Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-09-23
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 23 septembre 1903 23 septembre 1903
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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lit., A 8 heures du totr et de 10 heures du sovr à 1 heure du matin
rqo 122413. — Mercredi 23 Septembre 1903
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ADMINISTRATION ; 14, rue du Uatl ¡;,..,-- 1
Adresser lettres et mandats » l'i i m ûstraieur -
NOS LEADERS
UCini
Disons, en style d'affiche électorale :
pas d'équivoque ! Ce n'est pas du Bo-
napartisme que nous voulons parler.
Le Bonapartisme est enterré depuis si
longtemps, que le vocable d' «impé-
rialisme». qui servait autrefois à le
désigner a maintenant un autre usage.
L'Impérialisme — au sens maintenant
le plus général du mot — c'est pro-
prement, comme tou* le savez, du
reste, la doctrine qui donne à chaque
nation la mission de devenir toujours
« plus grande ». La plus grande An-
gleterre, c'est le programme des impé-
rialistes anglais, que nos nationalistes
plagient quand ils nous parlent de la
« plus grande France».
Avec les allures de nouveauté qu'elle
se donne, la doctrine dont il s'agit re-
présente une très vieille erreur. Il n'y
a pas de peuple, si vigoureux qu'il fut,
qui n'ait trouvé, à un moment donné,
la limite de son expansion. Ni les
Perses, avec leurs Darius et leurs
Cyrus, ni les Grecs, avec leur
Alexandre, ni les Romains avec leurs
Césars, ni, pour rentrer dans l'his-
toire contemporaine, la France avec
ses Napoléons, n'ont pu tenir la ga-
geure. d'augmenter sans cesse leurs
possessions, leurs armées et leurs res-
sources.
***
Je sais bien que l'impérialisme a ceci
de neuf, qu'il prétend répondre à des
besoins économiques modernes. En
Angleterre, en Amérique, en Allema-
gne, en France, l'industrie fournit ses
produits avec une abondance crois-
sante. Aucune nation ne peut se con-
tenter de son propre marché ; il faut
absolument arriver à trouver des dé-
bouchés chez les voisins, Les voisins
se défendent par des tarifs douaniers.
Alors, il reste deux ressources : la pre-
mière consiste à se constituer une
clientèle au loin, dans les colonies ; la
seconde serait d'imposer aux peuples
dont on craint la concurrence écono-
mique des traités de commerce léo-
nins — fût-ce à coups de canon.
Les peuples où l'impérialisme est en
vogue se signalent donc tous par les
mêmes tendances : augmentation des
forces militaires, politique de conquête
coloniale, restriction du libre-échange.
En obéissant à cette impulsion, les
Etats-Unis ont été amenés à prendre
une attitude belliqueuse, sous prétexte
de maintenir intacte la doctrine de
Monroë, et à faire la guerre à l'Espa-
gne. De même, l'Angleterre s'est lan-
cée dans l'aventure du Transvaal. De
même encore, nos nationalistes ont es-
sayé de nous entraîner dans une po-
litique de coups d'épingle à l'égard des
grandes nations européennes.
Rien de plus dangereux, rien de
plus haïssable que l'impérialisme. Son
action est entièrement contraire à celle
de la démocratie internationale. Son
triomphe serait celui d'une ère de bar-
barie, d'une tyrannie sanglante, et
d'une ruine générale.
Le succès d'une si abominable doc-
trine, paraissait, il y a quelques années,
à la veille d'être assuré, pour une pé-
riode d'années qu'il était impossible de
préciser.
***
Heureusement, l'opinion fait partout
un retour sur elle-même. Le cas de
M. Chamberlain, forcé d'abandonner
le pouvoir, pour ne pas exaspérer la
révolte du peuple anglais, est signi-
ficatif.
Le recul du mélinisme et l'effondre-
ment du nationalisme en France sont
rassurants, dans le même ordre
d'idées. Et nous constaterons, pour
finir, l'échec de l'impérialisme, dans
un pays où il n'aurait jamais dû faire
son apparition : l'Espagne.
M. Silvela, l'ancien président du
conseil, confesse, dans une récente
interview, la déroute de sa politique.
« Je voulais, dit-il, avoir une poli-
tique extérieure ; la situation de l'Es-
pagne au Maroc devait, dans mon es-
prit, nous permettre de nous placer
en face des puissances, avec un pro-
gramme de politique mondiale. Mais
je dois renoncer à mes espérances,
elles ne sont pas populaires et n'ont
pas les sympathies de l'opinion. »
Et M. Silvela « se résigne ». C'est
ce qu'il a de mieux à faire L'Espagne
a déjà assez payé pour les fautes de ses
gouvernants. Se ruiner en armements
sur terre et sur mer ? Heurter les inté-
rêts des peuples qui ont des intérêts
en Afrique ? Pourquoi se préparerait-
elle tant de peines et tant de dangers ?
Elle arriverait simplement à exagérer
ses embarras d'argent.
Qu'elle reconstitue ses finances,
qu'elle mette en valeur son propre
sol, dont la stérilité est apparente,
qu'elle ait une industrie, un com-
perce, qu elle chasse ses moines,
qu'elle opère des réformes démocrati-
ques.
Ce programme est celui du peuple
JSpagnol, servi par un instinct très
ter des besoins nationaux.
La banqueroute de l'impérialisme
s'annonce générale, parce qu'il a par-
tout le peuple contre lui. ; ;'
," HuguesDestrexn.
EL MOUNGAR
On possède maintenant le
rapport officiel sur le combat:
d'El Moungar. :
Le premier sentiment qu'il
impose, c'est un sentiment de
respect et d'admiration pour
nos combattants, pour leur bravoure, pour :
leur endurance, pour leur sang-froid au
milieu dçs circonstances les plus terribles,
et alors qu'ils pouvaient se croire tous
perdus.
On a pensé d'abord que le malheureux
capitaine commandant la troupe héroïque
avait pû se laisser surprendre; on s'en
montrait frappé, d'autant plus que la sur-
prise se serait produite sur le lieu même où
un combat de même nature avait eu lieu en
juillet 1900, car ceci est le second combat
d'El Moungar. Eh bien, il n'en est rien : le
peloton attaqué était gardé normalement,
et de la seule façon dont un si faible effectif
pouvait être gardé, par de petites patrouil-
les de goumiers ; et ce sont ces patrouilles
d'éclaireurs qui, attaquées, ont, en se re-
pliant, donné au gros du peloton le temps
de prendre les armes et de se mettre en
défense. Donc, aucun reproche, nous sem-
ble-t-il, ne peut atteindre les malheureux
officiers victimes de l'embuscade d'El
Moungar.
D'autre part, nou9 voyons, comme nous
l'avions pensé : que « les premiers magh-
zenis du capitaine Susbielle, avertis pai
nos cavaliers dès le début de l'action ))
n'ont pu, quelque diligence qu'ils aient
faite, entrer en ligne qu'à cinq heures
trente de l'après-midi. On se battait depuis
neuf heures quarante minutes du matin et
le feu avait cessé depuis une demi-heure,
l'ennemi s'étant éloigné avec le butin.
Donc, le peloton qui a glorieusement suc-
combé à El Moungar, a été détruit parce
qu'il était trop faible d'effectif et trop éloi-
gné des autres pelotons.
Il suit de là : 1° que dans les régions du
Sud Oranais, il faudra désormais, lors-
qu'un chef d'expédition sera obligé de
fractionner sa troupe,qu'il procède par éche-
lons plus importants, d'effectifs plus rap-
prochés les uns des autres. C'est ce que
nous avons dit dès la première dépêche.
L'AFFAIRE DU COMMANDANT PEPROT
Epernay, 21 septembre.
Le commandant Perrot,du 31' dragons, vient
d'être mis en réforme après avis du conseil
d'enquête. On se souvient que cet officiel' avait
été dernièrement condamné à 1 franc d'amende
par le conseil de guerre de Châlons pour avoir
par lettre anonyme, dont, à l'audience, il
s'était reconnu l'auteur, adressé des menaces
de mort au général Percin, chef du cabinet du
ministre de la guerre.
L'automobile colonial allemand
(De notre correspondant particulier)
Zanzibar, 21 septembre.
Le gouverneur de la colonie allemande de
l'Afrique orientale a ouvert un concours pour
la construction d'un automobile colonial des-
tiné à remplacer le service des porteurs. Cha-
que véhicule doit pouvoir transporter une
charge de 500 kilogrammes. Le moteur devra
être exclusivement à pétrole ou à alcool, les
.messageries ayant refusé d'importer de la ben-
zine dans la colonie.
Les constructeurs ou inventeurs doivent pré-
senter leurs modèles avant le 1er avril 1905.
LA GENDARMERIE PONTIFICALE
IDe notre correspondant particuUeri
Rome, 21 septembre.
M. Nicolas TagUaferri, commandant de la
gendarmerie pontificale, a donné sa démission,
en alléguant des raisons de santé. En réalité,
il quitte son poste, parce qu'il lui était impos-
sible de lutter contre l'esprit d'indiscipline qui
a envahi la troupe. Quand il infligeait une pu-
nition, le subalterne qui en était atteint, s'a-
dressait à la presse catholique. Il est fort pro--
bable que Pie X fera réorganiser radicalement
la gendarmerie du Vatisan et qu'il placera à
la tête de ce corps un fonctionnaire de la police
italienne, actuellement en service.
LES GRANDES MANŒUVRES AU TRANSVAAL
(De notre correspondant particulier)
Capetown, 21 septembre.
Les grandes manœuvres qui ont eu pour
théâtre les environs de Klip River viennent de
se terminer par une revue à laquelle 15.000
hommes ont participé.
Pendant le défilé on a pu remarquer que la
cavalerie laisse toujours à désirer.
Beaucoup de Boers, anciens combattants de
la dernière guerre, ont suivi les manœuvres
avec attention et ont assisté à la revue.
00
COMPLOT CONTRE DES SOUVERAINES
(De notre correspondant particulier)
Copenhague, 21 septembre.
La police secrète a été avertie que plusieurs
anarchistes sont en route pour Copenhague où
la reine d'Angleterre, l'impératrice douairière
de Russie et la reine Marguerite doivent se ren-
contrer.
Les autorités bien qua sceptiques. au sujet
de ce complot ont pris des mesures spéciales
pour surveiller les abords de la capitale.
Le rapport qui a signalé le prétendu com-
plot, est, paraît-il, l'œuvre d'un ancien fonc-
tionnaire de la police russe, très connu à Pa-
ris et tombé en disgrâce à la suite d'un inci-
dent qui s'était produit à Compiègne.
— »
UNE VRAIE CHANCE !
, La Roche-sur-Yon, 21 septembre.
L express 106 de Bordeaux à Nantes arrivait
près de la station de Bellevue-sur-Vic, à une
vitesse de 70 kilomètres, quand le mécanicien,
nommé Letroadec, tomba de la machine. Le
chauffeur, sans perdre de temps, arrêta le
train, craignant de trouver son compagnon
mort.
Il fut stupéfait de le voir au loin, qui courait
dans la direction du convoi et n'ayant aucune
blessure. Letroadec remonta sur la machine et
poursuivit sa route sur Nantes.
LE CONFLIT
JUSTRO-HONGROIS
Crise ministérielle en Hongrie. -
L'augmentation du contingent mili-
taire. — Tentatives de corruption
parlementaire. — L'introduction
de la langue hongroise dans les
régiments magyars. - Les
résistances de François-Jo-
seph. — Luttes intestines.
— L'étude de M. Paul
Wiriath.- La solution
qu'il propose. - Som-. -; ,
bres perspectives.
H y aura trois mois, à la fin de septembre,
qu'une crise ministérielle a éclaté en Hongrie,
et il n'est pas probable qu'à ce moment, elle
soit près d'être résolue. C'est qu'il s'agit, cette
fois, non pas d'un conflit entre la Chambre
hongroise et un ministère quelconque, mais
bien plutôt d'un véritable désaccord entre les
députés magyars et l'empereur François-Joseph,
qui trouvant sans doute que ses sujets ne suppor-
tent pas des charges militaires assez lourdes,
et qui est fort préoccupé de l'avenir dans les
,Balkans, a jugé qu'il devenait nécessaire de
mettre sur pied des forces en nombre suffisant
pour une péréquation avec les autres armées
de l'échiquier, l'armée russe et l'armée ita-
lienne, l'armée turque et l'armée bulgare, et il
a fait présenter aux Chambres autrichienne et
hongroise un projet d'augmentation du con-
tingent : la Chambre hongroise a refusé de vo-
ter le projet, et c'est à la suite de ce vote que
le cabinet do Szell a dû démissionner, à la fin
de juin.
La Chambre autrichienne, au contraire, a
voté le contingent augmenté de 103 à 125,000
hommes pour la ligne et de 10,000 à 14,500
pour la réserve — mais — et ceci aggrave
encore le conflit - une clause, introduite par
le député Chiari, empêche qu'on appelle les
conscrits -pour la ligne avant que le contingent
soit voté en Hongrie: dans ces conditions on
comprend que l'empereur ne se soit pas laissé
décourager par le vote de la Chambre hon-
groise et qu'il ait décidé de revenir à la charge
avec un autre ministre, un ministre à poigne,
le comte Khuen Hedervary (celui-ci s'était fait
remarquer, comme ban de Croatie, par l'en-
train qu'il mettait à faire fusiller - paysans
indigènes). Le choix n'était pas du plus heu-
reux : on ne mène pas un Parlement comme
on mène, avec des soldats, des populations
sans armes et sans défense : le comte Khuen,
ne pouvant emprisonner et bannir les mem-
bres de l'opposition, et ne sachant comment
venir à bout de leurs tentatives d'obstruction,
essaya d'un moyen qui, pour avoir le mérite
de la nouveauté, n'en était pas meilleur : il
tenta d'acheter leur adhésion à la politique mi-
nistérielle, ou du moins leur abstention et ce
fut son ami personnel, le comte Spazary, gou-
verneur de Fiume, qui se chargea de cette
opération plutôt délicate : mais les membres
de l'opposition — et ceci leur fait honneur —
repoussèrent très dignement l'offre qui leur
était faite, et ils dénoncèrent à la tribune les
tentât! (ma de corruption dont ils avaient été
l'objet; le comte Khuen. nia bien toute com-
plicité dans cette triste affaire ; il affirma que
le comte Spazary avait agi de sa propre ini-
tiative, mais ses déclarations ne trouvèrent
que peu de créance auprès des parlementaires
et du public hongrois, et le 10 août, voyant
que sa situation était définitivement compro-
mise, il remettait la démission de son minis-
tère à François-Joseph.
Depuis l'empereur est venu à Budapest où
il est resté près de quinze jours, et où il a
très consciencieusement interrogé toutes les
personnalités influentes du monde parlemen-
taire ; mais il a dû repartir pour assister aux
manœuvres et pour recevoir Guillaumo II sans
avoir pu arriver à constituer un nouveau ca-
l'inet, sans avoir même trouvé le futur prési-
dent du conseil. Il ne reviendra certainement
pas à Budapest avant la fin de septembre, en
admettant qu'à ce moment il puisse enfin for-
mer un ministère, la Hongrie sera bien restée
trois mois sans gouvernement, si du moins
l'on fait abstraction des 45 jours qu'a vécu le
cabinet Khuen Hedervary.
Les revendications des Magyars
Cette situation est très anormale et elle dé-
note une crise très grave, aussi bien dans la
politique intérieure de la Hongrie, que dans
-les relations respectives de l'Autriche et de la
Hongrie.
Ce conflit, d'ailleurs, ne date pas d'hier ;
mais l'empereur-roi avait réussi jusqu'à au-
jourd'hui , par certaines concessions de peu
d'importance et surtout par de belles paroles
et des promesses jamais tenues, à endormir le
patriotisme hongrois.
Cette fois, la vieille tactique n'a aucune
chance de succès : le parti Kossuth ou parti de
l'indépendance a rallié à lui tous les mécon-
tents ; le parti national qui a pour chef le
comte Apponyi s'est peu à peu rapproché du
parti libéral nu point de ne plus former qu'un
grand parti avec lequel tout gouvernement
devra compter ; d'ailleurs les membres de ce
parti, même les plus modérés, sont unanimes
à reconnaître qu'il faut donner satisfaction à
l'esprit d'indépendance du peuple hongrois.
Enfin, la chute scandaleuse du cabinet Khuen-
Hedervary a excité encore davantage l'ardeur
belliqueuse du parti Kossuth et l'a encouragé
à accentuer ses prétentions. En ce qui con-
cerne la question militaire, les revendications
hongroises visent principalement ces 3 points :
1. Introduction du hongrois comme langue
de commandement en Hongrois ; 2. Emploi du
hongrois dans les débats des conseils de
guerre ; 3. Réformes des écoles militaires hon-
groises.
L'armée austro-hongroise
L'empereur François-Joseph est assez décidé
:à faire de larges concessions sur le dernier de
:ces trois points, c'est-à-dire à réformer l'orga-
nisation des écoles militaires de la Hongrie ;
mais sur les deux premiers points, c'est à-dire
sur l'introduction de la langue hongroise
dans les débats des conseils de guerre, et sur-
tout sur l'emploi du hongrois comme langue
de commandement en Hongrie, il ne veut pas
céder, et cela se comprend, car cette réforme
aboutit en réalité à la séparation de l'armée
hongroise et de l'armée autrichienne. L'armée
commune est aujourd'hui recrutée par le ser-
vice personnel obligatoire : trois ans de l'ac-
tive, sept ans dans la réserve, deux dans la
Iandwehr. Les conscrits allemands et magyars,
tchèques et italiens, etc., sont confondus
dans les mêmes régiments. L'effectif de 336.000
hommes et de 26.000 officiers est réparti dans
quinze corps d'armée de pareil amalgame :
trois dans les provinces autrichiennes, pro-
prement dites, deux dans la Bohême, deux
dans la Galicie polonaise, quatre dans les
provinces magyares, un en Croatie, un en
Transylvanie, un dans le Tyrol, ie dernier
enfin, dans la Bosnie-Herzégovine. Tous ces
corps ont les mêmes règlements, les mêmes
unités de commandement : au sommet, l'em-
pereur, assisté du ministre de la guerre, du
chef d'état-major général et de trois inspec-
teurs d'armée. Enfin, ils ont l'unité de lan-
gage ; dans toute l'armée, c'est l'allemand qui
est la langue du commandement.
L'introduction du hongrois dans les régi-
raents magyars couperait forcément l'armée en
deux, et, comme l'armée Commune constitue
l'Unique trafit d'union du dualisme actuel, en-
tre la Cisleithanie et la Transleithanie, il est
évident que l'adoption de cette réforme si ar-
demment désirée et si vivement réclamée par
le parti de l'indépendance, aboutirait à bref
délai au divorce complet et définitif de la
Hongrie et de l'Autriche. Ce n'est pas sans
doute le but immédiat, que poursuivent Kos-
suth et ses amis : ils invoquent au contraire
Tart. 42 du Compromis de 1867 qui donne à
l'empereur le pouvoir de régler tout ce qui a
trait à l'organisation de l'armée. c'est-à-dire,
disent-ils, le droit d'organiser séparément une
armée autrichienne et une armée hongroise. Il
n'en est pas moins vrai que le jour où
les deux pays s'auront plus ce dernier lien
que constitue entre elles l'armée commune,
leur maintien sous le même sceptre sera bien
difficile, le compromis aura probablement
vécu.
La résistance de François-Joseph aux reven-
dications magyares s'explique donc très bien ,
il est possible cependant que les Hongrois en
viennent à bout, car il faudra bien mettre un
terme à une situation qui s'aggrave tous les
jours ; la Chambre des députés de Budapest
ayant refusé d'approuver l'appel du contingent
le ministre de la guerre, à défaut des recrues
a dû retenir sous les drapeaux, en Autriche et
en Hongrie, la classe qui vient d'achever ses
trois ans : cette mesure a provoqué de très vifs
mécontentements, et dans plusieurs villes, de
graves désordres sç sont produits : cette solu-
tion ne peut donc être que provisoire, et il fau-
dra bien, d'ici peu, réunir de nouveau la
Chambre hongroise pour qu'elle règle la ques-
tion du contingent ; s'il veut désarrner, alors
les partisans de Kossuth, l'empereur devra
très probablement faire de grandes conces-
sions.
L'anarchie dans l'empire austro-hon-
grois.
Elles ne rétabliront pas d'ailleurs la paix au
sein de l'Empire : en réalité l'anarchie la plus
grande règne dans tout le pays : les diverses
populations qui l'occupent se traitent en en-
nemies, et c'est à l'étranger, dans les pays de
nationalité semblable qu'elles cherchent des
amitiés et des appuis ; comme le montre très
nettement M. Paul Wiriath dans sa récente
étude « La Question d'Autriche-Hongrie » pu-
bliée par les Pages Libres, la crise que traverse
l'Autriche-Hongrie vient de ce qu'après avoir
poursuivi durant des siècles la chimère de
l'empire universel, sa maison régnante s'est
ensuite attachée à réaliser à l'intérieur de son
empire un impossible centralisme : avec l'appui
de l'Eglise, de l'armée, dé l'idée dynastique,
elle s'est obstinée à perpétuer le défi jeté par
Metternich à la Révolution vaincue, et à conti-
nuer cette politique insensée qui consistait à
nier la liberté constitutionnelle et les droits de
nationalités dans le pays où des antagonismes
multiples rendaient plus nécessaire que nulle
part ailleurs cette double aspiration : de là les
crises continuelles, et les luttes intestines qui
deviennent tous les jours plus violentes, et qui
aboutiront fatalement, à une date plus ou
moins rapprochée à la séparation des diverses
natluiiaittdrj Tjui forment l'Aatriâho Il..:> nsn(t.
Les pessimistes prévoient déjà qu'à la mort de
François-Joseph — (l'héritier du trône est très
impopulaire en Hongrie, et il ne fait rien pour
s'attirer les sympathies des Magyars) — le
pacte sera dénoncé et que les nationalités abdi-
queront entre les mains des grandes nations
auxquelles leur origine les rattache.
La solution fédéraliste
M. Paul Wiriath, sans être optimiste, estime
cependant que l'unité de ce grand pays pour-
rait être préservée d'un prochain démembre-
ment, par la misé en pratique du système fédé-
raliste qui apaiserait définitivement les rivali-
tés de nationalités, puisqu'il accorderait à cha-
cune le maximum d'indépendance et de liberté
mais qui laisserait cependant subsister entre
elles un lien assez étroit pour qu'au point de
vue extérieur elles ne forment comme aujour-
d'hui qu'un seul Etat.
La solution proposée par M. Wiriath, et
avant lui par quelques fédéralistes convaincus,
paraît à première vue convenir parfaitement
à la situation ; mais il me semble, en y réflé-
chissant, qu'elle ne serait que difficilement
réalisable. En effet, comme nous le disions
plus haut, les habitants de ce pays, Allemands,
Slaves, Tchèques de Bohème, Roumains, Polo-
nais, en majorité du moins, préfèrent se rap-
procher des populations de leur nationalité
que chercher à réaliser en Autriche-Hongrie
une combinaison politique durable, à organi-
ser un régime de paix intérieure. La crise mi-
nistérielle de Hongrie montre suffisamment
que les Magyars ne sont pas disposés à désar-
mer, et qu'ils continueront demain avec plus
de violence encore que par le passé, leur cam-
pagne d'obstruction systématique. jusqu'au
jour où la séparation sera un fait accompli.
FRANÇOIS VIEL.
Voiz- à la a .page
les Dernières Dépôohoa
La laïcisation des « Quinze-vingts »
Nous avons annoncé que le directeur de
l'hospice des Quinze-Vingts avait été invité a
procéder à la laïcisation de cet établissement
par dépêche ministérielle en date du 15 sep-
tembre. A ce sujet la Lanterne ajoutait :
Par ordre du directeur, qui espère, comme il y
a vingt ans, passer outre à ce second décret de laï-
cisation, cette décision ministérielle devait bien
inutilement être tenue secrète. Parmi les établis-
sements nationaux de bienfaisance, il ne restait
plus que celui-là à faire rentrer sous la loi com-
mune. Voilà qui va être fait, malgré l'opposition
sournoise des bureaux — sur laquelle nous revien-
drons.
Notre confrère oublie l'Institution nationale
des sourdes-muettes de Bordeaux, qui, elle
aussi, se trouve en possession de cornettes.
Nous exprimons l'espoir que le président du
conseil ne les oubliera pas et qu'à bref délai
nous apprendrons, qu'elles aussi, vont faire
place nette.
Nous sommes persuadé que notre excellent
confrère réparera son cubli et se joindra à
nous pour demander à M. Combes de complé-
ter son œuvre.
UN PÈLERINAGE HONGROIS A CONSTANTINOPLE
(De notre correspondant particulier)
Budapest, 21 septembre.
Le 10 octobre partira pour Constantinople
un pèlerinage de plusieurs milliers de Hon-
grois de toutes les couches de la Société et de
tous les cultes pour visiter la tombe du prince
Rakoczy.
Le prince Rakoczy était le chef de la guerre
d'indépendance de la Hongrie en 1702 et avait
comme allié Louis XIV, roi de France. En
1713, il est parti en exil et s'est fixé à Cons-
tantinople où il est mort. Il a légué son cœur
à la France. Ce sont les lazaristes français à
Constantinople qui le gardent dans une urne.
Le comité des pèlerins fera des démarches
pour obtenir l'autorisation de transférer en
Hongrie la dépouille mortelle de Rakoczy.
L'INSURRECTION
'";-' EM MACÉDOINE
Un combat à Melnik
Sofia, 21 septembre (source anglaise)
Une dépêche de Rilo dit que des fugitifs ve-
nant de Djumaia annoncent qu'un sérieux en-
gagement a eu lieu dans les montagnes Perim,
près de Melnik.
Les Turcs auraient perdu 500 tués dont deux
colonels.
La plupart des villages du district de Melnik
sont aux mains des insurgés. Beaucoup sont
en flammes.
Deux régiments avec de l'artillerie et uft fca-
taiilon d'Albanais ont quitté Djumaia Mur
Melnik, où une forte colonne turque serait
entourée. -
Nouvelles de source turque
L'ambassade ottomane communique la dépêche
suivante :
Constantinople, le 21 septembre.
Les notables Grecs de Neveska ont remercié
Hilmi pacha pour les dispositions adoptées par
les autorités civiles et militaires lors de l'ap-
parition des révolutionnaires bulgares dans
cette localité, Un grand nombre de ces der-
niers, qui avaient été arrôtés et déférés à la
justice, viennent d'être condamnés à différeo-
tes peine.
La discipline des Albanais
Salonique. 21 septembre.
Jeudi dernier un gendarme chrétien, de
Vuchtrin, ayant adressé des observations à des
réservistes albanais qui causaient du scandale,
fut frappé par eux et eut les oreilles coupées.
Les autres gendarmes chrétiens se réfugièrent
.au consulit de Russie, à Mitrovitza.
Le vali d'Uskub se rendit à Mitrovitza par
train spécial, et le bataillon en garnison à Vuch-
trin, fut envoyé à Calcandelene.
On se rappelle que c'est déjà un incident
causé par un gendarme chrétien de Vuchtrin,
qui avait motivé une attaque de Mitrovitza par
des Albanais, qui eut pour suite le meurtre du
consul Cbtchérbina.
La Bulgarie et la Porte
Londres, 21 septembre.
On mande de Constantinople au Standard,
dont nous reproduisons la dépêche sous tou-
tes réserves :
D'après des informations de source sûre, la Bul-
garie déclarera la guerre ou se révoltera contre
son prince, qui est presque seul, maintenant, à
tenter d'endiguer le sentiment populaire. On
songe à établir un camp fortifié de 180,000 hom
mes ; les ingénieurs bulgares sont aidés par 6 of-
ficiers volontaires russes.
D'autre part, le correspondant du Daily
Tele.grapib à Constantinople se dit en mesure
d'affirmer que le sultan est tellement résolu à
éviter la guerre, qu'en apprenant que la
France était disposée à faire une démonstra-
tion navale, il fit rédiger un décret défendant
le massacre dans trois vilayets d'Europe et ac-
cordant aux populations chrétiennes des droits
plus étendus que ceux demandés par les in-
surgés. Toutefois, quand la nouvelle de la dé-
monstration française fut démentie, le décret
fut annulé.
Une seconde fois, le décret fut préparé quand
on annonça la mobilisation bulgare, et annulé
de nouveau lorsque le commissaire turc à Sofia
eut télégraphié que la mesure prise par la
Bulgarie ne constituait pas une mobilisation
Sofia, 21 septembre. (Source anglaise).
Le gouvernement continue ses préparatifs
militaires. A l'heure actuelle, 200.000 hommes
pourraient être concentrés sur la frontière en
huit jours.
Contrairement à ce qu'on raconte, les muni-
tions sont abondantes.
Les journaux anglais
Le correspundant du Times à Constantinople,
examinant les chances de succès de la Bulgarie
dans le cas très probable, croit-il, où elle se
verrait forcée d'aller au secours de ses conci-
toyens de Macédoine, dit qu'à tous les points
de vue, l'armée bulgare est considèrée comme
une des meilleures d'Europe, tandis que l'ar-
mée turque est mal organisée et a peu d'offi-
ciers instruits. Les officiers turcs reçoivent les
ordres du Palais par-dessus la tête du com
mandant responsable ; il leur serait très dif-
ficile d'assurer leurs communications, tout le
pays situé sur le littoral de la frontière étant
déjà en rébellion ouverte.
D'autre part la Bulgarie aurait un solide
appui dans les insurgés et il serait très diffi-
cile au gouvernement serbe de ne pas se join-
dre à ses voisins, car les Serbes réclament une
grande partie de la Macédoine comme ap-
partenant à la race serbe.
Plusieurs bandes serbes ont déjà fran-
chi la frontière et combattent en Macé-
doine.
Quant à la Grèce, à en juger par son atti-
tude présente, elle attendrait, pour se pronon-
cer, de voir de quel côté se dessine l'avantage;
mais la Turquie, ne pouvant se fier à la
neutralité, devrait faire surveiller sa fron-
tière.
Il est à peu près certain, conclut le corres-
pondant du Times, qu'en fin de compte les
Turcs seraient vainqueurs ; mais la Bulgarie
lutterait assez longtemps pour obliger les puis
sances à accorder à la Macédoine une admi-
nistration convenable.
L'Allemagne et la Turquie
Vienne, 21 septembre.
Le Neues Wiener Tageblatt publie une in-
terview qu'il aurait eu avec M. de Bülow.
L'homme d'Etat allemand a déclaré que la po-
litique orientale de l'Allemagne ne poursuit
pas de buts spéciaux.
L'Allemagne poursuit, at dit M. de Biilow,
une politique réellement pacifique. Elle ne
songe nullement à encourager la Turquie à la
résistance à l'égard de la politique des autres
puissances notamment à l'égard de l'Autricht-
Hongrie et la Rus3ie. L'Allemagne a appuyé et
appuiera volontiers et pleinement toutes lAs
démarches et les mesures sur lesquelles l'Au-
triche-Hongrie et la Russie sont tombées d'ac-
cord dans le but d'améliorer la situation des
Balkans.
M. de Bülow a conclu en exprimant l'espoir
que les observations énergiques faites par les
puissances ainsi que la conscience qu'en cas de
conflit les intéressés n'auraient pas beaucoup
à gagner, empêcheront une explosion. En tout
cas, des efforts seront faits pour localiser le
conflit.
Une réunion arménophile
Le comité arménophile français organise
pour le 25 octobre, à Paris, une réunion à la-
quelle il convoque les arménophiles français
et anglais, dans le but de rechercher la solu-
tion, la la plus prompte et la meilleure possi-
ble, de la crise qui sévit actuellement en
Macédoine et en Arménie.
L'adhésion de l'Association anglo-américain
est d'ores et déjà assurée.
IVoir la suite dans notre DEUXIEME EDlTIONJ
FANTAISIE BIZARRE
Mont Saint-Michel, 21 septembre.
M. James Bartlctt, sujet anglais, vient de se
payer une fantaisie bizarre. Ce gentleman s'est
1
fait enfermer depuis 8 h, du soir jusqu'à 6
heures du matin dans un des cachots du Mont
Saint-Michel, afin de se rendre compte des im-
pressions que ressent un prisonnier.
Il est sorti enchanté de sa nuit. Avouez qu'il,
n'est pas difficile.
..---..
LE DEVOIR RÉPUBLICAIN
Les « maristes 8 possèdent à RioÏn,sous-pré
fectare du Puy-de-Dôme, un important col-
lège C'est tàque se sont formés tous les chefs,
locaux du parti réactionnaire, c'est là que set
préparent les. élections. La congrégation,
n ayant pas demandé l'autorisation pour ce&
établissement, reçut l'ordre de se disperser -kt,'
l'échéance des délais prévus pour'l'application
de la loi de 1901. M. Combes avait compta
sans ses h. Conseillés par Ia. quasi-una-
nimité des avocats à la cour d'appel de Riomt
les « pères » résolurent d'essayer de tous les
moyens dilatoires. Ils protestèrent, déclarant
que dès 1881, ils avaient rompu avec leur con-
grégation dont le siège est à Lyon et s'étaient
sécularisés. Une longue et minutieuse enquêta,
dont nous avons entretenu nos lecteurs en
avril dernier, fut conduite par M. Roux, le
juge d'instruction d'alors, et les « maristes »
renvoyés devant le tribunal correctionnel. Ils-
firent opposition. La chambre des mises en
accusation vient de confirmer l'ordonnance de'
renvoi.
Nous croyons savoir que devant les tribu-
naux, les « pères » vont faire défaut, puis op-
position au premier jugea, nt et appel du se-
cond. Ils recommenceront alors la même pro-
cédure qui se dénouera devant la cour de cas-
sation. Ils espèrent ainsi pouvoir tenir en échec"
le gouvernement et l'opinion pendant dix-huit\
mois au moins. Après, s'il le faut, ils oppose-
ront une-résistance brutale.
Voilà un exemple saisissant de la façon dont
les cléricaux tournent la loi et discutent avec
elle. Ce n'est pas un cas isolé, presque partout,
dans le département, quand eut lieu la signifi-
cation des décrets de fermeture, les moines
s'empressèrent de revêtir la redingote et 4Ia
faire une déclaration d'ouverture d'école. It
n'est pas de village où ne se rencontre commue
instituteur libre un individu à figure mauvaise,
à regard fuyant, à épaules tombantes, à poi.,
trine rentrée, sous le complet noir duquel oit
devine le scapulaire et la crasse, conventuelle.
Nombre de sœurs aussi, ces vierges naïves»'
ces victimes expiatoires que s'est offert le see-
tarisme républicain, ont rusé de même manièrf
En présence de cette révolte, l'administration a
généralement fait son devoir bien qu'elle ail
eu d'impardonnables faiblesses en autorisant
par exemple les sœurs de « Notre Dame des
Arts » à enseigner un an encore dans leur éta-
blissement de Riom On ne-saurait faire pareil
éloge de la magistrature. Elle s'est refusée à
sévir contre ceux qui violaient ainsi la loi.
Pour eux, c'était tantôt un acquittement, tantôt
une mince amende avec application de la lot
de sursis.
Tout le monde réactionnaire du département
en fit des gorges chaudes. Encouragé par cette
excessive mansuétude, il a repris la lutte plus
cyniquement que jamais.
A Ménétrol, à Pontgibault, dans toutes les
tommniiM nafin d'où elles étaient parties, les'
sœurs ont à nouveau fait leur apparition. III
est à supposer qu'elles ne sont pas rentrées au
nid pour humer une dernière fois l'air du
pays et emporter dans un exil définitif un
souvenir attendri et douloureux des lieux ott
s'exerça leur zèle apostolique.
La bataille que les cléricaux nous offrent ne
nous étonne ni ne nous émeut. Nous ne nous
attendions pas à ce que l'Eglise abandonnât
sans.résistance les privilèges dont elle jouit
abusivement depuis des siècles. Nous sommes
certains que la libre-pensée qui a su ébranler-
la masse formidable du cléricalisme, peut lui
donner la définitive poussée. Ce qui nous ef-
fraye c'est que le gouvernement en qui nous
avons mis notre confiance et qui pourrait,
soutenu comme il l'ôst par le bloc républicain,
nous conduire à la victoire, hésite à comman-.
der l'assaut. Qu'il renonce à son sabre de boMT
pour solutionner une question qui en s'éter-
nisant finit par devenir dangereuse pour le
parti républicain. En consacrant toute not"e
énergie à batailler contre la cléricaille, nous;
négligeons d'urgents intérêts économiques que
nos adversaires- tentent jésuitiquement de
tourner contre nous. Il faut en finir : Si la-i
prochains année législative ne nous donne pas
la séparation des Eglises et de l'Etat ainsi que'
le monopole universitaire nous penserons que;
le gouvernement a forfait. — Maurice Juncker.
LE RÉSERVISTE JAY
- Y
C'est par erreur qu'on avait annoncé que la
punition du réserviste Jay — qui avait refusé
de prendre un fusil — avait été levée. Elle
avait été simplement réduite de 60 à 30 jours,
et le réserviste dont il s'agit, au lieu d'avoir
été libéré samedi en même temps que ses ca
marades, est resté pour faire ce temps à là
prison de la caserne d'Hauteroche.
—————————————
ACADÉMIE DES SCIENCES
La culture des orchidées
Les amateurs d'orchidées savent combien il
est difficile de les cultiver dans les serres et
les jardins.
Il en est ainsi parce que pour prospérer les
orchidées ont besoin de contracter une asso-
ciation avec certains champignons. Or, dans
la terre dont disposent les jardiniers, les
champignons propices manquent le plus sou-
vent.
Grâce à un savant botaniste. M. Noël Ber-
nard, dont M. le professeur Gaston Bonnier a:
présenté, hier, un curieux travail, cet état da
choses pourrait fort bien changer avant long-
temps. M. Bernard, en effet, est arrivé à culti-
ver les espèces de champignons convenant aux
espèces d'orchidées qu'il désire voir prospé-
rer. Le résultat de ces expériences est que l'on
peut espérer dorénavant réunir aisément la
culture de ces admirables plantes aujourd'hui
encore rares et coûteuses.
Les greffes américaines
On sait que depuis l'apparition du phylloxéra
et en vue de lutter contre ses ravages, l'on
greffe les plants de vignes françaises avec des
greffes provenant de ceps américains.
Quelle peut être l'influence de ces greffes sur
l'avenir de nos vignobles ?
A cette question posée depuis déjà long-
temps, M. le professeur Gaston Bonnier a ap-
porté, hier, au nom de M. Jurie, une réponse
intéressante.
Des recherches de cet éminent viticulteur, il
résulte, en effet, que les greffons exercent de
façon indéniable une action sur les ceps qui
les reçoivent.
La conséquence pratique de ces remarques
est qu'il convient de se méfier des greffes amé-
ricaines. Avec elles, l'on a bien des plants ro-
bustes vis à-vis du phylloxéra, mais l'on ris-
que aussi de voir disparaître ces qualités par-
ticulières d'arome et de bouquet qui ont fait
justement à nos grands vins de Bordeaux et
de Bourgogne leur universelle renommée.
La dernière tempête
La tempête de la semaine passée a eu soa
petit écho hier à l'Académie.
--
ANNONCES •k v' ^-
AUX-BUREAUX DU JOURNAL
14, roe du Mail, Paris. <.
St chez MM. IiAGRANGB, CERF t\
Adresse Télégraphique : XIX' SIÈCLI- PA81.
ABONNEMENTS
Pairs. Trais mais 6 f. six mois 11 t. usa ml'.,
Départements — 7 f. — 12 f. — 24 f.
Union Postale — 9 r. — 16 f. - 321,
Lei Abonnements sont reçus sant frai
dans tous les Bureaux de Poste
RED ACTION s * 4, rue do MaU, Pariai
lit., A 8 heures du totr et de 10 heures du sovr à 1 heure du matin
rqo 122413. — Mercredi 23 Septembre 1903
5* JOUR COMPLEMENTAIRE AK 111
ADMINISTRATION ; 14, rue du Uatl ¡;,..,-- 1
Adresser lettres et mandats » l'i i m ûstraieur -
NOS LEADERS
UCini
Disons, en style d'affiche électorale :
pas d'équivoque ! Ce n'est pas du Bo-
napartisme que nous voulons parler.
Le Bonapartisme est enterré depuis si
longtemps, que le vocable d' «impé-
rialisme». qui servait autrefois à le
désigner a maintenant un autre usage.
L'Impérialisme — au sens maintenant
le plus général du mot — c'est pro-
prement, comme tou* le savez, du
reste, la doctrine qui donne à chaque
nation la mission de devenir toujours
« plus grande ». La plus grande An-
gleterre, c'est le programme des impé-
rialistes anglais, que nos nationalistes
plagient quand ils nous parlent de la
« plus grande France».
Avec les allures de nouveauté qu'elle
se donne, la doctrine dont il s'agit re-
présente une très vieille erreur. Il n'y
a pas de peuple, si vigoureux qu'il fut,
qui n'ait trouvé, à un moment donné,
la limite de son expansion. Ni les
Perses, avec leurs Darius et leurs
Cyrus, ni les Grecs, avec leur
Alexandre, ni les Romains avec leurs
Césars, ni, pour rentrer dans l'his-
toire contemporaine, la France avec
ses Napoléons, n'ont pu tenir la ga-
geure. d'augmenter sans cesse leurs
possessions, leurs armées et leurs res-
sources.
***
Je sais bien que l'impérialisme a ceci
de neuf, qu'il prétend répondre à des
besoins économiques modernes. En
Angleterre, en Amérique, en Allema-
gne, en France, l'industrie fournit ses
produits avec une abondance crois-
sante. Aucune nation ne peut se con-
tenter de son propre marché ; il faut
absolument arriver à trouver des dé-
bouchés chez les voisins, Les voisins
se défendent par des tarifs douaniers.
Alors, il reste deux ressources : la pre-
mière consiste à se constituer une
clientèle au loin, dans les colonies ; la
seconde serait d'imposer aux peuples
dont on craint la concurrence écono-
mique des traités de commerce léo-
nins — fût-ce à coups de canon.
Les peuples où l'impérialisme est en
vogue se signalent donc tous par les
mêmes tendances : augmentation des
forces militaires, politique de conquête
coloniale, restriction du libre-échange.
En obéissant à cette impulsion, les
Etats-Unis ont été amenés à prendre
une attitude belliqueuse, sous prétexte
de maintenir intacte la doctrine de
Monroë, et à faire la guerre à l'Espa-
gne. De même, l'Angleterre s'est lan-
cée dans l'aventure du Transvaal. De
même encore, nos nationalistes ont es-
sayé de nous entraîner dans une po-
litique de coups d'épingle à l'égard des
grandes nations européennes.
Rien de plus dangereux, rien de
plus haïssable que l'impérialisme. Son
action est entièrement contraire à celle
de la démocratie internationale. Son
triomphe serait celui d'une ère de bar-
barie, d'une tyrannie sanglante, et
d'une ruine générale.
Le succès d'une si abominable doc-
trine, paraissait, il y a quelques années,
à la veille d'être assuré, pour une pé-
riode d'années qu'il était impossible de
préciser.
***
Heureusement, l'opinion fait partout
un retour sur elle-même. Le cas de
M. Chamberlain, forcé d'abandonner
le pouvoir, pour ne pas exaspérer la
révolte du peuple anglais, est signi-
ficatif.
Le recul du mélinisme et l'effondre-
ment du nationalisme en France sont
rassurants, dans le même ordre
d'idées. Et nous constaterons, pour
finir, l'échec de l'impérialisme, dans
un pays où il n'aurait jamais dû faire
son apparition : l'Espagne.
M. Silvela, l'ancien président du
conseil, confesse, dans une récente
interview, la déroute de sa politique.
« Je voulais, dit-il, avoir une poli-
tique extérieure ; la situation de l'Es-
pagne au Maroc devait, dans mon es-
prit, nous permettre de nous placer
en face des puissances, avec un pro-
gramme de politique mondiale. Mais
je dois renoncer à mes espérances,
elles ne sont pas populaires et n'ont
pas les sympathies de l'opinion. »
Et M. Silvela « se résigne ». C'est
ce qu'il a de mieux à faire L'Espagne
a déjà assez payé pour les fautes de ses
gouvernants. Se ruiner en armements
sur terre et sur mer ? Heurter les inté-
rêts des peuples qui ont des intérêts
en Afrique ? Pourquoi se préparerait-
elle tant de peines et tant de dangers ?
Elle arriverait simplement à exagérer
ses embarras d'argent.
Qu'elle reconstitue ses finances,
qu'elle mette en valeur son propre
sol, dont la stérilité est apparente,
qu'elle ait une industrie, un com-
perce, qu elle chasse ses moines,
qu'elle opère des réformes démocrati-
ques.
Ce programme est celui du peuple
JSpagnol, servi par un instinct très
ter des besoins nationaux.
La banqueroute de l'impérialisme
s'annonce générale, parce qu'il a par-
tout le peuple contre lui. ; ;'
," HuguesDestrexn.
EL MOUNGAR
On possède maintenant le
rapport officiel sur le combat:
d'El Moungar. :
Le premier sentiment qu'il
impose, c'est un sentiment de
respect et d'admiration pour
nos combattants, pour leur bravoure, pour :
leur endurance, pour leur sang-froid au
milieu dçs circonstances les plus terribles,
et alors qu'ils pouvaient se croire tous
perdus.
On a pensé d'abord que le malheureux
capitaine commandant la troupe héroïque
avait pû se laisser surprendre; on s'en
montrait frappé, d'autant plus que la sur-
prise se serait produite sur le lieu même où
un combat de même nature avait eu lieu en
juillet 1900, car ceci est le second combat
d'El Moungar. Eh bien, il n'en est rien : le
peloton attaqué était gardé normalement,
et de la seule façon dont un si faible effectif
pouvait être gardé, par de petites patrouil-
les de goumiers ; et ce sont ces patrouilles
d'éclaireurs qui, attaquées, ont, en se re-
pliant, donné au gros du peloton le temps
de prendre les armes et de se mettre en
défense. Donc, aucun reproche, nous sem-
ble-t-il, ne peut atteindre les malheureux
officiers victimes de l'embuscade d'El
Moungar.
D'autre part, nou9 voyons, comme nous
l'avions pensé : que « les premiers magh-
zenis du capitaine Susbielle, avertis pai
nos cavaliers dès le début de l'action ))
n'ont pu, quelque diligence qu'ils aient
faite, entrer en ligne qu'à cinq heures
trente de l'après-midi. On se battait depuis
neuf heures quarante minutes du matin et
le feu avait cessé depuis une demi-heure,
l'ennemi s'étant éloigné avec le butin.
Donc, le peloton qui a glorieusement suc-
combé à El Moungar, a été détruit parce
qu'il était trop faible d'effectif et trop éloi-
gné des autres pelotons.
Il suit de là : 1° que dans les régions du
Sud Oranais, il faudra désormais, lors-
qu'un chef d'expédition sera obligé de
fractionner sa troupe,qu'il procède par éche-
lons plus importants, d'effectifs plus rap-
prochés les uns des autres. C'est ce que
nous avons dit dès la première dépêche.
L'AFFAIRE DU COMMANDANT PEPROT
Epernay, 21 septembre.
Le commandant Perrot,du 31' dragons, vient
d'être mis en réforme après avis du conseil
d'enquête. On se souvient que cet officiel' avait
été dernièrement condamné à 1 franc d'amende
par le conseil de guerre de Châlons pour avoir
par lettre anonyme, dont, à l'audience, il
s'était reconnu l'auteur, adressé des menaces
de mort au général Percin, chef du cabinet du
ministre de la guerre.
L'automobile colonial allemand
(De notre correspondant particulier)
Zanzibar, 21 septembre.
Le gouverneur de la colonie allemande de
l'Afrique orientale a ouvert un concours pour
la construction d'un automobile colonial des-
tiné à remplacer le service des porteurs. Cha-
que véhicule doit pouvoir transporter une
charge de 500 kilogrammes. Le moteur devra
être exclusivement à pétrole ou à alcool, les
.messageries ayant refusé d'importer de la ben-
zine dans la colonie.
Les constructeurs ou inventeurs doivent pré-
senter leurs modèles avant le 1er avril 1905.
LA GENDARMERIE PONTIFICALE
IDe notre correspondant particuUeri
Rome, 21 septembre.
M. Nicolas TagUaferri, commandant de la
gendarmerie pontificale, a donné sa démission,
en alléguant des raisons de santé. En réalité,
il quitte son poste, parce qu'il lui était impos-
sible de lutter contre l'esprit d'indiscipline qui
a envahi la troupe. Quand il infligeait une pu-
nition, le subalterne qui en était atteint, s'a-
dressait à la presse catholique. Il est fort pro--
bable que Pie X fera réorganiser radicalement
la gendarmerie du Vatisan et qu'il placera à
la tête de ce corps un fonctionnaire de la police
italienne, actuellement en service.
LES GRANDES MANŒUVRES AU TRANSVAAL
(De notre correspondant particulier)
Capetown, 21 septembre.
Les grandes manœuvres qui ont eu pour
théâtre les environs de Klip River viennent de
se terminer par une revue à laquelle 15.000
hommes ont participé.
Pendant le défilé on a pu remarquer que la
cavalerie laisse toujours à désirer.
Beaucoup de Boers, anciens combattants de
la dernière guerre, ont suivi les manœuvres
avec attention et ont assisté à la revue.
00
COMPLOT CONTRE DES SOUVERAINES
(De notre correspondant particulier)
Copenhague, 21 septembre.
La police secrète a été avertie que plusieurs
anarchistes sont en route pour Copenhague où
la reine d'Angleterre, l'impératrice douairière
de Russie et la reine Marguerite doivent se ren-
contrer.
Les autorités bien qua sceptiques. au sujet
de ce complot ont pris des mesures spéciales
pour surveiller les abords de la capitale.
Le rapport qui a signalé le prétendu com-
plot, est, paraît-il, l'œuvre d'un ancien fonc-
tionnaire de la police russe, très connu à Pa-
ris et tombé en disgrâce à la suite d'un inci-
dent qui s'était produit à Compiègne.
— »
UNE VRAIE CHANCE !
, La Roche-sur-Yon, 21 septembre.
L express 106 de Bordeaux à Nantes arrivait
près de la station de Bellevue-sur-Vic, à une
vitesse de 70 kilomètres, quand le mécanicien,
nommé Letroadec, tomba de la machine. Le
chauffeur, sans perdre de temps, arrêta le
train, craignant de trouver son compagnon
mort.
Il fut stupéfait de le voir au loin, qui courait
dans la direction du convoi et n'ayant aucune
blessure. Letroadec remonta sur la machine et
poursuivit sa route sur Nantes.
LE CONFLIT
JUSTRO-HONGROIS
Crise ministérielle en Hongrie. -
L'augmentation du contingent mili-
taire. — Tentatives de corruption
parlementaire. — L'introduction
de la langue hongroise dans les
régiments magyars. - Les
résistances de François-Jo-
seph. — Luttes intestines.
— L'étude de M. Paul
Wiriath.- La solution
qu'il propose. - Som-. -; ,
bres perspectives.
H y aura trois mois, à la fin de septembre,
qu'une crise ministérielle a éclaté en Hongrie,
et il n'est pas probable qu'à ce moment, elle
soit près d'être résolue. C'est qu'il s'agit, cette
fois, non pas d'un conflit entre la Chambre
hongroise et un ministère quelconque, mais
bien plutôt d'un véritable désaccord entre les
députés magyars et l'empereur François-Joseph,
qui trouvant sans doute que ses sujets ne suppor-
tent pas des charges militaires assez lourdes,
et qui est fort préoccupé de l'avenir dans les
,Balkans, a jugé qu'il devenait nécessaire de
mettre sur pied des forces en nombre suffisant
pour une péréquation avec les autres armées
de l'échiquier, l'armée russe et l'armée ita-
lienne, l'armée turque et l'armée bulgare, et il
a fait présenter aux Chambres autrichienne et
hongroise un projet d'augmentation du con-
tingent : la Chambre hongroise a refusé de vo-
ter le projet, et c'est à la suite de ce vote que
le cabinet do Szell a dû démissionner, à la fin
de juin.
La Chambre autrichienne, au contraire, a
voté le contingent augmenté de 103 à 125,000
hommes pour la ligne et de 10,000 à 14,500
pour la réserve — mais — et ceci aggrave
encore le conflit - une clause, introduite par
le député Chiari, empêche qu'on appelle les
conscrits -pour la ligne avant que le contingent
soit voté en Hongrie: dans ces conditions on
comprend que l'empereur ne se soit pas laissé
décourager par le vote de la Chambre hon-
groise et qu'il ait décidé de revenir à la charge
avec un autre ministre, un ministre à poigne,
le comte Khuen Hedervary (celui-ci s'était fait
remarquer, comme ban de Croatie, par l'en-
train qu'il mettait à faire fusiller - paysans
indigènes). Le choix n'était pas du plus heu-
reux : on ne mène pas un Parlement comme
on mène, avec des soldats, des populations
sans armes et sans défense : le comte Khuen,
ne pouvant emprisonner et bannir les mem-
bres de l'opposition, et ne sachant comment
venir à bout de leurs tentatives d'obstruction,
essaya d'un moyen qui, pour avoir le mérite
de la nouveauté, n'en était pas meilleur : il
tenta d'acheter leur adhésion à la politique mi-
nistérielle, ou du moins leur abstention et ce
fut son ami personnel, le comte Spazary, gou-
verneur de Fiume, qui se chargea de cette
opération plutôt délicate : mais les membres
de l'opposition — et ceci leur fait honneur —
repoussèrent très dignement l'offre qui leur
était faite, et ils dénoncèrent à la tribune les
tentât! (ma de corruption dont ils avaient été
l'objet; le comte Khuen. nia bien toute com-
plicité dans cette triste affaire ; il affirma que
le comte Spazary avait agi de sa propre ini-
tiative, mais ses déclarations ne trouvèrent
que peu de créance auprès des parlementaires
et du public hongrois, et le 10 août, voyant
que sa situation était définitivement compro-
mise, il remettait la démission de son minis-
tère à François-Joseph.
Depuis l'empereur est venu à Budapest où
il est resté près de quinze jours, et où il a
très consciencieusement interrogé toutes les
personnalités influentes du monde parlemen-
taire ; mais il a dû repartir pour assister aux
manœuvres et pour recevoir Guillaumo II sans
avoir pu arriver à constituer un nouveau ca-
l'inet, sans avoir même trouvé le futur prési-
dent du conseil. Il ne reviendra certainement
pas à Budapest avant la fin de septembre, en
admettant qu'à ce moment il puisse enfin for-
mer un ministère, la Hongrie sera bien restée
trois mois sans gouvernement, si du moins
l'on fait abstraction des 45 jours qu'a vécu le
cabinet Khuen Hedervary.
Les revendications des Magyars
Cette situation est très anormale et elle dé-
note une crise très grave, aussi bien dans la
politique intérieure de la Hongrie, que dans
-les relations respectives de l'Autriche et de la
Hongrie.
Ce conflit, d'ailleurs, ne date pas d'hier ;
mais l'empereur-roi avait réussi jusqu'à au-
jourd'hui , par certaines concessions de peu
d'importance et surtout par de belles paroles
et des promesses jamais tenues, à endormir le
patriotisme hongrois.
Cette fois, la vieille tactique n'a aucune
chance de succès : le parti Kossuth ou parti de
l'indépendance a rallié à lui tous les mécon-
tents ; le parti national qui a pour chef le
comte Apponyi s'est peu à peu rapproché du
parti libéral nu point de ne plus former qu'un
grand parti avec lequel tout gouvernement
devra compter ; d'ailleurs les membres de ce
parti, même les plus modérés, sont unanimes
à reconnaître qu'il faut donner satisfaction à
l'esprit d'indépendance du peuple hongrois.
Enfin, la chute scandaleuse du cabinet Khuen-
Hedervary a excité encore davantage l'ardeur
belliqueuse du parti Kossuth et l'a encouragé
à accentuer ses prétentions. En ce qui con-
cerne la question militaire, les revendications
hongroises visent principalement ces 3 points :
1. Introduction du hongrois comme langue
de commandement en Hongrois ; 2. Emploi du
hongrois dans les débats des conseils de
guerre ; 3. Réformes des écoles militaires hon-
groises.
L'armée austro-hongroise
L'empereur François-Joseph est assez décidé
:à faire de larges concessions sur le dernier de
:ces trois points, c'est-à-dire à réformer l'orga-
nisation des écoles militaires de la Hongrie ;
mais sur les deux premiers points, c'est à-dire
sur l'introduction de la langue hongroise
dans les débats des conseils de guerre, et sur-
tout sur l'emploi du hongrois comme langue
de commandement en Hongrie, il ne veut pas
céder, et cela se comprend, car cette réforme
aboutit en réalité à la séparation de l'armée
hongroise et de l'armée autrichienne. L'armée
commune est aujourd'hui recrutée par le ser-
vice personnel obligatoire : trois ans de l'ac-
tive, sept ans dans la réserve, deux dans la
Iandwehr. Les conscrits allemands et magyars,
tchèques et italiens, etc., sont confondus
dans les mêmes régiments. L'effectif de 336.000
hommes et de 26.000 officiers est réparti dans
quinze corps d'armée de pareil amalgame :
trois dans les provinces autrichiennes, pro-
prement dites, deux dans la Bohême, deux
dans la Galicie polonaise, quatre dans les
provinces magyares, un en Croatie, un en
Transylvanie, un dans le Tyrol, ie dernier
enfin, dans la Bosnie-Herzégovine. Tous ces
corps ont les mêmes règlements, les mêmes
unités de commandement : au sommet, l'em-
pereur, assisté du ministre de la guerre, du
chef d'état-major général et de trois inspec-
teurs d'armée. Enfin, ils ont l'unité de lan-
gage ; dans toute l'armée, c'est l'allemand qui
est la langue du commandement.
L'introduction du hongrois dans les régi-
raents magyars couperait forcément l'armée en
deux, et, comme l'armée Commune constitue
l'Unique trafit d'union du dualisme actuel, en-
tre la Cisleithanie et la Transleithanie, il est
évident que l'adoption de cette réforme si ar-
demment désirée et si vivement réclamée par
le parti de l'indépendance, aboutirait à bref
délai au divorce complet et définitif de la
Hongrie et de l'Autriche. Ce n'est pas sans
doute le but immédiat, que poursuivent Kos-
suth et ses amis : ils invoquent au contraire
Tart. 42 du Compromis de 1867 qui donne à
l'empereur le pouvoir de régler tout ce qui a
trait à l'organisation de l'armée. c'est-à-dire,
disent-ils, le droit d'organiser séparément une
armée autrichienne et une armée hongroise. Il
n'en est pas moins vrai que le jour où
les deux pays s'auront plus ce dernier lien
que constitue entre elles l'armée commune,
leur maintien sous le même sceptre sera bien
difficile, le compromis aura probablement
vécu.
La résistance de François-Joseph aux reven-
dications magyares s'explique donc très bien ,
il est possible cependant que les Hongrois en
viennent à bout, car il faudra bien mettre un
terme à une situation qui s'aggrave tous les
jours ; la Chambre des députés de Budapest
ayant refusé d'approuver l'appel du contingent
le ministre de la guerre, à défaut des recrues
a dû retenir sous les drapeaux, en Autriche et
en Hongrie, la classe qui vient d'achever ses
trois ans : cette mesure a provoqué de très vifs
mécontentements, et dans plusieurs villes, de
graves désordres sç sont produits : cette solu-
tion ne peut donc être que provisoire, et il fau-
dra bien, d'ici peu, réunir de nouveau la
Chambre hongroise pour qu'elle règle la ques-
tion du contingent ; s'il veut désarrner, alors
les partisans de Kossuth, l'empereur devra
très probablement faire de grandes conces-
sions.
L'anarchie dans l'empire austro-hon-
grois.
Elles ne rétabliront pas d'ailleurs la paix au
sein de l'Empire : en réalité l'anarchie la plus
grande règne dans tout le pays : les diverses
populations qui l'occupent se traitent en en-
nemies, et c'est à l'étranger, dans les pays de
nationalité semblable qu'elles cherchent des
amitiés et des appuis ; comme le montre très
nettement M. Paul Wiriath dans sa récente
étude « La Question d'Autriche-Hongrie » pu-
bliée par les Pages Libres, la crise que traverse
l'Autriche-Hongrie vient de ce qu'après avoir
poursuivi durant des siècles la chimère de
l'empire universel, sa maison régnante s'est
ensuite attachée à réaliser à l'intérieur de son
empire un impossible centralisme : avec l'appui
de l'Eglise, de l'armée, dé l'idée dynastique,
elle s'est obstinée à perpétuer le défi jeté par
Metternich à la Révolution vaincue, et à conti-
nuer cette politique insensée qui consistait à
nier la liberté constitutionnelle et les droits de
nationalités dans le pays où des antagonismes
multiples rendaient plus nécessaire que nulle
part ailleurs cette double aspiration : de là les
crises continuelles, et les luttes intestines qui
deviennent tous les jours plus violentes, et qui
aboutiront fatalement, à une date plus ou
moins rapprochée à la séparation des diverses
natluiiaittdrj Tjui forment l'Aatriâho Il..:> nsn(t.
Les pessimistes prévoient déjà qu'à la mort de
François-Joseph — (l'héritier du trône est très
impopulaire en Hongrie, et il ne fait rien pour
s'attirer les sympathies des Magyars) — le
pacte sera dénoncé et que les nationalités abdi-
queront entre les mains des grandes nations
auxquelles leur origine les rattache.
La solution fédéraliste
M. Paul Wiriath, sans être optimiste, estime
cependant que l'unité de ce grand pays pour-
rait être préservée d'un prochain démembre-
ment, par la misé en pratique du système fédé-
raliste qui apaiserait définitivement les rivali-
tés de nationalités, puisqu'il accorderait à cha-
cune le maximum d'indépendance et de liberté
mais qui laisserait cependant subsister entre
elles un lien assez étroit pour qu'au point de
vue extérieur elles ne forment comme aujour-
d'hui qu'un seul Etat.
La solution proposée par M. Wiriath, et
avant lui par quelques fédéralistes convaincus,
paraît à première vue convenir parfaitement
à la situation ; mais il me semble, en y réflé-
chissant, qu'elle ne serait que difficilement
réalisable. En effet, comme nous le disions
plus haut, les habitants de ce pays, Allemands,
Slaves, Tchèques de Bohème, Roumains, Polo-
nais, en majorité du moins, préfèrent se rap-
procher des populations de leur nationalité
que chercher à réaliser en Autriche-Hongrie
une combinaison politique durable, à organi-
ser un régime de paix intérieure. La crise mi-
nistérielle de Hongrie montre suffisamment
que les Magyars ne sont pas disposés à désar-
mer, et qu'ils continueront demain avec plus
de violence encore que par le passé, leur cam-
pagne d'obstruction systématique. jusqu'au
jour où la séparation sera un fait accompli.
FRANÇOIS VIEL.
Voiz- à la a .page
les Dernières Dépôohoa
La laïcisation des « Quinze-vingts »
Nous avons annoncé que le directeur de
l'hospice des Quinze-Vingts avait été invité a
procéder à la laïcisation de cet établissement
par dépêche ministérielle en date du 15 sep-
tembre. A ce sujet la Lanterne ajoutait :
Par ordre du directeur, qui espère, comme il y
a vingt ans, passer outre à ce second décret de laï-
cisation, cette décision ministérielle devait bien
inutilement être tenue secrète. Parmi les établis-
sements nationaux de bienfaisance, il ne restait
plus que celui-là à faire rentrer sous la loi com-
mune. Voilà qui va être fait, malgré l'opposition
sournoise des bureaux — sur laquelle nous revien-
drons.
Notre confrère oublie l'Institution nationale
des sourdes-muettes de Bordeaux, qui, elle
aussi, se trouve en possession de cornettes.
Nous exprimons l'espoir que le président du
conseil ne les oubliera pas et qu'à bref délai
nous apprendrons, qu'elles aussi, vont faire
place nette.
Nous sommes persuadé que notre excellent
confrère réparera son cubli et se joindra à
nous pour demander à M. Combes de complé-
ter son œuvre.
UN PÈLERINAGE HONGROIS A CONSTANTINOPLE
(De notre correspondant particulier)
Budapest, 21 septembre.
Le 10 octobre partira pour Constantinople
un pèlerinage de plusieurs milliers de Hon-
grois de toutes les couches de la Société et de
tous les cultes pour visiter la tombe du prince
Rakoczy.
Le prince Rakoczy était le chef de la guerre
d'indépendance de la Hongrie en 1702 et avait
comme allié Louis XIV, roi de France. En
1713, il est parti en exil et s'est fixé à Cons-
tantinople où il est mort. Il a légué son cœur
à la France. Ce sont les lazaristes français à
Constantinople qui le gardent dans une urne.
Le comité des pèlerins fera des démarches
pour obtenir l'autorisation de transférer en
Hongrie la dépouille mortelle de Rakoczy.
L'INSURRECTION
'";-' EM MACÉDOINE
Un combat à Melnik
Sofia, 21 septembre (source anglaise)
Une dépêche de Rilo dit que des fugitifs ve-
nant de Djumaia annoncent qu'un sérieux en-
gagement a eu lieu dans les montagnes Perim,
près de Melnik.
Les Turcs auraient perdu 500 tués dont deux
colonels.
La plupart des villages du district de Melnik
sont aux mains des insurgés. Beaucoup sont
en flammes.
Deux régiments avec de l'artillerie et uft fca-
taiilon d'Albanais ont quitté Djumaia Mur
Melnik, où une forte colonne turque serait
entourée. -
Nouvelles de source turque
L'ambassade ottomane communique la dépêche
suivante :
Constantinople, le 21 septembre.
Les notables Grecs de Neveska ont remercié
Hilmi pacha pour les dispositions adoptées par
les autorités civiles et militaires lors de l'ap-
parition des révolutionnaires bulgares dans
cette localité, Un grand nombre de ces der-
niers, qui avaient été arrôtés et déférés à la
justice, viennent d'être condamnés à différeo-
tes peine.
La discipline des Albanais
Salonique. 21 septembre.
Jeudi dernier un gendarme chrétien, de
Vuchtrin, ayant adressé des observations à des
réservistes albanais qui causaient du scandale,
fut frappé par eux et eut les oreilles coupées.
Les autres gendarmes chrétiens se réfugièrent
.au consulit de Russie, à Mitrovitza.
Le vali d'Uskub se rendit à Mitrovitza par
train spécial, et le bataillon en garnison à Vuch-
trin, fut envoyé à Calcandelene.
On se rappelle que c'est déjà un incident
causé par un gendarme chrétien de Vuchtrin,
qui avait motivé une attaque de Mitrovitza par
des Albanais, qui eut pour suite le meurtre du
consul Cbtchérbina.
La Bulgarie et la Porte
Londres, 21 septembre.
On mande de Constantinople au Standard,
dont nous reproduisons la dépêche sous tou-
tes réserves :
D'après des informations de source sûre, la Bul-
garie déclarera la guerre ou se révoltera contre
son prince, qui est presque seul, maintenant, à
tenter d'endiguer le sentiment populaire. On
songe à établir un camp fortifié de 180,000 hom
mes ; les ingénieurs bulgares sont aidés par 6 of-
ficiers volontaires russes.
D'autre part, le correspondant du Daily
Tele.grapib à Constantinople se dit en mesure
d'affirmer que le sultan est tellement résolu à
éviter la guerre, qu'en apprenant que la
France était disposée à faire une démonstra-
tion navale, il fit rédiger un décret défendant
le massacre dans trois vilayets d'Europe et ac-
cordant aux populations chrétiennes des droits
plus étendus que ceux demandés par les in-
surgés. Toutefois, quand la nouvelle de la dé-
monstration française fut démentie, le décret
fut annulé.
Une seconde fois, le décret fut préparé quand
on annonça la mobilisation bulgare, et annulé
de nouveau lorsque le commissaire turc à Sofia
eut télégraphié que la mesure prise par la
Bulgarie ne constituait pas une mobilisation
Sofia, 21 septembre. (Source anglaise).
Le gouvernement continue ses préparatifs
militaires. A l'heure actuelle, 200.000 hommes
pourraient être concentrés sur la frontière en
huit jours.
Contrairement à ce qu'on raconte, les muni-
tions sont abondantes.
Les journaux anglais
Le correspundant du Times à Constantinople,
examinant les chances de succès de la Bulgarie
dans le cas très probable, croit-il, où elle se
verrait forcée d'aller au secours de ses conci-
toyens de Macédoine, dit qu'à tous les points
de vue, l'armée bulgare est considèrée comme
une des meilleures d'Europe, tandis que l'ar-
mée turque est mal organisée et a peu d'offi-
ciers instruits. Les officiers turcs reçoivent les
ordres du Palais par-dessus la tête du com
mandant responsable ; il leur serait très dif-
ficile d'assurer leurs communications, tout le
pays situé sur le littoral de la frontière étant
déjà en rébellion ouverte.
D'autre part la Bulgarie aurait un solide
appui dans les insurgés et il serait très diffi-
cile au gouvernement serbe de ne pas se join-
dre à ses voisins, car les Serbes réclament une
grande partie de la Macédoine comme ap-
partenant à la race serbe.
Plusieurs bandes serbes ont déjà fran-
chi la frontière et combattent en Macé-
doine.
Quant à la Grèce, à en juger par son atti-
tude présente, elle attendrait, pour se pronon-
cer, de voir de quel côté se dessine l'avantage;
mais la Turquie, ne pouvant se fier à la
neutralité, devrait faire surveiller sa fron-
tière.
Il est à peu près certain, conclut le corres-
pondant du Times, qu'en fin de compte les
Turcs seraient vainqueurs ; mais la Bulgarie
lutterait assez longtemps pour obliger les puis
sances à accorder à la Macédoine une admi-
nistration convenable.
L'Allemagne et la Turquie
Vienne, 21 septembre.
Le Neues Wiener Tageblatt publie une in-
terview qu'il aurait eu avec M. de Bülow.
L'homme d'Etat allemand a déclaré que la po-
litique orientale de l'Allemagne ne poursuit
pas de buts spéciaux.
L'Allemagne poursuit, at dit M. de Biilow,
une politique réellement pacifique. Elle ne
songe nullement à encourager la Turquie à la
résistance à l'égard de la politique des autres
puissances notamment à l'égard de l'Autricht-
Hongrie et la Rus3ie. L'Allemagne a appuyé et
appuiera volontiers et pleinement toutes lAs
démarches et les mesures sur lesquelles l'Au-
triche-Hongrie et la Russie sont tombées d'ac-
cord dans le but d'améliorer la situation des
Balkans.
M. de Bülow a conclu en exprimant l'espoir
que les observations énergiques faites par les
puissances ainsi que la conscience qu'en cas de
conflit les intéressés n'auraient pas beaucoup
à gagner, empêcheront une explosion. En tout
cas, des efforts seront faits pour localiser le
conflit.
Une réunion arménophile
Le comité arménophile français organise
pour le 25 octobre, à Paris, une réunion à la-
quelle il convoque les arménophiles français
et anglais, dans le but de rechercher la solu-
tion, la la plus prompte et la meilleure possi-
ble, de la crise qui sévit actuellement en
Macédoine et en Arménie.
L'adhésion de l'Association anglo-américain
est d'ores et déjà assurée.
IVoir la suite dans notre DEUXIEME EDlTIONJ
FANTAISIE BIZARRE
Mont Saint-Michel, 21 septembre.
M. James Bartlctt, sujet anglais, vient de se
payer une fantaisie bizarre. Ce gentleman s'est
1
fait enfermer depuis 8 h, du soir jusqu'à 6
heures du matin dans un des cachots du Mont
Saint-Michel, afin de se rendre compte des im-
pressions que ressent un prisonnier.
Il est sorti enchanté de sa nuit. Avouez qu'il,
n'est pas difficile.
..---..
LE DEVOIR RÉPUBLICAIN
Les « maristes 8 possèdent à RioÏn,sous-pré
fectare du Puy-de-Dôme, un important col-
lège C'est tàque se sont formés tous les chefs,
locaux du parti réactionnaire, c'est là que set
préparent les. élections. La congrégation,
n ayant pas demandé l'autorisation pour ce&
établissement, reçut l'ordre de se disperser -kt,'
l'échéance des délais prévus pour'l'application
de la loi de 1901. M. Combes avait compta
sans ses h. Conseillés par Ia. quasi-una-
nimité des avocats à la cour d'appel de Riomt
les « pères » résolurent d'essayer de tous les
moyens dilatoires. Ils protestèrent, déclarant
que dès 1881, ils avaient rompu avec leur con-
grégation dont le siège est à Lyon et s'étaient
sécularisés. Une longue et minutieuse enquêta,
dont nous avons entretenu nos lecteurs en
avril dernier, fut conduite par M. Roux, le
juge d'instruction d'alors, et les « maristes »
renvoyés devant le tribunal correctionnel. Ils-
firent opposition. La chambre des mises en
accusation vient de confirmer l'ordonnance de'
renvoi.
Nous croyons savoir que devant les tribu-
naux, les « pères » vont faire défaut, puis op-
position au premier jugea, nt et appel du se-
cond. Ils recommenceront alors la même pro-
cédure qui se dénouera devant la cour de cas-
sation. Ils espèrent ainsi pouvoir tenir en échec"
le gouvernement et l'opinion pendant dix-huit\
mois au moins. Après, s'il le faut, ils oppose-
ront une-résistance brutale.
Voilà un exemple saisissant de la façon dont
les cléricaux tournent la loi et discutent avec
elle. Ce n'est pas un cas isolé, presque partout,
dans le département, quand eut lieu la signifi-
cation des décrets de fermeture, les moines
s'empressèrent de revêtir la redingote et 4Ia
faire une déclaration d'ouverture d'école. It
n'est pas de village où ne se rencontre commue
instituteur libre un individu à figure mauvaise,
à regard fuyant, à épaules tombantes, à poi.,
trine rentrée, sous le complet noir duquel oit
devine le scapulaire et la crasse, conventuelle.
Nombre de sœurs aussi, ces vierges naïves»'
ces victimes expiatoires que s'est offert le see-
tarisme républicain, ont rusé de même manièrf
En présence de cette révolte, l'administration a
généralement fait son devoir bien qu'elle ail
eu d'impardonnables faiblesses en autorisant
par exemple les sœurs de « Notre Dame des
Arts » à enseigner un an encore dans leur éta-
blissement de Riom On ne-saurait faire pareil
éloge de la magistrature. Elle s'est refusée à
sévir contre ceux qui violaient ainsi la loi.
Pour eux, c'était tantôt un acquittement, tantôt
une mince amende avec application de la lot
de sursis.
Tout le monde réactionnaire du département
en fit des gorges chaudes. Encouragé par cette
excessive mansuétude, il a repris la lutte plus
cyniquement que jamais.
A Ménétrol, à Pontgibault, dans toutes les
tommniiM nafin d'où elles étaient parties, les'
sœurs ont à nouveau fait leur apparition. III
est à supposer qu'elles ne sont pas rentrées au
nid pour humer une dernière fois l'air du
pays et emporter dans un exil définitif un
souvenir attendri et douloureux des lieux ott
s'exerça leur zèle apostolique.
La bataille que les cléricaux nous offrent ne
nous étonne ni ne nous émeut. Nous ne nous
attendions pas à ce que l'Eglise abandonnât
sans.résistance les privilèges dont elle jouit
abusivement depuis des siècles. Nous sommes
certains que la libre-pensée qui a su ébranler-
la masse formidable du cléricalisme, peut lui
donner la définitive poussée. Ce qui nous ef-
fraye c'est que le gouvernement en qui nous
avons mis notre confiance et qui pourrait,
soutenu comme il l'ôst par le bloc républicain,
nous conduire à la victoire, hésite à comman-.
der l'assaut. Qu'il renonce à son sabre de boMT
pour solutionner une question qui en s'éter-
nisant finit par devenir dangereuse pour le
parti républicain. En consacrant toute not"e
énergie à batailler contre la cléricaille, nous;
négligeons d'urgents intérêts économiques que
nos adversaires- tentent jésuitiquement de
tourner contre nous. Il faut en finir : Si la-i
prochains année législative ne nous donne pas
la séparation des Eglises et de l'Etat ainsi que'
le monopole universitaire nous penserons que;
le gouvernement a forfait. — Maurice Juncker.
LE RÉSERVISTE JAY
- Y
C'est par erreur qu'on avait annoncé que la
punition du réserviste Jay — qui avait refusé
de prendre un fusil — avait été levée. Elle
avait été simplement réduite de 60 à 30 jours,
et le réserviste dont il s'agit, au lieu d'avoir
été libéré samedi en même temps que ses ca
marades, est resté pour faire ce temps à là
prison de la caserne d'Hauteroche.
—————————————
ACADÉMIE DES SCIENCES
La culture des orchidées
Les amateurs d'orchidées savent combien il
est difficile de les cultiver dans les serres et
les jardins.
Il en est ainsi parce que pour prospérer les
orchidées ont besoin de contracter une asso-
ciation avec certains champignons. Or, dans
la terre dont disposent les jardiniers, les
champignons propices manquent le plus sou-
vent.
Grâce à un savant botaniste. M. Noël Ber-
nard, dont M. le professeur Gaston Bonnier a:
présenté, hier, un curieux travail, cet état da
choses pourrait fort bien changer avant long-
temps. M. Bernard, en effet, est arrivé à culti-
ver les espèces de champignons convenant aux
espèces d'orchidées qu'il désire voir prospé-
rer. Le résultat de ces expériences est que l'on
peut espérer dorénavant réunir aisément la
culture de ces admirables plantes aujourd'hui
encore rares et coûteuses.
Les greffes américaines
On sait que depuis l'apparition du phylloxéra
et en vue de lutter contre ses ravages, l'on
greffe les plants de vignes françaises avec des
greffes provenant de ceps américains.
Quelle peut être l'influence de ces greffes sur
l'avenir de nos vignobles ?
A cette question posée depuis déjà long-
temps, M. le professeur Gaston Bonnier a ap-
porté, hier, au nom de M. Jurie, une réponse
intéressante.
Des recherches de cet éminent viticulteur, il
résulte, en effet, que les greffons exercent de
façon indéniable une action sur les ceps qui
les reçoivent.
La conséquence pratique de ces remarques
est qu'il convient de se méfier des greffes amé-
ricaines. Avec elles, l'on a bien des plants ro-
bustes vis à-vis du phylloxéra, mais l'on ris-
que aussi de voir disparaître ces qualités par-
ticulières d'arome et de bouquet qui ont fait
justement à nos grands vins de Bordeaux et
de Bourgogne leur universelle renommée.
La dernière tempête
La tempête de la semaine passée a eu soa
petit écho hier à l'Académie.
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