Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-08-16
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 16 août 1903 16 août 1903
Description : 1903/08/16 (N12210). 1903/08/16 (N12210).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
crNQCENTIMES le , , U -h PARIS & DÊPAflTÉMENTS ,.:..,',
i Le Numéro CINQ CENTIMES
ï liF li AY1TA Y* OSiïmfl!fi!lïi.llaP
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AUX BUBEAUX DU JOURNAL
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Ne 12210. — Diixi anche 16 Août 1903
29 THERMIDOR AN 111
ADMINISTRATION ; 14, rue du Hall
Adresser lettres et mandats à V Admiistraleur
NOS LEADERS
Contre las magistrats ,
républicains
Les jugements républicains du tri-
bunal d'Autun, que nous reprodui-
sions l'autre jour, produisent l'effet au-
quel il fallait s'attendre. Les juges cou-
pables d'avoir appliqué la loi, loyalement
et sans faiblesse, subissent, après les
fureurs instinctives du public clérical,
les attaques réfléchies de l'épiscopat.
Il faut lire la Semaine religieuse d'Au-
tun, Chalon et Mâcon, organe officiel du
cardinal Perraud!
Je rappelle ce que les jugements
dont il s'agit avaient de pénible pour la
congrégation et pour le haut clergé sé-
culier.
Dans une première affaire, l'abbé
PifIaut, prosecrétaire de l'évêché, était
poursuivi pour avoir ouvert une école
maternelle libre, avec l'aide des sœurs
Je Nevers, afin de poursuivre la pro-
pagande antirépublicaine de l'école
municipale congréganiste d'Autun,
iont la laïcisation avait privé les cléri-
caux d'un puissant instrument d'op-
pression sur les familles pauvres de
Saône-et-Loire.
Qu'est-ce que cet abbé Piffaut ? Je
demande la permission de relire les
« attendus » qui le concernent :
Il a agi en parfaite connaissance de cause ;
homme éclairé, chanoine honoraire, prosecré-
taire de l'évêché ; vivant dans une sphère su-
périeure à cella des simples desservants et des
religieuses, il a compris la loi, ce que démon-
tre son obstination habile à refuser de faire
une demande d'autorisation ; il a compris et
7oulu la portée de son acte; ce n'est pas une
œuvre de charité et de religion qu'il a entre-
prise, mais une couvre de combat et de résis-
tance à la loi.
Pour beaucoup de magistrats réac-
tionnaires, cette volonté montrée par
l'abbé Piffaut de combattre par tous
les moyens l'Etat laïque aurait été un;
litre à Findulgence du tribunal. Les;
juges d'Autun, présidés par l'énergi-
que républicain Devillebichot, ont ma-i
nifesté un sentiment tout opposé.
Ils ont condamné l'abbé Piffaut ; ilsj
l'ont condamné sévèrement : à quinze)
jours de prison et à 100 fr. d'amende.
Comme nous le disions en reprodui-,
sant les parties essentielles de ce juge-!
ment, la réaction militante était frap-j
pée à la tête. C'était un prêtre très!
« galonné » — si je puis emprunter;
cette image au vocabulaire militaire —
qui était touché. Et il en prenait pour
son grade. En même temps, l'influence
des chefs du clergé séculier sur les
actes de révolte congréganiste se trou-
vait mise en évidence.
Comme l'avait dit en termes éner-
, giques, dans son réquisitoire, M. Fla-
marion, procureur de la République,
l'abbé Pifïaut avait laissé voir un es-
prit d'opposition systématique et il ne
lui avait point déplu de poser au mar-
tyr pour la galerie. Mais, fitchtre ! Cent
francs d'amendé, quinze jours de pri-
son ! Le martyre devient une denrée
trop chère à ce prix. Ne croyez pas que
les cléricaux sachent gré au tribunal d'a-
voir épargné la sœur Bernard en ne lui
infligeant que seize francs d'amende.
La sœur Bernard n'a cessé de répéter
« qu'elle avait agi par obéissance ».
Elle croyait même obéir au gouverne-
ment.
Il est difficile d'en vouloir beaucoup
à un esprit aussi simple !
On ne sera jamais trop indulgent
pour ces malheureux qui forment le 1
prolétariat de la religion, et qui sont
les premières victimes des grands prê-
tres.
— Alors, s'écrient les réacteurs, il
y a des juges pour estimer que les re-
belles les plus intelligents, les meneurs
de la contre-Révolution, les- organisa-
teurs de l'œuvre antidémocratique et
antilaïque tfoivent subir les premiers,
la conséquence de leurs actes? C'est
l'état-major de la soutane qui suppor-
tera la peine de ses fautes ? La répres-
sion légale atteindra nos chefs les pre-
miers?
A l'école de tir, on enseigne aux sol-
dats qu'il faut viser, de préférence,
parmi les ennemis, les officiers.
En vertu d'une règle analogue, il
convient d'abattre les directeurs du
mouvement de résistance congréga-
niste, plutôt que de s'acharner contre
des converses quelconques, incons-
cientes à peu près de la besogne qu'on
leur donne à faire.
Décourageons les abbés Pifïaut
livrées à elles-mêmes, les sœurs Ber-
nard n'ont pas assez d'initiative ni
d'adresse pour entraver longtemps
l'action de la loi.
Quant au second jugement, pronon-
çant un double acquittement - doute
tie faveur — il ne devait pas jnoiHé
désoler le cardinal Perraud et son en-
tourage. "--
Rappelons que lé disposilitrepro-
Àmt notamment une lettre du vicaire
général Gauthey, de l'évêché d'Autun,
dans laquelle ce prêtre donne des ins-
tructions à ?a supérieure d'une congré-
gation pouf résister aux lois de laïcisa-
lion ou pour les tourner.
Ainsï, dans l'une comme dans l'au-
tre aftiire, oïl voit donc le clergé sécu-
Mer 5e mêler au « régulier » gour es-
sayer de mettre en défaut la volonté du
pouvoir législatif. -,
Je demande pardon au lecteur d'a-
voir tiré, plus longuement peut-être
qu'il n'était nécessaire, la leçon des
jugements d'Autun. Ils comportent
eux-mêmes leur enseignement et ne
nécessitent point le commentaire.
Cependant, il n'était pas tout à fait
'inutile d'indiquer que la Semaine reli-
gieuse du cardinal Perraud ne s'em-
porte pas sans raison contre les juges
'de l'abbé Piffaut.
La Semaine croit pouvoir se recom-
: mander de « l'indignation de tous les
'honnêtes gens, lorsque le tribunal,
composé de M. le président Deville-
ibieliot et de M. Proteau et Duvoucoux,
rendit son jugement ». Elle croit, « si
elle en a bien saisi le sens à l'audience,
(qu'il serait facile de dégager de leurs
'considérants cette conclusion, qu'au
:delà de sœur Bernard et de l'abbé Pif-
faut, on a voulu atteindre tout un or-
dre de choses et de personnes des plus
vénérables; ce qui expliquerait, du
moins en partie. la sévérité de la con-
damnation portée contre ces deux in-
culpés ».
Le journal du cardinal Perraud an-
nonce que M. Pifiaut a interjeté appel
devant la Cour de Dijon. Espérons qu'il
y a des juges, à Dijon, comme il y en
a à Autun.
La Semaine Religieuse, malgré ses
fracas, ne s'abandonne pas au déses-
poir. Elle dit :
Des .marques de sympathie viennent nom-
breuses aux deux condamnés, des rangs du:
,peuple, comme des hautes classes do la société,
ide bon nombre de nos adversaires comme de tous
nos amis. N'est-ce pas là un heureux signe, qui,
montré que tout sentiment de liberté n'est pas
encore éteint dans le cœur des Français et qui:
donne à espérer, dans un lointain que Dieu
seul connaît, de beaux jours après la tem-
pête ?
Ainsi, récriminations, appel du juge-
ment, malédictions lancées contre les
juges, nommément désignés, applau-
dissements aux condamnés, et pro-
Imesse non voilée de pousser avec ac-
tivité la guerre déclarée à la Républi-
que et à la loi, tels sont les procédés:
du clergé séculier pris en flagrant délit
de complicité active avec les congré-
[ganistes. Le gouvernement compren-
dra- t-il enfin qu'il y a non seulement;
:des moines, mais des curés ligueurs ?
Et ces curés sont revêtus, par l'Etat
français, d'un caractère officiel. Et les
évêques se dressent devant les juges,
exigent que la robe le cède à la sou-
tane, tentent de déconsidérer, par le
journal ou par la parole, les rares ma-
gistrats qui prétendent rester libres
vis à vis de l'Eglise.
Le Concordat a créé un quatrième
pouvoir : le pouvoir ecclésiastique qui
empiète sur les trois autres, qui sera
satisfait seulement le jour où députés,
ministres et magistrats rivaliseront dé
zèle au service de Notre Sainte-Mère
la Religion romaine. Il serait urgent de
rompre, avec cette politique concorda-
taire qui nous vaut tant de mécomp-
tes.
Hugaes Destrem.
LE DISCOURS DU TRONE ANGLAIS
I
Le discouis du trône a été lu
hier, à la clôture du Parlement
anglais. :.
Il convient de noter que les
premières lignes de ce discours
sont pour parler - avec sympathie
du voyage à Londres de M. Loubet : « Ré-
cemment, dit le diseours royal, le Prési-
dent de la République française a été
mon hôte, et sa visite a donné lieu
à une remarquable manifestation des
.sentiments de cordialité mutuelle qui
existent entre les deux pays. » Quant à la
visite des parlen entaires à Londres , le
gouvernement d'Edouard VII n'avait pas à
en parler, puisqu'il s'agissait là d'une dé-
marche particulière aux députés des deux'
nations pris individuellement ; mais les
lignes consacrées au voyage du Présidenti
sont intéressantes : les mots de « cordialité
mutuelle » sont de ceux auxquels nous
n'étions plus habitués à fàire appel depuis
quelques années pour qualifier la nature'
des relations entre les deux grands pays.
:Ces mots indiquent tout au moins que les
efforts des nationalistes pour brouiller défi-i
:nitivement les deux nations voisines ont!
échoué.
En dehors du passage visé plus haut,!
nous ne voyons plus à noter dans le dis—
cours que quelques mots relatifs à la situa-
tion en Macédoine. Cette situation « con-1
tinue à être un sujet d'anxiété générale))
déclare le discours et il ajoute que le gouver-
nement anglais « agissant de concert avec
ceux d'Autriche-Hongrie et de Russie, et
les signataires du traité de Betlin. s'est effor:
cée de circonscrire l'étendue du soulève-
ment, et de faire comprendre aux intéressés h
la nécessité de, rester calmes et d'exercer;
une contrainte pour eux-mêmes )) ; les « in-
téressés » ce sont à la fois, je le suppose, la
Porte et les populations chrétiennes. « J'es-
père fermement, lisons-nous encore, que le
plan de réformes imposé à la Porte par les
deux puissances. qui -s'y trouvent le plus
(directement intéressées, plan que mon gou-
vernement a soutenu avec énergie, peut
réaliser quelque amélioration dans-la con-
dition de toutes les classes de la population
en Macédoine. »
Evidemment ce ne sont pas là des. paro-
tes d'extrême confiance; on n'ose dife que
toute complication ultérieure soit écartée ;
ce n'est pas non plus le langage d'un gou-
vernement qui s'attendrait à une catas-
trophe. On a donc le droit de croire que,
dans la pensée du Foreign-Officer la si-
tuation en Orient, si çllç est tendue, n'est
j)jts désespérée^ — ,:
LEPROBlEME DU STYLE
Les langues universelles. — Le style
et les idées. — Un livre de M. Rémy
de Gourmont. — La méthode de
M. Albalat. — Le génie et l'or-
thographe.
Notre éminent collaborateur, M. Lucien Vic-
tor-Meunier, a pris ces jours derniers, à cette
iméme page, dans un article très combatif et de
haute portée littéraire, la défense de la langue
française contre ses envahisseurs.
Il n'est pas de jour, en effet, où l'esprit de
vandalisme, sous couleur humanitaire, ne sus-
cite l'éclosiou d'un volapuk, d'un baltha, d'un
espéranto ou d'une langue bleue, destinés au,
dire de leurs préconisateurs à faciliter les rela-
tions commerciales des peuples devenus frères
ou tendant à le devenir.
Mais s'il ne s'agissait que de réduire à merci
les profanations d'un culte destiné à conserver
la beauté traditionnelle de notre langage lit-
téral, la tâche serait facile. Nous avons d'au-
tres ennemis à combattre, et ceux-là sont les
plus dangereux. Il s'agit de ceux d'entre les
philologues qui prétendent enseigner au pre-
mier venu l'art d'écrire, de se créer un style,
au moyen d'une méthode, 'ou d'un formu-
laire ; quelque chose comme l'allemand ou l'an-
glais en vingt leçons.
De tels grammates prétendent avoir aussi
résolu le problème du style, auquel un écri-
vain de premier ordre, M. Rémy de Gour-
mont, a consacré tout récemment, avec quel-
que fruit, un ouvrage des plus intéressants.
En lisant un chapitre d'un livre sur l'Art
d'écrire, le critique sagace et affiné auqael-
nous devons La Culture des Idées et l'Esthéti-
que de la Langue française, a failli se pâmer
devant la méthode d'enseignement proposée
par M. Albalat. Négliger son goût particulier,
et lire les livres où il y a du talent, en souli-
gnant d'un passage les traits qui sont à rete-
nir ; farcir peu à peu sa mémoire de ces nom-
breux clichés et les servir dans sa prose, en
reléguant toute expression qui pourrait, n'é-
tant pas sortie de ce moule, être suspecte d'o-
riginalité, telle est la formule recommandée.
(Agiter avant de s'en servir.)
Cela, sous prétexte de souscrire à l'esprit
d'imitation qui fut de tout temps, affirme ce
gnostique lexicologue, le guide des maitres et
des grands écrivains de notre littérature.
L'imitation dans la littérature
A l'entendre, La Fontaine n'est qu'un imita-
teur d'Esope ou de Phèdre, La Bruyère un co-
piste de Théophraste, et ainsi du reste.
Il semblerait ainsi que ni le goût, ni la sen-
sibilité ne dussent entrer en ligne de compte
dans le rôle d'un écrivain. Seule, l'assimilation
créerait les œuvres définitives.
: Ce raisonnement est du même genre que la
théorie qui préfère à l'originalité du style, l'ap-
i parence novatrice du sujet, comme s'il y avait
ici bas un sujet vraiment neuf, sur lequel per-
sonne ne se fût jusqu'à présent exercé.
La caractéristique d'un style est cependant
I bien facile à discerner, et il n'est pas d'esprit
exercé dans la connaissance des auteurs qui ne
: puisse nommer tel grand écrivain français à la
seule lecture d'une de ses pages. Si le style
n'était qu'un mélange de tournures emprun-
tées de toutes pièces aux œuvres du passé,
comment se dégagerait cette personnalité ? En
outre, les variétés générales du style ne doi-
vent pas leurs fluctuations à l'originalité seule-
de chacun des écrivains, mais encore à l'évolu-
tion de l'âme populaire à travers les époques.
De même qu'on découvre aisément qu'un ta-
rbleau se rapporte esthétiquement à l'école ita-
lienne, flamande ou française, et qu'il est aisé
même de dater le siècle qui l'a vu peindre, de
même on peut délimiter là période littéraire
qui a produit tels ou tels chefs d'oeuvre. La
manière de Rousseau n'est pas celle de Vol-
taire, non plus que l'art poétique de Victor
Hugo semblable à celui d% Ponsard ; pourtant
l'on sent fort bien a leurs vers que ces deux
poètes ne sont pas du même temps que Racine
et Boursault.
C'est assez dire que le succès et la gloire des
maîtres résidaient non. dans l'application, mais
dans le" mépris des procédés.
Le fond et la forme
Je ne crois pas que l'excès de rhétorique ait
jamais contribué à engendrer des chefs-d'œu-
vre. Ces derniers conservent toujours en eux
l'attrait d'une grande simplicité. « En littéra-
ture, dit M. Rémy de Gourmont, le fond des ,
choses a une importance absolue ; aucune des
variétés de la littérature ne peut se soustraire
à la nécessité de creuser des fondations et de
les maçonner solidement. » Autre chose est en
effet de trouver des idées belles et des idées neu-
ves. Dailleurs,les écrivains riches d'idées,grÁce
au don précieux de la mémoire visuelle qui
leur permet de replacer dans leur cadre les
personnages et les objets qu'ils font vivre, ces
écrivains-là ont toujours eu des tendances à la
concision.
Quoi de plus vide en effet qu'une belle phrase,
qui ne s'appuie pas sur une pensée, solide et
;consistante ? Quoi de plus creux qu'un beau
vers vide de sens ?
f On pardonne même volontiers aux œuvres
-défectueuses dans leur forme, lorsqu'elles évo-
luent beaucoup d'idées saines ou même de jo-
uis tableaux retraçant la vie.
En pareil cas, plus que jamais, le style de-
vient la pensée même. Il ne viendrait à per-
sonne, je pense, l'idée de reprocher aux pay-t
isanneries qui fleurissent le jardin de la enan-i
son des 18' et 19e siècle, leur insouci de la!
[grammaire. On peut avoir le génie de la des-:
tcription, et au plus haut point l'éloquence du'
t'bon sens, sans posséder pour cela de l'ortho-
graphe.
La liberté de l'orthographe ,.
Celle-ci ajoute un ornement au talent et dé-
;montre que l'auteur a intelligemment étudié,
les étymologies du vocabulaire, mais elle n'est
rpas la condition sine quâ non du style, comme
se le figurent les gens qui attachent de l'impor-
tance aux examens administratifs comportant;
,une dictée hérissée d'aspérités orthographiques;
sur lesquelles, le plus souvent, les jurés sont
loin d'être er vmêmes bien fixés..
L'ortgographe est comme le décor extérieur
d'une bolle phrase. Mais il faut prendre garde
à ce que les latitudes données à son sujet par
le décret ministériel de 1900 ne suscitent des:
fautes graves contre la logique. Or la logique,
en matière d'orthographe, consiste à -respecter
les origines traditionnelles des mots, en sorte
qu'on puisse reconnaître leur source à leur
simple lecture.
Le son du mot ne suffit pas dans la langue
française, si chargée d'homonymes, à distin-
guer les origines,et si nous venions à perdre les
traces de ces dernières, l'étude de la langue, au
lieu d'être intelligemment conduite, ne serait
plus qu'un jeu de perroquets.
11 faut savoir non seulement l'orthographe,
mais surtout le français, et dresser son oreille
à nô pas s'accoutumer aux confusions non
plus qu'aux discordances phonétiques.
r Tout compte fait nous sommes fondés à sup-
poser, que lil. Albalat, qui trouve en M. Rémy
de Gourmont le plus érudit et le plus autorisé
des censeurs, n'a pas entendu apprendre à
écrire à ceux qui le savent mieux que lui,
¡mais aux modestes bourgeois dont les ambi-
tions littéraires se bornent aux lettres de nou-
vel an, aux réclamations locatives et au libellé
ooropports administratifs.
• Or ce n'est plus ici l'art décrire qu'il eût dû
envisager. II s'est trompé de nom. C'est la
sdence d'écrire, l'application des règles de gram-
maire qu'il a entendu vulgariser. Quel dom-,
mage ! Nous y perdrons certainement des au-:
tographes bien amusants.
ALCANTER DE BRAHM.
Voix* à la 3e page
les Dernières - Dépêches
LE PRÉFET DE L'ORNE
J'ai déjà signalé dans ce journal l'adminis-
tration cléricale et réactionnaire du préfet de
l'Orne, M. Moussard. C'était par la parole
qu'il combattait la République, aujourd'hui
c'est par la plume.
J'ai publié, dans l'Avenir de l'Orne du 5 août,
la note suivante : a
LE PRÉFET ET LES CONGRÉGATIONS
L'école de filles de Sainte-Honorinc-Ia Chardonne
ayant été laïcisée il y a 5 ans, une religieuse
ouvrit une école libre et cette école a existé jus-
qu'à ce jour dans un local appartenant à la Provi-
dence de Sées.
Cette communauté de Sées avait depuis 50 ans
un important établissement scolaire dans la ville
voisine de Condé-sur-Noireau. Un arrêté de ferme-
ture lui a été notifié il y a près de deux mois,
tandis qu'on semble ignorer l'existence de l'éta-
.blissement qu'elle possède à Sainte-Honorine et
sans autorisation. Pourquoi cette différence de
traitement?. Condé est dans le Calvados et
Sainte-Honorine dans l'Orne l
:.. T. BUSNOT.
M. le préfet s'est empressé de répondre (Ave-
nir de l'Orne du 9 août) : -
L'école privée de filles de Sainte-Honorine-la-
Chardonne est installée dans les dépendances d'un
établissement congréganiste régulièrement AUTORISÉ
par décret dit 7 décembre 1859. Il n'y a donc pas
lieu à fermeture.
Le préfet de l'Orne.
E. MOUSSAIW.
Les mots soulignés l'ont été par M. le préfet.
Vous remarquerez la manière jésuitique
dont ce communiqué est rédigé. M. Moussard
ne dit pas que l'école est autorisée, il dit
qu'elle est située dans un établissement auto
risé. Il y a là une distinction très importante
que le public, qui n'est pas habitué à ces ques-
tions, ne saisira pas ; c'est évidemment pour
l'induire en erreur qu'il est rédigé en ces ter-
mes.
Tout le monde savait ici que, vers 1860, la
Providence de Séls avait été autorisée, à cause,
d'un legs, à avoir,dans la commune de Sainte-
Honorine,une sœur pour soigner les malades,ce
qui est bien différent d'une école.
Voyons le décret de 1859 cité par le préfet,
le voici :
La Providence de Sées est autorisée à fonder,
dans lacommunede Sainte- Honorine-la-Chardonnel
un établissement de sœurs de son ordre à la charge,
par les membres de cet établissement de se con-
former exactement aux statuts approuvés par le
décret du 22 janvier 1811.
C'est donc le décret de 1811 qui nous rensei-
gnera :
Décret impérial contenant Brevet d'institution.
putlique des sœurs hospitalières attachées à l'hô-
pital de Sées.
1* Les statuts de la congrégation des sœurs de
la Providence de Sées sont approuvés et reconnus.
S" Le nombre actuel des maisons de la dite con-
grégation pourra être augmenté avec notre auto-
risation selon les besoins des hospices et des pau-
vres.
Vous voyez que, contrairement aux affirma-
tions de M. le préfet, la Providence de Sées n'a
pas été autorisée à avoir des écoles et que toutes
ses écoles doivent être fermées partout où il en
existe.
Un grand nombre de congrégations ont leurs
sièges dans l'Orne, il devient nécessaire d'exa-
miner les décrets d'autorisation et de voir si:
elles s'y sont conformées; on ne peut avoir
confiance aux indications de M. Moussard.'
Je ne nie suis occupé que de 11 Providence de
Sées.
M. Combes peut-il maintenir un tel fonction-
naire à là tête d'un département? C'est un ré-
publicain qu'il nous faut et non un jésuite. -
T. Husnot
•
AFFAIRES D'ESPIONNAGE
En France
Belfort, 14 août.
Sur l'ordre du parquet un nommé J. L.,
alsacien, âgé d'une trentaine d'années, qui
iavail acheté tout récemment le château d'Aigre-
mont, à Frontaine, village français voisin de
:la frontière, vient d'être arrêté sous l'inculpa-
tion d'espionnage. Il était surveillé depuis
longtemps.
Au Tyrol
Bosen, 14 août.
On vient d'arrêter à Fassatala, deux es-
pions italiens : Ange le Bnzzolli, professeur de
langues à Venise, et Archimèdes Benutti, em-
ployé des postes de Florence. Les deux Ita-
iliens, en possession desquels on a trouvé plu-
sieurs descriptions de divers forts de la fron-
tière tyrolienne, ont été envoyés à la prison
de Trieste.
(Voir, la suite a ans notre DEUXIEME EDITION)
m., n .g ♦
LORD SALISBURY MALADE
Londres, 14 août.
La santé de lord Salisbury donne depuis
:trois ou quatre mois des inquiétudes. L'une
ides sommités médicales de l'Angléterre, sir
îDouglas Powell, a été appelé à Hatfield, près
rdu malade. Lord Cranborne, fils ainé de lord
Salisbury, et son frère, lord Hugh Cecil, se
trouvaient aux côtés de leur père. On annonce,
aujourd'hui, qu'après une crise grave une
amélioration s'est produite et qu'il n'y a plus
de danger immédiat à craindre*
(Voir la suite dans notre DEUXIEME EDITION)
UN NOUVEAU FUStL ITALIEN
(De notre correspondant particulier)
r; Rome, 14 août.
Le ministre de la guerre a donné l'ordre de
faire dans l'école de tir centrale de l'infanterie
des expériences avec un nouveau fusil.
Il s'agit surtout d'étudier l'effet de l'armn à
une distance variant de 650 à 1.000 mètres.
La dépopulation en Angleterre
(De notre correspondant particulier)
Londres, 14 août.
Le dernier rapport du conseil hygiénique de
la région de Battersea constate que dans l'an-
née 1902, le nombre des naissances a diminué
de 3, 3 pour cent.
Il est tombé à 28, 2 par 1000, c'est le chif-
re le plus bas qu'on ait jamais pu consta-
ter ; cette diminution de la natalité ne se
borne pas à Battersea; on l'a constatée aussi
dans des contrées habitées par une population
exclusivement anglo-saxonne.
L'AFFAIRE HUriîBERT
SIXIÈME AUDIENCE :
La joie de Thérèse. — Après la déposition de Dumort. - Le{
mystère du coffre-fort. — Audition de M. Bonneau. — Une
scie. - Parlez tout de suite. — Tout le monde proteste.
— Armand Parayre. — La Rente Viagère. — Les
confidences de Mme Humbert. — Naissance
mystérieuse. — Les diplomates.. — La dépo-
sition de Me LanqueSt. — M. Cattaui. -
,. Thérèse se fâche.
S'il faut en croire quelques avocats ayant
des liens d'amitié avec les défenseurs de la
iamille Humbert, la Grande Thérèse en ren-
trant jeudi soir dans sa cellule de la Con-
ciergerie aurait manifesté une joie très
vive de l'attitude dn jury pendant la dépo-
sition de M. Dumort, l'ancien notaire qui
:a vu les millions dans le coffre-fort et en
est resté tout ébloui, non moins que du
souvenir vivace que lui ont laissé les frères
Robert et Henry Crawford.
Mme Humbert a conclu de cette attitude
que les jurés paraissaient sympathiques à
sa cause et qu'elle bénéficierait d'un ver-
dict d'acquittement comme dans le procès
CattauÏ.
La Grande Thérèse prend sans doute
ses désirs pour la réalité. Je la crois très
fine et très perspicace. Mais qu'elle ait le
flair assez subtil pour saisir les impressions
du jury sur telle ou telle déposition, c'est
ce dont il est permis de douter.
Si Mme Humbert avait vraiment cette
conviction d'être acquittée, parce qu'elle a
cru sonder les reins et les consciences des
jurés, ce serait peut-être fâcheux. J'entends
qu'elle serait capable alors de nous priver
de sa confession finale. Quelle rude et
amère déception pour tout le monde, si le
mystère du coffre-fort demeurait impéné-
trable et si on ne connaissait pas le vérita-
ble nom des Crawford !.
C'est de tout cela qu'on cause, dans le
prétoire, avant l'ouverture de l'audience et
aussi des dépositions des frères Parayre et
de M. Lanquest, le notaire de Mme Hum-
;bert,qui seront certainement entendus dans
la journée.
On croit que tous les témoignages seront
jterminés lundi prochain. Le réquisitoire et
[les plaidoiries pouvant occuper trois au-
diences il serait possible, dans ces condi-
tions, que le verdict fût rendu jeudi dans
la soirée.
Une bonne nouvelle est annoncée par
le président Bonnet dès l'ouverture de l'au-
fdience. à savoir que deux jours de congé
isont accordés aux accusés, aux jurés, à la
.cour et à la presse. Pas d'audience aujour-
d'hui, ni demain, quelle joie de pouvoir
souffler pendant quarante-huit heures!.
La faillite des Humbert
Le président. — Huissier, faites entrer M.
Bonneau, syndic de la faillite.
M. Bonneau, syndic de la falÏÏÎtfc Hum-
jbert, expose que le jugement du tribunal
de commerce qui a prononcé la faillite n'a,
mis en cause que M. Frédéric Humbert et
que ce jugement ne s'applique nullement à
Mme Humbert, sa femme.
— L'inventaire fait à Paris, ajoute M. Bon-
neau, s'est élevé à 1,041,000 francs, celui des
Vives-Eaux à 100,000 francs, celui de Celey-
ran à 130,000 francs. La vente de l'actif à pro-
duit, à Paris, 1,800,000 francs, dont l,*fuG,000
francs pour les table nu x et dessins. Le mobi-
lier des Vives-Eaux a été vendu 100,000 francs.
Les vins trouvés à Celeyran 110,000 francs. En
présumé, la vente du mobilier a produit 2,300,000
'francs. Les ventes d'immeubles s'élèvent à1
;2,260,000 francs. Il reste à réaliser; de 7 à:
•800,000 francs d'immeubles, dont ceux de Tu",
nisie. Le passif hypothécaire qui grève les
'immeubles s'élève à 4.500,000 francs, soit un
déficit d'un million 500,000 francs au bas mot.
Le président. — Quel a été le chiffre de la
circulation des effets Humbert ?
Le témoin. — Sept cents millions eo dix-sept
ans.
Le président. — Vous avez, sur chaque
créance, des dossiers dressés par Frédéric Hum-
bert?
Le témoin. — J'ai trouvé des dossiers assez
complets, mais tous les créanciers sont loini
d'avoir produit. Les plus forts surtout se sont
abstenus. Je n'ai reçu que pour vingt-huit mil-
lions de production.
Le président. — Quel est le chiffre approxif
matif du passif réel ?
Le témoin. — C'est bien difficile. Le passif
normal s'élève à in millions. En ce qui con-
cerne le passif réel, jo ne puis dire que quel-;
que chose d'approximatif. Si ce passif réel s'é- j
lève à 50 millions, ce sera tout.
Mme Humbert. — Il n'atteint même pas 30
millions.
Le témoin. — J'eère le faire irédaire. Mais
je ne sais si j'y arriverai pour tous et surtout
pour les tiers porteurs.
Les toilettes de Thérèse
Sur interpellation du président. M. Bon-
neau, après avoir expliqué qu'il lui est im-
possible de dire les sommes exactes qui
ont été versées aux créanciers—et à l'appui
il cite M. Marchand qui s'est porté pour
30 millions et qui ne paraît être créancier
que pour huit ou neuf millions—donne des
indications sur le chiffre des dépenses de la
maison Humbert.
— Sans compterdit le témoin, le loyer et les
toilettas, j'évalue à 193.000 fr. par an les dé-
-penses ordinaires des Humbert.
Le président. — Ah ! les toilettes !. Rien
que chez Doucet, il y en avait pour 130.000
francs.
Mme Humbert. — Pardon, le chiffre que
vous citez remonte à l'époque où ma sœur s'est :
mariée. Ce fut tout à fait exceptionnel. Vous ci-
tez ce chiffre mais vous ne parlez pas des années
où je ne dépensais que 3.000 fr. pour m'ha-
biller. Enfin, M. le président, vous oubliez que
ma fortune me permettait de faire quelques
dépenses.
n Le président. — Votre fortune? Laquelle?
Mme Humbert. — Mais celle qui était enfer-
mée-dans le coffre-fort.
Le président. — Et dont nous attendons tou-
jours la révélation. A ce propos, où touchiez^-
vous les coupons que certains témoins auraient
.vus, de leurs yeux vus? g
Mme Humbert. — Les frères Crawford qui
géraient la fortune me remettaient tous les trois
mois l'argent qu'ils touchaient à la Dette pu-
blique.
La scie du secret reparaît
Il est écrit que pas une seule audience M
se passera sans que nous entendions la sch.
du secret.
Le président demandant à Mme Humbert,,
de préciser la caisse où les frères Crawford
touchaient les coupons, elle se redresse lé-1
gèrement et dit :
- Je vous le dirai quand le moment sera
venu. On saura tout.Crawford et les millions» '!
tout cela n'est pas un mythe, ils existent.
L'insistance de M. Bonnet à vouloir-»
arracher des aveux à Mme Humbert ne pa-.
raît pas du goût de son mari qui fait enten- ;
dre des protestations déjà vieilles de deux'
jours.
M. Frédéric Humbert est, en effet, per-
suadé que le président cherche une diver-
sion .aux débats et qu'une pareille tactique-
ne peut que nuire à l'accusation dans l'es-
prit des jurés.
Alors pourquoi se plaint-il ?
Mais M. Bonnet ne se laisse pas émou-
voir et Mme Humbert répétant pour la
vingtième fois peut-être : « Je parlerai a,
il lui répond nettement : t
- Tout de suite!..,
Mme Humbert. — Quand je pourrai mettre
la main daps la main de mon mari et recou-
vrer ma liberté avec lui.
Le président. — Voyons, mais il ne dépend
que de vous de hâter cette précieuse liberté.
Mme Humbert. — Vous oubliez ma fille. Jo
veux que les débats se produisent en entier et
que M. l'avocat général ait prononcé son ré-
quisitoire. Vous saurez tout.
Le président. — C'est entendu. Ainsi voua
refusez de dire où los coupons étaient touchés ?
Mme Humbert refait en raccourci sa dé-
claration de l'autre jour :
On touchait les coupons éhez M. Bernard
qui est mort depuis. Je dirai tout bientôt.
Je sens que je serai acquittée et que je sortirai
d ici mercredi ou jeudi, libre avec Frédéric.
Vous souriez, M. le président (vive hilarité).
Vous avez tort. Je n'ai jamais fait de tort à.
personne. Et si j'étais condamnée je ne pour-
rais pas survivre un seul jour à cette condam..
nation, non pas un seul jour,..
Le président. — Mais nous oublions le té-*
moin. Veuillez continuer, M. Bonneau.
Le témoin parle du domaine de Celer
ran, puis de l'hôtel de l'avenue de 1
Grande-Armée, dont les tableaux ont étf
vendus dans des conditions avantageuses,
Les autres ventes ont été également fruc
tueuses, grâce à l'engouement èt à la cu<
riosité du public.
M. Humbert proteste
M. Frédéric Humbert. — Je tiens à dire I,
messieurs les jurés que nous n'avons jamais
fait de commerce et qu'on n'avait pas le droit
de nous mettre en faillite.
Je n'ai jamais vendu ae tableaux, si ce n'est
les miens t. je n'ai jamais vendu devin si C81
n'est celui de nos propriétés et si on m'a mtè
en faillite, c'est simplement pour sauver Ni
Cattaul de la correctionnelle qui le réclamait.
Le président. — Et vous avez acquiescé au:
jugement vous déclarant en faillite ?
Frédéric. — Je n'ai signé, aucun acquiesoo-i
ment. Je n'avais pas à m'élever contre le ju-
gement du tribunal de commerce qui avait{
force de chose jugée, je ne puis empêcher qu'il
fasse jour lorsqu'il fait jour et toutes mes ré-!
criminations n'auraient pu que créer un prs
judice à mes créanciers, ce que je ne voula.
pas faire. Jusqu'à présent il ne m'a jamais é
possible de protester, et aujourd'hui je pro-t
teste.
Mme Humbert. - Et moi aussi je pro-^'
teste.
M. Bonneau. — Ce n'est pas vous, madame, ;
qui êtes en faillite. Je répondrai à M. Hum-,
bert qu'il a fait commerce d'agence d'affaires, :
acheté et vendu des bijoux, pratiqué des opéW
rations de banque. La faillite a donc été 16-
gaiement prononcée.
Le président. — Faites venir M. Arman
Parayre.
Encore un qui a vu les millions
C'est au milieu de la curiosité généraïa
que l'homme de confiance de Mme Hum-
bert s'avance vers la barre.
Le président. — Veuillez faire votre décla
ration.
M. Parayre. — Ma déclaration ?. Sir quoi 7<
Tout ce que je puis dire en ce qui me concef J
ne, est l'affirmation d'un incapable. J'ai étcl,
arrêté alors mêmo que le délit qu'on préten- «
dait m'imputer n'en constituait pas un et j'ai i
été retenu pendant 41 jours pour une chose
qui demandait à peine deux heuras pour êtr
élucidée. Voilà pour ce qui me concerne.
Le président. — Mais savoz-vous quelque
chose des inculpés, pouvez-vous me dire quel- f
que chose d'eux ?
M. Parayre. — Monsieur le président, veuil- i
lez me poser des questions, j'y répondrai ; jei,
ne sais sur quoi j'ai à vous donner des expli-i
cations. !
Le président. — Avez-vous vu des liasses do
billets?
M. Parayre. — Oui, souvent.
Le président. — Des enveloppes ?
M. Parayre. — J'ai vu des paquets de titres,
des paquets qu'on prétendait renfermer des
titres.
Le président. — Avez-vous vu des paquets
de titres?
M. Parayre. — J'ai vu des paquets de papier
couleur jaunâtre, enveloppés de ficelle et avec,
des cachets rouges.
Le président. -- Est-ce qu'un jour votre(
femme, en ouvrant une bibliothèque, ne s'esfc,
pas trouvée en face d'une liasse de billets ? j
M. Parayre. — Oui, mais cela remonte bien.
loin..
Le président. — Je vous le demande.
M. Parayre. — C'est vers 1882 ou 1883. Un
jour, Mlle Maria Daurignac avait égaré la clôj
d'une armoire, elle nous fit demander SI dans,
nos trousseaux de clés nous ne trouvcrions(
pas une clé qui pouvait ouvrir Cette armoire,
ou plutôt cette bibliothèque, car c'était une bi- (
bliothèque. Nous avons pris nos trousseaux efc;
inous en avons trouvé une qui ouvrait cette bi- i
Ibliothèquè. A l'ilitérieur, nous "avons vu des?
[Juillets de banque, d'énormes liasses; par ajhf
i Le Numéro CINQ CENTIMES
ï liF li AY1TA Y* OSiïmfl!fi!lïi.llaP
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Adresser lettres et mandats à V Admiistraleur
NOS LEADERS
Contre las magistrats ,
républicains
Les jugements républicains du tri-
bunal d'Autun, que nous reprodui-
sions l'autre jour, produisent l'effet au-
quel il fallait s'attendre. Les juges cou-
pables d'avoir appliqué la loi, loyalement
et sans faiblesse, subissent, après les
fureurs instinctives du public clérical,
les attaques réfléchies de l'épiscopat.
Il faut lire la Semaine religieuse d'Au-
tun, Chalon et Mâcon, organe officiel du
cardinal Perraud!
Je rappelle ce que les jugements
dont il s'agit avaient de pénible pour la
congrégation et pour le haut clergé sé-
culier.
Dans une première affaire, l'abbé
PifIaut, prosecrétaire de l'évêché, était
poursuivi pour avoir ouvert une école
maternelle libre, avec l'aide des sœurs
Je Nevers, afin de poursuivre la pro-
pagande antirépublicaine de l'école
municipale congréganiste d'Autun,
iont la laïcisation avait privé les cléri-
caux d'un puissant instrument d'op-
pression sur les familles pauvres de
Saône-et-Loire.
Qu'est-ce que cet abbé Piffaut ? Je
demande la permission de relire les
« attendus » qui le concernent :
Il a agi en parfaite connaissance de cause ;
homme éclairé, chanoine honoraire, prosecré-
taire de l'évêché ; vivant dans une sphère su-
périeure à cella des simples desservants et des
religieuses, il a compris la loi, ce que démon-
tre son obstination habile à refuser de faire
une demande d'autorisation ; il a compris et
7oulu la portée de son acte; ce n'est pas une
œuvre de charité et de religion qu'il a entre-
prise, mais une couvre de combat et de résis-
tance à la loi.
Pour beaucoup de magistrats réac-
tionnaires, cette volonté montrée par
l'abbé Piffaut de combattre par tous
les moyens l'Etat laïque aurait été un;
litre à Findulgence du tribunal. Les;
juges d'Autun, présidés par l'énergi-
que républicain Devillebichot, ont ma-i
nifesté un sentiment tout opposé.
Ils ont condamné l'abbé Piffaut ; ilsj
l'ont condamné sévèrement : à quinze)
jours de prison et à 100 fr. d'amende.
Comme nous le disions en reprodui-,
sant les parties essentielles de ce juge-!
ment, la réaction militante était frap-j
pée à la tête. C'était un prêtre très!
« galonné » — si je puis emprunter;
cette image au vocabulaire militaire —
qui était touché. Et il en prenait pour
son grade. En même temps, l'influence
des chefs du clergé séculier sur les
actes de révolte congréganiste se trou-
vait mise en évidence.
Comme l'avait dit en termes éner-
, giques, dans son réquisitoire, M. Fla-
marion, procureur de la République,
l'abbé Pifïaut avait laissé voir un es-
prit d'opposition systématique et il ne
lui avait point déplu de poser au mar-
tyr pour la galerie. Mais, fitchtre ! Cent
francs d'amendé, quinze jours de pri-
son ! Le martyre devient une denrée
trop chère à ce prix. Ne croyez pas que
les cléricaux sachent gré au tribunal d'a-
voir épargné la sœur Bernard en ne lui
infligeant que seize francs d'amende.
La sœur Bernard n'a cessé de répéter
« qu'elle avait agi par obéissance ».
Elle croyait même obéir au gouverne-
ment.
Il est difficile d'en vouloir beaucoup
à un esprit aussi simple !
On ne sera jamais trop indulgent
pour ces malheureux qui forment le 1
prolétariat de la religion, et qui sont
les premières victimes des grands prê-
tres.
— Alors, s'écrient les réacteurs, il
y a des juges pour estimer que les re-
belles les plus intelligents, les meneurs
de la contre-Révolution, les- organisa-
teurs de l'œuvre antidémocratique et
antilaïque tfoivent subir les premiers,
la conséquence de leurs actes? C'est
l'état-major de la soutane qui suppor-
tera la peine de ses fautes ? La répres-
sion légale atteindra nos chefs les pre-
miers?
A l'école de tir, on enseigne aux sol-
dats qu'il faut viser, de préférence,
parmi les ennemis, les officiers.
En vertu d'une règle analogue, il
convient d'abattre les directeurs du
mouvement de résistance congréga-
niste, plutôt que de s'acharner contre
des converses quelconques, incons-
cientes à peu près de la besogne qu'on
leur donne à faire.
Décourageons les abbés Pifïaut
livrées à elles-mêmes, les sœurs Ber-
nard n'ont pas assez d'initiative ni
d'adresse pour entraver longtemps
l'action de la loi.
Quant au second jugement, pronon-
çant un double acquittement - doute
tie faveur — il ne devait pas jnoiHé
désoler le cardinal Perraud et son en-
tourage. "--
Rappelons que lé disposilitrepro-
Àmt notamment une lettre du vicaire
général Gauthey, de l'évêché d'Autun,
dans laquelle ce prêtre donne des ins-
tructions à ?a supérieure d'une congré-
gation pouf résister aux lois de laïcisa-
lion ou pour les tourner.
Ainsï, dans l'une comme dans l'au-
tre aftiire, oïl voit donc le clergé sécu-
Mer 5e mêler au « régulier » gour es-
sayer de mettre en défaut la volonté du
pouvoir législatif. -,
Je demande pardon au lecteur d'a-
voir tiré, plus longuement peut-être
qu'il n'était nécessaire, la leçon des
jugements d'Autun. Ils comportent
eux-mêmes leur enseignement et ne
nécessitent point le commentaire.
Cependant, il n'était pas tout à fait
'inutile d'indiquer que la Semaine reli-
gieuse du cardinal Perraud ne s'em-
porte pas sans raison contre les juges
'de l'abbé Piffaut.
La Semaine croit pouvoir se recom-
: mander de « l'indignation de tous les
'honnêtes gens, lorsque le tribunal,
composé de M. le président Deville-
ibieliot et de M. Proteau et Duvoucoux,
rendit son jugement ». Elle croit, « si
elle en a bien saisi le sens à l'audience,
(qu'il serait facile de dégager de leurs
'considérants cette conclusion, qu'au
:delà de sœur Bernard et de l'abbé Pif-
faut, on a voulu atteindre tout un or-
dre de choses et de personnes des plus
vénérables; ce qui expliquerait, du
moins en partie. la sévérité de la con-
damnation portée contre ces deux in-
culpés ».
Le journal du cardinal Perraud an-
nonce que M. Pifiaut a interjeté appel
devant la Cour de Dijon. Espérons qu'il
y a des juges, à Dijon, comme il y en
a à Autun.
La Semaine Religieuse, malgré ses
fracas, ne s'abandonne pas au déses-
poir. Elle dit :
Des .marques de sympathie viennent nom-
breuses aux deux condamnés, des rangs du:
,peuple, comme des hautes classes do la société,
ide bon nombre de nos adversaires comme de tous
nos amis. N'est-ce pas là un heureux signe, qui,
montré que tout sentiment de liberté n'est pas
encore éteint dans le cœur des Français et qui:
donne à espérer, dans un lointain que Dieu
seul connaît, de beaux jours après la tem-
pête ?
Ainsi, récriminations, appel du juge-
ment, malédictions lancées contre les
juges, nommément désignés, applau-
dissements aux condamnés, et pro-
Imesse non voilée de pousser avec ac-
tivité la guerre déclarée à la Républi-
que et à la loi, tels sont les procédés:
du clergé séculier pris en flagrant délit
de complicité active avec les congré-
[ganistes. Le gouvernement compren-
dra- t-il enfin qu'il y a non seulement;
:des moines, mais des curés ligueurs ?
Et ces curés sont revêtus, par l'Etat
français, d'un caractère officiel. Et les
évêques se dressent devant les juges,
exigent que la robe le cède à la sou-
tane, tentent de déconsidérer, par le
journal ou par la parole, les rares ma-
gistrats qui prétendent rester libres
vis à vis de l'Eglise.
Le Concordat a créé un quatrième
pouvoir : le pouvoir ecclésiastique qui
empiète sur les trois autres, qui sera
satisfait seulement le jour où députés,
ministres et magistrats rivaliseront dé
zèle au service de Notre Sainte-Mère
la Religion romaine. Il serait urgent de
rompre, avec cette politique concorda-
taire qui nous vaut tant de mécomp-
tes.
Hugaes Destrem.
LE DISCOURS DU TRONE ANGLAIS
I
Le discouis du trône a été lu
hier, à la clôture du Parlement
anglais. :.
Il convient de noter que les
premières lignes de ce discours
sont pour parler - avec sympathie
du voyage à Londres de M. Loubet : « Ré-
cemment, dit le diseours royal, le Prési-
dent de la République française a été
mon hôte, et sa visite a donné lieu
à une remarquable manifestation des
.sentiments de cordialité mutuelle qui
existent entre les deux pays. » Quant à la
visite des parlen entaires à Londres , le
gouvernement d'Edouard VII n'avait pas à
en parler, puisqu'il s'agissait là d'une dé-
marche particulière aux députés des deux'
nations pris individuellement ; mais les
lignes consacrées au voyage du Présidenti
sont intéressantes : les mots de « cordialité
mutuelle » sont de ceux auxquels nous
n'étions plus habitués à fàire appel depuis
quelques années pour qualifier la nature'
des relations entre les deux grands pays.
:Ces mots indiquent tout au moins que les
efforts des nationalistes pour brouiller défi-i
:nitivement les deux nations voisines ont!
échoué.
En dehors du passage visé plus haut,!
nous ne voyons plus à noter dans le dis—
cours que quelques mots relatifs à la situa-
tion en Macédoine. Cette situation « con-1
tinue à être un sujet d'anxiété générale))
déclare le discours et il ajoute que le gouver-
nement anglais « agissant de concert avec
ceux d'Autriche-Hongrie et de Russie, et
les signataires du traité de Betlin. s'est effor:
cée de circonscrire l'étendue du soulève-
ment, et de faire comprendre aux intéressés h
la nécessité de, rester calmes et d'exercer;
une contrainte pour eux-mêmes )) ; les « in-
téressés » ce sont à la fois, je le suppose, la
Porte et les populations chrétiennes. « J'es-
père fermement, lisons-nous encore, que le
plan de réformes imposé à la Porte par les
deux puissances. qui -s'y trouvent le plus
(directement intéressées, plan que mon gou-
vernement a soutenu avec énergie, peut
réaliser quelque amélioration dans-la con-
dition de toutes les classes de la population
en Macédoine. »
Evidemment ce ne sont pas là des. paro-
tes d'extrême confiance; on n'ose dife que
toute complication ultérieure soit écartée ;
ce n'est pas non plus le langage d'un gou-
vernement qui s'attendrait à une catas-
trophe. On a donc le droit de croire que,
dans la pensée du Foreign-Officer la si-
tuation en Orient, si çllç est tendue, n'est
j)jts désespérée^ — ,:
LEPROBlEME DU STYLE
Les langues universelles. — Le style
et les idées. — Un livre de M. Rémy
de Gourmont. — La méthode de
M. Albalat. — Le génie et l'or-
thographe.
Notre éminent collaborateur, M. Lucien Vic-
tor-Meunier, a pris ces jours derniers, à cette
iméme page, dans un article très combatif et de
haute portée littéraire, la défense de la langue
française contre ses envahisseurs.
Il n'est pas de jour, en effet, où l'esprit de
vandalisme, sous couleur humanitaire, ne sus-
cite l'éclosiou d'un volapuk, d'un baltha, d'un
espéranto ou d'une langue bleue, destinés au,
dire de leurs préconisateurs à faciliter les rela-
tions commerciales des peuples devenus frères
ou tendant à le devenir.
Mais s'il ne s'agissait que de réduire à merci
les profanations d'un culte destiné à conserver
la beauté traditionnelle de notre langage lit-
téral, la tâche serait facile. Nous avons d'au-
tres ennemis à combattre, et ceux-là sont les
plus dangereux. Il s'agit de ceux d'entre les
philologues qui prétendent enseigner au pre-
mier venu l'art d'écrire, de se créer un style,
au moyen d'une méthode, 'ou d'un formu-
laire ; quelque chose comme l'allemand ou l'an-
glais en vingt leçons.
De tels grammates prétendent avoir aussi
résolu le problème du style, auquel un écri-
vain de premier ordre, M. Rémy de Gour-
mont, a consacré tout récemment, avec quel-
que fruit, un ouvrage des plus intéressants.
En lisant un chapitre d'un livre sur l'Art
d'écrire, le critique sagace et affiné auqael-
nous devons La Culture des Idées et l'Esthéti-
que de la Langue française, a failli se pâmer
devant la méthode d'enseignement proposée
par M. Albalat. Négliger son goût particulier,
et lire les livres où il y a du talent, en souli-
gnant d'un passage les traits qui sont à rete-
nir ; farcir peu à peu sa mémoire de ces nom-
breux clichés et les servir dans sa prose, en
reléguant toute expression qui pourrait, n'é-
tant pas sortie de ce moule, être suspecte d'o-
riginalité, telle est la formule recommandée.
(Agiter avant de s'en servir.)
Cela, sous prétexte de souscrire à l'esprit
d'imitation qui fut de tout temps, affirme ce
gnostique lexicologue, le guide des maitres et
des grands écrivains de notre littérature.
L'imitation dans la littérature
A l'entendre, La Fontaine n'est qu'un imita-
teur d'Esope ou de Phèdre, La Bruyère un co-
piste de Théophraste, et ainsi du reste.
Il semblerait ainsi que ni le goût, ni la sen-
sibilité ne dussent entrer en ligne de compte
dans le rôle d'un écrivain. Seule, l'assimilation
créerait les œuvres définitives.
: Ce raisonnement est du même genre que la
théorie qui préfère à l'originalité du style, l'ap-
i parence novatrice du sujet, comme s'il y avait
ici bas un sujet vraiment neuf, sur lequel per-
sonne ne se fût jusqu'à présent exercé.
La caractéristique d'un style est cependant
I bien facile à discerner, et il n'est pas d'esprit
exercé dans la connaissance des auteurs qui ne
: puisse nommer tel grand écrivain français à la
seule lecture d'une de ses pages. Si le style
n'était qu'un mélange de tournures emprun-
tées de toutes pièces aux œuvres du passé,
comment se dégagerait cette personnalité ? En
outre, les variétés générales du style ne doi-
vent pas leurs fluctuations à l'originalité seule-
de chacun des écrivains, mais encore à l'évolu-
tion de l'âme populaire à travers les époques.
De même qu'on découvre aisément qu'un ta-
rbleau se rapporte esthétiquement à l'école ita-
lienne, flamande ou française, et qu'il est aisé
même de dater le siècle qui l'a vu peindre, de
même on peut délimiter là période littéraire
qui a produit tels ou tels chefs d'oeuvre. La
manière de Rousseau n'est pas celle de Vol-
taire, non plus que l'art poétique de Victor
Hugo semblable à celui d% Ponsard ; pourtant
l'on sent fort bien a leurs vers que ces deux
poètes ne sont pas du même temps que Racine
et Boursault.
C'est assez dire que le succès et la gloire des
maîtres résidaient non. dans l'application, mais
dans le" mépris des procédés.
Le fond et la forme
Je ne crois pas que l'excès de rhétorique ait
jamais contribué à engendrer des chefs-d'œu-
vre. Ces derniers conservent toujours en eux
l'attrait d'une grande simplicité. « En littéra-
ture, dit M. Rémy de Gourmont, le fond des ,
choses a une importance absolue ; aucune des
variétés de la littérature ne peut se soustraire
à la nécessité de creuser des fondations et de
les maçonner solidement. » Autre chose est en
effet de trouver des idées belles et des idées neu-
ves. Dailleurs,les écrivains riches d'idées,grÁce
au don précieux de la mémoire visuelle qui
leur permet de replacer dans leur cadre les
personnages et les objets qu'ils font vivre, ces
écrivains-là ont toujours eu des tendances à la
concision.
Quoi de plus vide en effet qu'une belle phrase,
qui ne s'appuie pas sur une pensée, solide et
;consistante ? Quoi de plus creux qu'un beau
vers vide de sens ?
f On pardonne même volontiers aux œuvres
-défectueuses dans leur forme, lorsqu'elles évo-
luent beaucoup d'idées saines ou même de jo-
uis tableaux retraçant la vie.
En pareil cas, plus que jamais, le style de-
vient la pensée même. Il ne viendrait à per-
sonne, je pense, l'idée de reprocher aux pay-t
isanneries qui fleurissent le jardin de la enan-i
son des 18' et 19e siècle, leur insouci de la!
[grammaire. On peut avoir le génie de la des-:
tcription, et au plus haut point l'éloquence du'
t'bon sens, sans posséder pour cela de l'ortho-
graphe.
La liberté de l'orthographe ,.
Celle-ci ajoute un ornement au talent et dé-
;montre que l'auteur a intelligemment étudié,
les étymologies du vocabulaire, mais elle n'est
rpas la condition sine quâ non du style, comme
se le figurent les gens qui attachent de l'impor-
tance aux examens administratifs comportant;
,une dictée hérissée d'aspérités orthographiques;
sur lesquelles, le plus souvent, les jurés sont
loin d'être er vmêmes bien fixés..
L'ortgographe est comme le décor extérieur
d'une bolle phrase. Mais il faut prendre garde
à ce que les latitudes données à son sujet par
le décret ministériel de 1900 ne suscitent des:
fautes graves contre la logique. Or la logique,
en matière d'orthographe, consiste à -respecter
les origines traditionnelles des mots, en sorte
qu'on puisse reconnaître leur source à leur
simple lecture.
Le son du mot ne suffit pas dans la langue
française, si chargée d'homonymes, à distin-
guer les origines,et si nous venions à perdre les
traces de ces dernières, l'étude de la langue, au
lieu d'être intelligemment conduite, ne serait
plus qu'un jeu de perroquets.
11 faut savoir non seulement l'orthographe,
mais surtout le français, et dresser son oreille
à nô pas s'accoutumer aux confusions non
plus qu'aux discordances phonétiques.
r Tout compte fait nous sommes fondés à sup-
poser, que lil. Albalat, qui trouve en M. Rémy
de Gourmont le plus érudit et le plus autorisé
des censeurs, n'a pas entendu apprendre à
écrire à ceux qui le savent mieux que lui,
¡mais aux modestes bourgeois dont les ambi-
tions littéraires se bornent aux lettres de nou-
vel an, aux réclamations locatives et au libellé
ooropports administratifs.
• Or ce n'est plus ici l'art décrire qu'il eût dû
envisager. II s'est trompé de nom. C'est la
sdence d'écrire, l'application des règles de gram-
maire qu'il a entendu vulgariser. Quel dom-,
mage ! Nous y perdrons certainement des au-:
tographes bien amusants.
ALCANTER DE BRAHM.
Voix* à la 3e page
les Dernières - Dépêches
LE PRÉFET DE L'ORNE
J'ai déjà signalé dans ce journal l'adminis-
tration cléricale et réactionnaire du préfet de
l'Orne, M. Moussard. C'était par la parole
qu'il combattait la République, aujourd'hui
c'est par la plume.
J'ai publié, dans l'Avenir de l'Orne du 5 août,
la note suivante : a
LE PRÉFET ET LES CONGRÉGATIONS
L'école de filles de Sainte-Honorinc-Ia Chardonne
ayant été laïcisée il y a 5 ans, une religieuse
ouvrit une école libre et cette école a existé jus-
qu'à ce jour dans un local appartenant à la Provi-
dence de Sées.
Cette communauté de Sées avait depuis 50 ans
un important établissement scolaire dans la ville
voisine de Condé-sur-Noireau. Un arrêté de ferme-
ture lui a été notifié il y a près de deux mois,
tandis qu'on semble ignorer l'existence de l'éta-
.blissement qu'elle possède à Sainte-Honorine et
sans autorisation. Pourquoi cette différence de
traitement?. Condé est dans le Calvados et
Sainte-Honorine dans l'Orne l
:.. T. BUSNOT.
M. le préfet s'est empressé de répondre (Ave-
nir de l'Orne du 9 août) : -
L'école privée de filles de Sainte-Honorine-la-
Chardonne est installée dans les dépendances d'un
établissement congréganiste régulièrement AUTORISÉ
par décret dit 7 décembre 1859. Il n'y a donc pas
lieu à fermeture.
Le préfet de l'Orne.
E. MOUSSAIW.
Les mots soulignés l'ont été par M. le préfet.
Vous remarquerez la manière jésuitique
dont ce communiqué est rédigé. M. Moussard
ne dit pas que l'école est autorisée, il dit
qu'elle est située dans un établissement auto
risé. Il y a là une distinction très importante
que le public, qui n'est pas habitué à ces ques-
tions, ne saisira pas ; c'est évidemment pour
l'induire en erreur qu'il est rédigé en ces ter-
mes.
Tout le monde savait ici que, vers 1860, la
Providence de Séls avait été autorisée, à cause,
d'un legs, à avoir,dans la commune de Sainte-
Honorine,une sœur pour soigner les malades,ce
qui est bien différent d'une école.
Voyons le décret de 1859 cité par le préfet,
le voici :
La Providence de Sées est autorisée à fonder,
dans lacommunede Sainte- Honorine-la-Chardonnel
un établissement de sœurs de son ordre à la charge,
par les membres de cet établissement de se con-
former exactement aux statuts approuvés par le
décret du 22 janvier 1811.
C'est donc le décret de 1811 qui nous rensei-
gnera :
Décret impérial contenant Brevet d'institution.
putlique des sœurs hospitalières attachées à l'hô-
pital de Sées.
1* Les statuts de la congrégation des sœurs de
la Providence de Sées sont approuvés et reconnus.
S" Le nombre actuel des maisons de la dite con-
grégation pourra être augmenté avec notre auto-
risation selon les besoins des hospices et des pau-
vres.
Vous voyez que, contrairement aux affirma-
tions de M. le préfet, la Providence de Sées n'a
pas été autorisée à avoir des écoles et que toutes
ses écoles doivent être fermées partout où il en
existe.
Un grand nombre de congrégations ont leurs
sièges dans l'Orne, il devient nécessaire d'exa-
miner les décrets d'autorisation et de voir si:
elles s'y sont conformées; on ne peut avoir
confiance aux indications de M. Moussard.'
Je ne nie suis occupé que de 11 Providence de
Sées.
M. Combes peut-il maintenir un tel fonction-
naire à là tête d'un département? C'est un ré-
publicain qu'il nous faut et non un jésuite. -
T. Husnot
•
AFFAIRES D'ESPIONNAGE
En France
Belfort, 14 août.
Sur l'ordre du parquet un nommé J. L.,
alsacien, âgé d'une trentaine d'années, qui
iavail acheté tout récemment le château d'Aigre-
mont, à Frontaine, village français voisin de
:la frontière, vient d'être arrêté sous l'inculpa-
tion d'espionnage. Il était surveillé depuis
longtemps.
Au Tyrol
Bosen, 14 août.
On vient d'arrêter à Fassatala, deux es-
pions italiens : Ange le Bnzzolli, professeur de
langues à Venise, et Archimèdes Benutti, em-
ployé des postes de Florence. Les deux Ita-
iliens, en possession desquels on a trouvé plu-
sieurs descriptions de divers forts de la fron-
tière tyrolienne, ont été envoyés à la prison
de Trieste.
(Voir, la suite a ans notre DEUXIEME EDITION)
m., n .g ♦
LORD SALISBURY MALADE
Londres, 14 août.
La santé de lord Salisbury donne depuis
:trois ou quatre mois des inquiétudes. L'une
ides sommités médicales de l'Angléterre, sir
îDouglas Powell, a été appelé à Hatfield, près
rdu malade. Lord Cranborne, fils ainé de lord
Salisbury, et son frère, lord Hugh Cecil, se
trouvaient aux côtés de leur père. On annonce,
aujourd'hui, qu'après une crise grave une
amélioration s'est produite et qu'il n'y a plus
de danger immédiat à craindre*
(Voir la suite dans notre DEUXIEME EDITION)
UN NOUVEAU FUStL ITALIEN
(De notre correspondant particulier)
r; Rome, 14 août.
Le ministre de la guerre a donné l'ordre de
faire dans l'école de tir centrale de l'infanterie
des expériences avec un nouveau fusil.
Il s'agit surtout d'étudier l'effet de l'armn à
une distance variant de 650 à 1.000 mètres.
La dépopulation en Angleterre
(De notre correspondant particulier)
Londres, 14 août.
Le dernier rapport du conseil hygiénique de
la région de Battersea constate que dans l'an-
née 1902, le nombre des naissances a diminué
de 3, 3 pour cent.
Il est tombé à 28, 2 par 1000, c'est le chif-
re le plus bas qu'on ait jamais pu consta-
ter ; cette diminution de la natalité ne se
borne pas à Battersea; on l'a constatée aussi
dans des contrées habitées par une population
exclusivement anglo-saxonne.
L'AFFAIRE HUriîBERT
SIXIÈME AUDIENCE :
La joie de Thérèse. — Après la déposition de Dumort. - Le{
mystère du coffre-fort. — Audition de M. Bonneau. — Une
scie. - Parlez tout de suite. — Tout le monde proteste.
— Armand Parayre. — La Rente Viagère. — Les
confidences de Mme Humbert. — Naissance
mystérieuse. — Les diplomates.. — La dépo-
sition de Me LanqueSt. — M. Cattaui. -
,. Thérèse se fâche.
S'il faut en croire quelques avocats ayant
des liens d'amitié avec les défenseurs de la
iamille Humbert, la Grande Thérèse en ren-
trant jeudi soir dans sa cellule de la Con-
ciergerie aurait manifesté une joie très
vive de l'attitude dn jury pendant la dépo-
sition de M. Dumort, l'ancien notaire qui
:a vu les millions dans le coffre-fort et en
est resté tout ébloui, non moins que du
souvenir vivace que lui ont laissé les frères
Robert et Henry Crawford.
Mme Humbert a conclu de cette attitude
que les jurés paraissaient sympathiques à
sa cause et qu'elle bénéficierait d'un ver-
dict d'acquittement comme dans le procès
CattauÏ.
La Grande Thérèse prend sans doute
ses désirs pour la réalité. Je la crois très
fine et très perspicace. Mais qu'elle ait le
flair assez subtil pour saisir les impressions
du jury sur telle ou telle déposition, c'est
ce dont il est permis de douter.
Si Mme Humbert avait vraiment cette
conviction d'être acquittée, parce qu'elle a
cru sonder les reins et les consciences des
jurés, ce serait peut-être fâcheux. J'entends
qu'elle serait capable alors de nous priver
de sa confession finale. Quelle rude et
amère déception pour tout le monde, si le
mystère du coffre-fort demeurait impéné-
trable et si on ne connaissait pas le vérita-
ble nom des Crawford !.
C'est de tout cela qu'on cause, dans le
prétoire, avant l'ouverture de l'audience et
aussi des dépositions des frères Parayre et
de M. Lanquest, le notaire de Mme Hum-
;bert,qui seront certainement entendus dans
la journée.
On croit que tous les témoignages seront
jterminés lundi prochain. Le réquisitoire et
[les plaidoiries pouvant occuper trois au-
diences il serait possible, dans ces condi-
tions, que le verdict fût rendu jeudi dans
la soirée.
Une bonne nouvelle est annoncée par
le président Bonnet dès l'ouverture de l'au-
fdience. à savoir que deux jours de congé
isont accordés aux accusés, aux jurés, à la
.cour et à la presse. Pas d'audience aujour-
d'hui, ni demain, quelle joie de pouvoir
souffler pendant quarante-huit heures!.
La faillite des Humbert
Le président. — Huissier, faites entrer M.
Bonneau, syndic de la faillite.
M. Bonneau, syndic de la falÏÏÎtfc Hum-
jbert, expose que le jugement du tribunal
de commerce qui a prononcé la faillite n'a,
mis en cause que M. Frédéric Humbert et
que ce jugement ne s'applique nullement à
Mme Humbert, sa femme.
— L'inventaire fait à Paris, ajoute M. Bon-
neau, s'est élevé à 1,041,000 francs, celui des
Vives-Eaux à 100,000 francs, celui de Celey-
ran à 130,000 francs. La vente de l'actif à pro-
duit, à Paris, 1,800,000 francs, dont l,*fuG,000
francs pour les table nu x et dessins. Le mobi-
lier des Vives-Eaux a été vendu 100,000 francs.
Les vins trouvés à Celeyran 110,000 francs. En
présumé, la vente du mobilier a produit 2,300,000
'francs. Les ventes d'immeubles s'élèvent à1
;2,260,000 francs. Il reste à réaliser; de 7 à:
•800,000 francs d'immeubles, dont ceux de Tu",
nisie. Le passif hypothécaire qui grève les
'immeubles s'élève à 4.500,000 francs, soit un
déficit d'un million 500,000 francs au bas mot.
Le président. — Quel a été le chiffre de la
circulation des effets Humbert ?
Le témoin. — Sept cents millions eo dix-sept
ans.
Le président. — Vous avez, sur chaque
créance, des dossiers dressés par Frédéric Hum-
bert?
Le témoin. — J'ai trouvé des dossiers assez
complets, mais tous les créanciers sont loini
d'avoir produit. Les plus forts surtout se sont
abstenus. Je n'ai reçu que pour vingt-huit mil-
lions de production.
Le président. — Quel est le chiffre approxif
matif du passif réel ?
Le témoin. — C'est bien difficile. Le passif
normal s'élève à in millions. En ce qui con-
cerne le passif réel, jo ne puis dire que quel-;
que chose d'approximatif. Si ce passif réel s'é- j
lève à 50 millions, ce sera tout.
Mme Humbert. — Il n'atteint même pas 30
millions.
Le témoin. — J'eère le faire irédaire. Mais
je ne sais si j'y arriverai pour tous et surtout
pour les tiers porteurs.
Les toilettes de Thérèse
Sur interpellation du président. M. Bon-
neau, après avoir expliqué qu'il lui est im-
possible de dire les sommes exactes qui
ont été versées aux créanciers—et à l'appui
il cite M. Marchand qui s'est porté pour
30 millions et qui ne paraît être créancier
que pour huit ou neuf millions—donne des
indications sur le chiffre des dépenses de la
maison Humbert.
— Sans compterdit le témoin, le loyer et les
toilettas, j'évalue à 193.000 fr. par an les dé-
-penses ordinaires des Humbert.
Le président. — Ah ! les toilettes !. Rien
que chez Doucet, il y en avait pour 130.000
francs.
Mme Humbert. — Pardon, le chiffre que
vous citez remonte à l'époque où ma sœur s'est :
mariée. Ce fut tout à fait exceptionnel. Vous ci-
tez ce chiffre mais vous ne parlez pas des années
où je ne dépensais que 3.000 fr. pour m'ha-
biller. Enfin, M. le président, vous oubliez que
ma fortune me permettait de faire quelques
dépenses.
n Le président. — Votre fortune? Laquelle?
Mme Humbert. — Mais celle qui était enfer-
mée-dans le coffre-fort.
Le président. — Et dont nous attendons tou-
jours la révélation. A ce propos, où touchiez^-
vous les coupons que certains témoins auraient
.vus, de leurs yeux vus? g
Mme Humbert. — Les frères Crawford qui
géraient la fortune me remettaient tous les trois
mois l'argent qu'ils touchaient à la Dette pu-
blique.
La scie du secret reparaît
Il est écrit que pas une seule audience M
se passera sans que nous entendions la sch.
du secret.
Le président demandant à Mme Humbert,,
de préciser la caisse où les frères Crawford
touchaient les coupons, elle se redresse lé-1
gèrement et dit :
- Je vous le dirai quand le moment sera
venu. On saura tout.Crawford et les millions» '!
tout cela n'est pas un mythe, ils existent.
L'insistance de M. Bonnet à vouloir-»
arracher des aveux à Mme Humbert ne pa-.
raît pas du goût de son mari qui fait enten- ;
dre des protestations déjà vieilles de deux'
jours.
M. Frédéric Humbert est, en effet, per-
suadé que le président cherche une diver-
sion .aux débats et qu'une pareille tactique-
ne peut que nuire à l'accusation dans l'es-
prit des jurés.
Alors pourquoi se plaint-il ?
Mais M. Bonnet ne se laisse pas émou-
voir et Mme Humbert répétant pour la
vingtième fois peut-être : « Je parlerai a,
il lui répond nettement : t
- Tout de suite!..,
Mme Humbert. — Quand je pourrai mettre
la main daps la main de mon mari et recou-
vrer ma liberté avec lui.
Le président. — Voyons, mais il ne dépend
que de vous de hâter cette précieuse liberté.
Mme Humbert. — Vous oubliez ma fille. Jo
veux que les débats se produisent en entier et
que M. l'avocat général ait prononcé son ré-
quisitoire. Vous saurez tout.
Le président. — C'est entendu. Ainsi voua
refusez de dire où los coupons étaient touchés ?
Mme Humbert refait en raccourci sa dé-
claration de l'autre jour :
On touchait les coupons éhez M. Bernard
qui est mort depuis. Je dirai tout bientôt.
Je sens que je serai acquittée et que je sortirai
d ici mercredi ou jeudi, libre avec Frédéric.
Vous souriez, M. le président (vive hilarité).
Vous avez tort. Je n'ai jamais fait de tort à.
personne. Et si j'étais condamnée je ne pour-
rais pas survivre un seul jour à cette condam..
nation, non pas un seul jour,..
Le président. — Mais nous oublions le té-*
moin. Veuillez continuer, M. Bonneau.
Le témoin parle du domaine de Celer
ran, puis de l'hôtel de l'avenue de 1
Grande-Armée, dont les tableaux ont étf
vendus dans des conditions avantageuses,
Les autres ventes ont été également fruc
tueuses, grâce à l'engouement èt à la cu<
riosité du public.
M. Humbert proteste
M. Frédéric Humbert. — Je tiens à dire I,
messieurs les jurés que nous n'avons jamais
fait de commerce et qu'on n'avait pas le droit
de nous mettre en faillite.
Je n'ai jamais vendu ae tableaux, si ce n'est
les miens t. je n'ai jamais vendu devin si C81
n'est celui de nos propriétés et si on m'a mtè
en faillite, c'est simplement pour sauver Ni
Cattaul de la correctionnelle qui le réclamait.
Le président. — Et vous avez acquiescé au:
jugement vous déclarant en faillite ?
Frédéric. — Je n'ai signé, aucun acquiesoo-i
ment. Je n'avais pas à m'élever contre le ju-
gement du tribunal de commerce qui avait{
force de chose jugée, je ne puis empêcher qu'il
fasse jour lorsqu'il fait jour et toutes mes ré-!
criminations n'auraient pu que créer un prs
judice à mes créanciers, ce que je ne voula.
pas faire. Jusqu'à présent il ne m'a jamais é
possible de protester, et aujourd'hui je pro-t
teste.
Mme Humbert. - Et moi aussi je pro-^'
teste.
M. Bonneau. — Ce n'est pas vous, madame, ;
qui êtes en faillite. Je répondrai à M. Hum-,
bert qu'il a fait commerce d'agence d'affaires, :
acheté et vendu des bijoux, pratiqué des opéW
rations de banque. La faillite a donc été 16-
gaiement prononcée.
Le président. — Faites venir M. Arman
Parayre.
Encore un qui a vu les millions
C'est au milieu de la curiosité généraïa
que l'homme de confiance de Mme Hum-
bert s'avance vers la barre.
Le président. — Veuillez faire votre décla
ration.
M. Parayre. — Ma déclaration ?. Sir quoi 7<
Tout ce que je puis dire en ce qui me concef J
ne, est l'affirmation d'un incapable. J'ai étcl,
arrêté alors mêmo que le délit qu'on préten- «
dait m'imputer n'en constituait pas un et j'ai i
été retenu pendant 41 jours pour une chose
qui demandait à peine deux heuras pour êtr
élucidée. Voilà pour ce qui me concerne.
Le président. — Mais savoz-vous quelque
chose des inculpés, pouvez-vous me dire quel- f
que chose d'eux ?
M. Parayre. — Monsieur le président, veuil- i
lez me poser des questions, j'y répondrai ; jei,
ne sais sur quoi j'ai à vous donner des expli-i
cations. !
Le président. — Avez-vous vu des liasses do
billets?
M. Parayre. — Oui, souvent.
Le président. — Des enveloppes ?
M. Parayre. — J'ai vu des paquets de titres,
des paquets qu'on prétendait renfermer des
titres.
Le président. — Avez-vous vu des paquets
de titres?
M. Parayre. — J'ai vu des paquets de papier
couleur jaunâtre, enveloppés de ficelle et avec,
des cachets rouges.
Le président. -- Est-ce qu'un jour votre(
femme, en ouvrant une bibliothèque, ne s'esfc,
pas trouvée en face d'une liasse de billets ? j
M. Parayre. — Oui, mais cela remonte bien.
loin..
Le président. — Je vous le demande.
M. Parayre. — C'est vers 1882 ou 1883. Un
jour, Mlle Maria Daurignac avait égaré la clôj
d'une armoire, elle nous fit demander SI dans,
nos trousseaux de clés nous ne trouvcrions(
pas une clé qui pouvait ouvrir Cette armoire,
ou plutôt cette bibliothèque, car c'était une bi- (
bliothèque. Nous avons pris nos trousseaux efc;
inous en avons trouvé une qui ouvrait cette bi- i
Ibliothèquè. A l'ilitérieur, nous "avons vu des?
[Juillets de banque, d'énormes liasses; par ajhf
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