. Ou, encore,
qu'on peut plus facilement manger avec
un franc de cinq sous qu'avec une livre
de sent, vingt-cinq francs.
Jacaues BARTY.
Le pot de terre
contre le pot de fer
OU L'ESPRIT DE REVENDICATION
NE SUFFIT PAS A SUPPRIMER
LES LOIS ECONOMIQUES
par R. GENTON
Vous avez bien entendu parler de l'Aus-
tralie, si vous n'y êtes pas allé. Vous avez
certainement lu de magnifiques exposés où,
il était dit que, dans ce pays neuf, où il
n'y avait pas de bourgeoisie à déposséder,
pas de traditions ni de lois oppressives à
démolitr, le progrès pouvait marcher sans
entraves et, sous le règne bienfaisant du
syndicat souverain, maître du pouvoir,
créer un paradis idéal.
En Australie, jes syndicats ouvriers s'é-
taient fait octroyer les lois les plus « con-
fortables » du monde. Ces socialistes, ces
internati'onalistes avaient fait preuve de la
plus complète intransigeance en fait de
protectionnisme et de nationalisme, parce
qu'ils y trouvaient leurs ayantages, qu'ils
faisaient passer avant les grands princi-
pes. Ils avaient fermé leurs frontières à la
main-d'œuvre de couleur, ce qui les met-
tait à l'abri de la concurrence.
De cette façon, les salaires étaient of-
ficiellement garantis. Evincés les Chinois;
évincés les nègres. Quant aux blancs, sur-
tout après 1a guerre, vous pensez bien
qu'ils n'affluaient pas; les ouvriers aus-
traliens n'étaient pas inquiets de ce côté.
Or, voilà que. dans la mère patrie, lei
chômage sévit dans les proportions que
vous savez. L'Angleterre cherche à éva-
cuer ses chômeurs vers ses dominions. n
en est débarqué un certain contingent en
Australie. On aurait préféré les voir res-
ter chez eux; mais enfin, on n'osa pas les
renvpyer, on les accueillit et ils furent
GRAND JOURNAL QUOTIDIEN DU MATIN A. .B ERNIER
A fîERNIER
Rédacteur en Chef: EUGÈNE LAUTIER 1)1recteur-Admilli.traf
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Seizième année Ne 4471
Rédaction et Administration
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19
OCTOBRE 1928
25 centimes le numéro
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Zi-m pays. 35 Ir. 69 Ir. 136 tr.
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LA POLITIQUE INTERIEURE
En attendant partie
r Un mot encore sur l'affaire des arti-
cles 70 et 71. Nous aurons, la semaine
prochaine, à commenter le résultat défi-
nitif des élections cantonales et à poser
une question assez importante à la veille
du congrès d'Angers.
Il ne servirait à rien de dissimuler
Ique l'incident de ces derniers jours
baisse dans le monde politique une vive
[impression de malaise. Léon Blum, qui
est demeuré spectateur impartial de la
'controverse récente, l'a décrite dans le
''Populaire d'hier matin avec sa précision
jet sa finesse coutumières.
J'avais comparé, mercredi dernier, la
journée du conseil des ministres à. la
fameuse Journée des Dupes, bien con-
nue dans l'histoire.
Nul ne se sentait complètement vain-
queur, au soir de ce grand jour. Certains
conservateurs trop excités avaient som-
lIDé M. Poincaré de tenir bon et de lais-
ser partir, au besoin, M. Ijldouard Hor-
riot, M. Queuille, M. Léon terrier, etc.
D'autre part, les radicaux socialistes at-
tendaient le retrait pur et simple des
articles 70 et 71,' ou bien la rupture de
j a'union nationale par la démission de
iM. Edouard Herriot et de ses amis.
La déception a été très grande des
deux côtés de la barricade : il en faut
convenir.
M. Poincaré ne s'est pas laissé étran-
gler entre deux portes. Il a rédigé une
note qui est un chef-d'œuvre de rosserie
douce ou tiède, car il a mis eu lumière,
impitoyableement, toutes les initiatives
vraiment républicaines qui se sont pro-
duites en faveur des missionnaires au
cours des dernières années.
Les services intérieurs du ministère
des 'affaires étrangères ont-ils passé la
mesure ? Qu'à cela ne tienne ! Les tex-
tes. que l'opinion radicale socialiste n'a
pas voulu avaler, on les retirera bien
gentiment de son gosier. On les enver-
ra aux commissions qui sont, paraît-il,
chargées uniquement de raboter, à
moins ql"e ce ne. soit de rebouter.
Désormais, chers collègues des gran-
des commissions, n'oubliez pas qu'avant
ttout vous êtes plus ou moins orthopé-
distes. Sans mauvais esprit, je vois d'ici
ie nez de mes camarades de. la commis-
sion des affaires étrangères quand on
•leur apportera ces deux articles 70 et 71
que leurs pères naturels (imitant des
exemples illustres) ont mis bel et bien
aux Enfants trouvés !
On sait que je ne souhaite pas qu'il
farrive un accident au ministère pendant
la discussion du budget. Je l'ai a&sez dit.
Je suis pourtant obligé de constater
que les incidents de ces derniers jours
ont donné d'assez fortes raisons d'espé-
rer aux adversaires les plus ardents et
les plus impatients du, cabinet.
Je sais bien que personne n'est res-
ponsable de cet imbroglio politique.
On a découvert dans les bureaux du
Quai d'Orsay un très digne fonctionnai-
re que nous avions déjà vu au Palais-
Bourbon pendant l discussion de l'am-
bassade du Vatican, et qui nous inspi-
rait à tous la plus grande estime et la
plus vive sympathie. C'est lui qui a
préparé, paraît-il, les textes !
Il s'appelle Canet. Comme tout le
monde, il peut réciter la fable des Ani-
maux malades de la peste. Il n'y a rien
pe mieux dans La Fontaine :
L« A ces mots, on cria: Haro sur le
[Canet »
L'humanité n'a pas beaucoup d'ima-
gination. La politique tourne toujours
dans le même cercle, hélas ! Nous di-
rons, si vous voulez : un cercle vicieux.
Quelle aubaine pour les orateurs vé-
héments du congrès d'Angers ! J'en-
tends leurs discours ;
« Ou bien les articles 70 et 71 s'im-
posaient dans l'intérêt national, et, alors,
,il fallait les défendre. Ou bien l'on pou-
,vait s'en passer; et ce nétait peut-être
pas la peine de compromettre d'avance
la discussion du budget en truffant la
loi de finances de ces articles malen-
contreux ».
Ce dilemme va sévir dans les pre-
miers jours de novembre. Il est, d'ail-
leurs, assez embarrassant. Vous verrez
es ravages de l'argument cornu.
Ce n'est pas que mes amis radicaux
(socialistes soient tous très échauffés
pour reprendre la lutte anticléricale.
Dans mon parti, l'on ne peut évidem-
ment recruter que parmi les républi-
cains de gauche un peu timorés. Il se-
rait imprudent de les effrayer.
A sa gauche, du côté des socialistes,
mon parti n'a rien à gagner au point
de vue électoral. Il ne saurait espérer
de mondre sur les contingents purement
ocialistes.
Il résulte de cette situation que le
parti radical socialiste va sans doute
utiliser fortement les fautes de détail
et de tactique commises par, le gouver-
nement; mais j'en connais un grand
nombre qui trouvent qu'on aurait bien
mieux fait de laisser dormir cette af-
faire.
Ce mécontentement n'est pas favo-
rable au cabinet. Les radicaux socialis-
ées, néanmoins, seront contraints, au
congrès d'Angers, d'acclamer la t dé-
claration de guerre à la Congrégation;
Pendant ce temps, les socialistes lais-
seront faire. Lisez l'article de Léon
Blum. S'il y avait à la Chambre un vote
sur les articles 70 et 71, le parti socia-
liste soutiendrait les radicaux socialisa
tes. Puisque nous avons, paraît-il, la
manie anticléricale, les socialistes re-
garderont nos exercices de trapèze laï-
que avec une indifférence mêlée d'un
certain mépris, comme je l'ai remarqué
et marqué il y a quatre années quand
il s'agissait de l'ambassade du Vatican.
Léon Blum recommande à ses amis
de réserver leurs, forces pour des ob-
jets plus vastes et plua sérieux : « Il ne
serait pas très raisonnable, de notre
part, dit Léon Blum, au moment où
nous nous trouvons engagés dans une
lutte de caractère nettement social, de
nous en laisser divertir par d'autres ba-
tailles ».
On ne saurait donner trop d'impor-
tance à cet avertissement.
Nous allons consacrer à des traditions
inéluctables nos vacances de la Tous-
saint.
Et M. Poincaré, qui a su redresser
le franc, a trois bonnes semaines pour
préparer un redressement d'un autre
genre. Mais fose lui dire, en toute res-
pectueuse amitié, que îa semaine ne fut
pas une bonne préface pour une se'ssion
qui doit être laborieuse.
EUGENE LAUTIER
Conseil des ministres
Les membres du gouvernement se sont
réunis en conseil des ministres, hier ma-
tin, à l'Elysée, sous la présidence de M.
Gaston Doumergue. La délibération s'est
poursuivie jusqu'à 12 h. 30.
M. Louis Barthou, garde des sceaux, a
soumis à la signature du président de
la République un décret nommant prési-
dent de chambre à la cour de cassation
M. Matter, avocat général à ladite cour.
M. Louis Marin, ministre des pensions,
a entretenu le conseil de la cérémonie du
11 novembre et des conditions dans les-
quelles les mutilés participeront au défilé.
Il a été décidé que la cérémonie de la
minute de silence auraty lieu, comme les
années précédentes, à 11 heures, et la re-
vue des troupes et le défilé des mutilés
à 13 h. 30.
Nomination au ministère de l'air
M. Laurent Eynac, ministre de l'air, a
fait signer par le président de la Répu-
blique un décret nOIDm'ant M. Caquot, di-
recteur des services techniques et indus-
triels de l'aéronautique.
M. Laurent Eynac a déclaré que les cré-
dits du ministère de l'air ne dépasseraient
pas ceux qui ont été précédemment ré-
partis entre les ministères de la guerre,
de la marine, du commerce et des colo-
nies et qu'ils seraient même légèrement
inférieurs à ces derniers.
Les ministres se réuniront en conseil à
l'Elysée le mardi 30 octobre.
I a retrouv ni iis [Énlis
'n[e u latam
Oslo, 18 octobre. — Le bateau de pêche
Leif vient d'arriver à Waldersund, sur la
côte de Norvège. Il avait à bord le réser-
voir d'essence du Latham.
Ce réservoir a été trouvé à 60°52' de
latitude nord et 8°50' de longitude est.
Il flottait.
Le réservoir est en aluminium, peint en
gris bleuâtre. Il a une forme allongée et
son volume est de 500 litres. Il contenait
encore 30 litres d'essence. Sa longueur est
de 1 m. 05, sa largeur de 60 à 70 centimè-
tres et sa hauteur de 75 centimètres.
Au réservoir est fixée une plaque de
cuivre portant cette inscription : « Es-
sence, contenance 600 litres. Hydravion
Latham. » Le réservoir est intact et est
muni de quelques boucles d'attache.
Sur un côté du réservoir se trouve une
inscription au crayon, mais la peinture
ayant disparu, cette inscription est pres-
que illisible. On avait cru un moment que
cette inscription avait pu être faite par un
survivant de l'équipage, mais un examen
ultérieur a permis de découvrir une série
de lettres et de chiffes détachés n'ayant
probablement aucun rapport avec l'acci-
dent survenu à l'appareil.
Ces lettres et ces chiffres semblent plu-
tôt avoir été inscrits au moment du mon-
tage du réservoir sur l'hydravion.
Un vapeur français
coule après avoir heurté des rochers
Le vi f eur Yser, de 3000 tonneaux. s'est
échoué la nuit dernière au sud de Belle-
Ile, à la pointe de l'Echelle.
Le bâtiment, dont la coque était crévée;
a coulé. Le remorqueur de sauvetage, qui'
avait appareillé pour porter assistance à
l'Yser, apprit, au Raz de Sein, que le va-
peur avait sombré, et rentra à Brest. Tout
l'équipage est sauvé.
LE DRAME QUOTIDIEN
Délaissé par sa jeune femme — ce qui
arrive, et qui peut n'être point toujours
un mal — Marcel Couléon, de Saint-Cyr-
en-Bourg, s'est vengé — et non point de
cette façon banale qui consiste simple-
ment à tuer la femme, mais d'u'ne façon
plus éclatante : il a tué d'abord la femme,
évidemment. Puis il s'est rendu dans un
petit village voisin, où était son fils, âgé
de vingt mois. Et il l'a assassiné d'une
balle en plein cœur.
Ceci fait, il est allé boire un coup de
rouge sur le zinc, dams le bistro d'en face.
C'est là qu'on a arrêté cet homme à la
page. - R. D.
*
La résistance des bouchers
UN ARGUMENT QUI TOMBE
Les exportations françaises de bétail
vont se trouver réduites de plus de moitié
Pour une fois il se pourrait
que M. Mussolini fût utile sinon
à la France, du moins au consom-
mateur français. Encore n'est-ce
pas très sûr.
A la veille de l'hiver les prix montent,
comme d'habitude. Le gouvernement ayant
tenté cette année de s'opposer à la hausse
par une offensive oratoire de grand style,
les prix ont monté un peu plus vite et un
peu plus fort. Pour la viande de boucherie,
en particulier, puisque c'était elle qui se trou-
vait visée particulièrement, la hausse a été,
en deux semaines, d'environ quatre-vingts
centimes par kilo.
bur ce, les bouchers conscients de la néces-
sité de prendre les devants pour empêcher le
mécontentement, ont immédiatement clamé
que la hausse venait du barème, appliqué
selon eux, trop rigoureusement et, aussi, de
la liberté rendue depuis six mois cependant
à l'exportation du bétail.
On pouvait s'y attendre. Le coupable, en
principe, se décharge toujours sur un voisin.
En l'occurrence l'intermédiaire accuse le pro-
ducteur.
Ce dernier, on le sait, n'a pas besoin d'être
défendu. Il peut répondre facilement à l'ac-
cusation des bouchers que le prix de la vian-
de n'a pas baissé lorsque l'exportation étant
interdite il y avait abondance de bêtes et
baisse de prix sur les marchés.
Mais c'est ici qu'intervient presque provi-
dentiellement M. Mussolini.
Soit qu'il ait en vue de protéger les pro-
ducteurs italiens, soit qu'il ait cherché à
favoriser en Italie d'autres exportateurs que
les nôtres, soit enfin qu'il ait craint une in-
vasion belliqueuse de bœufs français, il a
purement et simplement interdit l'entrée en
Italie du bétail français.
Et tout de suite nous avons appris des in-
téressés que l'Italie, étant notre principale
cliente pour le bétail, nos exportations al-
laient se trouver en fait, réduites de plus de
onoitié.
Du coup les bouchers vont avoir satisfac-
tion. La viande va abonder de nouveau —
et donc les prix vont baisser. Ce sont ces
messieurs eux-mêmes qui nous l'ont promis.
Qu'une promesse puisse n'être pas tous
jQmr terme, nous ne le savons que trop. Du
moins les bouchers ne pourront-ils plus re-
jeter sur le producteur la responsabilité de la
vie chère. Et si celle-ci persiste, en ce qui
concerne la viande tout au moins, il faudra
bien, alors, que le gouvernement se décide
à passer des circulaires aux actes et que l'on
applique sans rémission ni restriction le ba-
rème de M. le Préfet.
Qu'on étudie en même temps les moyens
de réconcilier le Il Duce » avec les bœufs
de France, nous n'y voyons pas d'inconvé-
nient. Mais en attendant d'obtenir cette ré-
conciliation il importe, et sans retard, de
réconcilier d'abord MM. les bouchers avec la
logique et avec leurs promesses.
A Vincennes
une maison en construction
s'effondre
Trois morts et plusieurs blessés
ont été retirés des décombres
Dans l'après-midii d'hier, vers 15 heu-
res, un immeuble de sept étages s'est
écroulé à Vincennes, 140, rue de la Garry,
ensevelissant sous les décombres 23 ou-
vriers.
Ce bâtiment avait été commencé il y
a 6 mois, environ, par M. Antoine Provinil,
29, rue des Granges, à Montreuil, qui en
était à la fois le propriétaire et l'entrepre-
neur. Les travaux étaient presque complè-
tement terminés et on procédait à la pose
des croisées au dernier étage.
Trente ouvriers travaillaient, hier, sur
le chantier. Sept d'entre eux parvinrent,
lorsque les premiers matériaux tombèrent,
à s'échapper en sautant par les fenêtres.
Mme Provini put se sauver elle aussi, mais,
lorsque le nuage de poussière produit par
l'écroulement se dissiipa, 23 malheureux
gisaient ensevelis.
Aussitôt alertés, les pompiers de Mon-
treuil, suivis bientôt par ceux de CharoIl-
ne, arœilyèrent sur les lieux et' s'employè-
rent au déblaiement.
A 20 heures, trois morts étaient retirés
des décombres. Après bien des efforts, on
réussissait à dégager 4 blessés qui furent
immédiatement transportés à l'hôpital
Saint-Antoine. Assez tard dans la nuit, on
espérait sauver deux ouvriers dont les
appels étaient entendus depuis un long
moment.
Le préfet de police s'est rendu sur les
lieux, accompagné du directeur général
de la police municipale.
ON EST SANS NOUVELLE
DE L'AVIATEUR
MAC DONALD
Sa provision d'essence lui permet
de tenir l'air
jusqu'à la fin de cet après-midi
Londres, 18 octobre. — On n'avait encore-
reçu, à 1 heure du matin, aucune nou-
velle, à Londres ou à Dublin, de l'aviateur
britannique Mac Donald quii avait quitté
Harbour-Grâce (Terre Neuve) mercredi
après-midi à 16 h. 51, pour tenter d'at-
teindre, d'une seule traite, l'Irlande ou la
Grande-Bretagne.
Au service central météorologique de
l'air ministry à Londres, on déclare que,
d'une façon générale, les conditions at-
mosphériques au-dessus de l'Atlantique,
au cours de ces dernières 24 heures, ont
été favorables à une telle tentative et que
l'aviateur a dû rencontrer un vent arrière
d'une vitesse d'environ 48 kilomètres à
l'heure, qui devait nécessairement aug-
menter sa vitesse.
Par ailleurs, la pluie violente et le fort
vent qui étaient signalés hier matin tout
le long de la côte ouest de l'Irlande, ont
maintenant disparu pour faire place à des
conditions atmosphériques normales.
Si tout avait bien marché, Mac Donald
aurait dû, comme il le comptait bien,
avant son départ de Harbour-Grâce, sur-
voler la côte irlandaise hier après-midi
entre 13 et 14 heures, car le ministère de
l'air britannique lui avait bien recomman-
dé de suivre une route située bien plus
au nord que celle généralement empruntée
par les aviateurs qui tentent, la traversée
de l'Atlantique de l'ouest à l'est.
En fait, Mac Donald était attendu à Gal-
way, côte irlandaise, vers 13 heures hiler
après-midi.
De toute façon, l'intrépide aviateur bri-
tannique avait suffisamment d'essence
pour tenir l'air pendant 35 heures et il n'y
a par conséquent pas lieu de s'alarmer à 1
son sujet avant la fin de raprès-mildi i
d aujourd'hui»
Les mémoires
du maréchal
Joffre
Ce dernier déplore le bruit
fait autour de leur publication
Refaire l'historique des deux batailles
de la Marne ? De celle qui, en 1914, re-
foula les armées allemandes; de celle
qui, en 1918, les repoussa, définitivement
cette fois, à quoi bon ? Qui ne le con-
naît ?
Aussi bien le maréchal Joffre, dans un
petit livre retentissant, a tenu en per-
sonne, et en accord parfait avec l'état-ma-
jor britannique, à reconstituer le panorama
stratégique du champ de bataille. Il a
tenu à faire justice des .légendes, à dé-
blayer le terrain des interprétations fan-
taisistes qui l'encombraient, à restituer à
l'Histoire le visage intact des chefs de la
Marne.
Et non seulement il l'a. fait dans un
petit livre retentissant, mais encore dans
un éclatant article de presse, tiré d'ail-
leurs de ce livre.
L'article fit un certain bruit, comme il
sied, et comme le maréchal, sans doute,
s'y attendait. En tout cas il ne protesta
pas.
Ou du moins il a tenu à ne protester
qu'à retardement : l'Agence Havas, il y
a quarante-huit heures, publiait de lui une
note récusant la paternité de l'article, et
toute responsabilité dans les allégations
du petit livre.
Or, ce livre, traduit de l'anglais, a été
connu du maréchal Joffre. La partie
qui contient le récit du vainqueur de la
Marne a été, après traduction en fran-
çais, soumise à son état-major, qui, après
ratures, après corrections, après revi-
sion, après addenda, deleatur, a donné à
l'éditeur, son imprimatur, en quelque
sorte.
Pourquoi, dès lors, et si tardivement,
le maréchal Joffre proteste-t-il ?
Nous l'avons demandé à l'éditeur.
— Je n'en sais, ma foi, rien, nous Sl-t-il
répondu.
— Mais encore ?
— Lion, vous dis-je.
— Cependant.
— Si le maréchal Joffre a ses raisons
d'avoir publié ce démenti, j'ignore absolu-
ment ces raisons.
— Pourtant, quand la presse entière
parla de ce récit par Joffre lui-même, de
la bataillé de la Marne.
- Et peut-être est-ce parce que la
presse entière, justement, a parlé de ce
récit, et en a parlé comme étant tiré des
mémoires du maréchal, que celui-ci a pro-
testé.
— Ah ! bah.
— Mais oui, le maréchal ayant l'inten-
tion de publier, un jour ou l'autre, ces
mémoires, n'est-ce pas, en quelque sorte,
les déflorer, que de les présenter comme
étant déjà publiés, sortis ?
— En somme, le maréchal Joffre se ré-
serve le droit d'avoir, à son heure, le lan-
cement de presse qui convient à un ou-
vrage d'une aussi vaste envergure ?
— Ne nous en faites pas dire plus que
je ne vous en ai dit.
— Rassurez-vous.
— Je ne sais, je vous le répète, qu'une
chose : c'est que la relation de la double
bataille de la Marne, telle que nous
l'avons publiée, a été connue du maré-
c'- ! et de son état-major.
— En somme, et pour nous résumer, une
phrasé, une seule.
— Laquelle ?
- Ne cherchez pas à comprendre.
- Je ne vous en ai pas tant dit. — R. D.
VOIR EN DEUXIEME PAGE :
La Revue de la Prejsse
Les nouvelles brèves
LE PROBLEME NAVAL
Les inquiétudes allemandes
sur l'accord franco - britannique
-- ne sont justifiées en rien
Si la publication des documents rela-
tifs et l'accord naval franco-britannique
a soulevé tant d'émotion, c'est moins en
raison des aspects techniques de cet
accord, que de sa signification politique
présumée. Londres et Paris se sont con-
tentés, en effet, de dégager les principes
sur lesquels, en commun, les représen-
tants des deux pays pourront agir à Ge-
nève au cours des travaux préparatoires
sur la réduction des annements. Ces
principes peuvent très bien — et ce sera
probablement le cas — ne pas rempor-
ter l'approbation des autres intéressés.
Dans ces conditions, ils devront se plier
devant la nécessité d'une transaction
générale, si tant est que pareille tran-
saction soit possible. En fait, les com-
missions compétentes de la Société des
Nations demeurent entièrement maî-
tresses des conclusions auxquelles il
leur plaira d'aboutir, conclusions que
la conférence plénière pourra à son tour
rejeter lorsqu'elle se réunira. C'est dire
que l'accord franco-britannique n'est
que le préliminaire d'autres préliminai-
res, et ne comporte aucune conséquence
technique irrévoofible..
Il n'aurait donc jamais soulevé l'orage
dont les échos retentissent encore si les
Etats-Unis, l'Alle-magne et l'Italie no-
tamment ne l'avaient considéré comme
la manifestation d'une entente politique
beaucoup plus vaste et riche en consé-
quences de tous ordres.
La Gazette de Francfort, organe mo-
déré, démocrate, favorable au rappro-
chement franco-allemand, nous apporte
à ce sujet une réaction fort instructive,
dont il n'est pas inutile de prendre Ii
tentivement connaissance, en nous di-
sant que la plupart des autres commen-
taires étrangers ont été et demeurent
beaucoup plus vifs.
Voici comment s'exprime notre con-
frère d'oulre-Rhin :
Quoi qu'il advienne, l'accord naval en-
tre Londres et Paris demeure un symp-
tôme de l'évolution politique générale. La
politique française a été visiblement beau-
coup plus active que la politique anglaise,
qui, avec la maladie de Chamberlain, est
devenue plus flottante et s'est trouvée en
opposition avec l'opinion publique anglaise
ellIe-même. Dans ce qu'on a nommé la
« nouvelle Entente », la direction échoit
à la France. La France a utilisé à son pro-
fit l'état de faiblesse qui règne au Foreign
Office, et en l'espèce il importe vraiment
peu que telle ou telle initiative soit venue
de Paris ou de Londres. Aucune diploma-
tie ne travaille aussi méthodiquement,
avec une telle portée de vues et avec tant
d'énergie dans les détails, que la diploma-
tie française..Le but est la sécurité de la
France. Pour cela, il faut les bons rap-
ports avec l'Allemagne, par conséquent
Locarno, il faut aussi les traités avec tous
les jeunes Etats qui ne sont pas précisé-
ment nos amis déclarés. Il y a deux ans,
Briand diLsai t au Parlement: « J'ai la con-
viction ferme que, sans un rapprochement
entre l'Allemagne et la France, il est im-
possible de rétablir l'équilibre en Europe.»
C'est là, aujourd'hui encore, une des prin-
cipales idées directrices de sa politique.
Cette idée a été déjà approuvée par la,
majorité du peuple français aux élections
de 1924, qui mirent fin à la politique de la
Ruhr menée par Poincaré. Elle a donc déjà
suffisamment pris de force pour qu'il ne
soit pas facile de l'éliminer. Mais il y a
toujours les nuances Briand et Poincaré,
et peut-être encore quelques nuances in-
termédiaires. Après le discours de Briand
à Genève, on a dit en plaisantant que le
« briandisme était poincarisé ».- Il y a
quelque chose de cela. Quand Briand vit
que l'Allemagne allait soulever la question
de l'évacuation rhénane, et que des négo-
ciations difficiles se préparaient, au sujet
des réparations, il aura trouvé sans dotte
que, pour la lutte diplomatique, sa note
ne serait pas aussi avantageuse que le ton
plus distant, plus « homme d'affaires n,
qui est celui de son président du conseil.
Les discours que nous entendons de ce
dernier laissent, en effet, soupçonner qu'il,
ne veut pas se laisser entraîner par la
sympathie pour l'Allemagne. Il était con
forme à ce système de ramener l'Angleter-j
re plus étroitement au rôle de la France.
.La concession faite par l'Angleterre à
la France au sujet des réserves militaires
françaises dans la question du désarme-
ment, a mis en lumière l'intérêt énorme
qui s'attache, pour la France, à une en-t
tente avec l'Angleterre. Ainsi la garant ie,
militaire se renforce d'une garantie di-»
plomatique.
Quand on se rend compte de ces iiit
terprélations et de ces craintes, on com-i
prend alors, avec facilité, l'accueil tu-
multueux qui a été fait à l'accord naval
franco-britannique. Et l'on ne s'étonne,
plus des commentaires sensationnels et
amers que l'on continue à lire, sur cette,
affaire, dans la presque totalité des jour-
naux américains, allemands, italiens ee
anglais. Car un très grand nombre de,
nos voisins d'outre-Manche sont réso
lument hostiles à une entente cordiale,
conçue comme nous venons de l'aper-
cevoir. Les. toutes récentes déclarations,
faites à Berlin par M. Ramsay Mac Do..,
nald, chef du parti travailliste, nous en-*
lèveraient le moindre doute à cet égardt
si nous pouvions en conserver.
Les Français au courant des projets
et des. vues du. Quai d'Orsay tel qu'il
est dirigé par M. Aristide Briand et par.
M. Philippe Berthelot, savent très bien
que ces interprétations ne correspondent,
nullement à la réalité. S'il a pu être,
question d'harmoniser les plans de dé-,
fense nationale français et britannique,
les gouvernements de Paris et de Ion.
dres, si désireux queii4 soient de s'ap-
puyer l'un sur l'autre, n'ont pas songé
un seul instant à régenter les destinées,
du vieux monde. Ils savent également,
que notre ministre des affaires étran-
gères se garderait bien de prendre une.
initiative qui puisse compromettre, l'œu-i
vre de Locamo — dont il est si légitime-
ment fier — ou élever un obstacle tan-
gible sur la route qui conduit au rappro-
chement franco-allemand, jugé plus queÀ
jamais nécessaire. -,.
Trop souvent, on oppose la politique,
de l'entente cordiale à celle du rappro
chement franco-allemand. C'est là eri,
même temps une sottise et une mala,
dresse. Les deux politiques, au contrai
re, se complètent mutuellement. L'une,
sans l'autre, c'est la sujétion à la Gran-.
de-Bretagne ou l'asservissement à l'Al
lemagne. L'une jointe à l'autre de*
vient — non point un puéril jeu de ban
lance — mais les deux bras d'un même
corps.
C'est ce qu'on devrait se dire à Berliri.
et ailleurs pour ne pas se méprendre,
sur la politique française d'aujourd'hui,
qui tend, sans ambition impérialiste,
à organiser lEurope sur la base du statu
quo territorial de 1919.
Jean-L. DAURIAC.
NOTE DU JOUR
Du général au particulier
Il ne faut pas conclure, dit-on, du par-
ticulier au général. D'accord. Mais il faut
encore moins conclure du général au par-
ticulier.
L'Angleterre, pour tout le monde, est
une grande et forte nation, puissante et
riche. Son industrie est magnitiaue, Elle
a la maitrise des mers. Les grosses fortu-
nes y abondent. Et, par-dessus tout cela,
le signe du sterling plane comme le
signe même de la fortune que rien ne peut
entamer, Du haut de sa terre, si je peux
dire, l'Anglais peut contempler insolem-
ment la misère des autres peuples.
C'est le général. Et l'on en pourrait
déduire que le particulier, en Angleterre,
lui aussi, est riche, plus riche que partout
ailleurs..
Or les journaux de Londres racontent
l'histoire lamentable d'un Anglais qui a
déclaré ceci :
cc Je consens a me laisser inoculer les
germes du cancer, de la typhoïde, de la
malaria et à me livrer à n'importe quelle
opération chirurgicale pourvu qu'elle ne
me rende pas totalement aveugle. »
Cet Anglais est-il un condamné à mort ?
Non pas. C'est beaucoup plus simplement
un ouvrier mineur du pays de Galles qui
ne peut plus nourrir ses cinq enfanls.
Il a quarante-deux ans, il est en pleine
santé mais. il ne peut trouver de travail
nulle part et sa femme et ses petits n'ont
plus que la peau sur les os. Aussi ferait-il
n'importe quoi pour trouver quelques res-
sources.
Voilà. ;
Du général n'allez pas conclure que tous
les Anglais sont riches: Ne concluez pas
davantage dit particulier que l'Angleterre
est L.I pays pauvre.
La vérité est que l'Angleterre est un
pays riche dont la fortune est payée de la
misère de beaucoup d'Anglais. Ou, encore,
qu'on peut plus facilement manger avec
un franc de cinq sous qu'avec une livre
de sent, vingt-cinq francs.
Jacaues BARTY.
Le pot de terre
contre le pot de fer
OU L'ESPRIT DE REVENDICATION
NE SUFFIT PAS A SUPPRIMER
LES LOIS ECONOMIQUES
par R. GENTON
Vous avez bien entendu parler de l'Aus-
tralie, si vous n'y êtes pas allé. Vous avez
certainement lu de magnifiques exposés où,
il était dit que, dans ce pays neuf, où il
n'y avait pas de bourgeoisie à déposséder,
pas de traditions ni de lois oppressives à
démolitr, le progrès pouvait marcher sans
entraves et, sous le règne bienfaisant du
syndicat souverain, maître du pouvoir,
créer un paradis idéal.
En Australie, jes syndicats ouvriers s'é-
taient fait octroyer les lois les plus « con-
fortables » du monde. Ces socialistes, ces
internati'onalistes avaient fait preuve de la
plus complète intransigeance en fait de
protectionnisme et de nationalisme, parce
qu'ils y trouvaient leurs ayantages, qu'ils
faisaient passer avant les grands princi-
pes. Ils avaient fermé leurs frontières à la
main-d'œuvre de couleur, ce qui les met-
tait à l'abri de la concurrence.
De cette façon, les salaires étaient of-
ficiellement garantis. Evincés les Chinois;
évincés les nègres. Quant aux blancs, sur-
tout après 1a guerre, vous pensez bien
qu'ils n'affluaient pas; les ouvriers aus-
traliens n'étaient pas inquiets de ce côté.
Or, voilà que. dans la mère patrie, lei
chômage sévit dans les proportions que
vous savez. L'Angleterre cherche à éva-
cuer ses chômeurs vers ses dominions. n
en est débarqué un certain contingent en
Australie. On aurait préféré les voir res-
ter chez eux; mais enfin, on n'osa pas les
renvpyer, on les accueillit et ils furent
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