Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-11-05
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 05 novembre 1903 05 novembre 1903
Description : 1903/11/05 (N12291). 1903/11/05 (N12291).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7575552j
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
-.- CINQ CENTIMES le Nu.xnéroc PARIS 5L DÉPARTEMENTS - r x_j© Numéro CINQ CENTIMES
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vellement à l'Administrateur de notre jour
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NOS LEADERS
LE VOTE D'HIER
La Chambre a voté, hier, une fois de
plus, la suppression des bureaux de
placement. Le projet adopté présente la
réforme sous un aspect de modéra-
tion et de prudence qui calmera, es-
pérons-le, les susceptibilités exagérées
des libéraux du Sénat. Le texte ap-
prouvé par la Chambre prévoit la dis-
parition des bureaux de placement,
dans un délai de cinq ans, par voie
d'arrêtés municipaux. En cas d'ur-
gence, les municipalités pourront abré-
ger le délai.
***
Le principe de l'indemnité aux pla-
ceurs, inscrit dans le projet de la com-
mission, a fait l'objet d'un débat assez
vif. M. Coûtant avait déposé un con-
tre-projet qui n'admettait point la dis-
tribution d'indemnités. Ce contre-projet
a eu la préférence de 102 députés.
C'est-à-dire qu'un certain nombre de
radicaux socialistes se sont joints à la
plupart des élus collectivistes pour ap-
prouver le texte de M. Jules Contant.
Il est assez curieux, d'ailleurs, de re-
marquer que plusieurs nationalistes,
MM. Georges Berry et Gauthier (de
Clagny), notamment, avouaient que
leurs préférences allaient au contre-
projet Coûtant.
M. Georges Berry a même trouvé une
formule assez heureuse pour critiquer
le système de l'indemnité :
— Nous n'avons pas, disait-il, à
rembourser ce qui n'a pas été payé.
Il est vraiment regrettable que les
nationalistes ne déploient pas toujours
autant de zèle à défendre la cause des
travailleurs. Nous sommes convaincus
de la sincérité de MM. Georges Berry
et Gauthier (de Clagny), mais. nous
avons le droit de constater que leur ar-
deur dans le débat d'hier ne pouvait
qu'être attisée par les intérêts électo-
raux de la délabrée Patrie française.
La suppression des bureaux de pla-
cement, intéresse surtout les ouvriers
de l'alimentation — garçons boulan-
gers, bouchers, charcutiers, limona-
diers. Il suffit d'ajouter à cette liste les
garçons coiffeurs pour dresser un ta-
bleau à peu près complet des catégories
: d'ouvriers intéressées par la loi que la
Chambre vient de voter.
Notez, qu'en province, la question
des bureaux de placement est beaucoup
moins aigiie qu'à Paris.
Rien d'étonnant si, non loin des élec-
tions municipales, les nationalistes
préfèrent ne pas se brouiller avec une
importante fraction des ouvriers de
Paris.
Le contre-projet Coûtant écarté, tout
le monde — sauf 16 réactionnaires
irréductibles, — s'est trouvé d'accord
pour voter le projet de la Commission.
Il alloue, je le répète, une indemnité
aux placeurs dessaisis. Cette réserve de
l'indemnité était nécessaire pour que
la réforme ne trouvât pas, au Luxem-
bourg, un accueil trop hostile.
Et pourtant, beaucoup de bons ré-
publicains trouvaient que cette indem-
nité constituait un fâcheux précédent.
— Pour quelle raison, disaient-ils,
donner une compensation à des com-
merçants dont le concours est jugé
plus nuisible qu'utile au bon fonction-
nement de la société ? Et que répon-
- dra-t-on aux industriels quand ils de-
manderont des secours à l'Etat, afin
de parer aux frais à eux occasionnés
par une loi de protection ouvrière?
Voyez, par exemple, les industriels du
tissage. « Ils faisaient travailler leurs
ouvriers pendant douze ou treize heu-
res. La limitation de la journée de tra-
vail leur interdit de garder les tisseurs
à l'atelier pendant plus de 10 heures
et demie. S'ils ne veulent pas restrein-
dre leur production, les patrons se-
pent forcés d'acheter de nouveaux
métiers, et de payer de nouveaux ou-
--- vriers. - - -
- a Ne seront-ils pas fondés à récla-
mer une indemnité à l'Etat qui, par
une loi, leur occasionne un « manque
« à gagner » tout comme auxplaceursj?
« Et les fabricants de blanc de cé-
ruse, obligés de se préparer à la fa-
brication du blanc de zinc, tiendront à
coup sûr un raisonnement analogue. »
.**
Ce raisonnement n'est pas dénué de
force. Tout au plus pourrait-on répli-
quer que les industriels à qui un rè-
glement impose des charges impré-
vues ont l'avenir devant eux pour réa-
liser des bénéfices, tandis que les pla-
neurs, dont l'industrie est purement
et simplement supprimée, subissent
tone perte sèche.
I Peu importent, en somme, ces dis-
cussions théoriques. Dans l'intérêt de
m Jaorale et de l'ordre publics la sup-
pression des bureaux de placement est
nécessaire. Puisque "le Sénat tient au
principe de l'indemnité, on a eu raison
de ne pas le contrecarrer sur ce point.
La contribution acceptée parl'Etat ne
saurait, en cinq ans, dépasser 500,000
francs. Ce n'est pas très cher pour so-
lutionner un douloureux et menaçant
problème social.
Hugues Destrem.
PLAINTES ET RÉSERVES
L'autre jour un interviewer
faisait dire à M. Combes, qu'il
sentait que la presse parisienne
le soutenait, « comme la corde
soutient le pendu», mais qu'il
trouvait un accueil meilleur dans
la presse de province. Et nous avions pris-
cette interview pour la fantaisie d'un con-
frère à court de copie, et décidé à inventer
quand la nouvelle ne donne pas.
Mais nous voyons aujourd'hui que le
président du Conseil prend, en effet, pour
confidents certains journaux de province,
auxquels il fait adresser par l'agence Havas
des notes tout à fait personnelles et curieu-
ses. Donc, empruntons à ces confrères si
spécialement documentés : >
« Nous croyons savoir que le président
du Conseil n'a pas dissimulé à diverses
personnes combien il avait été chagriné de
voir, au cours de la séance tenue vendredi
dernier par la Chambre, une fraction du
groupe socialiste se prononcer contre l'or-
dre du jour pur et simple, que le gouverne-
ment avait accepté comme conclusion aux
interpellations sur les incidents de la Bourse
du Travail.
« M. Combes n'a pas moins été chagriné
de constater que l'amendement de M. de
Lanjuinais, réduisant de 10.000 francs le
crédit pour le traitement des sous-préfets,
avait recueilli les voix de quelques députés
votant habituellement avec le cabinet. »
Par conséquent, « il n'est pas surpre-
nant » que M. Combes « ait laissé enten-
dre que si la majorité venait à se désagré-
ger, il abandonnerait immédiatement le
pouvoir ». Toutefois « il convient d'ajouter
qu'on assure de très bonne source qu'à
l'heure actuelle le président du conseil
n'aurait encore pris aucune résolution dé-
finitive sur la conduite qu'il compte tenir ».
Nous trouvons, dans cette note officieuse,
exactement résumée, la politique qui con-
siste à prendre congé avec l'intention de se
faire retenir. Nous avons déjà expliqué à
M. Combes que c'était là la plus vaine et
la plus détestable des politiques. Il s'en
prend à la majorité ; mais ce n'est pas ,à
lui de juger là majorité, c'est à la majorité
d'examiner s'il la représente avec plus ou
moins d'exactitude. Encore un coup, que
M. Combes agisse nettement selon le pro-
gramme des groupes de gauche, et ceux-ci
le suivront. Sinon, ses plaintes à certains
journaux de province ne changeront rien à
sa position, qui est, en effet, moins bonne
que naguère. - Ch. B.
SAGES MESURES
Les cruels incidents de la Bourse du Travail
ont appelé à nouveau l'attention sur les
malheureux qui viennent à Paris chercher for-
tune, et qui, espérant y trouver une situation
quelconque, sont réduits à passer sous le joug
des placeurs et à laisser entre leurs mains leurs
plus belles plumes.
L'ouvrier, la servante, arrivent un peu igno-
rants de leur province, ce sont des proies mer-
veilleuses pour les gens rapaces et sans scru-
pules qui vivent d'eux. S'ils ont quelques res-
sources à leur entrée à Paris, ils les mangent
en quelques jours, ils se découragent, ils sont
las de chercher tout seuls du travail, el finis-
sent par accepter les conditions les plus oné-
reuses, les hommes pour échapper à la faim,
les femmes pour échapper à la prostitution qui
bien souvent les guette.
Il faut reconnaître que nous sommes bien
mal organisés en France. Ce qui se produit
chez nous est évité en Belgique de la manière
suivante. Tous les trains qui conduisent à la
capitale, toutes les gares, contiennent des affi-
ches placées à un endroit où elles ne peuvent
échapper à l'œil le moins vigilant, et voici ce
que j'y ai lu :
Avis 'impoJ'tant.- Les ouvriers qui se rendraient
à Bruxelles à la recherche de travail et qui s'y
trouveraient dénués de toutes ressources, seront
accueillis en tous temps à la Maison du Travail,
où ils seront occupés, logés, nourris jusqu'à ce
qu'ils aient trouvé une place stable. Ils trouveront
des billets d'admission à la Bourse du Travail.
Maison des servantes. — Les jeunes filles qui
cherchent à se placer à Bruxelles et qui n'ont pas
à la gare un parent pour les recevoir, sont préve-
nues qu'il y a danger pour elles à suivre les indi-
cations d'adresses qui leur seraient données par
des inconnus. Elles peuvent immédiatement se
faire conduire à la Maison des servantes, où elles
trouveront le logement et les renseignements né-
cessaires. La course de voiture est payée aux frais
de la Maison.
J'espère que voici de bons exemples. Le tout
n'est point de les admirer, il faut les suivre.
— Ch. Darcji.
LE PROFESSEUR BEKHTEREW
(De notre correspondant particulier)
Saint-Pétersbourg, 3 novembre.
Le professeur Bekhterew, le célèbre psychia-
tre dont la réputation dépasse les frontières
de sa patrie vient d'accomplir sa 25e année de
service comme professeur de l'Ecole de Méde-
cine Militaire où il occupe la chaire de psycho
logis et de névi'ologie.
Aux termes du règlement il devrait être mis
à la retraite, mais le gouvernement a décidé de
le nommer titulaire de la chaire pour une nou-
velle période de cinq ans. M. Bekhterew a as-
sisté à plusieurs congrès des médecins à Paris
où il s'est signalé non seulement par ses com-
munications précieuses mais aussi par la cor-
rection avec laquelle il s'exprime en français.
———————————- ——————————— „
LE TRUST DE MORGAN
ENTRE LES MAINS DES ALLEMANDS
(De notre correspondant particulier)
Hambourg, 3 novembre.
M. Ballin, directeur de la « Messagerie Ham-,
bourg-New-York», est parti pour Chicago avec
la mission de remonter le trust de Morgan
ave3 des capitaux allemands. )1, Ballin est,
comme on sait, un ami intime de l'empereur
et des gens bien renseignés affirment que Guil-
laume II s'intéresse particulièrement au pro-
jet de faire entre des mains allemandes le
trust américain de construction navale.
LE RAPPEL
ARTISTIQUE ET LITTERAIRE
Le Salon d'automne
Depuis le rapport de M. Quentin-Bauchart.
le service des beaux-arts prend tournure, sous-
l'active collaboration de MM. Brown, Cain,
Veyrat, Henry Lapauze. Il fallait une direc-
tion unique groupant d'habiles éléments. Peut-
être verrons nous - bientôt les effets de cette
impulsion nouvelle. Au Petit Palais, ouver-
ture de ce Salon d'automne si longtemps
discuté, qui faillit être remis, une fois de
plus, à l'année suivante, et contre lequel le
matin même se dressaient encore des opposi-
tions. C'est un peu le Salon de la ville. La ré-
ception du ministre par MM. de Selves, De-
ville et Georges Veyrat a semblé une indi-
cation.
Heureux mélange
Et je dois convenir de l'aimable surprise
causée par ces locaux, qu'on croyait à jamais
réduits en oubliettes. Les organisateurs, MM.
Frantz Jourdain. Rambosson, en ont fait une
suite de petites loges intimes et coquettes, jo-
lies de teintes et d'éclairage. Deux grands cou-
rants, le rouge et le gris, paraissent les tra-
verser, avec les plus heureuses associations.
Chaque salle forme un tout harmonieux. On a
mélangé, innovation que quelques-uns. ont
blàmée, mais que je trouve plutôt agréable, les
gravures et les toiles, voisinant elles-mêmes
avec les sculptures et les vitrines d'objets dé-
coratifs.
Ce n'est pas la cohue des deux Salons de
printemps, ni la foire aux artistes. Le recueil-
lement et i'étude y conduiront plus d'un. C'é-
tait une cave, je le répète, elle est maintenant
charmante. Et entre les mains du comité dont
j'ai les noms sous les yeux ce devait fatale-
ment devenir une chose de goût.
Les étiquettes les plus diverses sont repré-
sentées : classiques, impressionnistes, idéalis-
tes et réalistes, les rêveurs et les violents. On
rencontre quelques anciens, intéressants tou-
jours, mais l'ensemble est plutôt jeune, d'a-
vant-garde, bien moderne. Il m'est difficile de
vous tracer un guide méthodique de notre vi-
site à cause de cette cohabitation des diverses
productions. Dès l'entrée des salles, à gauche,
vous êtes arrêté par les merveilles les plus va-
riées, James Vibert le sculpteur, les peintures
de Mademoiselle Dufau et d'Aman Jean, un
dessin de Chéret, un bijou de Lalique, les gra-
vures de Pierre-Eugène Vibert et de Léon Per-
richon, un groupe de Jasinski, une énorme
femme de Fix Masseau. Vous vous extasiez de-
vant l'agencement harmonieux d'une salle
tout entière, la 6e si je me souviens bien, où
toiles, gravures, vitrines, poteries de Dolahor-
che, se marient tendrement. Voycrestionc cha-
que catégorie, au hasard de la promenade, et
nous pouvons, mieux qu'à la Nationale ou aux
Artistes Français, réserver quelques minutes
partout où il nous semblera bon.
La peinture
Les envois de M. Albert Besnard su rprennent
ses amis. L'Intérieur d'é lt*se à Londres et Lé-
gende écossaise"rappellent des "Symphonies gri-
ses auxquelles ce fervent de la couleur a de-
puis longtemps renoncé. Aussi a t-il soi-
gneusement daté : 1881. Les portraits de M.
Jacques Blanche sont d'un charme indiscuta-
ble, surtout l'ardente blondeur de Georges
Moore. Que dire d'Eugène Carrière ? Regardez
M. Messelmitoff et dites-moi s'il est facile d'en-
clore plus de pensée dans quelques pouces de
toile. L'Heure paisible, de M. Eugène Chigot,
les études de Mme Gonyn de Lurieux, Sur la
lande austère et A Beg-Mell, et Le crépuscule
savoureux de M. Georges Lopisgich sont d'in-
téressantes notations.
Il y a de merveilleux paysages,de Paris et de
province. Admirez Le Pont au Change, d'Au-
guste Lepère, ce mouvement de foule, le scir,
et, du même, un neigeux Quai de l'Hôtel-de-
Ville. Voyez le Viarmes, de Paul Baignières ;
le Boulevard Barbès, de Braquaval, la Vallée
d'Arqués, de René Debraux, et les merveilleux
Arbres, Congés par le vent de mer, du Norvé-
gien Diriks, et les Ajoncs en fleurs, de M. Eu-
gène Bourgeois ; les Vagues déferlantes, de
l'Américain Harrisson ; les Bords de rivière,
d'Alfred Jeanmougin, et l'étude de Rempart de
Montreuil-sur-Mer le soir, de Francis Jourdain.
, Je n'aurais garde d'oublier M. Em. de la Vil-
léon et ses campagnes do la Nièvre, ni M. Panl
Simons, qui est en train de se classer au pre-
mier rang des peintres de lumières. Son Etang
de Caronte et La Uordigue au crépuscule m'ont
longtemps retenu. Çà et là de délicieux ta-
bleaux, assemblées Intimes,souvenirs de route,
croquis 6n plein vent, poèmes d'intérieur. Le
Mariage juif du Hollandais Josef Israels, qui
ne compte plus ses triomphes, les physionomies
féminines de M. Albert Belleroche, lierthe, Ro-
sine, Ninie et Lili. La Vieille hollandaise de M.
Jules Benoît-Lévy; le Nettoyage, de Jules.
Grûn ; la Rieuse, d'Abel Faivre ; la Dévideuse
picarde, de Matisse ; la Lettre, do Morisset ; la
Petite fresque, d'Armand Point, dont on con-
naît les tendances. Haidiment réactionnaire en
procédés, M. Armand Point est revenu à la
peinture à l'œuf, comme les primitifs, et son
atelier de Haute-Claire, à l'orée de la forêt de
Fontainebleau, vers Marlotte, est un labora-
toire des plus hautaines théories d'art décora-
tif. Les deux toiles rapportées de Fontainebleau
par M. Henry Tenré continuent l'œuvre déli-
cate de ce peintre. Toutes les pages de M. Abel
Truchet sont maintenant à citer. Ici, La fête de
Newilly, dans ce genre mouvementé où il
excelle. Il faut voir deux savoureuses scènes de
M. Félix Valloton.
Quelques bons portraits, d'ingénieux arran
gementa d'étoffes, des chairs savantes: nous
avons déjà vu Mme Jeanne Mahudez à la So-
ciété des Artistes Français, o'est un talent qui
s'affirme ; M. le conseiller P. rappelle Made-
moiselle Cécile Desliens ; M. Alexander expose
une bien intéressante Mlle F. J. M. Georges
Desvallières est toujours séduisant. @ J'apprécie
la Dame en blanc de M. Charles Guérin.
Alphonse Osbert a remis trois àJ ses vapo-
reuses rêveries, Contemplation, En vue des
"montagnes, et Les saintes femmes se rendant aur
.tombeau.
Il y a un coin spécial consacré à Paul Gau-
guin, au misanthrope qui délaissa les landes
bretonnes de Pont-Aven pour Tahiti et les
îles Marquises. Certains de ses paysages en
arrivent, plus faits pour la curiosité que pour
l'admiration. C'est ainsi que les beaux talents
se perdent, quand ils méconnaissent la me-
sure.
Dessins, gravures, architecture
Au passage : Jules Baric, une tête de Paul
Baignères et des portraits, des sanguines de
Jules Chéret, une aquarelle, Mer farouche, de
Henry Detouche, des pastels d'Abel Faivre, les
magnifiques pages de Lepère, un étang som-
bre, plus beau qu'une peinture, les Soupeurs
de Louis Legrand, un fusain de Lopisgich, des
fleurs de Mad. Céline Salard, et l'envoi de ce
délicieux Willette dont une adorable femme
rousse au pastel.
La section d'architecture présente de nou-
veaux essais d'ameublements et de décoration
du logis, la salle à manger en chêne ciré de
M. Charles Plumet, les papiers et tissus pour
tentures murales de MM. Francis Jourdain et
Ed. Cousin, ie bureau en sycomore de M. Sel-
jpaesheim. ,
Examinez les gravures : je ne vous appren-
drai rien en affirmant que M. Pierre-Eugène
Vibert est un grand artiste et que la science de
M. Léon Perrichon ne laisse rien à désirer. Une
lithographie de Pierre Roche, L'épave, l'eau-
forte de Sunyer, Blanchisseuse, celles de Le-
heutre, les eaux-fortes en couleurs de Bernard
Boutet de Monvel et de Bottini. le Passage du
gué, de Paul Colin, autant de minutes à consa-
crer dans notre promenade. -
La sculpture
Peu nombreuse, elle compte quand même,
Dès l'entrée, James Vibert présente la ma-
quette d'un groupe à placer dans sa vaste com-
position de l'Autel à la Nature, dont il a déjà
exposé de remarquables fragments, c'est l'Ef-
fort Humain. Un groupe de miséreux déchar-
nés traîne un énorme boulet, le fardeau du
travail. La Poésie les suit, relevant sa lyre
pour ranimer les énergies lasses. On a fort
admiré cette conception.
Le Baiser de M. Joseph Jasinski est doulou-
reux et puissant. C'est plus qu'une promesse.
M. Pierre Roche, artiste très probe, a étudié,
avec sa conscience habituelle, un torse de
femme, l'Innocence entre la ruse et la violence,
La Grosse femme do M. Fix-Masseau est amu-,
santé. Mlle Charlotte Besnard, avec un plâtre,
Matin, continue son brillant chemin.
On rencontre quelques bustes,le député M.,
par M. Paul Gasq, la Vision, de M. Alfrert-
Halou, un Gavroche de M. Injalbert, une Rieuse
de M. Marquet de Vasselot.
L'art décoratif
Celte section comprend tout ce qui concourt
à r^mhellissemôût du logis ou de la personne.
Mettons de suite hors - de pair les grès
flammés de Delaherche : c'est une iragie de.
teintes veloutées et chaudes qu'on n'osait pas
espérer d'une matière aussi rébarbative. M. Me--
they expose un crabe vigoureux. La vitrine de
M. Félix Massoul est à citer entière.
Dans les bijoux, MM. René Lalique et Char-
les Rivaud. Les compositions de ce dernier sont
d'une originalité saisissante. Quittant les tra-
ces de son heureux devancier, il a su donner à
chacun de ses essais une couleur, une person-
nalité propres. Il y a une certaine lourdeur, ou
plutôt une fermeté voulue, dans ses lignes,
dans leurs torsions, dans leurs entrelacs. Les
métaux gardent une demi-rudesse. Cependant
on sent bien que c'est pour la femme, et pour
compléter sa beauté, que l'or et l'argent asso-
cient en formes non pareilles leurs forces et
leurs volontés.
LÉON RloroR.
Memento. - Edmond Laebena! présente cette
année, à la Galerie Georges Patit de la rue de
Sèze, une exposition d'Art céraoïique du plus haut
intérêt, accompagnée de meubles do Majorelle. de
verreries de Daum, et de marbres statuaires de la
Société française de sculpture d'art.
Rappelons que la Société d'horticulture, dont
l'exposition annuelle a lieu d'aujourd'hui au 11
novembre, aux serres du Cours-la-Reine, contient
une section des beaux-arts, peinture, aquarelle,
sculpture de la fleur.
db --
LES CORBEAUX
Un certain nombre do corbeaux, plus ou
moins centenaires, las de parcourir les vastes
plaines durcies par la gelée ou recouvertes de
neige, viennent chaque année établir leurs
quartiers d'hiver dans nos squares parisiens.
Ce sont, pour la plupart, des philosophes
assez misanthropiques, d'un esprit méfiant et
clairvoyant, mais qui se montrent aimables et
loquaces lorsqu'ils daignent se laisser appro-
cher.
J'ai fait la connaissance de l'un d'eux au
parc des Buttes-Chaumont; il se tient le plus
souvent dans un petit sentier situé au-dessus
de la grotte, près de la cascade qui dégringole,
écumeuse et bruyante, du haut de la rue
Botzaris,
Mon corbeau avait, hior, l'air tout cha
grin.
- Sont-ce les premiers froids, lui deman-
dai-je, qui vous donnent cette mine triste et
lugubre?
— Ah ! le froid n'a guère de prise sur ma.
vieille carcasse. Le froid est, d'ailleurs, notre
ami.
La veille, je lui avais confié que je suis fri-
leux, et je crus voir une ironie dans sa ré-
ponse. Je ripostai :
— N'éprouvez-vous pas la nostalgie des
champs de bataille ?
— Comme vous connaissez peu les corbeaux !
Quels préjugés vous avez sur nous! Tenez, par
exemple, la mine rechignée que vous me voyez
n'est due qu'au spectacle que vous venez de
m'offrir, vous autres, hommes.
- Racontez-moi cela.
- Un jeune corbeau — c'est à peine s'il a
une cinquantaine d'années — m'a prié de.
l'accompagner à une fête foraine qui se tient
en ce moment à Montmartre. J'y ai consenti,
bien que je n'aime pas beaucoup la cohue hu-
maine. Quelques souvenirs personnels, s'il
faut tout dire, me décidèrent à faire cette pe-
tite excursion : je revis, quand mon ami me fit
sa proposition, les fêtes foraines de jadis, si
simples, si joyeuses; je revis surtout les bons
chevaux do bois qui tournaient lentement aux
sons d'une vague musique que couvraient
somplètement les fusées de rire des enfants. Le
pire dos enfants a toujours exercé sur moi un
charme particulier ; c'est, à mon humble avis
de corbeau, une des plus jolies choses qu'on
puisse goûter ici-bas.
Hélas ! je regrette bien d'être allô à Mont
martre 1 Les hommes n'ont plus de chevaux de
bois! Vous avez maintenant d'énormes manè-
ges qui font un bruit assourdissant, épouvan
table : on n'entend plus que le halètement des
machines à vapeur, les grincements des pis-
tons et des leviers, les sifflets stridents des si-
rènes. Et dans des tourbillons de fumée, on
voit monter et descendre et tourner avec une
vitesse vertigineuse des êtres humains, cram-
ponnés fébrilement à des tiges de cuivre, bla-
fards sous la lumière crue des globes électri-
ques.
Je me suis enfui à tire d'aile, me demandant
si les hommes ne sont pas devenus fous.
Mais rassurez-vous sur mon état ; je vais
éloigner de mon esprit cette vision diabolique,
je ne veux pas me laisser tomber dans le ma-
rasme et finir comme Rollinat.
— Un poète peut se suicider, mais un cor-
beau !
— Vous ne lisez donc pas les journaux ?
Rollinat n'est pas mort dans un accès de folie;
Rollinat n'a pas succombé aux suites de sa
tentative de suicide ; Rollinat, disent, aujour-
d'hui, les journaux, est mort d'un marasme
physiologique, comme vous ot moi pouvons on
mourir.
Allons 1 lisez mieux les gazettes — et.à de-
main, s'il ne pleut pas.
G. DE VORNEY.
-
A L'HOTEL DE VILLE
-
La commission mixte des omnibus et tram-
ways, nommée par le préfet de la Seine pour
examiner le projet de réorganisation du réseau
de tramways de la Compagnie générale des
Omnibus, s'est réunie hier après midi, à l'Hô-
tel de Ville.
Après avoir étudié les questions du tarif et
du sectionnement, elle a examiné la question'
des horaires et a réglé notamment l'heure des
premiers et derniers départs.
A LA CHAMBRÉ
LES BUREAUX DE PLACEMENT
M. Léon Bourgeois, qui présidait, a pro-
noncé, en prenant place au fauteuil, l'éloge
funèbre de M. Gabriel Denis, député répu-
blicain de la Charente Inférieure, dont
nous avons récemment annoncé la mort.
La Chambre a validé ensuite l'élection
de M. Videau dans la quatrième circons-
cription de Bordeaux.
A l'unanimité de 516 votants, a été
vote le projet relatif à la construction de
nouveaux tableaux téléphoniques multi-
ples à Paris, Lille et Lyon.
Ensuite,l'urgence a été conférée au pro-
jet de loi concernant la suppression des
bureaux de placement. Ce projet comporte
la suppression, avec indemnité, des bu-
reaux de placement, dans un délai de cinq
ans, avec faculté donnée aux municipalités
d'opérer la suppression de ces établisse-
ments sans délai en cas de nécessité. M.
Jules Coûtant réclame la suppression des
bureaux de placement sans indemnité.
M. Jules Coûtant. — Il me serait facile
de mettre sous les yeux de la Chambre des
faits, des abus qui démontrent que, dans l'in-
térêt des travailleurs, la suppression immé-
diate et sans indemnité des bureaux de pla-
cement s'impose.
Au fond, tout le monde est d'accord, et je
pense qu'il sera facile de trouver un terrain
d'entente pour que l'importante question du
placement des ouvriers et employés reçoive
enfin une solution définitive.
L'honorable rapporteur conclut à la suppres-
sion des bureaux avec des délais et des indem-
nités, en sorte que les ouvriers seront, en bien
des cas, forcés d'attendre, pendant des années
encore, la disparition de leurs exploiteurs.
Comment peut se justifier une indemnité à
ces agences que je qualifierai d'interlopes ?
Vous comblez ainsi les désirs des placeurs;
leur donner une indemnité, c'est encourager,
récompenser le vol du produit du travail.
Ne craignez-vous pas, d'autre part, monsieur
le rapporteur, d'imposer aux municipalités des
charges trop lourdes ?
M. Beauregard nous a objecté qu'en vertu de
la loi de 1891 nous n'avions pas le droit de
supprimer une industrie. Il oublie que les bu-
reaux de placement n'existent qu'en vertu d'une
tolérance. La loi de 1891 ne leur est pas appli-
cable et aucune indemnité ne leur est due ni en
droit ni en fait.
La suppression de ces bureaux est réclamée
depuis plus de cinquante ans par les travail-
leurs, car le bureau de placement tel qu'il est
organisé, c'est le vol autorisé. L'ouvrier est
dans la dépendance absolue du placeur et ce-
lui-ci peut dire à ses victimes : « Vous n'avez
pas d'argent, vous n'aurez pas de travail. » Est-
il juste, est-il admissible que l'on puisse ainsi
spéculer sur la détresse, sur la misère ?
J'ai dans mon dossier d'innombrables plain-
tes et le mouvement en faveur de la suppres-
sion immédiate, et sans indemnité, de tous
les bureaux de placement, s'étend à la France
entière.
Actuellement, l'ouvrier n'a aucun recours
contre ses exploiteurs ; s'il essaye de se ré-
volter ou de se plaindre, il est mis à l'index
par les placeurs et réduit à mourir de faim.
La révolte des travailleurs est absolument
légitime et trop de faits monstrueux justifient
leurs colères.
On dit que les placeurs rendent des services,
et on citait pour Paris 452.000 placements d'ou-
vriers en un an. Ce serait magnifique. Mais la
réalité est que le placeur place 8, 10 et 12 fois
par an le même ouvrier.
Tous les rapports des préfets sont défavora-
bles aux placeurs, et le préfet de police, au
lieu de massacrer les ouvriers, aurait mieux
fait d'étudier ce que disaient ses prédéces-
seurs des placeurs. Tous les ont sévèrement
jugés.
Le devoir du parti républicain est de proté-
ger les travailleurs. Nous devons mettre un
terme à leur exploitation.
C'est une des premières réformes qui s'im-
pose, que de supprimer la dîme sur les salai-
res. Au nom des ouvriers, je demande la sup-
pression pure et simple des bureaux de place-
ment, sans indemnité, et je demande qui
pourra ici défendre les placeurs.
M. Georges Berry demande à son tour
la suppression des bureaux de place-
ment : -.-
M. G. Berry. — Les abus des bureaux de
placement sont indéniables, L'an dernier, 367
procès-verbaux ont été dressés pour ces abus.
Le placement payant est immoral, contraire
aux bons rapports entre ouvriers et patrons,
et nous devons le condamner.
Le placeur n'a qu'un but, c'est de gagner de
l'argent. L'ouvrier est, pour lui, transformé en
une sorte de marchandise dont il trafique.
La suppression des bureaux payants s'im-
pose. Ils ont attiré à Paris des milliers de mal-
heureux qui, restés sur le pavé sans ouvrage,
en viennent à la révolte,
M. Meslier. — Les organisateurs du mou-
vement ont donné aux ouvriers le conseil de ne
pas fournir au préfet de police le prétexte d'un
nouveau guet apens comme celui qu'il avait
organisé l'autre jour.
M. Georges Berry. — Supprimez les bu-
reaux et vous supprimerez la cause des désor-
dres. Un calcul bien simple établit que les bu-
reaux de placement prélèvent chaque année
plus de 7 millions sur leur clientèle.
Que de misères seraient soulagées si tout cet
argent restait aux mains des ouvriers 1
Nous allons, pour la quatrième fois, suppri-
mer les bureaux payants. Le gouvernement
nous aidera, espérons le, pour que ce vote ne
reste pas lettre morte.
Il faut encourager les œuvres de placement
gratuit. Avant six mois, ces œuvres peuvent
être organisées de façon à rendre les plus
grands services. Il y a là une question de sa-
lubrité et d'honnêteté publiques,
On parle du respect dû à la liberté de l'in-
dustrie. Peut-il en être question ?
Vous avez fait des lois pour protéger l'ou-
vrier dans l'atelier. Pourquoi ne le protégeriez-
vous pas au dehors ?
Ifiscours du rapporteur
M. Chambon, rapporteur, défend les
conclusions de la commission.
M. Chambon. — Notre projet organise le
placement gratuit. Il donne le droit de l'exer-
cer non seulement aux municipalités, mais
aussi aux syndicats et aux mutualités, et nous
avons Dris des précautions pour qu'aucun des
abus du bureau payant ne se glisse dans le
fonctionnement du bureau gratuit.
Mais la principale innovation de nôtre pro*
jet, c'est l'article 11 qui établit le droit du te-
nancier à une indemnité effective et qui s'ef-
force, par des subventions décroissantes avec
le temps, de l'Etat et du département, d'acti-
ver la suppression des bureaux payants.
Les municipalités pourront, sans secousse,
sans à-coup, substituer le placement gratuit
au bureau payant, et les subventions étant
décroissantes, les municipalités auront inté-
rét à activer la suppression des bureaux
payants.
Les charges financières qui vont résultat
du vote de la loi peuvent s'évaluer facile-
ment. Le prix total des bureaux payants
peut être évalué à 6.002.000 francs; la charge
de l'Etat pour les subventions à fournir s'élè-
vera à 500.000 francs à répartir sur cinq exer-
cices.
Les charges des départements peuvent être
évaluées à 480.000 francs et celles des munici-
palités à o.040.000 francs, dont 2.167.200 fr.
pour la Seine.
Le projet que nous demandons à la Chambre
de voter aura un résultat immédiat : c'est de
mettre un terme à l'exploitation des salaires et
des salariés.
M. Thierry apporte au projet l'adhésion
de certains de ses amis du centre :
M. Thierry. — Le projet sanctionne le
principe de l'indemnité. Ici encore la commis-
sion a fait une bonne opération, mais se baser
pour l'allocation do ces indemnités sur une
moyenne de bénéfices, c'est-à-dire sur une va-
leur forfaitaire, donnera peut-être quelques
mécomptes.
En ce qui concerne le placement gratuit, on
avait dit, non sans raison, c'est un monopolo
que l'on veut donner aux syndicats. Ce repro-
che, le projet de la commission ne le mérite
plus et nous nous en félicitons.
Dans ces conditions, je ne vois plus antanf
d'inconvénients à l'expérience que l'on veut
tenter. Certes des réserves s'imposent sur l'a-
venir du placement gratuit, mais il est heureux
que le Parlement apporte un remède à une si-
tuation douloureuse et je revendique, pour
mon parti, l'honneur de collaborer à cette loi
dans un esprit de philanthropie et de solidarité
sociale.
Discours du ministre du commerce
M. Trouillot, ministre du commerce,
donne l'estampille gouvernementale du
projet de la commission :
M. Trouillot. — Le gouvernement de-
mande à la Chambre d'adopter le projet qui
lui est soumis. Ce projet qui s'inspire des an-
ciens projets ne mérite plus les mêmes repro-
ches. Il maintient les mêmes délais, mais let
communes sont intéressées à hâter la suppres-
sion des bureaux payants. D'autre part l'in-
demnité est désormais certaine.
Nous sommes donc en présence d'une solu-
tion moyenne, transactionnelle, que tout le
monde peut accepter ; nous sommes en pré-
sence d'une industrie spéciale, d'une industrie
qui exploite le chômage. Par le placement
gratuit, disparaîtront des abus qu'il est impos-
sible de réprimer dans l'état actuel des choses.
des abus qui échappent à toute répression par
leur nature même. (Très bien ! très bien.)
Le projet respecte tous les principes.
Je suis convaincu que la Chambre l'adop-
tera et le gouvernement fera tous ses efforts
pour le faire aboutir devant l'autre assemblée.
(Applaudissements.)
M. Jules Coûtant présente un contre-
projet conforme à ses précédentes déclara -
tions. -
M. Gauthier (de Clagny) dit qu'il aurait
préféré l'adoption de la proposition Coû-
tant à celle rapportée par M. Chambon.
Le contre-projet Coûtant est repoussé
par 467 voix contre 102.
On adopte les trois premiers articles du
projet de la commission. ,
On repollsse un amendement de M. Ca-
zeneuve, relatif aux bureaux de nourrices
qui sont soumis à un régime légal spé-
cial.
Par 331 voix contre 219, on repousse un
amendement de M. Gauthier (de Clagny)
excluant les ouvriers étrangers du béné<
fice des bureaux de placement munici-
paux.
Les divers articles du projet sont adoptés,
ainsi que l'ensemble, par 495 voix con-
tre 16.
L'interpellation Charles Bos
M. Jaurès dépose une demande d'inter-
pellation sur le refus des patrons d'accep-
ter l'arbitrage dans la grève d'Armen-,
tières.
M. Charles Bos demande que son inter-
pellation sur les frais de justice soit main-
tenue à la date précédemment fixée.
La Chambre se range à cet avis.
Sur la demande de M. Doumer, prési-
dent de la commission, il y aura séance au-
jourd'hui pour le budget.
H. D.
- ^3
Voir à la 3* page
les Dernières Oépèohes
• — - — —1 ■ ■■
Les papiers de M. de Miquel
(De notre correspondant particulier)
Francfort, 3 novembre.
Les fils de M. von Miquel, ancien ministre,
des finances, ont l'intention de publier tous les
papiers laissés par leur père, ainsi que toute.
sa correspondance. Ils ont adressé un appel à
tous ceux qui possèdent des lettres du défunt;
homme d'Etat, avec prière de les mettte'â la
disposition de M. von Miquel, préfet à Ra-
thenow.
Si la collection est complète, on y lira des
pièces curieuses, notamment des épîtres dans,
lesquelles l'ancien ministre se montre comme
socialiste révolutionnaire intransigeant.
On sait qu'il a débuté dans la carrière poli-
tique en agitant le drapeau rouge du commu-
nisme.
- m -
LE NAVIRE INSUBMERSIBLE
IDe notre correspondant particulier)
Londres, 3 novembre.
Tandis que les constructeurs navals s'occu-
pent de la perfection du sous-marin, un ingé-
nieur anglais, M. Rilston, résidant à Ayrshire,a
dirigé son esprit inventif dans le sens con-
traire et a inventé un bateau insubmersible.
Le navire est divisé en 24 compartiments dont
chacun est fermé hermétiquement par une
porte de fer. Au moment où le danger est si-
gnalé toutes ces portes se ferment par un mou-
vement automatique et le corps du bâtiment de-
vient imperméable. Les expériences qu'on vient
de faire ont donné d'excellents résultats. On dit
que l'amirauté allemande a acquis l'invention
de M. Rilston.
,
CURIEUX HOMONYME DU PAPE
(De notre correspondant particulier)
Rome, 3 novembre.
Un curieux quiproquo s'est produit l'autre
jour entre le pape Pie X et un brave tailleur.
Ce dernier ne se contènte pas d'exercer un
métier qu'on désigne en italien par le mot
sarto, il porte encore comme nom de famille
Santopadre, ce qui veut dire Saint-Père, et par
dessus le marché il s'appelle Pio dç son prti
f :.t - ; ,. ¡ m • 0, -fm
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
14, rue da Mail, Paris.
Ut chez MM. LAGRANGE, CERF et G*
6, place de la Bourse, 6
Adresse Télégraphique: XIX' SIÈCLB- PARIS
ABONNEMENTS
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Départements 7 f. — 12 f. — 24 f,
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dans tous les Bureaux de Poste
REDACTION 1 14, rue du Mail, Paris
De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du matin.
Ño 12291. - Jeudi 5 Novembre 1903
13 BRUMAIRE AN 112
ADMINISTRATION : 14, rue du Mail
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
L'échéance du 15 novembre étant une des
plus considérables de l'année, nous prions les
personnes dont l'abonnement expire à cette
date d'envoyer, dès à présent, avec la
dernière bande, le montant de leur renou-
vellement à l'Administrateur de notre jour
nal, 44, rue du Mail. -
.On peut également s'aboniter sans frais
dans - tous - les bureaux - de poste.
NOS LEADERS
LE VOTE D'HIER
La Chambre a voté, hier, une fois de
plus, la suppression des bureaux de
placement. Le projet adopté présente la
réforme sous un aspect de modéra-
tion et de prudence qui calmera, es-
pérons-le, les susceptibilités exagérées
des libéraux du Sénat. Le texte ap-
prouvé par la Chambre prévoit la dis-
parition des bureaux de placement,
dans un délai de cinq ans, par voie
d'arrêtés municipaux. En cas d'ur-
gence, les municipalités pourront abré-
ger le délai.
***
Le principe de l'indemnité aux pla-
ceurs, inscrit dans le projet de la com-
mission, a fait l'objet d'un débat assez
vif. M. Coûtant avait déposé un con-
tre-projet qui n'admettait point la dis-
tribution d'indemnités. Ce contre-projet
a eu la préférence de 102 députés.
C'est-à-dire qu'un certain nombre de
radicaux socialistes se sont joints à la
plupart des élus collectivistes pour ap-
prouver le texte de M. Jules Contant.
Il est assez curieux, d'ailleurs, de re-
marquer que plusieurs nationalistes,
MM. Georges Berry et Gauthier (de
Clagny), notamment, avouaient que
leurs préférences allaient au contre-
projet Coûtant.
M. Georges Berry a même trouvé une
formule assez heureuse pour critiquer
le système de l'indemnité :
— Nous n'avons pas, disait-il, à
rembourser ce qui n'a pas été payé.
Il est vraiment regrettable que les
nationalistes ne déploient pas toujours
autant de zèle à défendre la cause des
travailleurs. Nous sommes convaincus
de la sincérité de MM. Georges Berry
et Gauthier (de Clagny), mais. nous
avons le droit de constater que leur ar-
deur dans le débat d'hier ne pouvait
qu'être attisée par les intérêts électo-
raux de la délabrée Patrie française.
La suppression des bureaux de pla-
cement, intéresse surtout les ouvriers
de l'alimentation — garçons boulan-
gers, bouchers, charcutiers, limona-
diers. Il suffit d'ajouter à cette liste les
garçons coiffeurs pour dresser un ta-
bleau à peu près complet des catégories
: d'ouvriers intéressées par la loi que la
Chambre vient de voter.
Notez, qu'en province, la question
des bureaux de placement est beaucoup
moins aigiie qu'à Paris.
Rien d'étonnant si, non loin des élec-
tions municipales, les nationalistes
préfèrent ne pas se brouiller avec une
importante fraction des ouvriers de
Paris.
Le contre-projet Coûtant écarté, tout
le monde — sauf 16 réactionnaires
irréductibles, — s'est trouvé d'accord
pour voter le projet de la Commission.
Il alloue, je le répète, une indemnité
aux placeurs dessaisis. Cette réserve de
l'indemnité était nécessaire pour que
la réforme ne trouvât pas, au Luxem-
bourg, un accueil trop hostile.
Et pourtant, beaucoup de bons ré-
publicains trouvaient que cette indem-
nité constituait un fâcheux précédent.
— Pour quelle raison, disaient-ils,
donner une compensation à des com-
merçants dont le concours est jugé
plus nuisible qu'utile au bon fonction-
nement de la société ? Et que répon-
- dra-t-on aux industriels quand ils de-
manderont des secours à l'Etat, afin
de parer aux frais à eux occasionnés
par une loi de protection ouvrière?
Voyez, par exemple, les industriels du
tissage. « Ils faisaient travailler leurs
ouvriers pendant douze ou treize heu-
res. La limitation de la journée de tra-
vail leur interdit de garder les tisseurs
à l'atelier pendant plus de 10 heures
et demie. S'ils ne veulent pas restrein-
dre leur production, les patrons se-
pent forcés d'acheter de nouveaux
métiers, et de payer de nouveaux ou-
--- vriers. - - -
- a Ne seront-ils pas fondés à récla-
mer une indemnité à l'Etat qui, par
une loi, leur occasionne un « manque
« à gagner » tout comme auxplaceursj?
« Et les fabricants de blanc de cé-
ruse, obligés de se préparer à la fa-
brication du blanc de zinc, tiendront à
coup sûr un raisonnement analogue. »
.**
Ce raisonnement n'est pas dénué de
force. Tout au plus pourrait-on répli-
quer que les industriels à qui un rè-
glement impose des charges impré-
vues ont l'avenir devant eux pour réa-
liser des bénéfices, tandis que les pla-
neurs, dont l'industrie est purement
et simplement supprimée, subissent
tone perte sèche.
I Peu importent, en somme, ces dis-
cussions théoriques. Dans l'intérêt de
m Jaorale et de l'ordre publics la sup-
pression des bureaux de placement est
nécessaire. Puisque "le Sénat tient au
principe de l'indemnité, on a eu raison
de ne pas le contrecarrer sur ce point.
La contribution acceptée parl'Etat ne
saurait, en cinq ans, dépasser 500,000
francs. Ce n'est pas très cher pour so-
lutionner un douloureux et menaçant
problème social.
Hugues Destrem.
PLAINTES ET RÉSERVES
L'autre jour un interviewer
faisait dire à M. Combes, qu'il
sentait que la presse parisienne
le soutenait, « comme la corde
soutient le pendu», mais qu'il
trouvait un accueil meilleur dans
la presse de province. Et nous avions pris-
cette interview pour la fantaisie d'un con-
frère à court de copie, et décidé à inventer
quand la nouvelle ne donne pas.
Mais nous voyons aujourd'hui que le
président du Conseil prend, en effet, pour
confidents certains journaux de province,
auxquels il fait adresser par l'agence Havas
des notes tout à fait personnelles et curieu-
ses. Donc, empruntons à ces confrères si
spécialement documentés : >
« Nous croyons savoir que le président
du Conseil n'a pas dissimulé à diverses
personnes combien il avait été chagriné de
voir, au cours de la séance tenue vendredi
dernier par la Chambre, une fraction du
groupe socialiste se prononcer contre l'or-
dre du jour pur et simple, que le gouverne-
ment avait accepté comme conclusion aux
interpellations sur les incidents de la Bourse
du Travail.
« M. Combes n'a pas moins été chagriné
de constater que l'amendement de M. de
Lanjuinais, réduisant de 10.000 francs le
crédit pour le traitement des sous-préfets,
avait recueilli les voix de quelques députés
votant habituellement avec le cabinet. »
Par conséquent, « il n'est pas surpre-
nant » que M. Combes « ait laissé enten-
dre que si la majorité venait à se désagré-
ger, il abandonnerait immédiatement le
pouvoir ». Toutefois « il convient d'ajouter
qu'on assure de très bonne source qu'à
l'heure actuelle le président du conseil
n'aurait encore pris aucune résolution dé-
finitive sur la conduite qu'il compte tenir ».
Nous trouvons, dans cette note officieuse,
exactement résumée, la politique qui con-
siste à prendre congé avec l'intention de se
faire retenir. Nous avons déjà expliqué à
M. Combes que c'était là la plus vaine et
la plus détestable des politiques. Il s'en
prend à la majorité ; mais ce n'est pas ,à
lui de juger là majorité, c'est à la majorité
d'examiner s'il la représente avec plus ou
moins d'exactitude. Encore un coup, que
M. Combes agisse nettement selon le pro-
gramme des groupes de gauche, et ceux-ci
le suivront. Sinon, ses plaintes à certains
journaux de province ne changeront rien à
sa position, qui est, en effet, moins bonne
que naguère. - Ch. B.
SAGES MESURES
Les cruels incidents de la Bourse du Travail
ont appelé à nouveau l'attention sur les
malheureux qui viennent à Paris chercher for-
tune, et qui, espérant y trouver une situation
quelconque, sont réduits à passer sous le joug
des placeurs et à laisser entre leurs mains leurs
plus belles plumes.
L'ouvrier, la servante, arrivent un peu igno-
rants de leur province, ce sont des proies mer-
veilleuses pour les gens rapaces et sans scru-
pules qui vivent d'eux. S'ils ont quelques res-
sources à leur entrée à Paris, ils les mangent
en quelques jours, ils se découragent, ils sont
las de chercher tout seuls du travail, el finis-
sent par accepter les conditions les plus oné-
reuses, les hommes pour échapper à la faim,
les femmes pour échapper à la prostitution qui
bien souvent les guette.
Il faut reconnaître que nous sommes bien
mal organisés en France. Ce qui se produit
chez nous est évité en Belgique de la manière
suivante. Tous les trains qui conduisent à la
capitale, toutes les gares, contiennent des affi-
ches placées à un endroit où elles ne peuvent
échapper à l'œil le moins vigilant, et voici ce
que j'y ai lu :
Avis 'impoJ'tant.- Les ouvriers qui se rendraient
à Bruxelles à la recherche de travail et qui s'y
trouveraient dénués de toutes ressources, seront
accueillis en tous temps à la Maison du Travail,
où ils seront occupés, logés, nourris jusqu'à ce
qu'ils aient trouvé une place stable. Ils trouveront
des billets d'admission à la Bourse du Travail.
Maison des servantes. — Les jeunes filles qui
cherchent à se placer à Bruxelles et qui n'ont pas
à la gare un parent pour les recevoir, sont préve-
nues qu'il y a danger pour elles à suivre les indi-
cations d'adresses qui leur seraient données par
des inconnus. Elles peuvent immédiatement se
faire conduire à la Maison des servantes, où elles
trouveront le logement et les renseignements né-
cessaires. La course de voiture est payée aux frais
de la Maison.
J'espère que voici de bons exemples. Le tout
n'est point de les admirer, il faut les suivre.
— Ch. Darcji.
LE PROFESSEUR BEKHTEREW
(De notre correspondant particulier)
Saint-Pétersbourg, 3 novembre.
Le professeur Bekhterew, le célèbre psychia-
tre dont la réputation dépasse les frontières
de sa patrie vient d'accomplir sa 25e année de
service comme professeur de l'Ecole de Méde-
cine Militaire où il occupe la chaire de psycho
logis et de névi'ologie.
Aux termes du règlement il devrait être mis
à la retraite, mais le gouvernement a décidé de
le nommer titulaire de la chaire pour une nou-
velle période de cinq ans. M. Bekhterew a as-
sisté à plusieurs congrès des médecins à Paris
où il s'est signalé non seulement par ses com-
munications précieuses mais aussi par la cor-
rection avec laquelle il s'exprime en français.
———————————- ——————————— „
LE TRUST DE MORGAN
ENTRE LES MAINS DES ALLEMANDS
(De notre correspondant particulier)
Hambourg, 3 novembre.
M. Ballin, directeur de la « Messagerie Ham-,
bourg-New-York», est parti pour Chicago avec
la mission de remonter le trust de Morgan
ave3 des capitaux allemands. )1, Ballin est,
comme on sait, un ami intime de l'empereur
et des gens bien renseignés affirment que Guil-
laume II s'intéresse particulièrement au pro-
jet de faire entre des mains allemandes le
trust américain de construction navale.
LE RAPPEL
ARTISTIQUE ET LITTERAIRE
Le Salon d'automne
Depuis le rapport de M. Quentin-Bauchart.
le service des beaux-arts prend tournure, sous-
l'active collaboration de MM. Brown, Cain,
Veyrat, Henry Lapauze. Il fallait une direc-
tion unique groupant d'habiles éléments. Peut-
être verrons nous - bientôt les effets de cette
impulsion nouvelle. Au Petit Palais, ouver-
ture de ce Salon d'automne si longtemps
discuté, qui faillit être remis, une fois de
plus, à l'année suivante, et contre lequel le
matin même se dressaient encore des opposi-
tions. C'est un peu le Salon de la ville. La ré-
ception du ministre par MM. de Selves, De-
ville et Georges Veyrat a semblé une indi-
cation.
Heureux mélange
Et je dois convenir de l'aimable surprise
causée par ces locaux, qu'on croyait à jamais
réduits en oubliettes. Les organisateurs, MM.
Frantz Jourdain. Rambosson, en ont fait une
suite de petites loges intimes et coquettes, jo-
lies de teintes et d'éclairage. Deux grands cou-
rants, le rouge et le gris, paraissent les tra-
verser, avec les plus heureuses associations.
Chaque salle forme un tout harmonieux. On a
mélangé, innovation que quelques-uns. ont
blàmée, mais que je trouve plutôt agréable, les
gravures et les toiles, voisinant elles-mêmes
avec les sculptures et les vitrines d'objets dé-
coratifs.
Ce n'est pas la cohue des deux Salons de
printemps, ni la foire aux artistes. Le recueil-
lement et i'étude y conduiront plus d'un. C'é-
tait une cave, je le répète, elle est maintenant
charmante. Et entre les mains du comité dont
j'ai les noms sous les yeux ce devait fatale-
ment devenir une chose de goût.
Les étiquettes les plus diverses sont repré-
sentées : classiques, impressionnistes, idéalis-
tes et réalistes, les rêveurs et les violents. On
rencontre quelques anciens, intéressants tou-
jours, mais l'ensemble est plutôt jeune, d'a-
vant-garde, bien moderne. Il m'est difficile de
vous tracer un guide méthodique de notre vi-
site à cause de cette cohabitation des diverses
productions. Dès l'entrée des salles, à gauche,
vous êtes arrêté par les merveilles les plus va-
riées, James Vibert le sculpteur, les peintures
de Mademoiselle Dufau et d'Aman Jean, un
dessin de Chéret, un bijou de Lalique, les gra-
vures de Pierre-Eugène Vibert et de Léon Per-
richon, un groupe de Jasinski, une énorme
femme de Fix Masseau. Vous vous extasiez de-
vant l'agencement harmonieux d'une salle
tout entière, la 6e si je me souviens bien, où
toiles, gravures, vitrines, poteries de Dolahor-
che, se marient tendrement. Voycrestionc cha-
que catégorie, au hasard de la promenade, et
nous pouvons, mieux qu'à la Nationale ou aux
Artistes Français, réserver quelques minutes
partout où il nous semblera bon.
La peinture
Les envois de M. Albert Besnard su rprennent
ses amis. L'Intérieur d'é lt*se à Londres et Lé-
gende écossaise"rappellent des "Symphonies gri-
ses auxquelles ce fervent de la couleur a de-
puis longtemps renoncé. Aussi a t-il soi-
gneusement daté : 1881. Les portraits de M.
Jacques Blanche sont d'un charme indiscuta-
ble, surtout l'ardente blondeur de Georges
Moore. Que dire d'Eugène Carrière ? Regardez
M. Messelmitoff et dites-moi s'il est facile d'en-
clore plus de pensée dans quelques pouces de
toile. L'Heure paisible, de M. Eugène Chigot,
les études de Mme Gonyn de Lurieux, Sur la
lande austère et A Beg-Mell, et Le crépuscule
savoureux de M. Georges Lopisgich sont d'in-
téressantes notations.
Il y a de merveilleux paysages,de Paris et de
province. Admirez Le Pont au Change, d'Au-
guste Lepère, ce mouvement de foule, le scir,
et, du même, un neigeux Quai de l'Hôtel-de-
Ville. Voyez le Viarmes, de Paul Baignières ;
le Boulevard Barbès, de Braquaval, la Vallée
d'Arqués, de René Debraux, et les merveilleux
Arbres, Congés par le vent de mer, du Norvé-
gien Diriks, et les Ajoncs en fleurs, de M. Eu-
gène Bourgeois ; les Vagues déferlantes, de
l'Américain Harrisson ; les Bords de rivière,
d'Alfred Jeanmougin, et l'étude de Rempart de
Montreuil-sur-Mer le soir, de Francis Jourdain.
, Je n'aurais garde d'oublier M. Em. de la Vil-
léon et ses campagnes do la Nièvre, ni M. Panl
Simons, qui est en train de se classer au pre-
mier rang des peintres de lumières. Son Etang
de Caronte et La Uordigue au crépuscule m'ont
longtemps retenu. Çà et là de délicieux ta-
bleaux, assemblées Intimes,souvenirs de route,
croquis 6n plein vent, poèmes d'intérieur. Le
Mariage juif du Hollandais Josef Israels, qui
ne compte plus ses triomphes, les physionomies
féminines de M. Albert Belleroche, lierthe, Ro-
sine, Ninie et Lili. La Vieille hollandaise de M.
Jules Benoît-Lévy; le Nettoyage, de Jules.
Grûn ; la Rieuse, d'Abel Faivre ; la Dévideuse
picarde, de Matisse ; la Lettre, do Morisset ; la
Petite fresque, d'Armand Point, dont on con-
naît les tendances. Haidiment réactionnaire en
procédés, M. Armand Point est revenu à la
peinture à l'œuf, comme les primitifs, et son
atelier de Haute-Claire, à l'orée de la forêt de
Fontainebleau, vers Marlotte, est un labora-
toire des plus hautaines théories d'art décora-
tif. Les deux toiles rapportées de Fontainebleau
par M. Henry Tenré continuent l'œuvre déli-
cate de ce peintre. Toutes les pages de M. Abel
Truchet sont maintenant à citer. Ici, La fête de
Newilly, dans ce genre mouvementé où il
excelle. Il faut voir deux savoureuses scènes de
M. Félix Valloton.
Quelques bons portraits, d'ingénieux arran
gementa d'étoffes, des chairs savantes: nous
avons déjà vu Mme Jeanne Mahudez à la So-
ciété des Artistes Français, o'est un talent qui
s'affirme ; M. le conseiller P. rappelle Made-
moiselle Cécile Desliens ; M. Alexander expose
une bien intéressante Mlle F. J. M. Georges
Desvallières est toujours séduisant. @ J'apprécie
la Dame en blanc de M. Charles Guérin.
Alphonse Osbert a remis trois àJ ses vapo-
reuses rêveries, Contemplation, En vue des
"montagnes, et Les saintes femmes se rendant aur
.tombeau.
Il y a un coin spécial consacré à Paul Gau-
guin, au misanthrope qui délaissa les landes
bretonnes de Pont-Aven pour Tahiti et les
îles Marquises. Certains de ses paysages en
arrivent, plus faits pour la curiosité que pour
l'admiration. C'est ainsi que les beaux talents
se perdent, quand ils méconnaissent la me-
sure.
Dessins, gravures, architecture
Au passage : Jules Baric, une tête de Paul
Baignères et des portraits, des sanguines de
Jules Chéret, une aquarelle, Mer farouche, de
Henry Detouche, des pastels d'Abel Faivre, les
magnifiques pages de Lepère, un étang som-
bre, plus beau qu'une peinture, les Soupeurs
de Louis Legrand, un fusain de Lopisgich, des
fleurs de Mad. Céline Salard, et l'envoi de ce
délicieux Willette dont une adorable femme
rousse au pastel.
La section d'architecture présente de nou-
veaux essais d'ameublements et de décoration
du logis, la salle à manger en chêne ciré de
M. Charles Plumet, les papiers et tissus pour
tentures murales de MM. Francis Jourdain et
Ed. Cousin, ie bureau en sycomore de M. Sel-
jpaesheim. ,
Examinez les gravures : je ne vous appren-
drai rien en affirmant que M. Pierre-Eugène
Vibert est un grand artiste et que la science de
M. Léon Perrichon ne laisse rien à désirer. Une
lithographie de Pierre Roche, L'épave, l'eau-
forte de Sunyer, Blanchisseuse, celles de Le-
heutre, les eaux-fortes en couleurs de Bernard
Boutet de Monvel et de Bottini. le Passage du
gué, de Paul Colin, autant de minutes à consa-
crer dans notre promenade. -
La sculpture
Peu nombreuse, elle compte quand même,
Dès l'entrée, James Vibert présente la ma-
quette d'un groupe à placer dans sa vaste com-
position de l'Autel à la Nature, dont il a déjà
exposé de remarquables fragments, c'est l'Ef-
fort Humain. Un groupe de miséreux déchar-
nés traîne un énorme boulet, le fardeau du
travail. La Poésie les suit, relevant sa lyre
pour ranimer les énergies lasses. On a fort
admiré cette conception.
Le Baiser de M. Joseph Jasinski est doulou-
reux et puissant. C'est plus qu'une promesse.
M. Pierre Roche, artiste très probe, a étudié,
avec sa conscience habituelle, un torse de
femme, l'Innocence entre la ruse et la violence,
La Grosse femme do M. Fix-Masseau est amu-,
santé. Mlle Charlotte Besnard, avec un plâtre,
Matin, continue son brillant chemin.
On rencontre quelques bustes,le député M.,
par M. Paul Gasq, la Vision, de M. Alfrert-
Halou, un Gavroche de M. Injalbert, une Rieuse
de M. Marquet de Vasselot.
L'art décoratif
Celte section comprend tout ce qui concourt
à r^mhellissemôût du logis ou de la personne.
Mettons de suite hors - de pair les grès
flammés de Delaherche : c'est une iragie de.
teintes veloutées et chaudes qu'on n'osait pas
espérer d'une matière aussi rébarbative. M. Me--
they expose un crabe vigoureux. La vitrine de
M. Félix Massoul est à citer entière.
Dans les bijoux, MM. René Lalique et Char-
les Rivaud. Les compositions de ce dernier sont
d'une originalité saisissante. Quittant les tra-
ces de son heureux devancier, il a su donner à
chacun de ses essais une couleur, une person-
nalité propres. Il y a une certaine lourdeur, ou
plutôt une fermeté voulue, dans ses lignes,
dans leurs torsions, dans leurs entrelacs. Les
métaux gardent une demi-rudesse. Cependant
on sent bien que c'est pour la femme, et pour
compléter sa beauté, que l'or et l'argent asso-
cient en formes non pareilles leurs forces et
leurs volontés.
LÉON RloroR.
Memento. - Edmond Laebena! présente cette
année, à la Galerie Georges Patit de la rue de
Sèze, une exposition d'Art céraoïique du plus haut
intérêt, accompagnée de meubles do Majorelle. de
verreries de Daum, et de marbres statuaires de la
Société française de sculpture d'art.
Rappelons que la Société d'horticulture, dont
l'exposition annuelle a lieu d'aujourd'hui au 11
novembre, aux serres du Cours-la-Reine, contient
une section des beaux-arts, peinture, aquarelle,
sculpture de la fleur.
db --
LES CORBEAUX
Un certain nombre do corbeaux, plus ou
moins centenaires, las de parcourir les vastes
plaines durcies par la gelée ou recouvertes de
neige, viennent chaque année établir leurs
quartiers d'hiver dans nos squares parisiens.
Ce sont, pour la plupart, des philosophes
assez misanthropiques, d'un esprit méfiant et
clairvoyant, mais qui se montrent aimables et
loquaces lorsqu'ils daignent se laisser appro-
cher.
J'ai fait la connaissance de l'un d'eux au
parc des Buttes-Chaumont; il se tient le plus
souvent dans un petit sentier situé au-dessus
de la grotte, près de la cascade qui dégringole,
écumeuse et bruyante, du haut de la rue
Botzaris,
Mon corbeau avait, hior, l'air tout cha
grin.
- Sont-ce les premiers froids, lui deman-
dai-je, qui vous donnent cette mine triste et
lugubre?
— Ah ! le froid n'a guère de prise sur ma.
vieille carcasse. Le froid est, d'ailleurs, notre
ami.
La veille, je lui avais confié que je suis fri-
leux, et je crus voir une ironie dans sa ré-
ponse. Je ripostai :
— N'éprouvez-vous pas la nostalgie des
champs de bataille ?
— Comme vous connaissez peu les corbeaux !
Quels préjugés vous avez sur nous! Tenez, par
exemple, la mine rechignée que vous me voyez
n'est due qu'au spectacle que vous venez de
m'offrir, vous autres, hommes.
- Racontez-moi cela.
- Un jeune corbeau — c'est à peine s'il a
une cinquantaine d'années — m'a prié de.
l'accompagner à une fête foraine qui se tient
en ce moment à Montmartre. J'y ai consenti,
bien que je n'aime pas beaucoup la cohue hu-
maine. Quelques souvenirs personnels, s'il
faut tout dire, me décidèrent à faire cette pe-
tite excursion : je revis, quand mon ami me fit
sa proposition, les fêtes foraines de jadis, si
simples, si joyeuses; je revis surtout les bons
chevaux do bois qui tournaient lentement aux
sons d'une vague musique que couvraient
somplètement les fusées de rire des enfants. Le
pire dos enfants a toujours exercé sur moi un
charme particulier ; c'est, à mon humble avis
de corbeau, une des plus jolies choses qu'on
puisse goûter ici-bas.
Hélas ! je regrette bien d'être allô à Mont
martre 1 Les hommes n'ont plus de chevaux de
bois! Vous avez maintenant d'énormes manè-
ges qui font un bruit assourdissant, épouvan
table : on n'entend plus que le halètement des
machines à vapeur, les grincements des pis-
tons et des leviers, les sifflets stridents des si-
rènes. Et dans des tourbillons de fumée, on
voit monter et descendre et tourner avec une
vitesse vertigineuse des êtres humains, cram-
ponnés fébrilement à des tiges de cuivre, bla-
fards sous la lumière crue des globes électri-
ques.
Je me suis enfui à tire d'aile, me demandant
si les hommes ne sont pas devenus fous.
Mais rassurez-vous sur mon état ; je vais
éloigner de mon esprit cette vision diabolique,
je ne veux pas me laisser tomber dans le ma-
rasme et finir comme Rollinat.
— Un poète peut se suicider, mais un cor-
beau !
— Vous ne lisez donc pas les journaux ?
Rollinat n'est pas mort dans un accès de folie;
Rollinat n'a pas succombé aux suites de sa
tentative de suicide ; Rollinat, disent, aujour-
d'hui, les journaux, est mort d'un marasme
physiologique, comme vous ot moi pouvons on
mourir.
Allons 1 lisez mieux les gazettes — et.à de-
main, s'il ne pleut pas.
G. DE VORNEY.
-
A L'HOTEL DE VILLE
-
La commission mixte des omnibus et tram-
ways, nommée par le préfet de la Seine pour
examiner le projet de réorganisation du réseau
de tramways de la Compagnie générale des
Omnibus, s'est réunie hier après midi, à l'Hô-
tel de Ville.
Après avoir étudié les questions du tarif et
du sectionnement, elle a examiné la question'
des horaires et a réglé notamment l'heure des
premiers et derniers départs.
A LA CHAMBRÉ
LES BUREAUX DE PLACEMENT
M. Léon Bourgeois, qui présidait, a pro-
noncé, en prenant place au fauteuil, l'éloge
funèbre de M. Gabriel Denis, député répu-
blicain de la Charente Inférieure, dont
nous avons récemment annoncé la mort.
La Chambre a validé ensuite l'élection
de M. Videau dans la quatrième circons-
cription de Bordeaux.
A l'unanimité de 516 votants, a été
vote le projet relatif à la construction de
nouveaux tableaux téléphoniques multi-
ples à Paris, Lille et Lyon.
Ensuite,l'urgence a été conférée au pro-
jet de loi concernant la suppression des
bureaux de placement. Ce projet comporte
la suppression, avec indemnité, des bu-
reaux de placement, dans un délai de cinq
ans, avec faculté donnée aux municipalités
d'opérer la suppression de ces établisse-
ments sans délai en cas de nécessité. M.
Jules Coûtant réclame la suppression des
bureaux de placement sans indemnité.
M. Jules Coûtant. — Il me serait facile
de mettre sous les yeux de la Chambre des
faits, des abus qui démontrent que, dans l'in-
térêt des travailleurs, la suppression immé-
diate et sans indemnité des bureaux de pla-
cement s'impose.
Au fond, tout le monde est d'accord, et je
pense qu'il sera facile de trouver un terrain
d'entente pour que l'importante question du
placement des ouvriers et employés reçoive
enfin une solution définitive.
L'honorable rapporteur conclut à la suppres-
sion des bureaux avec des délais et des indem-
nités, en sorte que les ouvriers seront, en bien
des cas, forcés d'attendre, pendant des années
encore, la disparition de leurs exploiteurs.
Comment peut se justifier une indemnité à
ces agences que je qualifierai d'interlopes ?
Vous comblez ainsi les désirs des placeurs;
leur donner une indemnité, c'est encourager,
récompenser le vol du produit du travail.
Ne craignez-vous pas, d'autre part, monsieur
le rapporteur, d'imposer aux municipalités des
charges trop lourdes ?
M. Beauregard nous a objecté qu'en vertu de
la loi de 1891 nous n'avions pas le droit de
supprimer une industrie. Il oublie que les bu-
reaux de placement n'existent qu'en vertu d'une
tolérance. La loi de 1891 ne leur est pas appli-
cable et aucune indemnité ne leur est due ni en
droit ni en fait.
La suppression de ces bureaux est réclamée
depuis plus de cinquante ans par les travail-
leurs, car le bureau de placement tel qu'il est
organisé, c'est le vol autorisé. L'ouvrier est
dans la dépendance absolue du placeur et ce-
lui-ci peut dire à ses victimes : « Vous n'avez
pas d'argent, vous n'aurez pas de travail. » Est-
il juste, est-il admissible que l'on puisse ainsi
spéculer sur la détresse, sur la misère ?
J'ai dans mon dossier d'innombrables plain-
tes et le mouvement en faveur de la suppres-
sion immédiate, et sans indemnité, de tous
les bureaux de placement, s'étend à la France
entière.
Actuellement, l'ouvrier n'a aucun recours
contre ses exploiteurs ; s'il essaye de se ré-
volter ou de se plaindre, il est mis à l'index
par les placeurs et réduit à mourir de faim.
La révolte des travailleurs est absolument
légitime et trop de faits monstrueux justifient
leurs colères.
On dit que les placeurs rendent des services,
et on citait pour Paris 452.000 placements d'ou-
vriers en un an. Ce serait magnifique. Mais la
réalité est que le placeur place 8, 10 et 12 fois
par an le même ouvrier.
Tous les rapports des préfets sont défavora-
bles aux placeurs, et le préfet de police, au
lieu de massacrer les ouvriers, aurait mieux
fait d'étudier ce que disaient ses prédéces-
seurs des placeurs. Tous les ont sévèrement
jugés.
Le devoir du parti républicain est de proté-
ger les travailleurs. Nous devons mettre un
terme à leur exploitation.
C'est une des premières réformes qui s'im-
pose, que de supprimer la dîme sur les salai-
res. Au nom des ouvriers, je demande la sup-
pression pure et simple des bureaux de place-
ment, sans indemnité, et je demande qui
pourra ici défendre les placeurs.
M. Georges Berry demande à son tour
la suppression des bureaux de place-
ment : -.-
M. G. Berry. — Les abus des bureaux de
placement sont indéniables, L'an dernier, 367
procès-verbaux ont été dressés pour ces abus.
Le placement payant est immoral, contraire
aux bons rapports entre ouvriers et patrons,
et nous devons le condamner.
Le placeur n'a qu'un but, c'est de gagner de
l'argent. L'ouvrier est, pour lui, transformé en
une sorte de marchandise dont il trafique.
La suppression des bureaux payants s'im-
pose. Ils ont attiré à Paris des milliers de mal-
heureux qui, restés sur le pavé sans ouvrage,
en viennent à la révolte,
M. Meslier. — Les organisateurs du mou-
vement ont donné aux ouvriers le conseil de ne
pas fournir au préfet de police le prétexte d'un
nouveau guet apens comme celui qu'il avait
organisé l'autre jour.
M. Georges Berry. — Supprimez les bu-
reaux et vous supprimerez la cause des désor-
dres. Un calcul bien simple établit que les bu-
reaux de placement prélèvent chaque année
plus de 7 millions sur leur clientèle.
Que de misères seraient soulagées si tout cet
argent restait aux mains des ouvriers 1
Nous allons, pour la quatrième fois, suppri-
mer les bureaux payants. Le gouvernement
nous aidera, espérons le, pour que ce vote ne
reste pas lettre morte.
Il faut encourager les œuvres de placement
gratuit. Avant six mois, ces œuvres peuvent
être organisées de façon à rendre les plus
grands services. Il y a là une question de sa-
lubrité et d'honnêteté publiques,
On parle du respect dû à la liberté de l'in-
dustrie. Peut-il en être question ?
Vous avez fait des lois pour protéger l'ou-
vrier dans l'atelier. Pourquoi ne le protégeriez-
vous pas au dehors ?
Ifiscours du rapporteur
M. Chambon, rapporteur, défend les
conclusions de la commission.
M. Chambon. — Notre projet organise le
placement gratuit. Il donne le droit de l'exer-
cer non seulement aux municipalités, mais
aussi aux syndicats et aux mutualités, et nous
avons Dris des précautions pour qu'aucun des
abus du bureau payant ne se glisse dans le
fonctionnement du bureau gratuit.
Mais la principale innovation de nôtre pro*
jet, c'est l'article 11 qui établit le droit du te-
nancier à une indemnité effective et qui s'ef-
force, par des subventions décroissantes avec
le temps, de l'Etat et du département, d'acti-
ver la suppression des bureaux payants.
Les municipalités pourront, sans secousse,
sans à-coup, substituer le placement gratuit
au bureau payant, et les subventions étant
décroissantes, les municipalités auront inté-
rét à activer la suppression des bureaux
payants.
Les charges financières qui vont résultat
du vote de la loi peuvent s'évaluer facile-
ment. Le prix total des bureaux payants
peut être évalué à 6.002.000 francs; la charge
de l'Etat pour les subventions à fournir s'élè-
vera à 500.000 francs à répartir sur cinq exer-
cices.
Les charges des départements peuvent être
évaluées à 480.000 francs et celles des munici-
palités à o.040.000 francs, dont 2.167.200 fr.
pour la Seine.
Le projet que nous demandons à la Chambre
de voter aura un résultat immédiat : c'est de
mettre un terme à l'exploitation des salaires et
des salariés.
M. Thierry apporte au projet l'adhésion
de certains de ses amis du centre :
M. Thierry. — Le projet sanctionne le
principe de l'indemnité. Ici encore la commis-
sion a fait une bonne opération, mais se baser
pour l'allocation do ces indemnités sur une
moyenne de bénéfices, c'est-à-dire sur une va-
leur forfaitaire, donnera peut-être quelques
mécomptes.
En ce qui concerne le placement gratuit, on
avait dit, non sans raison, c'est un monopolo
que l'on veut donner aux syndicats. Ce repro-
che, le projet de la commission ne le mérite
plus et nous nous en félicitons.
Dans ces conditions, je ne vois plus antanf
d'inconvénients à l'expérience que l'on veut
tenter. Certes des réserves s'imposent sur l'a-
venir du placement gratuit, mais il est heureux
que le Parlement apporte un remède à une si-
tuation douloureuse et je revendique, pour
mon parti, l'honneur de collaborer à cette loi
dans un esprit de philanthropie et de solidarité
sociale.
Discours du ministre du commerce
M. Trouillot, ministre du commerce,
donne l'estampille gouvernementale du
projet de la commission :
M. Trouillot. — Le gouvernement de-
mande à la Chambre d'adopter le projet qui
lui est soumis. Ce projet qui s'inspire des an-
ciens projets ne mérite plus les mêmes repro-
ches. Il maintient les mêmes délais, mais let
communes sont intéressées à hâter la suppres-
sion des bureaux payants. D'autre part l'in-
demnité est désormais certaine.
Nous sommes donc en présence d'une solu-
tion moyenne, transactionnelle, que tout le
monde peut accepter ; nous sommes en pré-
sence d'une industrie spéciale, d'une industrie
qui exploite le chômage. Par le placement
gratuit, disparaîtront des abus qu'il est impos-
sible de réprimer dans l'état actuel des choses.
des abus qui échappent à toute répression par
leur nature même. (Très bien ! très bien.)
Le projet respecte tous les principes.
Je suis convaincu que la Chambre l'adop-
tera et le gouvernement fera tous ses efforts
pour le faire aboutir devant l'autre assemblée.
(Applaudissements.)
M. Jules Coûtant présente un contre-
projet conforme à ses précédentes déclara -
tions. -
M. Gauthier (de Clagny) dit qu'il aurait
préféré l'adoption de la proposition Coû-
tant à celle rapportée par M. Chambon.
Le contre-projet Coûtant est repoussé
par 467 voix contre 102.
On adopte les trois premiers articles du
projet de la commission. ,
On repollsse un amendement de M. Ca-
zeneuve, relatif aux bureaux de nourrices
qui sont soumis à un régime légal spé-
cial.
Par 331 voix contre 219, on repousse un
amendement de M. Gauthier (de Clagny)
excluant les ouvriers étrangers du béné<
fice des bureaux de placement munici-
paux.
Les divers articles du projet sont adoptés,
ainsi que l'ensemble, par 495 voix con-
tre 16.
L'interpellation Charles Bos
M. Jaurès dépose une demande d'inter-
pellation sur le refus des patrons d'accep-
ter l'arbitrage dans la grève d'Armen-,
tières.
M. Charles Bos demande que son inter-
pellation sur les frais de justice soit main-
tenue à la date précédemment fixée.
La Chambre se range à cet avis.
Sur la demande de M. Doumer, prési-
dent de la commission, il y aura séance au-
jourd'hui pour le budget.
H. D.
- ^3
Voir à la 3* page
les Dernières Oépèohes
• — - — —1 ■ ■■
Les papiers de M. de Miquel
(De notre correspondant particulier)
Francfort, 3 novembre.
Les fils de M. von Miquel, ancien ministre,
des finances, ont l'intention de publier tous les
papiers laissés par leur père, ainsi que toute.
sa correspondance. Ils ont adressé un appel à
tous ceux qui possèdent des lettres du défunt;
homme d'Etat, avec prière de les mettte'â la
disposition de M. von Miquel, préfet à Ra-
thenow.
Si la collection est complète, on y lira des
pièces curieuses, notamment des épîtres dans,
lesquelles l'ancien ministre se montre comme
socialiste révolutionnaire intransigeant.
On sait qu'il a débuté dans la carrière poli-
tique en agitant le drapeau rouge du commu-
nisme.
- m -
LE NAVIRE INSUBMERSIBLE
IDe notre correspondant particulier)
Londres, 3 novembre.
Tandis que les constructeurs navals s'occu-
pent de la perfection du sous-marin, un ingé-
nieur anglais, M. Rilston, résidant à Ayrshire,a
dirigé son esprit inventif dans le sens con-
traire et a inventé un bateau insubmersible.
Le navire est divisé en 24 compartiments dont
chacun est fermé hermétiquement par une
porte de fer. Au moment où le danger est si-
gnalé toutes ces portes se ferment par un mou-
vement automatique et le corps du bâtiment de-
vient imperméable. Les expériences qu'on vient
de faire ont donné d'excellents résultats. On dit
que l'amirauté allemande a acquis l'invention
de M. Rilston.
,
CURIEUX HOMONYME DU PAPE
(De notre correspondant particulier)
Rome, 3 novembre.
Un curieux quiproquo s'est produit l'autre
jour entre le pape Pie X et un brave tailleur.
Ce dernier ne se contènte pas d'exercer un
métier qu'on désigne en italien par le mot
sarto, il porte encore comme nom de famille
Santopadre, ce qui veut dire Saint-Père, et par
dessus le marché il s'appelle Pio dç son prti
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