Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-03-05
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 05 mars 1903 05 mars 1903
Description : 1903/03/05 (N12046). 1903/03/05 (N12046).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7572397h
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
CINO CENTIMB9 le Numéro.
PARIS & DÉPARTEMENTS
L's Numéro, CINQ CENTIMES
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AUX EUREAUX DU JOURNAL
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RÉDACTION 11, rue du Mail
De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du matin
No 12046 — Jeuicli 5 Mars 1903
15 VENTOSE AN 111
ADMINISTISATIOIV ; 14, rue du Mail
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NOS LEADERS
La Réforme de
l'enseignement supérieur
Si nous sommes bien informés, la
sous-commission de l'enseignement su-
périeur qui siège au Sénat, et qui est
composée de MM. Maurice Faure. Thé-
zard et Charles Dupuy, serait résolue à
ouvrir une enquête sur le fonctionne-
ment de nos grandes écoles et de nos
facultés.
Le principe de l'enquête dont il s'agit
avait déjà été adopté par la commission
qui a chargé les trois sénateurs ci-des-
sus énumérés d'approfondir la question.
Disons tout de suite que cette enquête
est nécessaire. Si quelque chose doit
nous étonner, c'est qu'on n'y nit pas
procédé depuis longtemps.
Notre enseignement supérieur passe
pour être affreusement réactionnaire
au point de vue politique, et horrible-
ment rétrograde au point de vue scien-
tifique. Il faut savoir si l'abcès soup-
çonné existe, s'il est grave, s'il est mûr,
et si l'on peut le crever d'un bon coup
de bistouri. Nous réclamons une auscul-
tation sérieuse du malade et un dia-
gnostic sérieux sur son cas.
Une partie de ce qui devrait être
l'élite de la jeunesse française a versé
dans le fossé nationaliste. Il n'est pas
naturel que des garçons de vingt à trente
ans, abondamment renseignés sur l'his-
toire, les lettres et les sciences, s'en ail-
lent croupir parmi les cléricaux et en-
trent de gaieté de cœur dans la domes-
ticité des jésuites.
A ces dégénérés, il faut refaire des
muscles et surtout une conscience. Ceux
des professeurs de nos Facultés qui sont
de taille à entreprendre une pareille
cure le diront — et le montreront ; ceux
qui se sentiront inférieurs à la tâche que
nous leur demandons le diront aussi —
et s'en iront.
On nous a beaucoup parlé de profes-
seurs d'énergie. Pour montrer que nous
avons bien compris, nous exigerons
qu'on nous débarrasse sans retard des
professeurs de lâcheté, d'égoïsme et de
discorde sociale. Je ne demande pas
qu'on fasse payer les bons pour les mau-
vais. Qui se sont morveux se mouche.
Et je suis bien certain de tenir un lan-
gage qui ne déplaira pas aux éducateurs
démocrates : ils sont nombreux, ils sont
la majorité. Mais des chaires très impor-
tantes sont occupées par des messieurs
assidus à propager l'esprit de révolte
contre les institutions populaires. La
République a le droit de se défendre;
elle se défendra.
Elle risque de se heurter à l'inamovi-
bilité dont sont revêtus certains maî-
tres. La commission sénatoriale a-t-elle
entrevu le danger? Il convient de le
croire, car on nous la représente comme
résolue à demander que les étudiants
soient forcés de passer leurs examens
devant les jurys des Universités dont
ils ont suivi les cours.
Qu'est-ce que cela signifie ? Cela si-
gnifie qu'on entend en finir avec la ty-
rannie exercée, même involontaire-
ment, par certains maîtres sur leurs
collègues moins favorisés et sur des
générations entières d'apprentis-ci-
toyens.
Tâchons de nous expliquer d'une fa-
çon plus complète : le nombre des étu-
diants qui viennent de province passer
leurs examens à Paris progresse chaque
année. Ces jeunes gens se sont aperçus
que les licenciés de Paris, les agrégés
de Paris, étaient généralement placés
plus vite et mieux placés, dans les di-
verses administrations — principale-
ment dans les établissements scolaires
— que leurs égaux et leurs émules de
Toulouse, d'Aix ou de Nancy. Il sé-
sulte de ce phénomène que les métho-
des, les théories des professeurs de la
capitale sont seules appréciées dans les
facultés des départements, parce qu'el-
les seules satisfont complètement les
besoins des étudiants.
Ce phénomène provoque une paraly-
sie générale du corps universitaire.
Pour lui rendre force, santé, souplesse,
il suffit de retenir les jeunes gens dans
les facultés de province à l'époque et à
l'occasion de leurs examens.
On ignore généralement à quel point
l'influence excessive d'un vieux pédago-
gue, entiché d'un préjugé traditionnel,
peut être pernicieuse Quelqu'un me cite
le fait suivant : Sainte-Claire-Deville fut
titulaire de la chaire de chimie organi-
que, à la Sorbonne, jusqu'à l'an 1884, à
peu près. Il était l'adversaire de la théo-
rie atomique, dont la valeur était déjà
difficile à contester. Eh bien, tant que
dura le règne de Sainte-Claire-Deville,
la théorie atomique ne fut admise ni
dans l'enseignement public, ni dans les
programmes.
Sans doute, Wurtz professait, à l'é-
poque de Sainte-Claire-Deville, la théo-
rie atomique ; mais son cours était gé-
néralement délaissé: il n'ouvrait point
le chemin des grades, ni des fonctions.
Depuis, la théorie atomique a vaincu
tous les scrupules ; elle est enseignée
partout. Les professeurs formés par
Sainte-Claire-Deville et par ses collè-
gues ont dû refaire leur éducation en ce
qui concerne la chimie.
Les savants affirment que la chimie
organique allemande est en avance de
dix ans sur l'état où se trouve la même
science, telle que nous la possédons en
France. La raison de notre infériorité
serait due à l'emploi tardif de la mé-
thode moderne chez nous. Et n'oubliez
pas que la théorie atomique est une
invention française !
Autre exemple : à l'époque où Lacaze-
Duthiers et Milne-Edwards enseignaient
simultanément la zoologie à la faculté
des sciences, ils avaient établi entre eux
une sorte de « roulement » pour les
examens. Une année, c'était le premier
qui interrogeait les candidats ; l'année
suivante, c'était le second qui « poussait
des colles » aux élèves.
Les professeurs dont les élèves étaient
menacés par les « boules noires » des
terribles savants, disaient à leurs disci-
ples : « Ceux qui passeront leur examen
cette année feront bien de lire les ou-
vrages de M. Lacaze-Duthiers ; ceux
qui passeront leur examen l'année pro-
chaine devront consulter les travaux de
M. Milne-Edwards. »
J'ai voulu éviter de parler des vi-
vants. Mais qui prétendrait que les cho-
ses sont beaucoup changées depuis La-
caze-Duthiers et Milne-Edwards?
J'accorde que les étudiants s'exagè-
rent énormément le danger que l'on
trouve à. combattre les idées d'qp exa-
minateur. A la Faculté de drdft, qui
n'est cependant pas la moins réaction-
naire, je sais qu'un jury composé de M.
Cauwès, épris d'économie politique na-
tionale, de M. A. Deschamps, écono-
miste libéral, et de M. Chénon, qui est
plus clérical que le pape, ne repousse-
rait pas la thèse d'un étudiant socia-
liste, si cette thèse était intéressante.
Malgré la concession que je fais, je
maintiens qu'il y a, dans l'ordre d'i-
dées qui nous occupe, un progrès à ac-
complir. Il faut que les élèves sachent
pertinemment qu'ils ne sont pas con-
damnés aux systèmes, aux opinions de
tel ou tel professeur. Ce n'est pas le
mode du travail qu'on doit apprécier
aux examens : c'est la quantité et sur-
tout la qualité du travail d'un étudiant.
Hugues Destrem.
QUE Vfl-T-OIM FAIRE?
Le ministère actuel s'est
constitué sur la question des
congrégations. Son chef, cha-
que fois ou à peu près chaque
fois qu'il a pris la parole a dé-
claré que son programme était
d'en finir avec les congréga-
tions. Voici neuf mois qu'il est au pouvoir.
Et nous attendons toujours des actes de
vigueur. Il nous paraît impossible, en effet,
de qualifier ainsi de nombreuses fermetu-
res d'écoles qui ont été presque toutes rou-
vertes d'ailleurs.
Mais voici une espèce à propos de la-
quelle M. Combes peut démontrer qu'il a
bien l'intention d'appliquer la loi de 1901.
Il s'agit des sœurs du Bon-Pasteur. On se
rappelle les réquisitions fulminantes de
l'évêque de Nancy contre cette congréga-
tions avant tout industrielle et commer-
çante. On sait en quels termes véhéments
il leur a reproché d'exploiter, au lieu de les
nourrir et de les élever, des milliers de
jeunes filles qui sont forcées dese consacrer
nuit et jour à des travaux de lingerie, de
lingerie abominablement profane surtout,
car l'évêque affirme que le Bon-Pasteur a
la spécialité des dessous des « demi-mon-
daines M.
Justement, cette exploitation contre la-
quelle M. Turinaz, évêque de Nancy, s'est
élevé avec tant d'indignation vient d'être
blâmée aussi vertement par la justice.Une
des malheureuses jeunes filles exploitées
par les sœurs du Bon-Pasteur, Mlle Le-
coanet, a réussi à quitter le couvent où elle
était comme détenue. Elle en est sortie
anémiée, les yeux à peu près perdus à la
suite des longues veillées. Elle a eu le cou-
rage de faire un procès à la congrégation.
Ce procès elle l'a gagné. Et si la cour d'ap-
pel de Nancy n'a pas été très généreuse en
ne lui accordant que 10,000 francs de dom-
mages-intérêts, elle s'est cependant mon-
trée fort sévère contre la congrégation.
Nous avons d'ailleurs publié les considé-
rants de l'arrêt.
Que va faire le gouvernement ?
Personne ne songera à défendre les soeurs
du Bon-Pasteur, congrégation autorisée
possédant plus de 200 établissements et
employant aux travaux que je viens d'indi-
quer des milliers de jeunes filles, sous pré-
texte de les élever et de les entretenir. En
réalité, il y a, derrière cette façade de « cha-
rité chrétienne », un scandale révoltant
qu'il importe de faire cesser au plus vite.
Que va faire le gouvernement? Il est bon
de lui reposer la question.
En vertu de l'article 13 de la loi de 1901,
toute congrégation autorisée peut être dis-
soute par un décret rendu en conseil des
ministres.
La raison de dissoudre la congrégation
des sœurs du Bon-Pasteur, ou tout au
moins de fermer ceux de ses établissements
où des faits lamentables se sont passés, est
plus que suffisante. L'opinion publique
attend cette satisfaction. Les républicains
espèrent qu'on la leur donnera,
Le gouvernement y est-il disposé ? Vrai-
ment, il est extraordinaire que nous soyons
obligés de le lui demander, et que la chose
ne soit pas déjà annoncée, sinon faite. -
Ch. B.
Dans les mines d'or de Roavalle-Guinto
(De notre correspondant particulier)
Sydney, 3 mars.
De nombreux assassinats sont commis dans
la région du fleuve de Coumassi ot de Giri-
Creek où pullulent les chercheurs d'or. Der-
nièrement un Anglais, nommé Brackenbury.et
un Autrichien ont été assommés à coups de
massue par les indigènes qui les ont ensuite
dépouillés. Les chercheurs d'or se sont réunis
en troupe et ont attaqué la tribu lalaquoUe ap-
partiennent les assassins. -' .,'
LE RAPPEL
ARTISTIQUE ET LITTERAIRE
Les livres et les revues. — L' « Art
décoratif ». — Petits Salons et bou-
tiques.- Edmond Rocher.- Les
merveilles de la verrerie et
du meuble. — Les aqua-
relles de la rue Vol-
ney.
Je viens de fouiller Vérité, un des quatre
évangiles de Zola (Fa3quelle édit.). Cette atta-
que posthume du rude jouteur est d'une extra-
ordinaire puissance d'évocation. Le cauchemar
m'a obsédé. Durant des nuits j'ai rêvé de Le
Barazer. J'ai suivi, pas à pas, les haines d'une
foule ameutée par l'obscurantisme, troupeau
docile qui déchire, à dents de rage, le bouc
émissaire. On a dit que c'était une paraphrase
de l'affaire Dreyfus.Eh bien! oui. Mais Zola s'é-
lève mieux encore. Il construit un héros plus
noble qu'un officier, plus intéressant que Drey-
fus. Un petit garçon est assassiné par un frère
de la Doctrine Chrétienne. Cependant la popu-
lation abhorre les Juifs, et l'instituteur com-
munal appartient à cette race exécrée. C'est
lui le coupable. La plus aveuglante lumière
ne parviendra pas à l'innocenter. Ici même,
Lucien Victor-Meunier a commenté ces pages.
Je ne saurais aller plus avant. C'est un monu-
ment qui restera.
A travers les revues et les livres
La vente prodigieuse de Quo Vadis a mis en
fièvre les libraires. Le Pharaon, par Boleslas
Prus (Ch. Carrington, édit.), se réclame des
mêmes origines et je lui trouve la même sa-
veur archaïque. L'élévation au trône de Ram-
sès XIII. son éducation politique, ses aventu-
res, sos amours, sont mêlées à l'analyse docu-
mentée des - mœurs égyptiennes onze siècles
avant Jésus-Christ. Les mystères religieux rem-
plissent des scènes horrifiques où l'amour s'é-
panouit en fleurs de luxure. La hiérarchie des
prêtres, des nobles, des usuriers phéniciens,
des soldats grecs écrase le paysan frappé de
bastonnade et nourri de fèves. Tout cela d'une
savante teinte locale.
Guy de Téramond, que je rencontre avec
plaisir, me rappelle d'anciennes années, où
tous deux, sous le harnais militaire, nous son-
gions à la littérature comme à la Terre promise.
Oh ! les poignantes saisons, si douces quand
on se les rémémore 1 N'était-ce pas la jeunesse
quand même ! Son nouveau roman, La Route
amoureuse (Simonis-Empis, édit.), est d'une
attrayante lecture. C'est le bréviaire de l'inti-
mité conjugale. L'amour, un instant harassé,
se réconforte dans la confiance mutuelle, et
repart, allègrement, vers de nouvoaux jar-
dins.
Chez Calmann-Lévy, Donatienne, par René
Bazin, touchante histoire de misère. Une jeune
Bretonne quitte enfants et mari pour s'enga-
ger nourrice à Paris et leur gagner du pain.
Elle sombre dan9 le gouffre fatal et disparaît
on ne sait où. Mais elle apprendra que ceux
qui la chérissent autant qu'avant sont en proie
aux infirmités et à la faim et combien sa
faute fut grande. Elle vient alors reprendre sa
place au foyer, pardonnée, toujours Dona-
tienne. Ne fut-elle pas aussi une victime de ca
faux luxe, des plaisirs malsains éblouissant
son âme simple? Cette narration est mêlée de
jolis détails. L'exode du paria breton,qui s'en
va le long des routes, avec toute sa nichée, à
la recherche de la mère et de l'épouse, est im-
pressionnant. — A la même librairie, La fin
d'une amante, qu'on put connaître dans le
Journal, par Mad. Camille Bruno.
Cette confession d'un mélancolique amour
plut aux lectrices. En des pages d'une passion
sans bornes, chacune peut revivre un chapitre
d'elle-même, celui où elle rêva de se sacrifier
à son dieu et d'en mourir.
Le genre Jules Verne a bercé nos jeunes ans.
Cependant,le maître se faisant vieux,il fallait le
continuer. André Laurie est un disciple, avisé.
Ses livres suivent d'assez près le fantaisiste
évocateur, dans un parfum nouveau d'enfance
et de féminité. Le Tour du globe d'un bache-
lier (Hetzel, édit.)est le dernier-né de cette ins-
tructive série.
Les Cmtennales parisiennes font défiler les
événements du siècle mort. M. Charles Simond
appela des collaborateurs documentés, et la vie
publique fut disséquée par tableaux. Des cen-
taines do dessins, reproductions de portraits,
estampes, caricatures accompagnent l'habile
commentaire servi par ces messieurs (Pion,
Nourrit, édit.)
Dans le premier numéro de l'Informateur
des gens de lettres, que fonde Mad. Camille
Pert, lire un article d'Henry de Braisue sur
Ludovic Halévy.
Lorsque M. Victor Champier fut nommé di-
recteur.de l'Ecole des Arts Industriels de Rou-
baix. la Revue des Arts décoratifs, que patro-
rait l'Union centrale, interrompit sa publica-
tion, et des esprits chagrins purent croire un
instant à la disparition d'un de nos principaux
organes de vulgarisation. Mais l'Art décoratif,
qui poursuivait une honorable carrière entre
les mains exportes de MM. Gustave Soulier et
G.-M. Jacques, recueillit les traditions de la
Revue en ce qu'elles avaient d'excellent, y ad-
joignit sa propre expérience, et un parfait en-
semble en résulta.
Aussi, la plupart des sommaires de l'Art dé-
coratif seraient-ils à citer. Dans le dernier nu-
méro, un portrait de fillette en couleurs de
Van Rysselberghe et une étude d'Albert Bes-
nard sur Madame Bernard, sculpteur, précédée
de considérations sur le rôle féminin. Mme
Besnard est fille de Vital Dubray, qui eut des
succès sous le Second Empire et dont on éri-
gea une statue de l'impératrice Joséphine sur
l'avenue de ce nom. MM. Gustave Soulier et
Emile Sedeyn nous conduisent à travers les
expositions, dans le mobilier et le décor archi-
tectural. En janvier, avec des reproductions
noir et couleurs de Jules Chéret, texte de Ca-
mille Mauclair, une tête de femme de Lévy-
Dhurmer et « la Toilette féminine comprise.
par les artistes », du prince B. Karageorge-
vitch.
Collections et expositions
Chaque jour le ciel artistique est rayé d'un
fugitif astre nouveau.Les orientalistes tressail-
leront de joie quand on ouvrira le Musée d'En-
nery, suprême collection d'un homme opulent
qui eut quelque goût. Mais quand le public
verra-t-il le Musée d'Ennéry ? Le Musée Gus-
tave Moreau, dont je vous ai fait la description
dam ma chronique du 20 novembre dernier,
reçoit désormais les visiteurs. L'inauguration
a eu lieu sans bruit, ou plutôt il n'y a pas eu
d'inauguration, ce qui est aussi sage.A bon vin
pas d'enseigne.
Chez Silberberg, rue Taitbout, intéressant
assemblage de toiles et dessins de MM. Besson,
Jules Adler, Jean Pierre, TancrèdeSynave, une
Sérénade sur le grand canal à Venise, de M.
Morisset; des pastels et des aquarelles de Mlle
Dufau, deux bronzes de M. Roger Bloche etdes
objets d'art de M. LaportQ-BJairsy, J'ai fait cette
visite sans déplaisir.
L'Automobile-Club de France, la puissante
organisation de la place de la Concorde, à la-
quelle on doit l'essor d'une industrie floris-
sante, a jugé utile de rivaliser avec les rues
Boissy-d'Anglas et Volney pour la peinture et
4a sculpture, sans songôr que l'une s'appelait
Union artistique et l'autre Cercle artistique.
Chaz ellail n'y a qu'AutomobUe.,ot cela devrait
sufûco à sa gloire. EUa uotuf a tUQuUé dos ve-
dettes connues, avec des fruits de circonstance.
Son triomphe est sur les routes, dans l'cnvole-
ment jj^s décors, dans la variété des sites, dans
le parcours de ta nature, colle qui n'est pas
peinte.
Les Dix, de la Petite Galerie Drouot, cèdent
momentanément le local à leur camarade Mau-
rice Moisset, dont j'avais observé, dans une
précédente exposition, les sites parisiens nets
et bien éclairés. Ses vingt toiles nous condui-
sent avec un égal bonheur de la foire aux fer-
railles aux landes bretonnes. - Un peintre nor-
végien, Halfdan Strom, à Kristiana, essaie à
son tour la conquête de Paris. Depuis que « la
lumière nous vient du Nord » et que Anders
Zorn a franchi le Luxembourg, ces Scandinaves
ne doutent de rien. Celui-là a raison : ses étu-
des, ses intérieurs de son pays, ses paysages
lointains, ont de la saveur, de la sauvagerie,
et lui ont valu mention honorable, médaille
d'or, à nos Universelles do 1889 et 1900, ruban
rouge, et de passer, lui aussi, les portes du
musée de la rive gauche avec la Jeune Mère. Il
fut, d'ailleurs, élève de Holl,
Galerie Georges Petit, les Aquarellistes, avec
leurs noms habituels. Vous en connaissez lss
tendances et les façons un peu poncives. Les
enfants de M. Geoffroy sont pourtant des meil-
leurs.
Du 7 mars au 5 avril, à l'Hôtel de Poilly,
rue du Colisée, 3e Salon de la Société artisti-
que des Chemins de fer français, président M.
Logan. La Manufacture de Sèvres aura pour
Pâques un magasin de vente au détail, au coin
du boulevard des Italiens et de la rue Favart.
On y cédera aussi de* médailles et des gravu-
res de la Chalcographie du Louvre. — Prochai-
nement, fête à la mémoire de Gavarni, et plus
lard étalage des œuvres du fameux Chicardier.
— Il parait que le legs Thomy-Thiery est en
ftéciyi/l Il fait si chaud sous les combles du Lou-
vre que le bitume coule et envahit tout. Jadis
le Halage, do Decamps, fut perdu dans cette
fournaise.
Un illustrateur féminin: Edmond
Rocher
Chez Belin, quai Voltaire, les Peintres Enlu-
mineurs Miniaturistes, avec des essais valeu-
reux. De M. Atalaya, connu par ses illustra-
tions de Don Quichotte, un Napoléon, enlumi-
nure à l'huile, des aquarelles combinées de M.
P. Barthélémy, Près Châteauroux, Dans les
Alpes et Bois de là Bernarde, une miniature de
Mme Brancour-Lenique, un portrait masculin
savamment traité de Mlle Fauconnier, des mé-
daillons ivoire de Mlle Pègre. Ici nos compa-
gnes triomphent,dans ces impressions menues
dont les finesses sont l'attrait. Tout ce qu'ap-
porle Mlle George-Grimblot est d'une char-
mante facture, et j'admire cette lôte d'étude
qui ressemble à une peinture.
Cependant, voici M. Edmond Rocher, vice-
président du groupement, quasi-féminin par
son inlassable choix de femmes et de fleurs.
Je souhaite qu'elles le lui rendent. Son cadre
de dessins à la plume, extrait d'une suite sur
la fleur décorative, indique une imagination
experte. Jamais elle ne quitte les sentiers de
son jardin d'élection. L'Anthémis, de nudité
perverse, continue le parterre luxurieux de ses
Fleurs passionnées. Lascives, elles mêlent leur
chair aux pétales et aux parfums, offrant leur
calice aux pistils enamourés et aux caresses des
vents.
Une gouache adornée d'émaux : c'est la cou-
verture des Edens, recueil de vers où s'épa-
nouit l'ardeur des vingt ans. Des paons, aux
queues ocellées, s'étalent sous l'arbre du bien
et du mal. Et on devine que les fruits espérés
sont des baisers.
L'Ecole de Nancy
L' « Art décoratif lorrain », effort sans pré-
cédent pour la rénovation du mobilier contem-
porain, convie le public durant tout le mois de
mars au Pavillon de Marsan. Que les passants
entrent, qu'ils regardent et comprennent. Ils y
verront des conceptions intéressantes, des mer-
veilles de technique et de composition. L'un
des salons contient une garniture de chambre
à coucher, aux lignes habiles, au décor mar-
queté d'ombellifères. M. Emile Gallé, maître
verrier et savant ébéniste, qui a voué une ado-
ration manifeste à cette classo do végétaux, en
tire des effets surprenants.
Dans cette même pièce, un mobilier de salle
à manger ornementé de lierre, un buffet en
forme de chalet, dont les panneaux nous trans-
portent au milieu des Alpes. Le suivant mon-
tre un cabinet de travail paré de nénuphars
dorés, do M. Majorel. Le troisième un siège,
exécuté pour un marchand de houille nan-
céen, par M. Valin. Sur un relief sculpté en
plein bois, un paria de la mine manie le pic.
Et d'autres conceptions de M. Gruber.
Mais ce qu'il faut admirer dans cetle mani-
festation de l'Ecole de Nancy, parce qu'on y
reconnaît ce qui fut jusqu'alors sa gloire, c'est
l'adoration du cristal, de la céramique, des
gemmos, épanouie en des vitrines cantrales.
MM. Emile Gallé, Daum, Majore!, Bussière,
ont assemblé des verreries inestimables, des
flammés, des émaux, des vase3 où se jouent
de fluides métaux. Et ce sont tous objots usuels
que chacun peut utiliser, des ampoules électri-
ques, des porte-bouquets, des soucoupes, des
bouteilles et des carafes. Les décors en sont
des plus savants et des plus variés. La lumière
s'ébat mieux qu'en un prisme, sur ces fleurs
d'un parterre fabuleux.
Rue Volney
Le deuxième vernissage du Cercle (Aqua-
relles et Paslols" , a eu lieu lundi. L'ensemble
décèle quelques offorts agréables. Cependant les
reproches que j'adressais aux pointures la mois
dernier pourraient encore s'appliquer ici. Le
spectateur se sent trop dans un cercle fermé,
accessible aux seuls adhérents et aux portraits
de leurs amis,quoiqu'une tendance à plus de di-
versité puisse pallier un peu cotte sorte d'ex-
clusivisme.
Notons, au hasard de la promenade, des
effets de grisailles et de noirs, eaux-fortes en
couleurs, Lever de Lune à Douarnenes et
Dans le parc de Fontainebleau, de Bellanger-
Adhémar. Un coin de berge de Seine, d'Abel
Truchot. Là, une rivière glisse entre des berges
mélancoliques, vers la chule d'un jour d'au-
tomne. Cette aquarelle, de M. Gaston Knight,
est à regarder. Du même, ailleurs, Un Village
sous la Neige, au bord de l'eau violette de froid.
Frédéric Régamey apporte deux tableaux
d'une exactitude telle qu'on .dirait des photo-
graphies agrandies et coloriéas, On y recon-
naît facilement les têtes. C'est un assaut d'ar-
mes entre Kircholfer et Conti, champiou d'Ita-
lie, et un défilé de troupes devant les Inva-
lides, Transfert du gouvernement militaire, A
côté, une balustrade de cathédrale, Sur les
toits de Notre-Dame,par Henri Magne.
Un bon coin avec trois portraits, Madame
B., jolie blonde sur fond vert, aquarelle aux
teintes de fusain et de pastel, de Gustavo
Brisgand, Mademoiselle L. P., noire et blan-
che, en robe et chapeau crêpe, par Rodo!phe
Pignet ; les épaules et !a tête sont délicieuso-
ment teintées. Et une étude, lôte féminine en-
tourée de stylisations florales, de Victor Bru-
gairolles.
Plus loin, un paysage lacustre, où un soleil
couchant rougeoie dans la brume en Hollande,
de Daniel Kœchlin, un visage obscur et pensif
de Guiraud de Scevola, des marais, pastels
mélancoliques, d'Iwill; des. enfants jouant
dans un champ de blé couplé, sous une ardente
lumière, d'Achille Cesbron, et un portrait de
Yvoone D., par Léandre.
, LÉON RJOTSR^
LA JOURNEE
PARLEMENTAIRE
A LA CHAMBRE
La loi de finances
M. Léon Bourgeois préside.
On en est resté à l'art.42 Cde la loi de finances.
M. Beauquier demande à la Chambre de dis-
joindre cet article qui concerne les Cours
d'appel. La suppression de sièges qu'on veut
opérer ne se justifie pas, à son avis. Oo ne
peut pas réorganiser l'administration de la jus-
tice par voie budgétaire.
M.Larquier a déposé une demande analogue.
Il réclame le renvoi à la commission de la ré-
forme judiciaite.
M. Clémentel. — Je m'étonne que le débat
actuel ait pu s'instituer, après les manifestations
qui se sont produites dans le sens de la fort mo-
deste mesure qui est proposée.
Il s'agit, en effet, d'une modification très res-
treinte du nombre des conseillers dans certaines
cours d'appel. C'est de Paris que vient la surcharge,
et il faut tenir compte des doléances légitimes des
contribuables.
La création de postes & Paris est indispensable.
Les créations se feront au fur et & mesure des
extinctions correspondantes dans les ressorts de
Paris.
M. du Perier de Larsan. — Le meilleur
moyen d'assurer le bon fonctionnement de la jus-
tice à Paris, ce serait de restreindre le champ de
juridiction de cette cour, car le ressort de Paris est
trop étendu.
M. Vallé, garde des sceaux. — La réforme
très modeste proposée a été étudiée sur tous les
points.
On ne fera croire & personne que des villes com-
me Agen, Besancon, Dijon, Grenoble et Poitiers
perdront de leur prestige, parce que leurs cours
d'appel auront 18 magistrats au lieu do 22. Cette
suppression a été prévue au budget des dépenses.
Par 425 voix contre 96, la disjonction est
repoussée.
Les art. 42 C. et 43 sont adoptés ainsi que
l'art. 43 A qui est relatif aux médailles d'hon-
neur.
On adopte sans grande discussion les art. 44
à 48.
Souvenirs de 70-71
Sur l'art. 48 bis MM. Couyba et Schneider
réclament la création d'une médaille commé-
morative du siège de Paris.
La commission repousse cet amendement.
M. Brunet insiste pour l'adoption.
M. Baudet réclame une médaille pour les dé-
fenseurs de Châteaudun.
L'amendement de M. Schneider n'est pas
adopté.
Les instituteurs
L'art. 51 modifié est, explique M. Chaumié,
la consécration d'une disposition volée par la
Chambre dao:) le budget.
M. Chaumié. — Avec la disposition actuelle-
ment présentée, le traitement des stagiaires est
fixé à mille francs et celui des instituteurs et ins-
titutrices de deuxième classe à 1,100 francs.
Le jour est tout à fait prochain où le complé-
ment de la solution désirée par tous arrivera.
M. Bepmale, rapporteur du budget de l'ins-
truction publique. - La commission s'est trouvée
eu présence du projet du gouvernement et de pro-
positions de diverse nature. Elle n'a pu fondre ces
dernières dans un texte unique qui aurait été sou-
mis à la Chambre.
Toutefois, ou est tombé d'accord sur un texte,
encore incomplet, d'ailleurs, que le ministre & pré-
senté et quo la commission a accepté.
La commission demande, d'autre part, au mi-
nistre de régler ses promotions prochaines de façon
à assurer les bénéfices des dispositions présentées
dès cette année.
M. Carnaud se rallie au texte présenté.
M. Chaumet retire un amendement qu'il
avait déposé.
Les art. 51 et 52 sont adoptés.
M. Viollette a déposé un article additionnel
que le président déclare en contradiction avec
les dispositions du règlement. Il demande une
meilleure répartition du traitement des agents
des postes pour 1904.
M. Rouvier. — Le gouvernement n'a pas
qualité pour interpréter le règlement de la Cham-
bre; mais il lui parait que l'article 51 bis écarte la
présentation dans le budget de l'amendement de
M. Viollette.
A la majorité de 343 voix contre 188, la Cham-
bre décide que l'amendement de M. Viollette
n'est pas recevable.
On adopte les art. 53 à 55.
M. Brunet demande la disjonction de l'article
55 A. La commission et le gouvernement ne s'y
opposent pas, et l'article est renvoyé à la com-
mission.
Les art. 55 B, C, D et E sont adoptés.
M. Mulac demanda le maintien de la prime
pour la destruction des loups, telle qu'elle était
fixée par la loi du 3 août 1882, c'est-à-dire la
suppression de l'article.
L'art. 56 est adopté.
La retraite des mineurs
M. Laurens-Castetet soutient uo amende-
ment tendant à disjoindre les articles 57 A à 57
M, relatifs à la majoration des pensions des
ouvriers ou employés des mines.
L'orateur dit qu'il y a d'autres ouvriers aussi
intéressants que les mineurs.
M. Drake développe des idées analogues.
M. Janet combat la disjonction.
M. Janet. — Actuellement, sur 21.000 anciens
ouvriers mineurs, il y en a 12.000 qui n'ont pas de
retraite, on qui n'ont qu'une pension inférieure à
50 francs. Voilà ceux qu'on représente comme des
privilégiés.
M. Jumel, rapporteur de la commission du
budget, développe des aperçus semblables. Il
proteste contre les sentiments de jalousie qu'on
prête à la toute des ouvriers à l'égard des mi-
neurs.
M. Paul Beauregard revient appuyer la pro-
position de disjonction.
M. Maruéjouls, ministre des travaux publics,
estime que les dispositions présentées ont un
caractère do très grande urgence, ce qui jus-
tifie leur incorporalion dans la loi de fiuances.
Après quelques observations de M. de Ra-
mel, la disjonction est ropoussée par 349 voix
contre 187.
H. D.
-
AU SÉNAT
Les victimes de la Martinique
Le Sénat discute au début de la séance le pro-
jet de loi relatif aux pensions des veuves et des
orphelins des fonctionnaires morts dans la ca-
tastrophe de la Guadeloupe..
M. Knight demanda le renvoi à la commis-
lion.
M. Doumergue défend le projet, qui ne porte
augmentation de crédits que pour 24,000 francs.
MM. Godin, Antonin Dubost, Knight par-
lent successivement, et le renvoi à la commis-
sion est repollssé.
Les propositions de la commission sont adop-
tées après urgence déclarée.
Les conseils de prud'hommes
On examine ensuite la proposition concer-
nant les conseils de prud'hommes.
i M. Sav.iry, rapporteur, dit qu'il faut assurer
l'impartialité des juges et augmenter leur au-
torité. ,"
M: Strauss réclame pour les employés de
commerce la juridiction des prud'hommes.
M. Tromlfot appuio l'amendement- Slrnll!=l::.
Aur&t le digues du miuiitrc du commerce,
la discussion est renvoyée à une prochaina
séance), - H. D.
——————————— ——————————.
QUAND LA LOI LES DÉSOBLIGE
Demandez la façon de traiter les lois comme
elles le méritent, cinq centimes. Quand une
loi déplaît à l'évêque de Périgueux, voici-comme
il la traite : « le sombre et cyniquo travail des
forbans de la finance ot des sectaires de la lit-
térature et do la fausse sciencc: qui ont rêvé de
mettre notre société en coupe réglée, au mieux
des intérêts de leurs ambitions et de leur
caisse ». Voilà en quels termes le fonction-
naire placé par l'Etat à la lôto d'un diocèse et
salarié par lui, s'exprime sur le compte des
dépulés, des sénateurs et du Président de la
République qui, soit par la discussion, soit par
le vote, soit par la signal//¡'o'} do promulgation,
ont travaillé à l'édification d'une loi de l'Etat.
Vous avez déjà deviné qu'il s'agit de la loi
sur les associations que le même évêque, dans
le même factum, traite encore de « déshon-
neur public et national 0. Le Temps veut bien
reconnaître que de telles paroles dans la bou-
che d'un prélat font mieux les affaires de l'an-
ticléricalisme que vingt discours radicaux.; le
Temps a parfaiiemont. raison ; pourquoi occu-
perions-cous notre temps à dire des prêtres et
des dévots ce que nous pensons, puisque ceux-
ci s'entendent si bien à se montrer à tous tels
qu'ils sont : intolérants et dominateurs quand
ils sont les maîtres; haineux et collectionneurs
de basses invectives quand la loi réclame
d'eux, comme de tous, la déférence qui lui est
due ?
» —-
CHRÊME ET CARNAVAL
Ça va mieux, la dévotion; la chronique
mondaine du journal le mieux informé de ce
qui se passe dans le véritable grand monde,
j'ai nommé le Joc!ce!/, nous annonce, en effet,
que les belles madames ont renoncé a l'habi-
tude fâcheuse qu'elles avaient contractée de
donner des bals jusqu'à la Mi-Carême, en
sorte qu'il n'y avait plus do carême, à peu
près, pour les belles madames ; elles usaient
d'un demi-carême tout au plus. Maintenant les
voilà parties à ne plus transiger avec les re-
commandations do l'Eglise, eb elles ne s'arrê-
tent plus, « c'est il pline si l'on admet jusque-
là — jusqu'à la Mi-Carême — des matinées, et
encore pour la petite jeunesse ». Et vous
croyez que c'est fini ? Détrompez-vous : a De
même, le maigre n'a jamais eu de plus nom-
breux fidèles ».
lTous me demandez pourquoi ce retour aux
pratiques recommandées par l'église ? intèrro.
gez le Jockey, il vous répondra : « Ce retour
plus empressé aux loi? de l'église doit être,
sans aucun doute, attribué aux persécutions
officielles. »
D'où il semblerait suivre que lorsque les
prescriptions du Carêmo n'avaient pour se re-
commander que les objurgations des prêtres,
on se dérobait à ellos. avec élégance; mais que
l'on fait maigre simplement pour se montrer
désagréable à la République.Nous savions déjà
de quelle qualité est, au fond, la dévotion de la
riche clientèle clôricale: elle est faite d'hosti-
lité contre les idées de la Révolution.
Pourtant, que les belles madame." no se g.
nent pas pour continuer : qu'elles renoncent à
danser en Carême, cela ne nous incommode on
rien, et même qu'elles fassent maigre, cela fera
monter le cours du poisson que nos pêcheurs
ont tant de peine à aller chercher par les mers
démontées de ces iours-ci.
Nous, cela nous est donc égal, ces formes
enfantines d'opposition, mais quand ce sont
les cléricaux qui gouvernent, la question
change d'aspect. Oyez plulôl :
Il y a. pas loin d'ici.en Btllgiquc,un curé qui
s'était séparé de son clerc; e-t la population de
la commune avait pris parti pour le clerc; et le
Carnaval était imminent; le curé entrevoyait
avec ennui dos jours de fête cù ses paroissiens
viendraient peut-être, masqués, sous les
fenêtres de la cure, acclamer le clerc dé-
gommé.
Ce fut simple : le curé obtint du bourgmestre
un arrêté prohibant le port du masque; la po-
pulation ne tint pas compte de l'arrêté: les
gendarmes circulèrent, arrachant les masques
des gens en train de s'amuser; l'un des gen-
darmes puussa le respect de l'arrêté du bourg-
mestre jusqu'à luer, dans un café, un consom-
mateur d'un coup do carabine, et ce gendarme
fut assommé par la fonle.
Quiétude des pays où le prêtre est en force,
et règne.
LES JUGES DE PAIX
M. Jean Cruppi vient de déposer sur le bu-
reau de la Chambre son rapport sur la propo-
sition de loi déjà adoptée par le Sénat et rela-
tive à l'extension de la compétence des juges
de paix.
Aux termes de co projet, la compétence ci-
vile des tribunaux do simple police est élevée
à 300 francs en dernier ressort et à 600 francs
en premier ressort. Nous avons déjà.ici même,
à plusieurs reprises, demandé que cette ré-
forme ne reste pas à jamais oubliée dans les
commissions de réforme judiciaire.
Les juges de paix ont fait leurs preuves. Ils
constituent la juridiction la plus rapide, la
moins coûteuse et la plus simple. Devant eux,
la procédure n'est point un maquis, et la con-
ciliation est facile. En 1891 sur 336.556 affaires
soumises 64,304, c'est à dire 19 0[9 ont été ar-
rangées à l'audience.
Il y a donc là au premier chef une réforme
démocratique. Toutefois, qu'il nous soit per-
mis de formuler un regret. Le projet actuelle-
ment soumis à la détibéraliou de la Chambre
est trop timide. On pourrait encore augmenter
de beaucoup le chiffre qui délimite la compé-
tence des juges do paix. Nous comptons bien
que par voie d'amendement les députés se-
ront saisis d'une proposition analogue.
On pourrait également étendre la compé-
tence criminelle des tribunaux de simple po-
lice en leur attribuant la connaissance des in-
fractions dénommées délits-coiUiNuenlions-qui,
par une étrange anomalie, resie encore aujour-
d'hui attribuée aux tribunaux de police correc-
tionnelle. -A.
LETTRE A M. WALDECK-ROUSSEAU
M. Luzzatti répond en ces termes à M. Wal..
deck-Rousseau qui lui avait adressé, sur la
coopération italienne, une lettre que les jour-
naux de la péniusufeavaient reproduite:
Monsieur le sénateur.
Sous les auspices de notre commun ami, M. Bar
rère, le bon génie diplomatique do nos deux pay-
latins, je reçois votre lettre qui est un grand hon-*
neur pour la coopération italienne. Votre approba-
tion a une valeur inestimable, car l'homme d'Etat
et l'homme de science se complètent en vous et
s'entr'aident eu uréant un type d'élite, de sincéritâ
et de force morale.
Vous ôtes un guide et une lumière pour nos dé-
mocraties qui recherchont les solutions de l'avenir
dans l'étude des problèmes sociaux.
Agréez, monsieur le sénateur, avec les remercie-,
monts des coopérateurs italiens, L'expression de
mes hommages les plus respectueux.
LUZZATTI.
-——————————————— ————————————————-.
LES ANGLAIS EN AM8IE
Adeu, 3 mars.,..
Les Anglais ont occupé dans l'arrière-pays
une position qui domine te district de OeLuall.
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L's Numéro, CINQ CENTIMES
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NOS LEADERS
La Réforme de
l'enseignement supérieur
Si nous sommes bien informés, la
sous-commission de l'enseignement su-
périeur qui siège au Sénat, et qui est
composée de MM. Maurice Faure. Thé-
zard et Charles Dupuy, serait résolue à
ouvrir une enquête sur le fonctionne-
ment de nos grandes écoles et de nos
facultés.
Le principe de l'enquête dont il s'agit
avait déjà été adopté par la commission
qui a chargé les trois sénateurs ci-des-
sus énumérés d'approfondir la question.
Disons tout de suite que cette enquête
est nécessaire. Si quelque chose doit
nous étonner, c'est qu'on n'y nit pas
procédé depuis longtemps.
Notre enseignement supérieur passe
pour être affreusement réactionnaire
au point de vue politique, et horrible-
ment rétrograde au point de vue scien-
tifique. Il faut savoir si l'abcès soup-
çonné existe, s'il est grave, s'il est mûr,
et si l'on peut le crever d'un bon coup
de bistouri. Nous réclamons une auscul-
tation sérieuse du malade et un dia-
gnostic sérieux sur son cas.
Une partie de ce qui devrait être
l'élite de la jeunesse française a versé
dans le fossé nationaliste. Il n'est pas
naturel que des garçons de vingt à trente
ans, abondamment renseignés sur l'his-
toire, les lettres et les sciences, s'en ail-
lent croupir parmi les cléricaux et en-
trent de gaieté de cœur dans la domes-
ticité des jésuites.
A ces dégénérés, il faut refaire des
muscles et surtout une conscience. Ceux
des professeurs de nos Facultés qui sont
de taille à entreprendre une pareille
cure le diront — et le montreront ; ceux
qui se sentiront inférieurs à la tâche que
nous leur demandons le diront aussi —
et s'en iront.
On nous a beaucoup parlé de profes-
seurs d'énergie. Pour montrer que nous
avons bien compris, nous exigerons
qu'on nous débarrasse sans retard des
professeurs de lâcheté, d'égoïsme et de
discorde sociale. Je ne demande pas
qu'on fasse payer les bons pour les mau-
vais. Qui se sont morveux se mouche.
Et je suis bien certain de tenir un lan-
gage qui ne déplaira pas aux éducateurs
démocrates : ils sont nombreux, ils sont
la majorité. Mais des chaires très impor-
tantes sont occupées par des messieurs
assidus à propager l'esprit de révolte
contre les institutions populaires. La
République a le droit de se défendre;
elle se défendra.
Elle risque de se heurter à l'inamovi-
bilité dont sont revêtus certains maî-
tres. La commission sénatoriale a-t-elle
entrevu le danger? Il convient de le
croire, car on nous la représente comme
résolue à demander que les étudiants
soient forcés de passer leurs examens
devant les jurys des Universités dont
ils ont suivi les cours.
Qu'est-ce que cela signifie ? Cela si-
gnifie qu'on entend en finir avec la ty-
rannie exercée, même involontaire-
ment, par certains maîtres sur leurs
collègues moins favorisés et sur des
générations entières d'apprentis-ci-
toyens.
Tâchons de nous expliquer d'une fa-
çon plus complète : le nombre des étu-
diants qui viennent de province passer
leurs examens à Paris progresse chaque
année. Ces jeunes gens se sont aperçus
que les licenciés de Paris, les agrégés
de Paris, étaient généralement placés
plus vite et mieux placés, dans les di-
verses administrations — principale-
ment dans les établissements scolaires
— que leurs égaux et leurs émules de
Toulouse, d'Aix ou de Nancy. Il sé-
sulte de ce phénomène que les métho-
des, les théories des professeurs de la
capitale sont seules appréciées dans les
facultés des départements, parce qu'el-
les seules satisfont complètement les
besoins des étudiants.
Ce phénomène provoque une paraly-
sie générale du corps universitaire.
Pour lui rendre force, santé, souplesse,
il suffit de retenir les jeunes gens dans
les facultés de province à l'époque et à
l'occasion de leurs examens.
On ignore généralement à quel point
l'influence excessive d'un vieux pédago-
gue, entiché d'un préjugé traditionnel,
peut être pernicieuse Quelqu'un me cite
le fait suivant : Sainte-Claire-Deville fut
titulaire de la chaire de chimie organi-
que, à la Sorbonne, jusqu'à l'an 1884, à
peu près. Il était l'adversaire de la théo-
rie atomique, dont la valeur était déjà
difficile à contester. Eh bien, tant que
dura le règne de Sainte-Claire-Deville,
la théorie atomique ne fut admise ni
dans l'enseignement public, ni dans les
programmes.
Sans doute, Wurtz professait, à l'é-
poque de Sainte-Claire-Deville, la théo-
rie atomique ; mais son cours était gé-
néralement délaissé: il n'ouvrait point
le chemin des grades, ni des fonctions.
Depuis, la théorie atomique a vaincu
tous les scrupules ; elle est enseignée
partout. Les professeurs formés par
Sainte-Claire-Deville et par ses collè-
gues ont dû refaire leur éducation en ce
qui concerne la chimie.
Les savants affirment que la chimie
organique allemande est en avance de
dix ans sur l'état où se trouve la même
science, telle que nous la possédons en
France. La raison de notre infériorité
serait due à l'emploi tardif de la mé-
thode moderne chez nous. Et n'oubliez
pas que la théorie atomique est une
invention française !
Autre exemple : à l'époque où Lacaze-
Duthiers et Milne-Edwards enseignaient
simultanément la zoologie à la faculté
des sciences, ils avaient établi entre eux
une sorte de « roulement » pour les
examens. Une année, c'était le premier
qui interrogeait les candidats ; l'année
suivante, c'était le second qui « poussait
des colles » aux élèves.
Les professeurs dont les élèves étaient
menacés par les « boules noires » des
terribles savants, disaient à leurs disci-
ples : « Ceux qui passeront leur examen
cette année feront bien de lire les ou-
vrages de M. Lacaze-Duthiers ; ceux
qui passeront leur examen l'année pro-
chaine devront consulter les travaux de
M. Milne-Edwards. »
J'ai voulu éviter de parler des vi-
vants. Mais qui prétendrait que les cho-
ses sont beaucoup changées depuis La-
caze-Duthiers et Milne-Edwards?
J'accorde que les étudiants s'exagè-
rent énormément le danger que l'on
trouve à. combattre les idées d'qp exa-
minateur. A la Faculté de drdft, qui
n'est cependant pas la moins réaction-
naire, je sais qu'un jury composé de M.
Cauwès, épris d'économie politique na-
tionale, de M. A. Deschamps, écono-
miste libéral, et de M. Chénon, qui est
plus clérical que le pape, ne repousse-
rait pas la thèse d'un étudiant socia-
liste, si cette thèse était intéressante.
Malgré la concession que je fais, je
maintiens qu'il y a, dans l'ordre d'i-
dées qui nous occupe, un progrès à ac-
complir. Il faut que les élèves sachent
pertinemment qu'ils ne sont pas con-
damnés aux systèmes, aux opinions de
tel ou tel professeur. Ce n'est pas le
mode du travail qu'on doit apprécier
aux examens : c'est la quantité et sur-
tout la qualité du travail d'un étudiant.
Hugues Destrem.
QUE Vfl-T-OIM FAIRE?
Le ministère actuel s'est
constitué sur la question des
congrégations. Son chef, cha-
que fois ou à peu près chaque
fois qu'il a pris la parole a dé-
claré que son programme était
d'en finir avec les congréga-
tions. Voici neuf mois qu'il est au pouvoir.
Et nous attendons toujours des actes de
vigueur. Il nous paraît impossible, en effet,
de qualifier ainsi de nombreuses fermetu-
res d'écoles qui ont été presque toutes rou-
vertes d'ailleurs.
Mais voici une espèce à propos de la-
quelle M. Combes peut démontrer qu'il a
bien l'intention d'appliquer la loi de 1901.
Il s'agit des sœurs du Bon-Pasteur. On se
rappelle les réquisitions fulminantes de
l'évêque de Nancy contre cette congréga-
tions avant tout industrielle et commer-
çante. On sait en quels termes véhéments
il leur a reproché d'exploiter, au lieu de les
nourrir et de les élever, des milliers de
jeunes filles qui sont forcées dese consacrer
nuit et jour à des travaux de lingerie, de
lingerie abominablement profane surtout,
car l'évêque affirme que le Bon-Pasteur a
la spécialité des dessous des « demi-mon-
daines M.
Justement, cette exploitation contre la-
quelle M. Turinaz, évêque de Nancy, s'est
élevé avec tant d'indignation vient d'être
blâmée aussi vertement par la justice.Une
des malheureuses jeunes filles exploitées
par les sœurs du Bon-Pasteur, Mlle Le-
coanet, a réussi à quitter le couvent où elle
était comme détenue. Elle en est sortie
anémiée, les yeux à peu près perdus à la
suite des longues veillées. Elle a eu le cou-
rage de faire un procès à la congrégation.
Ce procès elle l'a gagné. Et si la cour d'ap-
pel de Nancy n'a pas été très généreuse en
ne lui accordant que 10,000 francs de dom-
mages-intérêts, elle s'est cependant mon-
trée fort sévère contre la congrégation.
Nous avons d'ailleurs publié les considé-
rants de l'arrêt.
Que va faire le gouvernement ?
Personne ne songera à défendre les soeurs
du Bon-Pasteur, congrégation autorisée
possédant plus de 200 établissements et
employant aux travaux que je viens d'indi-
quer des milliers de jeunes filles, sous pré-
texte de les élever et de les entretenir. En
réalité, il y a, derrière cette façade de « cha-
rité chrétienne », un scandale révoltant
qu'il importe de faire cesser au plus vite.
Que va faire le gouvernement? Il est bon
de lui reposer la question.
En vertu de l'article 13 de la loi de 1901,
toute congrégation autorisée peut être dis-
soute par un décret rendu en conseil des
ministres.
La raison de dissoudre la congrégation
des sœurs du Bon-Pasteur, ou tout au
moins de fermer ceux de ses établissements
où des faits lamentables se sont passés, est
plus que suffisante. L'opinion publique
attend cette satisfaction. Les républicains
espèrent qu'on la leur donnera,
Le gouvernement y est-il disposé ? Vrai-
ment, il est extraordinaire que nous soyons
obligés de le lui demander, et que la chose
ne soit pas déjà annoncée, sinon faite. -
Ch. B.
Dans les mines d'or de Roavalle-Guinto
(De notre correspondant particulier)
Sydney, 3 mars.
De nombreux assassinats sont commis dans
la région du fleuve de Coumassi ot de Giri-
Creek où pullulent les chercheurs d'or. Der-
nièrement un Anglais, nommé Brackenbury.et
un Autrichien ont été assommés à coups de
massue par les indigènes qui les ont ensuite
dépouillés. Les chercheurs d'or se sont réunis
en troupe et ont attaqué la tribu lalaquoUe ap-
partiennent les assassins. -' .,'
LE RAPPEL
ARTISTIQUE ET LITTERAIRE
Les livres et les revues. — L' « Art
décoratif ». — Petits Salons et bou-
tiques.- Edmond Rocher.- Les
merveilles de la verrerie et
du meuble. — Les aqua-
relles de la rue Vol-
ney.
Je viens de fouiller Vérité, un des quatre
évangiles de Zola (Fa3quelle édit.). Cette atta-
que posthume du rude jouteur est d'une extra-
ordinaire puissance d'évocation. Le cauchemar
m'a obsédé. Durant des nuits j'ai rêvé de Le
Barazer. J'ai suivi, pas à pas, les haines d'une
foule ameutée par l'obscurantisme, troupeau
docile qui déchire, à dents de rage, le bouc
émissaire. On a dit que c'était une paraphrase
de l'affaire Dreyfus.Eh bien! oui. Mais Zola s'é-
lève mieux encore. Il construit un héros plus
noble qu'un officier, plus intéressant que Drey-
fus. Un petit garçon est assassiné par un frère
de la Doctrine Chrétienne. Cependant la popu-
lation abhorre les Juifs, et l'instituteur com-
munal appartient à cette race exécrée. C'est
lui le coupable. La plus aveuglante lumière
ne parviendra pas à l'innocenter. Ici même,
Lucien Victor-Meunier a commenté ces pages.
Je ne saurais aller plus avant. C'est un monu-
ment qui restera.
A travers les revues et les livres
La vente prodigieuse de Quo Vadis a mis en
fièvre les libraires. Le Pharaon, par Boleslas
Prus (Ch. Carrington, édit.), se réclame des
mêmes origines et je lui trouve la même sa-
veur archaïque. L'élévation au trône de Ram-
sès XIII. son éducation politique, ses aventu-
res, sos amours, sont mêlées à l'analyse docu-
mentée des - mœurs égyptiennes onze siècles
avant Jésus-Christ. Les mystères religieux rem-
plissent des scènes horrifiques où l'amour s'é-
panouit en fleurs de luxure. La hiérarchie des
prêtres, des nobles, des usuriers phéniciens,
des soldats grecs écrase le paysan frappé de
bastonnade et nourri de fèves. Tout cela d'une
savante teinte locale.
Guy de Téramond, que je rencontre avec
plaisir, me rappelle d'anciennes années, où
tous deux, sous le harnais militaire, nous son-
gions à la littérature comme à la Terre promise.
Oh ! les poignantes saisons, si douces quand
on se les rémémore 1 N'était-ce pas la jeunesse
quand même ! Son nouveau roman, La Route
amoureuse (Simonis-Empis, édit.), est d'une
attrayante lecture. C'est le bréviaire de l'inti-
mité conjugale. L'amour, un instant harassé,
se réconforte dans la confiance mutuelle, et
repart, allègrement, vers de nouvoaux jar-
dins.
Chez Calmann-Lévy, Donatienne, par René
Bazin, touchante histoire de misère. Une jeune
Bretonne quitte enfants et mari pour s'enga-
ger nourrice à Paris et leur gagner du pain.
Elle sombre dan9 le gouffre fatal et disparaît
on ne sait où. Mais elle apprendra que ceux
qui la chérissent autant qu'avant sont en proie
aux infirmités et à la faim et combien sa
faute fut grande. Elle vient alors reprendre sa
place au foyer, pardonnée, toujours Dona-
tienne. Ne fut-elle pas aussi une victime de ca
faux luxe, des plaisirs malsains éblouissant
son âme simple? Cette narration est mêlée de
jolis détails. L'exode du paria breton,qui s'en
va le long des routes, avec toute sa nichée, à
la recherche de la mère et de l'épouse, est im-
pressionnant. — A la même librairie, La fin
d'une amante, qu'on put connaître dans le
Journal, par Mad. Camille Bruno.
Cette confession d'un mélancolique amour
plut aux lectrices. En des pages d'une passion
sans bornes, chacune peut revivre un chapitre
d'elle-même, celui où elle rêva de se sacrifier
à son dieu et d'en mourir.
Le genre Jules Verne a bercé nos jeunes ans.
Cependant,le maître se faisant vieux,il fallait le
continuer. André Laurie est un disciple, avisé.
Ses livres suivent d'assez près le fantaisiste
évocateur, dans un parfum nouveau d'enfance
et de féminité. Le Tour du globe d'un bache-
lier (Hetzel, édit.)est le dernier-né de cette ins-
tructive série.
Les Cmtennales parisiennes font défiler les
événements du siècle mort. M. Charles Simond
appela des collaborateurs documentés, et la vie
publique fut disséquée par tableaux. Des cen-
taines do dessins, reproductions de portraits,
estampes, caricatures accompagnent l'habile
commentaire servi par ces messieurs (Pion,
Nourrit, édit.)
Dans le premier numéro de l'Informateur
des gens de lettres, que fonde Mad. Camille
Pert, lire un article d'Henry de Braisue sur
Ludovic Halévy.
Lorsque M. Victor Champier fut nommé di-
recteur.de l'Ecole des Arts Industriels de Rou-
baix. la Revue des Arts décoratifs, que patro-
rait l'Union centrale, interrompit sa publica-
tion, et des esprits chagrins purent croire un
instant à la disparition d'un de nos principaux
organes de vulgarisation. Mais l'Art décoratif,
qui poursuivait une honorable carrière entre
les mains exportes de MM. Gustave Soulier et
G.-M. Jacques, recueillit les traditions de la
Revue en ce qu'elles avaient d'excellent, y ad-
joignit sa propre expérience, et un parfait en-
semble en résulta.
Aussi, la plupart des sommaires de l'Art dé-
coratif seraient-ils à citer. Dans le dernier nu-
méro, un portrait de fillette en couleurs de
Van Rysselberghe et une étude d'Albert Bes-
nard sur Madame Bernard, sculpteur, précédée
de considérations sur le rôle féminin. Mme
Besnard est fille de Vital Dubray, qui eut des
succès sous le Second Empire et dont on éri-
gea une statue de l'impératrice Joséphine sur
l'avenue de ce nom. MM. Gustave Soulier et
Emile Sedeyn nous conduisent à travers les
expositions, dans le mobilier et le décor archi-
tectural. En janvier, avec des reproductions
noir et couleurs de Jules Chéret, texte de Ca-
mille Mauclair, une tête de femme de Lévy-
Dhurmer et « la Toilette féminine comprise.
par les artistes », du prince B. Karageorge-
vitch.
Collections et expositions
Chaque jour le ciel artistique est rayé d'un
fugitif astre nouveau.Les orientalistes tressail-
leront de joie quand on ouvrira le Musée d'En-
nery, suprême collection d'un homme opulent
qui eut quelque goût. Mais quand le public
verra-t-il le Musée d'Ennéry ? Le Musée Gus-
tave Moreau, dont je vous ai fait la description
dam ma chronique du 20 novembre dernier,
reçoit désormais les visiteurs. L'inauguration
a eu lieu sans bruit, ou plutôt il n'y a pas eu
d'inauguration, ce qui est aussi sage.A bon vin
pas d'enseigne.
Chez Silberberg, rue Taitbout, intéressant
assemblage de toiles et dessins de MM. Besson,
Jules Adler, Jean Pierre, TancrèdeSynave, une
Sérénade sur le grand canal à Venise, de M.
Morisset; des pastels et des aquarelles de Mlle
Dufau, deux bronzes de M. Roger Bloche etdes
objets d'art de M. LaportQ-BJairsy, J'ai fait cette
visite sans déplaisir.
L'Automobile-Club de France, la puissante
organisation de la place de la Concorde, à la-
quelle on doit l'essor d'une industrie floris-
sante, a jugé utile de rivaliser avec les rues
Boissy-d'Anglas et Volney pour la peinture et
4a sculpture, sans songôr que l'une s'appelait
Union artistique et l'autre Cercle artistique.
Chaz ellail n'y a qu'AutomobUe.,ot cela devrait
sufûco à sa gloire. EUa uotuf a tUQuUé dos ve-
dettes connues, avec des fruits de circonstance.
Son triomphe est sur les routes, dans l'cnvole-
ment jj^s décors, dans la variété des sites, dans
le parcours de ta nature, colle qui n'est pas
peinte.
Les Dix, de la Petite Galerie Drouot, cèdent
momentanément le local à leur camarade Mau-
rice Moisset, dont j'avais observé, dans une
précédente exposition, les sites parisiens nets
et bien éclairés. Ses vingt toiles nous condui-
sent avec un égal bonheur de la foire aux fer-
railles aux landes bretonnes. - Un peintre nor-
végien, Halfdan Strom, à Kristiana, essaie à
son tour la conquête de Paris. Depuis que « la
lumière nous vient du Nord » et que Anders
Zorn a franchi le Luxembourg, ces Scandinaves
ne doutent de rien. Celui-là a raison : ses étu-
des, ses intérieurs de son pays, ses paysages
lointains, ont de la saveur, de la sauvagerie,
et lui ont valu mention honorable, médaille
d'or, à nos Universelles do 1889 et 1900, ruban
rouge, et de passer, lui aussi, les portes du
musée de la rive gauche avec la Jeune Mère. Il
fut, d'ailleurs, élève de Holl,
Galerie Georges Petit, les Aquarellistes, avec
leurs noms habituels. Vous en connaissez lss
tendances et les façons un peu poncives. Les
enfants de M. Geoffroy sont pourtant des meil-
leurs.
Du 7 mars au 5 avril, à l'Hôtel de Poilly,
rue du Colisée, 3e Salon de la Société artisti-
que des Chemins de fer français, président M.
Logan. La Manufacture de Sèvres aura pour
Pâques un magasin de vente au détail, au coin
du boulevard des Italiens et de la rue Favart.
On y cédera aussi de* médailles et des gravu-
res de la Chalcographie du Louvre. — Prochai-
nement, fête à la mémoire de Gavarni, et plus
lard étalage des œuvres du fameux Chicardier.
— Il parait que le legs Thomy-Thiery est en
ftéciyi/l Il fait si chaud sous les combles du Lou-
vre que le bitume coule et envahit tout. Jadis
le Halage, do Decamps, fut perdu dans cette
fournaise.
Un illustrateur féminin: Edmond
Rocher
Chez Belin, quai Voltaire, les Peintres Enlu-
mineurs Miniaturistes, avec des essais valeu-
reux. De M. Atalaya, connu par ses illustra-
tions de Don Quichotte, un Napoléon, enlumi-
nure à l'huile, des aquarelles combinées de M.
P. Barthélémy, Près Châteauroux, Dans les
Alpes et Bois de là Bernarde, une miniature de
Mme Brancour-Lenique, un portrait masculin
savamment traité de Mlle Fauconnier, des mé-
daillons ivoire de Mlle Pègre. Ici nos compa-
gnes triomphent,dans ces impressions menues
dont les finesses sont l'attrait. Tout ce qu'ap-
porle Mlle George-Grimblot est d'une char-
mante facture, et j'admire cette lôte d'étude
qui ressemble à une peinture.
Cependant, voici M. Edmond Rocher, vice-
président du groupement, quasi-féminin par
son inlassable choix de femmes et de fleurs.
Je souhaite qu'elles le lui rendent. Son cadre
de dessins à la plume, extrait d'une suite sur
la fleur décorative, indique une imagination
experte. Jamais elle ne quitte les sentiers de
son jardin d'élection. L'Anthémis, de nudité
perverse, continue le parterre luxurieux de ses
Fleurs passionnées. Lascives, elles mêlent leur
chair aux pétales et aux parfums, offrant leur
calice aux pistils enamourés et aux caresses des
vents.
Une gouache adornée d'émaux : c'est la cou-
verture des Edens, recueil de vers où s'épa-
nouit l'ardeur des vingt ans. Des paons, aux
queues ocellées, s'étalent sous l'arbre du bien
et du mal. Et on devine que les fruits espérés
sont des baisers.
L'Ecole de Nancy
L' « Art décoratif lorrain », effort sans pré-
cédent pour la rénovation du mobilier contem-
porain, convie le public durant tout le mois de
mars au Pavillon de Marsan. Que les passants
entrent, qu'ils regardent et comprennent. Ils y
verront des conceptions intéressantes, des mer-
veilles de technique et de composition. L'un
des salons contient une garniture de chambre
à coucher, aux lignes habiles, au décor mar-
queté d'ombellifères. M. Emile Gallé, maître
verrier et savant ébéniste, qui a voué une ado-
ration manifeste à cette classo do végétaux, en
tire des effets surprenants.
Dans cette même pièce, un mobilier de salle
à manger ornementé de lierre, un buffet en
forme de chalet, dont les panneaux nous trans-
portent au milieu des Alpes. Le suivant mon-
tre un cabinet de travail paré de nénuphars
dorés, do M. Majorel. Le troisième un siège,
exécuté pour un marchand de houille nan-
céen, par M. Valin. Sur un relief sculpté en
plein bois, un paria de la mine manie le pic.
Et d'autres conceptions de M. Gruber.
Mais ce qu'il faut admirer dans cetle mani-
festation de l'Ecole de Nancy, parce qu'on y
reconnaît ce qui fut jusqu'alors sa gloire, c'est
l'adoration du cristal, de la céramique, des
gemmos, épanouie en des vitrines cantrales.
MM. Emile Gallé, Daum, Majore!, Bussière,
ont assemblé des verreries inestimables, des
flammés, des émaux, des vase3 où se jouent
de fluides métaux. Et ce sont tous objots usuels
que chacun peut utiliser, des ampoules électri-
ques, des porte-bouquets, des soucoupes, des
bouteilles et des carafes. Les décors en sont
des plus savants et des plus variés. La lumière
s'ébat mieux qu'en un prisme, sur ces fleurs
d'un parterre fabuleux.
Rue Volney
Le deuxième vernissage du Cercle (Aqua-
relles et Paslols" , a eu lieu lundi. L'ensemble
décèle quelques offorts agréables. Cependant les
reproches que j'adressais aux pointures la mois
dernier pourraient encore s'appliquer ici. Le
spectateur se sent trop dans un cercle fermé,
accessible aux seuls adhérents et aux portraits
de leurs amis,quoiqu'une tendance à plus de di-
versité puisse pallier un peu cotte sorte d'ex-
clusivisme.
Notons, au hasard de la promenade, des
effets de grisailles et de noirs, eaux-fortes en
couleurs, Lever de Lune à Douarnenes et
Dans le parc de Fontainebleau, de Bellanger-
Adhémar. Un coin de berge de Seine, d'Abel
Truchot. Là, une rivière glisse entre des berges
mélancoliques, vers la chule d'un jour d'au-
tomne. Cette aquarelle, de M. Gaston Knight,
est à regarder. Du même, ailleurs, Un Village
sous la Neige, au bord de l'eau violette de froid.
Frédéric Régamey apporte deux tableaux
d'une exactitude telle qu'on .dirait des photo-
graphies agrandies et coloriéas, On y recon-
naît facilement les têtes. C'est un assaut d'ar-
mes entre Kircholfer et Conti, champiou d'Ita-
lie, et un défilé de troupes devant les Inva-
lides, Transfert du gouvernement militaire, A
côté, une balustrade de cathédrale, Sur les
toits de Notre-Dame,par Henri Magne.
Un bon coin avec trois portraits, Madame
B., jolie blonde sur fond vert, aquarelle aux
teintes de fusain et de pastel, de Gustavo
Brisgand, Mademoiselle L. P., noire et blan-
che, en robe et chapeau crêpe, par Rodo!phe
Pignet ; les épaules et !a tête sont délicieuso-
ment teintées. Et une étude, lôte féminine en-
tourée de stylisations florales, de Victor Bru-
gairolles.
Plus loin, un paysage lacustre, où un soleil
couchant rougeoie dans la brume en Hollande,
de Daniel Kœchlin, un visage obscur et pensif
de Guiraud de Scevola, des marais, pastels
mélancoliques, d'Iwill; des. enfants jouant
dans un champ de blé couplé, sous une ardente
lumière, d'Achille Cesbron, et un portrait de
Yvoone D., par Léandre.
, LÉON RJOTSR^
LA JOURNEE
PARLEMENTAIRE
A LA CHAMBRE
La loi de finances
M. Léon Bourgeois préside.
On en est resté à l'art.42 Cde la loi de finances.
M. Beauquier demande à la Chambre de dis-
joindre cet article qui concerne les Cours
d'appel. La suppression de sièges qu'on veut
opérer ne se justifie pas, à son avis. Oo ne
peut pas réorganiser l'administration de la jus-
tice par voie budgétaire.
M.Larquier a déposé une demande analogue.
Il réclame le renvoi à la commission de la ré-
forme judiciaite.
M. Clémentel. — Je m'étonne que le débat
actuel ait pu s'instituer, après les manifestations
qui se sont produites dans le sens de la fort mo-
deste mesure qui est proposée.
Il s'agit, en effet, d'une modification très res-
treinte du nombre des conseillers dans certaines
cours d'appel. C'est de Paris que vient la surcharge,
et il faut tenir compte des doléances légitimes des
contribuables.
La création de postes & Paris est indispensable.
Les créations se feront au fur et & mesure des
extinctions correspondantes dans les ressorts de
Paris.
M. du Perier de Larsan. — Le meilleur
moyen d'assurer le bon fonctionnement de la jus-
tice à Paris, ce serait de restreindre le champ de
juridiction de cette cour, car le ressort de Paris est
trop étendu.
M. Vallé, garde des sceaux. — La réforme
très modeste proposée a été étudiée sur tous les
points.
On ne fera croire & personne que des villes com-
me Agen, Besancon, Dijon, Grenoble et Poitiers
perdront de leur prestige, parce que leurs cours
d'appel auront 18 magistrats au lieu do 22. Cette
suppression a été prévue au budget des dépenses.
Par 425 voix contre 96, la disjonction est
repoussée.
Les art. 42 C. et 43 sont adoptés ainsi que
l'art. 43 A qui est relatif aux médailles d'hon-
neur.
On adopte sans grande discussion les art. 44
à 48.
Souvenirs de 70-71
Sur l'art. 48 bis MM. Couyba et Schneider
réclament la création d'une médaille commé-
morative du siège de Paris.
La commission repousse cet amendement.
M. Brunet insiste pour l'adoption.
M. Baudet réclame une médaille pour les dé-
fenseurs de Châteaudun.
L'amendement de M. Schneider n'est pas
adopté.
Les instituteurs
L'art. 51 modifié est, explique M. Chaumié,
la consécration d'une disposition volée par la
Chambre dao:) le budget.
M. Chaumié. — Avec la disposition actuelle-
ment présentée, le traitement des stagiaires est
fixé à mille francs et celui des instituteurs et ins-
titutrices de deuxième classe à 1,100 francs.
Le jour est tout à fait prochain où le complé-
ment de la solution désirée par tous arrivera.
M. Bepmale, rapporteur du budget de l'ins-
truction publique. - La commission s'est trouvée
eu présence du projet du gouvernement et de pro-
positions de diverse nature. Elle n'a pu fondre ces
dernières dans un texte unique qui aurait été sou-
mis à la Chambre.
Toutefois, ou est tombé d'accord sur un texte,
encore incomplet, d'ailleurs, que le ministre & pré-
senté et quo la commission a accepté.
La commission demande, d'autre part, au mi-
nistre de régler ses promotions prochaines de façon
à assurer les bénéfices des dispositions présentées
dès cette année.
M. Carnaud se rallie au texte présenté.
M. Chaumet retire un amendement qu'il
avait déposé.
Les art. 51 et 52 sont adoptés.
M. Viollette a déposé un article additionnel
que le président déclare en contradiction avec
les dispositions du règlement. Il demande une
meilleure répartition du traitement des agents
des postes pour 1904.
M. Rouvier. — Le gouvernement n'a pas
qualité pour interpréter le règlement de la Cham-
bre; mais il lui parait que l'article 51 bis écarte la
présentation dans le budget de l'amendement de
M. Viollette.
A la majorité de 343 voix contre 188, la Cham-
bre décide que l'amendement de M. Viollette
n'est pas recevable.
On adopte les art. 53 à 55.
M. Brunet demande la disjonction de l'article
55 A. La commission et le gouvernement ne s'y
opposent pas, et l'article est renvoyé à la com-
mission.
Les art. 55 B, C, D et E sont adoptés.
M. Mulac demanda le maintien de la prime
pour la destruction des loups, telle qu'elle était
fixée par la loi du 3 août 1882, c'est-à-dire la
suppression de l'article.
L'art. 56 est adopté.
La retraite des mineurs
M. Laurens-Castetet soutient uo amende-
ment tendant à disjoindre les articles 57 A à 57
M, relatifs à la majoration des pensions des
ouvriers ou employés des mines.
L'orateur dit qu'il y a d'autres ouvriers aussi
intéressants que les mineurs.
M. Drake développe des idées analogues.
M. Janet combat la disjonction.
M. Janet. — Actuellement, sur 21.000 anciens
ouvriers mineurs, il y en a 12.000 qui n'ont pas de
retraite, on qui n'ont qu'une pension inférieure à
50 francs. Voilà ceux qu'on représente comme des
privilégiés.
M. Jumel, rapporteur de la commission du
budget, développe des aperçus semblables. Il
proteste contre les sentiments de jalousie qu'on
prête à la toute des ouvriers à l'égard des mi-
neurs.
M. Paul Beauregard revient appuyer la pro-
position de disjonction.
M. Maruéjouls, ministre des travaux publics,
estime que les dispositions présentées ont un
caractère do très grande urgence, ce qui jus-
tifie leur incorporalion dans la loi de fiuances.
Après quelques observations de M. de Ra-
mel, la disjonction est ropoussée par 349 voix
contre 187.
H. D.
-
AU SÉNAT
Les victimes de la Martinique
Le Sénat discute au début de la séance le pro-
jet de loi relatif aux pensions des veuves et des
orphelins des fonctionnaires morts dans la ca-
tastrophe de la Guadeloupe..
M. Knight demanda le renvoi à la commis-
lion.
M. Doumergue défend le projet, qui ne porte
augmentation de crédits que pour 24,000 francs.
MM. Godin, Antonin Dubost, Knight par-
lent successivement, et le renvoi à la commis-
sion est repollssé.
Les propositions de la commission sont adop-
tées après urgence déclarée.
Les conseils de prud'hommes
On examine ensuite la proposition concer-
nant les conseils de prud'hommes.
i M. Sav.iry, rapporteur, dit qu'il faut assurer
l'impartialité des juges et augmenter leur au-
torité. ,"
M: Strauss réclame pour les employés de
commerce la juridiction des prud'hommes.
M. Tromlfot appuio l'amendement- Slrnll!=l::.
Aur&t le digues du miuiitrc du commerce,
la discussion est renvoyée à une prochaina
séance), - H. D.
——————————— ——————————.
QUAND LA LOI LES DÉSOBLIGE
Demandez la façon de traiter les lois comme
elles le méritent, cinq centimes. Quand une
loi déplaît à l'évêque de Périgueux, voici-comme
il la traite : « le sombre et cyniquo travail des
forbans de la finance ot des sectaires de la lit-
térature et do la fausse sciencc: qui ont rêvé de
mettre notre société en coupe réglée, au mieux
des intérêts de leurs ambitions et de leur
caisse ». Voilà en quels termes le fonction-
naire placé par l'Etat à la lôto d'un diocèse et
salarié par lui, s'exprime sur le compte des
dépulés, des sénateurs et du Président de la
République qui, soit par la discussion, soit par
le vote, soit par la signal//¡'o'} do promulgation,
ont travaillé à l'édification d'une loi de l'Etat.
Vous avez déjà deviné qu'il s'agit de la loi
sur les associations que le même évêque, dans
le même factum, traite encore de « déshon-
neur public et national 0. Le Temps veut bien
reconnaître que de telles paroles dans la bou-
che d'un prélat font mieux les affaires de l'an-
ticléricalisme que vingt discours radicaux.; le
Temps a parfaiiemont. raison ; pourquoi occu-
perions-cous notre temps à dire des prêtres et
des dévots ce que nous pensons, puisque ceux-
ci s'entendent si bien à se montrer à tous tels
qu'ils sont : intolérants et dominateurs quand
ils sont les maîtres; haineux et collectionneurs
de basses invectives quand la loi réclame
d'eux, comme de tous, la déférence qui lui est
due ?
» —-
CHRÊME ET CARNAVAL
Ça va mieux, la dévotion; la chronique
mondaine du journal le mieux informé de ce
qui se passe dans le véritable grand monde,
j'ai nommé le Joc!ce!/, nous annonce, en effet,
que les belles madames ont renoncé a l'habi-
tude fâcheuse qu'elles avaient contractée de
donner des bals jusqu'à la Mi-Carême, en
sorte qu'il n'y avait plus do carême, à peu
près, pour les belles madames ; elles usaient
d'un demi-carême tout au plus. Maintenant les
voilà parties à ne plus transiger avec les re-
commandations do l'Eglise, eb elles ne s'arrê-
tent plus, « c'est il pline si l'on admet jusque-
là — jusqu'à la Mi-Carême — des matinées, et
encore pour la petite jeunesse ». Et vous
croyez que c'est fini ? Détrompez-vous : a De
même, le maigre n'a jamais eu de plus nom-
breux fidèles ».
lTous me demandez pourquoi ce retour aux
pratiques recommandées par l'église ? intèrro.
gez le Jockey, il vous répondra : « Ce retour
plus empressé aux loi? de l'église doit être,
sans aucun doute, attribué aux persécutions
officielles. »
D'où il semblerait suivre que lorsque les
prescriptions du Carêmo n'avaient pour se re-
commander que les objurgations des prêtres,
on se dérobait à ellos. avec élégance; mais que
l'on fait maigre simplement pour se montrer
désagréable à la République.Nous savions déjà
de quelle qualité est, au fond, la dévotion de la
riche clientèle clôricale: elle est faite d'hosti-
lité contre les idées de la Révolution.
Pourtant, que les belles madame." no se g.
nent pas pour continuer : qu'elles renoncent à
danser en Carême, cela ne nous incommode on
rien, et même qu'elles fassent maigre, cela fera
monter le cours du poisson que nos pêcheurs
ont tant de peine à aller chercher par les mers
démontées de ces iours-ci.
Nous, cela nous est donc égal, ces formes
enfantines d'opposition, mais quand ce sont
les cléricaux qui gouvernent, la question
change d'aspect. Oyez plulôl :
Il y a. pas loin d'ici.en Btllgiquc,un curé qui
s'était séparé de son clerc; e-t la population de
la commune avait pris parti pour le clerc; et le
Carnaval était imminent; le curé entrevoyait
avec ennui dos jours de fête cù ses paroissiens
viendraient peut-être, masqués, sous les
fenêtres de la cure, acclamer le clerc dé-
gommé.
Ce fut simple : le curé obtint du bourgmestre
un arrêté prohibant le port du masque; la po-
pulation ne tint pas compte de l'arrêté: les
gendarmes circulèrent, arrachant les masques
des gens en train de s'amuser; l'un des gen-
darmes puussa le respect de l'arrêté du bourg-
mestre jusqu'à luer, dans un café, un consom-
mateur d'un coup do carabine, et ce gendarme
fut assommé par la fonle.
Quiétude des pays où le prêtre est en force,
et règne.
LES JUGES DE PAIX
M. Jean Cruppi vient de déposer sur le bu-
reau de la Chambre son rapport sur la propo-
sition de loi déjà adoptée par le Sénat et rela-
tive à l'extension de la compétence des juges
de paix.
Aux termes de co projet, la compétence ci-
vile des tribunaux do simple police est élevée
à 300 francs en dernier ressort et à 600 francs
en premier ressort. Nous avons déjà.ici même,
à plusieurs reprises, demandé que cette ré-
forme ne reste pas à jamais oubliée dans les
commissions de réforme judiciaire.
Les juges de paix ont fait leurs preuves. Ils
constituent la juridiction la plus rapide, la
moins coûteuse et la plus simple. Devant eux,
la procédure n'est point un maquis, et la con-
ciliation est facile. En 1891 sur 336.556 affaires
soumises 64,304, c'est à dire 19 0[9 ont été ar-
rangées à l'audience.
Il y a donc là au premier chef une réforme
démocratique. Toutefois, qu'il nous soit per-
mis de formuler un regret. Le projet actuelle-
ment soumis à la détibéraliou de la Chambre
est trop timide. On pourrait encore augmenter
de beaucoup le chiffre qui délimite la compé-
tence des juges do paix. Nous comptons bien
que par voie d'amendement les députés se-
ront saisis d'une proposition analogue.
On pourrait également étendre la compé-
tence criminelle des tribunaux de simple po-
lice en leur attribuant la connaissance des in-
fractions dénommées délits-coiUiNuenlions-qui,
par une étrange anomalie, resie encore aujour-
d'hui attribuée aux tribunaux de police correc-
tionnelle. -A.
LETTRE A M. WALDECK-ROUSSEAU
M. Luzzatti répond en ces termes à M. Wal..
deck-Rousseau qui lui avait adressé, sur la
coopération italienne, une lettre que les jour-
naux de la péniusufeavaient reproduite:
Monsieur le sénateur.
Sous les auspices de notre commun ami, M. Bar
rère, le bon génie diplomatique do nos deux pay-
latins, je reçois votre lettre qui est un grand hon-*
neur pour la coopération italienne. Votre approba-
tion a une valeur inestimable, car l'homme d'Etat
et l'homme de science se complètent en vous et
s'entr'aident eu uréant un type d'élite, de sincéritâ
et de force morale.
Vous ôtes un guide et une lumière pour nos dé-
mocraties qui recherchont les solutions de l'avenir
dans l'étude des problèmes sociaux.
Agréez, monsieur le sénateur, avec les remercie-,
monts des coopérateurs italiens, L'expression de
mes hommages les plus respectueux.
LUZZATTI.
-——————————————— ————————————————-.
LES ANGLAIS EN AM8IE
Adeu, 3 mars.,..
Les Anglais ont occupé dans l'arrière-pays
une position qui domine te district de OeLuall.
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