Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-08-20
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 20 août 1903 20 août 1903
Description : 1903/08/20 (N12214). 1903/08/20 (N12214).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
orNO CENTIMES lo Numéro# PARIS 4 ÔÈPAfTTEMENTS Numéro CINQ CENTIMES
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N.12214. — Jeudi 20 Août 1903
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NOS LEADERS
Le dernier avatar
de M. Déroulède
Evidemment, il pourrait paraître
peu utile de consacrer, ne fut-ce que
quatre lignes, au banquet bonapartiste
qui, conformément aux traditions, a
eu lieu, le 15 août, au Salon des Fa-
milles. Le Salon des Familles en a vu
bien d'autres. Qu'est-ce que cela peut
nous faire que les membres des comi-
tés plébiscitaires — c'est ainsi qu'ils
s'appellent entre eux — se soient réu-
nis pour, inter pocula, écouter la lec-
ture d'une lettre du prince Victor et
y répondre par l'envoi d'un télégram-
me de dévouement ? Le prince Victor
n'est pas dangereux et, croyons-nous,
ne songe guère à l'être.
Il paraît qu'à ce banquet intime, un
M. de Peyramale se serait attaché à
« laver - la mémoire de Napoléon III
des actes qui lui sont reprochés : le 2
- décembre et Sedan ». Napoléon Ier, qui
se connaissait en linge sale, disait qu'il
faut toujours le laver en famille ; ce
bon M. de Peyramale s'est souvenu de
ce précepte. Passons. Tout cela est in-
existant.
La seule chose qui me semble digne
de remarque, c'est qu'à ces agapes bo-
napartistes, on ait lu des télégrammes
d'excuses de MM. Lasies, Quentin-
Bauchart, Millevoye et Déroulède.
Le bonapartisme de MM. Millevoye,
Quentin-Bauchart et Lasies est notoire,
mais l'adhésion de M. Déroulède à une
manifestation nettement impérialiste
et organisée en faveur de la candida-
ture du prince Victor, mérite d'être si-
gnalée. M. Déroulède est donc bona-
partiste à présent? Tiens ! tiens! tiens!
***
Certes, cela ne saurait nous étonner;
même nous avouerons sans ambages
que nous avons toujours pensé que cela
devait finir comme ça. Mais combien
d'opinions politiques M. Déroulède a-
t-il déjà tuées sous lui ? Nous l'avons,
d'abord, connu gambettiste. Puis,
ayant fondé sa Ligue des Patriotes dans
laquelle, disait-il : «républicain,bona-
partiste, royaliste, n'étaient que des
prénoms ; patriote étant le nom de fa-
mille » — ce qui nous a mis en juste
défiance — il continuait de fréquen-
ter ce qu'on appelait alors les oppor-
tunistes. Aux élections législatives
complémentaires de décembre 1885,
il figura sur la liste qui battit, au se-
cond tour de scrutin, la liste radicale.
Deux ans plus tard, il était violem-
ment boulangiste et, rompant avec
tous ses anciens amis, il menait une
ardente campagne pour le maintien à
l'Elysée de feu Jules Grévy, même
avec Wilson; pourvu que ce fut égale-
ment avec le général Boulanger. Pos-
térieurement, il semblait s'être aco-
quiné de façon définitive à ce qu'il ap-
pelait : La République plébiscitaire ;
il en exposait les beautés, en expli-
quait le mécanisme. Crac! voilà que
du jour au lendemain, tout cela est
lâché. M..Déroulède, décidément, s'en-
rôla parmi les bonapartistes.
J'ai dit que ce nouvel avatar n'avait
pas dé quoi nous surprendre. Quand
on n'a point, ppur se diriger dans la
vie, un principe, une foi ; quand on se
laisse, comme une épave par les flots
qui vont et viennent, ballottèr par le
flux et le reflux des événements con-
tradictoires; quand, à défaut d'idée,
on cherche un homme; qnand on a
successivement crié : Vive Gambetta !
Vive Grévy ! Vive Boulanger ! Vive Ro-
get! Vive n'importe qui! fatalement on
doit en arriver à crier : Vive le prince
Victor 1
Que M. Déroulède en soit là, à
l'heure actuelle, c'est plutôt triste. Car,
à vrai dire, il avait quelque chose de
sympathique en lui, jadis, ce grand
diable dégingandé, à longue redingote.
Je ne suis point de ceux qui renient
leurs engouements passés. De toutes
les femmes que j'ai aimées, même
quand elles n'en valaient pas la peine,
je garde le souvenir, comme on garde
une fleur fanée entre les feuillets d'un
livre. Je me souviens parfaitement
ravoir, vers seize ou dix-sept ans, été
si emballé par les « chants du soldat »
que — fatale mémoire ! — j'en récite-
rais encore des morceaux entiers, tout
d'une haleine. Même, je crois bien
avoir,de très bonne foi,trouvé beau cet
Hetman joué, à cette époque à l'Odéon,
et qui est bien,certes, la chose la plus
ridicule du monde.
, Que voulez-vous ? J'étais très jeune ;
je sortais du siège de Paris ; j'avais eu
faim ; j'avais eu froid; le tonnerre des
combats avait empli mes oreilles; les
obus allemands avaient passé en sif-
flant au-dessus de ma tête ; j'avais,
dans mon cœur d'enfant, la douleur
et la rage des vaincus ; mon espérance,
ma volonté, étaient d'être un jour un
des soldats de la revanche, et tous mes
rêves d'avenir tenaient en celui-ci :
tomber un jour de victoire, en voyant
le drapeau français flotter de nouveau
sur les remparts de Strasbourg recon-
quis. Etonnez-vous donc, après cela,
que les « Chants du soldat » aient ému
> mon P\9c,. Est-ce que, au même temj^
tout le monde n'a pas cru à la « Fille
de Roland » ? Et pourtant, les vers de
M. de Bornier n'étaient ni meilleurs ni
pires que ceux de M. Déroulède. ,
Celui-ci apparaissait aux jeunes
imaginations comme le barde de l'or-
gueil national ; il s'exprimait en un
français bizarre, invraisemblablement
incorrect, et était poète comme un
lauréat du prix Sully-Prudhomme,
mais qu'importe? Il brandissait un
drapeau et lançait, sonore, le cri de
ralliement.
***
Quel piédestal il aurait, maintenant,
s'il avait persévéré dans cette attitude !
A quelle dégringolade lamentable, au
contraire, avons-nous assisté ! Qu'est
devenu l'idéal patriotique auquel M.
Déroulède prétendait tout sacrifier?
M. Déroulède pourrait-il se dire en-
core patriote, alors qu'il fraternise
avec ceux qui ont entrepris de réha-
biliter la mémoire de Napoléon III ?
Laver son linge sale en famille, c'est
fort bien; mais il y a des lessivages
impossibles; on a beau savonner,
frotter, battre, rincer, tordre, la tache
demeure ineffaçable, la tache de boue,
la tache de sang, que les flots de la
mer, comme dit Shakespeare, ne par-
viendraient pas à effacer.
Est-ce qu'il est possible d'être en
même temps bonapartiste et patriote?
Je réDonds : non.
En 1871, l'Assemblée de Bordeaux a
déclaré Napoléon III « responsable de
la ruine et du démembrement de lai
patrie ». Ce vote subsiste, cette flétris-
sure est indélébile. Personnellement,
malgré mon enthousiasme juvénile
pour les « Chants du soldat », j'ai tou-
jours refusé de faire partie de la Ligue
des patriotes — parce qu'on y admet-
tait des bonapartistes. Pour être bona-
partiste après Waterloo et Sedan, il
faut ne pas avoir l'âme française. Je ne
serais nullement étonné si Guillaume II
était bonapartiste — comme l'est au-
jourd'hui M. Déroulède, hélas!
Lucien Victor-Meunier.
VICTOIRE DES PÈLERINS
Victoire des cléricaux organi-
sateurs de pèlerinages ; les trains
pour Lourdes vont se mettre en
route, bondés de malades divers,
et il. y aura baignade dans la piscine aux
scrofules.
M. Combes a, paraît-il, acquiescé une;
'fois encore aux doléances « de sénateurs et
de députés )) pour qui la prospérité de la
:grotte passe avant l'exécution de la loi ; et
,grâce au président du conseil, cette année
encore, l'industrie des miracles, malgré les
sourires des uns, malgré les indignations
des autres, s'exercera, avec un paisible
aplomb.
C'est tout de même un peu raide : on se
rue sur de petites chapelles de quartiers où
quelques vieilles dévotes prenaient plaisir
à allumer des ciergés et à chanter ; « Sau-
vez Rome. », et on respecteinfiniment et;
-on salue avec considération le vaste com-i
imerce de guérisons surnaturelles qui, du
nord au sud, et de l'est à l'ouest, draine la
quasi-unanimité des bons jobards disposés:
ià se tremper dans de l'eau sale et froide
pour atténuer leurs rhumatismes.
M. le président du conseil voudra bien
nous permettre de lui dire que son attitude
persistante dans cette question de Lourdes
est faite pour lui attirer Iutre chose quej
des compliments de la part des républi-;
cains qui lui ont confié la direction du gou-
vernement pour nous délivrer des moines,
et non pour déférer aux réquisitions des;
ifrocards et de leurs amis: En France la loi'
[n'a pas été votée pour ces départements-ci
ou ces départements-là, mais pour tout le
territoire. Nous conseillons vigoureuse-
fment à M. Combes, s'il en est temps encore,
[de se dégager des promesses qu'il a pu
faire à tels ou tels, en faveur de telles ou
'telles piscines.
Nous n'aimons pas bien que des moines
aient eu. assez d'influence pour déterminer,
:auprès du président du conseil une démar-
che de sénateurs ou de députés; nous ai-
Unons encore moins que le président du
conseil ait eu la faiblesse grande de ne
point résister, comme c'était son devoir
strict, à une pareille démarche.
11 ■
UNE OPÉRATION DANS LE SUD-ALGÉRIEN
Alger, 18 août.
Au retour de la colonne qui opéra récem-
ment à Bechar, l'occupation de BentZireg fut
décidée. Au moment de l'occupation, le géné-
ral commandant la division d'Oran, a réclamé
une force mobile, et le général Caze a donné
des ordres pour qu'on envoie à ce port un es-
cadron de chasseuis et un peloton de spahis.
Le départ de l'escadron d'Aïn Sefra ne doit
être que l'exécution de ce mouvement. Il est,
:d'ailleurs, exact que de nouvelles harka bera-
bers ont été signalées ces temps derniers comme
se dirigeant vers la Zousfanâ.
LA MAISON DE DICKENS
(De notre correspondant particulier)
Londres, 18 août.
La maison sise n° 387 dans la Commercial
Road à Portsmouth où le romancier Charles
Dickens est né,sera vendue prochainement aux
enchères. Un comité s'est formé dans le but de
l'acquérir et d'y créer un musée Dickens.
LES PHARES A ACETYLENE
(De notre correspondant particulier)
Rome, 18 août.
Les expériences avec le gaz acétylène pour
l'illvmination des phares sont terminées et ont
donné d'excellents résultats.
Un des grands avantages du nouveau sys-
tème c'est qu'on n'a pas besoin de faire surveil-
ler constamment le fonctionnemeat M Aa lu-
mière.
LE RAPPEL
ARTISTIQUE ET liTTÉRAl-RE
Les chefs-d'œuvre de la peinture. -
Paysages et figures. — Charles Mo-
reau-Vauthier, critique d'art. —
Une famille d'artistes
J'ai pu, grâce à mon ami Charles Moreau-
Vauthier, grâce aussi à une notable maison
d'éditions de la rive gauche, où la perfection
de la facture le dispute à la variété des séries,
parcourir les collections, les musées d'Europe,
en admirer les plus célèbres toiles, sans bou-
ger de mon fauteuil.
C'est un plaisir dont je les remercie. Il ne.
saurait y avoir d'universelle jouissance en une
courte vie. Grâce soit donc rendue à ceux qui,
abrégeant la distance et devançant le temps,
apportent à nos yeux les fleurs des siècles et du
génie !
Les plus célèbres toiles
Dans ces Chefs-d'œuvre des grands maîtres.
variés, et passant au gré de la renommée du
bitumineux Velasquez au fantomal Whistler,
des ombres noires de l'Escurial aux buées ro-
ses et dorées du grand canal vénitien, la pré-;
sentation des hommes était ardue. Pas d'école
à suivre, pas de théories à appliquer. Les noti-
ces s'échaffaudaient sur la seule valeur consa-
crée par les ans, Charles Moreau-Vauthier s'en
est tiré à son honneur. Effleurant le passé glo-
rieux do chaque nation, il a présenté dans
chacune le maître incontesté. Les plus fameux
tableaux sont là, et s'il faut en espérer d'autres
parmi les modernes, Puvis de Chavannes,Car-
rière, Direiks, Zuloaga, j'en passe, comptons
qu'ils ne seront pas oubliés dans les séries sui-
vantes.
Quelle richesse dans ce paysage. Des vaches
,au bord des tlots, du hollandais Cuyp (National
Gallery, Londres) paisibles et reposantes,Moulin
à vent de Ruysdaël (musée Van-der-Hoop.Ams-
.terdam) et un autre moulin d'Hobbema, blotti
,sous les arbres comme un nid (Louvre) près de
la rivière tranquille,et ce lac,idyllique du bon-
homme Corot (Louvre) où butine la lumière,
où le rêve vogue dans le brouillard léger du
matin ! Et cette merveilleuse Cathédrale de Sa-
,lisbury (South Kensington),
L'Anglais Constable fait « dans un élan
i commun s'élancer vers le ciel l'œuvre des hom-
mes et l'oeuvre de la Nature ». Turner apparaît
alors avec une admirable Vue de Venise, (Na-
tional Gallery). Les gondoles y dansent ainsi
que des papillons sur l'eau chatoyante où se
ireflètent les palais de marbre, toutes les légen-
des de la cité des doges sont évoquées par ce
mirage qui s'enlève sur un fond de réalité.
Le portrait, la ligure,les lignes inoubliables,
;des yeux "aux regards qui vous suivent, des
:sourires à damner, des perfections humaines
7qu'ùn ne sait trop devoir à l'Art où à la chair
; fragile. C'est l'Innocence, de Greuze (coll. Ri-
ichard Wallace, Londres) enfant ingénue cares-
sant des tourterelles, l'inoubliable Joconde, de
:Léonard de Vinci (Louvre), pur chef-d'œuvre à
travers les siècles 1 Mistress Cari Meyer et ses
enfants, de John Sargent, la Madeleine, du
Guide (National Gallery), l'Etude de Fragonard
; (Louvre) légère et jolie, ouvrant des albutps,
Nelly O Brien, par Réynolda (Colî. H.. Wallace,
:Londres), la Jeune Fille au manchon, de Bou-
cher (Louvre), le fameux portrait de la mère
de Whistler, au Luxembourg, la Mistress Gra-
[hum, de Gainsborough (Musée national d'E-
dimbourg) campée, altière et provocante, contre
(une colonne, Mistress Mark Currie de Romney
.'(National Gallery), l'adorable Comtesse de
Grammont, de Lely (Hampton-Court), Mrs
,Scott Moncrieff, de Raeburn (Edimbourg) et le
Rubens recherché do Munich, Hélène Fo urment
;et son enfant.
Les visages masculins ont la virile ardeur et
ila sincérité, c'est M. Bertin, d'Ingres (Louvre),
il1 Officier de Rembrandt (La Haye), le Moltke de
[l'Allemand Lenbach, Oswolt Krel 4499, d'Al-
;bert Durer (Munich), le Duc d'Olivarès de Ve-
:lasquez, le Charles I" de Van Dyck (Louvre).
;V oici des tableaux de genre, que le passant
irougirait de ne oas avoir vus. Le prestigieux
('Débarquement de Cléopâtre, où Claude Lor-
rain a magnifié le génia lumineux de l'Ecole
française, le Sacre de Napoléon Il, par Louis
ÏDavid, le Gilles de Watteau, le « pouilleux » de
;Murillo, les Pèlerins d'Emmaiis, de Paul Véro-
fnèse, la Noce Juive à Tunis, d'Eugène Dela-
croix, la Visite de Metsu et la Vierge du Pé-
;rugin, toutes ces toiles en ce Louvre fastueux
;qui recèle bien les plus splendides joyaux des
siècles d'art.
Promenade d'un critique
Oui, mon ami a eu la troublante joie de
:présenter ces merveilles et de les commenter.
;Je ne connais pas plaisir meilleur que de
parler de ce qu'on admire, et de faire parta-
itager son ivresse à autrui. Ce rôle de cice-
rone est méritoire quand il s'exerce avec sin-
cérité et si la science en est irréprochable. Ici
:10 guide est sûr, honnête et clair.
J'ai connu Charles Moreau-Vauthier aux
Sablons, à l'orée de la fonblandéenne forêt
"où le même amour des rites sylvestres nous
lavait conduits tous deux à l'heure où, hési-:
flant encore entre la peinture qu'il cultiva chez
iGérôme et l'écriture qui le tentait, il venait
demander à la nature le recueillement et l'ins-
;piration définitive. Il débuta par des récits i
:d'ateli6r, ces au jour-le-jour des faméliques
lenteurs de fortune qui s'escriment du pin-
jceau ou de l'ébauchoir et dont l'heure de mi-
fsère prépare la minute de gloire.
: C'est un recueil vécu, d'une sobriété tou-
;chante. Puis vinrent des romans, la simple vie,.
¡Oll battent des cœurs féminins de sœurs et de
mères, où fleurissent des grâces d'épouses. Il y
inarre les espoirs quotidiens des âmes candideg,
lIes étapes de la conquête du bonheur. Enfin, iL
[devait se révéler l'historien critique qui, s'a -
Abreuvant aux sources qu'il connaît bien, en
dévoile aux profanes les bocages enchanteurs.
Son volume, les Portraits de l'enfant, aimable.
et disert, montre un soin particulier de la re
cherche dans le sentiment. Celui-ci, les Chel's-l
d'œuvre des grands maîtres est, je le répète, la:
ipromenade superbe où s'exerce à loisir la vi-'
'sion de l'amateur de peinture à travers toutes
les écoles et toutes les époques.
La famille Moreau-Vauthier
Charles Moreau-Vauthier appartient à une
« lignée ». Ces familles d'artistes se dévelôp-
'pent, se complètent, et de chacune de leurs
"mains jaillit quelque nouvelle œuvre. Vous
avez tous vu au Luxembourg ce qu'a laissé
iAugustin Moreau-Vauthier. L'enamourée Bac-
chante qui s'étend, impudique et lascive, non
loin des statuettes orfévrées par Falize ? Der-
nièrement encore, à l'Exposition d'art manuel:
du musée Galliéra, nous admirâmes ses ivoires,
menus, ses bijoux de finesse et de grâce. C'était
un maître dans le choix des délicatesses.
Ses deux fils ont débordé sa mémoire et as-
semblé les multiples talents qu'il évoqua.
Paul, le cadet, suit ses traces avec une fougue
'ardente. La fameuse Parisienne de la , porte
monumentale des Champs-Elysées en 1900 fit
couler beaucoup d'encre, mais regardez le
Bonaparte sec et glabre, aux yeux de fièvre et
d'audace, le Mur, palpitant de mort, de sang,
de vengeance, au Salon de 1902 et toute cette
sculpture en travail 1 Une des filles a épousé le
sculpteur Dagonet.
w. L'aîné, Charles, peintre, romancier, critique,
enveloppe et conclut, Nous portons tous l'em-
preinte de nos origines. L'atmosphère de sa
famille façonne les goûts et les sentiments. Les
Moreau-Vauthier viennent une fois de plus en
exemple à ces théories. Et le temps, subtil jar-
dinier, distinguera les fleurs de leurs par-
terres.
LÉON RIOTOR.
MENIENTO. - M. Léon Bollack, qui instaura La-
langue bleue, concurrente du Volapuk et de l'Es-
péranto, étudie ce que peut devenir notre langue
en cent ans. Que sera-t-ellevers2003711 estime que
les vulgarités, l'argot courant, la francisation des
mots étrangers, auront pris force de loi dans les
lexiques. La théorie semble juste, à l'avenir de
préciser.
Mme la comtesse de Tramar. qui dans l'Expia-
tion a fait preuve d'une brillante imagination,
donne aujourd'hui avec le Bréviaire de la Femme
un précis savant, curieux, des recettes de toilette,
et d'hygiène nécessaires au maintien de la beauté.
M. Albert Savine, écrivain de valeur, s'est fait
une spécialité de la traduction de3 meilleures œu-
vres étrangères. Il publie les livres que le prési-
dent Roosevelt a écrits sur la vie de Ranchero aux
Etats-Unis. Après La vie au Rancho, voici Chasses
et parties dr- chasses, pages fécondes en incidents
pittoresques et d'une ardente saveur.
On signale l'apparition prochaine des Chansons
du sang, d'Etienne Bellot, précédées de l'histori-
que du groupe des poètes-chansonniers soeiitMsfps.
Voh" à la 36 page
les Dernières Dépêches
de la 1"1.1.1it.
et la Revue des Journaux
du :r.na-tin.
AU MÉTRO
Depuis l'épouvantable catastrophe survenue
sur le Métropolitain le 10 août dernier, com-
bien de flots d'encre ont été versés pour adres-
ser à la compagnie des reproches, — certai-
nement mérités — mais à coup sûr un peu tar-
difs ! Que de réformes ont été mises en avant !
Une commission s'occupe de prendre des déci-
sions à cet égard.
Il n'est pas de jour qui ne soit enregistré
:l'avis d'un savant* l'opinion d'un ingénieur.
Les manchettes alléchantes de certains jour-
naux promettent des révélations sensationnel-
les ou des réformes remarquables. On raconte
ce que pense M. X. ou ce que dit M. Z.
Nous sommes allé demander son avis à beau--
coup plus modeste — sinon moins compétent
personnage. Nous avons questionné un contre-
.maître d'un chantier du Métro sur les réfor-
mes qu'il pensait devoir êtres apportées, soit,
dans la construction, soit dans l'exploitation
du Métro.
— On a parlé, nous dit-il, d'adjoindre à-
l'éclairage électrique un autre système d'éclai-
rage, l'éclairage par l'huile, je crois. Eh bien!
ce système est impossible sur le Métro: la lampe
à huile est trop fumeuse. Ajoutez à cela qu'en cas.
d'incendie, la fumée empêcherait de voir la lueur-
d'une lampe à huile. Je suis descendu, ajoute-t-il,;
à la station des Couronnes après la catastrophe.
J'avais une lanterne électrique, alimentée par des
accumulateurs; je no voyais pas à un mètre de-:
vant moi.
Ce qu'on veut, c'est empêcher que l'obscurité
puisse surprendre des voyageurs pris de panique.
rll y a un moyen très simple pour empêcher que
les fils des lampes soient brûlés, en cas d'incendie:
ou n'a. o;{ÙJà; fairo -paao&r tes fils 'lectricité qui sert à l'éclairage dans une gaine en
.terre réfractaire. Le fil, dans sa gaine, serait placé,
sur toute la longueur du souterrain, au bas de la;
voûte, près du sol. ■
De distance en distance des branchements parti-:
raient qui se rendraient aux lampas placées au
Commet de la voûte. Chacun de ses branchements
iserait relié au conducteur principal par un plomb
fusible. En cas d'incendie, un ou plusieurs de ces
:branchements pourraient être brûlés, mais non
tous. Il y aurait alors diminution d'éclairage,
.mais non obscurité.
On peut encore faire mieux: si l'on peut isoler'
,1e conducteur principal dans une gaîna de terre re-,
fractaire, de même il est possible d'isoler chaque
branchement. On peut même le faire passer dans
une gouttière creusée à cet effet dans l'épaisseur
de la voûte ; on peut encore garantir la lampe
électrique de la fusion ou de tout autre aeeident,.
en la plaçant dans une concavité de la voûte, et
en la protégeant par une épaisse lentille. Rien
,n'emp?A,herait, en outre, de placer un réflecteur au ,',
fond de la concavité. L'éclairage ne pourrait qu'y
'gagner.
Notre aimable interlocuteur nous entretient:
ensuite des escaliers de secours et des chemi- ;
nées d'appel, dont il a été qrestion ces jours
derniers :
— Que fait la fumée? dit-il. Elle monte. Si on
fait des cheminées d'appel, elle sortira par ces is-
sues, d'accord. Mais si l'on fait des escaliers de se-
cours, la fumée s'engouffrera dans ces nouvelles
'cheminées d'appel. A mon avis, l'escalier de se-
fcours doit être placé à l'endroit où so trouve une
cheminée d'appel. J'ajouterai qu'à mon avis cet
'escalier doit d'abord descendre, c'est-à-dire ame-
ner le voyageur à un niveau inférieur à celui do
'la ligne, pour ensuite remonter à l'air libre. De la 1
sorte on évite l'appel de fumée dans l'escalier de
Isecours.
Très judicieux t
Mais la compagnie voudra-t-elle faire les
frais qu'entraîneront nécessairement toutes ces
imodifications. C'est au Conseil municipal à l'y
obliger. Nous comptons sur son autorité pour
obtenir ces réformes, et bien d'autres encore.
- A. J.
;
COMBAT DANS LE SOMAULAND
(De notre correspondant particulier)
Obock, 18 août.
A 50 lieues d'Obbia, dans l'intérieur du pays,
.un grave combat a eu lieu, qui a duré jusqu'à
ila nuit.
Une forte avant-garde du Mad-Moullah a at-
taqué un poste d'Ascari. Des deux côtés, des
renforts sont arrivés, et une bataille en règle
s'est engagée. On en ignore encore les détails.
LES PETITES FILLES POLONAISES
(De notre correspondant particulier)
Posen, 18 août.
Les assises du royaume de Prusse ne doi-
vent guère être solides, L'existence de ce
royaume parait déjà gravement menacé par les
élèves d'une écoles de filles. A Gnesen la po-
lice a pénétré dans l'école primaire des filles et
à arrêté 50 petites Polonaises dont l'âge varie
entre 11 et 13 ans. Elles sont accusées d'avoir
conspiré contre la sécurité de l'Etat. Le pro-
cureur royal les poursuivra pour haute trahi-
son. Il est vrai qu'elles ont eu le tort de lire
des livres polonais.
-- » ————————————-
Toujours les prophéties après coup
(De notre correspondant particulier)
Hong-Kong, 18 août.
A Manila on a découvert dans un couvent un
vieux manuscrit bien curieux. Ce sont les mé-
moires écrits de la sœur Madeleine de la Cruz,
supérieure du couvent de Santa-Clara qui vi-
vait au 17e siècle et qui, depuis, a été béatifiée.
Elle y écrivait entre autres :
Une nation qui n'est pas encore formée et qui
sera l'ennemie de la religion catholique prendra
les Philippines aux Espagnols et en chassera les
moines.
Cette prédiction s'est accomplie le lendemain
de la guerre hisnano-américame, -
Mais la sœur Madeleine ajoute :
Il se passera quelque temps et l'Espagne re-
prendra possession de ces îles les moines feront
alors une rentrée triomphale.:
La deuxième partie du pronostic n'est guère,
près de se réaliser. Ce qui est plus probable
c'est que les Philippins chasseront et les.
Américains et ce qui reste encore de prêtres.;
Dans tous les cas l'homme qui a fabriqué le'
manuscrit qui est censé dn dix-septième siècle
a oublié un fait : la création de l'Eglise na-
tionale aux Philippines.
LES DEUX PLANS
Tandis que le gouvernement entasse contra-
dictions sur contradictions, reculades sur re-
culades et défaites sur défaites, en essayant de
:l'allier ses échecs, par des discours, des décla-
rations et des circulaires, les congrégations
d emeurent, invulnérables, n'ayant rien changé
à leur plan de bataille.
,à Il faut avouer que celui du cabinet, si d'a-
venture il existe, est bien maladroit. Rentre-t-
il dans la tactique de M. Combes de montrer
l.UX yeux de tous ses incertitudes, ses indéci-
sions et ses faiblesses ? Dans ce cas, il tout le
reconnaître, l'exécution est réussie et l'ennemi
s'amuse beaucoup de ses contremarches.
On ferme de petites chapelles, sans impor-
tance, mais nous avons le bonheur de garder
toujours Lourdes, Fourvières, la Salette, et le
Sacré-Cœur continue à dominer Paris, et la
France qui lui fut, par une loi d'aberration,
consacrée. On fait, paraît-il, la chasse aux con-
gréganistes, mais nous avons la joie de possé-
der encore cent mille congréganistes non sécu-
larisés sans compter les autres, et soixante
anille écoles congréganistes.
Cependant le gouvernemeni raît
tations d'énergie, mais c'est tout ce qu'il fait
hélas ! et nos adversaires sourient de ses fautes
-et so moquent de ses incertitudes. C'est qu'ils ont
un but bien défini un plan nettement tracé,
:qu'ils ne cachent point, dont ils se vantent et
îdont ils n'ont point l'intention do se départir.
Faire échec par tous les moyens à l'applica-
tion de la loi de 1901, employer tous les sub-
terfuges pour continuer à agir sur l'intelli-
gence des adultes par la confession, la prédi-
cation et la presse, et l'intelligence des enfants
;par l'enseignement, voilà à quoi tendent les
efforts des cléricaux.
Ceci connu du gouvernement, comment se
fait-il que M. Combes paraisse l'ignorer, et se
borne à foudroyer les plus irréconciliables en-
nemies de la république de périodes déclama-
toires. Les belles phrases soulèvent toujours
:des applaudissements, mais on demande des
actes. Et l'on en attend depuis si longtemps que
l'on commence à se demander où le président
du Conseil veut en venir ? - Ch. D.
:————————————— —————————————
LES VŒUX DES CONSEILS GÉNÉRAUX
Parmi les vœux votés dans leur séance d'hier par
les Conseils généraux, citons :
lIaute-Loire. — Le vœu que la réalisation
du projet tendant au désarmement général soit
ardemment poursuivie par le gouvernement et
par le Parlement.
Pas-de-Calais. — Vœu demandant l'ajourne-
ment au mois de septembre de l'appel des ré-
servistes.
Cher. — Vœu demandnnt qu'il soit créé un
impôt progressif et superposé sur le capital,
considérant que la caisse des retraites pour les
; invalides du travail ne peut être créée qu'en
faisant contribuer ceux qui sont dans des si-
tuations de fortune leur permettant de vivre
:du travail des autres sans en produire euxr
mêmes.
Morbihan. - Vœu signalant au gouverne-
ment le redoublement de la crise sardinière
sur les côtes bretonnes et priant de faire par-
venir la somme de 500.000 fr. votée par 1 e
Parlement.
Marne. — Vœux demandant l'abaissement de
-la taxe des lettres à dix centimes et de celle-
des cartes postales à cinq centimes, la régle-
mentation dé la vitesse des automobiles et la
faculté pour les juges de paix d'appliquer la
loi dj sursis.
Loire. — Vœu demandant que l'article 19
de la Convention de La Haye soit appliqué.
Yonne. — Vœu en faveur de l'arbitrage in-
ternational pour régler les conflits entre na-
tions. Adresse invitant le gouvernemeni à assu-
rer, dans un avenir prochain, la suppression
.de toutes les congrégations, même celles encore
'autorisées. Vœu réclamant la séparation des
Eglises et de l'EtaL
————————————— —————————————.
LES INTERPRÈTES MILITAIRES ALLEMANDS
(De notre correspondant parliculier)
Berlin, 18 août.
Jusqu'ici on no connaissait pas, dans l'ar-
mée allemande, les interprètes militaires. Le
haut commandement se fiait aux connaissan-
ces linguistiques des chefs de troupe. Mais on
a trouvé que l'étude des langues est, depuis
quelque temps, moins répandue qu'autrefois
iparmi les officiers allemands.
L'empereur a donc donné l'ordre de créer
des cours de langues pour former des inter-
prètes. Dans les corps d'armée de l'Est on en- :
seignera le russe et le polonais, dans les autres
île français, l'anglais et aussi l'italien. Les offi-
ciers qui feront des progrès recevront des
bourses de voyage.
- --
L'INSURRECTION EN MACÉDOiNE
Soiia, 18 août.
Le mémoire remis aux grandes puissances au
sujet de l'attitude de le Turquie se borne à ci-
ter des faits, des dates avec détails, sans de-
mander une intervention.
- Le commissaire turc a dit que son gouverne-
ment répondrait par une déclaration conci-
liante.
L'assemblée des macédoniens a adopté, hier,
une résolution déclarant qu'elle considère l'in-
surrection comme une affaire nationale bul-
gare.
Sofia, 18 août.
On rapporte que trois bataillons de Turcs,,
ayant attaqué un millier d'insurgés près de Mo-
nastir, furent repoussés après six heures d'un
combat opiniâtre, avec une perte de 210 hom-
mes.
Les pertes des insurgés sont inconnues.
Constantinople, 18 août.
L'escadre russe est attendue demain dans
l'après-midi au large du littoral turc.
Vingt-quatre bataillons de rédifs ont été ap-
pelés sous les drapeaux dans les vilayets d'A-
natolie.
Cologne, 18 août.
On télégraphie de Belgrade à la Gazette de
Cologne :
« Sur l'intervention de la légation turque, on
a arrêté l'expédition d'arme3 et de munitions
qui devaient être envoyées en Bulgarie. L'ex-
péditeur a été condamné, pour exportation pro-
hibée, à 20,000 d'amende.
« Une grande réunion doit se tenir prochai-
nement à Belgrade, pour délibérer sur la posi-
tion que doit prendre la Serbie en co qui con-
cerne les troubles do MacédoiDCh
r L'AFFAIRE HUMBERT;
HUITlÉME AUDIENCE
Divagations. - A quand la révélation
du secret ? - Le dernier témoin. --
On reparle des Crawford. — Le ré-.j
quisitoire de M. Bicndel. — L'his-
toire de l'héritage. - Un châ-
teau en Espagne. — Craw-
ford maître d'école. — Les
droits de succession.
Ii était inévitable que le roman auquel
-nous avons fait allusion hier et dans lequel
Mme X. la femme du grand industriel dé-i
cédé qui aurait joué dans le drame de Ba-
gnères-de-Bigorre le rôle incestueux que!
l'on sait, aurait avancé des millions à Mme
Humbert pour lui faciliter ses escroqueries,
ce qui entre parenthèse l'eut rendue com-,
plice des agissements de la grande Thérèse,
il était inévitable,dis-je, que ce roman net
fît pas parler de lui au dehors, et n'ame-
nât de vives protestations. Cesprotestations
ont dû se produire, car ceux qui l'avaient
publié en donnant le nom de Mme X.
ont battu hier-piteusement en retraite,;
désavoué le roman et exprimé tous leurs
regret à Mme X. et à sa famille.
Pour tout dire, il est grand temps queii
l'affaire Humbert se termine, car tout le
monde semble gagner la maladie cérébrale5
de Mme Humbert età divaguer comme ella;
a divagué à la fin de l'audience de lundi.
la grande stupéfaction des jurés eux-mê^
_m.es aux semblaient se demander en econ-;
tant les incohérences de l'accusée si eUe:
était folle ou si elle se moquait largement
d'eux.
En prévision du réquisitoire de l'avocat
général et de la promesse faite la veille par.;
Mme Humbert qu'elle parlerait et dirait
tout, dès que M, Blondel eût fait connaître;
ses conclusions de condamnation, la salle',
était bien bondée à éclater. Je dois dire que'
dans le public on se montrait sceptique à
l'égard de Mme Humbert et qu'on se de-j,
mandait si, suivant la tactique qui lui est'
familière, elle n'allait pas remettre sa con-
fession in-extrcmis après la plaidoirie de
son avocat, Me Labori et même après les
plaidoiries de lcs Hesse et Clunet, pour les
frères Daurignac.
Un plaisant faisait même observer que
Mme Humbert était capable de réserver ses
dernières explications pour la Cour de cas-
sation au cas où elle serait condamnée et
qu'elle chargerait son avocat de révéler à
la Cour suprême le secret qui a inspiré;
à Fursy un si désopilant pot-pourri.
Mais à ce plaisant on objectait que M3 La-,
bori avait promis de révéler lui-même le
nom du personnage mystérieux qui se ca-
che ou se cachait derrière le pseudonyme
de Crawford, et que par conséquent, ,Ip(i
ce fut par Mme Humbert ou pas son dé-
fenseur, le terrible imbroglio serait enfin
dénoué d'ici à vingt-quatre heures.
Dans le prétoire, les avocats discutaient
sur l'attitude qu'aurait Mme Humbert pen-
dant le réquisitoire de M. Blondel et on
était à peu près d'accord pour dire que si
l'accusée avec son prurit de langue s'es-
sayait à attaquer l'avocat général, il trou-
verait un esprit peu facile à démolir et qui
moins courtois que le président Bonnets
saurait, énergiquement remettre à sa place
la Grande Thérèse.
Bref on présageait une audience nwuve-
mentée et c'est dans ces conditions que)
l'audience s'est ouverte à midi par l'audi-1
tion du dernier témoin, M. Eugène Bern.:
hardt, frère de M. Paul Bernhardt ancien
directeur de la Banque des valeurs indus"
trielles qui s'est suicidé après sa ruine*
M. Eugène Bernhardt
Dès que M. Eugène Bernhard est à la
barre, Mme Humbert lui pose la question
suivante :
— Est-il exact que MM. Camps, Fauré, Am
gues et Favantier étaient contre vous à Nar-'
bonne et voulurent vous empêcher d'acheter
le domaine de Celcyran.
M. Bernhardt. — Avant de répondre, •<* de-
mande à prêter serment.
Le président. -- Vous ne pouvez prête, ar-
ment, vous n'êtes pas cité comme témoin ot,
n'êtes entendu ici qu'en vertu de mon pouvoii
discrétionnaire.
M. Bernhardt. — C'est fort regrettable.
M° Labori. — Votre parole de galant homme
suffit.
M. Bernhard. — Voici comment j'ai connu
quelque peu la famille Humbert. J'étais négo-
ciant en cafés et mon frère banquier. En 1891
mon frère eut la malencontreuse idée de fon-
der la Banque des valeurs industrielles. 11 s'as-
socia avec M. Carpentier.
Mme Humbert interrompt le témoin. Le
.président l'arrête et M. Bernhardt lui-mêm.
proteste :
— Permettez, madame, vous m'avez fait ve-
nir ici pour parler. Jo parlerai. Jamais ie n'ai
connu MM. Camps, Amigues, Faure et Fava-
tier. Ce que je puis dire, c'est que mon frère 1
rendu de grands services à la famille Humbert
et que Mme Humbert a attaqué sa mémoire en
disant qu'il avait fait de l'usure.
Mme Humbert. — Je n'ai jamais dit ça, c'osl
M. Linol.
Frédéric Humbert. — C'est exact.
M. Bernhardt. — Jamais M. Linol n'a pi
tenir ce propos sur mon frère.
Le témoin sort une lettre de sa poche e1
se prépare d'en donner lecture lorsque le
président lui fait observer que la loi d op-
pose à cette lecture.
Sur une observation de Mme HumbCl'
M. Bernhardt répond :
— Madame Humbert je n'ai jamais été voir*
ami.
M* Labori. — Veuillez faire passer la lettre
de votre frère au président.
Mme Thérèse. — Il y a deux lettres.
M, Bernhardt. — Je n'en connais qu'une.
Le président donne lecture de la lettre df
M. Paul Bernhardt, écrite la veille de sa
mort et dans laquelle il expose qu'il a, peu
dant vingt ans, rendu des grands services
aux Humbert, a toujours confiance en eux
et espère que lorsqu'ils auront touché leui
héritage, ils n'oublieront pas sa famille.
M. Frédéric Humbert. — Nous n'avons eu
qu'à nous louer, en effet, de M. Bernhardt, et
M. Linol a commis une infamie en disant qu'il
a fait do l'usure contre nous.
Le témoin n'a pas vu de titres
Mme Humbert demande au témoin s'il a
vu dans le coffre-fort de son frère trois ti-
tres lui appartenant. - - ,\
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REDACTION: 14, rue du IlaU, Paris
Dei à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du malin
N.12214. — Jeudi 20 Août 1903
3 FRUCTIDOR AN 111
ADMINISTRATION ; 14, rue du llail r -
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NOS LEADERS
Le dernier avatar
de M. Déroulède
Evidemment, il pourrait paraître
peu utile de consacrer, ne fut-ce que
quatre lignes, au banquet bonapartiste
qui, conformément aux traditions, a
eu lieu, le 15 août, au Salon des Fa-
milles. Le Salon des Familles en a vu
bien d'autres. Qu'est-ce que cela peut
nous faire que les membres des comi-
tés plébiscitaires — c'est ainsi qu'ils
s'appellent entre eux — se soient réu-
nis pour, inter pocula, écouter la lec-
ture d'une lettre du prince Victor et
y répondre par l'envoi d'un télégram-
me de dévouement ? Le prince Victor
n'est pas dangereux et, croyons-nous,
ne songe guère à l'être.
Il paraît qu'à ce banquet intime, un
M. de Peyramale se serait attaché à
« laver - la mémoire de Napoléon III
des actes qui lui sont reprochés : le 2
- décembre et Sedan ». Napoléon Ier, qui
se connaissait en linge sale, disait qu'il
faut toujours le laver en famille ; ce
bon M. de Peyramale s'est souvenu de
ce précepte. Passons. Tout cela est in-
existant.
La seule chose qui me semble digne
de remarque, c'est qu'à ces agapes bo-
napartistes, on ait lu des télégrammes
d'excuses de MM. Lasies, Quentin-
Bauchart, Millevoye et Déroulède.
Le bonapartisme de MM. Millevoye,
Quentin-Bauchart et Lasies est notoire,
mais l'adhésion de M. Déroulède à une
manifestation nettement impérialiste
et organisée en faveur de la candida-
ture du prince Victor, mérite d'être si-
gnalée. M. Déroulède est donc bona-
partiste à présent? Tiens ! tiens! tiens!
***
Certes, cela ne saurait nous étonner;
même nous avouerons sans ambages
que nous avons toujours pensé que cela
devait finir comme ça. Mais combien
d'opinions politiques M. Déroulède a-
t-il déjà tuées sous lui ? Nous l'avons,
d'abord, connu gambettiste. Puis,
ayant fondé sa Ligue des Patriotes dans
laquelle, disait-il : «républicain,bona-
partiste, royaliste, n'étaient que des
prénoms ; patriote étant le nom de fa-
mille » — ce qui nous a mis en juste
défiance — il continuait de fréquen-
ter ce qu'on appelait alors les oppor-
tunistes. Aux élections législatives
complémentaires de décembre 1885,
il figura sur la liste qui battit, au se-
cond tour de scrutin, la liste radicale.
Deux ans plus tard, il était violem-
ment boulangiste et, rompant avec
tous ses anciens amis, il menait une
ardente campagne pour le maintien à
l'Elysée de feu Jules Grévy, même
avec Wilson; pourvu que ce fut égale-
ment avec le général Boulanger. Pos-
térieurement, il semblait s'être aco-
quiné de façon définitive à ce qu'il ap-
pelait : La République plébiscitaire ;
il en exposait les beautés, en expli-
quait le mécanisme. Crac! voilà que
du jour au lendemain, tout cela est
lâché. M..Déroulède, décidément, s'en-
rôla parmi les bonapartistes.
J'ai dit que ce nouvel avatar n'avait
pas dé quoi nous surprendre. Quand
on n'a point, ppur se diriger dans la
vie, un principe, une foi ; quand on se
laisse, comme une épave par les flots
qui vont et viennent, ballottèr par le
flux et le reflux des événements con-
tradictoires; quand, à défaut d'idée,
on cherche un homme; qnand on a
successivement crié : Vive Gambetta !
Vive Grévy ! Vive Boulanger ! Vive Ro-
get! Vive n'importe qui! fatalement on
doit en arriver à crier : Vive le prince
Victor 1
Que M. Déroulède en soit là, à
l'heure actuelle, c'est plutôt triste. Car,
à vrai dire, il avait quelque chose de
sympathique en lui, jadis, ce grand
diable dégingandé, à longue redingote.
Je ne suis point de ceux qui renient
leurs engouements passés. De toutes
les femmes que j'ai aimées, même
quand elles n'en valaient pas la peine,
je garde le souvenir, comme on garde
une fleur fanée entre les feuillets d'un
livre. Je me souviens parfaitement
ravoir, vers seize ou dix-sept ans, été
si emballé par les « chants du soldat »
que — fatale mémoire ! — j'en récite-
rais encore des morceaux entiers, tout
d'une haleine. Même, je crois bien
avoir,de très bonne foi,trouvé beau cet
Hetman joué, à cette époque à l'Odéon,
et qui est bien,certes, la chose la plus
ridicule du monde.
, Que voulez-vous ? J'étais très jeune ;
je sortais du siège de Paris ; j'avais eu
faim ; j'avais eu froid; le tonnerre des
combats avait empli mes oreilles; les
obus allemands avaient passé en sif-
flant au-dessus de ma tête ; j'avais,
dans mon cœur d'enfant, la douleur
et la rage des vaincus ; mon espérance,
ma volonté, étaient d'être un jour un
des soldats de la revanche, et tous mes
rêves d'avenir tenaient en celui-ci :
tomber un jour de victoire, en voyant
le drapeau français flotter de nouveau
sur les remparts de Strasbourg recon-
quis. Etonnez-vous donc, après cela,
que les « Chants du soldat » aient ému
> mon P\9c,. Est-ce que, au même temj^
tout le monde n'a pas cru à la « Fille
de Roland » ? Et pourtant, les vers de
M. de Bornier n'étaient ni meilleurs ni
pires que ceux de M. Déroulède. ,
Celui-ci apparaissait aux jeunes
imaginations comme le barde de l'or-
gueil national ; il s'exprimait en un
français bizarre, invraisemblablement
incorrect, et était poète comme un
lauréat du prix Sully-Prudhomme,
mais qu'importe? Il brandissait un
drapeau et lançait, sonore, le cri de
ralliement.
***
Quel piédestal il aurait, maintenant,
s'il avait persévéré dans cette attitude !
A quelle dégringolade lamentable, au
contraire, avons-nous assisté ! Qu'est
devenu l'idéal patriotique auquel M.
Déroulède prétendait tout sacrifier?
M. Déroulède pourrait-il se dire en-
core patriote, alors qu'il fraternise
avec ceux qui ont entrepris de réha-
biliter la mémoire de Napoléon III ?
Laver son linge sale en famille, c'est
fort bien; mais il y a des lessivages
impossibles; on a beau savonner,
frotter, battre, rincer, tordre, la tache
demeure ineffaçable, la tache de boue,
la tache de sang, que les flots de la
mer, comme dit Shakespeare, ne par-
viendraient pas à effacer.
Est-ce qu'il est possible d'être en
même temps bonapartiste et patriote?
Je réDonds : non.
En 1871, l'Assemblée de Bordeaux a
déclaré Napoléon III « responsable de
la ruine et du démembrement de lai
patrie ». Ce vote subsiste, cette flétris-
sure est indélébile. Personnellement,
malgré mon enthousiasme juvénile
pour les « Chants du soldat », j'ai tou-
jours refusé de faire partie de la Ligue
des patriotes — parce qu'on y admet-
tait des bonapartistes. Pour être bona-
partiste après Waterloo et Sedan, il
faut ne pas avoir l'âme française. Je ne
serais nullement étonné si Guillaume II
était bonapartiste — comme l'est au-
jourd'hui M. Déroulède, hélas!
Lucien Victor-Meunier.
VICTOIRE DES PÈLERINS
Victoire des cléricaux organi-
sateurs de pèlerinages ; les trains
pour Lourdes vont se mettre en
route, bondés de malades divers,
et il. y aura
scrofules.
M. Combes a, paraît-il, acquiescé une;
'fois encore aux doléances « de sénateurs et
de députés )) pour qui la prospérité de la
:grotte passe avant l'exécution de la loi ; et
,grâce au président du conseil, cette année
encore, l'industrie des miracles, malgré les
sourires des uns, malgré les indignations
des autres, s'exercera, avec un paisible
aplomb.
C'est tout de même un peu raide : on se
rue sur de petites chapelles de quartiers où
quelques vieilles dévotes prenaient plaisir
à allumer des ciergés et à chanter ; « Sau-
vez Rome. », et on respecteinfiniment et;
-on salue avec considération le vaste com-i
imerce de guérisons surnaturelles qui, du
nord au sud, et de l'est à l'ouest, draine la
quasi-unanimité des bons jobards disposés:
ià se tremper dans de l'eau sale et froide
pour atténuer leurs rhumatismes.
M. le président du conseil voudra bien
nous permettre de lui dire que son attitude
persistante dans cette question de Lourdes
est faite pour lui attirer Iutre chose quej
des compliments de la part des républi-;
cains qui lui ont confié la direction du gou-
vernement pour nous délivrer des moines,
et non pour déférer aux réquisitions des;
ifrocards et de leurs amis: En France la loi'
[n'a pas été votée pour ces départements-ci
ou ces départements-là, mais pour tout le
territoire. Nous conseillons vigoureuse-
fment à M. Combes, s'il en est temps encore,
[de se dégager des promesses qu'il a pu
faire à tels ou tels, en faveur de telles ou
'telles piscines.
Nous n'aimons pas bien que des moines
aient eu. assez d'influence pour déterminer,
:auprès du président du conseil une démar-
che de sénateurs ou de députés; nous ai-
Unons encore moins que le président du
conseil ait eu la faiblesse grande de ne
point résister, comme c'était son devoir
strict, à une pareille démarche.
11 ■
UNE OPÉRATION DANS LE SUD-ALGÉRIEN
Alger, 18 août.
Au retour de la colonne qui opéra récem-
ment à Bechar, l'occupation de BentZireg fut
décidée. Au moment de l'occupation, le géné-
ral commandant la division d'Oran, a réclamé
une force mobile, et le général Caze a donné
des ordres pour qu'on envoie à ce port un es-
cadron de chasseuis et un peloton de spahis.
Le départ de l'escadron d'Aïn Sefra ne doit
être que l'exécution de ce mouvement. Il est,
:d'ailleurs, exact que de nouvelles harka bera-
bers ont été signalées ces temps derniers comme
se dirigeant vers la Zousfanâ.
LA MAISON DE DICKENS
(De notre correspondant particulier)
Londres, 18 août.
La maison sise n° 387 dans la Commercial
Road à Portsmouth où le romancier Charles
Dickens est né,sera vendue prochainement aux
enchères. Un comité s'est formé dans le but de
l'acquérir et d'y créer un musée Dickens.
LES PHARES A ACETYLENE
(De notre correspondant particulier)
Rome, 18 août.
Les expériences avec le gaz acétylène pour
l'illvmination des phares sont terminées et ont
donné d'excellents résultats.
Un des grands avantages du nouveau sys-
tème c'est qu'on n'a pas besoin de faire surveil-
ler constamment le fonctionnemeat M Aa lu-
mière.
LE RAPPEL
ARTISTIQUE ET liTTÉRAl-RE
Les chefs-d'œuvre de la peinture. -
Paysages et figures. — Charles Mo-
reau-Vauthier, critique d'art. —
Une famille d'artistes
J'ai pu, grâce à mon ami Charles Moreau-
Vauthier, grâce aussi à une notable maison
d'éditions de la rive gauche, où la perfection
de la facture le dispute à la variété des séries,
parcourir les collections, les musées d'Europe,
en admirer les plus célèbres toiles, sans bou-
ger de mon fauteuil.
C'est un plaisir dont je les remercie. Il ne.
saurait y avoir d'universelle jouissance en une
courte vie. Grâce soit donc rendue à ceux qui,
abrégeant la distance et devançant le temps,
apportent à nos yeux les fleurs des siècles et du
génie !
Les plus célèbres toiles
Dans ces Chefs-d'œuvre des grands maîtres.
variés, et passant au gré de la renommée du
bitumineux Velasquez au fantomal Whistler,
des ombres noires de l'Escurial aux buées ro-
ses et dorées du grand canal vénitien, la pré-;
sentation des hommes était ardue. Pas d'école
à suivre, pas de théories à appliquer. Les noti-
ces s'échaffaudaient sur la seule valeur consa-
crée par les ans, Charles Moreau-Vauthier s'en
est tiré à son honneur. Effleurant le passé glo-
rieux do chaque nation, il a présenté dans
chacune le maître incontesté. Les plus fameux
tableaux sont là, et s'il faut en espérer d'autres
parmi les modernes, Puvis de Chavannes,Car-
rière, Direiks, Zuloaga, j'en passe, comptons
qu'ils ne seront pas oubliés dans les séries sui-
vantes.
Quelle richesse dans ce paysage. Des vaches
,au bord des tlots, du hollandais Cuyp (National
Gallery, Londres) paisibles et reposantes,Moulin
à vent de Ruysdaël (musée Van-der-Hoop.Ams-
.terdam) et un autre moulin d'Hobbema, blotti
,sous les arbres comme un nid (Louvre) près de
la rivière tranquille,et ce lac,idyllique du bon-
homme Corot (Louvre) où butine la lumière,
où le rêve vogue dans le brouillard léger du
matin ! Et cette merveilleuse Cathédrale de Sa-
,lisbury (South Kensington),
L'Anglais Constable fait « dans un élan
i commun s'élancer vers le ciel l'œuvre des hom-
mes et l'oeuvre de la Nature ». Turner apparaît
alors avec une admirable Vue de Venise, (Na-
tional Gallery). Les gondoles y dansent ainsi
que des papillons sur l'eau chatoyante où se
ireflètent les palais de marbre, toutes les légen-
des de la cité des doges sont évoquées par ce
mirage qui s'enlève sur un fond de réalité.
Le portrait, la ligure,les lignes inoubliables,
;des yeux "aux regards qui vous suivent, des
:sourires à damner, des perfections humaines
7qu'ùn ne sait trop devoir à l'Art où à la chair
; fragile. C'est l'Innocence, de Greuze (coll. Ri-
ichard Wallace, Londres) enfant ingénue cares-
sant des tourterelles, l'inoubliable Joconde, de
:Léonard de Vinci (Louvre), pur chef-d'œuvre à
travers les siècles 1 Mistress Cari Meyer et ses
enfants, de John Sargent, la Madeleine, du
Guide (National Gallery), l'Etude de Fragonard
; (Louvre) légère et jolie, ouvrant des albutps,
Nelly O Brien, par Réynolda (Colî. H.. Wallace,
:Londres), la Jeune Fille au manchon, de Bou-
cher (Louvre), le fameux portrait de la mère
de Whistler, au Luxembourg, la Mistress Gra-
[hum, de Gainsborough (Musée national d'E-
dimbourg) campée, altière et provocante, contre
(une colonne, Mistress Mark Currie de Romney
.'(National Gallery), l'adorable Comtesse de
Grammont, de Lely (Hampton-Court), Mrs
,Scott Moncrieff, de Raeburn (Edimbourg) et le
Rubens recherché do Munich, Hélène Fo urment
;et son enfant.
Les visages masculins ont la virile ardeur et
ila sincérité, c'est M. Bertin, d'Ingres (Louvre),
il1 Officier de Rembrandt (La Haye), le Moltke de
[l'Allemand Lenbach, Oswolt Krel 4499, d'Al-
;bert Durer (Munich), le Duc d'Olivarès de Ve-
:lasquez, le Charles I" de Van Dyck (Louvre).
;V oici des tableaux de genre, que le passant
irougirait de ne oas avoir vus. Le prestigieux
('Débarquement de Cléopâtre, où Claude Lor-
rain a magnifié le génia lumineux de l'Ecole
française, le Sacre de Napoléon Il, par Louis
ÏDavid, le Gilles de Watteau, le « pouilleux » de
;Murillo, les Pèlerins d'Emmaiis, de Paul Véro-
fnèse, la Noce Juive à Tunis, d'Eugène Dela-
croix, la Visite de Metsu et la Vierge du Pé-
;rugin, toutes ces toiles en ce Louvre fastueux
;qui recèle bien les plus splendides joyaux des
siècles d'art.
Promenade d'un critique
Oui, mon ami a eu la troublante joie de
:présenter ces merveilles et de les commenter.
;Je ne connais pas plaisir meilleur que de
parler de ce qu'on admire, et de faire parta-
itager son ivresse à autrui. Ce rôle de cice-
rone est méritoire quand il s'exerce avec sin-
cérité et si la science en est irréprochable. Ici
:10 guide est sûr, honnête et clair.
J'ai connu Charles Moreau-Vauthier aux
Sablons, à l'orée de la fonblandéenne forêt
"où le même amour des rites sylvestres nous
lavait conduits tous deux à l'heure où, hési-:
flant encore entre la peinture qu'il cultiva chez
iGérôme et l'écriture qui le tentait, il venait
demander à la nature le recueillement et l'ins-
;piration définitive. Il débuta par des récits i
:d'ateli6r, ces au jour-le-jour des faméliques
lenteurs de fortune qui s'escriment du pin-
jceau ou de l'ébauchoir et dont l'heure de mi-
fsère prépare la minute de gloire.
: C'est un recueil vécu, d'une sobriété tou-
;chante. Puis vinrent des romans, la simple vie,.
¡Oll battent des cœurs féminins de sœurs et de
mères, où fleurissent des grâces d'épouses. Il y
inarre les espoirs quotidiens des âmes candideg,
lIes étapes de la conquête du bonheur. Enfin, iL
[devait se révéler l'historien critique qui, s'a -
Abreuvant aux sources qu'il connaît bien, en
dévoile aux profanes les bocages enchanteurs.
Son volume, les Portraits de l'enfant, aimable.
et disert, montre un soin particulier de la re
cherche dans le sentiment. Celui-ci, les Chel's-l
d'œuvre des grands maîtres est, je le répète, la:
ipromenade superbe où s'exerce à loisir la vi-'
'sion de l'amateur de peinture à travers toutes
les écoles et toutes les époques.
La famille Moreau-Vauthier
Charles Moreau-Vauthier appartient à une
« lignée ». Ces familles d'artistes se dévelôp-
'pent, se complètent, et de chacune de leurs
"mains jaillit quelque nouvelle œuvre. Vous
avez tous vu au Luxembourg ce qu'a laissé
iAugustin Moreau-Vauthier. L'enamourée Bac-
chante qui s'étend, impudique et lascive, non
loin des statuettes orfévrées par Falize ? Der-
nièrement encore, à l'Exposition d'art manuel:
du musée Galliéra, nous admirâmes ses ivoires,
menus, ses bijoux de finesse et de grâce. C'était
un maître dans le choix des délicatesses.
Ses deux fils ont débordé sa mémoire et as-
semblé les multiples talents qu'il évoqua.
Paul, le cadet, suit ses traces avec une fougue
'ardente. La fameuse Parisienne de la , porte
monumentale des Champs-Elysées en 1900 fit
couler beaucoup d'encre, mais regardez le
Bonaparte sec et glabre, aux yeux de fièvre et
d'audace, le Mur, palpitant de mort, de sang,
de vengeance, au Salon de 1902 et toute cette
sculpture en travail 1 Une des filles a épousé le
sculpteur Dagonet.
w. L'aîné, Charles, peintre, romancier, critique,
enveloppe et conclut, Nous portons tous l'em-
preinte de nos origines. L'atmosphère de sa
famille façonne les goûts et les sentiments. Les
Moreau-Vauthier viennent une fois de plus en
exemple à ces théories. Et le temps, subtil jar-
dinier, distinguera les fleurs de leurs par-
terres.
LÉON RIOTOR.
MENIENTO. - M. Léon Bollack, qui instaura La-
langue bleue, concurrente du Volapuk et de l'Es-
péranto, étudie ce que peut devenir notre langue
en cent ans. Que sera-t-ellevers2003711 estime que
les vulgarités, l'argot courant, la francisation des
mots étrangers, auront pris force de loi dans les
lexiques. La théorie semble juste, à l'avenir de
préciser.
Mme la comtesse de Tramar. qui dans l'Expia-
tion a fait preuve d'une brillante imagination,
donne aujourd'hui avec le Bréviaire de la Femme
un précis savant, curieux, des recettes de toilette,
et d'hygiène nécessaires au maintien de la beauté.
M. Albert Savine, écrivain de valeur, s'est fait
une spécialité de la traduction de3 meilleures œu-
vres étrangères. Il publie les livres que le prési-
dent Roosevelt a écrits sur la vie de Ranchero aux
Etats-Unis. Après La vie au Rancho, voici Chasses
et parties dr- chasses, pages fécondes en incidents
pittoresques et d'une ardente saveur.
On signale l'apparition prochaine des Chansons
du sang, d'Etienne Bellot, précédées de l'histori-
que du groupe des poètes-chansonniers soeiitMsfps.
Voh" à la 36 page
les Dernières Dépêches
de la 1"1.1.1it.
et la Revue des Journaux
du :r.na-tin.
AU MÉTRO
Depuis l'épouvantable catastrophe survenue
sur le Métropolitain le 10 août dernier, com-
bien de flots d'encre ont été versés pour adres-
ser à la compagnie des reproches, — certai-
nement mérités — mais à coup sûr un peu tar-
difs ! Que de réformes ont été mises en avant !
Une commission s'occupe de prendre des déci-
sions à cet égard.
Il n'est pas de jour qui ne soit enregistré
:l'avis d'un savant* l'opinion d'un ingénieur.
Les manchettes alléchantes de certains jour-
naux promettent des révélations sensationnel-
les ou des réformes remarquables. On raconte
ce que pense M. X. ou ce que dit M. Z.
Nous sommes allé demander son avis à beau--
coup plus modeste — sinon moins compétent
personnage. Nous avons questionné un contre-
.maître d'un chantier du Métro sur les réfor-
mes qu'il pensait devoir êtres apportées, soit,
dans la construction, soit dans l'exploitation
du Métro.
— On a parlé, nous dit-il, d'adjoindre à-
l'éclairage électrique un autre système d'éclai-
rage, l'éclairage par l'huile, je crois. Eh bien!
ce système est impossible sur le Métro: la lampe
à huile est trop fumeuse. Ajoutez à cela qu'en cas.
d'incendie, la fumée empêcherait de voir la lueur-
d'une lampe à huile. Je suis descendu, ajoute-t-il,;
à la station des Couronnes après la catastrophe.
J'avais une lanterne électrique, alimentée par des
accumulateurs; je no voyais pas à un mètre de-:
vant moi.
Ce qu'on veut, c'est empêcher que l'obscurité
puisse surprendre des voyageurs pris de panique.
rll y a un moyen très simple pour empêcher que
les fils des lampes soient brûlés, en cas d'incendie:
ou n'a. o;{ÙJà; fairo -paao&r tes fils
.terre réfractaire. Le fil, dans sa gaine, serait placé,
sur toute la longueur du souterrain, au bas de la;
voûte, près du sol. ■
De distance en distance des branchements parti-:
raient qui se rendraient aux lampas placées au
Commet de la voûte. Chacun de ses branchements
iserait relié au conducteur principal par un plomb
fusible. En cas d'incendie, un ou plusieurs de ces
:branchements pourraient être brûlés, mais non
tous. Il y aurait alors diminution d'éclairage,
.mais non obscurité.
On peut encore faire mieux: si l'on peut isoler'
,1e conducteur principal dans une gaîna de terre re-,
fractaire, de même il est possible d'isoler chaque
branchement. On peut même le faire passer dans
une gouttière creusée à cet effet dans l'épaisseur
de la voûte ; on peut encore garantir la lampe
électrique de la fusion ou de tout autre aeeident,.
en la plaçant dans une concavité de la voûte, et
en la protégeant par une épaisse lentille. Rien
,n'emp?A,herait, en outre, de placer un réflecteur au ,',
fond de la concavité. L'éclairage ne pourrait qu'y
'gagner.
Notre aimable interlocuteur nous entretient:
ensuite des escaliers de secours et des chemi- ;
nées d'appel, dont il a été qrestion ces jours
derniers :
— Que fait la fumée? dit-il. Elle monte. Si on
fait des cheminées d'appel, elle sortira par ces is-
sues, d'accord. Mais si l'on fait des escaliers de se-
cours, la fumée s'engouffrera dans ces nouvelles
'cheminées d'appel. A mon avis, l'escalier de se-
fcours doit être placé à l'endroit où so trouve une
cheminée d'appel. J'ajouterai qu'à mon avis cet
'escalier doit d'abord descendre, c'est-à-dire ame-
ner le voyageur à un niveau inférieur à celui do
'la ligne, pour ensuite remonter à l'air libre. De la 1
sorte on évite l'appel de fumée dans l'escalier de
Isecours.
Très judicieux t
Mais la compagnie voudra-t-elle faire les
frais qu'entraîneront nécessairement toutes ces
imodifications. C'est au Conseil municipal à l'y
obliger. Nous comptons sur son autorité pour
obtenir ces réformes, et bien d'autres encore.
- A. J.
;
COMBAT DANS LE SOMAULAND
(De notre correspondant particulier)
Obock, 18 août.
A 50 lieues d'Obbia, dans l'intérieur du pays,
.un grave combat a eu lieu, qui a duré jusqu'à
ila nuit.
Une forte avant-garde du Mad-Moullah a at-
taqué un poste d'Ascari. Des deux côtés, des
renforts sont arrivés, et une bataille en règle
s'est engagée. On en ignore encore les détails.
LES PETITES FILLES POLONAISES
(De notre correspondant particulier)
Posen, 18 août.
Les assises du royaume de Prusse ne doi-
vent guère être solides, L'existence de ce
royaume parait déjà gravement menacé par les
élèves d'une écoles de filles. A Gnesen la po-
lice a pénétré dans l'école primaire des filles et
à arrêté 50 petites Polonaises dont l'âge varie
entre 11 et 13 ans. Elles sont accusées d'avoir
conspiré contre la sécurité de l'Etat. Le pro-
cureur royal les poursuivra pour haute trahi-
son. Il est vrai qu'elles ont eu le tort de lire
des livres polonais.
-- » ————————————-
Toujours les prophéties après coup
(De notre correspondant particulier)
Hong-Kong, 18 août.
A Manila on a découvert dans un couvent un
vieux manuscrit bien curieux. Ce sont les mé-
moires écrits de la sœur Madeleine de la Cruz,
supérieure du couvent de Santa-Clara qui vi-
vait au 17e siècle et qui, depuis, a été béatifiée.
Elle y écrivait entre autres :
Une nation qui n'est pas encore formée et qui
sera l'ennemie de la religion catholique prendra
les Philippines aux Espagnols et en chassera les
moines.
Cette prédiction s'est accomplie le lendemain
de la guerre hisnano-américame, -
Mais la sœur Madeleine ajoute :
Il se passera quelque temps et l'Espagne re-
prendra possession de ces îles les moines feront
alors une rentrée triomphale.:
La deuxième partie du pronostic n'est guère,
près de se réaliser. Ce qui est plus probable
c'est que les Philippins chasseront et les.
Américains et ce qui reste encore de prêtres.;
Dans tous les cas l'homme qui a fabriqué le'
manuscrit qui est censé dn dix-septième siècle
a oublié un fait : la création de l'Eglise na-
tionale aux Philippines.
LES DEUX PLANS
Tandis que le gouvernement entasse contra-
dictions sur contradictions, reculades sur re-
culades et défaites sur défaites, en essayant de
:l'allier ses échecs, par des discours, des décla-
rations et des circulaires, les congrégations
d emeurent, invulnérables, n'ayant rien changé
à leur plan de bataille.
,à Il faut avouer que celui du cabinet, si d'a-
venture il existe, est bien maladroit. Rentre-t-
il dans la tactique de M. Combes de montrer
l.UX yeux de tous ses incertitudes, ses indéci-
sions et ses faiblesses ? Dans ce cas, il tout le
reconnaître, l'exécution est réussie et l'ennemi
s'amuse beaucoup de ses contremarches.
On ferme de petites chapelles, sans impor-
tance, mais nous avons le bonheur de garder
toujours Lourdes, Fourvières, la Salette, et le
Sacré-Cœur continue à dominer Paris, et la
France qui lui fut, par une loi d'aberration,
consacrée. On fait, paraît-il, la chasse aux con-
gréganistes, mais nous avons la joie de possé-
der encore cent mille congréganistes non sécu-
larisés sans compter les autres, et soixante
anille écoles congréganistes.
Cependant le gouvernemeni raît
tations d'énergie, mais c'est tout ce qu'il fait
hélas ! et nos adversaires sourient de ses fautes
-et so moquent de ses incertitudes. C'est qu'ils ont
un but bien défini un plan nettement tracé,
:qu'ils ne cachent point, dont ils se vantent et
îdont ils n'ont point l'intention do se départir.
Faire échec par tous les moyens à l'applica-
tion de la loi de 1901, employer tous les sub-
terfuges pour continuer à agir sur l'intelli-
gence des adultes par la confession, la prédi-
cation et la presse, et l'intelligence des enfants
;par l'enseignement, voilà à quoi tendent les
efforts des cléricaux.
Ceci connu du gouvernement, comment se
fait-il que M. Combes paraisse l'ignorer, et se
borne à foudroyer les plus irréconciliables en-
nemies de la république de périodes déclama-
toires. Les belles phrases soulèvent toujours
:des applaudissements, mais on demande des
actes. Et l'on en attend depuis si longtemps que
l'on commence à se demander où le président
du Conseil veut en venir ? - Ch. D.
:————————————— —————————————
LES VŒUX DES CONSEILS GÉNÉRAUX
Parmi les vœux votés dans leur séance d'hier par
les Conseils généraux, citons :
lIaute-Loire. — Le vœu que la réalisation
du projet tendant au désarmement général soit
ardemment poursuivie par le gouvernement et
par le Parlement.
Pas-de-Calais. — Vœu demandant l'ajourne-
ment au mois de septembre de l'appel des ré-
servistes.
Cher. — Vœu demandnnt qu'il soit créé un
impôt progressif et superposé sur le capital,
considérant que la caisse des retraites pour les
; invalides du travail ne peut être créée qu'en
faisant contribuer ceux qui sont dans des si-
tuations de fortune leur permettant de vivre
:du travail des autres sans en produire euxr
mêmes.
Morbihan. - Vœu signalant au gouverne-
ment le redoublement de la crise sardinière
sur les côtes bretonnes et priant de faire par-
venir la somme de 500.000 fr. votée par 1 e
Parlement.
Marne. — Vœux demandant l'abaissement de
-la taxe des lettres à dix centimes et de celle-
des cartes postales à cinq centimes, la régle-
mentation dé la vitesse des automobiles et la
faculté pour les juges de paix d'appliquer la
loi dj sursis.
Loire. — Vœu demandant que l'article 19
de la Convention de La Haye soit appliqué.
Yonne. — Vœu en faveur de l'arbitrage in-
ternational pour régler les conflits entre na-
tions. Adresse invitant le gouvernemeni à assu-
rer, dans un avenir prochain, la suppression
.de toutes les congrégations, même celles encore
'autorisées. Vœu réclamant la séparation des
Eglises et de l'EtaL
————————————— —————————————.
LES INTERPRÈTES MILITAIRES ALLEMANDS
(De notre correspondant parliculier)
Berlin, 18 août.
Jusqu'ici on no connaissait pas, dans l'ar-
mée allemande, les interprètes militaires. Le
haut commandement se fiait aux connaissan-
ces linguistiques des chefs de troupe. Mais on
a trouvé que l'étude des langues est, depuis
quelque temps, moins répandue qu'autrefois
iparmi les officiers allemands.
L'empereur a donc donné l'ordre de créer
des cours de langues pour former des inter-
prètes. Dans les corps d'armée de l'Est on en- :
seignera le russe et le polonais, dans les autres
île français, l'anglais et aussi l'italien. Les offi-
ciers qui feront des progrès recevront des
bourses de voyage.
- --
L'INSURRECTION EN MACÉDOiNE
Soiia, 18 août.
Le mémoire remis aux grandes puissances au
sujet de l'attitude de le Turquie se borne à ci-
ter des faits, des dates avec détails, sans de-
mander une intervention.
- Le commissaire turc a dit que son gouverne-
ment répondrait par une déclaration conci-
liante.
L'assemblée des macédoniens a adopté, hier,
une résolution déclarant qu'elle considère l'in-
surrection comme une affaire nationale bul-
gare.
Sofia, 18 août.
On rapporte que trois bataillons de Turcs,,
ayant attaqué un millier d'insurgés près de Mo-
nastir, furent repoussés après six heures d'un
combat opiniâtre, avec une perte de 210 hom-
mes.
Les pertes des insurgés sont inconnues.
Constantinople, 18 août.
L'escadre russe est attendue demain dans
l'après-midi au large du littoral turc.
Vingt-quatre bataillons de rédifs ont été ap-
pelés sous les drapeaux dans les vilayets d'A-
natolie.
Cologne, 18 août.
On télégraphie de Belgrade à la Gazette de
Cologne :
« Sur l'intervention de la légation turque, on
a arrêté l'expédition d'arme3 et de munitions
qui devaient être envoyées en Bulgarie. L'ex-
péditeur a été condamné, pour exportation pro-
hibée, à 20,000 d'amende.
« Une grande réunion doit se tenir prochai-
nement à Belgrade, pour délibérer sur la posi-
tion que doit prendre la Serbie en co qui con-
cerne les troubles do MacédoiDCh
r L'AFFAIRE HUMBERT;
HUITlÉME AUDIENCE
Divagations. - A quand la révélation
du secret ? - Le dernier témoin. --
On reparle des Crawford. — Le ré-.j
quisitoire de M. Bicndel. — L'his-
toire de l'héritage. - Un châ-
teau en Espagne. — Craw-
ford maître d'école. — Les
droits de succession.
Ii était inévitable que le roman auquel
-nous avons fait allusion hier et dans lequel
Mme X. la femme du grand industriel dé-i
cédé qui aurait joué dans le drame de Ba-
gnères-de-Bigorre le rôle incestueux que!
l'on sait, aurait avancé des millions à Mme
Humbert pour lui faciliter ses escroqueries,
ce qui entre parenthèse l'eut rendue com-,
plice des agissements de la grande Thérèse,
il était inévitable,dis-je, que ce roman net
fît pas parler de lui au dehors, et n'ame-
nât de vives protestations. Cesprotestations
ont dû se produire, car ceux qui l'avaient
publié en donnant le nom de Mme X.
ont battu hier-piteusement en retraite,;
désavoué le roman et exprimé tous leurs
regret à Mme X. et à sa famille.
Pour tout dire, il est grand temps queii
l'affaire Humbert se termine, car tout le
monde semble gagner la maladie cérébrale5
de Mme Humbert età divaguer comme ella;
a divagué à la fin de l'audience de lundi.
la grande stupéfaction des jurés eux-mê^
_m.es aux semblaient se demander en econ-;
tant les incohérences de l'accusée si eUe:
était folle ou si elle se moquait largement
d'eux.
En prévision du réquisitoire de l'avocat
général et de la promesse faite la veille par.;
Mme Humbert qu'elle parlerait et dirait
tout, dès que M, Blondel eût fait connaître;
ses conclusions de condamnation, la salle',
était bien bondée à éclater. Je dois dire que'
dans le public on se montrait sceptique à
l'égard de Mme Humbert et qu'on se de-j,
mandait si, suivant la tactique qui lui est'
familière, elle n'allait pas remettre sa con-
fession in-extrcmis après la plaidoirie de
son avocat, Me Labori et même après les
plaidoiries de lcs Hesse et Clunet, pour les
frères Daurignac.
Un plaisant faisait même observer que
Mme Humbert était capable de réserver ses
dernières explications pour la Cour de cas-
sation au cas où elle serait condamnée et
qu'elle chargerait son avocat de révéler à
la Cour suprême le secret qui a inspiré;
à Fursy un si désopilant pot-pourri.
Mais à ce plaisant on objectait que M3 La-,
bori avait promis de révéler lui-même le
nom du personnage mystérieux qui se ca-
che ou se cachait derrière le pseudonyme
de Crawford, et que par conséquent, ,Ip(i
ce fut par Mme Humbert ou pas son dé-
fenseur, le terrible imbroglio serait enfin
dénoué d'ici à vingt-quatre heures.
Dans le prétoire, les avocats discutaient
sur l'attitude qu'aurait Mme Humbert pen-
dant le réquisitoire de M. Blondel et on
était à peu près d'accord pour dire que si
l'accusée avec son prurit de langue s'es-
sayait à attaquer l'avocat général, il trou-
verait un esprit peu facile à démolir et qui
moins courtois que le président Bonnets
saurait, énergiquement remettre à sa place
la Grande Thérèse.
Bref on présageait une audience nwuve-
mentée et c'est dans ces conditions que)
l'audience s'est ouverte à midi par l'audi-1
tion du dernier témoin, M. Eugène Bern.:
hardt, frère de M. Paul Bernhardt ancien
directeur de la Banque des valeurs indus"
trielles qui s'est suicidé après sa ruine*
M. Eugène Bernhardt
Dès que M. Eugène Bernhard est à la
barre, Mme Humbert lui pose la question
suivante :
— Est-il exact que MM. Camps, Fauré, Am
gues et Favantier étaient contre vous à Nar-'
bonne et voulurent vous empêcher d'acheter
le domaine de Celcyran.
M. Bernhardt. — Avant de répondre, •<* de-
mande à prêter serment.
Le président. -- Vous ne pouvez prête, ar-
ment, vous n'êtes pas cité comme témoin ot,
n'êtes entendu ici qu'en vertu de mon pouvoii
discrétionnaire.
M. Bernhardt. — C'est fort regrettable.
M° Labori. — Votre parole de galant homme
suffit.
M. Bernhard. — Voici comment j'ai connu
quelque peu la famille Humbert. J'étais négo-
ciant en cafés et mon frère banquier. En 1891
mon frère eut la malencontreuse idée de fon-
der la Banque des valeurs industrielles. 11 s'as-
socia avec M. Carpentier.
Mme Humbert interrompt le témoin. Le
.président l'arrête et M. Bernhardt lui-mêm.
proteste :
— Permettez, madame, vous m'avez fait ve-
nir ici pour parler. Jo parlerai. Jamais ie n'ai
connu MM. Camps, Amigues, Faure et Fava-
tier. Ce que je puis dire, c'est que mon frère 1
rendu de grands services à la famille Humbert
et que Mme Humbert a attaqué sa mémoire en
disant qu'il avait fait de l'usure.
Mme Humbert. — Je n'ai jamais dit ça, c'osl
M. Linol.
Frédéric Humbert. — C'est exact.
M. Bernhardt. — Jamais M. Linol n'a pi
tenir ce propos sur mon frère.
Le témoin sort une lettre de sa poche e1
se prépare d'en donner lecture lorsque le
président lui fait observer que la loi d op-
pose à cette lecture.
Sur une observation de Mme HumbCl'
M. Bernhardt répond :
— Madame Humbert je n'ai jamais été voir*
ami.
M* Labori. — Veuillez faire passer la lettre
de votre frère au président.
Mme Thérèse. — Il y a deux lettres.
M, Bernhardt. — Je n'en connais qu'une.
Le président donne lecture de la lettre df
M. Paul Bernhardt, écrite la veille de sa
mort et dans laquelle il expose qu'il a, peu
dant vingt ans, rendu des grands services
aux Humbert, a toujours confiance en eux
et espère que lorsqu'ils auront touché leui
héritage, ils n'oublieront pas sa famille.
M. Frédéric Humbert. — Nous n'avons eu
qu'à nous louer, en effet, de M. Bernhardt, et
M. Linol a commis une infamie en disant qu'il
a fait do l'usure contre nous.
Le témoin n'a pas vu de titres
Mme Humbert demande au témoin s'il a
vu dans le coffre-fort de son frère trois ti-
tres lui appartenant. - - ,\
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