Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-11-22
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 22 novembre 1903 22 novembre 1903
Description : 1903/11/22 (N12308). 1903/11/22 (N12308).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7575569t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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:: NOS LEADERS
L'nsignillnt seconaire
Le principe de l'interdiction du droit
d'enseigner aux congrégations, auto-
risées ou non, a triomphé hier au
Sénat. A une petite majorité, il est
vrai : onze voix. Mais cette majorité
nous suffit à nous autres républicains
anticléricaux. Nous en aurons, en ef-
fet, une autre bien plus considérable
à la Chambre.
Ainsi, peut-être, aura vécu bientôt
l'enseignement congréganiste. Je dois
dire tout de suite que M. Combes,
malheureusement pour lui, n'est pour
rien dans ce succès dont tous les ré-
publicains se félicitent. Son projet ne
visait pas les congrégations autorisées.
Il a dû, sous peine de voir sa majorité
Se couper en deux, accepter un amen-
dement de M. Delpech. Comment d'ail-
leurs a-t-il défendu cet amendement ?
Mal, très mal, au point qu'il faut dé-
clarer, pour rendre hommage à la
vérité, que le Sénat a voté le principe
si cher aux républicains malgré l'in-
tervention du président du conseil.
Dans toute cette affaire, on sent que
M. Combes pprie contre sa propre opi-
,: nion. Or, quand on parle sans être
convaincu, on parle mal. Je ne m'é-
tonne donc pas de l'insuffisance de ses.
; observations. A la fin de la session der-
nière, j'avais en effet tenté de faire vo-
1er par la Chambre un projet de ré-
solution analogue à l'amendement de
M. Delpech et je m'étais heurté à un re-
fus obstiné de M. Combes. Depuis qua-
tre mois, M. Combes n'a pu, évidem-
ment, changer de sentiment sur la
question de la liberté de l'enseigne-
ment. De là son discours d'hier, embar-
- rassé, sans largeur de vues, émaillé de
statistiques douteuses et de remarques
plus douteuses encore.
.**
Il aeu affaire à forte partie. M, Wal-
deck-Rousseau, aussi maître de sa pen-
sée et de sa parole que dans ces gros-
ses séances mouvementées de la Cham-
bre, lors de la discussion de la loi sur
les associations, a critiqué vivement
* et avec des arguments juridiques dont
la vérité n'a échappé à personne, la
politique de M. Combes. Quels résul-
tats a donnés cette politique ? Aucun.
On a embrouillé comme à plaisir tou-
tes les questions ; on a demandé
à la loi des associations plus qu'elle
ne pouvait produire > on a cherché
'toujours à faire voter des lois de cir-
constance qui ne sont que des expé-
dients. Expédient, cette fameuse pro-
position de loi Massé, que le Sénat con-
serve précieusement dans ses cartons,
Jjparce que « sans doute, c'est un en-
tant qui ne donne aucun orgueil à son
père ». Expédients, toutes ces ferme-
tures d'écoles dont la-plupart ont été
rouvertes..
Et très habilement, M. Waldeck-
Rousseau, toujours fidèle à ses engage-
ments et au respect de la loi, a posé
Bette question : « L'amendement Del-
pech est-il nécessaire? Que fait-on
4e l'article de la loi des associations
qui autorise le gouvernement à dis-
soudre, sur simple décret,sans avoir à
fournir de raisons à qui que ce soit,
telle ou teUe congrégation autorisée et
à fermer les établissements qui le gê-
neraient dequelquefaçon que ce fût '?».
Il est visible que M. Combes ne veut
pas se départir de son système de gou-
vernement : Ne jamais diriger sa ma-
jorité, la suivre toujours. Or, il est cer-
tain que M. Combes a le droit de dis-
soudre les congrégations autorisées. Il
ne veut pas le faire de son propre gré,
mais il demande au Parlement de lui
ordonner par une loi de faire ce qu'il
pourrait faire personnellement. C'est
un déplacement de responsabilités. Le
pouvoir législatif devient le pouvoir
exécutif, et M. Combes, se refusant a
r ; Tien faire de lui-même, se borne à exé-
, cuter les décisions du Parlement.
L Le discours de grande allure, si juri-
dique et si élevé de M. Waldeck-Rous-r
seau, avait fait une énorme impression.
M. Combes a tenté d'y répondre. Mais
sa réponse a produit un désenchante-
ment général. J'y reviendrai tout à
l'heure. Il a fallu que Clémenceau se
levât pour repêcher ce gouvernement
qui barbotait dans de piteuses explica-
tions, car c'est Clemenceau qui l'a
sauvent avec quelle habileté !
Il a renouvelé une de ces manoeu-
vres qui lui étaient jadis si familières.
• Mais d'une manœuvre de renverse-
ment, il a fait un merveilleux outil de
sauvetage. Un cliquetis de mots, d'op-
positions de personnes et de formules
et cela a suffi. M. Combes, après cette
opération, avait une majorité de
11 voix sur laquelle il n'avait pas osé
compter.
.(., - ,',.¡. ***
i Dans sa réponse, il avait malheu-
reusement fait deux aveux terribles
qui engendreront, je le crains fort
- avec lui, une profonde déception dans
le pays. Il n'y a plus, a-t-il dit d'a-
bord, d'écoles congréganistes secon-
daires en France, alors qu'il est pa-
tent que toutes les statistiques de l'ins-
* Iruction publique donnent seulement
à l'Université (lycées et collèges), 10,000
élèves de plus qu'à l'enseignement
congréganiste. M. Combes a ainsi re-
connu que, partout,la nouvelle loi est
déjà tournée. Les anciens établisse-
ments congréganistes sont maintenant
entre les mains de prêtres séculiers
ou de laïques ayant le même esprit que
les congréganistes auxquels ils ont
succédé. ",
Ce n'est pas tout. M. Combes a ajouté
qu'il redoutait une pareille désillusion
à propos de l'enseignement primaire,
quand Finterdiction du droit d'ensei-
gner aux congrégations serait pronon-
cée et que, d'ailleurs, il accorderait
des délais à beaucoup de ces congré-
gations. Nous voilà bien loin de la dis-
parition immédiate de l'enseignement
congréganiste promise par M. Combes.
Et pourquoi avoir fait tant de bruit
pour être obligé de constater que tou-
tes lesécolesfermées rouvriront avecun
personnel professant la même hosti-
lité que l'ancien contre la République?
Le président du conseil aurait sûre-
ment mieux fait d'écouter ceux qui, il
y a un an, lui conseillaient de prendre
son temps, de construire des écoles
nouvelles et de dissoudre au fur et à
mesure des besoins les congrégations
ou les établissements congréganistes
qu'il ferait remplacer. Nous aurions
ainsi évité le gâchis dans lequel nous
nous trouvons.
Charles Bos.
UNE ŒUVRE A CRÉER
Retracer ici les bienfaits des patronages laï-
ques dans les divers arrondissements de Paris
est superflu. Nous avons relaté, au cours des
fêtes- annuelles ou d'inauguration, les succès
remportés par tous ces patronages. Nous avons
invité les familles à envoyer leurs enfants
dans ces groupements où la morale remplace
l'instruction religieuse, où les devoirs civiques
du citoyen viennent détrôner les commande-
ments de Dieu et de l'Eglise.
Lés patronages laïques énlèvent les enfants.
aux dangers de la rue, les amènent progressi-
vement jusqu'à l'époque du métier militaire
ou ils deviennent la proie des oiseaux noirs,
des curés de paroisse ou des aumôniers mili-
taires.
A Vincennes où j'ai fait mon service mili
taire, un patronage clérical était installé.
A la porte du quartier, des rabatteurs distri-
buaient des imprimés où l'on promettait, à t
ceux qui fréquenteraient cet antre, des lectures j
saines, - une salle bien - chauffée, des parties -- de
billard interminables. Grâce à une légère coti-
sation, des consommations étaient servies aux-
soldats de toutes armes qui prenaient le pré-
texte de la messe du dimanche, du salut ou du
patronage pour échapper aux corvées que les
camarades étaient obligés de faire.
Pourquoi dans les villes de garnisons le cer-
cle républicain de la région n'instituerait-il
pas un foyer qui deviendrait pour nos enfants
élevés dans la morale laïque un endroit de
réunion? Ce serait le meilleur moyen d'enrayer
au régiment l'invasion cléricale qui s'insinue
partout et qui cherche à faire oublier à nos
enfants, quand ils sont éloignés de nous, les
principes que nous leur avons inculqués.' À"
régiment, l'entraînement est tout ; les soldats
sont des moutons de Panurge ; où l'on va,
toute la carrée va. Au bout de quelques mois
les anciens auraient vite fait d'enseigner aux
bleus le chemin du patronage laïque et nous
n'aurions qu'à nous louer d'une pareille insti-
tution.
Je souhaite que ces quelques lignes soient
lues par le général Peigné que j'ai connu co-
lonel du 13" d'artillerie à Vincennes et qui,
dans ses paroles et dans ses actes, se montre
animé du plus pur esprit républicain, chose
rare à l'époque où l'institution des jésuites de
la rue Lhomond est la pépinière de nos futurs
officiers d'état major. — !J. G.
BIZARRE AFFAIRE D'HONNEUR ENTRE DÉPUTÉS
(De notre correspondant particulier)
Budapest, 20 novembre. -
M. Géza Polonyi et M. Louis Olay, tous deux
députés siégeant à l'extrême gauche de la
Chambré, s'aligneront sur le terrain pour une
affaire d'honneur des plus bizarres.
Il y a quelques jours, le ministre, M Béla
Tallian, a payé un dîner par suite d'un pari
perdu. Selon ce qui était convenu, il a dû in-
viter trois députés de la majorité gouverne-
mentale et trois de l'opposition. Parmi ces der-
niers étaient M. Polonyi et M. Olay.
M. Polonyi, qui est connu non seulement
comme un orateur remarquable mais aussi
comme une mauvaise langue, raconta le len-
demain dans les couloirs que son collègue Olay
ne sachant quel usage il fallait faire du « bÓl )
dans lequel les convives se trempent les doigts
après avoir mangé des huîtres, but l'eau
chaude .qui s'y trouvait. On riait beaucoup
dans le monde parlementaire. Mais M. Olay
trouva mauvaise cette plaisanterie et envoya
ses témoins à M. Polonyi.
DÉCOUVERTE DES M£MOIRES DU ROI SOBIESKI
(De notre correspondant particulier]
Varsovie, 20 novembre.
M. le comte Branicki, depuis quelque temps
propriétaire du château de Wilanow, ancienne
résidence du roi Jean Sobieski, a découvert,
dans un des vieux meubles des anciens appar-
tements royaux, un document du plus haut
intérêt historique. C'est un journal dans le-
quel le célèbre roi polonais a inscrit au jour le
jour les événements les plus importants de
sa vie. ',
On y trouve un récit complet de la campa-
gne au cours de laquelle Sobieski réussit à dé-
livrer Vienne qui était sur le point d'être pris
d'assaut par l'armée turque. Le roi raconte
aussi les incidents de son retour en Pologne.
Sans Sobieski le croissant aurait remplacé la
croix sur la cathédrale de Saint-Etienno de
Vienne. La maison des Habsbourgs n'en a su
gré, ni à lui, ni à ses compatriotes.
Maison neuve au Taiican
[De notre correspondant particulier}
Rome, 20 novembre.
Le pape a décidé de remplacer autant que
possible tous les fonctionnaires et dignitaires
du Saint-Siège qui ont déjà servi sous le pon-
tificat de Léon XIII. Il déplacera d'abord le
maire du palais, Cagiano d'Azevedo, et nom-
mera à sa place un personnage de confiance.
Il nommera prochainement un « uditore
très saint » qui sera encore choisi parmi ses
amis intimes.
J ,. ,\
LES LANGUES VIVANTES
, Leur suppression dans les écoles
normales
Un enseignement accessoire. - Ce qu'a
fait la République. — Une campa-
gne incompréhensible. — Son-
geons à notre activité com-
merciale et industrielle.
Défendons les lan-
gues vivantes.
L'enseignement des langues vivantes en
France n'a pas une longue histoire : il est né
avec nos dèrniers revers.
Ce sera l'honneur du gouvernement de là
République d'avoir su combler une lacune
profonde dans le savoir de la jeunesse fran-
çaise et de l'avoir armée en vue de la lutte
économique présente et future. Non pas que
les langues vivantes ne fussent pas enseignées
dans nos établissements scolaires.
L'enseignement des langues modernes, avant
la grande guerre n'était alors qu'un squelette,
qu'un corps sans âme, qu'un enseignement
accessoire. Aussi était-il confié à des étran-
gers, la plupart sans aptitude, n'offrant pas
toutes les garanties de savoir et de capacité
professionnelle, absolument indispensable à
tout éducateur de l'enfance.
Ce sont ces professeurs exotiques qui ont
éloigné de nombreuses générations de l'ensei-
gnement des langues vivantes et qui ont em-
pêché ce dernier de jouer le rôle qu'il joue en
ce moment.
Nous pouvons dire — et nous ne serons con-
tredit par personne — que la République a
non seulement organisé mais encore réhabilité
l'enseignement des langues vivantes dans notre
pays. :
Un concours efficac3
Pour cette réhabilitation des langues vivan-
tes auprès des familles et du public, le gou-
vernement reçut un concours efficace des mu-
nicipalités, des chambres de commerce, des
chambres syndicales, des grands établisse-
ments de crédit et des grosses maisons de com-
merce. Il étendit peu à peu l'étude de l'angbis
et de l'allemand à toutes nos écoles normales,
à nos écoles primaires supérieures et, enfin, à
notre enseignement commercial du soir.
Tous ces efforts portèrent leurs fruits et nous
pouvons affirmer que, sur ce point, nous avons
fait des progrès absolument uniques.
Nous nous apprêtons à faire plus et nous
nous réjouissons,avec le pays tout entier, des
résultats déjà obteuus dans toutes nos écoles,,
grâce a l energic des nouveaux inspecteurs gé-
néraux et au dévouement de tous les profes-
seurs, primaires ou secondaires, c'est pourquoi
nous ne partageons pas du tout les sentiments
de tous ceux qui, sous prétexte de quelques
milliers de francs d'économie, seraient heu-
reux de voir les langues vivantes proscrites de
l'enseignement primaire et devenir l'apanage
exclusif des lycées et collèges.
La campagne menée actuellement contre
l'enseignement des langues vivantes dans les
écoles normales et conséquemment, dans les
écoles primaires supérieures est incompréhen-
sible et inadmissible, on pourrait même la
qualifier d'anti-française; c'est une arme traî-
tresse, dont les coups porteront préjudice à
notre activité économique.
Notre enseignement est un ; il forme dans sa
complexité un organisme perfectible assuré-
ment, mais où la suppression de quelques
rouages pourrait apporter une profonde per-
turJjatiou et compromettre les résultats es-
pérés.
Fortifier au contraire tout notre enseigne-
ment primaire, pierre angulaire sur laquelle
repose tout notre enseignement national, don-
ner une forte culture à nos instituteurs, les
rendre aptes à bien enseigner les premiers
éléments des langues vivantes dans les cours
supérieurs de nos écoles primaires ou dans
les cours reconnus par les municipalités, n'est-
ce pas servir la cause de notre enseignement
secondaire et de notre commerce national ?
Moment mal choisi
Le moment de cette campagne est bien mal
choisi par ses auteurs. Comment, nous désar-
merions au moment où nos rivaux anglais et
américains encouragent de plus en plus l'en-
seignement des langues vivantes, où les Alle-
mands introduisent l'anglais et le français
dans toutes leurs écoles normales d'institu-
teurs et d'institutrices r Quel ne sera pas l'é-
tonnement de nos grands réformateurs — qui
pourraient dépenser leur activité sur d'autres
points où il y a tant à faire — quand nous
leur dirons qu'à Hambourg, les élèves des mo-
destes écoles primaires reçoivent, de 10 à 14
ans, 4 heures d'anglais par semaine.
Les Allemands, gens pratiques, n'ont pas des
idées aussi étroites et aussi obtuses que celles
de beaucoup de nos généreux compatriotes; ils
mettent au service de leur activité économique
toutes les armes propres à assurer la victoire.
Dans le grand port de l'Elbe, un trafic énorme
se fait avec l'Angleterre ; les rapports entre
Anglais et Allemands sont tellerrient nombreux
que la municipalité luxembourgeoise s'est em-
pressée de faciliter, d'étendre et do resserrer
ces rapports par tous les moyens possibles..
Grâce à l'enseignement de l'anglais dans les
écoles élémentaires - enseignement entièrement
confié aux instituteurs — elle a permis à ses
employés dé commerce de servir indifférem-
ment dans des maisons allemandes ou anglai-
ses ; à ses marins d'embarquer sur les navires
des deux nations. Nous pourrions procéder de
même dans nos grands ports de Dunkerque,
Boulogne, Le Havre, Bordeaux, Cette, Mar-
seille, Alger, etc. Mais que de cris, que de ré-
criminations ! Quel désespoir une semblable
mesure ne provoquerait-elle pas ? L'anglais,
l'allemand, l'italien, l'espagnol, à nos enfants
du peuple, excellente mesure en Allemagne ou
en Angleterre ; mais, dans la France démocra-
tique, allons donc !
Esprits arriérés
Nous ne croyons, pas que ces esprits réac-
tionnaires et contempteurs auront gain ; de
cause ! Ils ne sont plus de leur époque ; ils
n'ont, sûrement aucune 'notion des change-
ments qui s'opèrent autour de nous ; ils ou-
blient que la vapeur et l'électricité mettent en
contact non seulement les fils de bourgeois,
mais aussi les enfants du peuple ; que d'ail-
leurs, les législateurs et l'administration ne
tomberont pas dans le piège qui leur est tendu
et ne s'associeront pas à une mesure aussi an-
tilibérale et aussi antisociale.
Certes, il est possible de réaliser des écono-
mies sur un budget de trois milliards et demi,
mais non pas sur le ohapitre des écoles, dont
le but sacré est d'élever nos enfants, d'en
faire des hommes énergiques, capables d'af-
fronter la lutte économique qui, âpre et ar-
dente, se déroule partout sous nos yeux.
Nous voulons croire que les députés républi-
cains qui se sont toujours tenus à la tête du
progrès, n'hésiteront pas à enrayer cette fu-
neste campagne.
Cette question, paraît-il, fera l'objet d'une
discussion, dans la prochaine session du Con-
seil supérieur de l'Instruction publique; qu'ils
s'opposent avec nous, énergiquement, à toutes
ces tentatives maladroites qui tendent a dimi-
nuer la culture générale de nos instituteurs, à
lçs empêcher de se teuir directement au cou-
rant de tous les progrès qui s'accomplissent en
dehors de nos frontières.
Barrons la route à tous ces novateurs qui,
pour leur popularité et leur gloriole person-
nelle, iraient jusqu'à sacrifier des intérêts qui
nous sont chers à tous et qui sont intimement
liés à notre rayonnement, à notre prospérité
dans le monde. — André Duti.
Voir à la 3' page
les Dernières Dépêches
de la nuit
et la Revue des Journaux
du ixiatin
VINGT ANS APRES
Sous mes fenêtres un orgue de Barbarie moud
lamentablement un air dolent et plaintif pen-
dant que mes yeux parcourent les journaux
qui donnent des détails sur « le nouveau train
de vie » QI'.ç Humbert Daurignac.
- Tous les héros de la colossale escroquerie, à
la fois bouffonne et tragique, sont aujourd'hui
brisés, anéantis; Thérèse elle-même, la farou-
che, l'indomptée, dont le génie était fait d'ar-
rogance, d'aplomb et d'audace, Thérèse a perdu
sa superbe et s'est écroulée inerte, dans la pri-
son de Rennes,ne tressaillant même plus sous
les humiliations qu'a subies sa coquetterie de
femme.
Frédéric Humbert, tondu, rasé, livide, les os
des pommettes semblant percer les joues, n'est
plus qu'une loque humaine. Par dérision, sans
doute, on l'a écroué dans un château histori-
que, dans le château de Thouars, sur la porte
duquel est cette inscription : « Maison de
force ». Force ? Ce mot cache mal celui de
forçat.
On n'a rien laissé à Frédéric de sa vie d'an-
tan — rien, pas même son lorgnon qui a été
remplacé par des lunettes réglementaires.
Courbé en deux, trébuchant à chaque pas,
il s'efforce de suivre les autres détenus qui
marchent en file indienne autour d'un préau
gardé par des factionnaires, et il psaimodie,
hébété : « Gauche ! Droite ! Gauche ! Droite !»
Dans la journée, l'ancien député de Seinc-et
Marne, le fils de l'ancien ministre de la justice
mort Président de la Cour des Comptes, fait,..
des corsets
Tondus et rasés aussi, les frères Emile et
Romain Daurignac, qui déambulent dans le
préau de la prison de Poissy en psalmodiant
comme Frédéric : « Gauche ! Droite ! » Sous le
costume réglementaire : casaque de drogue!,'-
Béret; cliaussonset sabots de bois, ils ont perdu
leur belle jactance méridionale, si amusante
parfois, chez Romain.
Celui-ci (le nl 759,73^) fait des brosses. —
Emile (le n° 50,736) des abat-jour.
Voilà donc à quoi aboutit la conquête de
Paris par ces méridionaux qui, pendant vingt
ans, ont transformé en actes les rêves les plus
extravagants d'une imagination en délire.
Quel sera l'Alexandre Dumas qui écrira les
Vingt ans après de ces mousquetaires par trop
modernes ?
Sous mes fenêtres un orgue de Barbarie
moud lamentablement un air dolent et plain-
tif.
G. DE VORNEY.
- -
LE MINISTRE DE LA MARINE CONTflE L' « AVANT! »
(De notre correspondant particulierJ
Rome, 20 novembre 1903.
Il se déroule en eo moment, à Rome, un pro-
cès très important, dont la seule perspective,
il y a quelques mois, faillit renverser le mi-
nistère Zanardelli et provoqua la démission du
ministre de la marine, amiral Bettolo.
Voici les faits. Le journal socialiste VAvanti
avait publié des révélations très graves sur les
actes de la marine. Plusieurs discussions eu-
rent lieu à ce sujet à la Chambre, à la suite
desquelles le ministère faillit démissionner.
On se borna à nommer une commission
d'enquête, mais le ministre de la marine, dé-
cidé à poursuivre le journal l'Avanti, donna sa
démission et déposa une plainte.
En même temps, le corps des officiers supé-
rieurs de la marine poursuivait lui-même le
journal. 1
La plainte des officiers de la marine, portée
devant le tribunal avant celle du ministre, fut
rejelée, après plusieurs audiences,par le tribu-
nal, comme étant irrégulière, et les plaignants
condamnés aux frais.
Ce jugement, rendu sur la demande de M.
Ferri, député, directeur du journal VAmmti,
fut considéré parce dernier comme un triom-
phe précédant celui qu'il remporterait égale-
ment dans le procès intenté par l'ancien mi-
nistre Bettolo.
Ce nouveau procès est commencé depuis
trois jours. S'il se produit au cours des au-
diences des faits intéressants, je vous en ren-
drai compte. Je vous ferai connaître le juge-
ment. — P.
LES HOTTENTOTS DE L'AFRIQUE ALLEMANDE
fDe notre correspondant particulier)
Capetown, 20 novembre.
Une troupe de Bondelswartz est venue se ré-
fugier sur le territoire du Cap. Les hommes
ont été désarmés et internés dans un camp im-
provisé. Le gouvernement da Cap ne sai t pas
encore si cesfugitifsdoivent être traités comnre
prisonniers de guerr.,
Une dépêche annonce qu'à Scnndrift. au
sud-est de Warmbad, une grande action est
engagée entre Allemands et Hottentots.
L'issue de la bataille n'est pas encore connue.
LA DETTE ÉGYPTIENNE
(De notre correspondant particulier)
Le Caire, 20, novembre.
Au Palais du gouverneur on affirme que
Sir Eldon Gorst se rendra prochainement à
Londres avec la mission de préparer la con-
version de la Dette Unifiée Egyptienne et de
discuter sur le sort qu'on doit réserver à la
caisse de la Dette.
Naturalisation payés un million
(De notre correspondant particulier]
Bâic, 20 novembre.
11 ya quelques mois le Rappel, a raconté
qu'une nouvelle secte communiste-chrétienne
avait acheté presque toutes les terres et les
maisons de la commune de Grappenhoff pour
y fonder une colonie communiste.
M. Josué Kiein, le grand-pontife du nou-
.veau culte, vient d'acquérir la naturalisation
et le droit de cité pour lui et sa famille moyen-
nant une somme d'un million de francs. Sui-
vant un accord entre lui et le gouvernement
de Saint-Galle, 10,000 francs seulement seront
comptés comme « droit de sceaux », 200,000
francs seront donnés à l'Assistance publique,
95,000 francs à la fabrique de l'église, 000
francs aux écoles et 450,000 francs à la caisse
de la commune de Glarua.
LA JOURNEE
, - PARLEMENTAIRE
AU SENAT
L'enseignement et les congrégations
autorisées
L'amendement Delpech consiste, on le sait, à
interdire l'enseignement secondaire aux con
grégations autorisées comme à celles dont les
demandes ont été rejetées par la Chambre.
M. Thézard déclare, au début de la séance,
que la commission a délibéré, et, par 9 voix
contre 5, a décidé de proposer au Sénat d'a-
dopter l'amendement.
M. Maxime Lecomte prononce quelques pa-
roles heureusement tournées pour appuyer
l'amendement. 1
Discours de M. Combes
Voici le président du conseil à la tribune. Il
va préciser l'attitude du gouvernement, qui,
nous l'avons dit, accepte l'amendement Del-
pech.
M. Combes, d'accord en cela avec Jules Si-
mon, n'accepte pas la liberté d'enseignement
en tant que droit naturel.
M. Combes. — Les congrégations ont su, par
des manœuvres très habiles, attirer les fils de la
bourgeoisie et même de nos fonctionnaires.
Dans l'armée, les établissements de l'Etat étaient
frappés d'une sorte d'interdit.
M. de Cuverville. — Vous parlez de faits qui
sn sont passés en -1892. Mais on n'a pas voulu me
nommer alors vice-amiral, paree que j'étais catho-
lique et on n'a pas comblé la vacance qui existait
dans le codrc des vice-amiraux.
Le président du conseil. — En 1893, dans
une ville du Midi, un capitaine plaça ses deux fils
au collège. Ce fut une stupéfaction dans la ville
entière.
Tout le régiment s'était entendu, jusqu'alors,
pour que les enfants des officiers ne soient pas
envoyés au collège communal.
Le même fait est signalé par 4es recteurs pour
un certain nombre de régiment.
M. de Goulaine. — Combien avez-vous frappé
d'officiers pour cela ?
rd. Le Provost de Launay. - C'est de la
police infâme. (Exclamations.)
Le président du conseil. — Je souhaite que
les mœurs policières n'aillent jamais plus loin.
(Applaudissements à gauche.)
Comment un proviseur n'aurait pas le droit
de dire à son ministre qu'il n'a pas de fils d'offi-
ciers ?
Plusieurs recteurs signàlent que c'est surtout
du côté de l'armée qu'est le danger pour l'Uni
versité et l'Etat. On n'hésite pas à répudier hau-
tement et publiquement l'enseignemant universi-
taire.
En parcourant tous ces rapports, je fus profon-
dément attristé. Je n'ai pas cru devoir citer ces
faits en 1901.
Je m'en suis tenu aux principes et cela a suffi
pour que le Sénat me donnât raison à une grande
majorité. Je peux représenter aujourd'hui les mô-
mes arguments.
Un mouvement marqué d'attention se pro-
duit quand le président, M. Fallières, donne la
parole à M. Waldeck-Rousseau.
Discours de M. Waldeck-Rousseau
Avec la merveilleuse clarté que ses adver-
saires les plus ardents ne peuvent s'em-
pêcher d'admirer, l'ancien président du Conseil
fait l'exposé de la situation, qu'il critique vi-
vement.
M. Waldeck-Rousseau. — Ce qui frappe
surtout, au milieu des événements du jour, c'est
cette instabilité dans les idées, les programmes et
les solutions dont nous sommes les témoins.
C'est cet état d'esprit qui, de jour en jour, novs
entraîne eu avant vers un but de plus en plus dif-
ficile à saisir. C'est cette modification continuelle
du plan de campagne qui exige tous les matins un
nouvel effort législatif. (Vifs applaudissements.)
D'ordinaire, on juge de la valeur d'un plan de
campagne à ce trait qu'il se simplifie à mesure
qu'on l'applique, e'est-à-dire que l'on gagne du
terrain, que l'on obtient des avantages. Nous n'en
sommes point là. Il semblé bien que le plan de
campagne se complique à mesure qu'il se réalise,
se complique et s'élargit au point d'embrasser cha-
que jour un champ de plus en plus vaste.
J'avais prévu et indiqué moi-même que là était
le danger. Il n'était pas nécessaire d'être grand
prophète pour l'entrevoir. Beaucoup pensaient
comme moi. Le gouvernement paraît avoir eu,
d'abord, le même sentiment; -puis il a cédé, du
moins les circonstances autorisent cette supposi-
tion, aux conseils d'amis plus hardis ou plus im-
patients. (Applaudissements sur divers bancs.)
C'est alors que M. Girard a proposé de suppri-
mer l'enseignement de toutes les congrégations
autorisées. Comment tire-t-ou si pCII de fruit de
l'expérience ? Alors que l'œuvre entreprise, trop
lourde, n'a pas abouti, on propose de l'aggraver,
de la décupler.
11 est vrai qu'on dit qu'il ne s'agit que de l'en-
seignement secondaire. Si vous statuez en cette
matière, il est impossible de ne pas statugr dans
l'enseignement primaire. (Très bien!)
Tous les principes seraient méconnus si on
agissait autrement. Le problème à solutionner
comprend donc non seulement l'enseignement se-
condaire, mais aussi l'enseignement primaire. Il
faut donc voir les conséquences de cette réforme
complète.
Les charges en sont si écrasantes que le gou-
vernement n'esi pas en mesure de les acquitter.
Nous manquohs d'ailleurs de renseignements sur
l'importance de ces charges. Le Sénat a li droit et
le devoir d'avoir ces renseignements. (Très bien !
Très bien ! )
Comment a-t il pu paraître possible qu'une pa-
reille réforme fut votée sans avoir été discutée à
fond ici, et n'ayant été discutée qu'en dehors do
cette enceinte ?
D'ailleurs, la mesure proposée ne donne aucune
forcé nouvelle au gouvernement. II l'avait même
rejetée de son texte (Très bien il en ne visant que
les congréganistes non autorisés. (Applaudisse-
ments.)
Je comprendrais ce qu'on nous propose, si nous
étions en face d'un danger pressant. Mais je dis
que vous ètes armés. Vous ne faites pas ce que
vous pouvez faire et vous demandez à faire ce que
vous ne pouvez pas faire.
La loi de 1901 donne au gouvernement le droit
de retirer les autorisations donuées aux établisse-
ments congréganistes. Il peut donc procéder par
échelons et étapes.
La loi de 1901 n'est donc pas une loi stérile. Elle
a produit des résultats. Elle contient toutes les ar-
mes dont le gouvernement a besoin.
Nous ne pourrons donc pas voter l'amendement
de M. Delpech. 11 est à sa place dans un autre dé-
bat.
D'ailleurs, le gouvernement lui-même, il y a
huit jours à peine, a déclaré que la question devait
être tranchée dans un projet de loi spécial. (Vifs
applaudissements sur un grand nombre de; bancs.)
Réplique do président dn Conseil
M. Combes réplique. Il paraît gêné par la
nécessité de l'improvisation; il peine visible-
ment, s essouffle et se perd dans les digres-
sions.
M. Combas,président du Conseil. - Du mo-
ment où l'on abroge la loi Falloux, charte de fon-
dation de l'enseignement congréganiste, c'est bien
dans la loi qui prononce cette abrogation qu'on
doit dire si, oui ou non, la congrégation pourra
continuer, ou recommencer ce qu'on lui reproche.
C'est une question de principe que le Sénat aura
a cœur de trancher.
Aucun supplément de dépenses n'est à redouter.
Il faut que chucun ait la responsabilité de son
vote. Le gouvernement ne consent pas à l'ajour-
nement qui est la conclusion des discours de M.
Waldeck-Rousseau. (Applaudissements à gauche.)
M. Emile Labiche pose la question sui-
vante:
M. Emile Labiche. — La loi s'appliquera-t-
elle aux établissements sedondaires de fllIes? Fer
me-t-elle les écoles congréganistes de filles ?
r Le président du conseil. — Les congréga-
tions ne donnent aux filles que l'enseignement pri-
maire supérieur. Nous n'avons pas à fermer des
établissements d'enseignement secondaire qui
n'existent pas. Je me bornerai à les ramener à
1 application de leurs statuts si elles les ont dé-
passés.
Discours de M. Clemenceau
M. Clemenceau sent bien que. le chef du gou-
vernement n'a pas présenté une défense bril-
lante. L'orateur de l'extrême-gaucbe se pro-
pose pour l'adversaire digne de lui qu'attend
M. Waldeck Rousseau.
-- M. Clemenceau. -- La situation est ce qu'elle
est la cause première en doit être attribuée à M.
Waldeck-Rousseau. C'est lui qui nous a mis en
route.
M. Waldeck-Roussean a reproché à M. Combes
d'avoir mal appliqué sa loi; M. Waldeck-Rousseau
n avait qu'à ne pas quitter le pouvoir et à l'appli-
quer lui-mêmé. On a applaudi M. Waldeck-
Housseau quand il est entré dans cette voie; on
applaudit maintenant M. Combes qui y persé-
vère.
Je vois dans le parti républicain deux pnrtis : le
parti de la laïcisation et le parti de la cléricalisa-
tion. Je ne veux pas dire qu'il y a un parti de recul'
mais il y a un parti qui a peur de déclérîcaliser
(Applaudissements à l'extrême-gauche. )
L'amendement Delpech est adopté par 147
voix contre 136.
A mardi. — H. D.
A LA CHAMBRE
LE BUDGET
DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. d'Estournelles de Constant répond, dans
la discussion générale du budget des affaires
étrangères, au discours de M. Deschanel.
M. d'Estournelles de Constant. — Le dis-
cours de M. Deschanel appelle quelques réserves de
ma part. Le rapprochement franco-anglais n'est
dirigé contre personne et n'a pour but que la con-
solidation de la paix. 1
M. Deschanel a fait un .très bel éloge des progrès
de l'arbitrage. Mais je m'étonpe des réserves qu'il
a faites au sujet des initiateurs de ce mouvement.
Il a dit-que nous avions confondu l'arbitrage et le
désarmement. Je tiens à dire que je n'ai jamais
préconisé le désarmement immédiat. Depuis M.
Jaurès jusqu'à M. Frédéric Passy, nous estiméns
qu'avant d'arriver au désarmement, qui est le der-
nier terme de la politique pacifique, il ne sera èb-
tenu qu'après entente avec les puissances.
Il faudra arriver à limiter progressivement les
armements. L'Europe continue sans cesse ses arme-
ments. Devons-nous laisser se poursuivre cette
course à l'abîme, ou, au contraire, devons-nous
tout faire pour l'arrêter? C'est cette dernière solu.
tion qui est la nôtre. (Applaudissements.)
Discours de M. G. Hubbard
Notre ami G. 'Hubbard prononce un su-
perbe discours oÙ il expose quelle doit être
l'attitude des esprits de sang-froid et des paci-
fiques vis-à-vis de l'alliance avec la Russie et
de l'entente cordiale avec l'Angleterre. II traite
ensuite, avec la largeur de vues et la chaude
éloquence qu'on lui connaît, le problème du
désarmement.
M. G. Hubbard. - Que la France se fasse
l'interprète de tous les groupements scientifiques,
littéraires ou' religieux qui poursuivent la prix
universelle, des sociétés de la paix du monde en-
tier, et elle restera à la hauteur de sa mission civi-
lisatrice. ,
Le budget devrait entourer la cour de !a Haye de
plus de bienveillance : ou olle n'y tigu-e pas, ou
elle n'y figure que pour une somme infime.
M. Delcassé — Il y a quinze jours seulement,
j'ai reçu le compte des dépenses de la commission
administrative de la Haye. ;le me suis empressé
de les transmettre à la commission. L-s dépenses
sont proportionnées au nom:r.'e et à l'importance
des affaires. On ne peut donc pas les prévoir.
M. Hubbard. — L'Institut international de la
paix, à Berne, reçoit une subvention régulière.
Pourquoi ne pas subventionner aussi régulière-
ment la cour permanente d'arbitrage ?
Trop longtemps, le droit est né du fait, dans une
Europe qui a eu l'orgueil de la victoire militaire
et de la guerre. Il faut que, dans une Europe pa-
cifiée et pacifique, le fait naisse du droit. Voilèt
pourquoi je salue l'entente franco-italienne, sur-
tout si vous faites, monsieur le ministre, disparaî-
tre cette ambassade du Vatican, dont la suppres-
sion achèvera le rapprochement de l'Italie avec la
France.
Je demande à la politique extérieure de la France
de servir la grande cause du désarmement. Elle
répondra ou vœu de sa démocratie en prenant
l'initiative des conférences internationales en vue
dit désarmement. *-
M. Boni de Castellane prononce un discours
qui constitue pour lui un bon début à la tri-
bune de la Chambre. On ne saurait d'ailleurs
approuver sa singulière attaque contre le peu- *
pIe italien.
M. B de Castellane. - La politique italienne
a été la grande erreur, la grande faute de Napo-
léon 111; nos gouvernants retombent dans cette
erreur par une étrange et déplorable aberration.
Notre politique extérieure ne doit pas être une
politique vaguement humanitaire, mais une poli-
tique nationale avec tout ce que ce mot com-
porte de légitimes égoïsmes, une politique éner-
gique et suivie, au lieu d'une politique livrée
au hasard des événements et des influences du mo-
ment.
M. Gauthier (de Clagny) interroge le minis-
tre des affaires étrangères sur les événements
du Maroc.
M. Deloncle rappelle la question du Siam.
M. Jaurès parle longuement de la question
du Maroc. Ll craint que l'on ne dépense beau-
coup d'argent et que l'on n'use beaucoup
d'hommes pour conquérir la --Nlaroc.
M. Jaurès — Ces sacrifices, et bien moindres
et plus efficaces, je vous demande de les faire par
la pénétration pacifique du Maroc. -
Je vous demande d'y créer des infirmeries comme
en Algérie, d'y amener des réserves de grains con-
tre la famine. Je demande au gouvernement d'ins-
crire -ces-dépenses au budget; de les inscrire ou-
vertement car nous n'avons rien à cacher. (Très
bien !)
Je lui demande, je demandj à la Chambre, d'ou-
vrir le budget de pénétration pacifique du Maroc
pour éviter d'ouvrir le budget autrement coûteux
de la pénétration militaire du Maroc.
M. Denys-Cochin porte à la tribune l'ex-
pression, des ordinaires préoccupatiqps du
parti catholique.
M. Denys-Cochin. — Je suis inquiet de ce qui
s'est pass* é en Tunisie, de la fermeture de nos éco-
les libres C'est l'exportation d'une politique fu-
neste. Et comment prendrez-vous la défense de
nos nationaux dans les pays lointains, alors que
c'est vous qui donnez l'exemple de la persécution
contre eux,:
Discours de M. Thomson f
M. Thomson, très documenté, n'a pas de
peine à justifier la politique républicaine et
laïque dans son action aux colonies et notam-
ment en Tunisie.
M..Thomson. — Non seulement il était bon
de supprimer les congrégations enseignantes en
Tunisie, mais il faut encore pousser plus loin J'am.
vre de la laïcisation dans tout le protectorat. Au-
cun culte n'est subventionné en Tunisie.
Dans tous les cas, la suppression des écoles cou
gréganistes sera utile à l'influence française car
plusieurs d'entre elfes étaient dirigées par desf prê-
tres étrangers.
Elles ne pourront plus, par suite, donner un en-
seignement contraire à la vérité des faits. Elles ne
pourront plus dire de Jules Ferry toutes ces ca-
lomnies qu'elles ont propagées à Tunis, où le sou-
vehir de M. Jules Ferry est aimé, où ce grand ci-
toyen a sa statue (Vifs applaudissements). 1
M. de Pressensé a besoin de tout le reste de
la séance pour prononcer un grand discours
où il passe en revue toutes les questions qui
sont plus ou moins à l'ordre du jour.
<3IPJ'0"--*0SX«"-TIMESS le Wumêror .,_.u',.":" .:,";" - ., psrîS g SÊPAPTtMENTSV - ;
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te Wnmêro CINQ XXïVXSS
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De 4 & 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du malin
N* J.2308. - Dimanche 22 Novexxibre 190^
.1 30 BRUMAIRE AN 119
ADMINISTRATION: 14, rue lu ":&il
Adresser lettres et mandais à l'Administrateur
:: NOS LEADERS
L'nsignillnt seconaire
Le principe de l'interdiction du droit
d'enseigner aux congrégations, auto-
risées ou non, a triomphé hier au
Sénat. A une petite majorité, il est
vrai : onze voix. Mais cette majorité
nous suffit à nous autres républicains
anticléricaux. Nous en aurons, en ef-
fet, une autre bien plus considérable
à la Chambre.
Ainsi, peut-être, aura vécu bientôt
l'enseignement congréganiste. Je dois
dire tout de suite que M. Combes,
malheureusement pour lui, n'est pour
rien dans ce succès dont tous les ré-
publicains se félicitent. Son projet ne
visait pas les congrégations autorisées.
Il a dû, sous peine de voir sa majorité
Se couper en deux, accepter un amen-
dement de M. Delpech. Comment d'ail-
leurs a-t-il défendu cet amendement ?
Mal, très mal, au point qu'il faut dé-
clarer, pour rendre hommage à la
vérité, que le Sénat a voté le principe
si cher aux républicains malgré l'in-
tervention du président du conseil.
Dans toute cette affaire, on sent que
M. Combes pprie contre sa propre opi-
,: nion. Or, quand on parle sans être
convaincu, on parle mal. Je ne m'é-
tonne donc pas de l'insuffisance de ses.
; observations. A la fin de la session der-
nière, j'avais en effet tenté de faire vo-
1er par la Chambre un projet de ré-
solution analogue à l'amendement de
M. Delpech et je m'étais heurté à un re-
fus obstiné de M. Combes. Depuis qua-
tre mois, M. Combes n'a pu, évidem-
ment, changer de sentiment sur la
question de la liberté de l'enseigne-
ment. De là son discours d'hier, embar-
- rassé, sans largeur de vues, émaillé de
statistiques douteuses et de remarques
plus douteuses encore.
.**
Il aeu affaire à forte partie. M, Wal-
deck-Rousseau, aussi maître de sa pen-
sée et de sa parole que dans ces gros-
ses séances mouvementées de la Cham-
bre, lors de la discussion de la loi sur
les associations, a critiqué vivement
* et avec des arguments juridiques dont
la vérité n'a échappé à personne, la
politique de M. Combes. Quels résul-
tats a donnés cette politique ? Aucun.
On a embrouillé comme à plaisir tou-
tes les questions ; on a demandé
à la loi des associations plus qu'elle
ne pouvait produire > on a cherché
'toujours à faire voter des lois de cir-
constance qui ne sont que des expé-
dients. Expédient, cette fameuse pro-
position de loi Massé, que le Sénat con-
serve précieusement dans ses cartons,
Jjparce que « sans doute, c'est un en-
tant qui ne donne aucun orgueil à son
père ». Expédients, toutes ces ferme-
tures d'écoles dont la-plupart ont été
rouvertes..
Et très habilement, M. Waldeck-
Rousseau, toujours fidèle à ses engage-
ments et au respect de la loi, a posé
Bette question : « L'amendement Del-
pech est-il nécessaire? Que fait-on
4e l'article de la loi des associations
qui autorise le gouvernement à dis-
soudre, sur simple décret,sans avoir à
fournir de raisons à qui que ce soit,
telle ou teUe congrégation autorisée et
à fermer les établissements qui le gê-
neraient dequelquefaçon que ce fût '?».
Il est visible que M. Combes ne veut
pas se départir de son système de gou-
vernement : Ne jamais diriger sa ma-
jorité, la suivre toujours. Or, il est cer-
tain que M. Combes a le droit de dis-
soudre les congrégations autorisées. Il
ne veut pas le faire de son propre gré,
mais il demande au Parlement de lui
ordonner par une loi de faire ce qu'il
pourrait faire personnellement. C'est
un déplacement de responsabilités. Le
pouvoir législatif devient le pouvoir
exécutif, et M. Combes, se refusant a
r ; Tien faire de lui-même, se borne à exé-
, cuter les décisions du Parlement.
L Le discours de grande allure, si juri-
dique et si élevé de M. Waldeck-Rous-r
seau, avait fait une énorme impression.
M. Combes a tenté d'y répondre. Mais
sa réponse a produit un désenchante-
ment général. J'y reviendrai tout à
l'heure. Il a fallu que Clémenceau se
levât pour repêcher ce gouvernement
qui barbotait dans de piteuses explica-
tions, car c'est Clemenceau qui l'a
sauvent avec quelle habileté !
Il a renouvelé une de ces manoeu-
vres qui lui étaient jadis si familières.
• Mais d'une manœuvre de renverse-
ment, il a fait un merveilleux outil de
sauvetage. Un cliquetis de mots, d'op-
positions de personnes et de formules
et cela a suffi. M. Combes, après cette
opération, avait une majorité de
11 voix sur laquelle il n'avait pas osé
compter.
.(., - ,',.¡. ***
i Dans sa réponse, il avait malheu-
reusement fait deux aveux terribles
qui engendreront, je le crains fort
- avec lui, une profonde déception dans
le pays. Il n'y a plus, a-t-il dit d'a-
bord, d'écoles congréganistes secon-
daires en France, alors qu'il est pa-
tent que toutes les statistiques de l'ins-
* Iruction publique donnent seulement
à l'Université (lycées et collèges), 10,000
élèves de plus qu'à l'enseignement
congréganiste. M. Combes a ainsi re-
connu que, partout,la nouvelle loi est
déjà tournée. Les anciens établisse-
ments congréganistes sont maintenant
entre les mains de prêtres séculiers
ou de laïques ayant le même esprit que
les congréganistes auxquels ils ont
succédé. ",
Ce n'est pas tout. M. Combes a ajouté
qu'il redoutait une pareille désillusion
à propos de l'enseignement primaire,
quand Finterdiction du droit d'ensei-
gner aux congrégations serait pronon-
cée et que, d'ailleurs, il accorderait
des délais à beaucoup de ces congré-
gations. Nous voilà bien loin de la dis-
parition immédiate de l'enseignement
congréganiste promise par M. Combes.
Et pourquoi avoir fait tant de bruit
pour être obligé de constater que tou-
tes lesécolesfermées rouvriront avecun
personnel professant la même hosti-
lité que l'ancien contre la République?
Le président du conseil aurait sûre-
ment mieux fait d'écouter ceux qui, il
y a un an, lui conseillaient de prendre
son temps, de construire des écoles
nouvelles et de dissoudre au fur et à
mesure des besoins les congrégations
ou les établissements congréganistes
qu'il ferait remplacer. Nous aurions
ainsi évité le gâchis dans lequel nous
nous trouvons.
Charles Bos.
UNE ŒUVRE A CRÉER
Retracer ici les bienfaits des patronages laï-
ques dans les divers arrondissements de Paris
est superflu. Nous avons relaté, au cours des
fêtes- annuelles ou d'inauguration, les succès
remportés par tous ces patronages. Nous avons
invité les familles à envoyer leurs enfants
dans ces groupements où la morale remplace
l'instruction religieuse, où les devoirs civiques
du citoyen viennent détrôner les commande-
ments de Dieu et de l'Eglise.
Lés patronages laïques énlèvent les enfants.
aux dangers de la rue, les amènent progressi-
vement jusqu'à l'époque du métier militaire
ou ils deviennent la proie des oiseaux noirs,
des curés de paroisse ou des aumôniers mili-
taires.
A Vincennes où j'ai fait mon service mili
taire, un patronage clérical était installé.
A la porte du quartier, des rabatteurs distri-
buaient des imprimés où l'on promettait, à t
ceux qui fréquenteraient cet antre, des lectures j
saines, - une salle bien - chauffée, des parties -- de
billard interminables. Grâce à une légère coti-
sation, des consommations étaient servies aux-
soldats de toutes armes qui prenaient le pré-
texte de la messe du dimanche, du salut ou du
patronage pour échapper aux corvées que les
camarades étaient obligés de faire.
Pourquoi dans les villes de garnisons le cer-
cle républicain de la région n'instituerait-il
pas un foyer qui deviendrait pour nos enfants
élevés dans la morale laïque un endroit de
réunion? Ce serait le meilleur moyen d'enrayer
au régiment l'invasion cléricale qui s'insinue
partout et qui cherche à faire oublier à nos
enfants, quand ils sont éloignés de nous, les
principes que nous leur avons inculqués.' À"
régiment, l'entraînement est tout ; les soldats
sont des moutons de Panurge ; où l'on va,
toute la carrée va. Au bout de quelques mois
les anciens auraient vite fait d'enseigner aux
bleus le chemin du patronage laïque et nous
n'aurions qu'à nous louer d'une pareille insti-
tution.
Je souhaite que ces quelques lignes soient
lues par le général Peigné que j'ai connu co-
lonel du 13" d'artillerie à Vincennes et qui,
dans ses paroles et dans ses actes, se montre
animé du plus pur esprit républicain, chose
rare à l'époque où l'institution des jésuites de
la rue Lhomond est la pépinière de nos futurs
officiers d'état major. — !J. G.
BIZARRE AFFAIRE D'HONNEUR ENTRE DÉPUTÉS
(De notre correspondant particulier)
Budapest, 20 novembre. -
M. Géza Polonyi et M. Louis Olay, tous deux
députés siégeant à l'extrême gauche de la
Chambré, s'aligneront sur le terrain pour une
affaire d'honneur des plus bizarres.
Il y a quelques jours, le ministre, M Béla
Tallian, a payé un dîner par suite d'un pari
perdu. Selon ce qui était convenu, il a dû in-
viter trois députés de la majorité gouverne-
mentale et trois de l'opposition. Parmi ces der-
niers étaient M. Polonyi et M. Olay.
M. Polonyi, qui est connu non seulement
comme un orateur remarquable mais aussi
comme une mauvaise langue, raconta le len-
demain dans les couloirs que son collègue Olay
ne sachant quel usage il fallait faire du « bÓl )
dans lequel les convives se trempent les doigts
après avoir mangé des huîtres, but l'eau
chaude .qui s'y trouvait. On riait beaucoup
dans le monde parlementaire. Mais M. Olay
trouva mauvaise cette plaisanterie et envoya
ses témoins à M. Polonyi.
DÉCOUVERTE DES M£MOIRES DU ROI SOBIESKI
(De notre correspondant particulier]
Varsovie, 20 novembre.
M. le comte Branicki, depuis quelque temps
propriétaire du château de Wilanow, ancienne
résidence du roi Jean Sobieski, a découvert,
dans un des vieux meubles des anciens appar-
tements royaux, un document du plus haut
intérêt historique. C'est un journal dans le-
quel le célèbre roi polonais a inscrit au jour le
jour les événements les plus importants de
sa vie. ',
On y trouve un récit complet de la campa-
gne au cours de laquelle Sobieski réussit à dé-
livrer Vienne qui était sur le point d'être pris
d'assaut par l'armée turque. Le roi raconte
aussi les incidents de son retour en Pologne.
Sans Sobieski le croissant aurait remplacé la
croix sur la cathédrale de Saint-Etienno de
Vienne. La maison des Habsbourgs n'en a su
gré, ni à lui, ni à ses compatriotes.
Maison neuve au Taiican
[De notre correspondant particulier}
Rome, 20 novembre.
Le pape a décidé de remplacer autant que
possible tous les fonctionnaires et dignitaires
du Saint-Siège qui ont déjà servi sous le pon-
tificat de Léon XIII. Il déplacera d'abord le
maire du palais, Cagiano d'Azevedo, et nom-
mera à sa place un personnage de confiance.
Il nommera prochainement un « uditore
très saint » qui sera encore choisi parmi ses
amis intimes.
J ,. ,\
LES LANGUES VIVANTES
, Leur suppression dans les écoles
normales
Un enseignement accessoire. - Ce qu'a
fait la République. — Une campa-
gne incompréhensible. — Son-
geons à notre activité com-
merciale et industrielle.
Défendons les lan-
gues vivantes.
L'enseignement des langues vivantes en
France n'a pas une longue histoire : il est né
avec nos dèrniers revers.
Ce sera l'honneur du gouvernement de là
République d'avoir su combler une lacune
profonde dans le savoir de la jeunesse fran-
çaise et de l'avoir armée en vue de la lutte
économique présente et future. Non pas que
les langues vivantes ne fussent pas enseignées
dans nos établissements scolaires.
L'enseignement des langues modernes, avant
la grande guerre n'était alors qu'un squelette,
qu'un corps sans âme, qu'un enseignement
accessoire. Aussi était-il confié à des étran-
gers, la plupart sans aptitude, n'offrant pas
toutes les garanties de savoir et de capacité
professionnelle, absolument indispensable à
tout éducateur de l'enfance.
Ce sont ces professeurs exotiques qui ont
éloigné de nombreuses générations de l'ensei-
gnement des langues vivantes et qui ont em-
pêché ce dernier de jouer le rôle qu'il joue en
ce moment.
Nous pouvons dire — et nous ne serons con-
tredit par personne — que la République a
non seulement organisé mais encore réhabilité
l'enseignement des langues vivantes dans notre
pays. :
Un concours efficac3
Pour cette réhabilitation des langues vivan-
tes auprès des familles et du public, le gou-
vernement reçut un concours efficace des mu-
nicipalités, des chambres de commerce, des
chambres syndicales, des grands établisse-
ments de crédit et des grosses maisons de com-
merce. Il étendit peu à peu l'étude de l'angbis
et de l'allemand à toutes nos écoles normales,
à nos écoles primaires supérieures et, enfin, à
notre enseignement commercial du soir.
Tous ces efforts portèrent leurs fruits et nous
pouvons affirmer que, sur ce point, nous avons
fait des progrès absolument uniques.
Nous nous apprêtons à faire plus et nous
nous réjouissons,avec le pays tout entier, des
résultats déjà obteuus dans toutes nos écoles,,
grâce a l energic des nouveaux inspecteurs gé-
néraux et au dévouement de tous les profes-
seurs, primaires ou secondaires, c'est pourquoi
nous ne partageons pas du tout les sentiments
de tous ceux qui, sous prétexte de quelques
milliers de francs d'économie, seraient heu-
reux de voir les langues vivantes proscrites de
l'enseignement primaire et devenir l'apanage
exclusif des lycées et collèges.
La campagne menée actuellement contre
l'enseignement des langues vivantes dans les
écoles normales et conséquemment, dans les
écoles primaires supérieures est incompréhen-
sible et inadmissible, on pourrait même la
qualifier d'anti-française; c'est une arme traî-
tresse, dont les coups porteront préjudice à
notre activité économique.
Notre enseignement est un ; il forme dans sa
complexité un organisme perfectible assuré-
ment, mais où la suppression de quelques
rouages pourrait apporter une profonde per-
turJjatiou et compromettre les résultats es-
pérés.
Fortifier au contraire tout notre enseigne-
ment primaire, pierre angulaire sur laquelle
repose tout notre enseignement national, don-
ner une forte culture à nos instituteurs, les
rendre aptes à bien enseigner les premiers
éléments des langues vivantes dans les cours
supérieurs de nos écoles primaires ou dans
les cours reconnus par les municipalités, n'est-
ce pas servir la cause de notre enseignement
secondaire et de notre commerce national ?
Moment mal choisi
Le moment de cette campagne est bien mal
choisi par ses auteurs. Comment, nous désar-
merions au moment où nos rivaux anglais et
américains encouragent de plus en plus l'en-
seignement des langues vivantes, où les Alle-
mands introduisent l'anglais et le français
dans toutes leurs écoles normales d'institu-
teurs et d'institutrices r Quel ne sera pas l'é-
tonnement de nos grands réformateurs — qui
pourraient dépenser leur activité sur d'autres
points où il y a tant à faire — quand nous
leur dirons qu'à Hambourg, les élèves des mo-
destes écoles primaires reçoivent, de 10 à 14
ans, 4 heures d'anglais par semaine.
Les Allemands, gens pratiques, n'ont pas des
idées aussi étroites et aussi obtuses que celles
de beaucoup de nos généreux compatriotes; ils
mettent au service de leur activité économique
toutes les armes propres à assurer la victoire.
Dans le grand port de l'Elbe, un trafic énorme
se fait avec l'Angleterre ; les rapports entre
Anglais et Allemands sont tellerrient nombreux
que la municipalité luxembourgeoise s'est em-
pressée de faciliter, d'étendre et do resserrer
ces rapports par tous les moyens possibles..
Grâce à l'enseignement de l'anglais dans les
écoles élémentaires - enseignement entièrement
confié aux instituteurs — elle a permis à ses
employés dé commerce de servir indifférem-
ment dans des maisons allemandes ou anglai-
ses ; à ses marins d'embarquer sur les navires
des deux nations. Nous pourrions procéder de
même dans nos grands ports de Dunkerque,
Boulogne, Le Havre, Bordeaux, Cette, Mar-
seille, Alger, etc. Mais que de cris, que de ré-
criminations ! Quel désespoir une semblable
mesure ne provoquerait-elle pas ? L'anglais,
l'allemand, l'italien, l'espagnol, à nos enfants
du peuple, excellente mesure en Allemagne ou
en Angleterre ; mais, dans la France démocra-
tique, allons donc !
Esprits arriérés
Nous ne croyons, pas que ces esprits réac-
tionnaires et contempteurs auront gain ; de
cause ! Ils ne sont plus de leur époque ; ils
n'ont, sûrement aucune 'notion des change-
ments qui s'opèrent autour de nous ; ils ou-
blient que la vapeur et l'électricité mettent en
contact non seulement les fils de bourgeois,
mais aussi les enfants du peuple ; que d'ail-
leurs, les législateurs et l'administration ne
tomberont pas dans le piège qui leur est tendu
et ne s'associeront pas à une mesure aussi an-
tilibérale et aussi antisociale.
Certes, il est possible de réaliser des écono-
mies sur un budget de trois milliards et demi,
mais non pas sur le ohapitre des écoles, dont
le but sacré est d'élever nos enfants, d'en
faire des hommes énergiques, capables d'af-
fronter la lutte économique qui, âpre et ar-
dente, se déroule partout sous nos yeux.
Nous voulons croire que les députés républi-
cains qui se sont toujours tenus à la tête du
progrès, n'hésiteront pas à enrayer cette fu-
neste campagne.
Cette question, paraît-il, fera l'objet d'une
discussion, dans la prochaine session du Con-
seil supérieur de l'Instruction publique; qu'ils
s'opposent avec nous, énergiquement, à toutes
ces tentatives maladroites qui tendent a dimi-
nuer la culture générale de nos instituteurs, à
lçs empêcher de se teuir directement au cou-
rant de tous les progrès qui s'accomplissent en
dehors de nos frontières.
Barrons la route à tous ces novateurs qui,
pour leur popularité et leur gloriole person-
nelle, iraient jusqu'à sacrifier des intérêts qui
nous sont chers à tous et qui sont intimement
liés à notre rayonnement, à notre prospérité
dans le monde. — André Duti.
Voir à la 3' page
les Dernières Dépêches
de la nuit
et la Revue des Journaux
du ixiatin
VINGT ANS APRES
Sous mes fenêtres un orgue de Barbarie moud
lamentablement un air dolent et plaintif pen-
dant que mes yeux parcourent les journaux
qui donnent des détails sur « le nouveau train
de vie » QI'.ç Humbert Daurignac.
- Tous les héros de la colossale escroquerie, à
la fois bouffonne et tragique, sont aujourd'hui
brisés, anéantis; Thérèse elle-même, la farou-
che, l'indomptée, dont le génie était fait d'ar-
rogance, d'aplomb et d'audace, Thérèse a perdu
sa superbe et s'est écroulée inerte, dans la pri-
son de Rennes,ne tressaillant même plus sous
les humiliations qu'a subies sa coquetterie de
femme.
Frédéric Humbert, tondu, rasé, livide, les os
des pommettes semblant percer les joues, n'est
plus qu'une loque humaine. Par dérision, sans
doute, on l'a écroué dans un château histori-
que, dans le château de Thouars, sur la porte
duquel est cette inscription : « Maison de
force ». Force ? Ce mot cache mal celui de
forçat.
On n'a rien laissé à Frédéric de sa vie d'an-
tan — rien, pas même son lorgnon qui a été
remplacé par des lunettes réglementaires.
Courbé en deux, trébuchant à chaque pas,
il s'efforce de suivre les autres détenus qui
marchent en file indienne autour d'un préau
gardé par des factionnaires, et il psaimodie,
hébété : « Gauche ! Droite ! Gauche ! Droite !»
Dans la journée, l'ancien député de Seinc-et
Marne, le fils de l'ancien ministre de la justice
mort Président de la Cour des Comptes, fait,..
des corsets
Tondus et rasés aussi, les frères Emile et
Romain Daurignac, qui déambulent dans le
préau de la prison de Poissy en psalmodiant
comme Frédéric : « Gauche ! Droite ! » Sous le
costume réglementaire : casaque de drogue!,'-
Béret; cliaussonset sabots de bois, ils ont perdu
leur belle jactance méridionale, si amusante
parfois, chez Romain.
Celui-ci (le nl 759,73^) fait des brosses. —
Emile (le n° 50,736) des abat-jour.
Voilà donc à quoi aboutit la conquête de
Paris par ces méridionaux qui, pendant vingt
ans, ont transformé en actes les rêves les plus
extravagants d'une imagination en délire.
Quel sera l'Alexandre Dumas qui écrira les
Vingt ans après de ces mousquetaires par trop
modernes ?
Sous mes fenêtres un orgue de Barbarie
moud lamentablement un air dolent et plain-
tif.
G. DE VORNEY.
- -
LE MINISTRE DE LA MARINE CONTflE L' « AVANT! »
(De notre correspondant particulierJ
Rome, 20 novembre 1903.
Il se déroule en eo moment, à Rome, un pro-
cès très important, dont la seule perspective,
il y a quelques mois, faillit renverser le mi-
nistère Zanardelli et provoqua la démission du
ministre de la marine, amiral Bettolo.
Voici les faits. Le journal socialiste VAvanti
avait publié des révélations très graves sur les
actes de la marine. Plusieurs discussions eu-
rent lieu à ce sujet à la Chambre, à la suite
desquelles le ministère faillit démissionner.
On se borna à nommer une commission
d'enquête, mais le ministre de la marine, dé-
cidé à poursuivre le journal l'Avanti, donna sa
démission et déposa une plainte.
En même temps, le corps des officiers supé-
rieurs de la marine poursuivait lui-même le
journal. 1
La plainte des officiers de la marine, portée
devant le tribunal avant celle du ministre, fut
rejelée, après plusieurs audiences,par le tribu-
nal, comme étant irrégulière, et les plaignants
condamnés aux frais.
Ce jugement, rendu sur la demande de M.
Ferri, député, directeur du journal VAmmti,
fut considéré parce dernier comme un triom-
phe précédant celui qu'il remporterait égale-
ment dans le procès intenté par l'ancien mi-
nistre Bettolo.
Ce nouveau procès est commencé depuis
trois jours. S'il se produit au cours des au-
diences des faits intéressants, je vous en ren-
drai compte. Je vous ferai connaître le juge-
ment. — P.
LES HOTTENTOTS DE L'AFRIQUE ALLEMANDE
fDe notre correspondant particulier)
Capetown, 20 novembre.
Une troupe de Bondelswartz est venue se ré-
fugier sur le territoire du Cap. Les hommes
ont été désarmés et internés dans un camp im-
provisé. Le gouvernement da Cap ne sai t pas
encore si cesfugitifsdoivent être traités comnre
prisonniers de guerr.,
Une dépêche annonce qu'à Scnndrift. au
sud-est de Warmbad, une grande action est
engagée entre Allemands et Hottentots.
L'issue de la bataille n'est pas encore connue.
LA DETTE ÉGYPTIENNE
(De notre correspondant particulier)
Le Caire, 20, novembre.
Au Palais du gouverneur on affirme que
Sir Eldon Gorst se rendra prochainement à
Londres avec la mission de préparer la con-
version de la Dette Unifiée Egyptienne et de
discuter sur le sort qu'on doit réserver à la
caisse de la Dette.
Naturalisation payés un million
(De notre correspondant particulier]
Bâic, 20 novembre.
11 ya quelques mois le Rappel, a raconté
qu'une nouvelle secte communiste-chrétienne
avait acheté presque toutes les terres et les
maisons de la commune de Grappenhoff pour
y fonder une colonie communiste.
M. Josué Kiein, le grand-pontife du nou-
.veau culte, vient d'acquérir la naturalisation
et le droit de cité pour lui et sa famille moyen-
nant une somme d'un million de francs. Sui-
vant un accord entre lui et le gouvernement
de Saint-Galle, 10,000 francs seulement seront
comptés comme « droit de sceaux », 200,000
francs seront donnés à l'Assistance publique,
95,000 francs à la fabrique de l'église, 000
francs aux écoles et 450,000 francs à la caisse
de la commune de Glarua.
LA JOURNEE
, - PARLEMENTAIRE
AU SENAT
L'enseignement et les congrégations
autorisées
L'amendement Delpech consiste, on le sait, à
interdire l'enseignement secondaire aux con
grégations autorisées comme à celles dont les
demandes ont été rejetées par la Chambre.
M. Thézard déclare, au début de la séance,
que la commission a délibéré, et, par 9 voix
contre 5, a décidé de proposer au Sénat d'a-
dopter l'amendement.
M. Maxime Lecomte prononce quelques pa-
roles heureusement tournées pour appuyer
l'amendement. 1
Discours de M. Combes
Voici le président du conseil à la tribune. Il
va préciser l'attitude du gouvernement, qui,
nous l'avons dit, accepte l'amendement Del-
pech.
M. Combes, d'accord en cela avec Jules Si-
mon, n'accepte pas la liberté d'enseignement
en tant que droit naturel.
M. Combes. — Les congrégations ont su, par
des manœuvres très habiles, attirer les fils de la
bourgeoisie et même de nos fonctionnaires.
Dans l'armée, les établissements de l'Etat étaient
frappés d'une sorte d'interdit.
M. de Cuverville. — Vous parlez de faits qui
sn sont passés en -1892. Mais on n'a pas voulu me
nommer alors vice-amiral, paree que j'étais catho-
lique et on n'a pas comblé la vacance qui existait
dans le codrc des vice-amiraux.
Le président du conseil. — En 1893, dans
une ville du Midi, un capitaine plaça ses deux fils
au collège. Ce fut une stupéfaction dans la ville
entière.
Tout le régiment s'était entendu, jusqu'alors,
pour que les enfants des officiers ne soient pas
envoyés au collège communal.
Le même fait est signalé par 4es recteurs pour
un certain nombre de régiment.
M. de Goulaine. — Combien avez-vous frappé
d'officiers pour cela ?
rd. Le Provost de Launay. - C'est de la
police infâme. (Exclamations.)
Le président du conseil. — Je souhaite que
les mœurs policières n'aillent jamais plus loin.
(Applaudissements à gauche.)
Comment un proviseur n'aurait pas le droit
de dire à son ministre qu'il n'a pas de fils d'offi-
ciers ?
Plusieurs recteurs signàlent que c'est surtout
du côté de l'armée qu'est le danger pour l'Uni
versité et l'Etat. On n'hésite pas à répudier hau-
tement et publiquement l'enseignemant universi-
taire.
En parcourant tous ces rapports, je fus profon-
dément attristé. Je n'ai pas cru devoir citer ces
faits en 1901.
Je m'en suis tenu aux principes et cela a suffi
pour que le Sénat me donnât raison à une grande
majorité. Je peux représenter aujourd'hui les mô-
mes arguments.
Un mouvement marqué d'attention se pro-
duit quand le président, M. Fallières, donne la
parole à M. Waldeck-Rousseau.
Discours de M. Waldeck-Rousseau
Avec la merveilleuse clarté que ses adver-
saires les plus ardents ne peuvent s'em-
pêcher d'admirer, l'ancien président du Conseil
fait l'exposé de la situation, qu'il critique vi-
vement.
M. Waldeck-Rousseau. — Ce qui frappe
surtout, au milieu des événements du jour, c'est
cette instabilité dans les idées, les programmes et
les solutions dont nous sommes les témoins.
C'est cet état d'esprit qui, de jour en jour, novs
entraîne eu avant vers un but de plus en plus dif-
ficile à saisir. C'est cette modification continuelle
du plan de campagne qui exige tous les matins un
nouvel effort législatif. (Vifs applaudissements.)
D'ordinaire, on juge de la valeur d'un plan de
campagne à ce trait qu'il se simplifie à mesure
qu'on l'applique, e'est-à-dire que l'on gagne du
terrain, que l'on obtient des avantages. Nous n'en
sommes point là. Il semblé bien que le plan de
campagne se complique à mesure qu'il se réalise,
se complique et s'élargit au point d'embrasser cha-
que jour un champ de plus en plus vaste.
J'avais prévu et indiqué moi-même que là était
le danger. Il n'était pas nécessaire d'être grand
prophète pour l'entrevoir. Beaucoup pensaient
comme moi. Le gouvernement paraît avoir eu,
d'abord, le même sentiment; -puis il a cédé, du
moins les circonstances autorisent cette supposi-
tion, aux conseils d'amis plus hardis ou plus im-
patients. (Applaudissements sur divers bancs.)
C'est alors que M. Girard a proposé de suppri-
mer l'enseignement de toutes les congrégations
autorisées. Comment tire-t-ou si pCII de fruit de
l'expérience ? Alors que l'œuvre entreprise, trop
lourde, n'a pas abouti, on propose de l'aggraver,
de la décupler.
11 est vrai qu'on dit qu'il ne s'agit que de l'en-
seignement secondaire. Si vous statuez en cette
matière, il est impossible de ne pas statugr dans
l'enseignement primaire. (Très bien!)
Tous les principes seraient méconnus si on
agissait autrement. Le problème à solutionner
comprend donc non seulement l'enseignement se-
condaire, mais aussi l'enseignement primaire. Il
faut donc voir les conséquences de cette réforme
complète.
Les charges en sont si écrasantes que le gou-
vernement n'esi pas en mesure de les acquitter.
Nous manquohs d'ailleurs de renseignements sur
l'importance de ces charges. Le Sénat a li droit et
le devoir d'avoir ces renseignements. (Très bien !
Très bien ! )
Comment a-t il pu paraître possible qu'une pa-
reille réforme fut votée sans avoir été discutée à
fond ici, et n'ayant été discutée qu'en dehors do
cette enceinte ?
D'ailleurs, la mesure proposée ne donne aucune
forcé nouvelle au gouvernement. II l'avait même
rejetée de son texte (Très bien il en ne visant que
les congréganistes non autorisés. (Applaudisse-
ments.)
Je comprendrais ce qu'on nous propose, si nous
étions en face d'un danger pressant. Mais je dis
que vous ètes armés. Vous ne faites pas ce que
vous pouvez faire et vous demandez à faire ce que
vous ne pouvez pas faire.
La loi de 1901 donne au gouvernement le droit
de retirer les autorisations donuées aux établisse-
ments congréganistes. Il peut donc procéder par
échelons et étapes.
La loi de 1901 n'est donc pas une loi stérile. Elle
a produit des résultats. Elle contient toutes les ar-
mes dont le gouvernement a besoin.
Nous ne pourrons donc pas voter l'amendement
de M. Delpech. 11 est à sa place dans un autre dé-
bat.
D'ailleurs, le gouvernement lui-même, il y a
huit jours à peine, a déclaré que la question devait
être tranchée dans un projet de loi spécial. (Vifs
applaudissements sur un grand nombre de; bancs.)
Réplique do président dn Conseil
M. Combes réplique. Il paraît gêné par la
nécessité de l'improvisation; il peine visible-
ment, s essouffle et se perd dans les digres-
sions.
M. Combas,président du Conseil. - Du mo-
ment où l'on abroge la loi Falloux, charte de fon-
dation de l'enseignement congréganiste, c'est bien
dans la loi qui prononce cette abrogation qu'on
doit dire si, oui ou non, la congrégation pourra
continuer, ou recommencer ce qu'on lui reproche.
C'est une question de principe que le Sénat aura
a cœur de trancher.
Aucun supplément de dépenses n'est à redouter.
Il faut que chucun ait la responsabilité de son
vote. Le gouvernement ne consent pas à l'ajour-
nement qui est la conclusion des discours de M.
Waldeck-Rousseau. (Applaudissements à gauche.)
M. Emile Labiche pose la question sui-
vante:
M. Emile Labiche. — La loi s'appliquera-t-
elle aux établissements sedondaires de fllIes? Fer
me-t-elle les écoles congréganistes de filles ?
r Le président du conseil. — Les congréga-
tions ne donnent aux filles que l'enseignement pri-
maire supérieur. Nous n'avons pas à fermer des
établissements d'enseignement secondaire qui
n'existent pas. Je me bornerai à les ramener à
1 application de leurs statuts si elles les ont dé-
passés.
Discours de M. Clemenceau
M. Clemenceau sent bien que. le chef du gou-
vernement n'a pas présenté une défense bril-
lante. L'orateur de l'extrême-gaucbe se pro-
pose pour l'adversaire digne de lui qu'attend
M. Waldeck Rousseau.
-- M. Clemenceau. -- La situation est ce qu'elle
est la cause première en doit être attribuée à M.
Waldeck-Rousseau. C'est lui qui nous a mis en
route.
M. Waldeck-Roussean a reproché à M. Combes
d'avoir mal appliqué sa loi; M. Waldeck-Rousseau
n avait qu'à ne pas quitter le pouvoir et à l'appli-
quer lui-mêmé. On a applaudi M. Waldeck-
Housseau quand il est entré dans cette voie; on
applaudit maintenant M. Combes qui y persé-
vère.
Je vois dans le parti républicain deux pnrtis : le
parti de la laïcisation et le parti de la cléricalisa-
tion. Je ne veux pas dire qu'il y a un parti de recul'
mais il y a un parti qui a peur de déclérîcaliser
(Applaudissements à l'extrême-gauche. )
L'amendement Delpech est adopté par 147
voix contre 136.
A mardi. — H. D.
A LA CHAMBRE
LE BUDGET
DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. d'Estournelles de Constant répond, dans
la discussion générale du budget des affaires
étrangères, au discours de M. Deschanel.
M. d'Estournelles de Constant. — Le dis-
cours de M. Deschanel appelle quelques réserves de
ma part. Le rapprochement franco-anglais n'est
dirigé contre personne et n'a pour but que la con-
solidation de la paix. 1
M. Deschanel a fait un .très bel éloge des progrès
de l'arbitrage. Mais je m'étonpe des réserves qu'il
a faites au sujet des initiateurs de ce mouvement.
Il a dit-que nous avions confondu l'arbitrage et le
désarmement. Je tiens à dire que je n'ai jamais
préconisé le désarmement immédiat. Depuis M.
Jaurès jusqu'à M. Frédéric Passy, nous estiméns
qu'avant d'arriver au désarmement, qui est le der-
nier terme de la politique pacifique, il ne sera èb-
tenu qu'après entente avec les puissances.
Il faudra arriver à limiter progressivement les
armements. L'Europe continue sans cesse ses arme-
ments. Devons-nous laisser se poursuivre cette
course à l'abîme, ou, au contraire, devons-nous
tout faire pour l'arrêter? C'est cette dernière solu.
tion qui est la nôtre. (Applaudissements.)
Discours de M. G. Hubbard
Notre ami G. 'Hubbard prononce un su-
perbe discours oÙ il expose quelle doit être
l'attitude des esprits de sang-froid et des paci-
fiques vis-à-vis de l'alliance avec la Russie et
de l'entente cordiale avec l'Angleterre. II traite
ensuite, avec la largeur de vues et la chaude
éloquence qu'on lui connaît, le problème du
désarmement.
M. G. Hubbard. - Que la France se fasse
l'interprète de tous les groupements scientifiques,
littéraires ou' religieux qui poursuivent la prix
universelle, des sociétés de la paix du monde en-
tier, et elle restera à la hauteur de sa mission civi-
lisatrice. ,
Le budget devrait entourer la cour de !a Haye de
plus de bienveillance : ou olle n'y tigu-e pas, ou
elle n'y figure que pour une somme infime.
M. Delcassé — Il y a quinze jours seulement,
j'ai reçu le compte des dépenses de la commission
administrative de la Haye. ;le me suis empressé
de les transmettre à la commission. L-s dépenses
sont proportionnées au nom:r.'e et à l'importance
des affaires. On ne peut donc pas les prévoir.
M. Hubbard. — L'Institut international de la
paix, à Berne, reçoit une subvention régulière.
Pourquoi ne pas subventionner aussi régulière-
ment la cour permanente d'arbitrage ?
Trop longtemps, le droit est né du fait, dans une
Europe qui a eu l'orgueil de la victoire militaire
et de la guerre. Il faut que, dans une Europe pa-
cifiée et pacifique, le fait naisse du droit. Voilèt
pourquoi je salue l'entente franco-italienne, sur-
tout si vous faites, monsieur le ministre, disparaî-
tre cette ambassade du Vatican, dont la suppres-
sion achèvera le rapprochement de l'Italie avec la
France.
Je demande à la politique extérieure de la France
de servir la grande cause du désarmement. Elle
répondra ou vœu de sa démocratie en prenant
l'initiative des conférences internationales en vue
dit désarmement. *-
M. Boni de Castellane prononce un discours
qui constitue pour lui un bon début à la tri-
bune de la Chambre. On ne saurait d'ailleurs
approuver sa singulière attaque contre le peu- *
pIe italien.
M. B de Castellane. - La politique italienne
a été la grande erreur, la grande faute de Napo-
léon 111; nos gouvernants retombent dans cette
erreur par une étrange et déplorable aberration.
Notre politique extérieure ne doit pas être une
politique vaguement humanitaire, mais une poli-
tique nationale avec tout ce que ce mot com-
porte de légitimes égoïsmes, une politique éner-
gique et suivie, au lieu d'une politique livrée
au hasard des événements et des influences du mo-
ment.
M. Gauthier (de Clagny) interroge le minis-
tre des affaires étrangères sur les événements
du Maroc.
M. Deloncle rappelle la question du Siam.
M. Jaurès parle longuement de la question
du Maroc. Ll craint que l'on ne dépense beau-
coup d'argent et que l'on n'use beaucoup
d'hommes pour conquérir la --Nlaroc.
M. Jaurès — Ces sacrifices, et bien moindres
et plus efficaces, je vous demande de les faire par
la pénétration pacifique du Maroc. -
Je vous demande d'y créer des infirmeries comme
en Algérie, d'y amener des réserves de grains con-
tre la famine. Je demande au gouvernement d'ins-
crire -ces-dépenses au budget; de les inscrire ou-
vertement car nous n'avons rien à cacher. (Très
bien !)
Je lui demande, je demandj à la Chambre, d'ou-
vrir le budget de pénétration pacifique du Maroc
pour éviter d'ouvrir le budget autrement coûteux
de la pénétration militaire du Maroc.
M. Denys-Cochin porte à la tribune l'ex-
pression, des ordinaires préoccupatiqps du
parti catholique.
M. Denys-Cochin. — Je suis inquiet de ce qui
s'est pass* é en Tunisie, de la fermeture de nos éco-
les libres C'est l'exportation d'une politique fu-
neste. Et comment prendrez-vous la défense de
nos nationaux dans les pays lointains, alors que
c'est vous qui donnez l'exemple de la persécution
contre eux,:
Discours de M. Thomson f
M. Thomson, très documenté, n'a pas de
peine à justifier la politique républicaine et
laïque dans son action aux colonies et notam-
ment en Tunisie.
M..Thomson. — Non seulement il était bon
de supprimer les congrégations enseignantes en
Tunisie, mais il faut encore pousser plus loin J'am.
vre de la laïcisation dans tout le protectorat. Au-
cun culte n'est subventionné en Tunisie.
Dans tous les cas, la suppression des écoles cou
gréganistes sera utile à l'influence française car
plusieurs d'entre elfes étaient dirigées par desf prê-
tres étrangers.
Elles ne pourront plus, par suite, donner un en-
seignement contraire à la vérité des faits. Elles ne
pourront plus dire de Jules Ferry toutes ces ca-
lomnies qu'elles ont propagées à Tunis, où le sou-
vehir de M. Jules Ferry est aimé, où ce grand ci-
toyen a sa statue (Vifs applaudissements). 1
M. de Pressensé a besoin de tout le reste de
la séance pour prononcer un grand discours
où il passe en revue toutes les questions qui
sont plus ou moins à l'ordre du jour.
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