Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-05-19
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 19 mai 1903 19 mai 1903
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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fit chez MM. LAGRANGE, CERF & €»•
6, place de la Bmwse, 6.
'êdresoc Télégraphique: XIX* SIÈCLE « PARIS
ABONIVEMEÎVTS -
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Dép ff f. — 12 f. - 24 L
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1903 ——
s sont reçus sans frais
nans tous les Bureaux de Posta
REDACTION : 14, rue du Mail, Paris
De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du matin
ISTo 12121. - Mardi 19 Mai 1903
30 FLORÉAL AN 111
ADMINISTRATION ; 14, rue du Un,iI
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
- NOS LEADERS
« Pensées!. oinions »
Sous ce titre, qui est d'ailleurs celui
de l'ouvrage, Lucien Victor-Meunier et
Hugues Destrem ont déjà parlé du beau
livre que vient de publier Henry Maret
à la librairie Flammarion. Ils l'ont fait
en termes excellents. Dois-je ajouter
qu'ils n'ont rien oublié? Donc, une seule
Chose m'excuse d'y revenir après eux :
c'est que je ne puis résister au plaisir
d'écrire ce que je pense de notre émi-
nent confrère du lladical, dont j'ai
l'honneur d'être le collègue au Parle-
ment.
Henry Maret est un philosophe doux
et aimable, largement indulgent, ayant
une longue pratique des hommes et des
choses. Je recherche volontiers sa com-
pagnie. Il est rare qu'à la Chambre je
ne sois pas assis à ses côtés. Je ne con-
nais pas d'auditeur plus calme et plus
patient Il écoute tout ce qui se dit à la
tribune avec une attention admirable et
pourtant, ce tout n'est pas toujours in-
téressant. Si c'est un ami politique qui
a la parole, quoi qu'il dise, Maret l'ap-
plaudit. Si c'est un adversaire, et si par
hasard il regarde du côté de Maret, un
haussement dédaigneux d'épaules l'a-
vertit qu'il a commis une sottise. Et
c'est tout. Maret n'interrompt jamais.
Il le pourrait cependant, car il pos-
sède l'art des formules nettes et préci-
ses parce que brèves, ironiques aussi.
L'indulgence de Maret ne va pas en
effet sans une certaine ironie qu'il garde
pour lui ou qu'il indique à ses proches
voisins, à moins que la généralisant et
n'ayant pas l'air de l'appliquer à une
personne communément désignée, il
n'en prenne pour confidents, dans un
vigoureux article, ses lecteurs du Radi-
càL Henry Maret a la pensée claire et
l'écriture si limpide des grands écri-
vains du XVIIIe siècle ; je ne crois pas
j le diminuer en affirmant qu'il y joint
un peu de cette humour caustique de
Marc Twain, qui est plus que de la sa-
vante ironie, quelque chose qui vous
ridiculise un homme ou vous tue une
idée sans avoir l'air d'y toucher et avec
le vrai langage du bon sens.
Pourquoi ne parle-t-il pas ? J'ai le
souvenir de deux ou trois interventions
à la tribune que d'autres ont pu pren-
dre pour hâtives, mais qui étaient
d'une belle langue, ciselée à plaisir,
pleines d'esprit, celui de Figaro, abon-
dantes de savoir et de bon sens. Je répète
le mot à dessein, car Maret est le bon
sens même. Il n'est sujet à aucun em-
ballement ; il n'est pas davantage pes-
simiste. Toujours la note juste. Mais
je sais pourquoi Maret ne parle pas. Sa
modestie en est la seule cause. Il a
peur de paraître, d'avoir l'air surtout
de vouloir paraître. Peut-être aussi
rçdoule-t-il sa propre critique. Cet
homme exquis pour les autres, si en-
courageant, si peu rigoureux, est pour
lui-même d'une sévérité excessive.
Je lui demande pardon d'évoquer de
vieux souvenirs. Des professeurs de
vertu se sont attaqués à lui, jadis, il y a
bien longtemps. Vous savez ce qu'est le
professeur de vertu? En général, il a
- toujours quelque chose à se faire par-
donner, et le malheureux croit le faire
oublier en suspectant les autres, en
étant leur censeur implacable, en appe-
lant sur eux la vengeance des justes
lois. Ce que, pour se faire prendre pour
un honnête homme, il déverse d'inju-
res et de calomnies sur ses semblables
est inénarrable. Naturellement, un de
ceux-là ou plusieurs, je ne sais com-
bien, devaient un beau jour essayer de
.salir Maret.
Il n'eut qu'à repousser du pied l'ac-
cusalion immonde pour être tout de
suite grandi, mais, en même temps,
ce brave et excellent homme avait fait
la connaissance de la justice de son
pays. Il l'a dépeinte, bien souvent, en
des termes qu'il croyait impitoyables,
que d'autres auraient voulu plus impi-
toyables, mais qui ne l'étaient pas
assez pour céler son inépuisable bonté.
Si j'ajoute que Maret est un libéral
de vieille roche, un de ces libéraux qui
n'acceptent pas plus de liberté pour
eux-mêmes que pour leurs adversaires,
qu'il a l'horreur des règlements suran-
nés, des codes de lois où chaque texte
paraît être une embûche pour le citoyen
le plus impeccable, que sa courtoisie
'ne se dément pas un seul instant; que,
critique d'art, il vous laisse vos artistes
incapables do savoir s'ils doivent être
plus contents des compliments décernés
ou se plaindre de la finesse acérée des
observations, — et ils optent toujours
pourlepremier terme de l'aflir 'mative-;
que, critique littéraire, il sait. tendre
une main sëcoùrable aux débutants, je
pense bien vous avoir donné une idée
à peu près exacte du vrai Henry Maret,
de celui qu'aiment tous ceux qui le
connaissent.
Encore un mot. Ce qui précède vous
indique l'homme politique quo doit
être Maret. Sa vie publïquo corres-
pond à ses sentiments intimes. Son
amour de la liberté en fait un indivi-
dualiste forcené, une sorte d'anarchiste
— j'écris le mot avec son véritable
sens — à la façon do Proudhon, dont
toutes les idées sont inspirées par le
respect de la liberté La liberté de Ma-
ret finit là où celle des autres com-
mence. Croyez-vous par hasard que ce
soit là une mauvaise doctrine? C'est la
vraie doctrine républicaine et c'est
pourquoi Maret nous est à tous un
conseiller précieux.
Lisez Pensées et Opinions. Vous n'au-
rez pas perdu votre temps. Le livre, une
fois fermé, vous n'en serez que meil-
leurs et plus républicains.
Charles Bos.
ERREUR PERSISTANTE
Le mariage purement civil de M. Marcel
Trouillot, fils du ministre du commerce,
éveilla, dès le début, les méfiances des clé-
ricaux.
— Ce n'est pas sérieux, dirent-ils. M. Mar-
cel Trouillot fera comme tout le monde; il se
présentera, d'abord, à la mairie, c'est entendu.
Mais tout de suite après, il se dirigera vers
l'église.
Or M. Marcel Trouillot et sa jeune femme
quittèrent Paris sans avoir rendu visite à au-
cun curé.
— Nous les tenonR, reprirent les journalistes
catholiques, ces dignes enfants ont été de-
mander la bénédiction d'un prêtre de la ban-
lieue.
Il advint qu'un démenti formel fut opposé à
cette affirmation.
— Nous ne sommes pas entêtés, s'écrièrent
nos confrères réactionnaires; il est exact que
la cérémonie religieuse n'a pas été célébrée dans
la banlieue; les époux ont gagné l'Espagne par
le rapide le plus direct; et c'est dans l'ombre
tiède d'une égliso transpyrénéenne que la messe
a été récitée en leur honneur.
Nouveau démenti.
*Et hier matin la presse cléricale, insensible
à des rectifications déjà si nombreuses, pour-
suivait la mystification entreprise :
— Nous savons parfaitement que M. et Mme
Marcel Trouillot ont été demander à un curé de
Saône-et-Loire la permission do fonder une fa-
mille.
Une sole qui nous est communiquée affirme
que cette dernière information est aussi fausse
que les précédentes, et que le mariage civil
n'a été suivi d'aucun mariage religieux.
Ne croyez pas que les journaux catholiques
restent cois. Ils maintiendront leur fable ; si
M. et Mme Marcel Trouillot n'ont été mariés
religieusement ni à Paris, ni dans la banlieue,
ni en Espagne, ni en Bourgogne, c'est que la
cérémonie a -eu - pour cadre une chapelle du
Poitou, de la Bretagne, du Morvan, de l'Au-
vergne, la cathédrale de Strasbour. la mos-
quée de La Mecque ou, en Extrême-Orient, les
ruines imposantes du temple d'Angkor.
Il est absolument nécessaire à la polémique
de nos adversaires que le fils de l'ancien rap-
porteur de la loi des associations se soit age-
nouillé devant le tabernacle. Autrement, il
conviendrait de croire que l'antéchrist est né
sous la forme do jeunes républicains qui, éle-
vés en dehors do l'Eglise, n'éprouvent aucun
besoin de renier leur éducation laïque. — Hu-
gues Destrem.
» —
DES ÉCONOMIES!
Des économies ! Il y a longtemps qu'il on est
question. Malheureusement la coutume est d'en
parler beaucoup et de n'y penser jamais. On
nomme des commissions d'enqllêle, on leur
enjoint de faire un travail sérieux afin quo le
prochain budget puisse comporter une dimi-
nution de dépenses. Les commissions parais-
sent vouloir se renseigner, elles font compa-
raître devant elles des ministres et des hauts
fonctionnaires. Mais l'on ignore toujours le
résultat de leurs investigations.
Quelles sont les causes de cet éUl do choses.
Elles sont multiples. Elles résident à la fois
dans l'espril de ceux qui enquêtent et dans ce-
lui do ceux qui déposent. Il est aisé de les tlé-
finir.
Le fonctionnarisme est le mal endémique
de ce temps. 11 est le cancer qui ronge, dévore
et engloutit nos finances. Tout le monde veut
à un titre quelconque occuper une charge ré
tribuée par l'Etat. Cello idée est tellement an-
crée qu'on peut fort difficilement la combattre.
On ne dit plus : tout citoyen a le droit d'obte-
nir une fonction publique. On dit : l'Etat a le
devoir de donner un emploi à chaque citoyen
et de le rémunérer. Rien n'est plus faux que
cet aphorisme.
Il suit de là, que chaque député a derrière
lui des milliers d'électeurs qui le talonnent,
qui prient, qui supplient, qui ordonnent, qui
menacent, qui gémissent.
Ils exigent un emploi pour eux, pour
leurs femmes, pour leurs fils, pour leurs
maîtresses, pour leurs nev_eu..pour leurs amis,
Ils assiègent le malheureux représentant, chez
lui, dans la rue, à la Chambre. Comment vou-
lez-vous qu'après cela, un député, si bien dis-
posé soit-il en faveur des économies budgétai-
res, ait le courage de voler la suppression de
fonctions qui sont sollicitées avec tant d'ardeur
par ses commettants?
Ce n'est pas tout. Il y alune masse de postes
inutiles, tant dans l'administration propre-
ment dite que dans la magistrature et les fi
nances. Malheureusement, on les ignore très
souvent. Pourquoi? Parce que les grands chefs,
les directeurs, croient que leur importance
serait diminuée s'ils avaient moins d'hommes
à commander.
J'ai connu un président de cour d'appel
qui a fait des pieds et des mains pour que l'on
ne supprime point deux, places superflues de
conseillers à sa cour. Il s'imaginait que c'était
lui enlever à lui-même quelque prestige. Le
Français aime à diriger. Il lui plaît de donner
des ordres à ses concitoyens. Et plus nom-
breux sont les employés dont il est la maître,
plus sa situation lui paraît enviable. C'est là
une tendance d'esprit mesquine, mais, par
malheur: très généralement répandue.
La conclusion de tout cela 1 Faisons des éco-
nomies soit ! mais commençons par nous ré-
former nous-mêmes. Ne croyons pas l'Etat
obligé de nous entretenir en échange d'un tra-
vail très limité. Et-lorsque des enquêtes sont
faites n'ontendons point Ibs directeurs des ad-
ministrations. Ils no sont point dans l'espèce
des témoins désintéressés. — L. Armbruster.
EXPÉDITION GARIBALDIÈNNE EN ALBANIE
(De noliû correspondant particulier)
Palerme, 17 mai.
Le Giornale di Sicilia publie uns interview
qu'un de ses correspondants a eue avec le gé-
néral Ricciotti Garibaldi, sur les affaires de
Macédoine et d'Albanie. Ricciotti Garibaldi a
déclaré qu'au cas où les troupes austro-hon-
groises.se mettraient en maréhe vers Salonique,
la jeunesse italienne ne saurait plus rester im-
passiblo.
Les volontaires garibaldiens envahiraient
alors l'Albanie. Ricciotti :'. déclaré se mettre à
la disposition de la jeunesse italienne, comme
il l'a fait en 1897, lors de la guerre gréco-tur-
que. Tous les préparatife sont déjà faits et dans
le cas où un débarquement des garibaldiens
sur la côte albanaise deviendrait impossible on
agirait du côté des Alpes sur la froutièro au-
trichienne* - -
LE MOUVEMENT
ANTICLERICAL
Manifestations et conférences. — A
Belleville. — Révolutionnaires et
royalistes. - Bagarres. — Nom-
breux blessés. — Protesta-
tion:- La journée à Plai-
sance. - Dans les
départements.
À la suite des nombreux appels publiés par
différents groupes de la Libre-Pensée, des ma-
nifestations anticléricales ont eu lien hier, à
Paris d'abord et ,dans un grand, nombre de
communes où des conférences et des réunions
avaient été organisées, notamment à :
Agde, Aigues-Vives, Amfreville-la-Mi- Voie,
Amiens, Angers, Argenteuil, Aubervilliers, Bar-
sur-Seine, Beaumont (S.-et 0.), Besançon, Bolbec,
BouIogne-sur-Mer, Brest, Chartres, Clermont-Fcr-
rand, Dieulefit (Drôme), EIbeuf,Grand'Combe, Gre-
noble, Laon, Le Havre, Lo Mans, Levallois (Seine),
Lille, Lillebonne (Seine-Inférieure), Limoges, Lyon,
Meulan, Miradous (Gers), Montéliinar, Morlaix,
Moulins, Nancy, Nuntes.Nemours (Seine-et-Marne),
Nîmes, Notre-Dame de-Franqueville, Nouzon [Ar-
deunos), Pacy-sur-Eure, Reims, Reuilly (Indre),
Ribérllc, Roanne, Rouen. Saintes, Saint-Amand,
Saint-Béat (Ilaute-Saône), Saint-Chaptes, Sainl-
Elienne-du-Rouvray, Saint- Hippolyte-du-Fort,
Saumur, Tours, Triel (Seine-et.,OiSe), Troyes, Va-
lenciennes, Versaille!:l,Vcsoul, Vieune (Isère), Voulx
(Seine-et-Marne).
A SAINT-JEAN-BAPTISTE
DE BELLEVILLE
Les nombreux Bellevillois qui, le dimanche,
s'en vont à la campagne, pour chercher avec
le calrao champêtre un peu de repos, n'étaient
pas peu surpris de rencontrer, hier malin, dès
la première heure, de nombreux agents, dont
beaucoup en civils, qui se dirigeaient vers
l'église Saint-Jean-Baptisle.
Qu{j pouvait-il y avoir ? En vérité, rien dans
l'attitude ni l'allure des ouailles bellevilloises
ne laissait prévoir ce qui allait se passer
dans la journée.
Les messes de la matinée se passent sans in-
cident. Les agents, cependant, ne sont pas par-
tis; au contraire, nous apprenons qu'une cin-
quantaine de ceux-ci sont massés dans les éco-
les de la rue Fessart. Puis un bruit circule, un
congréganiste doit venir, malgré la circulaire
ministérielle, pour prêcher et lancer ainsi un
défi à l'œuvre anticléricale du gouvernement.
Ce sera à l'occasion des vêpres.
Nous arrivons à 2 h. 1(4, la cérémonie est
commencée; un va et vient se produit dans
l'église. On sent qu'il y a quelque chose dans
l'air.
Des groupes circulent, s'installent tantôt d'un
coté, tantôt de l'autre; ce sont les républi-
cains qui, désignés par quelques ex-membres
du comité nationaliste, sont entourés. Un fait
nous frappe en ce moment: les jeunes gons qui
nous entourent arborentà leur boutonnière une
croix de Malte émaillée de blanc, au-des&ous
do laquelle s'aperçoit lo bleuet traditionnel des
comités antisémites. et du roi de Prusse,
La bagarre
Mais voici un prêtre, un peu pâle, qui se
dirige vers la chaire. On nous donne son nom,
M. Oriot, professeur à l'institut catholique, cx-
congréganisto, sécularisé depuis peu. Après
avoir gravi lentement le petit escalier en escar-
got, il domine d'un geste son auditoire — un
silence profond — nul contenu, on dirait
qu'une sorte de malaise s'empare des fidèles.
Une bagarre vraiment est-elle à craindre ?
- m es frères.. mes soeurs. prononce lo
prédicateur.
— Assez ! crio une voix.
C'est un signal. Des centaines de cannes s'é-
lèvent, puis s'abattent sur quelques citoyens
quo nous ne pouvons reconnaître. Une panique
épouvantable s'empare des enfants ; les « bon-
nes sœurs » crient, se lamentent, pleurent,
mais les « bons royalistes n, les « paisibles
cléricaux », les « pacifiques nationalistes »,
doux moutons du Seigneur, redoublent d'ar-
deur avec une sauvagerie inouïe. Cléricaux,
bedeaux, curés, tous frappent avec ousemble.
Quelle douce tolérance ! La police cependant est
entrée et nous ne devons qu'à la confusion qui
s'est emparée des sauvages cléricaux, qui nous
prennent pour des fonctionnaires, de ne pas
être écharpés, quelques amis et moi.
Un à un, les agents, sous la direction de
leur officier de paix, M. Gauthier, accompa-
gné de M. Héron, commissaire de police,- aux-
quels nous sommes heureux de rendre hom-
mage, autant pour leur sang-froid que pour
leur courtoisie, écartent les perturbateurs ; on
sorties blessés, unedizaine,qui ,sont transportés
les uns à la sacristie, les autres au dehors. Co
sont tous des républicains, ce qui démonlre
bien le guet-apens.
Au dehors, au fur et à mesure que les bles-
sés sont transporlés dans les pharmacies voi-
sines, ce sont des claméurs dont les éclats tra-
versent les murs épais de l'église. Les cris do :
« A bas la calotte! Vive la République! A
mort les assassins! » arrivent jusqu'à nous,
tandis que le « bon prédicateur», sans un mot
de pitié, reprend son sormon et nous parle de
la bonté de la vierge Marie. Quelle conception
ont ces qens-là de la bonté 1
La sortie
Mais les républicains prévenus, indignés
d'une lelle sauvagerie, sont accourus des quar-
tiers environnants ; des milliers do citoyens
se massent sur la place de l'église, où retentis-
sent de nouveau les cris de : A bas la calotte !
Vive la République 1 La porte do la sacristie
est fermée, les cléricaux vont sortir sur la
place. Très adroitement, l'officier de paix, qui
connait bien le peuple parisien, profite de qui
rivée do 2 ou 3 convois funèbres pour faire sor-
tir les assommeurs. Pas un cri, pas un mur-
mure ; les révolutionnaires massés se décou-
vrent respectueusement devant les cercueils, et
les braves royalistes, antisémites et cléricaux
en profitent pour s'esquiver.
A ce moment arrive M. Bouvier, inspecteur
divisionnaire, suivi bientôt du préfet de police,
M. Lépino, qui vient se rendre compte par lui-
même de l'importance de la bagarre.
Très iatelligemment, l'officier de paix fait
évacuer la place, tandis que les cléricaux as-
sommeurs sont emmenés au poste.
Les victimes
Ont été blessés : Beylartl, conseiller prud'-
homme, président du comité Clovis Hugues ;
Jules Chalwich, 36 ans, demeurant boulevard
de la Villelte; Leblanc. Delpy; Bargasse, Pa-
rigot, Gravoissier, Jaruski. Tous sont blessés
assez grièvement à la tête.
Ont été maintenus en état d'arrestation :
Henri Angiboust, professeur, 104, rue d:.t\s-
sas, de la Jeunesse royaliste; Léon Riche, du
comité Sabran de Pontevès; Louis Boutard,
comptable, 86, rue Compans; Piorre Sever, 75,
boulovard Serrurier ; Philippe Charollon.
Dans cette malheureuse affaire, nous ne pou-
vons que nous réjouirtque les farouches anti-
sémitos, cléricaux, n'aionl pas suivi les a bons
conseils» donnés ces jours derniers par Y Auto-
rité - que nous ne résistons pas au plaisir dû
citer :
Que la canaille essaie donc de renouveler ses ex-
péditions brutales!.
Les catholiques, désormais prévenus et sur leurs
gardes, lui répondront avec autre chose que des
bâtons de chaise.
l Les revolvers n'ont pas été inventés pour faiJŒ
| Lueur seulement aux moineaux, v -..
Allons ! catholiques, défendons-nous, et tirons
sur les. apaches comme sur des chiens enragés
qu'ils sont, quand Ils se permettront de violer nos
sanctuaires!
Et nous verrons s'il se rencontre, en France, un
seul juré pour nous reprocher de nous être proté-
gés nous-mêmes, alors que nous étions en légitime
défense et lâchement trahis par le gouvernement
légal du pays ?
C'eût été vraiment complet ! — A. D.
A l'issue de celle terrible bagarre, les grou-
pes républicaios nnt rédigé la protestation sui-
vante, qu'ils nous prient d'insérer :
Les citoyens des différents groupes socialistes et
républicains du 19e protestent avec la plus grande
énergie contre les actes@ commis, le dimanche 17
courant, par les nationalistes, les cléricaux et les
royalistes enrégimentés et conduits par leur cure
et le. suisse, ligués dans une action commune
pour assommer les républicains paisibles qui
s'étaient réunis à l'église de Bellevillo pour pro-
tester contré la violation de la loi.
Dénoncent à qui de droit les actes infâmes et
criminels commis par tes suppôts du clergé qui
ont blessé nos amis d'une laçon assez sérieuse
pour les mettre dans l'impossibilité de continuer
leur travail.
Déclarent que si l'Etat ne fait pas de suite le
nécessaire, ils sont bien résolus à faire justice eux-
mêmes et à reprendre une éclatante revanche en
châtiant les brutes qui ont assassiné nos amis. —
FORMÉ, VERRIER, SCHMIT, PRENANT..
A PLAISANCE
Uno bagarre a eu lieu hier ttnatin dans une
chapelle âituée à Plaisance, 180, rue de Yan-
ves. -
Au moment où le prédicateur montait en
chaire, plusieurs personnes se levèrent en
même temps et demandèrent la parole.
Immédiatement une bagarre se produisit. Un
groupe d'étudiants cléricaux ripostèrent contre
Ses interrupteurs, et bientôt on en vint aux
mains.
Un vicaire de la paroisse étant allé immé-
diatement quérir la police, les agents pénètrent
dans l'église, le commissaire ceint de son
écharpe, à leur tête. Une dizaine d'arrestations
furent opérées.
Après un interrogatoire sommaire, les ma-
nifestants furent relâchés.
Une autre bagarre a eu lieu à la sortie de la
messe paroissiale autour de l'église du Ro-
saire, ancienne église de Plaisance. Un groupe
de jeunes socialistes a insulté l'abbé Finu, prê-
tre irlandais, naturalisé français.
Un certain nombre d'ouvriers qui sortaient
de l'église ont protesté contre les invectives des
jeunes socialistes. Une altercation s'en est sui-
vie. Des coups ont été échangés. Dans la ba-
garre, deux ouvriers qui défendaient l'abbé
Finn ont été blessés.
LE MOUVEMEN r EN PROVINCE
Notre correspondant particulier de Saintes nous
télégraphie :
Les républicains et les libres-penseurs réu-
nis à Saintes, après avoir entendu la confé-
rence du citoyen Bourceret, et lo discours du
citoyen Reveillaud, député, envoient au prési-
dcntduconseil l'expression de leurs sympathies
et leurs félicitations pour sonénergiedans l'ap-
plication de la loi sur les congrégations et
l'invitent à présenter dans le plus bref délai un
projet do loi tendant à la séparation des Egli-
ses et de l'Elat.
Chalon-sur-Saône, 17 mai.
Hier soir, M. Dubief, député, a fait, au théâ-
tre, une T-Snféreuce très applaudie sur le rôle
des missions religieuses eu Orient et on Ex-
trême-Orient. L'orateur a conclu ù la nécessité
de la séparation des Eglises et do l'Etat, aux
acclamations de ses 800 auditeurs. M. Mau-
champ, maire de Chalon, présidait, assisté de
MM. Martin et Gitiot, sénateurs, et de M.
Cbaussier, député.
Toulon, 17 mai.
Au cour3 d'une manifestation anticléricale
organisée pour protester contre les prières pu-
bliques qui avaient lieu dans les églises, quel-
ques bagarres se sont produites. Le capitaine
démissionnaire Dutheil de la Hochère et l'avo -
cat Balles, ayant voulu arracher le drapeau
rouge des mains des manifestants, ont été bles-
sés. La police et la gendarmerie ont dû inter-
venir pour rétablir l'ordre.
Marseille, 17 mai.
Ce matin, après des conférences données
dans différents quartiers do la ville, des grou-
pements anticléricaux se sont réunis cours du
Chapitre. Ils se sont ensuite rendus à la pré-
fecture pour y déposer lès ordres du jour votés
dans ces réunions, dans lesquels ils félicitent
unanimement le ministère pour son action an-
ticléricale et son attitude envers les congréga-
tions et où, en outre, ils demandent que le
gouvernement propose dès la rentrée des
Chambres la séparation des Eglises et del'Elat.
La manifestation, à laquelle cinq mille per-
sonnes environ ont pris part, s'est déroulée
aux chants de la Carmagnole et de 1Interna-
tionale à travers les rues de la ville sans que
l'ordre fût autrement troublé que par quel-
ques coups do sifflet partis des fenêtres des
habitations occupées par les cercles modérés
ou conservateurs de la rue Saint-Ferréol.
A la tête do la colonne formée par les mani-
festants marchait MM. Flaissières, Guichet,
David et Duverger, conseillers généraux; Dia-
noux, Clément, Lévy, Tadei, Joubert, Baille,
Ceccaldi, Bondon, conseillers d'arrondisse-
ment.
A la délégation, au nom de laquelle M. Flais-
sières a pris la parole pour remettra les adres-
ses des groupes anticléricaux de Marseille, M.
Mastier, préfet des Bouches-du-Rhône, a répon-
du qu'il allait les transmoltre sans retard à
l'administration centrale et a terminé par des
paroles do gratitude pour les félications adres-
sées au gouvernement qu'il a l'honneur de
représenter. 1
, Nice, 17 mai.
Une réunion a eu lieu ce matin dans la Qalle
du Pelit Casino. 500 personnes y assistaient.
Après une conférence do M. GhiJini, rédacteur
au Petit Niçois, sur l'historique du Concordat,
un ordre du jour demandant la dénonciation
du Concordat et la séparation des Eglises el de
l'Etat a été voté.
LES CONGRÉGATIONS
Les évêques
Des prières publiques sont proscrites pour le
24 mai, à l'exemple du cardinal Richard, par
les cardinaux Langenieux, archevêque de
Reims; CoulIié, archevêque de Lyon; par les
arçhevêques de Cambrai, Rouen, Bourges; par
les évêques de Chartres, Soissons, Séez,Bayeux,
Langres, Verdun, Angoulême, Grenoblc,Saiüt-
Claude, Le Mans, Moulins, Blois.
Dans les départements
Puy-de-Dôme. — Hier le tribunal de Riom a
rendu son jugement dans les poursuites in-
tentées contre le curé de Saint-Georges-dc-
Mons, la supérieure des sœurs de Notre-Dame,
et une religieuse du même ordre, poursuivis
pour avoir rouvert un établissement congré-
ganiste.
Les trois prévenus sont acquittés.
Hérault. — On nous télégraphie de Mont-
pellier :
La 34 chambre de la Cour d'appel a consa-
cré toute son audience d'hier à la suite dès
débats de l'affaire des jésuites de Marseille
poursuivis pour contravention à la loi sur les
congrégations.
LW Guibal demande la confirmation du ju-
gement du tribunal do Marseille et de l'arrêt de
la Cour d'Aix.
.M, Lafoad, procureur puerai, dépose tt€|
conclusions écrites et il adjure la cour de « ne
pas laisser sur ces têtes rebelles passer la jus-
tice et la loi J».
La cour a mis l'affaire en délibéré.
Seine-et-Oise. — Un valet de chambre, Jo-
seph Robinot, qui au cours des dernières ma-
nifestations de Versailles avait tenté de désar-
çonner un sous-officier de gendarmerie, a élé
condamné à 6 jours de prison avec sursis et à
25 fr. d'amende.
Loire - Infènturê. - On nous écrit de
Nantes :
Quelques conseillers municipaux ayant dé-
posé des vœux protestant contre l'application
de la loi sur les congrégations, le maire, M.
Sarradin, a refusé de mettre aux voix ces or-
dres du jour qui sortent, a-t-il dit, des altii-
butions du consei!.
Un ordre du jour de M. Fonteneau, socia-
liste, demandant la suppression des proces-
sions, pour mettre fin aux manifestations dans
la rue, a eu le même sort et l'ordre du jour
pur et simple a été adopté. - ,',,-
A l'étranger
Rome, 17 mai. - A la Chambre, M. Socci
et quelques-uns de ses collègues questionnent
le sous-secrétaire d'Etal à l'inlérieur pour sa-
voir si le gouvernement entend appliquer les
dispositions de la loi sur les congrégations re-
ligieuses; afin d'empêchor que l'Italie net de-
vienne le champ d'aclion de celles qui ont été
expulsées do France.
M. Ronchetli assure que le gouvernement,
surtout en ce qui concerne l'instruction publi-
que et la bienfaisance publique, ne faillira pas
à exercer la plus scrupuleuse vigilance.
M. Socci réplique. Il demande qu'on ne laisse
pas se produire les dangers qui pourraient naî-
tre de cette situation pour les jeunes généra-
tions et pour l'avenir du pays. L'incident est
clos.
(Voir la suite dans notre DEUXIEME EDITION)
<0
A PROPOS DE L'ORDRE DU JOUR
DUGÉNÉRAL MASSENET
La fermeture des cercles cathoIiqnes
L,-» discussion à laquelle a donné lieu la pu-
blication de l'ordre du jour du général Mas-
senet a procuré à VEclair l'occasion de citer
une circulaire du général Farro, en date du
22 juillet 1880, que nous ne connaissions pas,
mais dont notre confrère a sauté, pour les be-
soins de sa cause, les passages intéressants.
Voici les passages en question : à
La loi du 8 juillet 1880 relative à l'abrogation
de celles des 20 maiet 30 juin 1874sur l'aumônerie
militaire vient d'être promulguée, et il y a lieu
d'en assurer l'exécution.
En conséquence., etc.
Les aumôniers militaires cesseront, dans tous
les cas, toute participation aux réunions militai-
res, cercles ou bibliothèques de certaines casernes.
Il appartiendra aux chefs de corps de suppléer,
avec les moyens dont ils disposent, à la surveil-
lance qui leur était confiée à ce sujet.
Tout centre de réunion militaire, cercle ou bi-
bliothèque, établi en dehors des casernes, doit
être rigoureusement interdit aux sous-officiers et
soldats. Les indications de cercles ou bibliothèques
militaires inscrites sur certains bâtiments étran-
gers au service dans quelques villes de garnison,
devront disparaître.
De cette citation il résulte que le général
Farre, en mettant les aumôniers à la porte des
casernes, a formellement btipulé qu'ils ne de-
vaient pas se réinstaller au dehors et attirer les
soldats dans leurs établissements. Ils les y ont
attirés quand même, sous l'œil bienveillant du
général Zurlinden.
Nous n'avons pas connaissance que la circu-
laire du général Farre, citée par VEclair, ait
jamais été abrogée.
Pour être conséquent avec lui-même, notre
confrère devrait donc demander la fermeture
des cercles catholiques de soldats.
L'abondance des matières nous oblige à re-
mettre à demain la Causerie pédagogi-
que de notre ami et collaborateur Armand
Depper.
AU PONT-DE-FLANDRE
Le Comité indépendant du Pont-de-Flandre nous
communiqucl'ordredu jour suivant du 1S mai 1903:
Le Comité, après avoir entendu le citoyen
Marcy développer en une causerie le but de
la Ligue Internationale pour la défense du sol-
dat i ainsi que les citoyens V. Alazar, Houssin,
Meyer, Rabereau el Charbon, approuve les pro-
positions faites à ce sujet. Considère qu'il est du
devoir de tous socialistes humains de se grou-
per pour former bloc contre la calotte milita-
ris!e.
A bas les conseils de guerre et la loi de 1834 !
Le Comité fait ensuite un pressant appel à
l'énergie des citoyens Clovis Hugues el Charles
Bos, députés du 19e, ainsi qu'aux députés et
sénateurs vraiment socialistes pour que, au
Parlement, ils votent la séparation de l'Eglise
et de l'Etat.
A bas toutes leg^ialotles et Tive lar -Républi-
que sociale !
Pour le Comité et par ordre : Le secrétaire,
Ch. MARCY, 50, rue Hatitpoul; le trésorier,
MEYER, 36, quai de la Marne.
e
PROTESTATION RÉPUBLICAINE
M. Philippe, président d'honneur des Sauve-
teurs de la Seine, n'en revient pas II faisait,en
pleine Sùrbonne, l'apologie de Napoléon I" et
de son génie. Rien de plus naturel, n'est-ce-
pas? Eh bien, il a été interrompu par des ci-
toyens républicains, qui ont crié : « C'était un
tyran 1 A bas les tyransl » Ainsi, dorénavant,
quand M. Philippe jugera nécessaire do louer
la gloire de l'homme du 18 brumaire, il devra
réserver sou « laïus o pour les réunions bona-
partistes?
Je vous dis qu'il n'y a pas de liberté sous
la République.
Voir à la 30 page
les Dernières Dépêches
La Frison de Guillaume Oberdank
(De notre correspondant particulier)
Trieste, U mai.
La caserne où Guillaume OberdanK, victime
d'un assassinat judiciaire de la justice mili-
taire autrichienne, a passé son dernier jour,
avant d'être exécuté, sera démolie prochaine-
ment et fera place à un square. Rappelons pour
mémoire que Guillaume Oberdank, jeune étu-
diant de 21 ans, avait été - accusé d'avoir lancé
une bombe en guise do - protestation irréden-
tiste. L'accusation ne reposait sur rien ; qui
plus est, Oberdank a été soustrait à ses juges
naturels. Sous prétexte qu'il était inscrit sur le
rôle de la réserve, on le traduisit devant un
conseil de guerre. En Autriche, les conseils de
guerre siègent à huis clos, n'adrnetlenl aucun
avocat et jugent d'après un Code qui date de
l'époque de Marie-Thérèse. Ces magistrats ont
condamné la malheureux étudiant par ordre,
c'est le cas de le dire. ,
(1 est étonnant que les patriotes italiens
n'aient pas encore songé à faire une campagne
pour la réhabilitation d'Oberdank, ne fût-ce
que pour flétrir la plus grande infamie que la
justice militaire autrichiens ait commise de-
puis l'époque de Hayuuu, -
LES SAUVETEURS
EN FÊTE
A la Sorbonne. - Les Sauveteurs de la
Seine. — Le doyen des sauveteurs. —
Les hospitaliers sauveteurs à la
mairie du 4e arrondissement. —
Palmes et médailles. - Un séna-
teur décoré deux fois dans la
même journée.
Les échos de la Sorbonne ont retenti longue-
ment, hier, des applaudissements des specta-
teurs venus en grand nombre acclamer les lau-
réats de la Société des Sauveteurs de la Seine
qui donnait sa fête annuelle et sa distributioa
de récompenses dans le grand amphithéâtre.
M. Trouillot, ministre du commerce, empê-
ché, avait délégué son chef do cabinet, M. Saint,
qui, à 2 h., précédé des drapeaux des diverses
sociétés présentes. prenait, place au fauteuil
présidentiel entouré de :
M. le sénateur Gomot, président d3 1a Société ;
M. Lagues, vice président ; M. Bréhier, secrétaire
général ; MM. Morris, docteur Buret, Jules Dela-
rue, M. Bargeton, Chevet,sénateur, maire de Com-
piègne ; l'abbé Lanusse, aumônier de Saint-Cjr ;
le capitaine Burgiard, représentant les pompiers
de Paris ; le capitaine de Talade du Grail, repré-
sentant le grand chancelier de la Légion d'hon-
neur ; le lieutenant-colonel Vérand, commandant
la cavalerie de la garde républicaine ; Aruould
Rogier, doyen dos sauveteurs de Franco et son se-
crétaire; Rirsch, de Salverte représentant le mi-
nistre des afIaire étrangères. Le 1" secrétaire do
la légation chinoise à Paris, Ou Tsong-Lien et ses
enfants.
M. Saint prend fa parole et lit ua discours
dont, de l'endroit où l'on a placé la presse, ob
n'entend que des bribes ; toutefois nous per-
cevons que M. le ministre du commerce, re-
tenu dans le Jura, regrotte de ne pouvoir ap-
porter aux sauveteurs de la Seine, à l'occasion
de leur 99e anniversaire, le concours de la pa-
role ministérielle. M. Saint présente ses regrets
de ne pouvoir accordor aux membres de la
Société les distinctions honorifiques demandées
et donne l'assurance que le ministre du com-
merce comprendra dans la prochaine promo-
tion de juillet les lauréats que le président de.
la société lui a proposés.
M. le sénateur GomoL remercie tes personnes
présentes et donne la-parole au secrétaire gé-
néral pour la lecture du palmarès.
Le palmarès. — Les lauréats.
Grand diplôme d'honneur. — Mme Carlier, che-
valier de la Légion d'honneur, pour sa belle con-
duite lors des troubles d'Arménie.
Prix Blouet, 600 fr. en argent. — M. Greilnjg.
Prix du Président de la République. - M. Byf.
kngel.
Prix du ministre des affaires étrangères. — M.
Raisounier.
Prix du ministre des travaux publies. — Mlle
Boutarcl, qui, âgée de 7 ans, compte déjà deux
sauvetages à son actif.
Prix du préfet de police. — M. Cordier.
Prix du préfet de la Seine. — M. Bégon.
De nombreuses médailles de vermeil et d'argent
sont décernées à MM. Passelaigue, Lançon, le sé-
nateur Boularan, trie, Imeneuraet, le docteur Bis-
carrat, Simoi) net-Motret, Convert, Maillard, Lesage,
Derignancourt, Vast, etc.
En outre, 20 médailles spéciales pour les enfants
sauveteurs âgés de 6 à 13 ans, habitant la pro-
vince et ayant accompli des actes de sauvetage.
Une partie de concert où nous avons entendu
Mlles Rabutoau et Darras de l'Odéon clôturait
cette imposante cérémonie. La musique du 89*
régiment d'infanteriCl,sous J'fldhile direction de
son chef M. Suzanne,prétait son concours et
nous a fait entendre de charmants morceaux
parmi lesquels je n'aurai garde d'omettre la
suite d'orchestre sur la Louise de Charpentier.
Le doyen des sauveteurs me demande,comme
représentant du Rappel de. bien vouloir le rap-
peler à nos lecteurs et d'insérer l.acrosycua,
suivant dont il est l'auteur et qu'il a lu f l'as-
sistance, — ce que je fais très volontiers.
Paris vous a connus 'quatre-vingt-dix-neuf ans,
Réunis pour sauver. Celle persévérance
Eut pour cause et pour fin deux mots d'ordre
[émouvants :
« Sauver ou périr !.., J) et puis « Humanité-France! »
Il fut beau de vous voir, ouvriers ou savants,
Donner aide et secours aux autres en souffrance,
Et tirer du périt l'immortelle espérance !
N'èles-vottg pas, malgré la mort, toujours vivants?
Tous, vous ennoblissez l'œuvre du Sauvetage!
Gardez le Souvenir et l'Honneur en partage ;
Ouvrez pour nous, ouvrez vos cœurs à deux
[battants.
Mais nous savons aimer aussi nos grands modèles,
On le voit, et bientôt nous reviendrons, fidèles,
Tant nous serons heureux de fêter vos cent ans !
A LA MAIRIE DU
4' ARRONDISSEMENT
A la même heure, mais dans un cadre mal-
heureusement trop restreint, on distribuait,
dans la salle des fêtes de la mairie du 4e, les
récompenses aux lauréats de la Société de*
hospitaliers sauveteurs.
Là encore,lo ministre de l'instruction publi-.
que, M. Chaumié, empêché, s'était fait repré-
senter par son chef de cabinet M. de Monzie,
qui, en quelques mon. a retracé le triple but
do cette société : but humanitaire, but d'éduca-
tion sociale et de mutualité, et a assuré toua
les membres do la sympathie du gouverne-
ment.
Autour de lui avaient pris place sur res.
Irade :
M. Levasseur, président de la société ; Dalimier
vice-président; de Cousy et Grépat, secrétaires
Grilly, secrétaire adjoint ; Calien, trésorier ; Rive-;
mal, Lobetet Desvaux ; M. Fabrc, maire du 4* ar-
rondissement ; le docteur Lombard, notre ami et
collaborateur Léon Riotor, lo baron Annstrong ;
M. le capitaine Margot, représentant le gouverneur
militaire de Paris ; M. le commandant Taurignet,
représentant le grand chancelier de la Légion
d'honneur : M. le médecin raajar Lnbit, représen-
tant le ministre de la guerre ; M. Johin, attaché
au ministère de l'agriculture ; Domingue:, repré-
sentant le président de la chambre des députés i'
M. Olivier, délégué du ministre des colouies ; M.
Maurice Renoult, représentant le garde des sceaux;
le lieutenant Cramaii, attaché à la personne du
général Niox ; le capitaine Custies, des sapeurs-
pompiers.
Les distinctions honorifiques. -
Le palmarès.
Plus heureux que leurs collègues les sauve-
teurs de la Seine, les hospiialiors sauveteurs
reçoivent de M. de Monzie les distinctions ho-
norifiques suivantes :
Palmes académiques : M. de Cousy, vice présf-
dent; Gully, secrétaire général adjoint; Veyssièro,
sous-chef de matériel ; Thomas, sous-chef des intir-
miers volontaires.
Médailles de la mutualité : M. Sevret, Desvaux,
Frémau de Rochcieu, Fournier, Mme de Cousy.
Médailles de la société d'encouragement au bien:
MM. Démé et Bachmann.
Le secrétaire général donne alors îeclure du
palmarès dont nous extrayons les noms sui-
vants :
Prix du Président de la République : M. Pacot. -
Prix du ministre de l'agriculture : M. Hachette. —
Priu du préfet de la Seine : M. Coquinot.- Médaille
d'or à M, Lolet. — Médaille de vermeil à M. le doc-
teur Brosset.— Médailles d'argent à M.Pacot et à M.
le sénateur Boularan qui bien que sexagénaire n'hé-
sita pas à se jeter à la tête d'un cheval emporte,
place de Invalides, évitant ainsi par son sang froid
de nombreux accidents.
Des médailles de bronze à MM. Demurger, Diehl,
Schmidt, etc., etc.
Il faudrait consacrer des pages entières pour,
Citer les noms dos lauréats et leurs actes de -
courage. Ces hommes-là sont légion sur terre,
et combien souvent ignorés, pratiquant ert
L humbles les verlus les plus nobles : l'amoue
PâïtlS £ DÉP4R1TÉMENTS .-
Le N«naéi-p, CINQ CENTIMES
F F E CWWÎ* Î W
•w,, , ANNCKYtiES ,.- , *;
J AUX BUREAUX DU JOURNAL „
•••'5 : • -;14, rue du Mail, Paris. ! »
fit chez MM. LAGRANGE, CERF & €»•
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1903 ——
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De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du matin
ISTo 12121. - Mardi 19 Mai 1903
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ADMINISTRATION ; 14, rue du Un,iI
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
- NOS LEADERS
« Pensées!. oinions »
Sous ce titre, qui est d'ailleurs celui
de l'ouvrage, Lucien Victor-Meunier et
Hugues Destrem ont déjà parlé du beau
livre que vient de publier Henry Maret
à la librairie Flammarion. Ils l'ont fait
en termes excellents. Dois-je ajouter
qu'ils n'ont rien oublié? Donc, une seule
Chose m'excuse d'y revenir après eux :
c'est que je ne puis résister au plaisir
d'écrire ce que je pense de notre émi-
nent confrère du lladical, dont j'ai
l'honneur d'être le collègue au Parle-
ment.
Henry Maret est un philosophe doux
et aimable, largement indulgent, ayant
une longue pratique des hommes et des
choses. Je recherche volontiers sa com-
pagnie. Il est rare qu'à la Chambre je
ne sois pas assis à ses côtés. Je ne con-
nais pas d'auditeur plus calme et plus
patient Il écoute tout ce qui se dit à la
tribune avec une attention admirable et
pourtant, ce tout n'est pas toujours in-
téressant. Si c'est un ami politique qui
a la parole, quoi qu'il dise, Maret l'ap-
plaudit. Si c'est un adversaire, et si par
hasard il regarde du côté de Maret, un
haussement dédaigneux d'épaules l'a-
vertit qu'il a commis une sottise. Et
c'est tout. Maret n'interrompt jamais.
Il le pourrait cependant, car il pos-
sède l'art des formules nettes et préci-
ses parce que brèves, ironiques aussi.
L'indulgence de Maret ne va pas en
effet sans une certaine ironie qu'il garde
pour lui ou qu'il indique à ses proches
voisins, à moins que la généralisant et
n'ayant pas l'air de l'appliquer à une
personne communément désignée, il
n'en prenne pour confidents, dans un
vigoureux article, ses lecteurs du Radi-
càL Henry Maret a la pensée claire et
l'écriture si limpide des grands écri-
vains du XVIIIe siècle ; je ne crois pas
j le diminuer en affirmant qu'il y joint
un peu de cette humour caustique de
Marc Twain, qui est plus que de la sa-
vante ironie, quelque chose qui vous
ridiculise un homme ou vous tue une
idée sans avoir l'air d'y toucher et avec
le vrai langage du bon sens.
Pourquoi ne parle-t-il pas ? J'ai le
souvenir de deux ou trois interventions
à la tribune que d'autres ont pu pren-
dre pour hâtives, mais qui étaient
d'une belle langue, ciselée à plaisir,
pleines d'esprit, celui de Figaro, abon-
dantes de savoir et de bon sens. Je répète
le mot à dessein, car Maret est le bon
sens même. Il n'est sujet à aucun em-
ballement ; il n'est pas davantage pes-
simiste. Toujours la note juste. Mais
je sais pourquoi Maret ne parle pas. Sa
modestie en est la seule cause. Il a
peur de paraître, d'avoir l'air surtout
de vouloir paraître. Peut-être aussi
rçdoule-t-il sa propre critique. Cet
homme exquis pour les autres, si en-
courageant, si peu rigoureux, est pour
lui-même d'une sévérité excessive.
Je lui demande pardon d'évoquer de
vieux souvenirs. Des professeurs de
vertu se sont attaqués à lui, jadis, il y a
bien longtemps. Vous savez ce qu'est le
professeur de vertu? En général, il a
- toujours quelque chose à se faire par-
donner, et le malheureux croit le faire
oublier en suspectant les autres, en
étant leur censeur implacable, en appe-
lant sur eux la vengeance des justes
lois. Ce que, pour se faire prendre pour
un honnête homme, il déverse d'inju-
res et de calomnies sur ses semblables
est inénarrable. Naturellement, un de
ceux-là ou plusieurs, je ne sais com-
bien, devaient un beau jour essayer de
.salir Maret.
Il n'eut qu'à repousser du pied l'ac-
cusalion immonde pour être tout de
suite grandi, mais, en même temps,
ce brave et excellent homme avait fait
la connaissance de la justice de son
pays. Il l'a dépeinte, bien souvent, en
des termes qu'il croyait impitoyables,
que d'autres auraient voulu plus impi-
toyables, mais qui ne l'étaient pas
assez pour céler son inépuisable bonté.
Si j'ajoute que Maret est un libéral
de vieille roche, un de ces libéraux qui
n'acceptent pas plus de liberté pour
eux-mêmes que pour leurs adversaires,
qu'il a l'horreur des règlements suran-
nés, des codes de lois où chaque texte
paraît être une embûche pour le citoyen
le plus impeccable, que sa courtoisie
'ne se dément pas un seul instant; que,
critique d'art, il vous laisse vos artistes
incapables do savoir s'ils doivent être
plus contents des compliments décernés
ou se plaindre de la finesse acérée des
observations, — et ils optent toujours
pourlepremier terme de l'aflir 'mative-;
que, critique littéraire, il sait. tendre
une main sëcoùrable aux débutants, je
pense bien vous avoir donné une idée
à peu près exacte du vrai Henry Maret,
de celui qu'aiment tous ceux qui le
connaissent.
Encore un mot. Ce qui précède vous
indique l'homme politique quo doit
être Maret. Sa vie publïquo corres-
pond à ses sentiments intimes. Son
amour de la liberté en fait un indivi-
dualiste forcené, une sorte d'anarchiste
— j'écris le mot avec son véritable
sens — à la façon do Proudhon, dont
toutes les idées sont inspirées par le
respect de la liberté La liberté de Ma-
ret finit là où celle des autres com-
mence. Croyez-vous par hasard que ce
soit là une mauvaise doctrine? C'est la
vraie doctrine républicaine et c'est
pourquoi Maret nous est à tous un
conseiller précieux.
Lisez Pensées et Opinions. Vous n'au-
rez pas perdu votre temps. Le livre, une
fois fermé, vous n'en serez que meil-
leurs et plus républicains.
Charles Bos.
ERREUR PERSISTANTE
Le mariage purement civil de M. Marcel
Trouillot, fils du ministre du commerce,
éveilla, dès le début, les méfiances des clé-
ricaux.
— Ce n'est pas sérieux, dirent-ils. M. Mar-
cel Trouillot fera comme tout le monde; il se
présentera, d'abord, à la mairie, c'est entendu.
Mais tout de suite après, il se dirigera vers
l'église.
Or M. Marcel Trouillot et sa jeune femme
quittèrent Paris sans avoir rendu visite à au-
cun curé.
— Nous les tenonR, reprirent les journalistes
catholiques, ces dignes enfants ont été de-
mander la bénédiction d'un prêtre de la ban-
lieue.
Il advint qu'un démenti formel fut opposé à
cette affirmation.
— Nous ne sommes pas entêtés, s'écrièrent
nos confrères réactionnaires; il est exact que
la cérémonie religieuse n'a pas été célébrée dans
la banlieue; les époux ont gagné l'Espagne par
le rapide le plus direct; et c'est dans l'ombre
tiède d'une égliso transpyrénéenne que la messe
a été récitée en leur honneur.
Nouveau démenti.
*Et hier matin la presse cléricale, insensible
à des rectifications déjà si nombreuses, pour-
suivait la mystification entreprise :
— Nous savons parfaitement que M. et Mme
Marcel Trouillot ont été demander à un curé de
Saône-et-Loire la permission do fonder une fa-
mille.
Une sole qui nous est communiquée affirme
que cette dernière information est aussi fausse
que les précédentes, et que le mariage civil
n'a été suivi d'aucun mariage religieux.
Ne croyez pas que les journaux catholiques
restent cois. Ils maintiendront leur fable ; si
M. et Mme Marcel Trouillot n'ont été mariés
religieusement ni à Paris, ni dans la banlieue,
ni en Espagne, ni en Bourgogne, c'est que la
cérémonie a -eu - pour cadre une chapelle du
Poitou, de la Bretagne, du Morvan, de l'Au-
vergne, la cathédrale de Strasbour. la mos-
quée de La Mecque ou, en Extrême-Orient, les
ruines imposantes du temple d'Angkor.
Il est absolument nécessaire à la polémique
de nos adversaires que le fils de l'ancien rap-
porteur de la loi des associations se soit age-
nouillé devant le tabernacle. Autrement, il
conviendrait de croire que l'antéchrist est né
sous la forme do jeunes républicains qui, éle-
vés en dehors do l'Eglise, n'éprouvent aucun
besoin de renier leur éducation laïque. — Hu-
gues Destrem.
» —
DES ÉCONOMIES!
Des économies ! Il y a longtemps qu'il on est
question. Malheureusement la coutume est d'en
parler beaucoup et de n'y penser jamais. On
nomme des commissions d'enqllêle, on leur
enjoint de faire un travail sérieux afin quo le
prochain budget puisse comporter une dimi-
nution de dépenses. Les commissions parais-
sent vouloir se renseigner, elles font compa-
raître devant elles des ministres et des hauts
fonctionnaires. Mais l'on ignore toujours le
résultat de leurs investigations.
Quelles sont les causes de cet éUl do choses.
Elles sont multiples. Elles résident à la fois
dans l'espril de ceux qui enquêtent et dans ce-
lui do ceux qui déposent. Il est aisé de les tlé-
finir.
Le fonctionnarisme est le mal endémique
de ce temps. 11 est le cancer qui ronge, dévore
et engloutit nos finances. Tout le monde veut
à un titre quelconque occuper une charge ré
tribuée par l'Etat. Cello idée est tellement an-
crée qu'on peut fort difficilement la combattre.
On ne dit plus : tout citoyen a le droit d'obte-
nir une fonction publique. On dit : l'Etat a le
devoir de donner un emploi à chaque citoyen
et de le rémunérer. Rien n'est plus faux que
cet aphorisme.
Il suit de là, que chaque député a derrière
lui des milliers d'électeurs qui le talonnent,
qui prient, qui supplient, qui ordonnent, qui
menacent, qui gémissent.
Ils exigent un emploi pour eux, pour
leurs femmes, pour leurs fils, pour leurs
maîtresses, pour leurs nev_eu..pour leurs amis,
Ils assiègent le malheureux représentant, chez
lui, dans la rue, à la Chambre. Comment vou-
lez-vous qu'après cela, un député, si bien dis-
posé soit-il en faveur des économies budgétai-
res, ait le courage de voler la suppression de
fonctions qui sont sollicitées avec tant d'ardeur
par ses commettants?
Ce n'est pas tout. Il y alune masse de postes
inutiles, tant dans l'administration propre-
ment dite que dans la magistrature et les fi
nances. Malheureusement, on les ignore très
souvent. Pourquoi? Parce que les grands chefs,
les directeurs, croient que leur importance
serait diminuée s'ils avaient moins d'hommes
à commander.
J'ai connu un président de cour d'appel
qui a fait des pieds et des mains pour que l'on
ne supprime point deux, places superflues de
conseillers à sa cour. Il s'imaginait que c'était
lui enlever à lui-même quelque prestige. Le
Français aime à diriger. Il lui plaît de donner
des ordres à ses concitoyens. Et plus nom-
breux sont les employés dont il est la maître,
plus sa situation lui paraît enviable. C'est là
une tendance d'esprit mesquine, mais, par
malheur: très généralement répandue.
La conclusion de tout cela 1 Faisons des éco-
nomies soit ! mais commençons par nous ré-
former nous-mêmes. Ne croyons pas l'Etat
obligé de nous entretenir en échange d'un tra-
vail très limité. Et-lorsque des enquêtes sont
faites n'ontendons point Ibs directeurs des ad-
ministrations. Ils no sont point dans l'espèce
des témoins désintéressés. — L. Armbruster.
EXPÉDITION GARIBALDIÈNNE EN ALBANIE
(De noliû correspondant particulier)
Palerme, 17 mai.
Le Giornale di Sicilia publie uns interview
qu'un de ses correspondants a eue avec le gé-
néral Ricciotti Garibaldi, sur les affaires de
Macédoine et d'Albanie. Ricciotti Garibaldi a
déclaré qu'au cas où les troupes austro-hon-
groises.se mettraient en maréhe vers Salonique,
la jeunesse italienne ne saurait plus rester im-
passiblo.
Les volontaires garibaldiens envahiraient
alors l'Albanie. Ricciotti :'. déclaré se mettre à
la disposition de la jeunesse italienne, comme
il l'a fait en 1897, lors de la guerre gréco-tur-
que. Tous les préparatife sont déjà faits et dans
le cas où un débarquement des garibaldiens
sur la côte albanaise deviendrait impossible on
agirait du côté des Alpes sur la froutièro au-
trichienne* - -
LE MOUVEMENT
ANTICLERICAL
Manifestations et conférences. — A
Belleville. — Révolutionnaires et
royalistes. - Bagarres. — Nom-
breux blessés. — Protesta-
tion:- La journée à Plai-
sance. - Dans les
départements.
À la suite des nombreux appels publiés par
différents groupes de la Libre-Pensée, des ma-
nifestations anticléricales ont eu lien hier, à
Paris d'abord et ,dans un grand, nombre de
communes où des conférences et des réunions
avaient été organisées, notamment à :
Agde, Aigues-Vives, Amfreville-la-Mi- Voie,
Amiens, Angers, Argenteuil, Aubervilliers, Bar-
sur-Seine, Beaumont (S.-et 0.), Besançon, Bolbec,
BouIogne-sur-Mer, Brest, Chartres, Clermont-Fcr-
rand, Dieulefit (Drôme), EIbeuf,Grand'Combe, Gre-
noble, Laon, Le Havre, Lo Mans, Levallois (Seine),
Lille, Lillebonne (Seine-Inférieure), Limoges, Lyon,
Meulan, Miradous (Gers), Montéliinar, Morlaix,
Moulins, Nancy, Nuntes.Nemours (Seine-et-Marne),
Nîmes, Notre-Dame de-Franqueville, Nouzon [Ar-
deunos), Pacy-sur-Eure, Reims, Reuilly (Indre),
Ribérllc, Roanne, Rouen. Saintes, Saint-Amand,
Saint-Béat (Ilaute-Saône), Saint-Chaptes, Sainl-
Elienne-du-Rouvray, Saint- Hippolyte-du-Fort,
Saumur, Tours, Triel (Seine-et.,OiSe), Troyes, Va-
lenciennes, Versaille!:l,Vcsoul, Vieune (Isère), Voulx
(Seine-et-Marne).
A SAINT-JEAN-BAPTISTE
DE BELLEVILLE
Les nombreux Bellevillois qui, le dimanche,
s'en vont à la campagne, pour chercher avec
le calrao champêtre un peu de repos, n'étaient
pas peu surpris de rencontrer, hier malin, dès
la première heure, de nombreux agents, dont
beaucoup en civils, qui se dirigeaient vers
l'église Saint-Jean-Baptisle.
Qu{j pouvait-il y avoir ? En vérité, rien dans
l'attitude ni l'allure des ouailles bellevilloises
ne laissait prévoir ce qui allait se passer
dans la journée.
Les messes de la matinée se passent sans in-
cident. Les agents, cependant, ne sont pas par-
tis; au contraire, nous apprenons qu'une cin-
quantaine de ceux-ci sont massés dans les éco-
les de la rue Fessart. Puis un bruit circule, un
congréganiste doit venir, malgré la circulaire
ministérielle, pour prêcher et lancer ainsi un
défi à l'œuvre anticléricale du gouvernement.
Ce sera à l'occasion des vêpres.
Nous arrivons à 2 h. 1(4, la cérémonie est
commencée; un va et vient se produit dans
l'église. On sent qu'il y a quelque chose dans
l'air.
Des groupes circulent, s'installent tantôt d'un
coté, tantôt de l'autre; ce sont les républi-
cains qui, désignés par quelques ex-membres
du comité nationaliste, sont entourés. Un fait
nous frappe en ce moment: les jeunes gons qui
nous entourent arborentà leur boutonnière une
croix de Malte émaillée de blanc, au-des&ous
do laquelle s'aperçoit lo bleuet traditionnel des
comités antisémites. et du roi de Prusse,
La bagarre
Mais voici un prêtre, un peu pâle, qui se
dirige vers la chaire. On nous donne son nom,
M. Oriot, professeur à l'institut catholique, cx-
congréganisto, sécularisé depuis peu. Après
avoir gravi lentement le petit escalier en escar-
got, il domine d'un geste son auditoire — un
silence profond — nul contenu, on dirait
qu'une sorte de malaise s'empare des fidèles.
Une bagarre vraiment est-elle à craindre ?
- m es frères.. mes soeurs. prononce lo
prédicateur.
— Assez ! crio une voix.
C'est un signal. Des centaines de cannes s'é-
lèvent, puis s'abattent sur quelques citoyens
quo nous ne pouvons reconnaître. Une panique
épouvantable s'empare des enfants ; les « bon-
nes sœurs » crient, se lamentent, pleurent,
mais les « bons royalistes n, les « paisibles
cléricaux », les « pacifiques nationalistes »,
doux moutons du Seigneur, redoublent d'ar-
deur avec une sauvagerie inouïe. Cléricaux,
bedeaux, curés, tous frappent avec ousemble.
Quelle douce tolérance ! La police cependant est
entrée et nous ne devons qu'à la confusion qui
s'est emparée des sauvages cléricaux, qui nous
prennent pour des fonctionnaires, de ne pas
être écharpés, quelques amis et moi.
Un à un, les agents, sous la direction de
leur officier de paix, M. Gauthier, accompa-
gné de M. Héron, commissaire de police,- aux-
quels nous sommes heureux de rendre hom-
mage, autant pour leur sang-froid que pour
leur courtoisie, écartent les perturbateurs ; on
sorties blessés, unedizaine,qui ,sont transportés
les uns à la sacristie, les autres au dehors. Co
sont tous des républicains, ce qui démonlre
bien le guet-apens.
Au dehors, au fur et à mesure que les bles-
sés sont transporlés dans les pharmacies voi-
sines, ce sont des claméurs dont les éclats tra-
versent les murs épais de l'église. Les cris do :
« A bas la calotte! Vive la République! A
mort les assassins! » arrivent jusqu'à nous,
tandis que le « bon prédicateur», sans un mot
de pitié, reprend son sormon et nous parle de
la bonté de la vierge Marie. Quelle conception
ont ces qens-là de la bonté 1
La sortie
Mais les républicains prévenus, indignés
d'une lelle sauvagerie, sont accourus des quar-
tiers environnants ; des milliers do citoyens
se massent sur la place de l'église, où retentis-
sent de nouveau les cris de : A bas la calotte !
Vive la République 1 La porte do la sacristie
est fermée, les cléricaux vont sortir sur la
place. Très adroitement, l'officier de paix, qui
connait bien le peuple parisien, profite de qui
rivée do 2 ou 3 convois funèbres pour faire sor-
tir les assommeurs. Pas un cri, pas un mur-
mure ; les révolutionnaires massés se décou-
vrent respectueusement devant les cercueils, et
les braves royalistes, antisémites et cléricaux
en profitent pour s'esquiver.
A ce moment arrive M. Bouvier, inspecteur
divisionnaire, suivi bientôt du préfet de police,
M. Lépino, qui vient se rendre compte par lui-
même de l'importance de la bagarre.
Très iatelligemment, l'officier de paix fait
évacuer la place, tandis que les cléricaux as-
sommeurs sont emmenés au poste.
Les victimes
Ont été blessés : Beylartl, conseiller prud'-
homme, président du comité Clovis Hugues ;
Jules Chalwich, 36 ans, demeurant boulevard
de la Villelte; Leblanc. Delpy; Bargasse, Pa-
rigot, Gravoissier, Jaruski. Tous sont blessés
assez grièvement à la tête.
Ont été maintenus en état d'arrestation :
Henri Angiboust, professeur, 104, rue d:.t\s-
sas, de la Jeunesse royaliste; Léon Riche, du
comité Sabran de Pontevès; Louis Boutard,
comptable, 86, rue Compans; Piorre Sever, 75,
boulovard Serrurier ; Philippe Charollon.
Dans cette malheureuse affaire, nous ne pou-
vons que nous réjouirtque les farouches anti-
sémitos, cléricaux, n'aionl pas suivi les a bons
conseils» donnés ces jours derniers par Y Auto-
rité - que nous ne résistons pas au plaisir dû
citer :
Que la canaille essaie donc de renouveler ses ex-
péditions brutales!.
Les catholiques, désormais prévenus et sur leurs
gardes, lui répondront avec autre chose que des
bâtons de chaise.
l Les revolvers n'ont pas été inventés pour faiJŒ
| Lueur seulement aux moineaux, v -..
Allons ! catholiques, défendons-nous, et tirons
sur les. apaches comme sur des chiens enragés
qu'ils sont, quand Ils se permettront de violer nos
sanctuaires!
Et nous verrons s'il se rencontre, en France, un
seul juré pour nous reprocher de nous être proté-
gés nous-mêmes, alors que nous étions en légitime
défense et lâchement trahis par le gouvernement
légal du pays ?
C'eût été vraiment complet ! — A. D.
A l'issue de celle terrible bagarre, les grou-
pes républicaios nnt rédigé la protestation sui-
vante, qu'ils nous prient d'insérer :
Les citoyens des différents groupes socialistes et
républicains du 19e protestent avec la plus grande
énergie contre les actes@ commis, le dimanche 17
courant, par les nationalistes, les cléricaux et les
royalistes enrégimentés et conduits par leur cure
et le. suisse, ligués dans une action commune
pour assommer les républicains paisibles qui
s'étaient réunis à l'église de Bellevillo pour pro-
tester contré la violation de la loi.
Dénoncent à qui de droit les actes infâmes et
criminels commis par tes suppôts du clergé qui
ont blessé nos amis d'une laçon assez sérieuse
pour les mettre dans l'impossibilité de continuer
leur travail.
Déclarent que si l'Etat ne fait pas de suite le
nécessaire, ils sont bien résolus à faire justice eux-
mêmes et à reprendre une éclatante revanche en
châtiant les brutes qui ont assassiné nos amis. —
FORMÉ, VERRIER, SCHMIT, PRENANT..
A PLAISANCE
Uno bagarre a eu lieu hier ttnatin dans une
chapelle âituée à Plaisance, 180, rue de Yan-
ves. -
Au moment où le prédicateur montait en
chaire, plusieurs personnes se levèrent en
même temps et demandèrent la parole.
Immédiatement une bagarre se produisit. Un
groupe d'étudiants cléricaux ripostèrent contre
Ses interrupteurs, et bientôt on en vint aux
mains.
Un vicaire de la paroisse étant allé immé-
diatement quérir la police, les agents pénètrent
dans l'église, le commissaire ceint de son
écharpe, à leur tête. Une dizaine d'arrestations
furent opérées.
Après un interrogatoire sommaire, les ma-
nifestants furent relâchés.
Une autre bagarre a eu lieu à la sortie de la
messe paroissiale autour de l'église du Ro-
saire, ancienne église de Plaisance. Un groupe
de jeunes socialistes a insulté l'abbé Finu, prê-
tre irlandais, naturalisé français.
Un certain nombre d'ouvriers qui sortaient
de l'église ont protesté contre les invectives des
jeunes socialistes. Une altercation s'en est sui-
vie. Des coups ont été échangés. Dans la ba-
garre, deux ouvriers qui défendaient l'abbé
Finn ont été blessés.
LE MOUVEMEN r EN PROVINCE
Notre correspondant particulier de Saintes nous
télégraphie :
Les républicains et les libres-penseurs réu-
nis à Saintes, après avoir entendu la confé-
rence du citoyen Bourceret, et lo discours du
citoyen Reveillaud, député, envoient au prési-
dcntduconseil l'expression de leurs sympathies
et leurs félicitations pour sonénergiedans l'ap-
plication de la loi sur les congrégations et
l'invitent à présenter dans le plus bref délai un
projet do loi tendant à la séparation des Egli-
ses et de l'Elat.
Chalon-sur-Saône, 17 mai.
Hier soir, M. Dubief, député, a fait, au théâ-
tre, une T-Snféreuce très applaudie sur le rôle
des missions religieuses eu Orient et on Ex-
trême-Orient. L'orateur a conclu ù la nécessité
de la séparation des Eglises et do l'Etat, aux
acclamations de ses 800 auditeurs. M. Mau-
champ, maire de Chalon, présidait, assisté de
MM. Martin et Gitiot, sénateurs, et de M.
Cbaussier, député.
Toulon, 17 mai.
Au cour3 d'une manifestation anticléricale
organisée pour protester contre les prières pu-
bliques qui avaient lieu dans les églises, quel-
ques bagarres se sont produites. Le capitaine
démissionnaire Dutheil de la Hochère et l'avo -
cat Balles, ayant voulu arracher le drapeau
rouge des mains des manifestants, ont été bles-
sés. La police et la gendarmerie ont dû inter-
venir pour rétablir l'ordre.
Marseille, 17 mai.
Ce matin, après des conférences données
dans différents quartiers do la ville, des grou-
pements anticléricaux se sont réunis cours du
Chapitre. Ils se sont ensuite rendus à la pré-
fecture pour y déposer lès ordres du jour votés
dans ces réunions, dans lesquels ils félicitent
unanimement le ministère pour son action an-
ticléricale et son attitude envers les congréga-
tions et où, en outre, ils demandent que le
gouvernement propose dès la rentrée des
Chambres la séparation des Eglises et del'Elat.
La manifestation, à laquelle cinq mille per-
sonnes environ ont pris part, s'est déroulée
aux chants de la Carmagnole et de 1Interna-
tionale à travers les rues de la ville sans que
l'ordre fût autrement troublé que par quel-
ques coups do sifflet partis des fenêtres des
habitations occupées par les cercles modérés
ou conservateurs de la rue Saint-Ferréol.
A la tête do la colonne formée par les mani-
festants marchait MM. Flaissières, Guichet,
David et Duverger, conseillers généraux; Dia-
noux, Clément, Lévy, Tadei, Joubert, Baille,
Ceccaldi, Bondon, conseillers d'arrondisse-
ment.
A la délégation, au nom de laquelle M. Flais-
sières a pris la parole pour remettra les adres-
ses des groupes anticléricaux de Marseille, M.
Mastier, préfet des Bouches-du-Rhône, a répon-
du qu'il allait les transmoltre sans retard à
l'administration centrale et a terminé par des
paroles do gratitude pour les félications adres-
sées au gouvernement qu'il a l'honneur de
représenter. 1
, Nice, 17 mai.
Une réunion a eu lieu ce matin dans la Qalle
du Pelit Casino. 500 personnes y assistaient.
Après une conférence do M. GhiJini, rédacteur
au Petit Niçois, sur l'historique du Concordat,
un ordre du jour demandant la dénonciation
du Concordat et la séparation des Eglises el de
l'Etat a été voté.
LES CONGRÉGATIONS
Les évêques
Des prières publiques sont proscrites pour le
24 mai, à l'exemple du cardinal Richard, par
les cardinaux Langenieux, archevêque de
Reims; CoulIié, archevêque de Lyon; par les
arçhevêques de Cambrai, Rouen, Bourges; par
les évêques de Chartres, Soissons, Séez,Bayeux,
Langres, Verdun, Angoulême, Grenoblc,Saiüt-
Claude, Le Mans, Moulins, Blois.
Dans les départements
Puy-de-Dôme. — Hier le tribunal de Riom a
rendu son jugement dans les poursuites in-
tentées contre le curé de Saint-Georges-dc-
Mons, la supérieure des sœurs de Notre-Dame,
et une religieuse du même ordre, poursuivis
pour avoir rouvert un établissement congré-
ganiste.
Les trois prévenus sont acquittés.
Hérault. — On nous télégraphie de Mont-
pellier :
La 34 chambre de la Cour d'appel a consa-
cré toute son audience d'hier à la suite dès
débats de l'affaire des jésuites de Marseille
poursuivis pour contravention à la loi sur les
congrégations.
LW Guibal demande la confirmation du ju-
gement du tribunal do Marseille et de l'arrêt de
la Cour d'Aix.
.M, Lafoad, procureur puerai, dépose tt€|
conclusions écrites et il adjure la cour de « ne
pas laisser sur ces têtes rebelles passer la jus-
tice et la loi J».
La cour a mis l'affaire en délibéré.
Seine-et-Oise. — Un valet de chambre, Jo-
seph Robinot, qui au cours des dernières ma-
nifestations de Versailles avait tenté de désar-
çonner un sous-officier de gendarmerie, a élé
condamné à 6 jours de prison avec sursis et à
25 fr. d'amende.
Loire - Infènturê. - On nous écrit de
Nantes :
Quelques conseillers municipaux ayant dé-
posé des vœux protestant contre l'application
de la loi sur les congrégations, le maire, M.
Sarradin, a refusé de mettre aux voix ces or-
dres du jour qui sortent, a-t-il dit, des altii-
butions du consei!.
Un ordre du jour de M. Fonteneau, socia-
liste, demandant la suppression des proces-
sions, pour mettre fin aux manifestations dans
la rue, a eu le même sort et l'ordre du jour
pur et simple a été adopté. - ,',,-
A l'étranger
Rome, 17 mai. - A la Chambre, M. Socci
et quelques-uns de ses collègues questionnent
le sous-secrétaire d'Etal à l'inlérieur pour sa-
voir si le gouvernement entend appliquer les
dispositions de la loi sur les congrégations re-
ligieuses; afin d'empêchor que l'Italie net de-
vienne le champ d'aclion de celles qui ont été
expulsées do France.
M. Ronchetli assure que le gouvernement,
surtout en ce qui concerne l'instruction publi-
que et la bienfaisance publique, ne faillira pas
à exercer la plus scrupuleuse vigilance.
M. Socci réplique. Il demande qu'on ne laisse
pas se produire les dangers qui pourraient naî-
tre de cette situation pour les jeunes généra-
tions et pour l'avenir du pays. L'incident est
clos.
(Voir la suite dans notre DEUXIEME EDITION)
<0
A PROPOS DE L'ORDRE DU JOUR
DUGÉNÉRAL MASSENET
La fermeture des cercles cathoIiqnes
L,-» discussion à laquelle a donné lieu la pu-
blication de l'ordre du jour du général Mas-
senet a procuré à VEclair l'occasion de citer
une circulaire du général Farro, en date du
22 juillet 1880, que nous ne connaissions pas,
mais dont notre confrère a sauté, pour les be-
soins de sa cause, les passages intéressants.
Voici les passages en question : à
La loi du 8 juillet 1880 relative à l'abrogation
de celles des 20 maiet 30 juin 1874sur l'aumônerie
militaire vient d'être promulguée, et il y a lieu
d'en assurer l'exécution.
En conséquence., etc.
Les aumôniers militaires cesseront, dans tous
les cas, toute participation aux réunions militai-
res, cercles ou bibliothèques de certaines casernes.
Il appartiendra aux chefs de corps de suppléer,
avec les moyens dont ils disposent, à la surveil-
lance qui leur était confiée à ce sujet.
Tout centre de réunion militaire, cercle ou bi-
bliothèque, établi en dehors des casernes, doit
être rigoureusement interdit aux sous-officiers et
soldats. Les indications de cercles ou bibliothèques
militaires inscrites sur certains bâtiments étran-
gers au service dans quelques villes de garnison,
devront disparaître.
De cette citation il résulte que le général
Farre, en mettant les aumôniers à la porte des
casernes, a formellement btipulé qu'ils ne de-
vaient pas se réinstaller au dehors et attirer les
soldats dans leurs établissements. Ils les y ont
attirés quand même, sous l'œil bienveillant du
général Zurlinden.
Nous n'avons pas connaissance que la circu-
laire du général Farre, citée par VEclair, ait
jamais été abrogée.
Pour être conséquent avec lui-même, notre
confrère devrait donc demander la fermeture
des cercles catholiques de soldats.
L'abondance des matières nous oblige à re-
mettre à demain la Causerie pédagogi-
que de notre ami et collaborateur Armand
Depper.
AU PONT-DE-FLANDRE
Le Comité indépendant du Pont-de-Flandre nous
communiqucl'ordredu jour suivant du 1S mai 1903:
Le Comité, après avoir entendu le citoyen
Marcy développer en une causerie le but de
la Ligue Internationale pour la défense du sol-
dat i ainsi que les citoyens V. Alazar, Houssin,
Meyer, Rabereau el Charbon, approuve les pro-
positions faites à ce sujet. Considère qu'il est du
devoir de tous socialistes humains de se grou-
per pour former bloc contre la calotte milita-
ris!e.
A bas les conseils de guerre et la loi de 1834 !
Le Comité fait ensuite un pressant appel à
l'énergie des citoyens Clovis Hugues el Charles
Bos, députés du 19e, ainsi qu'aux députés et
sénateurs vraiment socialistes pour que, au
Parlement, ils votent la séparation de l'Eglise
et de l'Etat.
A bas toutes leg^ialotles et Tive lar -Républi-
que sociale !
Pour le Comité et par ordre : Le secrétaire,
Ch. MARCY, 50, rue Hatitpoul; le trésorier,
MEYER, 36, quai de la Marne.
e
PROTESTATION RÉPUBLICAINE
M. Philippe, président d'honneur des Sauve-
teurs de la Seine, n'en revient pas II faisait,en
pleine Sùrbonne, l'apologie de Napoléon I" et
de son génie. Rien de plus naturel, n'est-ce-
pas? Eh bien, il a été interrompu par des ci-
toyens républicains, qui ont crié : « C'était un
tyran 1 A bas les tyransl » Ainsi, dorénavant,
quand M. Philippe jugera nécessaire do louer
la gloire de l'homme du 18 brumaire, il devra
réserver sou « laïus o pour les réunions bona-
partistes?
Je vous dis qu'il n'y a pas de liberté sous
la République.
Voir à la 30 page
les Dernières Dépêches
La Frison de Guillaume Oberdank
(De notre correspondant particulier)
Trieste, U mai.
La caserne où Guillaume OberdanK, victime
d'un assassinat judiciaire de la justice mili-
taire autrichienne, a passé son dernier jour,
avant d'être exécuté, sera démolie prochaine-
ment et fera place à un square. Rappelons pour
mémoire que Guillaume Oberdank, jeune étu-
diant de 21 ans, avait été - accusé d'avoir lancé
une bombe en guise do - protestation irréden-
tiste. L'accusation ne reposait sur rien ; qui
plus est, Oberdank a été soustrait à ses juges
naturels. Sous prétexte qu'il était inscrit sur le
rôle de la réserve, on le traduisit devant un
conseil de guerre. En Autriche, les conseils de
guerre siègent à huis clos, n'adrnetlenl aucun
avocat et jugent d'après un Code qui date de
l'époque de Marie-Thérèse. Ces magistrats ont
condamné la malheureux étudiant par ordre,
c'est le cas de le dire. ,
(1 est étonnant que les patriotes italiens
n'aient pas encore songé à faire une campagne
pour la réhabilitation d'Oberdank, ne fût-ce
que pour flétrir la plus grande infamie que la
justice militaire autrichiens ait commise de-
puis l'époque de Hayuuu, -
LES SAUVETEURS
EN FÊTE
A la Sorbonne. - Les Sauveteurs de la
Seine. — Le doyen des sauveteurs. —
Les hospitaliers sauveteurs à la
mairie du 4e arrondissement. —
Palmes et médailles. - Un séna-
teur décoré deux fois dans la
même journée.
Les échos de la Sorbonne ont retenti longue-
ment, hier, des applaudissements des specta-
teurs venus en grand nombre acclamer les lau-
réats de la Société des Sauveteurs de la Seine
qui donnait sa fête annuelle et sa distributioa
de récompenses dans le grand amphithéâtre.
M. Trouillot, ministre du commerce, empê-
ché, avait délégué son chef do cabinet, M. Saint,
qui, à 2 h., précédé des drapeaux des diverses
sociétés présentes. prenait, place au fauteuil
présidentiel entouré de :
M. le sénateur Gomot, président d3 1a Société ;
M. Lagues, vice président ; M. Bréhier, secrétaire
général ; MM. Morris, docteur Buret, Jules Dela-
rue, M. Bargeton, Chevet,sénateur, maire de Com-
piègne ; l'abbé Lanusse, aumônier de Saint-Cjr ;
le capitaine Burgiard, représentant les pompiers
de Paris ; le capitaine de Talade du Grail, repré-
sentant le grand chancelier de la Légion d'hon-
neur ; le lieutenant-colonel Vérand, commandant
la cavalerie de la garde républicaine ; Aruould
Rogier, doyen dos sauveteurs de Franco et son se-
crétaire; Rirsch, de Salverte représentant le mi-
nistre des afIaire étrangères. Le 1" secrétaire do
la légation chinoise à Paris, Ou Tsong-Lien et ses
enfants.
M. Saint prend fa parole et lit ua discours
dont, de l'endroit où l'on a placé la presse, ob
n'entend que des bribes ; toutefois nous per-
cevons que M. le ministre du commerce, re-
tenu dans le Jura, regrotte de ne pouvoir ap-
porter aux sauveteurs de la Seine, à l'occasion
de leur 99e anniversaire, le concours de la pa-
role ministérielle. M. Saint présente ses regrets
de ne pouvoir accordor aux membres de la
Société les distinctions honorifiques demandées
et donne l'assurance que le ministre du com-
merce comprendra dans la prochaine promo-
tion de juillet les lauréats que le président de.
la société lui a proposés.
M. le sénateur GomoL remercie tes personnes
présentes et donne la-parole au secrétaire gé-
néral pour la lecture du palmarès.
Le palmarès. — Les lauréats.
Grand diplôme d'honneur. — Mme Carlier, che-
valier de la Légion d'honneur, pour sa belle con-
duite lors des troubles d'Arménie.
Prix Blouet, 600 fr. en argent. — M. Greilnjg.
Prix du Président de la République. - M. Byf.
kngel.
Prix du ministre des affaires étrangères. — M.
Raisounier.
Prix du ministre des travaux publies. — Mlle
Boutarcl, qui, âgée de 7 ans, compte déjà deux
sauvetages à son actif.
Prix du préfet de police. — M. Cordier.
Prix du préfet de la Seine. — M. Bégon.
De nombreuses médailles de vermeil et d'argent
sont décernées à MM. Passelaigue, Lançon, le sé-
nateur Boularan, trie, Imeneuraet, le docteur Bis-
carrat, Simoi) net-Motret, Convert, Maillard, Lesage,
Derignancourt, Vast, etc.
En outre, 20 médailles spéciales pour les enfants
sauveteurs âgés de 6 à 13 ans, habitant la pro-
vince et ayant accompli des actes de sauvetage.
Une partie de concert où nous avons entendu
Mlles Rabutoau et Darras de l'Odéon clôturait
cette imposante cérémonie. La musique du 89*
régiment d'infanteriCl,sous J'fldhile direction de
son chef M. Suzanne,prétait son concours et
nous a fait entendre de charmants morceaux
parmi lesquels je n'aurai garde d'omettre la
suite d'orchestre sur la Louise de Charpentier.
Le doyen des sauveteurs me demande,comme
représentant du Rappel de. bien vouloir le rap-
peler à nos lecteurs et d'insérer l.acrosycua,
suivant dont il est l'auteur et qu'il a lu f l'as-
sistance, — ce que je fais très volontiers.
Paris vous a connus 'quatre-vingt-dix-neuf ans,
Réunis pour sauver. Celle persévérance
Eut pour cause et pour fin deux mots d'ordre
[émouvants :
« Sauver ou périr !.., J) et puis « Humanité-France! »
Il fut beau de vous voir, ouvriers ou savants,
Donner aide et secours aux autres en souffrance,
Et tirer du périt l'immortelle espérance !
N'èles-vottg pas, malgré la mort, toujours vivants?
Tous, vous ennoblissez l'œuvre du Sauvetage!
Gardez le Souvenir et l'Honneur en partage ;
Ouvrez pour nous, ouvrez vos cœurs à deux
[battants.
Mais nous savons aimer aussi nos grands modèles,
On le voit, et bientôt nous reviendrons, fidèles,
Tant nous serons heureux de fêter vos cent ans !
A LA MAIRIE DU
4' ARRONDISSEMENT
A la même heure, mais dans un cadre mal-
heureusement trop restreint, on distribuait,
dans la salle des fêtes de la mairie du 4e, les
récompenses aux lauréats de la Société de*
hospitaliers sauveteurs.
Là encore,lo ministre de l'instruction publi-.
que, M. Chaumié, empêché, s'était fait repré-
senter par son chef de cabinet M. de Monzie,
qui, en quelques mon. a retracé le triple but
do cette société : but humanitaire, but d'éduca-
tion sociale et de mutualité, et a assuré toua
les membres do la sympathie du gouverne-
ment.
Autour de lui avaient pris place sur res.
Irade :
M. Levasseur, président de la société ; Dalimier
vice-président; de Cousy et Grépat, secrétaires
Grilly, secrétaire adjoint ; Calien, trésorier ; Rive-;
mal, Lobetet Desvaux ; M. Fabrc, maire du 4* ar-
rondissement ; le docteur Lombard, notre ami et
collaborateur Léon Riotor, lo baron Annstrong ;
M. le capitaine Margot, représentant le gouverneur
militaire de Paris ; M. le commandant Taurignet,
représentant le grand chancelier de la Légion
d'honneur : M. le médecin raajar Lnbit, représen-
tant le ministre de la guerre ; M. Johin, attaché
au ministère de l'agriculture ; Domingue:, repré-
sentant le président de la chambre des députés i'
M. Olivier, délégué du ministre des colouies ; M.
Maurice Renoult, représentant le garde des sceaux;
le lieutenant Cramaii, attaché à la personne du
général Niox ; le capitaine Custies, des sapeurs-
pompiers.
Les distinctions honorifiques. -
Le palmarès.
Plus heureux que leurs collègues les sauve-
teurs de la Seine, les hospiialiors sauveteurs
reçoivent de M. de Monzie les distinctions ho-
norifiques suivantes :
Palmes académiques : M. de Cousy, vice présf-
dent; Gully, secrétaire général adjoint; Veyssièro,
sous-chef de matériel ; Thomas, sous-chef des intir-
miers volontaires.
Médailles de la mutualité : M. Sevret, Desvaux,
Frémau de Rochcieu, Fournier, Mme de Cousy.
Médailles de la société d'encouragement au bien:
MM. Démé et Bachmann.
Le secrétaire général donne alors îeclure du
palmarès dont nous extrayons les noms sui-
vants :
Prix du Président de la République : M. Pacot. -
Prix du ministre de l'agriculture : M. Hachette. —
Priu du préfet de la Seine : M. Coquinot.- Médaille
d'or à M, Lolet. — Médaille de vermeil à M. le doc-
teur Brosset.— Médailles d'argent à M.Pacot et à M.
le sénateur Boularan qui bien que sexagénaire n'hé-
sita pas à se jeter à la tête d'un cheval emporte,
place de Invalides, évitant ainsi par son sang froid
de nombreux accidents.
Des médailles de bronze à MM. Demurger, Diehl,
Schmidt, etc., etc.
Il faudrait consacrer des pages entières pour,
Citer les noms dos lauréats et leurs actes de -
courage. Ces hommes-là sont légion sur terre,
et combien souvent ignorés, pratiquant ert
L humbles les verlus les plus nobles : l'amoue
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