Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-12-21
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 21 décembre 1903 21 décembre 1903
Description : 1903/12/21 (N12337). 1903/12/21 (N12337).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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OÎ3STQ CENTIMES le Numéroé PARIS a DEPARTEMENTS Le 3>J\imêï»o CINQ CENTIMES
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AUX BUREAUX DU JOURNAL
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N° 12337. Lundi 21 Décembre 1903
29 FRIMAIRE AN 112
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NOS LEADERS
Srllnl rtinK
Il vaut mieux s'abstenir de com-
menter un crime et de discuter les
circonstances qui l'ont entouré tant
que la cour d'assises n'a pas rendu
son verdict. Le rôle de la presse est de
renseigner le public, et non pas de ju-
ger les accusés. L'opinion publique
n'est que trop portée à se passionner
et à imposer sa volonté, parfois mal
éclairée, à un jury souvent disposé à
se laisser intimider.
A propos de cette émouvante affaire
des « empoisonneurs de. Marseille »,
nous ne nous départirons pas de la
méthode que nous avons toujours sui-
vie et que nous suivrons toujours.
Mme Massot a-t-elle vraiment empoi-
sonné son mari ? M. Hubac a-t-il été
l'instigateur du crime? Ce sont des
questions que nous sommes mal placés
pour trancher, et que nous n'essaye-
rons pas de trancher..
Au surplus, le drame se joue dans
une atmosphère de mystère romanes-
que qui n'est point faite pour faciliter
une enquête exacte. Autour de cette
aventure marseillaise flotte un brouil-
lard surprenant : une brume méditer-
ranéenne traversée de quelques flèches
de soleil.
***
Un rayon lumineux permet seule-
ment de voir ceci : qu'il y a deux
parts à distinguer dans les récits de
tragédie apportés par les dépêches. Le
dessin principal de l'action se discerne
malaisément. Il est mêlé à une profu-
sion d'ornements elde caprices anec-
dotiques. Anacréontique ou Shakes-
pearien, l'amour ne renonce nulle part
a la fantaisie. Il « brode », comme l'en
• accuse M. François de Curel.
On croyait au moins tenir la preuve
matérielle du crime, avec la lettre
trouvée par la domestique Lucie Clap
— lettre au cours de laquelle Hubac
donnait des indications à sa maîtresse
pour hâter la mort de M. Massot. Or, vous
savez la curieuse explication donnée par
les accusés de l'existence de ce papier si
compromettant. Pour créer un lien im-
possible à rompre entre Hubac et elle,
Mme Massot aurait exigé que son
amant écrivît sous sa dictée la lettre
destinée à emprisonner leur amour
dans la complicité d'un crime imagi-
naire. Car la lettre aurait été écrite
après - la mort de M. - Massot ; -- - car M.
Massot n aurait jamais absorbé une
goutte de poison.
Mais que vais-je vous raconter-là ?
Vous connaissez ces détails aussi bien
que moi.
Le récit des amants de Marseille est
invraisemblable, dites-vous? Oui, telle
est l'impression pour ceux qui lisent
froidement, a Paris, de pareilles diva-
gation* s. A Marseille, dans la société
où les accusés ont vécu, on raisonne,
pnraît-il, d'une manière différente. La
Provence subit le charme d'une senti-
mentalité déjà italienne ; le mal est
dangereux, car il mêle du réalisme
sensuel et du mysticisme. Nous som-
mes loin du Sentiment du Nord et de
ses langueurs blondes. Il y a de la folie
latine dans l'histoire des empoison-
neurs de Marseille.
En somme, il est aussi difficile de
croire à la réalité du crime que de
croire à Finnocence des accusés. Du
moins, les mobiles du crime sont inin-
telligibles pour un esprit sain. Que
voulait M. Hubac?Epouser Mme Massot ?
Que voulait cette dernière? Epouser
Huhac. Il fallait donc supprimer Mas-
sot.
***
Je vous arrête. Il était plus simple
de rompre le lien conjugal que de tuer
le mari. L'empoisonnement, c'était la
sointion. rom a n tique ; le divorce, c'é-
tait la solution raisonnable— facile.
Est-ce comme trop « bourgeois » que
le commode divorce a été écarté ? Al-
lons donc ! Même. en Provence, l'a-
monr ne se fait pas meurtrier unique-
ment pour se donner en spectacle.
Cherchons mieux. Mme Massot n'est
pas seulement une amoureuse, c'est
encore une « religieuse ». Elle aurait
répugné à transgresser ouvertement
• les instructions de l'Eglise qui se re-
fuse à rompre les liens conjugaux par
lesquels les fidèles se sont unis. Les
-scrupu les mystiques ont causé quantité
de crines. incohéren ts. Toutefois, sans
doute Mme Massot aurait-elle eu re-
cours au divorce qui lui assurait le
bonheur sur cette terre, quitte à se
> débrouiller plus tard avec le Juge su-
prême. ;i
- Le problème avait, hélas, une autre
face. Quelqu'un d'admirablement do-
cumenté sur cette affaire, me dit i *
— Mme Massot n'était point seule à
entretenir des scrupules religieux; M.
Hubac était .dans un état d'esprit iden-.
tique. Surtout, la famille Hubac, en-
tièrement attachée aux opinions cléri-
cales* n'aurait jamais accepté qu'un de
ses membres épousât une femme di-
vorcée.
Nous souhaitons que Mme Massot et
M. Hubac échappent aux terribles
charges quient sur eux.Mais,quelle
que soit la fin du procès, le public saura
en tirer la morale qu'il comporte. Il
est odieux et ridicule que,dans un pays
où s'applique la loi du divorce, l'Eglise:
parvienne à en gêner le - fonctionne-
ment. Le divoree est assurément une
extrémité fàcheuse. Il permet cepen-;
dant de sortir sans grande difficulté de
situations qui menacent de devenir
tragiques. Que le mariage soit brisé
par un divorce ou qu'il soit brisé par
un crime, peu importe aux yeux de
l'Eglise. Nous finirons bien par arra-
cher les consciences françaises à l'ob-
session puérile et inquiétante de la
moralité religieuse.
Hugues Destrem.
LE BIEN DE FAMILLE
Le Conseil d'Etat est en train
d'examiner un projet que divers
bons esprits caressaient depuis
longtemps, et que M. Mougeot:
a fini par faire sien : nous vou-
lons dire le bien de famille, ce]
que les Américains nommènt le Homestead,
la maison familiale insaisissable, enfin ce
que le directeur du Courrier du Soir appe-
lait hier.assez spirituellement « l'institution
du majorat pour les pauvres ».
Il est à souhaiter que l'examen du Con-
seil d'Etat soit favorable à cette réforme :
elle créera des citoyens, des hommes libres
dans leur maisonnette inexpugnable, et par
conséquent des hommes très attachés au
pays qu'ils habitent. Nous nous réjouissons
du bien qu'une telle réforme pourra opé-
rer. - -
Et nous y avons quelque mérite, car
cette réforme, nous semble-t-il, ne pourra
guère faire sentir ses bienfaits dans les
centres où nous, tiavailleurs des villes,
- --- r-. 1 - , 1' 1
nous sommes connnes, réduits a i état cie
locataires, traitables et corvéables de tant
de façons. Lorsque l'ouvrier des champs
aura, par la loi du Homestead, conquis dé-
finitivement sa maison et son champ, il
faudra bien chercher et tiouver quelque
avantage analogue pour l'ouvrier des
villes.
Le homestead francais n'est encore qu'à
l'état d'avant-projet, et, on ne nous dit pas
dans quelles limites cette nouvelle forme
de propriété insaisissable, — peut-être
aussi incessible — pourra s'installer chez
nous, dont le Code civil est si mal préparé
à la recevoir; nous croyons que l'opinion
l'acccueillera avec faveur. Il nous semble
bien, au surplus,qu'un tel progrès ne serait
pas sans une répercussion heureuse sur le
problème de la natalité ; une répercussion
heureuse aussi sur la puissance d'écono..
mie des travailleurs, à qui ce but nouveau
sera offert : la conquête du foyer inviola-
ble, à l'abri de l'huissier. — Ch. B.
- -"
Di VACATIONS
M. Emile Ollivier qui, par instants, a des
renouveaux d'énergie, a publié hier dans le
Gaulois, un article où se retrouvent toute l'ar-
deur' poétique, toute la fougue des anciens
temps.
Il est toujours intéressant de lire les appré-
ciations que font des personnalités à qui il fut
donné, à un moment de leur existence, d'être
des conducteurs d'hommes, sur les événements
du jour. Figés dans les conceptions étroites de
leur âge mûr, cesvieiliards n'ont point changé
alors que tout s'est transformé autour d'eux.
Us se sont ancrés dans leurs idées, ils les con-
servent immuables et leur cerveau, telle une
forteresse triplement enceinte où n'arrivent
point les bruits, du dehors, reste formé à
toute compréhension des événements contem-
porains.
M. Emile Ollivier a fait une découverte au-
près de laquelle celle du radium est l'enfance
de l'art.
Les républicains demandent à cor et à cris la
séparation de l'Eglise et de l'Etat. Pauvres in-
sensés! Ils ne savent ni ce qu'ils font, ni ce
qu'ils font ni ce qu'ils veulent 1 Mais la sépa-
ration de l'Eglise et de l'Etat, ils l'ont, puis-
qu'ils ont le Concordat.
Nous sommes un peu « nouvelles couches »
pour nous expliquer cette manière de voir.Le
Concordat constitue, pour l'ancien ministre de
Napoléon III,la séparation définitive de l'Eglise
et de l'Etat. Voilà ce que l'on fera difficilement
entrer dans nos cervelles.
Il est vrai que M. Emile Ollivier reconnaît
qu'il y a beaucoup à faire encore pour que
cette séparation de principe soit une réalité
pratique, et c'est pour cela, sans douter que
nous ne saisissons pas bien. Mais à qui la faute?
« L'Eglise a loyalement respecté la séparation,
et ce n'est pas à elle qu'il faut demander quoi
que ce soit pour la rendre plus complète. C'est
l'Etat qui a fait obstacle à la séparation et a
en quelque sorte ressuscité l'union qui existait
sous l'ancien régime. »
Qui l'eût cru ? M. Emile Ollivier, daqs sa
retraite, ifa-t-il pas entendu les déclarations
de guerre du clergé ? N'a-t-il pas connaissance
de l'hostilité des évêques et de l'insolence des
prélats? Ne sait-il pas que les églises se sont
transformées en salles de réunions où la Répu-
blique ôst flétrie quotidiennement, à grand
renfort d'injures grossières, et que du haut de
la chaire de vérité devenue tribune, on ne cesse
de prêcher la haine de n,os institutions?
• S'il ignore tout cela, il aurait mieux fait de
garder le silence, cela lui eût évité de se rén-
dre ridicule en lançait des àmrmations si con-
traires à la vérité des faits que nous n'aurons
pas la cruauté de les apprécier, et, en traitant
les républicains qui demandent la séparation
de banqueroutiers et de voleurs.
Des apostrophes pareilles ne sont pas des
arguments, mais des calembredaines. M. Olli-
vier a donc perdu une bonne occasion de se
taire.If est toujours pénible de voir un homme
politique en arriver à d'aussi misérables
moyens dedisoussion, Et ce sera pour lui un
juste châtiment de voir les adversaires de ses
idées accueillir ses paroles, non par un haus-
sement d'épàuîés, mais par un geste de pitié.
— Charles Dcmyi ;, ; «. -
GUILLAUME 11 ET LE HUIS CLOS
IDe notre correspondant particulier
Berlin, 19 décembre.
Dans les cercles de la «cour on se raconte que
l'empereur Guillaume, par un ordre de cabi-
net confidentiel, a envoyé un blâme aux juges
du conseil, de guerre de Forbach. Il leur re-
proche sévèrement de n'avoir pas prononcé le
huis clos dans le procès du lieutenânt Bilse
accusé d'hoir publié le roman la Petite Gar-
-,
: ,_,.",re¡. - .-
A LA CAMPAGNE
FORETS MINUSCULES
Vente d'une forêt à l'Hôtel Drouot. —
Arbres majestueux, arbres pyg-
mées. — Au Japon. — Un art
bien oriental. — La nani-
sation.
J'ai lu, tout dernièrement, dans les jour-
naux, qu'une petite forêt avait été vendue
dans l'intérieur mêmè de l'Hôtel Drouot, dans
la grande salle des ventes parisiennes.
Je savais bien qu'on vendait de tout là-bas,
mais il ne m'était jamais venu à l'idée qu'on
y pût vendre une forêt, même toute petite. Je
dois dire que la lecture de la première partie
de l'entrefilet qui annonçait cette vente m'avait
laissé quelauo peu rêveur. Fort heureusement,
la fin donnait l'explication de l'affaire ra'ap-
prenaitque la forêt ainsi mise en vente n'était
composée quo d'arbres minuscules, importés
du Japon tout spécialement pour subir le fou
des enchères.
La nanisation des arbres au Japon
Aux ombrages séculaires des grands ar-
bres, aux futaies majestueuses qui font l'or-
gueil de nos forêts domaniales, les Japonais,
par antithèse sans doute, semblent préférer les.
arbres pygmées et les forêts minuscules. Ce
qui, à nos yeux, constitue une anomalie, une
étrangeté, apparaît aux leurs — peut-être
parce qu'ils sont bridés ? — comme le comble
de la perfection et comme la quintescence d'un
art bien oriental.
Cela tient, probablement, aux traditions, au
milieu dans lequel vivent les Japonais et à
Testhétiquo qui leur est propre. -
Chacun sait que les Japonais sont des pe-
tits hommes, disons mieux, des hommes petits,
Jet qu'ils possèdent de petites maisons entou
rées de jardins lilliputiens. De grands arbres,
dans ces petits jardins, près de ces maisons
minuscules paraîtraient les écraser par leur
'majestueux ombrage. Cela explique assez la
passion des Japonais pour les arbres nains et
pour tout ce qui s'accorde,comme dimensions,
à leurs très petites personnes. Pour eux, tout
ce qui est pstit, et même tout ce qui est dimi-
nué de taille, se rapproche de l'idéal qu'ils se
font de la perfection.
G est à cause de cela, justement, qu'ils ont
eu l'idée de créer, par un travail de longue
haleine, ies arbres nains dont ils se montrent
si liers.
L'atrophie des végétaux, ou, pour em-
ployer l'expression e oiisacré,,, la nanisation,
qui leur permet de réduire dans des propor-
tions considérables la taille d'un certain
nombre d'arbres forestiers, est le résultat de
: causes physiologiques qui, elles-mêmes, sont
généralement la conséquence CIe procédés cul-
turaux, aidés par l'influence du climat spécial
dont jouit le Japon.
- Le opérations culturales portent sur l'ali-
mentation du végétal et sur diverses opérations
,de taille, de greffage et autres opérations si-
milaires qui, en résumé, ne sont en quelque
sorte que de la mutilation savante. Le jeune
arbre que l'on veut naniser-doit subir de fré-
quent recépages; on tord, on contourne ses
rameaux et on le soumet à de nombreux rem-
potages. Les récipients dans lesquels on en-
ferme ses racines, après chaque rempotage,
sont aussi réduits que possible; enfin, à cha-
que rempotage, les racines sont raccourcies et
réduites à leur minimum. Tout cela est fait
dans le but de paralyser les fonctions de nutri-
tion et de provoquer un ralentissement dans
la croissance de l'arbre soumis au régime de
la nanisation.
Les essences dociles à la nanisation
Dans le monde des arbres, il est certaines
espèces qui se prêtent mieux que d'autres aux
déformations qu'on veut leur faire subir.
Ce sont les arbres à feuilles persistantes et
plus spécialement ceux qui appartiennent à la
grande famille des Conifères qui donnent les,
meilleurs résultats. Parmi les espèces qui con-
viennent tout particulièrement à la formation
des arbres pygmées, on peut citer : les Pinus
Parciflora, Pinus Densiflora, Pinus Massoniana,
Pinus Thunbergi, les Chamœcypasis obtusa, et
C. fiucoïdaM larix letitolepis, le Criptoniéria
Japonica, le Tsulga SiéboLdü, le Ginyko-Cilo-,
6a,etc.
Toutes ces espèces saprêtenttrès bien à la na-
nisation ; elles se contentent de peu de nourri-,
ture et peuvent souffrir sans mourir brusque- 1
ment. Ces arbres ont, en outre, des racines
très vigoureuses susceptibles de s'allonger ra-
pidement sous l'action de quelques soins spé-,
ciaux et c'est grâce à cette vitalité particulière:
des organes, qu'à un moment donné; il est pos-
sible de constituer promtement des tiges aé-
riennes qui portent la ramure à une assez
grande distance de l'axe principal. Tous les
Conifères soumis à la nanisation donnent l'il-
lusion de véritables réductions d'arbres géants,
car le feuillage reste en parfaite harmonie avec
les dimensions de la ramure.
Les Japonais ne soumettent pas que les ar-
bres à feuilles persistantes à la nanisati_ on.
Ils s'adressent aussi, pour cette opération, aux
végétaux à feuilles caduques.
Les résultats qu'ils obtiennent avec ces der-
niers ne ressemblent en rien à ceux que leur
fournissent les-conifères. : , (î
Bien que le tronc et la ramure soient très
rapetissés, les feuilles conservent à peu près
les mêmes dimensions que sur les grands ar-
bres ; l'aspect das ambres feuillus nanisés n'a
rien de bien, séduisant,, ils ont plutôt un air
lamentable.
Les' végétaux féuïlïus' Jeg. plus utilisés pour
la nanisation appartiennent rà quelques espè-
ces japonaises : Lw Styrax japonica, le Lager.
troemia irtilka, Je Gycas revoluta, puis quel-
ques variétés de chêné$, de prunler et d'éra-
ter
bles spéciales au Japofj;'' •
Un art déjà vieux l'
La navigation des arbres est pratiquée, au
Japon, et en Chine,- depuis de? siècles. Getta
suite d'opérations,pratiquées ,(^ns le but d'ob-
.tenir des arbres pygmées, èst considérée là-
bas comme un àrt vèVitàbléV7 ",.
Cet art a d'ailleurs ses" écaias; 'ses 'maires,
ses amateurs, tout comme;. la! peinture:, et la
sotylpture ont les leurs en ..Europe^,,,
, Ls maîtres dans l'art de la iranisatiôp si-
ghent leurs ehéfs-d'(éùvre VtëgétaUx, comme
nos peintres 'et 'nus sculpteurs signent ■ leurs
tableaux ou leurs statues. i ,
C'est dire, en peu do mots, que la. nanisation
est considérée au Japon comme une clrose ab-
solument artistique, demandant ffe l'habileté,
du temps, de la patience et de la ténacité.
La nanisation desarbreSç, est tellement en-
trée dans les mœurs dii Japon que beaucoup
de jeunes, Japonaises consacrent la majeure
partie de leur -temps à'ce genfô de travail.
C'est, en somme, dans tout; le-pays, une
vraie-passion qui sévit, passion peu dange-
reuse, mais qui indique d une façon suffisam-
ment claire que ce peuple si rômuant a sur les
faits et sur les choses âne conception et une
compréhension toutes différentes des nôtres.
- '• • • A. MONTOUX.
—————.—————— ———— ———————
LE GAZ DE PARIS
M. Navarre,- président, et les membres du.,
bureau de la commission du gaz se sont ren-
dus hier matin au ministère de l'intérieur pour
accomplir la mission que leur avait donnée
; hier le Conseil municipal « d'obtenir du gou-
vernement le dépôt du projet de régie directe».
M. Navarre et ses collègues verront encore,
avant ce dépôt, M, Combes, président du con-
seil, à qui ils ont demandé une audience pour
le début do la semaine prochaine.
■ ■
AU 19e ARRONDISSEMENT
Compte rendu de mandat du citoyen
Charles Bos
Notre rédacteur en chef, député de Belle-
ville et du Pont-de-Flandre, a rendu compte
de son mandat, hier soir. au préau des écoles
do la rue Barbanègre. C'est au milieu d'une
salle comble, qu'une centaine d'énergumènes
nationalistes venus des quatre coins de Paris-
avaient tenté d'envahir, que le citoyen Char-
les Bos a développé toutes les questions si
intéressantes qu'il a soutenues à la Chambre.
A l'issue do la réunion, l'ordre du jour sui-
ivant a été voté par tous les républicains ra-
dicaux et cadicaux-socialistes :
ORDRE DU JOUR
Les électeurs de la deuxième circonscription du
19e arrondissement, réunis au nombre de 800envi-'
ron au préau des écoles delà rue Barbanègre,1
après avoir entendu le citoyen Charles Bos, dé-'
puté, dans son compte rendu de mandat, et les'-
Réponses aux questions qui lui ont été posées, le
félicitent de s'être toujours inspiré de son pro-
gramme, et de l'avoir appliqué dans tous ses
votss, notamment de son heureuse campagne pour
l'abaissement des frais de justice, l'agrandissement
des bassins de la Villette, et la lutte qu'il a si
vaillamment soutenue contre les congrégations,
en faveur de l'enseignement laïque:
Lui renouvellent leur entière confiance et l'enga-
gent à continuer dans cette voie si nettement répu-
blicaine et anticléricale. Ils lèvent la séance au cri
de: « Vivo la République démocratique et sociale! »
— Signé : Bocquin, Pocquet, Landragin, Chamil-
lard, Merle.
A ce moment, comme les nationalistes qui
se trouvaient dans la salle tentaient une vague
et illusoire manifestation hostile à la Hépubli--
,que et au citoyen Charles Bos, ils ont été con-
spués par tous les républicains présents. On a
entendu les cris de : « Hou ! hou ! la calotte !
BarilJior à Charenton ! — A bas la calotte ! —
Déroulède à Charenton ! »
Penauds et honteux, les nationalistes se sont
enfuis, et la sortie s'est effectuée sans incident"
au milieu de l'enthousiasme Ses républi-
cains.
Voir à la 311 pagre
les Dernière's Dépêches
SOUHAITS RIMEs
Afin d'arriver bon premier, M. Jules Blan-
card, de Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme),:
vient d'adresser à M. Loubet ses « souhaits du
1er de l'an 1904 ».
Et afin que ces souhaits ne s'égarent pas,:
sans être lus, au fond d'un panier ou dans la
cheminée d'un secrétaire peu favorable aux
petites gens, M. Jules Blancard a communi-:
qué à la presse la copie imprimée de ces sou-
haits.
Ils tiennent une page; pnt pour titre Un:
point d'histoire ; - pour sous-titre : 17 août
'1903. Loubet, en villégiature en son château de
Mazenc, s'échappe incognito à la fête votive de
Pierrelatte; -- et nous apparaissent sous la
forme de six sonnets, dont le dernier est inti-
tulé : Invocation.
Dans le premier sonnet M. Blancard raconte
comment il rencontra, d'une façon tout im-
prévue, le Président de la République à la fête
de Pierrelatte. -
Qui donc, cet illustre perdu,
Déambulant et confondu
Au sein de tout ce monde en fête ?
C'est de Loubet la bonnette,
Avec son barbiohon pointu,
Son - regard profond bien connu,
Sa bouche en cœur faisant risette
Et le teint frais d'enfant qui tète.
Dès lors, m'approchant confiant,
J'en reçois accueil bienveillant,
Avec son air de bonhommie,
Don, chez Loubet, si précieux
Qu'il nous le peint à tous les yeux,
Admirable de courtoisie.
Les autres sonnets sont sur le même ton,
enthousiastes, familiers, un tantinet mali-
cieux, et cependant tout pleins d'admiration
et d'affection pour le Président.
Voici les derniers vers du dernier sonnet :
La fortune à souhait semblant souscrire en blanc, -
A tes moindres désirs semblant prêter le flanc,
Sache tirer parti d'une faveur féaonde
Au profit des petits et sur terre et sur l'onde j
Car ce n'est rien de vivre, il faut savoir mourir.
Après un vain triomphe à quoi sert de courir.
Si c'est pour n'entasser que gloires éphémères ?
Dame Postérité ne veut quô positif ;
Or, pour haut fait viable avoir à ton actif,
Inscris sur ton drapeau : Retraites ouvrières I
Evidemment, tous les poètes géniaux, genre
-Coppée et Rostand. Vont se tirébouchonner à
la lecture de cette « poésie » si économique-
ment riméé et dont les inversions sont encore
plus effarantes que celles de M'. Moréas. Soit ;
je concède volontiers qu'elle fait tout d'abord
sourire, et qu'on se demande pourquoi M. -
Blancard a éprouvé le. besoin de cadencer et
de rimer ses souhaits de 'bonne année. Mais
bientôt, malgré soi, on est pris par la bonhom-
mie, par l'honnêteté, par la touchante naïveté
qui se dégagent de ces bouts-rimés, et l'on ar-
rive à trouver que celui qui iospire de tels
sentiments doit être lui-même un excatlent
homme — un brave homme.
La facture de ces vers ne vaut certes pas
celle des poètes officiels attachés aux Cours
d'Europe — mais quclesf le poète officiel qui
Userait dire àlson souverain, empereur, roi ou
tsar :
, : Inscris ,sur ton drapeau : Retraites ouvrières,
G. DE VORNEY.
-
}' !',. 1', "-
NOUVELLE^ MÊTHOdE ,
POUR ATTEINDRE LE POLE NORD
,'; (Dé nôtfë correspondant pardeutierj
Vienne, 19 déoembye.
Dans le monde scientifique on s'occupe sé-
rieusement d'un projet bien original de l'ingé-
nieur "M. Ferdinand.Lupsa pour aller au Pôle
Nord. ,,
., Plus de navife ni de ballon, pas même de
sous-marin; tel est la principe du futur explo-
rateur. ',¡', .,
On n'a qu'à se laisser porter par le courant
polaire et on arrivera immanquablement au
Pôle et voici pâr quel procédé :
Qu'on érige une case bien spacieuse et mu-
nie de provisions sur un champ de glace po-
laire près du passage de Behring.
Cet icefidd formant une île flottante est
poussé par le courant vers le Pôle. Pour y ar-
river, il faut d'après les calculs approximatifs
3 ans environ; il faudrait donc se munir de
provisions pour 4 ans.
On voit que l'auteur du projet s'est inspiré
de la lecture des romans de Jules Verne.
Quoiqu'il en soit, il est sur le point de réu-
nir les fonds nécessaires à son entreprise.
A LA MAIRIE
ET A L'EGLISE
La déception d'un maire républicain.
— Les quêtes à destination étran-
gère. - La comptabilité des
Fabriques.—Inutile contrôle.
— La solution.
Nous étions récemment conviés à ce qu'on
appelle un mariage select; c'est une aubaine
assez rare, surtout en province, et il se trouva
que, par exception, quelques-uns des invités,
plus osés que beaucoup d'autres, prenant le
mariage civil au sérieux, s'étaient fait un de-
voir de se rendre, ce jour là, à l'Hôtel de
Ville, où M. le maire devait d'ailleurs pronon-
cer une de ces chaleureuses allocutions de cir-
constance qui lui sont familières. Ce magis-
trat possède, en effet, un incontestable talent
de parole ; son républicanisme est conciliant
et il cumule, sans faillir à ses multiples de-
voirs, les fonctions d'édile avec un haut grade
universitaire qui lui permet de rendre d'inap-
préciables services aux établissements d'onsei-
gnement laïques de la cité dont il est le na-
turel protecteur.
Quête. fructueuse
Aussi no fûmes-nous, en aucune façon,
surpris quand, après la solennelle déclaration
qui unissait les jeunes époux, nous fut pré-
sentée la bourse traditionnelle où devait tom-
ber notre offrande en faveur de la caisse des-
écoles de la localité.
L'assistance était riche ; la quête devait être
fructueuse et déjà l'on pouvait escompter les:
besoins nombreux auxquels, pendant l'hiver:
qui s'annonçait rude, la municipalité serait en
mesure de pourvoir.
Cet espoir fut de bien courte durée et nous
renoncerons à rendre la désillusion de l'hono-
rable magistrat en ne voyant apparaître, au.
fond de l'escarcelle, au lieu des pièces d'or
qu'il y cherchait en vain, que quelques sous,
fourbis soigneusement à l'avance, en manière
de trompe l'œil et représentant une somme ab-
solument dérisoire !
Si la Caisse des écoles est vide, si les livres
font défaut, si la cantine scolaire devient in-
suffisante, si les enfants pâtissent à la laïque,
qu'importe à ceux qui vont à l'église prochaine
recevoir labénécti-ction du curé-doyen avec,
en plus, celle du Saint-Père quand on y met le
prix.
Oh ! la quête sera abondante ici. et elle ne
courra pas le risque de s'égarer dans la Caisse
des écoles des enfants du peuple !
Purifions-nous
Il fallait passer devant M. le maire ; subir
la harangue, avec quelle impatience, d'un
homme qui s'avise de tendre la bourse en fa-
veur d'une oeuvre maçonnique au premier
chef; c'en était trop; on court se purifier à l'é-
glise. « Si j'ai jamais regretté un sou, dans
ma vie, c'est celui-là ! », s'écriait la mère du
marié en quittant l'Hôtel de Ville.
« Enrichissez-vous, conseillait le père Di-
don à ses élèves, à l'une de ses distributions
de prix,et vous ferez l'Eglise puissante et forte.»
L'illustre dominicain n'avait vraiment rien à
apprendre, à cet égard, aux gens d'Eglise, et
quand il s'agit d'encaisser, leur ingéniosité est
sans pareille : Les Petits Chinois leur ont plus
donné qu'une rançon de guerre. On a abusé de
la Sainte-Enfance; on prétend que Saint-An-'
toine de Padoue rond plus qu'il ne reçoit — il
est recommandé comme un placement de tout
premier ordre. Des femmes de distinction ne
croient pas déchoir eu quêtant pour leurs dé-
funts maris des messes à domicile, ce sont les
plus efficaces. L'évêché centralise les intentions,
en espèces sonnantes bien entendu, et, n'était le
Conseil d'Etat qui, parfois, met un frein à la
fureur accaparante des prélats, le prix des
fondations de messes (et quelles solides fon-
dations, messeigneurs!) atteindrait des taux
exhorbitants !
Nous ne sommes plus au temps de l'ancienne
coutume, qui ne prévoyait que quatre cas où
le droit de quête était autorisa. pour aller,
par exemple, en voyage d'outre-mer visiter la
Terre sainte. On va ma;ntenant à Lourdes et
autres lieux. C'ést infiniment plus productif et
la mense épiscopale de Tarbes en sait quelque
chose !
- L'on compte, écrivait Voltaire, 98 ordres monas-
tiques dans l'Eglise, 64 qui sont rentés et 34 qui
vivent de quêtes, sans aucune obligation de tra-
vailler ni corporellement ni spirituellement pour
gagner leur vie, mais seulement pour éviter l'oi-
siveté.
Où va l'argent ?
Que de chemin parcouru depuis cette épo-
que et quo penserait de nos jours le grand
philosophe en lisant les statistiques de M.
Combesl,Que sont devenus ces 3i ordres qui
vivaient sans travailler ? Us ont suivi le pré-
cepte : croissez et multipliez et. se sont enri-
chis ! Le Père Didon doit être content.
- D'où vient l'argent? on ne le sait que
trop; qu va-t il? c'est un secret impéné-
trable.
La comptabilité des fabriques qu'on essaye
do réglementer reste occulte ; elle se soustrait
à tout contrôle et ce n'est pas pour elle, sem-
ble-t-il, que le Parlement a légiféré.
Nous n'ignorons pas que les conseils muni-
cipaux sont annuellement appelés à donner
leur avis sur les comptes et budgets des fabri
ques et môme qu'ils peuvent exiger la com-
muuication. sans déplacement, des registres et
pièces de comptabilité (avis du Conseil d'Etat,
du 14 juin 1878, ville de Moulins).
- Nous ne faisons nulle difficulté de reconnaî-:
tre qu'après une résistance de forme, les curés
ont, pour la plupart, paru adhérer aux près
criptions légales ; mais avec quel sans-gêne
savent-ils échapper à toute constatation sé-
rieuse ! « Nous demander le produit des quê-
tes 1 mais nous sommes pauvres comme Job 1»
et, de fait, le compte rendu des délibérations
d'un conseil municipal que nous avons sous
les yeux nous apprend que, sur trois paroisses
d'une ville notoirement dévote, deux églises
n'ont perçu que des sommes insignifiantes, la
troisième présente un état négatif. ,-
L'objet des quêtes
Tartuffe n'est pas souvent à bout d'argu-
ments : aux explications sollicitées, on ré-
pond que, presque toutes les quêtes faites,
dans les églises ayant un objet étranger, elles
ne sauraient être soumises à aucun contrôle et
que le produit des autres quêtes pouvant être
affectées au service paroissial est de nulle va-
leur, en raison même de la rareté des quêtes
en question-. - ,
Des quêtes ayant un objet étranger ! - -
Comment? Des quêtes de toute nature dont
à l'Eglise et au dehors on accable les fidèles,
aucune ne viendrait en déduction des frais du
tulle, de sorte qu'en droit strict, les curés
pourraient s'autoriser de l'insuffisance des re-
cettes de.la fabrique (et l'on sait s'ils s'en pri-
vent) pour, à un moment donné, réclamer le
concours de la commune ou de la commission
départementale ou le curé possède toujours
qiielque.,Inflii,ent appui ?
L'Eglise invoque ses charges; elle dissimule:
ses ressources; les quêtes ont un objet étranger
et t'est l'Etat qui paie.
;,icnnc prête plus, nous le reconnaissons, a
l'équivoque, que l'article 21, § 7, de la loi du
18 juillet 1837 qui, à la Chambre et au Sénat,
a donne Heu successivement aux interpréta-
tions les _.plus contradictoires. En somme, la
clergé fait ce qu'il veut avec le texte de la loi
du o avril 1884 qui déclaré que, si le Conseil
municipal refuse ou néglige de donner soa
avis, il peut être passé outre.
Il faudrait prendre un parti.
L'Eglise est trop procédurière pour que nos
municipalités aient avantage à plaider contre
elle; nous ne le leur conseillerons jamais; il v a
des terrains sur lesquels il est dangereux de
s'aventurer avec certains adversaires.
La véritable solution qui s'impose, celle que
toute la démocratie réclame et qui ne prête à
aucun équivoque, c'est la séparation des Egli-,
ses et dé L'Etat.
Le clergé (il -s'en repentira peut-être) la fait
tous los jours ; la question est mure à peu près
partout.
Là èst le salut et nulle part ailleurs.
H. L. B.
UN MOT RETROUVÉ
Un petit jeune homme, jaloux des succès du
comte de Mun, veut, lui aussi, organiser un i
socialisme aspergé d'eau bénite. Comme il fal-
lait un titre nouveau pour un homme nou-
veau, l'idée lui est venue do couvrir les murs
d'affiches où flamboient les mots : Christia-
nisme démocratique.
Le christianisme, en effet, n'est plus démo-
cratique; il ne l'a été qu'un temps, à l'époque
où Néron se servait des chrétiens pour éclai-
rer ses fêtes orgiaques. Les corbeaux ont suc-
cédé aux martyrs. Pour le malheureux, usé
par le travail, le elergé a ces belles paroles,
consolatrices : « Soyez résigné sur la terre, la
Père Eternel vous rendra cela dans le ciel. »
Mais on ne peut se soutenir avec des litanies
et des oraisons. Le doute pénètre dans les es-
prits au sujet d'une doctrine qui favorise les'
riches et maintient dans un ascétisme obliga-
toire ceux qui peinent toute leur vie. Quelle
belle aubaine pour les fils de famille de se
donner, entre deux scirées mondaines, des
airs de prophète du xxe, siècle. Le noble fau-'
,
bourg a trouvé cela : accoler au christianisme
le mot démocratie. Tout le monde sera content.
Ils ont oublié, les inconscients, qu'il y a deux'
mille ans, un homme, qui s'appelait Jésus,
avait trouvé le « christianisme démocratique».
Son invention ne lui a pas réussi et il est mort
d'une façon malheureuse, crucifié par les clé-
ricaux de l'époque, auxquels, du reste, ceux
d'aujourd'hui n'ont rien à envier. — Ra(festin»
Nadaud.
L'ACTION ITALIENNE DANS LE SOfilALILft4tg
IDe notre correspondant particulier} y
Rome, 19 décembre.
Le ministre de la marine a reçu d'Aden un
rapport détaillé sur l'action du navire Galileo
qui a bombardé les forts et les ouvrages de
Durbu. Les sambouques des indigènes ont été
brûlées. Le Galileo est parti pour Burgat.
On croit qu'une campagne coloniale d'uno
plus vaste étendue se prépare. Le gouverne-
ment italien voudrait, dit-on, mettre lin au
semi-protectorat qui se trouve au bord de
la Mer Rouge et transforme ces territoires en,-
colonies rattachées directementà la Métropole.
LA RÉPUBLIQUE DE SAN-MARINO ESCROQUEE
fjîe notre correspondant particulier) !
Rome, 19 décembre. '?
La petite République de San-Marino 3
reçu un rude coup, qui a ébranlé: pour des
années son équilibre budgétaire. Un chevalier
d'industrie a réussi à soustraire au Trésor de.
l'Etat une somme de 225.000 fr. pour une pré- ,:
tendue affaire de timbres-poste. L'homme a
disparu avec l'argent, une fois le marché con-
clu. Deux triumvirs de la République se sont
mis à sa poursuite, mais, arrivés à Vionnec
ils ont perdu toute trace de l'escroc et ils oat
dû rentrer bredouilles, dans leur pays.
—__——————
'-- ,,:'mpi.., allemand manaca
(De notre correspondant tiarticulicr)
Dantzig, 19gdécembre.
M. LîzinsTcy, horloger à Dantzig, avait dans
sa vitrine une montre qui portait cette inscrip,
tion i
« Boze baw Polshe t (Dieu protège la Polo-
gne r ) »
Les autorités, voyant là un acte de nature à
compromettre sérieusement l'existence de l'em-
pire allemand, ont fait condamner l'horloger
à une amende de 150 marks.
LE CHANCELIER DE BULOW
ET LES JOURNALISTES ALLEMANDS
106 notre correspondant particulieri
Berlin, 19 décembre.
Le chancelier M. de Bülow a donné l'ordro
à tous les bureaux de ne donner les communi-
qués officiels qu'au Moniteur d'Empire. Les
informations et notes officieuses seront réser.
vées à la Gazette de l'Allemagne du Nord et à la
feuille lithographiée, la Berliner Korretpon-
denz.
Les journalistes qui ont l'habitude d'aller
tous les jours au bureau do la Wilhelmsstrassô
pour y recueillir des informatioas, sont dans
le désespoir et veulent adresser une pétitioa
au chancelier.
,,- --:'-
RUSSES ET JAPONAIS
-,
Tokio, 19 dëcëmbre (Source anglaise).
L'association des gardes-malades américai-
nes a offert au Japon son concours en cas ds
guerre avec la Russie..
La situation est plus menaçante que jamais.
- Cologne, 19 décembre.
On mande dé Saint-Pétersbourg, 19 décembre, à
la Gazette de Cologne :
Les renseignements suivants émanent d'une
source russe généralement bien informée :
Au cours des'récentes négociations entre la Rus-
sie et le Japon, ce dernier Etat a demandé à la:
Russie d'admettre le protectorat du Japon sur la
Corée, en oe sens que la Russie reconnaisse expli-
citement que la Corée ressortit exclusivement à la
spère des intérêts japonais et qù'olle concMe au
Japon le droit d'exercer une influenod-prépondé-
rante sur la politique de la Corée.
Par contre, le Jagon se déclare prôt à reconnaît
tre les conventions commerciales exiscant àctuei-
lemcnt-entre la Russie et la Coxiée; y compris la
concession sur les rives du fleuve Yalou, et à ac-
corder aussi dans l'avenir à la Russie tous les
droits commerciaux qui pourraient être concédés,
dans ce pays par le gouvernement japonais,
ou par le gouvernement coréen en accord avec
le gouvernement japonais, au-x autresnatians i
étrangèrea.
Le Japon réclame donc pour lui-mënie niie en-
tière liberté politique et commerciale eh Corée et i
veut/au contraire, que-la Russie y soit, traitéa
comme « nation étrangère ».
La Russie aurait mis en avant, de son côté, les,
revendications suivantes : Etablissement de points
d'appui militaires fortifiés à Masampo et àMolpho
et liberté absolue du commerce russe en Corée. v
La Russie était disposée à reconnaître le protec
torat japonais en Corée et à açcorder au Japon uney
influence prépondérante sur la politique coréenne
mais le gouvernement japonais a refusé catégorie.
OÎ3STQ CENTIMES le Numéroé PARIS a DEPARTEMENTS Le 3>J\imêï»o CINQ CENTIMES
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AUX BUREAUX DU JOURNAL
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REDACTION s 14, rue du Mail Paris
Do 1 à 8 heures iu soir et de 10 heures du soir à 1 heure du malin
N° 12337. Lundi 21 Décembre 1903
29 FRIMAIRE AN 112
ADIUIVISTRATIOX: fi, rue du Mail
Adresser lettres et mandats à l'Ai nimstrateur
NOS LEADERS
Srllnl rtinK
Il vaut mieux s'abstenir de com-
menter un crime et de discuter les
circonstances qui l'ont entouré tant
que la cour d'assises n'a pas rendu
son verdict. Le rôle de la presse est de
renseigner le public, et non pas de ju-
ger les accusés. L'opinion publique
n'est que trop portée à se passionner
et à imposer sa volonté, parfois mal
éclairée, à un jury souvent disposé à
se laisser intimider.
A propos de cette émouvante affaire
des « empoisonneurs de. Marseille »,
nous ne nous départirons pas de la
méthode que nous avons toujours sui-
vie et que nous suivrons toujours.
Mme Massot a-t-elle vraiment empoi-
sonné son mari ? M. Hubac a-t-il été
l'instigateur du crime? Ce sont des
questions que nous sommes mal placés
pour trancher, et que nous n'essaye-
rons pas de trancher..
Au surplus, le drame se joue dans
une atmosphère de mystère romanes-
que qui n'est point faite pour faciliter
une enquête exacte. Autour de cette
aventure marseillaise flotte un brouil-
lard surprenant : une brume méditer-
ranéenne traversée de quelques flèches
de soleil.
***
Un rayon lumineux permet seule-
ment de voir ceci : qu'il y a deux
parts à distinguer dans les récits de
tragédie apportés par les dépêches. Le
dessin principal de l'action se discerne
malaisément. Il est mêlé à une profu-
sion d'ornements elde caprices anec-
dotiques. Anacréontique ou Shakes-
pearien, l'amour ne renonce nulle part
a la fantaisie. Il « brode », comme l'en
• accuse M. François de Curel.
On croyait au moins tenir la preuve
matérielle du crime, avec la lettre
trouvée par la domestique Lucie Clap
— lettre au cours de laquelle Hubac
donnait des indications à sa maîtresse
pour hâter la mort de M. Massot. Or, vous
savez la curieuse explication donnée par
les accusés de l'existence de ce papier si
compromettant. Pour créer un lien im-
possible à rompre entre Hubac et elle,
Mme Massot aurait exigé que son
amant écrivît sous sa dictée la lettre
destinée à emprisonner leur amour
dans la complicité d'un crime imagi-
naire. Car la lettre aurait été écrite
après - la mort de M. - Massot ; -- - car M.
Massot n aurait jamais absorbé une
goutte de poison.
Mais que vais-je vous raconter-là ?
Vous connaissez ces détails aussi bien
que moi.
Le récit des amants de Marseille est
invraisemblable, dites-vous? Oui, telle
est l'impression pour ceux qui lisent
froidement, a Paris, de pareilles diva-
gation* s. A Marseille, dans la société
où les accusés ont vécu, on raisonne,
pnraît-il, d'une manière différente. La
Provence subit le charme d'une senti-
mentalité déjà italienne ; le mal est
dangereux, car il mêle du réalisme
sensuel et du mysticisme. Nous som-
mes loin du Sentiment du Nord et de
ses langueurs blondes. Il y a de la folie
latine dans l'histoire des empoison-
neurs de Marseille.
En somme, il est aussi difficile de
croire à la réalité du crime que de
croire à Finnocence des accusés. Du
moins, les mobiles du crime sont inin-
telligibles pour un esprit sain. Que
voulait M. Hubac?Epouser Mme Massot ?
Que voulait cette dernière? Epouser
Huhac. Il fallait donc supprimer Mas-
sot.
***
Je vous arrête. Il était plus simple
de rompre le lien conjugal que de tuer
le mari. L'empoisonnement, c'était la
sointion. rom a n tique ; le divorce, c'é-
tait la solution raisonnable— facile.
Est-ce comme trop « bourgeois » que
le commode divorce a été écarté ? Al-
lons donc ! Même. en Provence, l'a-
monr ne se fait pas meurtrier unique-
ment pour se donner en spectacle.
Cherchons mieux. Mme Massot n'est
pas seulement une amoureuse, c'est
encore une « religieuse ». Elle aurait
répugné à transgresser ouvertement
• les instructions de l'Eglise qui se re-
fuse à rompre les liens conjugaux par
lesquels les fidèles se sont unis. Les
-scrupu les mystiques ont causé quantité
de crines. incohéren ts. Toutefois, sans
doute Mme Massot aurait-elle eu re-
cours au divorce qui lui assurait le
bonheur sur cette terre, quitte à se
> débrouiller plus tard avec le Juge su-
prême. ;i
- Le problème avait, hélas, une autre
face. Quelqu'un d'admirablement do-
cumenté sur cette affaire, me dit i *
— Mme Massot n'était point seule à
entretenir des scrupules religieux; M.
Hubac était .dans un état d'esprit iden-.
tique. Surtout, la famille Hubac, en-
tièrement attachée aux opinions cléri-
cales* n'aurait jamais accepté qu'un de
ses membres épousât une femme di-
vorcée.
Nous souhaitons que Mme Massot et
M. Hubac échappent aux terribles
charges quient sur eux.Mais,quelle
que soit la fin du procès, le public saura
en tirer la morale qu'il comporte. Il
est odieux et ridicule que,dans un pays
où s'applique la loi du divorce, l'Eglise:
parvienne à en gêner le - fonctionne-
ment. Le divoree est assurément une
extrémité fàcheuse. Il permet cepen-;
dant de sortir sans grande difficulté de
situations qui menacent de devenir
tragiques. Que le mariage soit brisé
par un divorce ou qu'il soit brisé par
un crime, peu importe aux yeux de
l'Eglise. Nous finirons bien par arra-
cher les consciences françaises à l'ob-
session puérile et inquiétante de la
moralité religieuse.
Hugues Destrem.
LE BIEN DE FAMILLE
Le Conseil d'Etat est en train
d'examiner un projet que divers
bons esprits caressaient depuis
longtemps, et que M. Mougeot:
a fini par faire sien : nous vou-
lons dire le bien de famille, ce]
que les Américains nommènt le Homestead,
la maison familiale insaisissable, enfin ce
que le directeur du Courrier du Soir appe-
lait hier.assez spirituellement « l'institution
du majorat pour les pauvres ».
Il est à souhaiter que l'examen du Con-
seil d'Etat soit favorable à cette réforme :
elle créera des citoyens, des hommes libres
dans leur maisonnette inexpugnable, et par
conséquent des hommes très attachés au
pays qu'ils habitent. Nous nous réjouissons
du bien qu'une telle réforme pourra opé-
rer. - -
Et nous y avons quelque mérite, car
cette réforme, nous semble-t-il, ne pourra
guère faire sentir ses bienfaits dans les
centres où nous, tiavailleurs des villes,
- --- r-. 1 - , 1' 1
nous sommes connnes, réduits a i état cie
locataires, traitables et corvéables de tant
de façons. Lorsque l'ouvrier des champs
aura, par la loi du Homestead, conquis dé-
finitivement sa maison et son champ, il
faudra bien chercher et tiouver quelque
avantage analogue pour l'ouvrier des
villes.
Le homestead francais n'est encore qu'à
l'état d'avant-projet, et, on ne nous dit pas
dans quelles limites cette nouvelle forme
de propriété insaisissable, — peut-être
aussi incessible — pourra s'installer chez
nous, dont le Code civil est si mal préparé
à la recevoir; nous croyons que l'opinion
l'acccueillera avec faveur. Il nous semble
bien, au surplus,qu'un tel progrès ne serait
pas sans une répercussion heureuse sur le
problème de la natalité ; une répercussion
heureuse aussi sur la puissance d'écono..
mie des travailleurs, à qui ce but nouveau
sera offert : la conquête du foyer inviola-
ble, à l'abri de l'huissier. — Ch. B.
- -"
Di VACATIONS
M. Emile Ollivier qui, par instants, a des
renouveaux d'énergie, a publié hier dans le
Gaulois, un article où se retrouvent toute l'ar-
deur' poétique, toute la fougue des anciens
temps.
Il est toujours intéressant de lire les appré-
ciations que font des personnalités à qui il fut
donné, à un moment de leur existence, d'être
des conducteurs d'hommes, sur les événements
du jour. Figés dans les conceptions étroites de
leur âge mûr, cesvieiliards n'ont point changé
alors que tout s'est transformé autour d'eux.
Us se sont ancrés dans leurs idées, ils les con-
servent immuables et leur cerveau, telle une
forteresse triplement enceinte où n'arrivent
point les bruits, du dehors, reste formé à
toute compréhension des événements contem-
porains.
M. Emile Ollivier a fait une découverte au-
près de laquelle celle du radium est l'enfance
de l'art.
Les républicains demandent à cor et à cris la
séparation de l'Eglise et de l'Etat. Pauvres in-
sensés! Ils ne savent ni ce qu'ils font, ni ce
qu'ils font ni ce qu'ils veulent 1 Mais la sépa-
ration de l'Eglise et de l'Etat, ils l'ont, puis-
qu'ils ont le Concordat.
Nous sommes un peu « nouvelles couches »
pour nous expliquer cette manière de voir.Le
Concordat constitue, pour l'ancien ministre de
Napoléon III,la séparation définitive de l'Eglise
et de l'Etat. Voilà ce que l'on fera difficilement
entrer dans nos cervelles.
Il est vrai que M. Emile Ollivier reconnaît
qu'il y a beaucoup à faire encore pour que
cette séparation de principe soit une réalité
pratique, et c'est pour cela, sans douter que
nous ne saisissons pas bien. Mais à qui la faute?
« L'Eglise a loyalement respecté la séparation,
et ce n'est pas à elle qu'il faut demander quoi
que ce soit pour la rendre plus complète. C'est
l'Etat qui a fait obstacle à la séparation et a
en quelque sorte ressuscité l'union qui existait
sous l'ancien régime. »
Qui l'eût cru ? M. Emile Ollivier, daqs sa
retraite, ifa-t-il pas entendu les déclarations
de guerre du clergé ? N'a-t-il pas connaissance
de l'hostilité des évêques et de l'insolence des
prélats? Ne sait-il pas que les églises se sont
transformées en salles de réunions où la Répu-
blique ôst flétrie quotidiennement, à grand
renfort d'injures grossières, et que du haut de
la chaire de vérité devenue tribune, on ne cesse
de prêcher la haine de n,os institutions?
• S'il ignore tout cela, il aurait mieux fait de
garder le silence, cela lui eût évité de se rén-
dre ridicule en lançait des àmrmations si con-
traires à la vérité des faits que nous n'aurons
pas la cruauté de les apprécier, et, en traitant
les républicains qui demandent la séparation
de banqueroutiers et de voleurs.
Des apostrophes pareilles ne sont pas des
arguments, mais des calembredaines. M. Olli-
vier a donc perdu une bonne occasion de se
taire.If est toujours pénible de voir un homme
politique en arriver à d'aussi misérables
moyens dedisoussion, Et ce sera pour lui un
juste châtiment de voir les adversaires de ses
idées accueillir ses paroles, non par un haus-
sement d'épàuîés, mais par un geste de pitié.
— Charles Dcmyi ;, ; «. -
GUILLAUME 11 ET LE HUIS CLOS
IDe notre correspondant particulier
Berlin, 19 décembre.
Dans les cercles de la «cour on se raconte que
l'empereur Guillaume, par un ordre de cabi-
net confidentiel, a envoyé un blâme aux juges
du conseil, de guerre de Forbach. Il leur re-
proche sévèrement de n'avoir pas prononcé le
huis clos dans le procès du lieutenânt Bilse
accusé d'hoir publié le roman la Petite Gar-
-,
: ,_,.",re¡. - .-
A LA CAMPAGNE
FORETS MINUSCULES
Vente d'une forêt à l'Hôtel Drouot. —
Arbres majestueux, arbres pyg-
mées. — Au Japon. — Un art
bien oriental. — La nani-
sation.
J'ai lu, tout dernièrement, dans les jour-
naux, qu'une petite forêt avait été vendue
dans l'intérieur mêmè de l'Hôtel Drouot, dans
la grande salle des ventes parisiennes.
Je savais bien qu'on vendait de tout là-bas,
mais il ne m'était jamais venu à l'idée qu'on
y pût vendre une forêt, même toute petite. Je
dois dire que la lecture de la première partie
de l'entrefilet qui annonçait cette vente m'avait
laissé quelauo peu rêveur. Fort heureusement,
la fin donnait l'explication de l'affaire ra'ap-
prenaitque la forêt ainsi mise en vente n'était
composée quo d'arbres minuscules, importés
du Japon tout spécialement pour subir le fou
des enchères.
La nanisation des arbres au Japon
Aux ombrages séculaires des grands ar-
bres, aux futaies majestueuses qui font l'or-
gueil de nos forêts domaniales, les Japonais,
par antithèse sans doute, semblent préférer les.
arbres pygmées et les forêts minuscules. Ce
qui, à nos yeux, constitue une anomalie, une
étrangeté, apparaît aux leurs — peut-être
parce qu'ils sont bridés ? — comme le comble
de la perfection et comme la quintescence d'un
art bien oriental.
Cela tient, probablement, aux traditions, au
milieu dans lequel vivent les Japonais et à
Testhétiquo qui leur est propre. -
Chacun sait que les Japonais sont des pe-
tits hommes, disons mieux, des hommes petits,
Jet qu'ils possèdent de petites maisons entou
rées de jardins lilliputiens. De grands arbres,
dans ces petits jardins, près de ces maisons
minuscules paraîtraient les écraser par leur
'majestueux ombrage. Cela explique assez la
passion des Japonais pour les arbres nains et
pour tout ce qui s'accorde,comme dimensions,
à leurs très petites personnes. Pour eux, tout
ce qui est pstit, et même tout ce qui est dimi-
nué de taille, se rapproche de l'idéal qu'ils se
font de la perfection.
G est à cause de cela, justement, qu'ils ont
eu l'idée de créer, par un travail de longue
haleine, ies arbres nains dont ils se montrent
si liers.
L'atrophie des végétaux, ou, pour em-
ployer l'expression e oiisacré,,, la nanisation,
qui leur permet de réduire dans des propor-
tions considérables la taille d'un certain
nombre d'arbres forestiers, est le résultat de
: causes physiologiques qui, elles-mêmes, sont
généralement la conséquence CIe procédés cul-
turaux, aidés par l'influence du climat spécial
dont jouit le Japon.
- Le opérations culturales portent sur l'ali-
mentation du végétal et sur diverses opérations
,de taille, de greffage et autres opérations si-
milaires qui, en résumé, ne sont en quelque
sorte que de la mutilation savante. Le jeune
arbre que l'on veut naniser-doit subir de fré-
quent recépages; on tord, on contourne ses
rameaux et on le soumet à de nombreux rem-
potages. Les récipients dans lesquels on en-
ferme ses racines, après chaque rempotage,
sont aussi réduits que possible; enfin, à cha-
que rempotage, les racines sont raccourcies et
réduites à leur minimum. Tout cela est fait
dans le but de paralyser les fonctions de nutri-
tion et de provoquer un ralentissement dans
la croissance de l'arbre soumis au régime de
la nanisation.
Les essences dociles à la nanisation
Dans le monde des arbres, il est certaines
espèces qui se prêtent mieux que d'autres aux
déformations qu'on veut leur faire subir.
Ce sont les arbres à feuilles persistantes et
plus spécialement ceux qui appartiennent à la
grande famille des Conifères qui donnent les,
meilleurs résultats. Parmi les espèces qui con-
viennent tout particulièrement à la formation
des arbres pygmées, on peut citer : les Pinus
Parciflora, Pinus Densiflora, Pinus Massoniana,
Pinus Thunbergi, les Chamœcypasis obtusa, et
C. fiucoïdaM larix letitolepis, le Criptoniéria
Japonica, le Tsulga SiéboLdü, le Ginyko-Cilo-,
6a,etc.
Toutes ces espèces saprêtenttrès bien à la na-
nisation ; elles se contentent de peu de nourri-,
ture et peuvent souffrir sans mourir brusque- 1
ment. Ces arbres ont, en outre, des racines
très vigoureuses susceptibles de s'allonger ra-
pidement sous l'action de quelques soins spé-,
ciaux et c'est grâce à cette vitalité particulière:
des organes, qu'à un moment donné; il est pos-
sible de constituer promtement des tiges aé-
riennes qui portent la ramure à une assez
grande distance de l'axe principal. Tous les
Conifères soumis à la nanisation donnent l'il-
lusion de véritables réductions d'arbres géants,
car le feuillage reste en parfaite harmonie avec
les dimensions de la ramure.
Les Japonais ne soumettent pas que les ar-
bres à feuilles persistantes à la nanisati_ on.
Ils s'adressent aussi, pour cette opération, aux
végétaux à feuilles caduques.
Les résultats qu'ils obtiennent avec ces der-
niers ne ressemblent en rien à ceux que leur
fournissent les-conifères. : , (î
Bien que le tronc et la ramure soient très
rapetissés, les feuilles conservent à peu près
les mêmes dimensions que sur les grands ar-
bres ; l'aspect das ambres feuillus nanisés n'a
rien de bien, séduisant,, ils ont plutôt un air
lamentable.
Les' végétaux féuïlïus' Jeg. plus utilisés pour
la nanisation appartiennent rà quelques espè-
ces japonaises : Lw Styrax japonica, le Lager.
troemia irtilka, Je Gycas revoluta, puis quel-
ques variétés de chêné$, de prunler et d'éra-
ter
bles spéciales au Japofj;'' •
Un art déjà vieux l'
La navigation des arbres est pratiquée, au
Japon, et en Chine,- depuis de? siècles. Getta
suite d'opérations,pratiquées ,(^ns le but d'ob-
.tenir des arbres pygmées, èst considérée là-
bas comme un àrt vèVitàbléV7 ",.
Cet art a d'ailleurs ses" écaias; 'ses 'maires,
ses amateurs, tout comme;. la! peinture:, et la
sotylpture ont les leurs en ..Europe^,,,
, Ls maîtres dans l'art de la iranisatiôp si-
ghent leurs ehéfs-d'(éùvre VtëgétaUx, comme
nos peintres 'et 'nus sculpteurs signent ■ leurs
tableaux ou leurs statues. i ,
C'est dire, en peu do mots, que la. nanisation
est considérée au Japon comme une clrose ab-
solument artistique, demandant ffe l'habileté,
du temps, de la patience et de la ténacité.
La nanisation desarbreSç, est tellement en-
trée dans les mœurs dii Japon que beaucoup
de jeunes, Japonaises consacrent la majeure
partie de leur -temps à'ce genfô de travail.
C'est, en somme, dans tout; le-pays, une
vraie-passion qui sévit, passion peu dange-
reuse, mais qui indique d une façon suffisam-
ment claire que ce peuple si rômuant a sur les
faits et sur les choses âne conception et une
compréhension toutes différentes des nôtres.
- '• • • A. MONTOUX.
—————.—————— ———— ———————
LE GAZ DE PARIS
M. Navarre,- président, et les membres du.,
bureau de la commission du gaz se sont ren-
dus hier matin au ministère de l'intérieur pour
accomplir la mission que leur avait donnée
; hier le Conseil municipal « d'obtenir du gou-
vernement le dépôt du projet de régie directe».
M. Navarre et ses collègues verront encore,
avant ce dépôt, M, Combes, président du con-
seil, à qui ils ont demandé une audience pour
le début do la semaine prochaine.
■ ■
AU 19e ARRONDISSEMENT
Compte rendu de mandat du citoyen
Charles Bos
Notre rédacteur en chef, député de Belle-
ville et du Pont-de-Flandre, a rendu compte
de son mandat, hier soir. au préau des écoles
do la rue Barbanègre. C'est au milieu d'une
salle comble, qu'une centaine d'énergumènes
nationalistes venus des quatre coins de Paris-
avaient tenté d'envahir, que le citoyen Char-
les Bos a développé toutes les questions si
intéressantes qu'il a soutenues à la Chambre.
A l'issue do la réunion, l'ordre du jour sui-
ivant a été voté par tous les républicains ra-
dicaux et cadicaux-socialistes :
ORDRE DU JOUR
Les électeurs de la deuxième circonscription du
19e arrondissement, réunis au nombre de 800envi-'
ron au préau des écoles delà rue Barbanègre,1
après avoir entendu le citoyen Charles Bos, dé-'
puté, dans son compte rendu de mandat, et les'-
Réponses aux questions qui lui ont été posées, le
félicitent de s'être toujours inspiré de son pro-
gramme, et de l'avoir appliqué dans tous ses
votss, notamment de son heureuse campagne pour
l'abaissement des frais de justice, l'agrandissement
des bassins de la Villette, et la lutte qu'il a si
vaillamment soutenue contre les congrégations,
en faveur de l'enseignement laïque:
Lui renouvellent leur entière confiance et l'enga-
gent à continuer dans cette voie si nettement répu-
blicaine et anticléricale. Ils lèvent la séance au cri
de: « Vivo la République démocratique et sociale! »
— Signé : Bocquin, Pocquet, Landragin, Chamil-
lard, Merle.
A ce moment, comme les nationalistes qui
se trouvaient dans la salle tentaient une vague
et illusoire manifestation hostile à la Hépubli--
,que et au citoyen Charles Bos, ils ont été con-
spués par tous les républicains présents. On a
entendu les cris de : « Hou ! hou ! la calotte !
BarilJior à Charenton ! — A bas la calotte ! —
Déroulède à Charenton ! »
Penauds et honteux, les nationalistes se sont
enfuis, et la sortie s'est effectuée sans incident"
au milieu de l'enthousiasme Ses républi-
cains.
Voir à la 311 pagre
les Dernière's Dépêches
SOUHAITS RIMEs
Afin d'arriver bon premier, M. Jules Blan-
card, de Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme),:
vient d'adresser à M. Loubet ses « souhaits du
1er de l'an 1904 ».
Et afin que ces souhaits ne s'égarent pas,:
sans être lus, au fond d'un panier ou dans la
cheminée d'un secrétaire peu favorable aux
petites gens, M. Jules Blancard a communi-:
qué à la presse la copie imprimée de ces sou-
haits.
Ils tiennent une page; pnt pour titre Un:
point d'histoire ; - pour sous-titre : 17 août
'1903. Loubet, en villégiature en son château de
Mazenc, s'échappe incognito à la fête votive de
Pierrelatte; -- et nous apparaissent sous la
forme de six sonnets, dont le dernier est inti-
tulé : Invocation.
Dans le premier sonnet M. Blancard raconte
comment il rencontra, d'une façon tout im-
prévue, le Président de la République à la fête
de Pierrelatte. -
Qui donc, cet illustre perdu,
Déambulant et confondu
Au sein de tout ce monde en fête ?
C'est de Loubet la bonnette,
Avec son barbiohon pointu,
Son - regard profond bien connu,
Sa bouche en cœur faisant risette
Et le teint frais d'enfant qui tète.
Dès lors, m'approchant confiant,
J'en reçois accueil bienveillant,
Avec son air de bonhommie,
Don, chez Loubet, si précieux
Qu'il nous le peint à tous les yeux,
Admirable de courtoisie.
Les autres sonnets sont sur le même ton,
enthousiastes, familiers, un tantinet mali-
cieux, et cependant tout pleins d'admiration
et d'affection pour le Président.
Voici les derniers vers du dernier sonnet :
La fortune à souhait semblant souscrire en blanc, -
A tes moindres désirs semblant prêter le flanc,
Sache tirer parti d'une faveur féaonde
Au profit des petits et sur terre et sur l'onde j
Car ce n'est rien de vivre, il faut savoir mourir.
Après un vain triomphe à quoi sert de courir.
Si c'est pour n'entasser que gloires éphémères ?
Dame Postérité ne veut quô positif ;
Or, pour haut fait viable avoir à ton actif,
Inscris sur ton drapeau : Retraites ouvrières I
Evidemment, tous les poètes géniaux, genre
-Coppée et Rostand. Vont se tirébouchonner à
la lecture de cette « poésie » si économique-
ment riméé et dont les inversions sont encore
plus effarantes que celles de M'. Moréas. Soit ;
je concède volontiers qu'elle fait tout d'abord
sourire, et qu'on se demande pourquoi M. -
Blancard a éprouvé le. besoin de cadencer et
de rimer ses souhaits de 'bonne année. Mais
bientôt, malgré soi, on est pris par la bonhom-
mie, par l'honnêteté, par la touchante naïveté
qui se dégagent de ces bouts-rimés, et l'on ar-
rive à trouver que celui qui iospire de tels
sentiments doit être lui-même un excatlent
homme — un brave homme.
La facture de ces vers ne vaut certes pas
celle des poètes officiels attachés aux Cours
d'Europe — mais quclesf le poète officiel qui
Userait dire àlson souverain, empereur, roi ou
tsar :
, : Inscris ,sur ton drapeau : Retraites ouvrières,
G. DE VORNEY.
-
}' !',. 1', "-
NOUVELLE^ MÊTHOdE ,
POUR ATTEINDRE LE POLE NORD
,'; (Dé nôtfë correspondant pardeutierj
Vienne, 19 déoembye.
Dans le monde scientifique on s'occupe sé-
rieusement d'un projet bien original de l'ingé-
nieur "M. Ferdinand.Lupsa pour aller au Pôle
Nord. ,,
., Plus de navife ni de ballon, pas même de
sous-marin; tel est la principe du futur explo-
rateur. ',¡', .,
On n'a qu'à se laisser porter par le courant
polaire et on arrivera immanquablement au
Pôle et voici pâr quel procédé :
Qu'on érige une case bien spacieuse et mu-
nie de provisions sur un champ de glace po-
laire près du passage de Behring.
Cet icefidd formant une île flottante est
poussé par le courant vers le Pôle. Pour y ar-
river, il faut d'après les calculs approximatifs
3 ans environ; il faudrait donc se munir de
provisions pour 4 ans.
On voit que l'auteur du projet s'est inspiré
de la lecture des romans de Jules Verne.
Quoiqu'il en soit, il est sur le point de réu-
nir les fonds nécessaires à son entreprise.
A LA MAIRIE
ET A L'EGLISE
La déception d'un maire républicain.
— Les quêtes à destination étran-
gère. - La comptabilité des
Fabriques.—Inutile contrôle.
— La solution.
Nous étions récemment conviés à ce qu'on
appelle un mariage select; c'est une aubaine
assez rare, surtout en province, et il se trouva
que, par exception, quelques-uns des invités,
plus osés que beaucoup d'autres, prenant le
mariage civil au sérieux, s'étaient fait un de-
voir de se rendre, ce jour là, à l'Hôtel de
Ville, où M. le maire devait d'ailleurs pronon-
cer une de ces chaleureuses allocutions de cir-
constance qui lui sont familières. Ce magis-
trat possède, en effet, un incontestable talent
de parole ; son républicanisme est conciliant
et il cumule, sans faillir à ses multiples de-
voirs, les fonctions d'édile avec un haut grade
universitaire qui lui permet de rendre d'inap-
préciables services aux établissements d'onsei-
gnement laïques de la cité dont il est le na-
turel protecteur.
Quête. fructueuse
Aussi no fûmes-nous, en aucune façon,
surpris quand, après la solennelle déclaration
qui unissait les jeunes époux, nous fut pré-
sentée la bourse traditionnelle où devait tom-
ber notre offrande en faveur de la caisse des-
écoles de la localité.
L'assistance était riche ; la quête devait être
fructueuse et déjà l'on pouvait escompter les:
besoins nombreux auxquels, pendant l'hiver:
qui s'annonçait rude, la municipalité serait en
mesure de pourvoir.
Cet espoir fut de bien courte durée et nous
renoncerons à rendre la désillusion de l'hono-
rable magistrat en ne voyant apparaître, au.
fond de l'escarcelle, au lieu des pièces d'or
qu'il y cherchait en vain, que quelques sous,
fourbis soigneusement à l'avance, en manière
de trompe l'œil et représentant une somme ab-
solument dérisoire !
Si la Caisse des écoles est vide, si les livres
font défaut, si la cantine scolaire devient in-
suffisante, si les enfants pâtissent à la laïque,
qu'importe à ceux qui vont à l'église prochaine
recevoir labénécti-ction du curé-doyen avec,
en plus, celle du Saint-Père quand on y met le
prix.
Oh ! la quête sera abondante ici. et elle ne
courra pas le risque de s'égarer dans la Caisse
des écoles des enfants du peuple !
Purifions-nous
Il fallait passer devant M. le maire ; subir
la harangue, avec quelle impatience, d'un
homme qui s'avise de tendre la bourse en fa-
veur d'une oeuvre maçonnique au premier
chef; c'en était trop; on court se purifier à l'é-
glise. « Si j'ai jamais regretté un sou, dans
ma vie, c'est celui-là ! », s'écriait la mère du
marié en quittant l'Hôtel de Ville.
« Enrichissez-vous, conseillait le père Di-
don à ses élèves, à l'une de ses distributions
de prix,et vous ferez l'Eglise puissante et forte.»
L'illustre dominicain n'avait vraiment rien à
apprendre, à cet égard, aux gens d'Eglise, et
quand il s'agit d'encaisser, leur ingéniosité est
sans pareille : Les Petits Chinois leur ont plus
donné qu'une rançon de guerre. On a abusé de
la Sainte-Enfance; on prétend que Saint-An-'
toine de Padoue rond plus qu'il ne reçoit — il
est recommandé comme un placement de tout
premier ordre. Des femmes de distinction ne
croient pas déchoir eu quêtant pour leurs dé-
funts maris des messes à domicile, ce sont les
plus efficaces. L'évêché centralise les intentions,
en espèces sonnantes bien entendu, et, n'était le
Conseil d'Etat qui, parfois, met un frein à la
fureur accaparante des prélats, le prix des
fondations de messes (et quelles solides fon-
dations, messeigneurs!) atteindrait des taux
exhorbitants !
Nous ne sommes plus au temps de l'ancienne
coutume, qui ne prévoyait que quatre cas où
le droit de quête était autorisa. pour aller,
par exemple, en voyage d'outre-mer visiter la
Terre sainte. On va ma;ntenant à Lourdes et
autres lieux. C'ést infiniment plus productif et
la mense épiscopale de Tarbes en sait quelque
chose !
- L'on compte, écrivait Voltaire, 98 ordres monas-
tiques dans l'Eglise, 64 qui sont rentés et 34 qui
vivent de quêtes, sans aucune obligation de tra-
vailler ni corporellement ni spirituellement pour
gagner leur vie, mais seulement pour éviter l'oi-
siveté.
Où va l'argent ?
Que de chemin parcouru depuis cette épo-
que et quo penserait de nos jours le grand
philosophe en lisant les statistiques de M.
Combesl,Que sont devenus ces 3i ordres qui
vivaient sans travailler ? Us ont suivi le pré-
cepte : croissez et multipliez et. se sont enri-
chis ! Le Père Didon doit être content.
- D'où vient l'argent? on ne le sait que
trop; qu va-t il? c'est un secret impéné-
trable.
La comptabilité des fabriques qu'on essaye
do réglementer reste occulte ; elle se soustrait
à tout contrôle et ce n'est pas pour elle, sem-
ble-t-il, que le Parlement a légiféré.
Nous n'ignorons pas que les conseils muni-
cipaux sont annuellement appelés à donner
leur avis sur les comptes et budgets des fabri
ques et môme qu'ils peuvent exiger la com-
muuication. sans déplacement, des registres et
pièces de comptabilité (avis du Conseil d'Etat,
du 14 juin 1878, ville de Moulins).
- Nous ne faisons nulle difficulté de reconnaî-:
tre qu'après une résistance de forme, les curés
ont, pour la plupart, paru adhérer aux près
criptions légales ; mais avec quel sans-gêne
savent-ils échapper à toute constatation sé-
rieuse ! « Nous demander le produit des quê-
tes 1 mais nous sommes pauvres comme Job 1»
et, de fait, le compte rendu des délibérations
d'un conseil municipal que nous avons sous
les yeux nous apprend que, sur trois paroisses
d'une ville notoirement dévote, deux églises
n'ont perçu que des sommes insignifiantes, la
troisième présente un état négatif. ,-
L'objet des quêtes
Tartuffe n'est pas souvent à bout d'argu-
ments : aux explications sollicitées, on ré-
pond que, presque toutes les quêtes faites,
dans les églises ayant un objet étranger, elles
ne sauraient être soumises à aucun contrôle et
que le produit des autres quêtes pouvant être
affectées au service paroissial est de nulle va-
leur, en raison même de la rareté des quêtes
en question-. - ,
Des quêtes ayant un objet étranger ! - -
Comment? Des quêtes de toute nature dont
à l'Eglise et au dehors on accable les fidèles,
aucune ne viendrait en déduction des frais du
tulle, de sorte qu'en droit strict, les curés
pourraient s'autoriser de l'insuffisance des re-
cettes de.la fabrique (et l'on sait s'ils s'en pri-
vent) pour, à un moment donné, réclamer le
concours de la commune ou de la commission
départementale ou le curé possède toujours
qiielque.,Inflii,ent appui ?
L'Eglise invoque ses charges; elle dissimule:
ses ressources; les quêtes ont un objet étranger
et t'est l'Etat qui paie.
;,icnnc prête plus, nous le reconnaissons, a
l'équivoque, que l'article 21, § 7, de la loi du
18 juillet 1837 qui, à la Chambre et au Sénat,
a donne Heu successivement aux interpréta-
tions les _.plus contradictoires. En somme, la
clergé fait ce qu'il veut avec le texte de la loi
du o avril 1884 qui déclaré que, si le Conseil
municipal refuse ou néglige de donner soa
avis, il peut être passé outre.
Il faudrait prendre un parti.
L'Eglise est trop procédurière pour que nos
municipalités aient avantage à plaider contre
elle; nous ne le leur conseillerons jamais; il v a
des terrains sur lesquels il est dangereux de
s'aventurer avec certains adversaires.
La véritable solution qui s'impose, celle que
toute la démocratie réclame et qui ne prête à
aucun équivoque, c'est la séparation des Egli-,
ses et dé L'Etat.
Le clergé (il -s'en repentira peut-être) la fait
tous los jours ; la question est mure à peu près
partout.
Là èst le salut et nulle part ailleurs.
H. L. B.
UN MOT RETROUVÉ
Un petit jeune homme, jaloux des succès du
comte de Mun, veut, lui aussi, organiser un i
socialisme aspergé d'eau bénite. Comme il fal-
lait un titre nouveau pour un homme nou-
veau, l'idée lui est venue do couvrir les murs
d'affiches où flamboient les mots : Christia-
nisme démocratique.
Le christianisme, en effet, n'est plus démo-
cratique; il ne l'a été qu'un temps, à l'époque
où Néron se servait des chrétiens pour éclai-
rer ses fêtes orgiaques. Les corbeaux ont suc-
cédé aux martyrs. Pour le malheureux, usé
par le travail, le elergé a ces belles paroles,
consolatrices : « Soyez résigné sur la terre, la
Père Eternel vous rendra cela dans le ciel. »
Mais on ne peut se soutenir avec des litanies
et des oraisons. Le doute pénètre dans les es-
prits au sujet d'une doctrine qui favorise les'
riches et maintient dans un ascétisme obliga-
toire ceux qui peinent toute leur vie. Quelle
belle aubaine pour les fils de famille de se
donner, entre deux scirées mondaines, des
airs de prophète du xxe, siècle. Le noble fau-'
,
bourg a trouvé cela : accoler au christianisme
le mot démocratie. Tout le monde sera content.
Ils ont oublié, les inconscients, qu'il y a deux'
mille ans, un homme, qui s'appelait Jésus,
avait trouvé le « christianisme démocratique».
Son invention ne lui a pas réussi et il est mort
d'une façon malheureuse, crucifié par les clé-
ricaux de l'époque, auxquels, du reste, ceux
d'aujourd'hui n'ont rien à envier. — Ra(festin»
Nadaud.
L'ACTION ITALIENNE DANS LE SOfilALILft4tg
IDe notre correspondant particulier} y
Rome, 19 décembre.
Le ministre de la marine a reçu d'Aden un
rapport détaillé sur l'action du navire Galileo
qui a bombardé les forts et les ouvrages de
Durbu. Les sambouques des indigènes ont été
brûlées. Le Galileo est parti pour Burgat.
On croit qu'une campagne coloniale d'uno
plus vaste étendue se prépare. Le gouverne-
ment italien voudrait, dit-on, mettre lin au
semi-protectorat qui se trouve au bord de
la Mer Rouge et transforme ces territoires en,-
colonies rattachées directementà la Métropole.
LA RÉPUBLIQUE DE SAN-MARINO ESCROQUEE
fjîe notre correspondant particulier) !
Rome, 19 décembre. '?
La petite République de San-Marino 3
reçu un rude coup, qui a ébranlé: pour des
années son équilibre budgétaire. Un chevalier
d'industrie a réussi à soustraire au Trésor de.
l'Etat une somme de 225.000 fr. pour une pré- ,:
tendue affaire de timbres-poste. L'homme a
disparu avec l'argent, une fois le marché con-
clu. Deux triumvirs de la République se sont
mis à sa poursuite, mais, arrivés à Vionnec
ils ont perdu toute trace de l'escroc et ils oat
dû rentrer bredouilles, dans leur pays.
—__——————
'-- ,,:'mpi.., allemand manaca
(De notre correspondant tiarticulicr)
Dantzig, 19gdécembre.
M. LîzinsTcy, horloger à Dantzig, avait dans
sa vitrine une montre qui portait cette inscrip,
tion i
« Boze baw Polshe t (Dieu protège la Polo-
gne r ) »
Les autorités, voyant là un acte de nature à
compromettre sérieusement l'existence de l'em-
pire allemand, ont fait condamner l'horloger
à une amende de 150 marks.
LE CHANCELIER DE BULOW
ET LES JOURNALISTES ALLEMANDS
106 notre correspondant particulieri
Berlin, 19 décembre.
Le chancelier M. de Bülow a donné l'ordro
à tous les bureaux de ne donner les communi-
qués officiels qu'au Moniteur d'Empire. Les
informations et notes officieuses seront réser.
vées à la Gazette de l'Allemagne du Nord et à la
feuille lithographiée, la Berliner Korretpon-
denz.
Les journalistes qui ont l'habitude d'aller
tous les jours au bureau do la Wilhelmsstrassô
pour y recueillir des informatioas, sont dans
le désespoir et veulent adresser une pétitioa
au chancelier.
,,- --:'-
RUSSES ET JAPONAIS
-,
Tokio, 19 dëcëmbre (Source anglaise).
L'association des gardes-malades américai-
nes a offert au Japon son concours en cas ds
guerre avec la Russie..
La situation est plus menaçante que jamais.
- Cologne, 19 décembre.
On mande dé Saint-Pétersbourg, 19 décembre, à
la Gazette de Cologne :
Les renseignements suivants émanent d'une
source russe généralement bien informée :
Au cours des'récentes négociations entre la Rus-
sie et le Japon, ce dernier Etat a demandé à la:
Russie d'admettre le protectorat du Japon sur la
Corée, en oe sens que la Russie reconnaisse expli-
citement que la Corée ressortit exclusivement à la
spère des intérêts japonais et qù'olle concMe au
Japon le droit d'exercer une influenod-prépondé-
rante sur la politique de la Corée.
Par contre, le Jagon se déclare prôt à reconnaît
tre les conventions commerciales exiscant àctuei-
lemcnt-entre la Russie et la Coxiée; y compris la
concession sur les rives du fleuve Yalou, et à ac-
corder aussi dans l'avenir à la Russie tous les
droits commerciaux qui pourraient être concédés,
dans ce pays par le gouvernement japonais,
ou par le gouvernement coréen en accord avec
le gouvernement japonais, au-x autresnatians i
étrangèrea.
Le Japon réclame donc pour lui-mënie niie en-
tière liberté politique et commerciale eh Corée et i
veut/au contraire, que-la Russie y soit, traitéa
comme « nation étrangère ».
La Russie aurait mis en avant, de son côté, les,
revendications suivantes : Etablissement de points
d'appui militaires fortifiés à Masampo et àMolpho
et liberté absolue du commerce russe en Corée. v
La Russie était disposée à reconnaître le protec
torat japonais en Corée et à açcorder au Japon uney
influence prépondérante sur la politique coréenne
mais le gouvernement japonais a refusé catégorie.
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