Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-02-19
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
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Description : 19 février 1903 19 février 1903
Description : 1903/02/19 (N12032). 1903/02/19 (N12032).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
- Ctl/NTQ .vGENTIME-S- 1© Numéro. t. PÂW&& DÉPARTEMENTS
.¡.
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14. -ii.' 'In Mnii. Paris. -
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No - 12032. — Jeudi 19 Février 1903-
1" VENTOSE AN 111
- ADMINISTRATION ; 14, rue du Ilaii -
1 4, Adresser lettres et illandllls à l'administrateur..,
NOS LEADERS
Le Sénat continue à s'occuper avec
beaucoup d'activité de la réforme de
notre régime militaire. Peu à peu, la
loi sur le service de deux ans prend
corps et il est impossible de ne pas par-
tager la confiance dont témoignait,dans
un de ses derniers articles, notre rédac-
teur en chef.
Voilà encore un soulagement consi-
dérable que le pays en général, et les
classes les moins riches de la nation,
en particulier, vont devoir à la Répu-
blique.
Tous tes intéressés sont convaincus,
d'ailleurs, que le service de deux ans
sera prochainement établi ; et il serait
beaucoup plus difficile à un gouverne-
ment de se refuser à la réforme que
d'en poursuivre l'accomplissement.
C'est la raison du calme avec lequel
le public suit les délibérations du Sé-
nat. Il ne saurait être question d'indif-
férence; et si les adversaires du progrès
qui est en voiederéalisation parvenaient
à mettre en péril le projet dont le Sé-
-nat est saisi, on imagine difficilement
l'émotion qui se manifesterait dans
toutes les familles.
Il est évident que le premier plan de
'l'actualité est pris le plus souvent par
les batailles qui se livrent à la Cham-
bre. Comment ne serait-on pas plus
ému par les luttes auxquelles donne lieu
l'application de la loi sur les associa-
tions, par l'assaut que les républicains,
entourés d'embûches, donnent à la Con-
grégation, que par le paisible dévelop-
pement de la nouvelle loi militaire?
Cependant, nos lecteurs ne nous par-
donneraient pas de ne pas attirer leur
attention sur les détails les plus intéres-
sants de la discussion à laquelle se livre
le Sénat.
La séance d'hier, notamment, a tou-
ché à une quantité de points que tous
ceux qui ont porté ou porteront un fusil
ne voudraient pas ignorer.
Et d'abord, on a beaucoup parlé des
« permissions ». Avec grande rai-
son, le rapporteur avait signalé le
bénéfice que la santé morale du soldat
retirerait de fréquentes visites à sa fa-
mille. m
C'est une idée que les militaires de la
vieille école ont du mal à se mettre
dans la tête. A leurs yeux, le « bleu »
qui arrive à la caserne, doit perdre tout
souvenir de sa -vie passée, il doit es-
sayer de se transformer, corps et âme;
il était un civil, il devient un soldat.
Qui n'a entendu les adjudants crier aux
jeunes soldats : « Ah ! Cà.! Vous pen-
sez à votre payse ? » Grave tort, en
effet, que de se souvenir, quand on est
« sous les drapeaux », de ce qui vous
fut cher avant l'entrée à la caserne !
Il est bien possible que pour les soldats
des armées de métier, il y eût avantage
à oublier la « payse », ainsi que la fa-
mille. Un homme qui donne sept ou dix
ans de sa vie au métier des armes, tom-
berait vite dans un déplorable état de
mélancolie s'il donnait trop de sa pensée
* à ceux dont il sera si longtemps séparé.
Mais le soldat d'aujourd'hui, même
quand il a trois ans « à tirer »; mais le
soldat de demain, qui fera deux ans
d'instruction militaire, pourquoi vou-
lez-vous qu'il arrache de son cœur des
affections qu'il n'a pas quittées sans
espoir de retour ?
— Allons! reprennent les partisans
de l' « école de fer », nos conscrits peu-
vent être appelés à faire campagne,
pendant des mois, pendant des années
peut-être. Iraient-ils se reposer en per-
mission chez leurs vieux parents ?
Ce serait une étrange conception du
cœur humain que de juger de l'état
d'esprit du soldat qui marche à la fron-
tière, par les sentiments du jeune homme
qui apprend, à tout hasard, à se servir
d'un fusil.
On sacrifie la joie de se trouver au
milieu des siens à la joie héroïque de
sauver la patrie. Mais j'approuve fort
le soldat qui préfère passer une journée
chez lui que de flâner seize ou dix-huit
heures dans la cour d'une caserne.
La loi dont le Sénat achève l'étude
prévoit que des permissions pourront
être accordées aux troupiers chaque di-
manche, chaque jour férié ; cela sans
préjudice d'une trentaine de jours de
congé pendant la durée du service.
Il s'agit d un maximum ; beaucoup de
bons esprits voudraient que ce fût un
minimum. Les pires réactionnaires
avouent que le repos hebdomadaire est
indispensable à l'ouvrier; parce que
l'ouvrier revêt une culotte rouge, ses
besoins matériels et intellectuels ne'de-
viennent pas moins exigeants. Et un
surplus d'un demi-mois de congé par
an n'a rien d'excessif.
Un principe dont il faudrait à tout
prix se débarrasser est celui que quel-
qu'un — le commissaire du gouverne-
ment, je crois — formulait encore hier
sous cette forme : a Les permissions ne
sont pas un droit pour le soldat, mais
une faveur. » Cette pensée, dans la bou-
che d'un autre orateur, prenait cette
forme : « Les permissions sont utiles
pour récompenser les bons-soldats et
pour punir les mauvais. » *
Nous ne pouvons souscrire à cette
opinion. Le mauvais soldat, indisci-
pliné, révolté aigri, couYaiocu qu'il
est la victime de mille injustices, est
celui à qui une journée de détente mo-
rale est le plus nécessaire. Il
L'en priver, c'est risquer de l'exaspé-
rer, de le pousser à des coups de tête
dont il sera la première victime.
Le Sénat, quand viendra la deuxième
délibération sur la proposition Rolland,
et la Chambre, quand elle recevra la
proposition à son tour, devraient re-
connaître au soldat le « droit à la per-
mission. »
Une mesure du même genre, encore
plus importante, et qu'il est urgent de
prendre, c'est la suppression du « ra-
biot ».
La volonté du citoyen armé risque de
se briser sous la pression brutale de la
discipline. Des soupapes sont néces-
saires.
Hugues Destrem.
UNE MANŒUVRE
Toujours cette sempiternelle
question des bouilleurs de cru.
Leurs représentants sont insa
tiables et cela justifie ce que
je disais l'autre jour à propos
des batailles d'intérêts qui sou-
lèvent à la Chambre plus d'é-
motion que si nous étions en révolution.
Plus on leur fait de concessions, plus ils
déploient d'ardeur. Il semblerait résulter
de cela que le ministre a tort de leur pro-
poser des transactions. Car s'ils acceptent
ces transactions, ils ne prennent aucun en-
gagement de leur côté. Mais nous devi-
nons très bien ce que fera Rouvier qui con-
duit toute cette discussion avec un talent,
une vigueur et une maëstria auxquels tout
le monde applaudit.
, Il veut avoir une statistique de l'alcool,
évidemment. Et l'on verra l'an prochain
comment punir sérieusement les fraudeurs.
Quant aux 20 ou 25 millions que les con-
cessions qu'il a faites enlèvent au budget,
je me fie à lui pour les trouver.
En attendant et alors que tous nous
croyions que l'opposition des bouilleurs de
cru allait à peu près cesser, elle a repris
plus vive et plus irréconciliable que ja-
mais. Ils s'étaient entendus avec quelques
membres de la commission du budget. Ils
voulaient bien accepter un inventaire,après
la promulgation de la loi, des quantités
d'alcool existant chez les bouilleurs de cru,
mais ils n'en voulaient plus d'autre ensuite.
C'était l'inventaire in mternum, après quoi
la fraude pourrait s'exercer aussi large-
ment que possible à la barbe du fisc.
- Rouvier a exigé avec une énergie éton-
nante un inventaire tous les ans, après la
récolte, après la distillation, sans préjudice
de l'inventaire après la promulgation de la
loi, plus un récolement après la première
campagne. C'est le seul moyen de prévenir,
en partie seulement, la fraude.
Notre ami Berteaux, que tout le monde
estime à la Chambre, car c'est bien le meil-
leur homme du monde, sympathique, tra-
vailleur, ayant beaucoup de talent, a com-
battu Rouvier. Incontestablement, lui était
de bonne foi, et personne n'en pourrait
douter. Mais il a des bouilleurs de cru dans
sa circonscription. Il s'est dédoublé, parce
qu'il s'est un peu emballé. Il a peut-être
un moment oublié qu'il était rapporteur
général pour redevenir simple député de
Seine et-Oise. Aussi, les bouilleurs, ravis
de ce concours inattendu, en ont-ils profité
pour tenter une manœuvre contre Rouvier.
Ils l'ont accusé de renier ses engagements,
d'introduire l'exercice chez les cultivateurs,
etc., etc. Fort heureusement, la Chambre
était dans un de ses bons jours. Elle a battu
les bouilleurs à 50 voix, et, admirez le tra-
vail parlementaire, nous avons voté, pour
faire avorter la manœuvre des bouilleurs,
un amendement Lauraine dispensant de la
visite les bouilleurs de cru qui fabriquent
moins de 10 hectolitres d'alcool. C'est une
jolie marge.
Voilà bien où mènent ces causes indé-
fendables. Berteaux, qui est un convaincu
passionné a employé tous les arguments
possibles pour faire échouer l'amendement,
et il ne s'est pas aperçu que par la même
occasion, il mettait ces mêmes arguments
à la disposition des adversaires les plus
acharnés de l'impôtglobal et progressif sur
le revenu axec taxation et déclaration. En-
fin, nous ne sommes heureusement pas à
la veille de la discussion de cette réforme.
— Ch. B.
P.-s. — Je reçois la lettre suivante que je
livre aux méditations de nos lecteurs :
« C'est un employé des contributions indi-
rectes qui vous écrit pour vous dire que dans
les départements de l'ouest, la fraude n'est pas
pratiquée par une partie de la population qui
habite les campagnes ou les villes sans octroi,
mais bien par toute la population. On s'appro-
visionne chez les cultivateurs (bouilleurs de
cru) avec la plus grande facilité, et la fraude se
fait sur une si vaste échelle que si l'adminis-
tration des contributions indirectes ordonnait
des visites chez les habitants non récoltants
(en vertu d'un article 237 de la loi de 1816) on
trouverait partout dans leurs domiciles des
eaux-de vie introduites sans aucun paiement
des droits.
« Et avec la législation actuelle, cous som-
mes impuissants à réprimer cette fraude, qui
est la ruine de l'impôt, et je puis dire aussi de
la santé. Les législateurs peuvent dire que si
le cléricalisme est l'ennemi de la liberté, le pri-
vilège des bouilleurs de cru est encore un plus
grand ennemi de l'impôt sur l'alcool et de la
santé publique. »
LA MAFFIA EN PRUSSE -
LA MAFFIA EN PRUSSE -
(De noire correspondant particulier)
Posen, 17 février.
Le premier président de la province de Po-
sen, M. Bitter, vient de donner sa démission:
en invoquant comme motif que les derniers
événements l'ont ému au point de compromet-
tre gravement sa santé. Il convient de rappeler
à ce propos que l'opinion publique a reproché
à M. Bilter de ne pas avoir défendu M. von
Willich, son subordonné hiérarchique, qui, on
se le rappelle, par les menées de la Maffia mi-
litariste, a été poussé au suicide. M. Biller. est
tout au plus Coupable de manque de courage
civique. Il n'osait rien faire pour la défense du
malheureux M. von Willich, car il ne savait
que trop à quel point la coterie militariste
était soutenue, aï ev SLuelgjiiitfs DersonojK
;&:t! : - -.
LE RAPPEL
ARTISTIQUE ET LITTÉRAIRE'
Les femmes du monde au Grand-Palais.
- La Société nouvelle. — Exposi-
tions diverses. — Eugène Car-
rière" - Léonrapié, roman-
cier féministe
L'Union des Femmes peintres et sculpteurs
règne en ce moment au Grand-Palais dos
Champs-Elysées. Cette assemblée, faible et
chancelante hier encore, s'affirme et prend des
forces. Comme toutes los associations où l'indi-
vidu a peu de puissance par lui-même, où ce
n'est que l'amalgame des relations, des in-
fluences, de l'argent qui parviendra à donner
droit de cité, cette union s'abrite sous les aus-
pices,non du lalent, un talent incontesté, ce se-
rait difficile, mais d'un modèle de noblesse et
de mondanité. Et c'est de la duchesse douai-
rière d'Uzès, celle « qui voyait grand », qu'il
s'agit.
Elle compte aujourd'hui plus de 400 socié-
taires, dont une vingtaine ont pu affirmer
quelque talent. Ici 1,300 tableaux et 50 sculp-
tures occupent 10 salles. Les accessoires sont
mieux que les cimaises. On peut causer et s'as-
seoir, ce dont ne se font pas faule les légions
féminines accourues à l'appel de leurs amies —
pour en dire beaucoup de bien, ma chère. t
Fleurs et plumes -,
Les femmes peintres excellent dans la fleur,
quelques-unes dans l'enfant, dans l'espiègle
fleur humaine qui s'éveille et qui joue. Elles
ont de la délicatesse et du goût. Pour celles
dont le talent véritable peut rivaliser avec ce-
lui de leurs congénères masculins et embrasser
tous les genres, elles sont rares, toujours les
mêmes, et on les retrouve avec plaisir à cha-
que exposition. Et toujours en progrès. Des in-
térieurs de Mmes Peytel et Garnot-Beaupère,
une Cuisine normande de Mme Bergerot, et,
hors pair, deux grandes toiles, Crépuscule de
juin à Venise et Brumes du matin en Hollande,
de Mme Mauny Adam. ,
Jamais on n'aima l'enfant comme Mme
Boyer-Breton. On n'a pas oublié ceux qu'elle
nous montra, jouant dans les sables chauds,
ou pendus aux jupons de leur mère. Sa figure
de jeune fille, blottie derrière les Lys, est d'un
agréable sentiment. Dans les portraits, admi-
rons sans restriction la Princesse Argondona,
de Mme de Wentworth, et,de Mlle Louise Lav-
rut, une jeune personne on toilette de salin
blanc,assise dans un parc.Les pastels do Mmes
Huillard et Vallet sont élégants.
Des fleurs, des touffes, des brassées do fleurs,
ivoirines, incarnadines, orgueilleuses de leur
rosée, ou, d'avoir trop brillé,courbées mouran-
tes sur leurs tiges lasses, Mmes Salard,
Ponsard, Dury-Vasselon en ont apporté.
Ce sont des roses,des pa3seroses, des horten-
sias, tout l'éventaire du jardin. Des études do
nu sont à remarquer, celles de Mme Landré,
avec des chairs appétissantes où l'amour vou-
drait mordre, sa Femme au mirait, provocante
en sa simplicité. Aussi une Rêverie de Mlle Ca-
nuet. Où vont les songes des jeunes femmes 1
Aux robes, aux fêtes, aux amants. Et rien n'est
si gracieux que de rêver ainsi. Mme Caire nous
montre une Femme d sa toilette. C'est me des
heures favorites de la matinée, les lumières
sont propices à l'arrangement du teint et des
séductions. Le passant, jeune ou vieux, secoué
par une foule de soie et de parfuma, assiste non
sans plaisir à cette séance do coquollerie. -
La sculpture a toujours été plus incolore en-
core dans ces encombrements d'art mixte. La
femme y demeure menue, inapte à remuer les
blocs de glaise qui font les athlètes. Sa concep-
tion de l'armature humaine reste gracieuse,
sinon fausse. Pourtant, comme en peinture,
des progrès, dos choses meilleures, un bronze
doré de Mme Laure Coulan-Montorgueuil.des
femmes nues de Mme Fauny-Marc, un buste de
Nielzche, curieux, de Mme do Frumerie, qui
nous étonnera demain.
Société nouvelle de peintres et sculp-
teurs
Cette petite société, choisie et de haut goût,
présidée par M. Gabriel Mourey, occupe les
galeries Durand-Ruel, du 14 février au 7 mars.
Dès l'abord, on se sent chez des artistes
conscients de leur valeur. Les panneaux sont
composés sobrement. Voici d'abord celui où
règnent M. Jacques Blanche et ses portraits,
Claude Debussy, admirablement modelé, su-
perbe d'expression, voisinant avec une douce
tête de femme.A droite le Flamand Emile Claus
et ses pommiers en fleur, sa Maison rose, son
Printemps, fin, joli de couleur, et des pas-
tels.
M. Henry Caro-Delvaille, dont le vous ai
parlé à propos de son exposition chez Silber-
berg, continue sa symphonie des noirs et
blancs. M. René Prinet apporte une curieuse
Bibliothèque, et l'osquisse de La Sonate à Kreut-
zer vue au Champ de Mars. M. Daucbez aime
la Bretagne, les bords salins, les villages dans
les dunes. Le Mouillage, au coucher du soleil,
est d'une intense poésie.
Dans les pièces suivantes, les vues de Ham-
bourg,des marines, le Phare, de M. Ulmann,les
Bretons en costumes de fête, avec des crudités
naïves, des érubescences extraordinaires de
robes et de tabliers, de M. Lucien Simon ; les
effets de lune, gris bleutés et argentés, de M.
Henri Duhem ; une femme on rouge d'une
composition élégante, jolie de naturel, par M.
Georges Desvallières. Ici, tirant l'œil, le por-
trait de Mme la comtesse Mathieu de Noailles,
par Antonio de la Gandara. Cette jeune poé-
tesse, très luxe, dernier bateau, semble plus
perverse que nature. Hiératique, boudinée, une
peu en bois, elle s'érige dans une opacité ver-
dâtre, amante de l'énigme, d'une énigme bien
vêtue et parfumée de quelque odeur barbare.
Serait-ce l'ombre des jours où fleurissent les
hortensias bleus ?
M. Henri Martin se révèle pointilliste con-
vaincu. M. Charles Cottet est surprenant dans
ses sites de Bretague, son étude pour les feux
de la Saict-Jean, sa Femme d'Ouessant tenant
son enfant mort, la tête en est merveilleuse,
et l'arrangement polychrome du tableau a la
saveur d'un primitif. Les toiles de M. Georges
Griveau rappellent Corot, si ce n'est Sisley. Un
pastel de M.: René Ménard, Dernier Rayon,
montre un nuage admirable. La sculpture
compte deux plaquettes bronze d'Alexandre
Charpentier, et de Bartolomé une mère aux
chairs torturées et dont on ne voit pas le vi-
sage, étreignant sa progéniture inanimée. J'ou-
bliais un buste de Charles Celtet, par Constan-
tin Meunier, cet émule 'flamand des trois mai-
tres de l'époque : Rude, Carpeaux, Rodin.
--- Expositions diverses ------
Galerie Caumarlin, le paysagiste Jean Des-
brosses a réuni quarante de ses tableaux. C'est
un sincère qui, loin des coteries et des mon-
dains, a travaillé patiemment et longuement.
Ses vues du terroir natal parleront au cœur
de plus d'un.
Rue de Sèze, troisièma assemblée des Arts
Réunis. On y verra avec intérêt les estampes
gravées sur bois de M. Vibert, les paysages do
MM. Louis Toussaint, Bell anger Thiérot-Dam-
beza, les croquis humoristiques de M. Dowam-
bez, et des porlraits signés Ridel, Lauth, Mo-
nod, Cornillier, etc.
Eugène Carrière "i¡'.
, Je rpgreUe toujours de commenter un artiste
ma~f~ ? ~P P6U .!J! U
rassemblait chez Bernheim quelques-unes de ses
meilleures notations de physionomies, de ces
physionomies lumineux qu'on n'oublie pas,
où los yeux trouent la toile, dont les regards
nous suivent. Je l'ai vraiment compris dès
l'instant où j'ai aperçu chez Jean Dolent celle
admirable créature enténébrée aux chairs ado-
rablement modelées, étendue, joueuse, sur un
lit, et ce faunesque Verlaine, et cette scène de
famille aux trois personnages, Dolent, sa fille,
son chien, que je vais retrouver ici. Depuis,
chez Rodin, chez Gustave Geffroy, chez d'au-
tres amis, j'ai pu suivre l'intention de cette la-
borieuse pensée qui se moque des couleurs, qui
les évoque toutes avec deux seules, du noir et
du blanc, de la lumière et de l'ombre !
Les heureux possesseurs de ces visions les
ont apportées avec joie. Dès l'entrée, voici le
délicieux Enfant au chien, où res. prunelles
ont de si partantes lueurs ; la Scène de famille
chez Dolent, puis le portrait de Verlaine, à
côté d'un Christ en croix spectral, immense,
au flanc duquel Madoleine sanglote dans la
brume. Ici Le Sommeil,la femme prostrée près
de son enfant, le sein tari. Et que de mères,
tremblantes, douloureuses, passionnées, que
d'enfants blottis contre cette chair ardente,
que de baisers, que de caresses, que de
tendresses ! Carrière s'y est complu. La fa-
mille, à chaque heure, l'étreinte maternalle,
en tout lieu, ont exalté sa rêverie, et on com-
prend que c'est sa vie elle-même qu'il a ainsi
transportée, toute chaude, sur la toile, en des
pages poétiques et savantes mémorables.
« Marcelin Gayard », par Léon Frapié
Ce livre est quelque chose de désolant et de
très doux. Dans l'existence de Gayard, tout au
long racontée, depuis la prime enfance, tour à
tour, ouvrier, soldat, commis d'administration,
la lemme joue un rôle prépondérant, maîtresse
ou servante féconde. C'est la mère, demoiselle
affinée qui s'acoquine avec un compagnon ma-
çon, sans le maire, ni le curé, simplement parce
qu'il sut parler à son cœur par sa charité do-
cile; c'est l'épouse, type de ménagère et bouti-
quière parfaite, parangon des verlus économi-
ques, c'est la fille, toute charité, et qui se vend
par charité, c'est Phonsine, la gosseline des
rues, maman des mioches errants, convoitée
des gas en puberté, pauvre roulure par néces-
sité de manger. - -
Une infinie pitié flotte sur ces misères fémi-
nines, qui se dévoilent au jour le jour grosses
de hontes et de pleurs.
Quelles pages poignantes, colles où Margue-
rite, la fille de famille errante dans Paris,
chassée par sa marâtre,se donne à Limouset le
compagnon maçon ! celles où Lucette, l'enfant
de Marcelin, fleur puJique qu'un souffle sem-
ble devoir flétrir, va se livrer moyennant fi-
nances, dans toute l'horreur de son âme, au
riche garçon qui la désire, pour prolonger les
jours de Phonsine agonisante 1
Léon Frapié avait déjà eu, dans l'Institutrice
de province, son premier roman, ce sourire
trempé do larmes sur la détresse dos èves ter-
rassées. Ah ! les pauvres vies, submergées
d'angoisses, de désespoirs muets, d'attentes
vaines, où le moindre éclair d'amour est un
rayon de soleil, un souvenir do paradis 1
L'égoïsme masculin y coule à ploins bords,
emportant les dolentes noyées, sans qu'elles
songent à s'accrocher aux ronces de la rive.
L'Institutrice de province et Marcelin Gayard
sont gonflés de ces tortures renouvelées, d'un
réalisme touchant. Celles qui tient dans le
bonheur y connaîtront des sœurs qu'elles ne
soupçonnaient pas.
.- LÉON RIOTOR.
Mr nento. - Un des nouveaux poètes, M. Fer-
nand Rivet, vient de publier à la Société française
d'imprimerie et de librairie t5, rue de Cluny, un
recueil de poèmes d'intéressante allure, intitulé
Le Passant de la Vie.
L'auteur est partisan de plus de liberté poétique.
Il accepte l'hiatus sans trop de frayeur, et, sans
abandonner les traditions et les règles, s'abandonne
au courant qui pousse la muse à dénouer sa cein-
ture et ses cheveux. — L. R.
——b————ma
Voir à la 31 page
les Dernières Dépêches
de la nuit. et
la Revue des JOurnaux:
du matin
L'OBSTRUCTION
La discussion qui se poursuit à la Chambre
entre bouilleurs et antibouilleurs donne lieu à
do bien tristes spectacles. Au risque de prolon-
ger indéfiniment le vote du budget et de nous
acculer à un nouveau douzième provisoire, les
bouilleurs no reculent devant aucune manœu-
vre : amendements innombrables à chaque ar-
ticle de la loi do finances, introduction dans le
débat particulier do discussions étrangères à la
question, scrutins à la tribune et par appel no-
minal.
A quoi cela les conduira-t il? Il est évident
qu'il y a dès maintenant à la Chambre une
majorité en faveur du projet do M. Rouvier. A
moins d'incidents imprévus, cette majorité qui
déjà a eu maintes fois l'occasion de s'affirmer,
se maintiendra jusqu'au vote final.
Alors, pourquoi persister dans l'obstrtictiont
Est-ce que les lauriers de la Chambre belge
empêchent la Chambre française de dormir ?
On sait que les représentants ont, à propos
du vote récent de l'impôt, siégé pendant 80
heures consécutives. Nos députés sont moins
prodigues de leurs nuits. Mais il entendeDt,par
leur insistance et par leur ténacité, lasser la
majorité. Qu'ils n'y comptent pas.
L'intérêt général de la nation doit primer
les intérêts particuliers des départements et
les intérêts électorax.11 triomphera finalement.
Il ne restera aux obstructionnistes à outrance
que le regret d'avoir gâché un temps précieux
qui eût pu être employé plus utilement par la
Chambre aux réformes urgentes réclamées par
le pays. — L. Armbruster.
NOUVEAUX HUSSARDS TURCS
[Ûe notre correspondant particulierI
Constantinople, 17 février.
Deux nouveaux régiménts de hussards turcs
seront créés dans le villayet de Brousse. On
recrutera les hommes qui los composeront de
préférence dans la tribu dont est sorli le fonda-
teur de la dynastie ollomano.
11 H
UN DÉRAILLEMENT
Sur la ligne du Nord. — À Valenciôn-
nes. - Les victimes
Valenciennes, 17 février.
Le train de Valenciennes à Lille par Orchies,
a déraillé entre Saint-Amand et Rosutt.
Il y a un mort et treize blessés dont neuf lé-
gèrement.
On signale parmi les blessés : -
M. Ravez père, do Saint-Amand, dont l'état
est désespéré. Son fils est également blessé.
M. Laut, tapissier à Valenciennes, a des con-
tusions aux jambes.
Un autre blessé a les deux jambes fractu-
rées.
M. Pellerin, inspecteur principal, a quitté
Lille vers midi, se rendant sur le lieux de
l'accident.
Voici comment s'est produit l'accident :
Le train qui part de Lille à 8 h. 29 et qui
passe par Orchies, venait d'entrer dans la gare !
de liasult et franchisse r&igqjjle lorsque la J
machine s'est détachée du train et a continué
sur la voie libre.
, Le reste du train fut jeté sur une voie de ga-
rage où stationnait. un train do marchan-
dises. Les quatre premiers wagons ont été
broyés.
A la Compagnie du Nord
- A la Compagnie du Nord, à Paris, où nous
avons demandé des renseignements, on nous
affirme qu'il n'y a eu, dans ce déraillement,
que cinq personnes contusionnées. Aucun voya-
geur, d'après les nouvelles reçues à la direc-
tion, ne serait mort ni blessé grièvement.
A LA RECHERCHE D'UN NAIF
Décidément le Français, qui créa le vaude-
ville, n'arrive pas à prendre au sérieux le
martyre des antisémites qui laissent vendre
leurs meubles plutôt que de payer de bonne
grâce leurs impositions.
Aussi nos contribuables récalcitrants se don-
nent-ils maintenant beaucoup de mal pour
sortir à leur avantage do la situation comique
où ils se sont placés.
M. Drumont avait pris le parti d'offrir du
Champagne aux déménageurs chargés de
transporter ses meubles à l'Hôtel dos Ventes.
« Ce fut, écrit M. François Coppée à l'inven-
teur de l'antisémitisme, une manifestation fort
aimable et de gaîlé bien française. » Mais il
faut croire que les déménageurs furent exces-
sifs dans leur gaîté, voire un peu goguenards,
car le poète du Petit Epicier ne tient pas à re-
nouveler la petite fêle. Il écrit — toujours à
M. Drumont :
Il convient, n'est-ce pas, de varier le dénouement
de nos protestations, et voici celui que j'ai ima-
giné. -
Dans quelques jours, je mettrai moi-mêmo en
vente, chez moi, le manuscrit original d'un de mes
ouvrages, le Luthier de Crémone, en y joignant
les papiers, libres et timbrés, du percepteur et de
l'huissier. Cela constituera, me semble-t-il, une
curiosité de nature à exciter les collectionneurs
d'autographes.
Que, d'ici à deux ou trois jonrs, les personnes
qui désireraient assister à la vente de mon manus-
crit aient -:'onc la bonté de m'en avertir par un
mot Je leur ferai savoir le jour et l'heure où cette
veute aura lieu.
La mise à prix sera, naturellement, la somme
peu importante — deux cents francs à peine —
que me réclame le fisc, mais je désire, je vous l'a-
voue, que le prix d'adjudication soit respectable;
car l'excédent — quel qu'il soit — sera immédiate-
ment donné, bien entendu, à une ou doux œuvres
de bienfaisance.
Sans doute l'orgueil d'un vrai poète ne s'ac-
commoderait pas do cet arrangement. Les
écrivains do l'époque héroïque n'aimaient
point, pour leurs livres, le voisinage :du
papier timbré. Avant M. Coppée, nul artiste
n'avait jugé nécessaire à la vente de ses œu-
vres la collaboration du porcepteuret de l'huis-
sier.
Il est assez humiliant pour M. Coppée d'a-
vouer que, sans l'adjonction des feuillets ad-
ministratifs, le manuscrit du Luthier de Cré-
mone ne trouverait pas acquéreur en vente
publique.
Et puis, M. Coppée n'a pas réfléchi à l'ironie
de ceux qui prétendent que, s'il refusait de
payer ses contributions, c'était moins par pa-
triotisme que par. économie.
Les mauvaises langues diront que l'idée de
solder le fisc, grâce à la vente de papiers hors
d'usage, aurait séduit Harpagon.
Enfin, qu'adviendra-t-il de M. Coppée, s'il
ne trouve pas le naïf capable d'acheter deux
cents francs une liasse do sommations avec
frais?
CHEZ MA TANTE"
A propos d'un projet de loi. - La prisée.
— Le trafic des reconnaissances.
L'article que nous avons consacré à l'étude de
la réforme proposée par AI. ratil SI rauss,sénateu r
de la Seine, relalive à la fois à la prisée et aux
avances consenties par le Mont-de-Piélé, nous
a valu un grand nombre de lettres qui, dans
leur ensemble, peuvent se résumer ainsi : Le
public verrait supprimer l'intermédiaire des
commissaires priseurs, pour l'estimation des
objets offerts en nantissement, avec d'autant
plus de plaisir, qu'il serait appelé dans un temps
court à profiler des honoraires considérables
perçus et par la Chambre des commissaires
priseurs et par les quatorze bénéficiaires de
celle prébende.
Mais c'est aussi par la suppression du trafic
ruineux des reconnaissances que le projet de
loi do M. Strauss s'attire les sympathies du
public. La plupart de nos correspondants se
montrent toutefois très sceptiques sur la réali-
sation de cette double réforme, tant de fois
entreprise déjà et qui a toujours échoué. Nous
pouvons les rassurer. Ainsi que nous l'avons
indiqué dans notre article, la ténacité de M.
Strauss, dans les réformes qu'il entreprend,
est un sûr garant de la réussite de celle-ci.
Faisons-nous l'écho, en terminant, d'une ob-
servation fort judicieuse qui caractérise les in-
convénients de la prisée actuelle : les conditions
du prêt portées sur los reconnaissances aver-
tissent les emprunteurs qu'en cas de perte du
nantissement, la valeur en est payée au pro-
priétaire au prix d'estimation fixé lors du dé-
pôt par les commissaires priseurs de l'établis-
sement, et avec l'augmentalion d'un quart en
sus à litre d'indemnité. On reconnaitra que
l'emprunteur est exposé à une perte trop
grande, lorsque cet accident se produit, par
suite dos évaluations systématiques trop infé-
rieures à la valeur réclld;
LA CAVALERIE ALLEMANDE
(De notre correspondant particulierj
Hanovre, 17 février.
De grandes manœuvres de cavalerie auront
lieu, en présence de l'empereur et de plusieurs
souverains allemands, l'été prochain.
Les divisions de cavalerie do plusieurs corps
d'armée seront détachées pour ces manœuvres,
qui auront pour champ d'action la steppe de
Lunebourg.
Mme ROOSEVELT
[De noire correspondant particulieri
r Washington, 17 février.
Mme Roosevelt, femme du président des
Etats-Unis, est gravement malade. Le médecin
de la maison Blanche, a déclaré que la femme
du chef d'Etat a été trop surmenée par les nom-
breuses réceptions et soirées officielles qui ont
été données depuis l'avènement do M. Roose-
velt. Mme Roosevelt est atteinte d'une grave
affection nerveuse. On lui a prescrit un repos
absolu.
CONSEIL DES MINISTRES
- T
Les ministres se sont réunis hier matin à
l'Elysée sous la présidence de M. Loubet.
Tous les ministres assistaient à la séance.
Le conseil a décidé d'approuver en principe
la course d'automobiles projetée pour le
printemps, entre Paris et Madrid, sous la
réserve expresse que toutes les précautions se-
ront prises pour éviter des accidents funestes.
La ministre de l'instruction publique a mis
le conseil au courant des dispositions législa-
tives qu'il se propose de soutenir devant la
Chambre au sujet du traitement et de l'avan-
cement des josliluteurs,
LA - JOURNEE
PARLEMENTAIRE
A LA CHAMBRE
M. Lockroy préside.
Il s'agit de procéder d'abord au scrutin pu",
blie à la tribune sur la demande de disjonction
des articles 18 et 9 de la loi de finances, dépo-
sée par MM. Janet, Camuzet et Lannes de Mon-
tebello.
Sur la demande de plusieurs membres, la
scrutin a lieu par appel nominal.
A la majorité de 253 voix contre 216, la de-
mande de disjonction est repoussée.
M. d'Osmoy déclare qu'il n'acceptera aucune
transaction sur une loi qui équivaut, dit-il, au
rétablissement de l'exorcice.
M. Itouvier. — Mais l'inventaire n'exige au-
cune recherche. ,
M. Lauraine. — Le droit d'inventaire ne
donne pas aux agents de la régie le droit de visiter
le domicile.
M. d'Osmoy insiste.
M. Lauraine. — Il résulte des explications
fournies dans la discussion que le domicile du
bouilleur de cru resterait à l'abri des investiga-
tions de la régie. (Interruptions). Il faut que M.
le ministre des finances s'explique formellement
sur ce point.
M. Rouvier s'explique, une fois de plus, en
termes très nets.
M. Rouvier. - L'administration fera ce qu'il
convient db faire pour le recouvrement de l'impôt.
Il n'y aura pas do visite, s'il n'y a pas de présomp- *
tion de fraude. (Interruptions et réclamations à
droite.)
M. Lauraine. — Ce n'est pas là une garantie
suffisante. D'après ce que vient de dire le ministre
dos finances, le récolement, c'est l'exercice.
M. Rouvier — Le récolement aura lieu dons
les locaux désignés par le bouilleur ; mais, pouc
l'inventaire, l'administration usera des droits que
les lois antérieures lui confèrent.
M. Lauraine. — Je demande que la réserva
des présomptions de fraude soit inscrite dans la loi
et que la visite ait lieu seulement dans des cas
exceptionnels.
M. Rouvier. — Je m'oppose à une rédaction
qui porterait atteinte aux droits de la régie, résul-
tant da la législation antérieure.
M. foincaré — Les lettres anonymes cons-
titueront-elles pour l'administration une présomp-
tion do fraude ?
M. Rouvier. — L'administration continuera
à agir comme au temps où M. Poincaré était lui-
même ministre des finances. (Exclamations à
droite. )
M. Poincaré. — Cette réponse me suffit.
M. Trouiu. — La loi no porte pas atteinte au
privilège des bouilleurs de cru. La réglementation
actuelle n'aggrave pas la loi de 18I6, mais elle ne
la supprime pas. On veut jeter le discrédit sur le
Gouvernement de la République en disant que la
loi crée un impôt nouveau. Il s'agit simplement da,
donner à l'administration les moyens de réprimer
la fraude et de faire rentrer un impôt existant.
(Très bien!)
Je demande à la Chambre d'accepter les combi.
naisons qui lui sont proposées par le contre-projet
de M. Morlot, accepté par le Gouvernement.
Des voix nombreuses à gauche réclament la
clôture. '<
M. Cunéo d'Ornano s'y oppose en vain. M.
Lasies dit qu'il votera, contre l'article. On s'en
doutait. h
Par 302 voix contre 241, le premier para-
graphe de l'article 18 est adopté.
M. Marot retire la disposition additionnelle
qu'il avait présentée avec M. Cunéo d'Ornano,
les explications du gouvernement lui donnant
satisfaction.
M. G. Berry demande la suppression com-
plète de l'allocation familiale.M. Doumer, pré-
sident de la commission, déclare que la com-
mission et le gouvernement repoussent l'amen-
dement de M. G. Berry.
L'amendement de M. G. Berry n'est pay
adopté. ,
M. Lauraine présente l'amendement suivant ;
La faculté de procéder aux inventaires et aux
récolements ci dessus ne donne aux agents des
contributions indirectes que le droit de visiter les
locaux de production et non le domioile des bouil-
leurs de cru.
M. Rouvier. - Je repousse la prise en con-
sidération de cet amendement.
Par 278 voix contre 256, l'amendement n'est
pas pris en considération.
Il y a. sur le deuxième paragraphe de l'ar-
ticle 18, plusieurs amendements. Ce paragra-
phe est ainsi conçu :
Dans le premier cas, ils bénéficient d'nno alloca-
tion en franchise de 10 010, sans que cette alloca-
tion puisse être inférieure à 20 litres d'alcool pur.
M. Lasies présente un amendement tendant
à remplacer la quantité de 20 litres par celle
de 50 litres annuellement.
La commission et le gouvernement repous-
sent l'amendement. ,-.
Par 300 voix contre 245, l'amendement dit
M. Lasies n'est pas pris en considération.
M. Féron, qui demandait la suppression du
paragraphe 2, retire son amendement.
M. Camuzet présente un amendement ten-
dant à porter à 40 litres d'alcool pur la quan-
tité affranchie.
Il propose en outre que l'allocation en fran-
chise accordée aux bouilleurs, dans le cas où
ils acquitteraient immédiatement les droits,
soit plus considérable, pour les inviter à payer
comptant. -.
Le gouvernement et la commission repous-
sent l'amendement.
Par 305 voix contre 229, il est repoussé.
M. Quilboeuf reproche à M. Rouvier d'être
en désaccord avec des paroles prononcées par
lui à l'Assemblée nationale le 4 mars 1875.
M. Rouvier. — Je m'élevais alors contre di-
vers impôts nouveaux, que je qualifiais, en effet,
de « rognures de gros sous », tondis qu'il s'agit
aujourd'hui de faire rentrer les impôts qui existent
et qui ne sont pas payés par ceux qui les doivent.
L'amendement de M. Quilboeuf est repoussti'
par 298 voix contre 248.
Le ronvoi de la discussion est prononcé.
M. Rouvier. — La Chambre a prononcé..
renvoi de la discussion à une prochaine séance.
(Interruptions à droite.)
Je demande que la prochaine séance ait lieu dans
un quart d'heure.
Dans peu de jours, les deux douzièmes provisoi-
res vont être épuisés. Un troisième douzième sera
nécessaire. La majorité républicaine ne doit pas ou-
blier que le budget doit être voté à temps pour que
ce troisième douzième suffise.
Il y aura une majorité pour faire aboutir la loi.
Il faut qu'elle soit obéie. (Très bien 1 très bien 1 à
gauche.)
Par 313 voix contre 25G, la Chambre décide
que la prochaine séance aura lieu dans U-
quart d'heure. —
Deuxième séance
A la reprise de la séance, M. Rouvier dit qu&
la Chambre peut adopter sans discussion le
premier alinéa du paragraphe 3.
M. Rouvier. — La Chambre peu! adoptet-
sans discussion le premier a!inéa du paragraphe 3.
Cet alinéa porte que si les bouilleurs de crq
n'acquittent pas immédiatement les droit*, ils joui-
ront de la déduction ordinaire, sans que cette dé-,
duction puisse être inférieure à 20 litres d'alcool
pur pour la campagne pondant laquelle les eaux-dt:
vie ont été fabriquées.
L'accord est fait sur cet alinéa.
Le second alinéa du 3* paragraphe dit qu'il n.
aura qu'une visite par an chez les bouilleurs qtti>
ne fabriquent pas plus de dix hecitolitres. M. La1
raine a déposé un amendement disant que pour.
1 tout bouilleur il D) aura qu'uu visitgjtajr ABU
.¡.
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1 4, Adresser lettres et illandllls à l'administrateur..,
NOS LEADERS
Le Sénat continue à s'occuper avec
beaucoup d'activité de la réforme de
notre régime militaire. Peu à peu, la
loi sur le service de deux ans prend
corps et il est impossible de ne pas par-
tager la confiance dont témoignait,dans
un de ses derniers articles, notre rédac-
teur en chef.
Voilà encore un soulagement consi-
dérable que le pays en général, et les
classes les moins riches de la nation,
en particulier, vont devoir à la Répu-
blique.
Tous tes intéressés sont convaincus,
d'ailleurs, que le service de deux ans
sera prochainement établi ; et il serait
beaucoup plus difficile à un gouverne-
ment de se refuser à la réforme que
d'en poursuivre l'accomplissement.
C'est la raison du calme avec lequel
le public suit les délibérations du Sé-
nat. Il ne saurait être question d'indif-
férence; et si les adversaires du progrès
qui est en voiederéalisation parvenaient
à mettre en péril le projet dont le Sé-
-nat est saisi, on imagine difficilement
l'émotion qui se manifesterait dans
toutes les familles.
Il est évident que le premier plan de
'l'actualité est pris le plus souvent par
les batailles qui se livrent à la Cham-
bre. Comment ne serait-on pas plus
ému par les luttes auxquelles donne lieu
l'application de la loi sur les associa-
tions, par l'assaut que les républicains,
entourés d'embûches, donnent à la Con-
grégation, que par le paisible dévelop-
pement de la nouvelle loi militaire?
Cependant, nos lecteurs ne nous par-
donneraient pas de ne pas attirer leur
attention sur les détails les plus intéres-
sants de la discussion à laquelle se livre
le Sénat.
La séance d'hier, notamment, a tou-
ché à une quantité de points que tous
ceux qui ont porté ou porteront un fusil
ne voudraient pas ignorer.
Et d'abord, on a beaucoup parlé des
« permissions ». Avec grande rai-
son, le rapporteur avait signalé le
bénéfice que la santé morale du soldat
retirerait de fréquentes visites à sa fa-
mille. m
C'est une idée que les militaires de la
vieille école ont du mal à se mettre
dans la tête. A leurs yeux, le « bleu »
qui arrive à la caserne, doit perdre tout
souvenir de sa -vie passée, il doit es-
sayer de se transformer, corps et âme;
il était un civil, il devient un soldat.
Qui n'a entendu les adjudants crier aux
jeunes soldats : « Ah ! Cà.! Vous pen-
sez à votre payse ? » Grave tort, en
effet, que de se souvenir, quand on est
« sous les drapeaux », de ce qui vous
fut cher avant l'entrée à la caserne !
Il est bien possible que pour les soldats
des armées de métier, il y eût avantage
à oublier la « payse », ainsi que la fa-
mille. Un homme qui donne sept ou dix
ans de sa vie au métier des armes, tom-
berait vite dans un déplorable état de
mélancolie s'il donnait trop de sa pensée
* à ceux dont il sera si longtemps séparé.
Mais le soldat d'aujourd'hui, même
quand il a trois ans « à tirer »; mais le
soldat de demain, qui fera deux ans
d'instruction militaire, pourquoi vou-
lez-vous qu'il arrache de son cœur des
affections qu'il n'a pas quittées sans
espoir de retour ?
— Allons! reprennent les partisans
de l' « école de fer », nos conscrits peu-
vent être appelés à faire campagne,
pendant des mois, pendant des années
peut-être. Iraient-ils se reposer en per-
mission chez leurs vieux parents ?
Ce serait une étrange conception du
cœur humain que de juger de l'état
d'esprit du soldat qui marche à la fron-
tière, par les sentiments du jeune homme
qui apprend, à tout hasard, à se servir
d'un fusil.
On sacrifie la joie de se trouver au
milieu des siens à la joie héroïque de
sauver la patrie. Mais j'approuve fort
le soldat qui préfère passer une journée
chez lui que de flâner seize ou dix-huit
heures dans la cour d'une caserne.
La loi dont le Sénat achève l'étude
prévoit que des permissions pourront
être accordées aux troupiers chaque di-
manche, chaque jour férié ; cela sans
préjudice d'une trentaine de jours de
congé pendant la durée du service.
Il s'agit d un maximum ; beaucoup de
bons esprits voudraient que ce fût un
minimum. Les pires réactionnaires
avouent que le repos hebdomadaire est
indispensable à l'ouvrier; parce que
l'ouvrier revêt une culotte rouge, ses
besoins matériels et intellectuels ne'de-
viennent pas moins exigeants. Et un
surplus d'un demi-mois de congé par
an n'a rien d'excessif.
Un principe dont il faudrait à tout
prix se débarrasser est celui que quel-
qu'un — le commissaire du gouverne-
ment, je crois — formulait encore hier
sous cette forme : a Les permissions ne
sont pas un droit pour le soldat, mais
une faveur. » Cette pensée, dans la bou-
che d'un autre orateur, prenait cette
forme : « Les permissions sont utiles
pour récompenser les bons-soldats et
pour punir les mauvais. » *
Nous ne pouvons souscrire à cette
opinion. Le mauvais soldat, indisci-
pliné, révolté aigri, couYaiocu qu'il
est la victime de mille injustices, est
celui à qui une journée de détente mo-
rale est le plus nécessaire. Il
L'en priver, c'est risquer de l'exaspé-
rer, de le pousser à des coups de tête
dont il sera la première victime.
Le Sénat, quand viendra la deuxième
délibération sur la proposition Rolland,
et la Chambre, quand elle recevra la
proposition à son tour, devraient re-
connaître au soldat le « droit à la per-
mission. »
Une mesure du même genre, encore
plus importante, et qu'il est urgent de
prendre, c'est la suppression du « ra-
biot ».
La volonté du citoyen armé risque de
se briser sous la pression brutale de la
discipline. Des soupapes sont néces-
saires.
Hugues Destrem.
UNE MANŒUVRE
Toujours cette sempiternelle
question des bouilleurs de cru.
Leurs représentants sont insa
tiables et cela justifie ce que
je disais l'autre jour à propos
des batailles d'intérêts qui sou-
lèvent à la Chambre plus d'é-
motion que si nous étions en révolution.
Plus on leur fait de concessions, plus ils
déploient d'ardeur. Il semblerait résulter
de cela que le ministre a tort de leur pro-
poser des transactions. Car s'ils acceptent
ces transactions, ils ne prennent aucun en-
gagement de leur côté. Mais nous devi-
nons très bien ce que fera Rouvier qui con-
duit toute cette discussion avec un talent,
une vigueur et une maëstria auxquels tout
le monde applaudit.
, Il veut avoir une statistique de l'alcool,
évidemment. Et l'on verra l'an prochain
comment punir sérieusement les fraudeurs.
Quant aux 20 ou 25 millions que les con-
cessions qu'il a faites enlèvent au budget,
je me fie à lui pour les trouver.
En attendant et alors que tous nous
croyions que l'opposition des bouilleurs de
cru allait à peu près cesser, elle a repris
plus vive et plus irréconciliable que ja-
mais. Ils s'étaient entendus avec quelques
membres de la commission du budget. Ils
voulaient bien accepter un inventaire,après
la promulgation de la loi, des quantités
d'alcool existant chez les bouilleurs de cru,
mais ils n'en voulaient plus d'autre ensuite.
C'était l'inventaire in mternum, après quoi
la fraude pourrait s'exercer aussi large-
ment que possible à la barbe du fisc.
- Rouvier a exigé avec une énergie éton-
nante un inventaire tous les ans, après la
récolte, après la distillation, sans préjudice
de l'inventaire après la promulgation de la
loi, plus un récolement après la première
campagne. C'est le seul moyen de prévenir,
en partie seulement, la fraude.
Notre ami Berteaux, que tout le monde
estime à la Chambre, car c'est bien le meil-
leur homme du monde, sympathique, tra-
vailleur, ayant beaucoup de talent, a com-
battu Rouvier. Incontestablement, lui était
de bonne foi, et personne n'en pourrait
douter. Mais il a des bouilleurs de cru dans
sa circonscription. Il s'est dédoublé, parce
qu'il s'est un peu emballé. Il a peut-être
un moment oublié qu'il était rapporteur
général pour redevenir simple député de
Seine et-Oise. Aussi, les bouilleurs, ravis
de ce concours inattendu, en ont-ils profité
pour tenter une manœuvre contre Rouvier.
Ils l'ont accusé de renier ses engagements,
d'introduire l'exercice chez les cultivateurs,
etc., etc. Fort heureusement, la Chambre
était dans un de ses bons jours. Elle a battu
les bouilleurs à 50 voix, et, admirez le tra-
vail parlementaire, nous avons voté, pour
faire avorter la manœuvre des bouilleurs,
un amendement Lauraine dispensant de la
visite les bouilleurs de cru qui fabriquent
moins de 10 hectolitres d'alcool. C'est une
jolie marge.
Voilà bien où mènent ces causes indé-
fendables. Berteaux, qui est un convaincu
passionné a employé tous les arguments
possibles pour faire échouer l'amendement,
et il ne s'est pas aperçu que par la même
occasion, il mettait ces mêmes arguments
à la disposition des adversaires les plus
acharnés de l'impôtglobal et progressif sur
le revenu axec taxation et déclaration. En-
fin, nous ne sommes heureusement pas à
la veille de la discussion de cette réforme.
— Ch. B.
P.-s. — Je reçois la lettre suivante que je
livre aux méditations de nos lecteurs :
« C'est un employé des contributions indi-
rectes qui vous écrit pour vous dire que dans
les départements de l'ouest, la fraude n'est pas
pratiquée par une partie de la population qui
habite les campagnes ou les villes sans octroi,
mais bien par toute la population. On s'appro-
visionne chez les cultivateurs (bouilleurs de
cru) avec la plus grande facilité, et la fraude se
fait sur une si vaste échelle que si l'adminis-
tration des contributions indirectes ordonnait
des visites chez les habitants non récoltants
(en vertu d'un article 237 de la loi de 1816) on
trouverait partout dans leurs domiciles des
eaux-de vie introduites sans aucun paiement
des droits.
« Et avec la législation actuelle, cous som-
mes impuissants à réprimer cette fraude, qui
est la ruine de l'impôt, et je puis dire aussi de
la santé. Les législateurs peuvent dire que si
le cléricalisme est l'ennemi de la liberté, le pri-
vilège des bouilleurs de cru est encore un plus
grand ennemi de l'impôt sur l'alcool et de la
santé publique. »
LA MAFFIA EN PRUSSE -
LA MAFFIA EN PRUSSE -
(De noire correspondant particulier)
Posen, 17 février.
Le premier président de la province de Po-
sen, M. Bitter, vient de donner sa démission:
en invoquant comme motif que les derniers
événements l'ont ému au point de compromet-
tre gravement sa santé. Il convient de rappeler
à ce propos que l'opinion publique a reproché
à M. Bilter de ne pas avoir défendu M. von
Willich, son subordonné hiérarchique, qui, on
se le rappelle, par les menées de la Maffia mi-
litariste, a été poussé au suicide. M. Biller. est
tout au plus Coupable de manque de courage
civique. Il n'osait rien faire pour la défense du
malheureux M. von Willich, car il ne savait
que trop à quel point la coterie militariste
était soutenue, aï ev SLuelgjiiitfs DersonojK
;&:t! : - -.
LE RAPPEL
ARTISTIQUE ET LITTÉRAIRE'
Les femmes du monde au Grand-Palais.
- La Société nouvelle. — Exposi-
tions diverses. — Eugène Car-
rière" - Léonrapié, roman-
cier féministe
L'Union des Femmes peintres et sculpteurs
règne en ce moment au Grand-Palais dos
Champs-Elysées. Cette assemblée, faible et
chancelante hier encore, s'affirme et prend des
forces. Comme toutes los associations où l'indi-
vidu a peu de puissance par lui-même, où ce
n'est que l'amalgame des relations, des in-
fluences, de l'argent qui parviendra à donner
droit de cité, cette union s'abrite sous les aus-
pices,non du lalent, un talent incontesté, ce se-
rait difficile, mais d'un modèle de noblesse et
de mondanité. Et c'est de la duchesse douai-
rière d'Uzès, celle « qui voyait grand », qu'il
s'agit.
Elle compte aujourd'hui plus de 400 socié-
taires, dont une vingtaine ont pu affirmer
quelque talent. Ici 1,300 tableaux et 50 sculp-
tures occupent 10 salles. Les accessoires sont
mieux que les cimaises. On peut causer et s'as-
seoir, ce dont ne se font pas faule les légions
féminines accourues à l'appel de leurs amies —
pour en dire beaucoup de bien, ma chère. t
Fleurs et plumes -,
Les femmes peintres excellent dans la fleur,
quelques-unes dans l'enfant, dans l'espiègle
fleur humaine qui s'éveille et qui joue. Elles
ont de la délicatesse et du goût. Pour celles
dont le talent véritable peut rivaliser avec ce-
lui de leurs congénères masculins et embrasser
tous les genres, elles sont rares, toujours les
mêmes, et on les retrouve avec plaisir à cha-
que exposition. Et toujours en progrès. Des in-
térieurs de Mmes Peytel et Garnot-Beaupère,
une Cuisine normande de Mme Bergerot, et,
hors pair, deux grandes toiles, Crépuscule de
juin à Venise et Brumes du matin en Hollande,
de Mme Mauny Adam. ,
Jamais on n'aima l'enfant comme Mme
Boyer-Breton. On n'a pas oublié ceux qu'elle
nous montra, jouant dans les sables chauds,
ou pendus aux jupons de leur mère. Sa figure
de jeune fille, blottie derrière les Lys, est d'un
agréable sentiment. Dans les portraits, admi-
rons sans restriction la Princesse Argondona,
de Mme de Wentworth, et,de Mlle Louise Lav-
rut, une jeune personne on toilette de salin
blanc,assise dans un parc.Les pastels do Mmes
Huillard et Vallet sont élégants.
Des fleurs, des touffes, des brassées do fleurs,
ivoirines, incarnadines, orgueilleuses de leur
rosée, ou, d'avoir trop brillé,courbées mouran-
tes sur leurs tiges lasses, Mmes Salard,
Ponsard, Dury-Vasselon en ont apporté.
Ce sont des roses,des pa3seroses, des horten-
sias, tout l'éventaire du jardin. Des études do
nu sont à remarquer, celles de Mme Landré,
avec des chairs appétissantes où l'amour vou-
drait mordre, sa Femme au mirait, provocante
en sa simplicité. Aussi une Rêverie de Mlle Ca-
nuet. Où vont les songes des jeunes femmes 1
Aux robes, aux fêtes, aux amants. Et rien n'est
si gracieux que de rêver ainsi. Mme Caire nous
montre une Femme d sa toilette. C'est me des
heures favorites de la matinée, les lumières
sont propices à l'arrangement du teint et des
séductions. Le passant, jeune ou vieux, secoué
par une foule de soie et de parfuma, assiste non
sans plaisir à cette séance do coquollerie. -
La sculpture a toujours été plus incolore en-
core dans ces encombrements d'art mixte. La
femme y demeure menue, inapte à remuer les
blocs de glaise qui font les athlètes. Sa concep-
tion de l'armature humaine reste gracieuse,
sinon fausse. Pourtant, comme en peinture,
des progrès, dos choses meilleures, un bronze
doré de Mme Laure Coulan-Montorgueuil.des
femmes nues de Mme Fauny-Marc, un buste de
Nielzche, curieux, de Mme do Frumerie, qui
nous étonnera demain.
Société nouvelle de peintres et sculp-
teurs
Cette petite société, choisie et de haut goût,
présidée par M. Gabriel Mourey, occupe les
galeries Durand-Ruel, du 14 février au 7 mars.
Dès l'abord, on se sent chez des artistes
conscients de leur valeur. Les panneaux sont
composés sobrement. Voici d'abord celui où
règnent M. Jacques Blanche et ses portraits,
Claude Debussy, admirablement modelé, su-
perbe d'expression, voisinant avec une douce
tête de femme.A droite le Flamand Emile Claus
et ses pommiers en fleur, sa Maison rose, son
Printemps, fin, joli de couleur, et des pas-
tels.
M. Henry Caro-Delvaille, dont le vous ai
parlé à propos de son exposition chez Silber-
berg, continue sa symphonie des noirs et
blancs. M. René Prinet apporte une curieuse
Bibliothèque, et l'osquisse de La Sonate à Kreut-
zer vue au Champ de Mars. M. Daucbez aime
la Bretagne, les bords salins, les villages dans
les dunes. Le Mouillage, au coucher du soleil,
est d'une intense poésie.
Dans les pièces suivantes, les vues de Ham-
bourg,des marines, le Phare, de M. Ulmann,les
Bretons en costumes de fête, avec des crudités
naïves, des érubescences extraordinaires de
robes et de tabliers, de M. Lucien Simon ; les
effets de lune, gris bleutés et argentés, de M.
Henri Duhem ; une femme on rouge d'une
composition élégante, jolie de naturel, par M.
Georges Desvallières. Ici, tirant l'œil, le por-
trait de Mme la comtesse Mathieu de Noailles,
par Antonio de la Gandara. Cette jeune poé-
tesse, très luxe, dernier bateau, semble plus
perverse que nature. Hiératique, boudinée, une
peu en bois, elle s'érige dans une opacité ver-
dâtre, amante de l'énigme, d'une énigme bien
vêtue et parfumée de quelque odeur barbare.
Serait-ce l'ombre des jours où fleurissent les
hortensias bleus ?
M. Henri Martin se révèle pointilliste con-
vaincu. M. Charles Cottet est surprenant dans
ses sites de Bretague, son étude pour les feux
de la Saict-Jean, sa Femme d'Ouessant tenant
son enfant mort, la tête en est merveilleuse,
et l'arrangement polychrome du tableau a la
saveur d'un primitif. Les toiles de M. Georges
Griveau rappellent Corot, si ce n'est Sisley. Un
pastel de M.: René Ménard, Dernier Rayon,
montre un nuage admirable. La sculpture
compte deux plaquettes bronze d'Alexandre
Charpentier, et de Bartolomé une mère aux
chairs torturées et dont on ne voit pas le vi-
sage, étreignant sa progéniture inanimée. J'ou-
bliais un buste de Charles Celtet, par Constan-
tin Meunier, cet émule 'flamand des trois mai-
tres de l'époque : Rude, Carpeaux, Rodin.
--- Expositions diverses ------
Galerie Caumarlin, le paysagiste Jean Des-
brosses a réuni quarante de ses tableaux. C'est
un sincère qui, loin des coteries et des mon-
dains, a travaillé patiemment et longuement.
Ses vues du terroir natal parleront au cœur
de plus d'un.
Rue de Sèze, troisièma assemblée des Arts
Réunis. On y verra avec intérêt les estampes
gravées sur bois de M. Vibert, les paysages do
MM. Louis Toussaint, Bell anger Thiérot-Dam-
beza, les croquis humoristiques de M. Dowam-
bez, et des porlraits signés Ridel, Lauth, Mo-
nod, Cornillier, etc.
Eugène Carrière "i¡'.
, Je rpgreUe toujours de commenter un artiste
ma~f~ ? ~P P6U .!J! U
rassemblait chez Bernheim quelques-unes de ses
meilleures notations de physionomies, de ces
physionomies lumineux qu'on n'oublie pas,
où los yeux trouent la toile, dont les regards
nous suivent. Je l'ai vraiment compris dès
l'instant où j'ai aperçu chez Jean Dolent celle
admirable créature enténébrée aux chairs ado-
rablement modelées, étendue, joueuse, sur un
lit, et ce faunesque Verlaine, et cette scène de
famille aux trois personnages, Dolent, sa fille,
son chien, que je vais retrouver ici. Depuis,
chez Rodin, chez Gustave Geffroy, chez d'au-
tres amis, j'ai pu suivre l'intention de cette la-
borieuse pensée qui se moque des couleurs, qui
les évoque toutes avec deux seules, du noir et
du blanc, de la lumière et de l'ombre !
Les heureux possesseurs de ces visions les
ont apportées avec joie. Dès l'entrée, voici le
délicieux Enfant au chien, où res. prunelles
ont de si partantes lueurs ; la Scène de famille
chez Dolent, puis le portrait de Verlaine, à
côté d'un Christ en croix spectral, immense,
au flanc duquel Madoleine sanglote dans la
brume. Ici Le Sommeil,la femme prostrée près
de son enfant, le sein tari. Et que de mères,
tremblantes, douloureuses, passionnées, que
d'enfants blottis contre cette chair ardente,
que de baisers, que de caresses, que de
tendresses ! Carrière s'y est complu. La fa-
mille, à chaque heure, l'étreinte maternalle,
en tout lieu, ont exalté sa rêverie, et on com-
prend que c'est sa vie elle-même qu'il a ainsi
transportée, toute chaude, sur la toile, en des
pages poétiques et savantes mémorables.
« Marcelin Gayard », par Léon Frapié
Ce livre est quelque chose de désolant et de
très doux. Dans l'existence de Gayard, tout au
long racontée, depuis la prime enfance, tour à
tour, ouvrier, soldat, commis d'administration,
la lemme joue un rôle prépondérant, maîtresse
ou servante féconde. C'est la mère, demoiselle
affinée qui s'acoquine avec un compagnon ma-
çon, sans le maire, ni le curé, simplement parce
qu'il sut parler à son cœur par sa charité do-
cile; c'est l'épouse, type de ménagère et bouti-
quière parfaite, parangon des verlus économi-
ques, c'est la fille, toute charité, et qui se vend
par charité, c'est Phonsine, la gosseline des
rues, maman des mioches errants, convoitée
des gas en puberté, pauvre roulure par néces-
sité de manger. - -
Une infinie pitié flotte sur ces misères fémi-
nines, qui se dévoilent au jour le jour grosses
de hontes et de pleurs.
Quelles pages poignantes, colles où Margue-
rite, la fille de famille errante dans Paris,
chassée par sa marâtre,se donne à Limouset le
compagnon maçon ! celles où Lucette, l'enfant
de Marcelin, fleur puJique qu'un souffle sem-
ble devoir flétrir, va se livrer moyennant fi-
nances, dans toute l'horreur de son âme, au
riche garçon qui la désire, pour prolonger les
jours de Phonsine agonisante 1
Léon Frapié avait déjà eu, dans l'Institutrice
de province, son premier roman, ce sourire
trempé do larmes sur la détresse dos èves ter-
rassées. Ah ! les pauvres vies, submergées
d'angoisses, de désespoirs muets, d'attentes
vaines, où le moindre éclair d'amour est un
rayon de soleil, un souvenir do paradis 1
L'égoïsme masculin y coule à ploins bords,
emportant les dolentes noyées, sans qu'elles
songent à s'accrocher aux ronces de la rive.
L'Institutrice de province et Marcelin Gayard
sont gonflés de ces tortures renouvelées, d'un
réalisme touchant. Celles qui tient dans le
bonheur y connaîtront des sœurs qu'elles ne
soupçonnaient pas.
.- LÉON RIOTOR.
Mr nento. - Un des nouveaux poètes, M. Fer-
nand Rivet, vient de publier à la Société française
d'imprimerie et de librairie t5, rue de Cluny, un
recueil de poèmes d'intéressante allure, intitulé
Le Passant de la Vie.
L'auteur est partisan de plus de liberté poétique.
Il accepte l'hiatus sans trop de frayeur, et, sans
abandonner les traditions et les règles, s'abandonne
au courant qui pousse la muse à dénouer sa cein-
ture et ses cheveux. — L. R.
——b————ma
Voir à la 31 page
les Dernières Dépêches
de la nuit. et
la Revue des JOurnaux:
du matin
L'OBSTRUCTION
La discussion qui se poursuit à la Chambre
entre bouilleurs et antibouilleurs donne lieu à
do bien tristes spectacles. Au risque de prolon-
ger indéfiniment le vote du budget et de nous
acculer à un nouveau douzième provisoire, les
bouilleurs no reculent devant aucune manœu-
vre : amendements innombrables à chaque ar-
ticle de la loi do finances, introduction dans le
débat particulier do discussions étrangères à la
question, scrutins à la tribune et par appel no-
minal.
A quoi cela les conduira-t il? Il est évident
qu'il y a dès maintenant à la Chambre une
majorité en faveur du projet do M. Rouvier. A
moins d'incidents imprévus, cette majorité qui
déjà a eu maintes fois l'occasion de s'affirmer,
se maintiendra jusqu'au vote final.
Alors, pourquoi persister dans l'obstrtictiont
Est-ce que les lauriers de la Chambre belge
empêchent la Chambre française de dormir ?
On sait que les représentants ont, à propos
du vote récent de l'impôt, siégé pendant 80
heures consécutives. Nos députés sont moins
prodigues de leurs nuits. Mais il entendeDt,par
leur insistance et par leur ténacité, lasser la
majorité. Qu'ils n'y comptent pas.
L'intérêt général de la nation doit primer
les intérêts particuliers des départements et
les intérêts électorax.11 triomphera finalement.
Il ne restera aux obstructionnistes à outrance
que le regret d'avoir gâché un temps précieux
qui eût pu être employé plus utilement par la
Chambre aux réformes urgentes réclamées par
le pays. — L. Armbruster.
NOUVEAUX HUSSARDS TURCS
[Ûe notre correspondant particulierI
Constantinople, 17 février.
Deux nouveaux régiménts de hussards turcs
seront créés dans le villayet de Brousse. On
recrutera les hommes qui los composeront de
préférence dans la tribu dont est sorli le fonda-
teur de la dynastie ollomano.
11 H
UN DÉRAILLEMENT
Sur la ligne du Nord. — À Valenciôn-
nes. - Les victimes
Valenciennes, 17 février.
Le train de Valenciennes à Lille par Orchies,
a déraillé entre Saint-Amand et Rosutt.
Il y a un mort et treize blessés dont neuf lé-
gèrement.
On signale parmi les blessés : -
M. Ravez père, do Saint-Amand, dont l'état
est désespéré. Son fils est également blessé.
M. Laut, tapissier à Valenciennes, a des con-
tusions aux jambes.
Un autre blessé a les deux jambes fractu-
rées.
M. Pellerin, inspecteur principal, a quitté
Lille vers midi, se rendant sur le lieux de
l'accident.
Voici comment s'est produit l'accident :
Le train qui part de Lille à 8 h. 29 et qui
passe par Orchies, venait d'entrer dans la gare !
de liasult et franchisse r&igqjjle lorsque la J
machine s'est détachée du train et a continué
sur la voie libre.
, Le reste du train fut jeté sur une voie de ga-
rage où stationnait. un train do marchan-
dises. Les quatre premiers wagons ont été
broyés.
A la Compagnie du Nord
- A la Compagnie du Nord, à Paris, où nous
avons demandé des renseignements, on nous
affirme qu'il n'y a eu, dans ce déraillement,
que cinq personnes contusionnées. Aucun voya-
geur, d'après les nouvelles reçues à la direc-
tion, ne serait mort ni blessé grièvement.
A LA RECHERCHE D'UN NAIF
Décidément le Français, qui créa le vaude-
ville, n'arrive pas à prendre au sérieux le
martyre des antisémites qui laissent vendre
leurs meubles plutôt que de payer de bonne
grâce leurs impositions.
Aussi nos contribuables récalcitrants se don-
nent-ils maintenant beaucoup de mal pour
sortir à leur avantage do la situation comique
où ils se sont placés.
M. Drumont avait pris le parti d'offrir du
Champagne aux déménageurs chargés de
transporter ses meubles à l'Hôtel dos Ventes.
« Ce fut, écrit M. François Coppée à l'inven-
teur de l'antisémitisme, une manifestation fort
aimable et de gaîlé bien française. » Mais il
faut croire que les déménageurs furent exces-
sifs dans leur gaîté, voire un peu goguenards,
car le poète du Petit Epicier ne tient pas à re-
nouveler la petite fêle. Il écrit — toujours à
M. Drumont :
Il convient, n'est-ce pas, de varier le dénouement
de nos protestations, et voici celui que j'ai ima-
giné. -
Dans quelques jours, je mettrai moi-mêmo en
vente, chez moi, le manuscrit original d'un de mes
ouvrages, le Luthier de Crémone, en y joignant
les papiers, libres et timbrés, du percepteur et de
l'huissier. Cela constituera, me semble-t-il, une
curiosité de nature à exciter les collectionneurs
d'autographes.
Que, d'ici à deux ou trois jonrs, les personnes
qui désireraient assister à la vente de mon manus-
crit aient -:'onc la bonté de m'en avertir par un
mot Je leur ferai savoir le jour et l'heure où cette
veute aura lieu.
La mise à prix sera, naturellement, la somme
peu importante — deux cents francs à peine —
que me réclame le fisc, mais je désire, je vous l'a-
voue, que le prix d'adjudication soit respectable;
car l'excédent — quel qu'il soit — sera immédiate-
ment donné, bien entendu, à une ou doux œuvres
de bienfaisance.
Sans doute l'orgueil d'un vrai poète ne s'ac-
commoderait pas do cet arrangement. Les
écrivains do l'époque héroïque n'aimaient
point, pour leurs livres, le voisinage :du
papier timbré. Avant M. Coppée, nul artiste
n'avait jugé nécessaire à la vente de ses œu-
vres la collaboration du porcepteuret de l'huis-
sier.
Il est assez humiliant pour M. Coppée d'a-
vouer que, sans l'adjonction des feuillets ad-
ministratifs, le manuscrit du Luthier de Cré-
mone ne trouverait pas acquéreur en vente
publique.
Et puis, M. Coppée n'a pas réfléchi à l'ironie
de ceux qui prétendent que, s'il refusait de
payer ses contributions, c'était moins par pa-
triotisme que par. économie.
Les mauvaises langues diront que l'idée de
solder le fisc, grâce à la vente de papiers hors
d'usage, aurait séduit Harpagon.
Enfin, qu'adviendra-t-il de M. Coppée, s'il
ne trouve pas le naïf capable d'acheter deux
cents francs une liasse do sommations avec
frais?
CHEZ MA TANTE"
A propos d'un projet de loi. - La prisée.
— Le trafic des reconnaissances.
L'article que nous avons consacré à l'étude de
la réforme proposée par AI. ratil SI rauss,sénateu r
de la Seine, relalive à la fois à la prisée et aux
avances consenties par le Mont-de-Piélé, nous
a valu un grand nombre de lettres qui, dans
leur ensemble, peuvent se résumer ainsi : Le
public verrait supprimer l'intermédiaire des
commissaires priseurs, pour l'estimation des
objets offerts en nantissement, avec d'autant
plus de plaisir, qu'il serait appelé dans un temps
court à profiler des honoraires considérables
perçus et par la Chambre des commissaires
priseurs et par les quatorze bénéficiaires de
celle prébende.
Mais c'est aussi par la suppression du trafic
ruineux des reconnaissances que le projet de
loi do M. Strauss s'attire les sympathies du
public. La plupart de nos correspondants se
montrent toutefois très sceptiques sur la réali-
sation de cette double réforme, tant de fois
entreprise déjà et qui a toujours échoué. Nous
pouvons les rassurer. Ainsi que nous l'avons
indiqué dans notre article, la ténacité de M.
Strauss, dans les réformes qu'il entreprend,
est un sûr garant de la réussite de celle-ci.
Faisons-nous l'écho, en terminant, d'une ob-
servation fort judicieuse qui caractérise les in-
convénients de la prisée actuelle : les conditions
du prêt portées sur los reconnaissances aver-
tissent les emprunteurs qu'en cas de perte du
nantissement, la valeur en est payée au pro-
priétaire au prix d'estimation fixé lors du dé-
pôt par les commissaires priseurs de l'établis-
sement, et avec l'augmentalion d'un quart en
sus à litre d'indemnité. On reconnaitra que
l'emprunteur est exposé à une perte trop
grande, lorsque cet accident se produit, par
suite dos évaluations systématiques trop infé-
rieures à la valeur réclld;
LA CAVALERIE ALLEMANDE
(De notre correspondant particulierj
Hanovre, 17 février.
De grandes manœuvres de cavalerie auront
lieu, en présence de l'empereur et de plusieurs
souverains allemands, l'été prochain.
Les divisions de cavalerie do plusieurs corps
d'armée seront détachées pour ces manœuvres,
qui auront pour champ d'action la steppe de
Lunebourg.
Mme ROOSEVELT
[De noire correspondant particulieri
r Washington, 17 février.
Mme Roosevelt, femme du président des
Etats-Unis, est gravement malade. Le médecin
de la maison Blanche, a déclaré que la femme
du chef d'Etat a été trop surmenée par les nom-
breuses réceptions et soirées officielles qui ont
été données depuis l'avènement do M. Roose-
velt. Mme Roosevelt est atteinte d'une grave
affection nerveuse. On lui a prescrit un repos
absolu.
CONSEIL DES MINISTRES
- T
Les ministres se sont réunis hier matin à
l'Elysée sous la présidence de M. Loubet.
Tous les ministres assistaient à la séance.
Le conseil a décidé d'approuver en principe
la course d'automobiles projetée pour le
printemps, entre Paris et Madrid, sous la
réserve expresse que toutes les précautions se-
ront prises pour éviter des accidents funestes.
La ministre de l'instruction publique a mis
le conseil au courant des dispositions législa-
tives qu'il se propose de soutenir devant la
Chambre au sujet du traitement et de l'avan-
cement des josliluteurs,
LA - JOURNEE
PARLEMENTAIRE
A LA CHAMBRE
M. Lockroy préside.
Il s'agit de procéder d'abord au scrutin pu",
blie à la tribune sur la demande de disjonction
des articles 18 et 9 de la loi de finances, dépo-
sée par MM. Janet, Camuzet et Lannes de Mon-
tebello.
Sur la demande de plusieurs membres, la
scrutin a lieu par appel nominal.
A la majorité de 253 voix contre 216, la de-
mande de disjonction est repoussée.
M. d'Osmoy déclare qu'il n'acceptera aucune
transaction sur une loi qui équivaut, dit-il, au
rétablissement de l'exorcice.
M. Itouvier. — Mais l'inventaire n'exige au-
cune recherche. ,
M. Lauraine. — Le droit d'inventaire ne
donne pas aux agents de la régie le droit de visiter
le domicile.
M. d'Osmoy insiste.
M. Lauraine. — Il résulte des explications
fournies dans la discussion que le domicile du
bouilleur de cru resterait à l'abri des investiga-
tions de la régie. (Interruptions). Il faut que M.
le ministre des finances s'explique formellement
sur ce point.
M. Rouvier s'explique, une fois de plus, en
termes très nets.
M. Rouvier. - L'administration fera ce qu'il
convient db faire pour le recouvrement de l'impôt.
Il n'y aura pas do visite, s'il n'y a pas de présomp- *
tion de fraude. (Interruptions et réclamations à
droite.)
M. Lauraine. — Ce n'est pas là une garantie
suffisante. D'après ce que vient de dire le ministre
dos finances, le récolement, c'est l'exercice.
M. Rouvier — Le récolement aura lieu dons
les locaux désignés par le bouilleur ; mais, pouc
l'inventaire, l'administration usera des droits que
les lois antérieures lui confèrent.
M. Lauraine. — Je demande que la réserva
des présomptions de fraude soit inscrite dans la loi
et que la visite ait lieu seulement dans des cas
exceptionnels.
M. Rouvier. — Je m'oppose à une rédaction
qui porterait atteinte aux droits de la régie, résul-
tant da la législation antérieure.
M. foincaré — Les lettres anonymes cons-
titueront-elles pour l'administration une présomp-
tion do fraude ?
M. Rouvier. — L'administration continuera
à agir comme au temps où M. Poincaré était lui-
même ministre des finances. (Exclamations à
droite. )
M. Poincaré. — Cette réponse me suffit.
M. Trouiu. — La loi no porte pas atteinte au
privilège des bouilleurs de cru. La réglementation
actuelle n'aggrave pas la loi de 18I6, mais elle ne
la supprime pas. On veut jeter le discrédit sur le
Gouvernement de la République en disant que la
loi crée un impôt nouveau. Il s'agit simplement da,
donner à l'administration les moyens de réprimer
la fraude et de faire rentrer un impôt existant.
(Très bien!)
Je demande à la Chambre d'accepter les combi.
naisons qui lui sont proposées par le contre-projet
de M. Morlot, accepté par le Gouvernement.
Des voix nombreuses à gauche réclament la
clôture. '<
M. Cunéo d'Ornano s'y oppose en vain. M.
Lasies dit qu'il votera, contre l'article. On s'en
doutait. h
Par 302 voix contre 241, le premier para-
graphe de l'article 18 est adopté.
M. Marot retire la disposition additionnelle
qu'il avait présentée avec M. Cunéo d'Ornano,
les explications du gouvernement lui donnant
satisfaction.
M. G. Berry demande la suppression com-
plète de l'allocation familiale.M. Doumer, pré-
sident de la commission, déclare que la com-
mission et le gouvernement repoussent l'amen-
dement de M. G. Berry.
L'amendement de M. G. Berry n'est pay
adopté. ,
M. Lauraine présente l'amendement suivant ;
La faculté de procéder aux inventaires et aux
récolements ci dessus ne donne aux agents des
contributions indirectes que le droit de visiter les
locaux de production et non le domioile des bouil-
leurs de cru.
M. Rouvier. - Je repousse la prise en con-
sidération de cet amendement.
Par 278 voix contre 256, l'amendement n'est
pas pris en considération.
Il y a. sur le deuxième paragraphe de l'ar-
ticle 18, plusieurs amendements. Ce paragra-
phe est ainsi conçu :
Dans le premier cas, ils bénéficient d'nno alloca-
tion en franchise de 10 010, sans que cette alloca-
tion puisse être inférieure à 20 litres d'alcool pur.
M. Lasies présente un amendement tendant
à remplacer la quantité de 20 litres par celle
de 50 litres annuellement.
La commission et le gouvernement repous-
sent l'amendement. ,-.
Par 300 voix contre 245, l'amendement dit
M. Lasies n'est pas pris en considération.
M. Féron, qui demandait la suppression du
paragraphe 2, retire son amendement.
M. Camuzet présente un amendement ten-
dant à porter à 40 litres d'alcool pur la quan-
tité affranchie.
Il propose en outre que l'allocation en fran-
chise accordée aux bouilleurs, dans le cas où
ils acquitteraient immédiatement les droits,
soit plus considérable, pour les inviter à payer
comptant. -.
Le gouvernement et la commission repous-
sent l'amendement.
Par 305 voix contre 229, il est repoussé.
M. Quilboeuf reproche à M. Rouvier d'être
en désaccord avec des paroles prononcées par
lui à l'Assemblée nationale le 4 mars 1875.
M. Rouvier. — Je m'élevais alors contre di-
vers impôts nouveaux, que je qualifiais, en effet,
de « rognures de gros sous », tondis qu'il s'agit
aujourd'hui de faire rentrer les impôts qui existent
et qui ne sont pas payés par ceux qui les doivent.
L'amendement de M. Quilboeuf est repoussti'
par 298 voix contre 248.
Le ronvoi de la discussion est prononcé.
M. Rouvier. — La Chambre a prononcé..
renvoi de la discussion à une prochaine séance.
(Interruptions à droite.)
Je demande que la prochaine séance ait lieu dans
un quart d'heure.
Dans peu de jours, les deux douzièmes provisoi-
res vont être épuisés. Un troisième douzième sera
nécessaire. La majorité républicaine ne doit pas ou-
blier que le budget doit être voté à temps pour que
ce troisième douzième suffise.
Il y aura une majorité pour faire aboutir la loi.
Il faut qu'elle soit obéie. (Très bien 1 très bien 1 à
gauche.)
Par 313 voix contre 25G, la Chambre décide
que la prochaine séance aura lieu dans U-
quart d'heure. —
Deuxième séance
A la reprise de la séance, M. Rouvier dit qu&
la Chambre peut adopter sans discussion le
premier alinéa du paragraphe 3.
M. Rouvier. — La Chambre peu! adoptet-
sans discussion le premier a!inéa du paragraphe 3.
Cet alinéa porte que si les bouilleurs de crq
n'acquittent pas immédiatement les droit*, ils joui-
ront de la déduction ordinaire, sans que cette dé-,
duction puisse être inférieure à 20 litres d'alcool
pur pour la campagne pondant laquelle les eaux-dt:
vie ont été fabriquées.
L'accord est fait sur cet alinéa.
Le second alinéa du 3* paragraphe dit qu'il n.
aura qu'une visite par an chez les bouilleurs qtti>
ne fabriquent pas plus de dix hecitolitres. M. La1
raine a déposé un amendement disant que pour.
1 tout bouilleur il D) aura qu'uu visitgjtajr ABU
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