Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-04-08
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 08 avril 1903 08 avril 1903
Description : 1903/04/08 (N12080). 1903/04/08 (N12080).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75724313
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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CINQ CENTIMES- Ië Numifo: ipapis a DËPAATEMENTS- .:--::. --:-_ - Ue Numéro; CINQ CENT:tE"'
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No 12080 — Mercredi 8 Avril 1903
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NOS LEADERS
v .-i'" .:. -
PARIS
- ¡Le nationalisme joue définitivement
de malheur. Il y a huit jours c'était le
176 arrondissement qui lui donnait con-
gé. Avant-hier, c'était le 4e qui infligeait
à l'un de ses plus violents protagonistes
une défaite retentissante. C'est la chute
rapide. Son règne passe comme une
Dmbre.
Les dernières élections de Paris com-
portent néanmoins des enseignements
qu'il serait imprudent de méconnaître.
Le corps électoral parisien, n'est pas
complètement remis de la terrible se-
cousse que l'effort de la coalition lui a
fait subir au cours de ces dernières an-
nées. Il est facile de s'en convaincre. Il
suffit de constater les importantes mi-
norités que les adversaires de la Répu-
blique obtiennent encore dans les cir-
conscriptions que nous venons de re-
conquérir. La situation d'autrefois est
loin d'être pleinement reprise. Repor-
tons-nous seulement en 1898.
Qui eût osé, à cette époque, arborer
en plein Paris, comme l'a fait Barrès,
le drapeau du plébiscite? Et si on Feût
osé, quel nombre infime de suffrages on
aurait obtenu !
Il reste encore dans l'esprit d'un cer-
tain nombre de citoyens qui se croient
fermement républicains, je ne sais quel
esprit demécontentementintime dont la
blessure saigne toujours et qui se tra-
duit, à chaque élection, par un vote de
combat.
L'aventure nationaliste ne sera défi-
nitivement terminée que le jour où
tous ces égarés auront réintégré le
bercail républicain. Il faut donc les y
ramener. C'est donc là la tâche que
nous devons nous imposer. Tâche fa-
cile, d'ailleurs. Il suffit de vouloir et de
s'en donner la peine.
Les causes du mécontentement sont
visibles. Il y a des milieux, à Paris, où
l'on est, de très bonne foi, persuadé,
d'une part, que les pouvoirs publics,
que les Chambres, que le gouverne-
ment, tendent, dè parti pris, à la désor-
ganisation de la défense nationale;
d'autre part que la loi de 1901 n'a eu
d'autre but que de violer une de nos
plus chères libertés, la liberté d'asso-
ciation. On y est également convaincu
que le Parlement, énervé par des dis-
cussions stériles et des luttes sans issue
est impuissant â jamais réaliser aucune
des réformes démocratiques et sociales
qu'on a depuis si longtemps promises.
Quelque grossière que soit l'erreur, elle
existe dans l'esprit d'un très grand nom-
bre de citoyens de bonne foi. Il faut se
rendre à l'évidence. C'est à nous à la
détruire.
Il faut dans nos journaux, dans nos
discours, en d'incessantes conférences,
rétablir la vérité odieusement travestie.
Quel gouvernement s'est jamais mon-
tré plus jaloux de la grandeur et dé la
prospérité de la France que la Répu-
blique? La République a reçu la France
sur les champs de bataille de 1870,
meurtrie, blessée, agonisante. Dans un
admirable effort de résistance qui a fait
l'admiration du monde civilisé, elle a
d'abord sauvé son honneur, elle a payé
la plus formidable rançon qui ait ja-
mais été demandée à un peuple vaincu.
En quelques années elle a reconstitué
notre puissance militaire au point d'é-
veiller les susceptibilités du vainqueur.
Chaque fois qu'une découverte s'est pré-
sentée qui pouvait donner à nos armées
de terre ou de mer une force nouvelle,
la République n'a jamais hésité. Elle a
voté sans compter les dépenses néces-
saires. En 1898, le Parlement ouvrait un
crédit de deux cents millions pour la ré-
fection de notre matériel d'artillerie.
Il y a deux ans à peine, il votait pour la
construction de cuirassés, pour la dé-
fense des côtes, pour les points d'ap-
pui de la flotte un programme de tra-
vaux de près de sept cent millions. Le
budget militaire de la France est, cha-
que année, le plus élevé du monde. Il
faut avoir l'impudence et l'audace d'un
parti prêt à tout, pour oser dire que les
républicains désorganisent l'armée et
manquent de patriotisme.
La liberté d'association? Mais c'est
précisémentlaloi de 1901 qui donne cette
liberté. La loi de 1901 accorde à tous les
citoyens français vivant de la vie ordi-
naire le droit absolu de s'associer où
et comme bon leur semble sans restric-
tions, sans réserves. II n'est même pas
nécessaire de porter l'association à la
connaissance de l'autorité administra-
iive par voie de déclaration. Depuis
1901, on peut s'associer en France dans
n'importe quel but, pour n'importe quel
objet. N'est-ce pas là la liberté d'asso-
ciation telle que le parti républicain l'a
revendiquée dans l'opposition pendant
plus demi-siècle? Sans doute lé béné-
fice de cette loi ne s'étend pas auxcon-
gréganistes, c'est-à-dire à ceux qui vi-
vent en commun, sous le même toit, qui
ont fait vœu de pauvreté et d'obéissance
et qui relèvent d'un chef étranger.
Mais sur ce point la loi de 1901 n'a pas
innové, on ne saurait trop le redire. La
loi de 1901 ne fait que confirmer, à cet
égard, les dispositions des lois anté-
rieures. C'est depuis qu'il y a un droit
public en France, c'est-à-dire depuis
des slecles, qne les congrégations ont dû,
.'pout s'établir et pour vivre,obtenir l'au-
torisation de l'autorité civile. C'est la
suprématie de l'Etat laïque qui est en
jeu. Qui pourrait sérieusement préten-
dre que les pouvoir publics républicains
sont persécuteurs et sectaires parce
qu'ils résistent aux empiétements de
plus en plus dangereux des congréga-
tions insurgées contre la loi, contre
l'esprit moderne et contre nos institu-
tions ?
Quant aux réformes démocratiques et
sociales à qui donc la faute si elles ne
sont pas encore accomplies ? N'est-ce
pas surtout à cette opposition haineuse
et brutale, qui prend le masque de la
République pour la mieux combattre,
soulève sans cesse les questions les
plus irritantes, trouble l'opinion publi-
que par la plus odieuse propagande de
calomnies, de diffamations, d'outrages
et rend presque impossible le fonction-
nement régulier du régime parlemen-
taire.
Voilà ce qu'il faut dire. Voilà ce qu'il
faut proclamer sans cesse sous peine de
nous laisser peu à peu déborder par la
calomnie.
C'est là le devoir de tous les répu-
blicains. C'est plus particulièrement le
devoir du parti radical et radical-socia-
liste. Numériquement ce parti n'a pas
encore à la Chambre la majorité abso-
lue ; mais il y possède une forte ma-
jorité relative. Presque à chaque élection
c'est un des siens qui triomphe. Son pro-
gramme politique correspond à la
moyenne d'opinion de la France répu-
blicaine. En fait, c'est sur lui que pèse
la responsabilité du pouvoir. Qu'il y
songe. Qu'il s'organise. Qu'il dissipe,
par tous les moyens possibles, les
erreurs et les préjugés de l'opinion.
C'est surtout en politique qu'il est vrai
de dire qu'il n'y a pas de quantité né-
gligeable.
Louis Puech.
M. CAVAIGNAC
On sait que M. Jaurès devait,
à propos de l'élection Syveton,
parler de l'affaire Dreyfus et
notammentdu « faux impérial »,
c'est-à-dire de la fausse lettre
attribuée à l'empereur d'Alle-
magne, lettre que le général
Mercier a communiquée à certains juges du
conseil de guerre de Rennes. M. Jaurès est
monté hier à la tribune. Il a prononcé un
admirable discours qu'il continuera aujour-
d'hui. Et il a apporté, non pas à propre-
ment parler, un fait nouveau, mais un fait
d'une gravité exceptionnelle, qui a provoqué
un incideot des plus vifs entre Henri
Brisson et M. Cavaignac.
Il y a longtemps qu'ici même nous avons
dit ce qu'est M. Cavaignac : un homme
sans opinions, d'une ambition excessive,
prêt à tout pour donner satisfaction à ses
rêves d'avenir. Au moment où le faux
Heory a été découvert, M. Cavaignac pou-
vait, s'il l'avait voulu, ouvrir le procès
de revision et épargner à ce pays une ter-
rible crise. II ne l'a pas fait quoique Henry
ait perdu la vie (et comment?) le lende-
main de son aveu. Mais ce n'est pas le seul
crime dont M. Cavaignac soit responsable.
Il en a commis un autre.
Le 31 août 1898, Brisson étant président
du conseil et M. Cavaignac ministre de la
guerre, le général.de Pellieux écrivait à ce
dernier que, « dupe de gens sans honneur
« et n'ayant plus confiance en ceux de ses
« chefs qui l'avaient fait travailler sur des
cc faux » il demandait sa mise à la re-
traite. C'est M. Jaurès qui a lu cette lettre.
M. Cavaignac a avoué l'avoir reçue et n'en
avoir pas tenu compte. Le faux Henry
éclatait en même temps,
A ce moment du débat, Brisson s'est levé.
II a reproché à M. Cavaignac sa duplicité
et dans un mouvement de superbe indigna-
tion qui a été applaudi vigoureusement
par les républicains, il lui a dit qu'il pou-
vait se féliciter du vote de l'amnistie, sans
quoi ce serait pour lui la mise en accusa-
tion. Nul ne pourrait dépeindre cette situa-
tion vraiment dramatique: Brisson, debout,
tendant le bras, un bras vengeur, vers M.
Cavaignac, tous les républicains applaudis-
sant et le transfuge, effrayant de pâleur et
de lividité, tremblant, cloué sur son siège.
Il a eu pourtant l'audace de répondre.
Mais quelques mots balbutiés pour essayer
de faire dévier le débat. Peine inutile. Le
châtiment s'est abattu sur lui.
M. Jaurès finira aujourd'hui. Et il est
bien certain — c'est la première sanction
exigée par les républicains - que M. Syve-
ton sera invalidé. — Cli. B.
Le nouveau fusil anglais
(De naCra correspondant particulier}
Londres, 6 avril.
Aux ateliers d'Enfield, on pousse activement
la fabrication du nouveau fusil destiné à l'in-
fanterie anglaise. Plusieurs milliers de ces
nouvelles armes seront distribuées le mois
prochain. Le nouveau fusil aura un magasin.
qui pourra être chargé, en deux temps, de dix
cartouches. Il aura aussi cet avantage de peser
une livre de moins que l'ancien modèle,
LE PRINCE RADOLIN
ET SÉS EMPLOYÉS POLONAIS
(De notre correspondant varticulierl
Posen, 6 avril.
Les journaux polonais rapportent que le
princo Radolin, ambassadour d'Allemagne à
Paris, a licencié tous les employés de race po-
lonaise qu'il occupait dans sa propriété de
Iarotschin. Ils ont été remplacés par des Alle-
mands.
RÉVOLTE AU HONDURAS
New-York, 6 avril.
Une lettre dé Puerla-Corlez (Honduras), da-
tée du 2o mars, annonce que, la garnison,
forte de 200 hommes, s'est mutinée et a massa-
cré ses officiers, au nombre de sept.
La femme et les filles du président intéri-
maire Arias se sont réfugiées à bord d'un m-
vire ataci-lcain. - ,
CAUSERIE PEDAGOGIQUE
Les effets d'un discours
Le budget des cultes. — Une lettre de
M. René Goblet. — La séparation
des Eglises et de l'Etat. — Prêtres
et moines. — Le catéchisme. —
Les inconvénients des heures
choisies par le clergé. — Un
exemple à suivre.
Le discours de M. Combes sur la budget des
cultes an Sénat, affiché, ces jours derniers,
dans toutes les communes, a provoqué dans les
évêchés et les presbytères une vive émotion.
Depuis cent ans, jamais le chef du gouver-
nement n'avait blâmé si sévèrement l'attitude
inconvenante du clergé ; jamais il n'avait si
franchement enyisagé la question de la dénon-
ciation du Concordat; jamais il n'avait paru
si résolu à mettre ses menaces à exécution ja-
mais d'ailleurs il n'avait trouvé pour appui une
majorité si fidèle et si anticléricale que celle
d'aujourd'hui. Quoi qu'en dise en effet M.
René Goblet dans une lettre que publie le der-
nier numéro des Annales de la jeunesse laïque,
la majorité républicaine n'a nullement aban-
donné l'ancien programme républicain, et no-
tamment l'article concernant la séparation des
Eglises de l'Etat.
L'attitude du clergé
Le clergé ne l'ignore pas. Il a parfaitement
compris jusque dans ses moindres sous-onten-
dus l'avertissement de M. Combes. Il a montré
qu'il y était sensible.
Sa conduite a changé presque immédiate-
ment. Les curés les plus fougueux se sont
montrés prudents et réservés au sujet dos con-
grégations dissoutes. Ils no se sont point soli-
darisés avec elles. Il est vrai qu'elles étaient
vaincues! Ils n'ont point poussé des lamenta-
tions inutiles du haut de la chaire ; ils n'ont
point prêché la résistance à la loi ; ils n'ont
pas injurié lo Parlement. Les évêques n'ont
point écrit de mandements politiques. Calme
plat partout.
C'est nouveau, cela.
Si quelques révérends pères capucins, domi-
nicains ou autres, prêchent çà et là le carême
en langage violent, c'est tout simplement parce
que, déjà invités depuis quelques semaines à le
faire, il est trop tard pour prier maintenant
ces hôtes compromettants de s'éloigner et re-
joindre leur maison-mère. La politejsa veut
qu'ils continuent. Mais, à l'occasion de leur
expulsion prochaine, les curés s'abstiendront
de prendre part aux manifestations organi-
sées. On no les verra point, comme l'année
dernière, en Bretagne, chauffer avec de l'alcool
l'enthousiasme des paysans et des dévotes con-
voqués pour jeter des ordures et pousser des
cris séditieux. Ils resteront chez eux, satisfaits
peut-être de voir partir leurs redoutables con-
currents dans J'exploitation do la crédulité
humaine.
Une tois de plus, nous constaterons l'esprit
de contradiction qui les anime.
Ne suffit-il pas en effet de mettre publique-
ment eu relief un côté de leur altitude pour
que tout de suite cette altitude se modifie en
sens contraire? M. Waldeck-Rousseau s'éver-
tuait à proclamer, lors de 1a discussion de la
loi sur les associations, que les prêtres étaient
au fond les adversaires des moines. Aussitôt
le clergé séculier protesta, affirma et prouva
sa solidarité avec le clergé régulier. M. Com-
bes, après lui, dénonce les manquements du
clergé séculier ; il établit que le Concordat
n'est plus qu'un discordât. Tout de suite les
incorrections signalées cessent dans les gran-
des comme dans las petites paroisses.
Rappelons-nous les difficultés que Léon XIII
a dû vaincre pour faire admettre tant bien
que mnl par les prêtres qu'il faut adhérer au
régime politique actuel! En vérité, si nous
nous mettions à nous plaindre de l'indifféren-
co des curés à l'égard du p&po, nous les en-
tendiions s'écrier qu'ils répudient nos conseils
internationalistes et qu'ils ne doivent pas une
obéissance passive à un chef étranger.
Ceux qui s'intéressent à la résurrection de la
doctrine gallicane peuvent essayer le moyen,
il est bon.
Les heures du catéchisme
En attendant, profilons do l'assagissement
momentané du clergé pour obtenir do lui une
réforme qui, si petite qu'elle paraisse tout
d'abord, ne manque pas d'importance. Elle ré-
glerait au mieux des intérêts de l'enfant, le
seul rapport officiel qui existe entre l'Eglise et
l'école.
Il s'agit de modifier les heures de catéchis.
me. à l'église bien entendu ! A l'école le caté-
chisme est interdit formellement.
On sait qu'au lieu de l'enseigner le jeudi,
matin et soir, les curés l'enseignent plusieurs
fois par semaine, pendant une heure seulement.
C'est tout-à-fait opposé au vœu du législateur
qui n'a consacré le congé hebdomadaire du jeudi
quo pour fixer un jour à l'enseignement reli-
gieux.
L'article 2 de la loi du 28 mars 1882 le dit
expressément en ces termes :
Les écoles primaires publiques vaqueront un jour
par semaine, eu outre du dimanche, afin de per-
mettre aux parents de faire donner, s'ils le dési-
rent, à leurs enfants, l'instruction religieuse, en
dehors des édifices scolaires. ,,
Or, le catéchisme a lieu partout, tantôt do
7 à 8 heures du matin, tantôt de 11 heures à
midi. Le clergé se procure ainsi la douce sa-
tisfaction de se moquer de la loi.
Les enfants qui préparent leur première com-
munion perdent par la faut3 du curé un quart
d'heure de classe toutes les fois qu'ils ont à se
rendre de l'église à l'école ou de l'école à l'é-
glise.
Mais c'est bien pire s'ils fréquentent une des
vingt mille écoles de hameau qui existent en
France. Ces écoles étant situées comme le veut
la loi à plus de trois kilomètres du chef-lieu
de la commune, les enfants qui y sont ins-
crits et vont au catéchisme ont à faire un tra-
jet d'une heure pour aller de l'école à l'église
et vice versa. Si donc le catéchisme est fait de
7 à 8 heures du matin il faut que durant la
mauvaise saison ils se lèvent longtemps avant
le jour et marchent dans la nuit pendant une
heure au moins pour arriver à l'église en temps
voulu.
Le catéchisme fini, ils se rendent à l'école.
Ne pouvant y être avant neuf heures ; ils n'as-
sistent pas aux premiers exercices, les plus
importants, ceux précisément qui exigent le
plus d'efforts et produisent les meilleurs résul-
tats.
Si c'est de onze heures à midi que le curé a
placé l'enseignement du catéchisme, les con-
séquences en sont encore plus déplorables.
La santé des enfants peut en souffrir en mô-
me temps que leurs progrès en instruction. Il
est facile de comprendre pourquoi.
Les enfants quittent l'école vers dix heures,
une heure avant la sortie.
Ils courent à l'église où ils arrivent presque
en sueur. La maison de Dieu ebt froide; ils
peuvent dans ces circonstances y contracter
une maladie mortelle. A midi, ils retournent à
l'école, et se remettent à marcher vile pour y
être à une heure, moment de la rentrée. Ils
grignottent en route le morceau de pain qu'ils
ont dans leur poche. La digestion se fait mal
au pas gymnastique.
Elle se fait tout de même dans les jeunes
estomacs, mais c'est aux dépens de ces derniers!
Ces repas prjs pendant Aq rapides Ya-el-vieat -
les délabrent. L'hygiène condamne par consé-
quent tes catéchismes placés entre onze heures
et midi pour les enfants des écoles de hameau.
Les curés de campagne qui restent indifférents
devant celle considération sont vraiment cou-
pables.
Une occasion à saisir
Le moment est venu où ils sont en état d'en-
tendre 1.:\ison.1lssemontrent accommodants de-
puis lo discours de M. Combes. Les évêques
sont disposés à écouler les doléances répétées à
ce sujet. Je pourrais citer des faits très précis
sur ce point. Dans un département dont on
m'a prié de taire le nom pour que mon infor-
mation ne puisse avoir en aucune façon l'air
d'une réclame, les horaires des catéchismes
viennent d'être changés pour les enfants des
écoles do hameau. C'est le résultat d'une in-
tervention énergique du préfet auprès do l'évê-
ché. Les curés, pour les écoliers dont je parle,
feront* désormais le catéchisme les jeudis, les
dimanches et tous les jours s'il le faut durant
l'époque des grandes vacances.
Ce n'est qu'une demi-victoire puisque la so-
lution aurait pu être plus complète en établis-
sant ce régime pour les enfants de toutes les
écoles. Elle n'en constitue pas moins un gros
succès de l'école sur l'église. C'est, pour tous
les préfets, un exemple à suivre. Le discours
de M. Combes leur a donné une autorité nou-
velle auprès des prélats. Il ne lient qu'à eux
de la mettre au service des enfants, des familles
et des écoles.
ARMAND DEPPER.
————————— ———————————
BUREAUX RÉPUBLICAINS
Les journaux réactionnaires du soir annon-
çaient hier « une grande victoire nationaliste»
remportée, disaient-ils, au conseil municipal.
Une fois de plus le président avait été choisi à
droite.
Si les nationalistes n'étaient si démoralisés,
il faudrait s'étonner qu'ils se félicitent si vive-
ment pour un succès en apparence si naturel
dans une assemblée où ils avaient encore tout
récemment une grosse majorité.
Mais les temps sont changés et, à vrai dire,
le Conseil municipal de Paris n'est plus natio-
naliste. L'élection de M. Deville est due sur-
tout aux sympathies personnelles dont le con-
seiller du quartier N.- D. des Champs est en-
touré. Encore M. Deville n'a-t-il passé qu'à
une voix do majorité; et après un premier
tour de scrutin qui donnait l'avantago au can-
didat des républicains, M. Paul Brousse.
La vérité est que le bureau du Conseil mu-
nicipal est républicain puisque cinq sièges y
sont occupés par des membres de la gauche.
Notre ami, M. Achille, nommé vice-prési-
dent, est un dos conseillers les plus laborieux
et les plus sympathiques do l'Hôtel do Ville.
M. Bussat ne l'a emporté qu'au bénéfice de
l'âge sur un autre de nos amis, M. Henri
Rousselle.
Les secrétaires, MM. Poiry, Mossot, Pierre
Morel sont tous trois républicains. Et l'excel-
lent militant radical-socialista Bellan, culbutant
littéralement M. Gay, est élu syndic.
La « grande victoire nationaliste » ressem-
ble singulièrement à une débâcle. Et que se-
rait-ce si les députés nationalistes no s'accro-
chaient avec désespoir à des sièges de conseil-
lers qui, en droit, np tour appartiennent plus ?
Voh à la 3» page
les Dernières Dépêclies
de la nuit et
la Revue des Journaux
du matin
LA COMMISSION PERMANENTE
On a annoncé l'autre jour que le groupe par-
lementaire radical-socialiste avait nommé une
commission permanente pour la durée des va-
cances de Pâques. Les journaux et nous-mêmes
ont fait figurer par erreur dans cette commis-
sion le nom de M. Janet qui n'apparlient pas
au groupe. Par contre,il convient d'ajouter à la
liste des membres de la commission le nom de
M. Louis Puecb. qui avait été omis.
.——-——————— ——————————-
DÉBIGOCHAGE
Comment ne point se sentir tout imprégné
de commisération en songeant à ce qu'a dû
être l'état d'âme de M. Desmoulins, du Gaulois,
dimanche soir ? Vous le voyez, le pauvre, mâ-
chonnant son porte-plume, tiraillant les poils
de son visage, tortillant et délorlillant alterna-
tivement ses jambes, en face du papier blanc
destiné à devenir l' « éditorial » du lendemain
malin. +
Que M. Desmoulins ait eu la pensée de con-
sacrer cet éditorial à la question macédonienne
ou aux dangers de l'automobilismo, c'est assez
vraisemblable ; mais il aura ropoussé cette
idojo vertueusement. Allons donc ! c'eut été lâ.
cheté ! Non ! l'actualité lui ordonnait de parler
de l'élection du 4S arrondissement, il en par-
lerait.
Mais que pourrait-il bien en dire? Car de
confesser la défaite en toute franchise el bonne
foi, il no pouvait pas être question, n'est-ce
pas? Alors ?.
M. Desmoulins cherche. Il finit par poser ce
point d'interrogation : « Est ce une victoire ? »
Oui, est-ce une victoire ? Cruelle énigme. En
général, il est admis, en matière d'élection,
que celui des candidats qui est élu à remporté
la victoire. Mais M. Desmoulins fait valoir
deux circonstances atténuantes de la victoire
de M. Deville.
D'abord, dit-il, « M. Maurice Barrés a été
battu à deux cents voix de majorité ». Eh bien
mais, être en majorité de 200 voix là où. l'an-
née dernière, on était en minorité de 450 bul-
letins, ce n'est pas déjà si mal. Et puis, dit le
Desmoulins du Gaulots, « tout lo bloc a donné
en faveur de M. Deville ». Avouez quo M.
Desmoulins ne s'y prendrait pas autrement s'il
entrait dans ses vues do démontrer que le ré-
sultat de l'élection du 4e constitue bien une
grande victoire républicaine. Pas de chance,
M. Desmoulins. -
Mais il continue, suant et peinant sur son
innocent papier blanc. Il trouve coci : que M.
Deville n'eût pas été élu si MM. Poubelle et
Soulès « ne s'étaient désistés en sa faveur ».
Vraiment l c'est à croire que M. de La Palisse
se penche, souffleur complaisant, à l'oreille de
M. Desmoulins. Infortuné M. Desmoulins.
Attendez 1 vous n'êtes point au bout; vous
allez le voir tomber dans ce qu'on pourrait ap-
peler l'incohérence finale. En effet, après avoir
déclaré que le succès de M. Deville n'aurait pas
été obtenu «si les progressistes ne s'étaient pas
désintéressés de l'élection », il écrit : « les pro-
gressistes sont relativement nombreux dans le
quatrième arrondissement. A quelles inspira-
tions ont-ils obéi en volant pour un socialiste-
collectiviste ? Je l'ignore ».
Que diable! M. Desmoulins, il faudrait s'en-
tendre, et il faudrait choisir. Ce double repro-
che que vous adressez aux progressistes, d'une
part, de s'être désintéressés de l'élection, d'autre
part, d'avoir voté pour M. Deville, ne lient pas
debout. S'ils se sont désintéressés, ils n'ont pas
voté ; s'ils ont voté, ils nese sont pas désinté-
ressés. Voyons, voyons, qu'est-ce que vous,
dites ?
ijplas r il gérait cruel dMsterpour avoir une
réponse précise. M. Desmoulins, visiblement, ne
jouit pas de tous ses moyens.
Et c'est assez amusant que le môme coup de
massue asséné par les républicains du IVe sur
la tête du nationalisme ait eu pour premier ré-
sultat do brouiller à co point les idées de l'édi-
torialiste habituel du Gaulois. Le nationalisme
n'est peut-être pas encore tout-a-fait mort, mais
il en est à la période du « débigochage ». —
L. V.-M.
♦
UNE REVANCHE MANQUÉE
L'état d'esprit des amis des congrégations est
très curieux à observer, à l'heure actuelle.Dans
tous les coins du pays où les associations reli-
gieuses ont tenu école, pour se venger de leur
départ prochain, on calomnie les instituteurs
laïques, on cherche à tour nuire, on essaie de
lour jouer de vilains lours.
Il s'est passé notamment la semaine dernière,
à Levallois-Perret, un incident significatif. Un
conseiller municipal bien connu pour ses opi-
nions cléricales proposa de diminuer de 400 fr.
le irailement du directeur de l'école publique
de la rue Rivay.
EL la municipalité allait le suivre dans celle
voie, lorsque M. Aristide Hengy, un fervent
républicain, celui-là, protesta contre cette ma-
nière do faire. Il déclara que le moment n'était
point propice pour jeter le discrédit sur les
instituteurs, au moment même où la Républi-
que avait le plus besoin d'eux.
M. Hongy fut assez adroit et assez éloquent
pour enlever le vote rétablissant le crédit que
l'on voulait supprimer. Comme on le voit il
n'est point de petits moyens que ne négligent
les défenseurs de l'enseignement clérical.
Il faut que dans toutes les communes do
France, les républicains soient sans cesse sur
leurs gardes pour éviter les pièges que sèment
sous leurs pas les amis des congrégations. —
Charles Darcy.
-le
UN DISCOURS RÉPUBLICAIN
Le doyen d'âge du conseil municipal, le vieux
et solide républicain Opportun, a prononcé hier
un discours tel qu'il eu faudrait faire ontendre
souvent à ce qui reste de la majorité nationaliste.
Donnons quelques passages de cette remarquable
allocution :
M. Opportun. — Il est un vœu qui m'est
cher entre tous, et que je ne puis m'eaipêchor
de formuler. C est do voir la population pari-
sienne continuer de revenir en masse aux tra-
ditions de républicanisme et de libre-pensée
qui ont fait sa gloire, c'est d'avoir à célébrer,
toujours plus nombreuses, dos victoires comme.
cellos des récentes élections municipales, comme
celle do l'élection législative d'hier, qui honore
notre vaillante et laborieuse population du
4e arrondissement. (Très bien ! sur plusieurs
bancs.)
Je souhaite enfin que pareils à ce printemps
qui nous a procuré de chaudes et brillantes
journées, les horizons politiques s'éclaircissent
de plus en plus, que la lumière se fasse (Très
bien ! — Exclamations) dans l'esprit de ceux
qui se laissèrent égarer, et que désormais à
l'abri des enlreprises de l'obscurantisme et de
la réaction (Oh ! Oh! — Très bien!), le vieil es-
prit républicain démocratique règne de nouveau
sans partage dans cette maison commune du
peuple de Paris.
Vivo la République t
Vive Paria 1
(Très bienl — Applaudissements!).
LES ÉLECTIONS
Election législative
IJautcs-Pyrènèes (Arrondissement d'Argelès)
Inscrits : 12.060 — Votants : 9.579
MM. Achille Fould, républicain. 4.857 ELU.
Sasserre, nationaliste.- 1.597
Saura, rép.-calholique.,.u 1.399
Maysonnave, rad.-soc 1.105
Election au conseil d'arrondissement
Charente-Inférieure fcanton de Pons)
M. Albert Bardou, républicain, a été élu par
1.792 voix contre M. Calvet, séuateuf. qui en
a obtenu 1.425.
Election au conseil général
Eure (canton de Pont-Audemerj
M. Maxime Legendre, républicain libéral, a
été élu par 1.383 voix, contre M. Montier, ra-
dical, 1.260 voix.
——————————— --
L'UNION DOUANIÈRE EUROPÉENNE
CDB nofr4 correspondant particulierJ
Berlin, 6 avril.
Au prochain congrès international d'agri-
culture qui se réunira lo 13 courant à Rome,
M. Schwerin-Loewitz, président du conseil
d'agriculture de l'empire allemand, proposera
la création d'une sorte d'Union douanière eu-
ropéenne, pour favoriser les produits de l'Eu-
rope menacés par la concurrence américaine.
-
LA QUESTION D'ORIENT
(De notre correspondant particulier1
Vienne, 6 avril.
La question d'Orient se corso, on voit déjà
surgir l'antagonisme de l'Autriche et de la
Russie, l'assassinai du consul russe à Milro-
witza marque la première étape. Une manifes-
tation va avoir lieu en Galicie, aux frontières
russes ; en août dos exercices militaires com-
prenant 16 bataillons de cavalerie sont décidés
au ministère de la guerre. On veut montrer à
la Russie, qui le sait très bien, qu'on a ici des
soldats prêts à marcher. Nous verrons ce qu'il
adviendra de tout cela, mais il est certain que
l'Autriche est bien décidée à ne pas laisser à la
Russio seule le morceau qui se détache de la
Turquie el qu'elle veut au moins arriver à Salo-
nique. Elle y travaille depuis assez longtemps.
- E.-D.-G.
———————— ————————————
DÉTOURNEMENTS
A LA BANQUE NATIONALE BULGARE
(Do noire, correspondant particulier)
Sofia, 6 avril.
L'enquête ouverte par le ministre des finan-
ces sur la gestion do la Banque Nationale de
Bulgarie a amené la découverte de nombreux
détournements. Un des hauts fonctionnaires de
la banque vient d'être révoqué. Ou s'attend à
une prochaine épuration de tout le personnel
de cet établissement financier.
.—————.————— »
Le président Roosevelt est inquiet
(De notre correspondant particulier1
New-York, 6 avril.
Le président Roosevelt a fait prier les comi-
tés qui organisent dans les Etats de l'Ouest des
solennités à l'occasion do son voyage, de limi-
ter le nombre des fêtes et réceptions en son
honneur. Tout en se montrant très touché de
l'hospitalité splendide qu'on lui accorde, il
doit dire que,si l'on continue du train dont on
a commencé, il tombera niûlauè avant de pQg- j
voir terminer e4 tourna. ( J
A LA CHAMBRE ..;.- .Á
L'AFFAIRE DREYFUS
Comme on le prévoyait, la discussion sur
les opérations électorales du 2° arrondisse-
ment de Paris - élection Syveton — a
doanc lieu à un important débat sur l'af-
faire Dreyfus. On se penchait vers M. Mé-
line. On lui disait : « 11 y a donc une affaire
Dreyfus ? M Oui, il y en a une. Mais il est
probable que bientôt il n'y en aura plus :
la justice, momentanément troublée par
les faux et par les mensonges, ayant enfin
accompli son œuvre.
M. Jaurès a pu s'expliquer en détail sur
les raisonnements et sur les faits nouveaux
qu'il apportait. -Le centre et la droite ont
essayé en vain d'interrompre l'éloquent et
savant exposé de M. Jaurès. Ils n'ont plua
assez d'audace pour braver sérieusement la
vérité et la logique.
M. Cavaignac, dès longtemps abattu,
reste tout à fait écrasé après l'exécution que
lui a fait subir notre grand Brisson.
Mais ne nous attardons pas à apprécier
une séance qui est critiquée avec plus d'au-
torité dans une autre partie de ce journal.
Venons tout de suite à un compte rendti
complet et fidèle du débat.
Le rapport de M. Paul Beauregard con-
clut à la validation de M. Syveton.
M. Jaurès prend la parole.
M. Jaurès. — Pendant la période élec-
torale, M. Syvoton s'est emparé de l'affiche de
la Patrie française sur le a ministère de l'étran-
ger ». Il en a accepté la responsabilité.
Devant la commission, il a dit qu'il avait la
droit d'appeler le ministère d'alors « ministère
de l'étranger ».
Sa tùèse et celle de ses amis est celle-ci :
Une tentative a été faite, après le procès de
Rennes, pour faire casser devant la justice de
Rennes l'arrêt du conseil de guerre. Cette ten-
tative n'a échoué que grâce à M. le général de
Galliffet, qui a écrit à ce sujet une lettre à M.
Waldeck-Rousseau.
M. Syveloo s'est attaché à dérnontrer,par les
témoignages de MM. Judet et Jules Lemailre,
l'authenticité de la phrase de celte lettre qu'il
a fait afficher.
Je ne la conteste pas; il faut bien que, de
temps en temps, nos adversaires se servent
contre nous do documents authentiques.
Dans sa déposition, M. JudeL cherche à dé-
montrer que la phrase de M. do Galliffet signi-
fie que tout le parti républicain et le ministère
sont à la remorque de l'étranger.
M. Syveton a pris la responsabilité de ces
conclusions el dit que cette déposition lui don-
nait lo droit do dire que M. Mesureur était le
candidat de l'étranger.
Ces procédés, à l'égard de tout notre parti,
de tout le parti républicain (réclamations au
contre, applaudissements à gauche). Je vais
donner salisfaclioa au contre. Jo vous mels
en dehors des attaques et des injures de M.
Judet.
M. Jaurès apprécie l'attitude des natio-
nalistes qui gardent l'affaire Dreyfus ou-
verte pour eux et la ferment seulement
pour les républicains.
M. Jaurès. — A ceux qui nous accusent
d'être le parti de l'étranger, nous devons dé-
montrer qu'ils ont, moins que d'autres, le droit
de nous appeler le parti do l'étranger. Le parti
de l'étranger, c'est celui qui, pendant quatre
ans, a fait appel, pour servir ses combinai-
sons, par un faux, à la signature d'un souve-
rain étranger.
Pendant quatre années, ils ont affirmé qu'il
existait, à la charge de Dreyfus, une lettre, une
note écrite de la main môme de l'empereue
Guillaume.
Le lexte de la note prétendue de l'empereur
d'Allemagne est en allemand. La traduction
en a été donnée par des garants que nos adver-
saires ne récuseront pas. M. Millevoye en a
parlé dans une réunion en 1898, en disant
qu'elle contenait ces mots : « Cette canaille de
Dreyfus. D
M. Jaurès explique le système des ad-
versaires de la revision.
Tout le système est celui-ci : la lettre da
Guillaume II est une réponse au bordereau
qui n'a pas été écrit sur papier pelure, mais
sur papier fort.
Ce bordereau a été annoté par l'empereur
Guillaume, mais sur la réclamation du gou-
vernement français, on a dû le rendre et on en
a gardé une copie sur pelure, copie qui a été
connue plus tard. (Rumeurs à droite.)
Il est étrange que le chef du service des ren-
seignements se soit laissé aller à produire une
pièce fausse, car cette pièce était fausse.
Les souverains ne prendraient-ils pas les
précautions élémentaires quand des attachés
militaires, MM. Panizzardi el Schwartzkoppen,
ne correspondaient entre eux qu'avec la plus
grande réserve ?
M. Jaurès estime que les chefs de l'état-
major sont coupables de complicité morale
avec Henry et accuse le gouvernement de
M. Méline de négligence peut-être voulue.
Il demande à M. Millevoye, qui lui avait
fait connaître la soi-disant preuve du cri-
me attribué à Dreyfus.
M. Millevoye se refuse à répondre.
M. Jaurès. — Je constate votre refus da
répondre.
Ainsi, vous refusez de renseigner le pays,
après avoir devant lui porté les accusations les
plus graves, alors que vous devez à la France
elle-mêmo, à la France, dont le nom ne doit
cependant pas servir à masquer d'aussi étran-
ges dérobades, la vérité tout entière.
A co moment, bien des consciences se sont
éveillées, bien des yeux se sont ouverts. Au
premier rang de ceux-là, il y a le général, de
Pellieux ; il a écrit au ministre de la guerre
une lettre, qui n'a été montrée ni aux juges
du conseil de guerre, ni à la Cour de cassation
et dont les termes nécessitaient une enquête.
Celte lettre, adressée au ministre de la
guerre, j'en donne 1e texte à la Chambre. La
voici :
Le général de Pellicux à H. le Ministre de la
guerre.
31 août t898.
Dupe de gens sans henneur, ne pouvant plus
espérer compter sur la confiance des subordonnés
sans laquelle le commandement est impossible et,
de mon côté, no pouvant avoir contiance en ceux
de mes chefs qui m'ont fait travailler sur des faux,
je demande ma mise à la retraite.
Intervention de M. Brisson
Ici, Henri Brisson se lève, se prend le
front à deux mains, et avec une émotion
indicible, que partage toute # l'Assem-
blée, le grand orateur radical intervient
dans la discussion.
M. Brisson. — Celle lettre est, dilos-
vous, du 31 août 1898; eh bien! président du
conseil d'alors, je déclare que jo n'en ai jamais
eu connaissance.
M. Cavaignac. — Quelle conclusion,
M. Brisson, enlendez-vous donc tirer de cetla
lettre ? Elle n'a pas été ignorée. Une intefr»
view l'a (ait connaître à celle époque.
CINQ CENTIMES- Ië Numifo: ipapis a DËPAATEMENTS- .:--::. --:-_ - Ue Numéro; CINQ CENT:tE"'
"',
ANNONCES
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14, rue du Mnil. Pari?
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De 4 à 8 heures du soir el de (0 heures du soir à 1 heure du matin
No 12080 — Mercredi 8 Avril 1903
19 GERMINAL AN 111
- ADMINISTRATION ; 14, me du Mail
Adresser lettres et mandats à l'administrateur
NOS LEADERS
v .-i'" .:. -
PARIS
- ¡Le nationalisme joue définitivement
de malheur. Il y a huit jours c'était le
176 arrondissement qui lui donnait con-
gé. Avant-hier, c'était le 4e qui infligeait
à l'un de ses plus violents protagonistes
une défaite retentissante. C'est la chute
rapide. Son règne passe comme une
Dmbre.
Les dernières élections de Paris com-
portent néanmoins des enseignements
qu'il serait imprudent de méconnaître.
Le corps électoral parisien, n'est pas
complètement remis de la terrible se-
cousse que l'effort de la coalition lui a
fait subir au cours de ces dernières an-
nées. Il est facile de s'en convaincre. Il
suffit de constater les importantes mi-
norités que les adversaires de la Répu-
blique obtiennent encore dans les cir-
conscriptions que nous venons de re-
conquérir. La situation d'autrefois est
loin d'être pleinement reprise. Repor-
tons-nous seulement en 1898.
Qui eût osé, à cette époque, arborer
en plein Paris, comme l'a fait Barrès,
le drapeau du plébiscite? Et si on Feût
osé, quel nombre infime de suffrages on
aurait obtenu !
Il reste encore dans l'esprit d'un cer-
tain nombre de citoyens qui se croient
fermement républicains, je ne sais quel
esprit demécontentementintime dont la
blessure saigne toujours et qui se tra-
duit, à chaque élection, par un vote de
combat.
L'aventure nationaliste ne sera défi-
nitivement terminée que le jour où
tous ces égarés auront réintégré le
bercail républicain. Il faut donc les y
ramener. C'est donc là la tâche que
nous devons nous imposer. Tâche fa-
cile, d'ailleurs. Il suffit de vouloir et de
s'en donner la peine.
Les causes du mécontentement sont
visibles. Il y a des milieux, à Paris, où
l'on est, de très bonne foi, persuadé,
d'une part, que les pouvoirs publics,
que les Chambres, que le gouverne-
ment, tendent, dè parti pris, à la désor-
ganisation de la défense nationale;
d'autre part que la loi de 1901 n'a eu
d'autre but que de violer une de nos
plus chères libertés, la liberté d'asso-
ciation. On y est également convaincu
que le Parlement, énervé par des dis-
cussions stériles et des luttes sans issue
est impuissant â jamais réaliser aucune
des réformes démocratiques et sociales
qu'on a depuis si longtemps promises.
Quelque grossière que soit l'erreur, elle
existe dans l'esprit d'un très grand nom-
bre de citoyens de bonne foi. Il faut se
rendre à l'évidence. C'est à nous à la
détruire.
Il faut dans nos journaux, dans nos
discours, en d'incessantes conférences,
rétablir la vérité odieusement travestie.
Quel gouvernement s'est jamais mon-
tré plus jaloux de la grandeur et dé la
prospérité de la France que la Répu-
blique? La République a reçu la France
sur les champs de bataille de 1870,
meurtrie, blessée, agonisante. Dans un
admirable effort de résistance qui a fait
l'admiration du monde civilisé, elle a
d'abord sauvé son honneur, elle a payé
la plus formidable rançon qui ait ja-
mais été demandée à un peuple vaincu.
En quelques années elle a reconstitué
notre puissance militaire au point d'é-
veiller les susceptibilités du vainqueur.
Chaque fois qu'une découverte s'est pré-
sentée qui pouvait donner à nos armées
de terre ou de mer une force nouvelle,
la République n'a jamais hésité. Elle a
voté sans compter les dépenses néces-
saires. En 1898, le Parlement ouvrait un
crédit de deux cents millions pour la ré-
fection de notre matériel d'artillerie.
Il y a deux ans à peine, il votait pour la
construction de cuirassés, pour la dé-
fense des côtes, pour les points d'ap-
pui de la flotte un programme de tra-
vaux de près de sept cent millions. Le
budget militaire de la France est, cha-
que année, le plus élevé du monde. Il
faut avoir l'impudence et l'audace d'un
parti prêt à tout, pour oser dire que les
républicains désorganisent l'armée et
manquent de patriotisme.
La liberté d'association? Mais c'est
précisémentlaloi de 1901 qui donne cette
liberté. La loi de 1901 accorde à tous les
citoyens français vivant de la vie ordi-
naire le droit absolu de s'associer où
et comme bon leur semble sans restric-
tions, sans réserves. II n'est même pas
nécessaire de porter l'association à la
connaissance de l'autorité administra-
iive par voie de déclaration. Depuis
1901, on peut s'associer en France dans
n'importe quel but, pour n'importe quel
objet. N'est-ce pas là la liberté d'asso-
ciation telle que le parti républicain l'a
revendiquée dans l'opposition pendant
plus demi-siècle? Sans doute lé béné-
fice de cette loi ne s'étend pas auxcon-
gréganistes, c'est-à-dire à ceux qui vi-
vent en commun, sous le même toit, qui
ont fait vœu de pauvreté et d'obéissance
et qui relèvent d'un chef étranger.
Mais sur ce point la loi de 1901 n'a pas
innové, on ne saurait trop le redire. La
loi de 1901 ne fait que confirmer, à cet
égard, les dispositions des lois anté-
rieures. C'est depuis qu'il y a un droit
public en France, c'est-à-dire depuis
des slecles, qne les congrégations ont dû,
.'pout s'établir et pour vivre,obtenir l'au-
torisation de l'autorité civile. C'est la
suprématie de l'Etat laïque qui est en
jeu. Qui pourrait sérieusement préten-
dre que les pouvoir publics républicains
sont persécuteurs et sectaires parce
qu'ils résistent aux empiétements de
plus en plus dangereux des congréga-
tions insurgées contre la loi, contre
l'esprit moderne et contre nos institu-
tions ?
Quant aux réformes démocratiques et
sociales à qui donc la faute si elles ne
sont pas encore accomplies ? N'est-ce
pas surtout à cette opposition haineuse
et brutale, qui prend le masque de la
République pour la mieux combattre,
soulève sans cesse les questions les
plus irritantes, trouble l'opinion publi-
que par la plus odieuse propagande de
calomnies, de diffamations, d'outrages
et rend presque impossible le fonction-
nement régulier du régime parlemen-
taire.
Voilà ce qu'il faut dire. Voilà ce qu'il
faut proclamer sans cesse sous peine de
nous laisser peu à peu déborder par la
calomnie.
C'est là le devoir de tous les répu-
blicains. C'est plus particulièrement le
devoir du parti radical et radical-socia-
liste. Numériquement ce parti n'a pas
encore à la Chambre la majorité abso-
lue ; mais il y possède une forte ma-
jorité relative. Presque à chaque élection
c'est un des siens qui triomphe. Son pro-
gramme politique correspond à la
moyenne d'opinion de la France répu-
blicaine. En fait, c'est sur lui que pèse
la responsabilité du pouvoir. Qu'il y
songe. Qu'il s'organise. Qu'il dissipe,
par tous les moyens possibles, les
erreurs et les préjugés de l'opinion.
C'est surtout en politique qu'il est vrai
de dire qu'il n'y a pas de quantité né-
gligeable.
Louis Puech.
M. CAVAIGNAC
On sait que M. Jaurès devait,
à propos de l'élection Syveton,
parler de l'affaire Dreyfus et
notammentdu « faux impérial »,
c'est-à-dire de la fausse lettre
attribuée à l'empereur d'Alle-
magne, lettre que le général
Mercier a communiquée à certains juges du
conseil de guerre de Rennes. M. Jaurès est
monté hier à la tribune. Il a prononcé un
admirable discours qu'il continuera aujour-
d'hui. Et il a apporté, non pas à propre-
ment parler, un fait nouveau, mais un fait
d'une gravité exceptionnelle, qui a provoqué
un incideot des plus vifs entre Henri
Brisson et M. Cavaignac.
Il y a longtemps qu'ici même nous avons
dit ce qu'est M. Cavaignac : un homme
sans opinions, d'une ambition excessive,
prêt à tout pour donner satisfaction à ses
rêves d'avenir. Au moment où le faux
Heory a été découvert, M. Cavaignac pou-
vait, s'il l'avait voulu, ouvrir le procès
de revision et épargner à ce pays une ter-
rible crise. II ne l'a pas fait quoique Henry
ait perdu la vie (et comment?) le lende-
main de son aveu. Mais ce n'est pas le seul
crime dont M. Cavaignac soit responsable.
Il en a commis un autre.
Le 31 août 1898, Brisson étant président
du conseil et M. Cavaignac ministre de la
guerre, le général.de Pellieux écrivait à ce
dernier que, « dupe de gens sans honneur
« et n'ayant plus confiance en ceux de ses
« chefs qui l'avaient fait travailler sur des
cc faux » il demandait sa mise à la re-
traite. C'est M. Jaurès qui a lu cette lettre.
M. Cavaignac a avoué l'avoir reçue et n'en
avoir pas tenu compte. Le faux Henry
éclatait en même temps,
A ce moment du débat, Brisson s'est levé.
II a reproché à M. Cavaignac sa duplicité
et dans un mouvement de superbe indigna-
tion qui a été applaudi vigoureusement
par les républicains, il lui a dit qu'il pou-
vait se féliciter du vote de l'amnistie, sans
quoi ce serait pour lui la mise en accusa-
tion. Nul ne pourrait dépeindre cette situa-
tion vraiment dramatique: Brisson, debout,
tendant le bras, un bras vengeur, vers M.
Cavaignac, tous les républicains applaudis-
sant et le transfuge, effrayant de pâleur et
de lividité, tremblant, cloué sur son siège.
Il a eu pourtant l'audace de répondre.
Mais quelques mots balbutiés pour essayer
de faire dévier le débat. Peine inutile. Le
châtiment s'est abattu sur lui.
M. Jaurès finira aujourd'hui. Et il est
bien certain — c'est la première sanction
exigée par les républicains - que M. Syve-
ton sera invalidé. — Cli. B.
Le nouveau fusil anglais
(De naCra correspondant particulier}
Londres, 6 avril.
Aux ateliers d'Enfield, on pousse activement
la fabrication du nouveau fusil destiné à l'in-
fanterie anglaise. Plusieurs milliers de ces
nouvelles armes seront distribuées le mois
prochain. Le nouveau fusil aura un magasin.
qui pourra être chargé, en deux temps, de dix
cartouches. Il aura aussi cet avantage de peser
une livre de moins que l'ancien modèle,
LE PRINCE RADOLIN
ET SÉS EMPLOYÉS POLONAIS
(De notre correspondant varticulierl
Posen, 6 avril.
Les journaux polonais rapportent que le
princo Radolin, ambassadour d'Allemagne à
Paris, a licencié tous les employés de race po-
lonaise qu'il occupait dans sa propriété de
Iarotschin. Ils ont été remplacés par des Alle-
mands.
RÉVOLTE AU HONDURAS
New-York, 6 avril.
Une lettre dé Puerla-Corlez (Honduras), da-
tée du 2o mars, annonce que, la garnison,
forte de 200 hommes, s'est mutinée et a massa-
cré ses officiers, au nombre de sept.
La femme et les filles du président intéri-
maire Arias se sont réfugiées à bord d'un m-
vire ataci-lcain. - ,
CAUSERIE PEDAGOGIQUE
Les effets d'un discours
Le budget des cultes. — Une lettre de
M. René Goblet. — La séparation
des Eglises et de l'Etat. — Prêtres
et moines. — Le catéchisme. —
Les inconvénients des heures
choisies par le clergé. — Un
exemple à suivre.
Le discours de M. Combes sur la budget des
cultes an Sénat, affiché, ces jours derniers,
dans toutes les communes, a provoqué dans les
évêchés et les presbytères une vive émotion.
Depuis cent ans, jamais le chef du gouver-
nement n'avait blâmé si sévèrement l'attitude
inconvenante du clergé ; jamais il n'avait si
franchement enyisagé la question de la dénon-
ciation du Concordat; jamais il n'avait paru
si résolu à mettre ses menaces à exécution ja-
mais d'ailleurs il n'avait trouvé pour appui une
majorité si fidèle et si anticléricale que celle
d'aujourd'hui. Quoi qu'en dise en effet M.
René Goblet dans une lettre que publie le der-
nier numéro des Annales de la jeunesse laïque,
la majorité républicaine n'a nullement aban-
donné l'ancien programme républicain, et no-
tamment l'article concernant la séparation des
Eglises de l'Etat.
L'attitude du clergé
Le clergé ne l'ignore pas. Il a parfaitement
compris jusque dans ses moindres sous-onten-
dus l'avertissement de M. Combes. Il a montré
qu'il y était sensible.
Sa conduite a changé presque immédiate-
ment. Les curés les plus fougueux se sont
montrés prudents et réservés au sujet dos con-
grégations dissoutes. Ils no se sont point soli-
darisés avec elles. Il est vrai qu'elles étaient
vaincues! Ils n'ont point poussé des lamenta-
tions inutiles du haut de la chaire ; ils n'ont
point prêché la résistance à la loi ; ils n'ont
pas injurié lo Parlement. Les évêques n'ont
point écrit de mandements politiques. Calme
plat partout.
C'est nouveau, cela.
Si quelques révérends pères capucins, domi-
nicains ou autres, prêchent çà et là le carême
en langage violent, c'est tout simplement parce
que, déjà invités depuis quelques semaines à le
faire, il est trop tard pour prier maintenant
ces hôtes compromettants de s'éloigner et re-
joindre leur maison-mère. La politejsa veut
qu'ils continuent. Mais, à l'occasion de leur
expulsion prochaine, les curés s'abstiendront
de prendre part aux manifestations organi-
sées. On no les verra point, comme l'année
dernière, en Bretagne, chauffer avec de l'alcool
l'enthousiasme des paysans et des dévotes con-
voqués pour jeter des ordures et pousser des
cris séditieux. Ils resteront chez eux, satisfaits
peut-être de voir partir leurs redoutables con-
currents dans J'exploitation do la crédulité
humaine.
Une tois de plus, nous constaterons l'esprit
de contradiction qui les anime.
Ne suffit-il pas en effet de mettre publique-
ment eu relief un côté de leur altitude pour
que tout de suite cette altitude se modifie en
sens contraire? M. Waldeck-Rousseau s'éver-
tuait à proclamer, lors de 1a discussion de la
loi sur les associations, que les prêtres étaient
au fond les adversaires des moines. Aussitôt
le clergé séculier protesta, affirma et prouva
sa solidarité avec le clergé régulier. M. Com-
bes, après lui, dénonce les manquements du
clergé séculier ; il établit que le Concordat
n'est plus qu'un discordât. Tout de suite les
incorrections signalées cessent dans les gran-
des comme dans las petites paroisses.
Rappelons-nous les difficultés que Léon XIII
a dû vaincre pour faire admettre tant bien
que mnl par les prêtres qu'il faut adhérer au
régime politique actuel! En vérité, si nous
nous mettions à nous plaindre de l'indifféren-
co des curés à l'égard du p&po, nous les en-
tendiions s'écrier qu'ils répudient nos conseils
internationalistes et qu'ils ne doivent pas une
obéissance passive à un chef étranger.
Ceux qui s'intéressent à la résurrection de la
doctrine gallicane peuvent essayer le moyen,
il est bon.
Les heures du catéchisme
En attendant, profilons do l'assagissement
momentané du clergé pour obtenir do lui une
réforme qui, si petite qu'elle paraisse tout
d'abord, ne manque pas d'importance. Elle ré-
glerait au mieux des intérêts de l'enfant, le
seul rapport officiel qui existe entre l'Eglise et
l'école.
Il s'agit de modifier les heures de catéchis.
me. à l'église bien entendu ! A l'école le caté-
chisme est interdit formellement.
On sait qu'au lieu de l'enseigner le jeudi,
matin et soir, les curés l'enseignent plusieurs
fois par semaine, pendant une heure seulement.
C'est tout-à-fait opposé au vœu du législateur
qui n'a consacré le congé hebdomadaire du jeudi
quo pour fixer un jour à l'enseignement reli-
gieux.
L'article 2 de la loi du 28 mars 1882 le dit
expressément en ces termes :
Les écoles primaires publiques vaqueront un jour
par semaine, eu outre du dimanche, afin de per-
mettre aux parents de faire donner, s'ils le dési-
rent, à leurs enfants, l'instruction religieuse, en
dehors des édifices scolaires. ,,
Or, le catéchisme a lieu partout, tantôt do
7 à 8 heures du matin, tantôt de 11 heures à
midi. Le clergé se procure ainsi la douce sa-
tisfaction de se moquer de la loi.
Les enfants qui préparent leur première com-
munion perdent par la faut3 du curé un quart
d'heure de classe toutes les fois qu'ils ont à se
rendre de l'église à l'école ou de l'école à l'é-
glise.
Mais c'est bien pire s'ils fréquentent une des
vingt mille écoles de hameau qui existent en
France. Ces écoles étant situées comme le veut
la loi à plus de trois kilomètres du chef-lieu
de la commune, les enfants qui y sont ins-
crits et vont au catéchisme ont à faire un tra-
jet d'une heure pour aller de l'école à l'église
et vice versa. Si donc le catéchisme est fait de
7 à 8 heures du matin il faut que durant la
mauvaise saison ils se lèvent longtemps avant
le jour et marchent dans la nuit pendant une
heure au moins pour arriver à l'église en temps
voulu.
Le catéchisme fini, ils se rendent à l'école.
Ne pouvant y être avant neuf heures ; ils n'as-
sistent pas aux premiers exercices, les plus
importants, ceux précisément qui exigent le
plus d'efforts et produisent les meilleurs résul-
tats.
Si c'est de onze heures à midi que le curé a
placé l'enseignement du catéchisme, les con-
séquences en sont encore plus déplorables.
La santé des enfants peut en souffrir en mô-
me temps que leurs progrès en instruction. Il
est facile de comprendre pourquoi.
Les enfants quittent l'école vers dix heures,
une heure avant la sortie.
Ils courent à l'église où ils arrivent presque
en sueur. La maison de Dieu ebt froide; ils
peuvent dans ces circonstances y contracter
une maladie mortelle. A midi, ils retournent à
l'école, et se remettent à marcher vile pour y
être à une heure, moment de la rentrée. Ils
grignottent en route le morceau de pain qu'ils
ont dans leur poche. La digestion se fait mal
au pas gymnastique.
Elle se fait tout de même dans les jeunes
estomacs, mais c'est aux dépens de ces derniers!
Ces repas prjs pendant Aq rapides Ya-el-vieat -
les délabrent. L'hygiène condamne par consé-
quent tes catéchismes placés entre onze heures
et midi pour les enfants des écoles de hameau.
Les curés de campagne qui restent indifférents
devant celle considération sont vraiment cou-
pables.
Une occasion à saisir
Le moment est venu où ils sont en état d'en-
tendre 1.:\ison.1lssemontrent accommodants de-
puis lo discours de M. Combes. Les évêques
sont disposés à écouler les doléances répétées à
ce sujet. Je pourrais citer des faits très précis
sur ce point. Dans un département dont on
m'a prié de taire le nom pour que mon infor-
mation ne puisse avoir en aucune façon l'air
d'une réclame, les horaires des catéchismes
viennent d'être changés pour les enfants des
écoles do hameau. C'est le résultat d'une in-
tervention énergique du préfet auprès do l'évê-
ché. Les curés, pour les écoliers dont je parle,
feront* désormais le catéchisme les jeudis, les
dimanches et tous les jours s'il le faut durant
l'époque des grandes vacances.
Ce n'est qu'une demi-victoire puisque la so-
lution aurait pu être plus complète en établis-
sant ce régime pour les enfants de toutes les
écoles. Elle n'en constitue pas moins un gros
succès de l'école sur l'église. C'est, pour tous
les préfets, un exemple à suivre. Le discours
de M. Combes leur a donné une autorité nou-
velle auprès des prélats. Il ne lient qu'à eux
de la mettre au service des enfants, des familles
et des écoles.
ARMAND DEPPER.
————————— ———————————
BUREAUX RÉPUBLICAINS
Les journaux réactionnaires du soir annon-
çaient hier « une grande victoire nationaliste»
remportée, disaient-ils, au conseil municipal.
Une fois de plus le président avait été choisi à
droite.
Si les nationalistes n'étaient si démoralisés,
il faudrait s'étonner qu'ils se félicitent si vive-
ment pour un succès en apparence si naturel
dans une assemblée où ils avaient encore tout
récemment une grosse majorité.
Mais les temps sont changés et, à vrai dire,
le Conseil municipal de Paris n'est plus natio-
naliste. L'élection de M. Deville est due sur-
tout aux sympathies personnelles dont le con-
seiller du quartier N.- D. des Champs est en-
touré. Encore M. Deville n'a-t-il passé qu'à
une voix do majorité; et après un premier
tour de scrutin qui donnait l'avantago au can-
didat des républicains, M. Paul Brousse.
La vérité est que le bureau du Conseil mu-
nicipal est républicain puisque cinq sièges y
sont occupés par des membres de la gauche.
Notre ami, M. Achille, nommé vice-prési-
dent, est un dos conseillers les plus laborieux
et les plus sympathiques do l'Hôtel do Ville.
M. Bussat ne l'a emporté qu'au bénéfice de
l'âge sur un autre de nos amis, M. Henri
Rousselle.
Les secrétaires, MM. Poiry, Mossot, Pierre
Morel sont tous trois républicains. Et l'excel-
lent militant radical-socialista Bellan, culbutant
littéralement M. Gay, est élu syndic.
La « grande victoire nationaliste » ressem-
ble singulièrement à une débâcle. Et que se-
rait-ce si les députés nationalistes no s'accro-
chaient avec désespoir à des sièges de conseil-
lers qui, en droit, np tour appartiennent plus ?
Voh à la 3» page
les Dernières Dépêclies
de la nuit et
la Revue des Journaux
du matin
LA COMMISSION PERMANENTE
On a annoncé l'autre jour que le groupe par-
lementaire radical-socialiste avait nommé une
commission permanente pour la durée des va-
cances de Pâques. Les journaux et nous-mêmes
ont fait figurer par erreur dans cette commis-
sion le nom de M. Janet qui n'apparlient pas
au groupe. Par contre,il convient d'ajouter à la
liste des membres de la commission le nom de
M. Louis Puecb. qui avait été omis.
.——-——————— ——————————-
DÉBIGOCHAGE
Comment ne point se sentir tout imprégné
de commisération en songeant à ce qu'a dû
être l'état d'âme de M. Desmoulins, du Gaulois,
dimanche soir ? Vous le voyez, le pauvre, mâ-
chonnant son porte-plume, tiraillant les poils
de son visage, tortillant et délorlillant alterna-
tivement ses jambes, en face du papier blanc
destiné à devenir l' « éditorial » du lendemain
malin. +
Que M. Desmoulins ait eu la pensée de con-
sacrer cet éditorial à la question macédonienne
ou aux dangers de l'automobilismo, c'est assez
vraisemblable ; mais il aura ropoussé cette
idojo vertueusement. Allons donc ! c'eut été lâ.
cheté ! Non ! l'actualité lui ordonnait de parler
de l'élection du 4S arrondissement, il en par-
lerait.
Mais que pourrait-il bien en dire? Car de
confesser la défaite en toute franchise el bonne
foi, il no pouvait pas être question, n'est-ce
pas? Alors ?.
M. Desmoulins cherche. Il finit par poser ce
point d'interrogation : « Est ce une victoire ? »
Oui, est-ce une victoire ? Cruelle énigme. En
général, il est admis, en matière d'élection,
que celui des candidats qui est élu à remporté
la victoire. Mais M. Desmoulins fait valoir
deux circonstances atténuantes de la victoire
de M. Deville.
D'abord, dit-il, « M. Maurice Barrés a été
battu à deux cents voix de majorité ». Eh bien
mais, être en majorité de 200 voix là où. l'an-
née dernière, on était en minorité de 450 bul-
letins, ce n'est pas déjà si mal. Et puis, dit le
Desmoulins du Gaulots, « tout lo bloc a donné
en faveur de M. Deville ». Avouez quo M.
Desmoulins ne s'y prendrait pas autrement s'il
entrait dans ses vues do démontrer que le ré-
sultat de l'élection du 4e constitue bien une
grande victoire républicaine. Pas de chance,
M. Desmoulins. -
Mais il continue, suant et peinant sur son
innocent papier blanc. Il trouve coci : que M.
Deville n'eût pas été élu si MM. Poubelle et
Soulès « ne s'étaient désistés en sa faveur ».
Vraiment l c'est à croire que M. de La Palisse
se penche, souffleur complaisant, à l'oreille de
M. Desmoulins. Infortuné M. Desmoulins.
Attendez 1 vous n'êtes point au bout; vous
allez le voir tomber dans ce qu'on pourrait ap-
peler l'incohérence finale. En effet, après avoir
déclaré que le succès de M. Deville n'aurait pas
été obtenu «si les progressistes ne s'étaient pas
désintéressés de l'élection », il écrit : « les pro-
gressistes sont relativement nombreux dans le
quatrième arrondissement. A quelles inspira-
tions ont-ils obéi en volant pour un socialiste-
collectiviste ? Je l'ignore ».
Que diable! M. Desmoulins, il faudrait s'en-
tendre, et il faudrait choisir. Ce double repro-
che que vous adressez aux progressistes, d'une
part, de s'être désintéressés de l'élection, d'autre
part, d'avoir voté pour M. Deville, ne lient pas
debout. S'ils se sont désintéressés, ils n'ont pas
voté ; s'ils ont voté, ils nese sont pas désinté-
ressés. Voyons, voyons, qu'est-ce que vous,
dites ?
ijplas r il gérait cruel dMsterpour avoir une
réponse précise. M. Desmoulins, visiblement, ne
jouit pas de tous ses moyens.
Et c'est assez amusant que le môme coup de
massue asséné par les républicains du IVe sur
la tête du nationalisme ait eu pour premier ré-
sultat do brouiller à co point les idées de l'édi-
torialiste habituel du Gaulois. Le nationalisme
n'est peut-être pas encore tout-a-fait mort, mais
il en est à la période du « débigochage ». —
L. V.-M.
♦
UNE REVANCHE MANQUÉE
L'état d'esprit des amis des congrégations est
très curieux à observer, à l'heure actuelle.Dans
tous les coins du pays où les associations reli-
gieuses ont tenu école, pour se venger de leur
départ prochain, on calomnie les instituteurs
laïques, on cherche à tour nuire, on essaie de
lour jouer de vilains lours.
Il s'est passé notamment la semaine dernière,
à Levallois-Perret, un incident significatif. Un
conseiller municipal bien connu pour ses opi-
nions cléricales proposa de diminuer de 400 fr.
le irailement du directeur de l'école publique
de la rue Rivay.
EL la municipalité allait le suivre dans celle
voie, lorsque M. Aristide Hengy, un fervent
républicain, celui-là, protesta contre cette ma-
nière do faire. Il déclara que le moment n'était
point propice pour jeter le discrédit sur les
instituteurs, au moment même où la Républi-
que avait le plus besoin d'eux.
M. Hongy fut assez adroit et assez éloquent
pour enlever le vote rétablissant le crédit que
l'on voulait supprimer. Comme on le voit il
n'est point de petits moyens que ne négligent
les défenseurs de l'enseignement clérical.
Il faut que dans toutes les communes do
France, les républicains soient sans cesse sur
leurs gardes pour éviter les pièges que sèment
sous leurs pas les amis des congrégations. —
Charles Darcy.
-le
UN DISCOURS RÉPUBLICAIN
Le doyen d'âge du conseil municipal, le vieux
et solide républicain Opportun, a prononcé hier
un discours tel qu'il eu faudrait faire ontendre
souvent à ce qui reste de la majorité nationaliste.
Donnons quelques passages de cette remarquable
allocution :
M. Opportun. — Il est un vœu qui m'est
cher entre tous, et que je ne puis m'eaipêchor
de formuler. C est do voir la population pari-
sienne continuer de revenir en masse aux tra-
ditions de républicanisme et de libre-pensée
qui ont fait sa gloire, c'est d'avoir à célébrer,
toujours plus nombreuses, dos victoires comme.
cellos des récentes élections municipales, comme
celle do l'élection législative d'hier, qui honore
notre vaillante et laborieuse population du
4e arrondissement. (Très bien ! sur plusieurs
bancs.)
Je souhaite enfin que pareils à ce printemps
qui nous a procuré de chaudes et brillantes
journées, les horizons politiques s'éclaircissent
de plus en plus, que la lumière se fasse (Très
bien ! — Exclamations) dans l'esprit de ceux
qui se laissèrent égarer, et que désormais à
l'abri des enlreprises de l'obscurantisme et de
la réaction (Oh ! Oh! — Très bien!), le vieil es-
prit républicain démocratique règne de nouveau
sans partage dans cette maison commune du
peuple de Paris.
Vivo la République t
Vive Paria 1
(Très bienl — Applaudissements!).
LES ÉLECTIONS
Election législative
IJautcs-Pyrènèes (Arrondissement d'Argelès)
Inscrits : 12.060 — Votants : 9.579
MM. Achille Fould, républicain. 4.857 ELU.
Sasserre, nationaliste.- 1.597
Saura, rép.-calholique.,.u 1.399
Maysonnave, rad.-soc 1.105
Election au conseil d'arrondissement
Charente-Inférieure fcanton de Pons)
M. Albert Bardou, républicain, a été élu par
1.792 voix contre M. Calvet, séuateuf. qui en
a obtenu 1.425.
Election au conseil général
Eure (canton de Pont-Audemerj
M. Maxime Legendre, républicain libéral, a
été élu par 1.383 voix, contre M. Montier, ra-
dical, 1.260 voix.
——————————— --
L'UNION DOUANIÈRE EUROPÉENNE
CDB nofr4 correspondant particulierJ
Berlin, 6 avril.
Au prochain congrès international d'agri-
culture qui se réunira lo 13 courant à Rome,
M. Schwerin-Loewitz, président du conseil
d'agriculture de l'empire allemand, proposera
la création d'une sorte d'Union douanière eu-
ropéenne, pour favoriser les produits de l'Eu-
rope menacés par la concurrence américaine.
-
LA QUESTION D'ORIENT
(De notre correspondant particulier1
Vienne, 6 avril.
La question d'Orient se corso, on voit déjà
surgir l'antagonisme de l'Autriche et de la
Russie, l'assassinai du consul russe à Milro-
witza marque la première étape. Une manifes-
tation va avoir lieu en Galicie, aux frontières
russes ; en août dos exercices militaires com-
prenant 16 bataillons de cavalerie sont décidés
au ministère de la guerre. On veut montrer à
la Russie, qui le sait très bien, qu'on a ici des
soldats prêts à marcher. Nous verrons ce qu'il
adviendra de tout cela, mais il est certain que
l'Autriche est bien décidée à ne pas laisser à la
Russio seule le morceau qui se détache de la
Turquie el qu'elle veut au moins arriver à Salo-
nique. Elle y travaille depuis assez longtemps.
- E.-D.-G.
———————— ————————————
DÉTOURNEMENTS
A LA BANQUE NATIONALE BULGARE
(Do noire, correspondant particulier)
Sofia, 6 avril.
L'enquête ouverte par le ministre des finan-
ces sur la gestion do la Banque Nationale de
Bulgarie a amené la découverte de nombreux
détournements. Un des hauts fonctionnaires de
la banque vient d'être révoqué. Ou s'attend à
une prochaine épuration de tout le personnel
de cet établissement financier.
.—————.————— »
Le président Roosevelt est inquiet
(De notre correspondant particulier1
New-York, 6 avril.
Le président Roosevelt a fait prier les comi-
tés qui organisent dans les Etats de l'Ouest des
solennités à l'occasion do son voyage, de limi-
ter le nombre des fêtes et réceptions en son
honneur. Tout en se montrant très touché de
l'hospitalité splendide qu'on lui accorde, il
doit dire que,si l'on continue du train dont on
a commencé, il tombera niûlauè avant de pQg- j
voir terminer e4 tourna. ( J
A LA CHAMBRE ..;.- .Á
L'AFFAIRE DREYFUS
Comme on le prévoyait, la discussion sur
les opérations électorales du 2° arrondisse-
ment de Paris - élection Syveton — a
doanc lieu à un important débat sur l'af-
faire Dreyfus. On se penchait vers M. Mé-
line. On lui disait : « 11 y a donc une affaire
Dreyfus ? M Oui, il y en a une. Mais il est
probable que bientôt il n'y en aura plus :
la justice, momentanément troublée par
les faux et par les mensonges, ayant enfin
accompli son œuvre.
M. Jaurès a pu s'expliquer en détail sur
les raisonnements et sur les faits nouveaux
qu'il apportait. -Le centre et la droite ont
essayé en vain d'interrompre l'éloquent et
savant exposé de M. Jaurès. Ils n'ont plua
assez d'audace pour braver sérieusement la
vérité et la logique.
M. Cavaignac, dès longtemps abattu,
reste tout à fait écrasé après l'exécution que
lui a fait subir notre grand Brisson.
Mais ne nous attardons pas à apprécier
une séance qui est critiquée avec plus d'au-
torité dans une autre partie de ce journal.
Venons tout de suite à un compte rendti
complet et fidèle du débat.
Le rapport de M. Paul Beauregard con-
clut à la validation de M. Syveton.
M. Jaurès prend la parole.
M. Jaurès. — Pendant la période élec-
torale, M. Syvoton s'est emparé de l'affiche de
la Patrie française sur le a ministère de l'étran-
ger ». Il en a accepté la responsabilité.
Devant la commission, il a dit qu'il avait la
droit d'appeler le ministère d'alors « ministère
de l'étranger ».
Sa tùèse et celle de ses amis est celle-ci :
Une tentative a été faite, après le procès de
Rennes, pour faire casser devant la justice de
Rennes l'arrêt du conseil de guerre. Cette ten-
tative n'a échoué que grâce à M. le général de
Galliffet, qui a écrit à ce sujet une lettre à M.
Waldeck-Rousseau.
M. Syveloo s'est attaché à dérnontrer,par les
témoignages de MM. Judet et Jules Lemailre,
l'authenticité de la phrase de celte lettre qu'il
a fait afficher.
Je ne la conteste pas; il faut bien que, de
temps en temps, nos adversaires se servent
contre nous do documents authentiques.
Dans sa déposition, M. JudeL cherche à dé-
montrer que la phrase de M. do Galliffet signi-
fie que tout le parti républicain et le ministère
sont à la remorque de l'étranger.
M. Syveton a pris la responsabilité de ces
conclusions el dit que cette déposition lui don-
nait lo droit do dire que M. Mesureur était le
candidat de l'étranger.
Ces procédés, à l'égard de tout notre parti,
de tout le parti républicain (réclamations au
contre, applaudissements à gauche). Je vais
donner salisfaclioa au contre. Jo vous mels
en dehors des attaques et des injures de M.
Judet.
M. Jaurès apprécie l'attitude des natio-
nalistes qui gardent l'affaire Dreyfus ou-
verte pour eux et la ferment seulement
pour les républicains.
M. Jaurès. — A ceux qui nous accusent
d'être le parti de l'étranger, nous devons dé-
montrer qu'ils ont, moins que d'autres, le droit
de nous appeler le parti do l'étranger. Le parti
de l'étranger, c'est celui qui, pendant quatre
ans, a fait appel, pour servir ses combinai-
sons, par un faux, à la signature d'un souve-
rain étranger.
Pendant quatre années, ils ont affirmé qu'il
existait, à la charge de Dreyfus, une lettre, une
note écrite de la main môme de l'empereue
Guillaume.
Le lexte de la note prétendue de l'empereur
d'Allemagne est en allemand. La traduction
en a été donnée par des garants que nos adver-
saires ne récuseront pas. M. Millevoye en a
parlé dans une réunion en 1898, en disant
qu'elle contenait ces mots : « Cette canaille de
Dreyfus. D
M. Jaurès explique le système des ad-
versaires de la revision.
Tout le système est celui-ci : la lettre da
Guillaume II est une réponse au bordereau
qui n'a pas été écrit sur papier pelure, mais
sur papier fort.
Ce bordereau a été annoté par l'empereur
Guillaume, mais sur la réclamation du gou-
vernement français, on a dû le rendre et on en
a gardé une copie sur pelure, copie qui a été
connue plus tard. (Rumeurs à droite.)
Il est étrange que le chef du service des ren-
seignements se soit laissé aller à produire une
pièce fausse, car cette pièce était fausse.
Les souverains ne prendraient-ils pas les
précautions élémentaires quand des attachés
militaires, MM. Panizzardi el Schwartzkoppen,
ne correspondaient entre eux qu'avec la plus
grande réserve ?
M. Jaurès estime que les chefs de l'état-
major sont coupables de complicité morale
avec Henry et accuse le gouvernement de
M. Méline de négligence peut-être voulue.
Il demande à M. Millevoye, qui lui avait
fait connaître la soi-disant preuve du cri-
me attribué à Dreyfus.
M. Millevoye se refuse à répondre.
M. Jaurès. — Je constate votre refus da
répondre.
Ainsi, vous refusez de renseigner le pays,
après avoir devant lui porté les accusations les
plus graves, alors que vous devez à la France
elle-mêmo, à la France, dont le nom ne doit
cependant pas servir à masquer d'aussi étran-
ges dérobades, la vérité tout entière.
A co moment, bien des consciences se sont
éveillées, bien des yeux se sont ouverts. Au
premier rang de ceux-là, il y a le général, de
Pellieux ; il a écrit au ministre de la guerre
une lettre, qui n'a été montrée ni aux juges
du conseil de guerre, ni à la Cour de cassation
et dont les termes nécessitaient une enquête.
Celte lettre, adressée au ministre de la
guerre, j'en donne 1e texte à la Chambre. La
voici :
Le général de Pellicux à H. le Ministre de la
guerre.
31 août t898.
Dupe de gens sans henneur, ne pouvant plus
espérer compter sur la confiance des subordonnés
sans laquelle le commandement est impossible et,
de mon côté, no pouvant avoir contiance en ceux
de mes chefs qui m'ont fait travailler sur des faux,
je demande ma mise à la retraite.
Intervention de M. Brisson
Ici, Henri Brisson se lève, se prend le
front à deux mains, et avec une émotion
indicible, que partage toute # l'Assem-
blée, le grand orateur radical intervient
dans la discussion.
M. Brisson. — Celle lettre est, dilos-
vous, du 31 août 1898; eh bien! président du
conseil d'alors, je déclare que jo n'en ai jamais
eu connaissance.
M. Cavaignac. — Quelle conclusion,
M. Brisson, enlendez-vous donc tirer de cetla
lettre ? Elle n'a pas été ignorée. Une intefr»
view l'a (ait connaître à celle époque.
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