Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-06-26
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 26 juin 1908 26 juin 1908
Description : 1908/06/26 (N13986). 1908/06/26 (N13986).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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LE XDT SIECLE
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Le gouvernement se rend-
il compte enfin de J'état de
malaise et d'énervement que
cause son impuissance à fai-
re aboutir les réformes dé-
mocratiques ? A première
vue, 1 on serait tenté de le croire en
Usant la lettre que M. le président du
Conseil vient d'adresser à M. ClWinot,
président de la Commission sénatoriale
des retraites ouvrières.
Mais l'on peut se demander si, sous
prétexte de chercher un terrain de con-
ciliation, M. Clemenceau ne cherche pas
à donner au parti progressiste un nou-
veau gage de bienveillance et à faire
machine en arrière.
Pour la seconde fois, .en effet le
gouvernement fait à la commission, de
la Haute Assemblée des propositions qui
modifient les bases adoptées par la
Chambre des députés.
On sait que déjà une première fois,
le gouvernement avait voulu réduire à
une somme forfaitaire de 100 millions
la contribution qu'apporterait l'Etat aux
retraites ouvrières.
Mais il avait été contraint de recon-
naître qu'il ne pouvait être question de
limiter une fois pour toutes de façon
immuable, la participation de l'Etat
aux charges évidemment variables qui
résulteraient du fonctionnement de la
caisse. Le forfait enlevait toute certi-
tude pour les majorations de pensions
prévues dans la loi.
Le gouvernement, devant les protes-
tations des représentants des régions
ugricoles, avait dû céder aussi sur le
maintien dans le régime obligatoire de
la retraite des fermiers, métayers et do-
mestiques.
De nouveau, le gouvernement saisit la
commission sénatoriale de propositions
qui modifient sérieusement l'économie
du projet adopté par la Chambre. Il
s'abstient d'ailleurs de faire connaître à
l'opinion publique dans quelle mesure
les modifications apportées réduiraient
les charges du budget.
Le gouvernement, dans ses nouvelles
propositions, fixe à 65 ans, comme il
l'avait déjà proposé, la date d'entrée
an jouissance de la retraite. Nous pou-
vons aisément et pour J'heure actuelle,
lui faire cette concession.
De plus, et ici encore nous l'approu-
vons pleinement, il substitue à la con-
dition rigoureuse de trente années de
travail, à raison de 250 jours par an,
la formule plus simple de 6.50O journées
de travail.
Mais il nous est impossible d'acquies-
cer à certaines propositions qui modi-
fient essentiellement l'économie de la
loi et les résultats qu'on serait en droit
d'en attendre.
En effet, le gouvernement, préoccupé
de limiter la contribution de l'Etat, fait
supporter aux assurés les frais de ges-
tion de la caisse. Dans ce but, il opère
un prélèvement de 6 sur l'ensemble
des versements.
Il estime qu'un régime de retraite
n'est autre chose qu'une assurance de
rente viagère, et que dans ces condi-
tions, il convient de lui faire supporter
les frais de gestion.
Le raisonnement serait logique, s'il
était admis que dans aucun cas l'Etat
ne devrait être appelé à apporter sa
contribution.
Or, le gouvernement oublie que nous
entendons non seulement établir une as-
surance viagère, mais aussi élaborer une
loi de solidarité sociale.
Nous voulons payer aux travailleurs
une dette contractée envers eux par la
société. Pourquoi alors faire supporter
aux versemeïlis les frais de gestion, dès
lors que l'on entend assurer à chaque
participant une retraite déterminée ?
C'est ce qu'oublie M. Clemenceau
quand il se refuse à majorer jusqu'à
concurrence de 360 francs, dans la pé-
riode normale, les rentes qui n'attein-
draient pas ce chiffre, qui n'est en réa-
lité que le minimum nécessaire à l'exis-
tence.
Or, l'on nous propose non plus de ma-
jorer jusqu'à due concurrence la rente
à laquelle donneraient droit les verse-
ments, mais simplement de la doubler,
sauf pour les retraites inférieures à 120
francs, qui seraient toujours majorées
de cette somme.
Procéder ainsi , c'est méconnaître
l'objet même de la loi, qui est d'assurer
a tous les travailleurs une retraite dé-
terminée, soit par les versements des
patrons et des ouvriers, soit par ces
mêmes versements et une contribution
de l'Etat, si cela est nécessaire.
Et le gouvernement méconnaît tout à
Mit le caractère social que ^ous enten-
dons donner à la loi, quv.Íld il refuse de
dispenser du prélèvement les salaires
quotidiens inférieurs à 1 fr. 50.
Les déshérités qui travaillent à ce
taux infime ont vraiment droit à un peu
plus de sollicitude. -
Enfin, les travailleurs âgés de 65 à 69
ans au moment de la promulgation de la
loi bénéficieraient uniquement de l'ex-
tension de la loi sur l'assistance obli-
gatoire.
Le gouvernement ne se préoccupe
point de tenir vis-à-vis d'eux la promes-
se qui leur a été faite depuis si long-
temps.
Nous croyons devoir protester contre
cette conception du gouvernement, qui
tend à transformer le système élaboré
par la Chambre., tout empreint de soli-
darité, en un système d'assurance mu-
tuelle obligatoire.
Il nous paraît que dès maintenant, il
serait possible de faire payer par les
générations adultes, les retraites promi-
ses aux travailleurs âgés que la vieil-
lesse ou l'invalidité oblige d'abandon-
ner le travail.
Par une habile combinaison des sys-
tèmes déjà répartition et de la capita-
lisation, il serait possible de servir des
retraites moins modiques aux vieux ou-
vriers, qui ne revêtiraient pas le carac-
tère humiliant de la charité, et de cons-
tituer un fonds de réserve qui allégerait
les charges pour l'avenir.
Marcel REGNIER,
Député de l'Allier.
LA POLITIQUE
M. CAILLAUX ET LES DÉBITANTS
Les débitants de boissons
ne sont pas contents de M.
Caillaux et ils le lui ont fait
savoir. Ils ne sont pas nés avec
un tempérament de victimes;
i ils prétendent se défendre. Le
ministre des finances aura du travail s'il
veut résister à leur vigoureux retour of-
fensif. Mais dès à présent, on peut pré-
voir qu'il battra en retraite.
M. jCaillaux, en étabhssantsen projet
de budget pour 1909, s"est trouvé en
présence d'un déficit de quarante-quatre
millions. Pour combler ce déficit, il a
eu recours à une série de moyens, dont
le doublement de la licence des débi-
tants vendant de l'absinthe est un échan-
tillon. On espérait en tirer dix millions.
Le sort qui attendait cet expédient —
car il faut appeler les choses par leur
nom — était prévu. Dans les bureaux de
la Chambre, au moment même de
l'élection de la Commission du bud-
get, les trois quarts des candidats aux
fonctions de commissaires, s'étaient éle-
vés énergiquement contre la double li-
cence. Or, la plupart de ces adversaires
des procédés financiers de M. Caillaux
avaient été élus. La manifestation des
débitants n'est donc en réalité qu'une
escarmouche avant la bataille qui sera li-
vrée au dispositif budgétaire du minis-
tre des finances.
Mais, prochainement, ne le verrons-
nous pas se raviser ?
Les débitants ont fait valoir que le
commerce des liquides était avantageu-
sement surchargé à chaque difficulté du
'budget. Ils déclinent l'honneur de sau-
ver si souvent Ja mise des autres. Quel-
ques couplets sur l'égalité fiscale, en
cette saison, prenaient comme un sens
ironique. La double licence de M. Cail-
laux semble flambée.
Et dire que toutes les critiques du
projet de budget ne sont pas épuisées.
Bien des dépenses nécessaires ont été
écartées, momentanément; elles réappa-
raîtront plus tard, sous forme de chapi-
tres additionnels, de demandes de cré-
dits supplémentaires. Les dépenses du
Maroc ne figurent pas encore. Quand les
verra-t-on poindre?
M. Caillaux a été fort malmené hier
par les orateurs attitrés des débitants.
A nos yeux, il est regrettable que le
ministre qui porte le poids d'un projet
de loi démocratique de réforme fiscale
s'expose, dans un autre domaine de son
activité, à des critiques faciles et justi-
fiées.
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui jeudi :
Lever du soleil, à 3 h. 59 ; coucher, à
8 h. 5.
MalinéêS..— Vaudeville, Déjazet, Trente
Ans de théâtre (Trocadéro), Nouveau-Cir-
que, Cirque Médrano.
Courses à Auteuil.
Les voix du MIdI
Un savant hygiéniste vient de faire
une découverte singulière'. Frappé de ce
fait que beaucoup de Méridionaux sont
chanteurs, et que presque tous les chan-
teurs sont Méridionaux, il s'en est
anxieusement demandé la cause.
Après bien des recherches, il est ar-
rivé à cette bizarre conclusion que les
oranges, les citrons, les tomates exer-
cent une influence bienfaisante sur les
cordes vocales des gens du Midi. Par
; contre, il prétend que les Normands ne
; peuvent chanter congrûment « parce
qu'ils boivent du cidre et mangent des
poires », ce qui provoque une inflam-
mation de l'appareil vocal.11 recomman-
de, en même temps, de ne pas manger
tàe confitures, Ide sirops, de defesertis
sucrés, si l'on veut interpréter conve-
nablement les maîtres de la musique.
;Et surtout, jamais de marmelade 1 La
musique n'aime pas la marmelade.
Elégance canine.
Il vient de se fonder à Londres, un éta-
blissement destiné au perfectionnement
plastique de nos oons toutous.
Rien de réjouissant comme la lecture
du prospectus-tarif où sont détaillés les
divers embellissements que l'on peut ap-
porter au museau de Miss ou à la patte
de Marquis.
Changement de la forme du museau 40 fr.
Frisage d'une queue lisse. 20 —
Mise de rides dans la face d'un bull-dog 80 —
Changement de la dimension de la queue 20 —
Epilalion de poils superflus, l'heure 5 ;
Changement, de la couleur du poil 30 —
Transformation d'une oreille-pendanteen
oreille droite et vice-versa : 20 —
Déformation des pattes de devant d'un
bull-dog. ; 100
C'est le progrès !. Mais qu'en pen-
sent les pauvres « cabots » soumis à ces
embellissements ? »
AUTREFOIS
Rappel du 26 juin 1872. - Gladiateur,
qui a fait gagner des sommes énormes à
son propriétaire, va être vendu aux encne.
res.
On paraît renoncer, quant à présent, à
créer des voies souterraines dans Paris, Le
projet des tramways seul est adopté d'une
façon ferme.
Un collectionneur, M. His de la Salle, lè-
gue au Louvre plus de 200 dessins et une
dizaine de tableaux choisis dans sa galerie.
La conclusion des négociations avec VAl-
lemagne pour la libération anticipée du ter-
Iritoire est imminente.
On va créer un camp d'instruction d'en-
tnron 50.000 hommes, du cAté de Quiberon.
Le comte de Paris villégiature à Dinard;
les familles légitimistes s'abstiendront, di-
sent les ennemis de la fusion, de paraître,
cette année, dans la région.
Excentricités de romancier.
Alphonse Karr avait parié d'échapper
aux recherches d'une douzaine de Pari-
siens qui, à travers les champs voisins
de la Méditerranée, se mirent à ses
trousses. Au bord d'une rivière qu'il
avait traversée, on trouva une page dé-
tachée de son calepin : « Karr nage ».
Plus loin, sur un mur, cette inscrip-
tion : « Karr avance et raille ». Une fille
d'auberge, un peu plus loin, montra une
bouteille brisée à côté de laquelle il
avait laissé sa carte avec ce mot : « Karr
casse ». Le soir, dans une salle à man-
ger d'un hôtel, on trouva écrit sur le
mur : « Karr dîna là ». Le lendemain,
quand on lui remit le prix du pari qu'il
avait gagné, il dit gravement : « Karr
touche ».
Karr était d'ailleurs quelque peu ori-
ginal. Lorsqu'il habitait Taris, il se plai-
sait à ne pas vivre comme tout le monde
et à chercher des attitudes propres à
« épater les bourgeois «.C'est ainsi qu'un
jour, à la première représentation d'une
tragédie à l'Odéon, on le vit paraître aux
avant-scènes en habit noir, mais portant
sur le chef un casque de pompier.
Les députas aux Invalides.
Sait-on qu'il fut question, à une cer-
taine époque, de loger les députés à
l'Hôtel des Invalides ?
L'auteur du projet se nommait Cadet
de Vaux. D'après son plan, élaboré en
1791, l'Hôtel des Invalides aurait pris le
nom de « Temple des Lois ». La cha-
pelle était transformée en salle des séan-
ces, les réfectoires servaient aux com-
missions et aux bureaux ; on mettait
l'imprimerie dans la boulangerie, et en-
fin — c'était là l'originalité du projet —
le surplus du bâtiment était divisé én
logements pour les députés. Cnaque
corridor aurait porté le nom d'un dépar-
tement, afin de réunir les élus des mê-
mes collèges ! Enfin, il y avait un res-
taurant et une infirmerie.
Il n'y manquait qu'une salle de dou-
ches !
Une femme d'esprit
C'était sous l'Empire, à une vente de
charité. organisée par la princesse uzar-'
toryska, au profit des Polonais exilés.
George Sand, la célèbre romancière,
tenait une boutique de chiffons et de
babioles.
Tout à coup passe le baron James de
Rotschild, qui venait justement pour
voir l'illustre femme de lettres, qu'il ne
connaissait que de réputation. Celle-ci
ne laissa pas perdre une si belle occa-
sion.
Achetez-moi quelque chose, ba-
ron ! ,
— Que voulez-vous que je vous
achète ?.
« Vous n'avez rien qui puîsse me con
venir. Ah si, pourtant, je ne posséd3
pas d'autographe de vous, je ne con-
nais même pas votre écriture. Grifiha-
nez-moi quelques mots, et je vous les
achèterai, »
George Sand prit une feuille de pa-
pier, et de son écriture la plus mâle,
elle écrivit : « Je reconnais avoir reçu
de M. le baron -de Rotschild la somme
de mille francs, pour l'œuvre des Polo-
nais exilés. »
Les baron sourit, paya, et se retira eii-
clanté de son acquisition.
LE PAVE
Quelques journaux bien pensants trou-
vait un malin plaisir à railler M. B., dé-
pité radical, à l'occasion de son mariage
rùigieux.
A entendre ces journaux, le mariage de
M. B. a été entouré d'une pompe ex-
traordinaire. L'église était garnie de fleurs;
le curé a prononcé une allocution lauda-
tire ; un bénédictin a dit la messe et la
bénédiction pontificale a couronné cette
fêle, qui a fait tressaillir de bonheur toutes
les dévotes de la région.
les
Nous n'avons pas à juger M. B. Cet
acte de la vie privée le regarde et les ex-
plications qu'il pourrait fournir ne concer-
nent que ses électeurs.
Nous Jronyoty?, en sevunche, .que les
journaux cléricaux qui blaguent le député
B. commettent une de ces gaffes qui font
penser à l'éternel mot de Voltaire : que
Dieu me préserve de mes amis 1
De quoi s'agit-il ?
On accuse M. B. de palinodie, parce
qu'il a voulu respecter les convictions re-
ligieuses de sa femme. De quoi l'accuse-
rait-on s'il avait voulu imposer ses opi-
nions à sa fiancée ?
Si M. B. parait inconséquent avec lui-
même, comment faut-il qualifier l'attitude
de ce curé qui couvre de fleura un athée ?
Que dire d'un bénédictin qui sre déplace
exprès pour consacrer le mariage d'un des
votants de la loi de Séparation ?
Que dire, surtout, du pape qui, moyen-
nant rétribution, envoie sa bénédiction à
un excommunié ?
Les journaux cléricaux n'ont pas pensé
à ces questions en lançant à M. B. le pavé
qui devait l'écraser et qui leur retombe
sur le nez.
La cérémonie religieuse si minutieuse-
ment décrite par les organes réactionnaires
prouve surtout que l'Eglise a des indulgen-
ces singulières pour tout mécréant qui con-
naît le tarif des accommodements célestes.
Si c'est cela que les cléricaux ont voulu
prouver en tournant en ridicule M. B.,
ils ont pleinement réussi !
Jean Clerval.
- , , «•» ! III IN ■■
La vie future. des autres
Qu'est-ce que cela fait à la société que
Mme X. aille au paradis, M. Y. en en-
fer et Mlle Z. au purgatoire ? Rien du
tout. La société ne s'en portera ni mieux
ni plus mal.
Cependant Mme X., par ses prières
adressées du haut des cieux au bon Dieu,
dont elle sera devenue l'hôtesse pour toute
une éternité bienheureuse, obtiendra des
grâces, des faveurs et des bienfaits dont
profiteront, sur notre malheureuse terre,
des personnes pieuses, dignes de la pitié
et de la miséricorde divines, et même des
pêcheurs endurcis.
Eh bien, non. Il faut en finir aveo toutes
ces légendes du passé, très poétiques sans
doute, mais sans la moindre parcelle de
vérité scientifique.
Avant qu'il y eut une astronomie, les
chimères de l'astrologie judiciaire ont ber-
cé l'enfance de l'humanité.
De même, avant qu'il y eut une physique
et une chimie, Jupiter ou le Père Eternel
lançait la foudre.
Kle lancement de foudre n'est plus qu'une
métaphore du poète, un simple décor de
théâtre. ,-
Depuis qu'il y a une biologie et une
psychologie scientifique, les maladies, phy-
siques ou mentales, ont cessé d'être gué-
ries par les prières et les exorcismes.
C'est en" vain que les spirites se font
illusion. Cela prouve seulement qu'il y a
incohérence dans l'esprit de certains sa-
vants, comme dans celui de la grande ma-
jorité des ignorants. Ces savants ne rai-
sonnent juste que dans leur science spé-
ciale. Dès qu'ils en sortent, ils déraillent.
Ainsi, tels et tels que nous pourrions citer,
les uns morte, tes autres vivants. Cou-
vrons "leur incohérence de l'omnre du si-
lence.
De même, enfin, depuis que nous avrns
une sociologie, l'action divine ne s'-îs^rce
plus sur l'humanité ni sur aucune de ses
parties. On ne la rencontre que dans les
pompeux discours de certains empereur's.
Ces discours sont bons, tout au plus, pur
les peuples asservis auxquels ils s'adres-
sent, et encore n'est-ce pas bien sûr. Four
nous, ce n'est que de la rhétorique.
La vie future individuelle, dans un autre
monde, est indifférente à la société, qui
n'a pas à s'en préoccuper, parce qu'elle
n'a rien à y gagner ni rien à y perdre
Les morts agissent sur nous indirecte-
ment par les œuvres qu'ils ont accomplies
de leur vivant, par les travaux qu'ils nous
ont laissés et par les idées qu'ils ont se-
mées.
Ce qui doit nous préoccuper, c'est la vie
future des autres sur cette terre, la vie de
ceux qui viendront après nous, enfants,
petite-enfants, arrière-petits-enfants, aussi
loin que notre imagination peut errer dans
l'inconnu de l'avenir..
Remarquez que nous ne faisons qu'a:
grandir l'horizon du père de famille, qui
songe à conserver et à augmenter le do-
maine des siens.
Sans doute, nous songeoms à notre far
mille, mais nous songeons aussi aux fa-
milles des voisins les plus proches, dont
l'ensemble forme notre rue ; celle-ci et les
autres rues, la cité ; et "ensemble des ci-
tés, notre pays, notre société. Toutes les
sociétés réunies feront l'humanité future,
qui continuera, sciemment et volontaire-
ment ]& labeur incessant, entrepris par les
•siècles passée, qui a fait l'humanité ac-
tuelle.
Ceux qui travaillent pour la vie future
des autres, à quelquetitrè que ce soit, sont
des éducateurs. Il n'y en aura jamais as-
sez.
Emile RigoJage.
| LE COMMERCE DES BOISSONS
Grand meeting ne protestation
A la salle de l'Hippodrome. -Près de 5,000 assistants matiU
testent contre le projet Caillaux. - Les Discours.
- L'ordre du jour.
Le projet de budget de 1909, déposé il y
a quelque temps sur le bureau de la
Chambre par M. Caillaux, ministre des
finances, renferme plusieurs articles qui
visent les débitants de boissons. L'arti-
cle 39 interdit l'ouverture de nouveaux
débits, sauf dans des cas exceptionnels.
Four protester contre ces mesures, la
Fédération nationale du commerce au dé-
tail des boissons, restaurants et hôteliers
d'e France, a pris l'initiative d'une grande
réunion qui a eu lieu hier, à trois heures,
salle de l'Hip:poJ"lrme, sous la présidence
de M. Marguery.
Dès deux heures. les portes de l'Hippo-
drome sont ouvertes, et à trois heures, la
salle était littéralement bondée. On peut
estimer de 4 à 5,000 le nombre des assis-
tants.
On remarque sur la scène MM. Mar-
guery. président du Comité de l'alimenta-
tion parisienne ; Girardin, président de la
Itération nationale des débitants de
France ; Paul Forsans, président du Syn-
dicat national du commerce en gros des
vins, cidres, spiritueux et liqueurs de
France ; Gambade, président de la Fédé-
ration des débitants en boissons de Bor-
deaux ; Grizard, président de l'Union syn-
dicale des débitants de vi.ns et liquoristes
de Paris et de la Danlieue ; Schauerntein
secrétaire de la Fédération nationale du
commerce ; Figuières, président de la
Chambre syndicale des marchands de
vins et liquoristes de Paris ; Oudin, pré-
sident du Syndicat général du commerce
en détail des vins et spiritueux de Faris
et de la Seine, etc. -
On remarquait encore plusieurs dépu-
tés' de Paris, notamment MM. Desplas,
Deloncle, Failliot, Georges Berry, Maurice
garrès et de nombreux conseillers munici-
paux, parmi lesquels MM. Denais et Alpy.
De nombreuses délégations avaient été
,envoyées de tous les points de la France,
i notamment de Bordeaux, de Lille, de
Rouen, de Reims, a'Epernay. de Chalon,
de Dijon, de Saint-Quentin, etc.
DISCOURS DE M. MARGUERY
A trois heures et quart, M. Marguery,
: toujours alerte, toujours vigoureux, tou-
jours dévoué à tout ce qui touche à la
(prospérité commerciale de notre pays,
I ouvre la séance en remerciant tous les
! assistants de leur présence, tous les dé-
légués de province, ainsi que les membres
du Parlement et du Conseil municipal tt
la presse. En quelques mots, il indique le
but du meeting.
Cette réunion, dit-il, a été motivée par les
charges nouvelles dont le commerce des
boissons et de l'alimentation est menacé.
Toutes les fois qu'il l'a fallu, nous avons
accepté des charges, et récemment, nous
l'avons fait. à propos du repos hebdoma-
daire, par devoir d'humanité envers nos
collaborateurs.
Nous avons eu déjà des surtaxes sur les
:boissons. Aujourd'hui on veut doubler des
licences qui n'ont plus de raison d'exister.
H semble que l'on veuille faire disparaître
une liberté que l'on considère comme gê-
nante. Elevons-nous avec énergie contre
de telles tendances. Nous subirons la loi
comme nous en avons subi d'autres, mais
nous protesterons.
On parle de supprimer nos établisse-
ments après deux condamnations encou-
rues. N'est-ce pas monstrueux, quand on
songe à la façon dont ics expertises conl
faites parfois ? Ce serait revenir à un siècle
en arrière.
Qu'a-t-on à nous reprocher ? Nous avons
accepté le repos hebdomadaire. Nous l'a-
vons rendu possible, alors, qu'on nous tri
refusait les moyens, grâce à une loyale en-
tente entre patrons et employés. N'avions-
nous pas créé les assurances contre les ac-
cidents, avant même que la loi nous les ait
imposées ?
Nous nous plaignons parce qu'on nous
frappe trop souvent et trop fort. C'est notre
droit.
Mais je vous demande de ne pas vous
départir, dans vos .protestations, du calme
et de la dignité qui font la force même des
protestations.
Les paroles du vénérable président
sont applaudies par l'unanimité des as-
sistants qui, on le sent, sont heureux de
lui manifester de la sorte toute leur sym-
pathie.
Le président donne alors la parole à M.
Girardin. président de la Fédération natio-
nale des débitants de France.
DISCOURS DE M. GIRARDIN
M. Girardin prononce un très remarqua-
ble discours, admirablement ordonné et
parfaitement documenté, et ce qui ne nuit
jamais, très éloquent parfois. Aussi ob-
tient-il un succès considérable.
Après avoir dit un mot d'élbge et de re-
merciement à l'adresse de M. Marguery et
de M. Forsans, dont la présence à la réu-
nion marque bien que toutes les corpora-
tions des liquides marchent la main dans
la main, M. Girardin expose le but de la
réunion.
« Le commerce, dit-il, doit se défendre et
protester contre les nouvelles charges
qu'on veut lui imposer. Il souffre déjà de
toutes les charges qu'on lui a imposées à
plaisir et la proposition de M. Caillaux est
comme la goutte d'eau qui fait déborder le
vase. »
Ce début est salué par de nombreux cris
hostiles au ministre des finances.
M. Girardin dit que les assistants sont
venus pour faire le procès d'un régime fis-
cal mauvais et qui. s'il devait s'éterniser,
finirait par conduire Ja République à sa
ruine. „
« Depuis vingt ans, - le Parlement s'est
occupé d'une façon vraiment excessive du
commerce des boissons- Il a fait une série
de lois, les unes fiscales, les autres répres-
sives, et toutes, ou à peu près toutes, au
détriment du commerce, n
Nous regrettons dé" ne pouvorr SUlvrc
l'orateur dans ses développements et d en
être réduit à ne signaler que ceux qui ont
plus particulièrement frappé notre atten-
tion.
M. Girardin passe en revue les diverses
lois qui intéressent le commerce des bois-
sons.
fi La loi du 14 août 1889 fut votée pour
donner de l'extension au commerce des
vins naturels. Le commerce n'a pas pro-
testé contre cette loi dans son principe
môme, mais il a .protesté parce que le légis-
lateur ne lui donnait pas le moyen de faire
la différence entre le vin de raisins frais et
les mélanges de ce vin avec celui de rai-
sins secs. On nous a dit que la science était
impuissante, et nous nous sommes incli-
nés, ce qui n'empêche que des débitants
ont. de très bonne foi, été souvent victi-
mes de cette loi.
« Il en a été de même de la loi du 11 juil-
let 1891" qui kitejxlit la présence de plus di
2 grammes de- sulfate- de potasse par litre -
de vin. Le commerce a protesté parce que,
-la encore, il y a eu des condamnations de,
COfflrneB/Iïts dont la bonne toi ne pouvait
être mise en doute, m
M. Girardin fait l'historique de la loi du
29 décembre 1897 qui permet aux munici-
palités de supprimer les droite sur les bois-
sons hygiéniques. Les commerçants, dit-il,
étaient partisans de cette réforme, mais à
condition de n'être pas frappés par des
taxes spéciales. On a supprimé à Parie,
le droit d'entrée et le diroit de détail, on a
laissé subsister le droit de circulation de
1 fr. 50 et en revanche on a augmenté les
licences et les droits sur les alcools, de
telle sorte que le dégrèvement n'a pu pro-
fiter ni au commerce ni aux petites bour-
sos.
En 1900, dit-il, nous avons dû payer les
droits sur les stocks d'alcool en notre pos-
session, mais il ne nous a été tenu aucun
compte des dégrèvements opérés sur les
vins qui se trouvaient en la possession des
commerçants.
Après avoir critiqué l'exposé des motifs
du projet Caillaux, M..lardin s'écrie :
« Comment, dans un pays de production
comme le nôtre, qui se fait un honneur de
posséder les vins de bordeaux, ceux de
bourgogne, les vins de Champagne, les fins-
bois des Charentcs, toutes ces marques,
tous ces crus que l'Europe nous envie, on
en arriverait sous un gouvernement de li-
berté. d'égalité et de fraternité, à considé-
rer que ce sont là des produits que l'on
doit frapper sans merci ; on en arriverait
à considérer les débitants comme une bon-
ne vache à lait qui doit alimenter nos dé-
ficits budgétaires ! ))
La salle fait à ce moment une ovation N
l'orateur et pousse des cris hostiles à MM.
Caillaux et Clemenceau.
Lorsque Je calme est rétabl' M. Girar-
din demaixie qu'il n'y ait pas de manifes-
tation. Tout à l'heure, dit-il, quand nous
allons nous séparer, vous pousserez le cri
de protestation qui convient en la circons-
tance, mais il est essentiel que cette ma-
nifestation soit digne d'hommes conscients.
comme vous l'êtes.
Nous avions dit à M. de de VcrniDae,
rapporteur au Sénat de la loi de 1900, nue
le gouvernement trouverait des mécomptes
budgétaires dans l'application de cette loi,
Nous avions dit vrai.
Le dégrèvement pour les vins. bières, ci-
dres, poirés était d'une somme de 125 mil-
lions 986,663 francs et la surtaxe pour les
alcools, vins de liqueurs, bouilleurs de cru,
licence, imposition des vendanges, sucra-
ges des vins de 126.067,412 francs, cela s'é-
quilibrait.
Les prévisions du ministre n'ont pas été
justifiées ; en cinq ans, de 1901 à 190o, il a
enregistré un déficit de 442,055,962 francs.
L'impôt des boissons rapportait avant ia
loi de 1900 la somme de 520,001,582 francs ;
après la loi, oh enregistre les recettes sui-
vantes. marquant un déficit de :
En 1901 : 433,062,260 francs soit un défi-
cit de 92,729,607 francs.
En 1902 : 42-1,062,2UO francs, soit un défi-
cit de 101,939,230 franci,.
En 1903 : 442,650,?9tî francs, scrit un défi-
cit de 83.344,791 francs. ,
En 1904 : 475,051,874 francs, soit un défi-
cit de 50,949,708 francs.
En 1905 : 413,309,019 francs, soit un défi-
cit de 113,692,537 francs.
Ainsi, en cinq ans, il s'est produit un
déficit de 442,655.962 francs, soit 88 millions
et demi par an, et cela continue jusqu'en
1908. Le déficit de ce chef dépasse le demi-
milliard.
Et l'on a fait, par surcroît, une réforme
à rebours. Le riche qui peut acheter son
vin à la pièce, profite du dégrèvement.
L'ouvrier a dû continuer à payer son vin
le même prix parce qu'il l'achète au lilre.
et que les charges imposées aux commer-
çants n'ont pas permis à ceux-ci de le fai-
re bénéficier d'une réduction. (Vifs applau-
dissements.)
M. Girardin fait ensuite' l'historique de
l'impôt des licences, qui est un impôt
monstrueux, une atteinte à la liberté du
commerce.
Il démontre que des licences, qui étaient
autrefois de 20 francs, ont atteint 450 fr.
dans les villes au-dessus de 100,000 habi-
tants. et qu'elles atteindront 900 franc.
avec 'le projet Caillaux.
Le législateur de 1816 qm a créé la licen-
ce avait peut-être des raisons de vouloir,
que le commerce des boissons ne soit pas
libre : ia hcnce s'expliquait ; mais Ja loi
du 17 juillet 1880 ayant rendu ce commer-
ce libre pour tous les ciioyens honnêtes et
dont le casier est vierge, la licence est de-
venue un impôt de superfétation, sans jus
tice, sans égalité-
Les licences rapportaient, avant la loi de
1900, 14 millions ; on leur demanda 22 mil-
Iions et elles les donnèrent ; et depuis
1903 elles donnent 36 millions. On trouve
que 'ce n'est pas suffisant-
On va demander 900 francs de licence à
un débitant pour lui permettre de vendre,
de l'-a.bintne.. -' l t. d t
Les hommes de la dont nom
sommes orgueilleux d'être les fils, ont d.
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Le gouvernement se rend-
il compte enfin de J'état de
malaise et d'énervement que
cause son impuissance à fai-
re aboutir les réformes dé-
mocratiques ? A première
vue, 1 on serait tenté de le croire en
Usant la lettre que M. le président du
Conseil vient d'adresser à M. ClWinot,
président de la Commission sénatoriale
des retraites ouvrières.
Mais l'on peut se demander si, sous
prétexte de chercher un terrain de con-
ciliation, M. Clemenceau ne cherche pas
à donner au parti progressiste un nou-
veau gage de bienveillance et à faire
machine en arrière.
Pour la seconde fois, .en effet le
gouvernement fait à la commission, de
la Haute Assemblée des propositions qui
modifient les bases adoptées par la
Chambre des députés.
On sait que déjà une première fois,
le gouvernement avait voulu réduire à
une somme forfaitaire de 100 millions
la contribution qu'apporterait l'Etat aux
retraites ouvrières.
Mais il avait été contraint de recon-
naître qu'il ne pouvait être question de
limiter une fois pour toutes de façon
immuable, la participation de l'Etat
aux charges évidemment variables qui
résulteraient du fonctionnement de la
caisse. Le forfait enlevait toute certi-
tude pour les majorations de pensions
prévues dans la loi.
Le gouvernement, devant les protes-
tations des représentants des régions
ugricoles, avait dû céder aussi sur le
maintien dans le régime obligatoire de
la retraite des fermiers, métayers et do-
mestiques.
De nouveau, le gouvernement saisit la
commission sénatoriale de propositions
qui modifient sérieusement l'économie
du projet adopté par la Chambre. Il
s'abstient d'ailleurs de faire connaître à
l'opinion publique dans quelle mesure
les modifications apportées réduiraient
les charges du budget.
Le gouvernement, dans ses nouvelles
propositions, fixe à 65 ans, comme il
l'avait déjà proposé, la date d'entrée
an jouissance de la retraite. Nous pou-
vons aisément et pour J'heure actuelle,
lui faire cette concession.
De plus, et ici encore nous l'approu-
vons pleinement, il substitue à la con-
dition rigoureuse de trente années de
travail, à raison de 250 jours par an,
la formule plus simple de 6.50O journées
de travail.
Mais il nous est impossible d'acquies-
cer à certaines propositions qui modi-
fient essentiellement l'économie de la
loi et les résultats qu'on serait en droit
d'en attendre.
En effet, le gouvernement, préoccupé
de limiter la contribution de l'Etat, fait
supporter aux assurés les frais de ges-
tion de la caisse. Dans ce but, il opère
un prélèvement de 6 sur l'ensemble
des versements.
Il estime qu'un régime de retraite
n'est autre chose qu'une assurance de
rente viagère, et que dans ces condi-
tions, il convient de lui faire supporter
les frais de gestion.
Le raisonnement serait logique, s'il
était admis que dans aucun cas l'Etat
ne devrait être appelé à apporter sa
contribution.
Or, le gouvernement oublie que nous
entendons non seulement établir une as-
surance viagère, mais aussi élaborer une
loi de solidarité sociale.
Nous voulons payer aux travailleurs
une dette contractée envers eux par la
société. Pourquoi alors faire supporter
aux versemeïlis les frais de gestion, dès
lors que l'on entend assurer à chaque
participant une retraite déterminée ?
C'est ce qu'oublie M. Clemenceau
quand il se refuse à majorer jusqu'à
concurrence de 360 francs, dans la pé-
riode normale, les rentes qui n'attein-
draient pas ce chiffre, qui n'est en réa-
lité que le minimum nécessaire à l'exis-
tence.
Or, l'on nous propose non plus de ma-
jorer jusqu'à due concurrence la rente
à laquelle donneraient droit les verse-
ments, mais simplement de la doubler,
sauf pour les retraites inférieures à 120
francs, qui seraient toujours majorées
de cette somme.
Procéder ainsi , c'est méconnaître
l'objet même de la loi, qui est d'assurer
a tous les travailleurs une retraite dé-
terminée, soit par les versements des
patrons et des ouvriers, soit par ces
mêmes versements et une contribution
de l'Etat, si cela est nécessaire.
Et le gouvernement méconnaît tout à
Mit le caractère social que ^ous enten-
dons donner à la loi, quv.Íld il refuse de
dispenser du prélèvement les salaires
quotidiens inférieurs à 1 fr. 50.
Les déshérités qui travaillent à ce
taux infime ont vraiment droit à un peu
plus de sollicitude. -
Enfin, les travailleurs âgés de 65 à 69
ans au moment de la promulgation de la
loi bénéficieraient uniquement de l'ex-
tension de la loi sur l'assistance obli-
gatoire.
Le gouvernement ne se préoccupe
point de tenir vis-à-vis d'eux la promes-
se qui leur a été faite depuis si long-
temps.
Nous croyons devoir protester contre
cette conception du gouvernement, qui
tend à transformer le système élaboré
par la Chambre., tout empreint de soli-
darité, en un système d'assurance mu-
tuelle obligatoire.
Il nous paraît que dès maintenant, il
serait possible de faire payer par les
générations adultes, les retraites promi-
ses aux travailleurs âgés que la vieil-
lesse ou l'invalidité oblige d'abandon-
ner le travail.
Par une habile combinaison des sys-
tèmes déjà répartition et de la capita-
lisation, il serait possible de servir des
retraites moins modiques aux vieux ou-
vriers, qui ne revêtiraient pas le carac-
tère humiliant de la charité, et de cons-
tituer un fonds de réserve qui allégerait
les charges pour l'avenir.
Marcel REGNIER,
Député de l'Allier.
LA POLITIQUE
M. CAILLAUX ET LES DÉBITANTS
Les débitants de boissons
ne sont pas contents de M.
Caillaux et ils le lui ont fait
savoir. Ils ne sont pas nés avec
un tempérament de victimes;
i ils prétendent se défendre. Le
ministre des finances aura du travail s'il
veut résister à leur vigoureux retour of-
fensif. Mais dès à présent, on peut pré-
voir qu'il battra en retraite.
M. jCaillaux, en étabhssantsen projet
de budget pour 1909, s"est trouvé en
présence d'un déficit de quarante-quatre
millions. Pour combler ce déficit, il a
eu recours à une série de moyens, dont
le doublement de la licence des débi-
tants vendant de l'absinthe est un échan-
tillon. On espérait en tirer dix millions.
Le sort qui attendait cet expédient —
car il faut appeler les choses par leur
nom — était prévu. Dans les bureaux de
la Chambre, au moment même de
l'élection de la Commission du bud-
get, les trois quarts des candidats aux
fonctions de commissaires, s'étaient éle-
vés énergiquement contre la double li-
cence. Or, la plupart de ces adversaires
des procédés financiers de M. Caillaux
avaient été élus. La manifestation des
débitants n'est donc en réalité qu'une
escarmouche avant la bataille qui sera li-
vrée au dispositif budgétaire du minis-
tre des finances.
Mais, prochainement, ne le verrons-
nous pas se raviser ?
Les débitants ont fait valoir que le
commerce des liquides était avantageu-
sement surchargé à chaque difficulté du
'budget. Ils déclinent l'honneur de sau-
ver si souvent Ja mise des autres. Quel-
ques couplets sur l'égalité fiscale, en
cette saison, prenaient comme un sens
ironique. La double licence de M. Cail-
laux semble flambée.
Et dire que toutes les critiques du
projet de budget ne sont pas épuisées.
Bien des dépenses nécessaires ont été
écartées, momentanément; elles réappa-
raîtront plus tard, sous forme de chapi-
tres additionnels, de demandes de cré-
dits supplémentaires. Les dépenses du
Maroc ne figurent pas encore. Quand les
verra-t-on poindre?
M. Caillaux a été fort malmené hier
par les orateurs attitrés des débitants.
A nos yeux, il est regrettable que le
ministre qui porte le poids d'un projet
de loi démocratique de réforme fiscale
s'expose, dans un autre domaine de son
activité, à des critiques faciles et justi-
fiées.
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui jeudi :
Lever du soleil, à 3 h. 59 ; coucher, à
8 h. 5.
MalinéêS..— Vaudeville, Déjazet, Trente
Ans de théâtre (Trocadéro), Nouveau-Cir-
que, Cirque Médrano.
Courses à Auteuil.
Les voix du MIdI
Un savant hygiéniste vient de faire
une découverte singulière'. Frappé de ce
fait que beaucoup de Méridionaux sont
chanteurs, et que presque tous les chan-
teurs sont Méridionaux, il s'en est
anxieusement demandé la cause.
Après bien des recherches, il est ar-
rivé à cette bizarre conclusion que les
oranges, les citrons, les tomates exer-
cent une influence bienfaisante sur les
cordes vocales des gens du Midi. Par
; contre, il prétend que les Normands ne
; peuvent chanter congrûment « parce
qu'ils boivent du cidre et mangent des
poires », ce qui provoque une inflam-
mation de l'appareil vocal.11 recomman-
de, en même temps, de ne pas manger
tàe confitures, Ide sirops, de defesertis
sucrés, si l'on veut interpréter conve-
nablement les maîtres de la musique.
;Et surtout, jamais de marmelade 1 La
musique n'aime pas la marmelade.
Elégance canine.
Il vient de se fonder à Londres, un éta-
blissement destiné au perfectionnement
plastique de nos oons toutous.
Rien de réjouissant comme la lecture
du prospectus-tarif où sont détaillés les
divers embellissements que l'on peut ap-
porter au museau de Miss ou à la patte
de Marquis.
Changement de la forme du museau 40 fr.
Frisage d'une queue lisse. 20 —
Mise de rides dans la face d'un bull-dog 80 —
Changement de la dimension de la queue 20 —
Epilalion de poils superflus, l'heure 5 ;
Changement, de la couleur du poil 30 —
Transformation d'une oreille-pendanteen
oreille droite et vice-versa : 20 —
Déformation des pattes de devant d'un
bull-dog. ; 100
C'est le progrès !. Mais qu'en pen-
sent les pauvres « cabots » soumis à ces
embellissements ? »
AUTREFOIS
Rappel du 26 juin 1872. - Gladiateur,
qui a fait gagner des sommes énormes à
son propriétaire, va être vendu aux encne.
res.
On paraît renoncer, quant à présent, à
créer des voies souterraines dans Paris, Le
projet des tramways seul est adopté d'une
façon ferme.
Un collectionneur, M. His de la Salle, lè-
gue au Louvre plus de 200 dessins et une
dizaine de tableaux choisis dans sa galerie.
La conclusion des négociations avec VAl-
lemagne pour la libération anticipée du ter-
Iritoire est imminente.
On va créer un camp d'instruction d'en-
tnron 50.000 hommes, du cAté de Quiberon.
Le comte de Paris villégiature à Dinard;
les familles légitimistes s'abstiendront, di-
sent les ennemis de la fusion, de paraître,
cette année, dans la région.
Excentricités de romancier.
Alphonse Karr avait parié d'échapper
aux recherches d'une douzaine de Pari-
siens qui, à travers les champs voisins
de la Méditerranée, se mirent à ses
trousses. Au bord d'une rivière qu'il
avait traversée, on trouva une page dé-
tachée de son calepin : « Karr nage ».
Plus loin, sur un mur, cette inscrip-
tion : « Karr avance et raille ». Une fille
d'auberge, un peu plus loin, montra une
bouteille brisée à côté de laquelle il
avait laissé sa carte avec ce mot : « Karr
casse ». Le soir, dans une salle à man-
ger d'un hôtel, on trouva écrit sur le
mur : « Karr dîna là ». Le lendemain,
quand on lui remit le prix du pari qu'il
avait gagné, il dit gravement : « Karr
touche ».
Karr était d'ailleurs quelque peu ori-
ginal. Lorsqu'il habitait Taris, il se plai-
sait à ne pas vivre comme tout le monde
et à chercher des attitudes propres à
« épater les bourgeois «.C'est ainsi qu'un
jour, à la première représentation d'une
tragédie à l'Odéon, on le vit paraître aux
avant-scènes en habit noir, mais portant
sur le chef un casque de pompier.
Les députas aux Invalides.
Sait-on qu'il fut question, à une cer-
taine époque, de loger les députés à
l'Hôtel des Invalides ?
L'auteur du projet se nommait Cadet
de Vaux. D'après son plan, élaboré en
1791, l'Hôtel des Invalides aurait pris le
nom de « Temple des Lois ». La cha-
pelle était transformée en salle des séan-
ces, les réfectoires servaient aux com-
missions et aux bureaux ; on mettait
l'imprimerie dans la boulangerie, et en-
fin — c'était là l'originalité du projet —
le surplus du bâtiment était divisé én
logements pour les députés. Cnaque
corridor aurait porté le nom d'un dépar-
tement, afin de réunir les élus des mê-
mes collèges ! Enfin, il y avait un res-
taurant et une infirmerie.
Il n'y manquait qu'une salle de dou-
ches !
Une femme d'esprit
C'était sous l'Empire, à une vente de
charité. organisée par la princesse uzar-'
toryska, au profit des Polonais exilés.
George Sand, la célèbre romancière,
tenait une boutique de chiffons et de
babioles.
Tout à coup passe le baron James de
Rotschild, qui venait justement pour
voir l'illustre femme de lettres, qu'il ne
connaissait que de réputation. Celle-ci
ne laissa pas perdre une si belle occa-
sion.
Achetez-moi quelque chose, ba-
ron ! ,
— Que voulez-vous que je vous
achète ?.
« Vous n'avez rien qui puîsse me con
venir. Ah si, pourtant, je ne posséd3
pas d'autographe de vous, je ne con-
nais même pas votre écriture. Grifiha-
nez-moi quelques mots, et je vous les
achèterai, »
George Sand prit une feuille de pa-
pier, et de son écriture la plus mâle,
elle écrivit : « Je reconnais avoir reçu
de M. le baron -de Rotschild la somme
de mille francs, pour l'œuvre des Polo-
nais exilés. »
Les baron sourit, paya, et se retira eii-
clanté de son acquisition.
LE PAVE
Quelques journaux bien pensants trou-
vait un malin plaisir à railler M. B., dé-
pité radical, à l'occasion de son mariage
rùigieux.
A entendre ces journaux, le mariage de
M. B. a été entouré d'une pompe ex-
traordinaire. L'église était garnie de fleurs;
le curé a prononcé une allocution lauda-
tire ; un bénédictin a dit la messe et la
bénédiction pontificale a couronné cette
fêle, qui a fait tressaillir de bonheur toutes
les dévotes de la région.
les
Nous n'avons pas à juger M. B. Cet
acte de la vie privée le regarde et les ex-
plications qu'il pourrait fournir ne concer-
nent que ses électeurs.
Nous Jronyoty?, en sevunche, .que les
journaux cléricaux qui blaguent le député
B. commettent une de ces gaffes qui font
penser à l'éternel mot de Voltaire : que
Dieu me préserve de mes amis 1
De quoi s'agit-il ?
On accuse M. B. de palinodie, parce
qu'il a voulu respecter les convictions re-
ligieuses de sa femme. De quoi l'accuse-
rait-on s'il avait voulu imposer ses opi-
nions à sa fiancée ?
Si M. B. parait inconséquent avec lui-
même, comment faut-il qualifier l'attitude
de ce curé qui couvre de fleura un athée ?
Que dire d'un bénédictin qui sre déplace
exprès pour consacrer le mariage d'un des
votants de la loi de Séparation ?
Que dire, surtout, du pape qui, moyen-
nant rétribution, envoie sa bénédiction à
un excommunié ?
Les journaux cléricaux n'ont pas pensé
à ces questions en lançant à M. B. le pavé
qui devait l'écraser et qui leur retombe
sur le nez.
La cérémonie religieuse si minutieuse-
ment décrite par les organes réactionnaires
prouve surtout que l'Eglise a des indulgen-
ces singulières pour tout mécréant qui con-
naît le tarif des accommodements célestes.
Si c'est cela que les cléricaux ont voulu
prouver en tournant en ridicule M. B.,
ils ont pleinement réussi !
Jean Clerval.
- , , «•» ! III IN ■■
La vie future. des autres
Qu'est-ce que cela fait à la société que
Mme X. aille au paradis, M. Y. en en-
fer et Mlle Z. au purgatoire ? Rien du
tout. La société ne s'en portera ni mieux
ni plus mal.
Cependant Mme X., par ses prières
adressées du haut des cieux au bon Dieu,
dont elle sera devenue l'hôtesse pour toute
une éternité bienheureuse, obtiendra des
grâces, des faveurs et des bienfaits dont
profiteront, sur notre malheureuse terre,
des personnes pieuses, dignes de la pitié
et de la miséricorde divines, et même des
pêcheurs endurcis.
Eh bien, non. Il faut en finir aveo toutes
ces légendes du passé, très poétiques sans
doute, mais sans la moindre parcelle de
vérité scientifique.
Avant qu'il y eut une astronomie, les
chimères de l'astrologie judiciaire ont ber-
cé l'enfance de l'humanité.
De même, avant qu'il y eut une physique
et une chimie, Jupiter ou le Père Eternel
lançait la foudre.
Kle lancement de foudre n'est plus qu'une
métaphore du poète, un simple décor de
théâtre. ,-
Depuis qu'il y a une biologie et une
psychologie scientifique, les maladies, phy-
siques ou mentales, ont cessé d'être gué-
ries par les prières et les exorcismes.
C'est en" vain que les spirites se font
illusion. Cela prouve seulement qu'il y a
incohérence dans l'esprit de certains sa-
vants, comme dans celui de la grande ma-
jorité des ignorants. Ces savants ne rai-
sonnent juste que dans leur science spé-
ciale. Dès qu'ils en sortent, ils déraillent.
Ainsi, tels et tels que nous pourrions citer,
les uns morte, tes autres vivants. Cou-
vrons "leur incohérence de l'omnre du si-
lence.
De même, enfin, depuis que nous avrns
une sociologie, l'action divine ne s'-îs^rce
plus sur l'humanité ni sur aucune de ses
parties. On ne la rencontre que dans les
pompeux discours de certains empereur's.
Ces discours sont bons, tout au plus, pur
les peuples asservis auxquels ils s'adres-
sent, et encore n'est-ce pas bien sûr. Four
nous, ce n'est que de la rhétorique.
La vie future individuelle, dans un autre
monde, est indifférente à la société, qui
n'a pas à s'en préoccuper, parce qu'elle
n'a rien à y gagner ni rien à y perdre
Les morts agissent sur nous indirecte-
ment par les œuvres qu'ils ont accomplies
de leur vivant, par les travaux qu'ils nous
ont laissés et par les idées qu'ils ont se-
mées.
Ce qui doit nous préoccuper, c'est la vie
future des autres sur cette terre, la vie de
ceux qui viendront après nous, enfants,
petite-enfants, arrière-petits-enfants, aussi
loin que notre imagination peut errer dans
l'inconnu de l'avenir..
Remarquez que nous ne faisons qu'a:
grandir l'horizon du père de famille, qui
songe à conserver et à augmenter le do-
maine des siens.
Sans doute, nous songeoms à notre far
mille, mais nous songeons aussi aux fa-
milles des voisins les plus proches, dont
l'ensemble forme notre rue ; celle-ci et les
autres rues, la cité ; et "ensemble des ci-
tés, notre pays, notre société. Toutes les
sociétés réunies feront l'humanité future,
qui continuera, sciemment et volontaire-
ment ]& labeur incessant, entrepris par les
•siècles passée, qui a fait l'humanité ac-
tuelle.
Ceux qui travaillent pour la vie future
des autres, à quelquetitrè que ce soit, sont
des éducateurs. Il n'y en aura jamais as-
sez.
Emile RigoJage.
| LE COMMERCE DES BOISSONS
Grand meeting ne protestation
A la salle de l'Hippodrome. -Près de 5,000 assistants matiU
testent contre le projet Caillaux. - Les Discours.
- L'ordre du jour.
Le projet de budget de 1909, déposé il y
a quelque temps sur le bureau de la
Chambre par M. Caillaux, ministre des
finances, renferme plusieurs articles qui
visent les débitants de boissons. L'arti-
cle 39 interdit l'ouverture de nouveaux
débits, sauf dans des cas exceptionnels.
Four protester contre ces mesures, la
Fédération nationale du commerce au dé-
tail des boissons, restaurants et hôteliers
d'e France, a pris l'initiative d'une grande
réunion qui a eu lieu hier, à trois heures,
salle de l'Hip:poJ"lrme, sous la présidence
de M. Marguery.
Dès deux heures. les portes de l'Hippo-
drome sont ouvertes, et à trois heures, la
salle était littéralement bondée. On peut
estimer de 4 à 5,000 le nombre des assis-
tants.
On remarque sur la scène MM. Mar-
guery. président du Comité de l'alimenta-
tion parisienne ; Girardin, président de la
Itération nationale des débitants de
France ; Paul Forsans, président du Syn-
dicat national du commerce en gros des
vins, cidres, spiritueux et liqueurs de
France ; Gambade, président de la Fédé-
ration des débitants en boissons de Bor-
deaux ; Grizard, président de l'Union syn-
dicale des débitants de vi.ns et liquoristes
de Paris et de la Danlieue ; Schauerntein
secrétaire de la Fédération nationale du
commerce ; Figuières, président de la
Chambre syndicale des marchands de
vins et liquoristes de Paris ; Oudin, pré-
sident du Syndicat général du commerce
en détail des vins et spiritueux de Faris
et de la Seine, etc. -
On remarquait encore plusieurs dépu-
tés' de Paris, notamment MM. Desplas,
Deloncle, Failliot, Georges Berry, Maurice
garrès et de nombreux conseillers munici-
paux, parmi lesquels MM. Denais et Alpy.
De nombreuses délégations avaient été
,envoyées de tous les points de la France,
i notamment de Bordeaux, de Lille, de
Rouen, de Reims, a'Epernay. de Chalon,
de Dijon, de Saint-Quentin, etc.
DISCOURS DE M. MARGUERY
A trois heures et quart, M. Marguery,
: toujours alerte, toujours vigoureux, tou-
jours dévoué à tout ce qui touche à la
(prospérité commerciale de notre pays,
I ouvre la séance en remerciant tous les
! assistants de leur présence, tous les dé-
légués de province, ainsi que les membres
du Parlement et du Conseil municipal tt
la presse. En quelques mots, il indique le
but du meeting.
Cette réunion, dit-il, a été motivée par les
charges nouvelles dont le commerce des
boissons et de l'alimentation est menacé.
Toutes les fois qu'il l'a fallu, nous avons
accepté des charges, et récemment, nous
l'avons fait. à propos du repos hebdoma-
daire, par devoir d'humanité envers nos
collaborateurs.
Nous avons eu déjà des surtaxes sur les
:boissons. Aujourd'hui on veut doubler des
licences qui n'ont plus de raison d'exister.
H semble que l'on veuille faire disparaître
une liberté que l'on considère comme gê-
nante. Elevons-nous avec énergie contre
de telles tendances. Nous subirons la loi
comme nous en avons subi d'autres, mais
nous protesterons.
On parle de supprimer nos établisse-
ments après deux condamnations encou-
rues. N'est-ce pas monstrueux, quand on
songe à la façon dont ics expertises conl
faites parfois ? Ce serait revenir à un siècle
en arrière.
Qu'a-t-on à nous reprocher ? Nous avons
accepté le repos hebdomadaire. Nous l'a-
vons rendu possible, alors, qu'on nous tri
refusait les moyens, grâce à une loyale en-
tente entre patrons et employés. N'avions-
nous pas créé les assurances contre les ac-
cidents, avant même que la loi nous les ait
imposées ?
Nous nous plaignons parce qu'on nous
frappe trop souvent et trop fort. C'est notre
droit.
Mais je vous demande de ne pas vous
départir, dans vos .protestations, du calme
et de la dignité qui font la force même des
protestations.
Les paroles du vénérable président
sont applaudies par l'unanimité des as-
sistants qui, on le sent, sont heureux de
lui manifester de la sorte toute leur sym-
pathie.
Le président donne alors la parole à M.
Girardin. président de la Fédération natio-
nale des débitants de France.
DISCOURS DE M. GIRARDIN
M. Girardin prononce un très remarqua-
ble discours, admirablement ordonné et
parfaitement documenté, et ce qui ne nuit
jamais, très éloquent parfois. Aussi ob-
tient-il un succès considérable.
Après avoir dit un mot d'élbge et de re-
merciement à l'adresse de M. Marguery et
de M. Forsans, dont la présence à la réu-
nion marque bien que toutes les corpora-
tions des liquides marchent la main dans
la main, M. Girardin expose le but de la
réunion.
« Le commerce, dit-il, doit se défendre et
protester contre les nouvelles charges
qu'on veut lui imposer. Il souffre déjà de
toutes les charges qu'on lui a imposées à
plaisir et la proposition de M. Caillaux est
comme la goutte d'eau qui fait déborder le
vase. »
Ce début est salué par de nombreux cris
hostiles au ministre des finances.
M. Girardin dit que les assistants sont
venus pour faire le procès d'un régime fis-
cal mauvais et qui. s'il devait s'éterniser,
finirait par conduire Ja République à sa
ruine. „
« Depuis vingt ans, - le Parlement s'est
occupé d'une façon vraiment excessive du
commerce des boissons- Il a fait une série
de lois, les unes fiscales, les autres répres-
sives, et toutes, ou à peu près toutes, au
détriment du commerce, n
Nous regrettons dé" ne pouvorr SUlvrc
l'orateur dans ses développements et d en
être réduit à ne signaler que ceux qui ont
plus particulièrement frappé notre atten-
tion.
M. Girardin passe en revue les diverses
lois qui intéressent le commerce des bois-
sons.
fi La loi du 14 août 1889 fut votée pour
donner de l'extension au commerce des
vins naturels. Le commerce n'a pas pro-
testé contre cette loi dans son principe
môme, mais il a .protesté parce que le légis-
lateur ne lui donnait pas le moyen de faire
la différence entre le vin de raisins frais et
les mélanges de ce vin avec celui de rai-
sins secs. On nous a dit que la science était
impuissante, et nous nous sommes incli-
nés, ce qui n'empêche que des débitants
ont. de très bonne foi, été souvent victi-
mes de cette loi.
« Il en a été de même de la loi du 11 juil-
let 1891" qui kitejxlit la présence de plus di
2 grammes de- sulfate- de potasse par litre -
de vin. Le commerce a protesté parce que,
-la encore, il y a eu des condamnations de,
COfflrneB/Iïts dont la bonne toi ne pouvait
être mise en doute, m
M. Girardin fait l'historique de la loi du
29 décembre 1897 qui permet aux munici-
palités de supprimer les droite sur les bois-
sons hygiéniques. Les commerçants, dit-il,
étaient partisans de cette réforme, mais à
condition de n'être pas frappés par des
taxes spéciales. On a supprimé à Parie,
le droit d'entrée et le diroit de détail, on a
laissé subsister le droit de circulation de
1 fr. 50 et en revanche on a augmenté les
licences et les droits sur les alcools, de
telle sorte que le dégrèvement n'a pu pro-
fiter ni au commerce ni aux petites bour-
sos.
En 1900, dit-il, nous avons dû payer les
droits sur les stocks d'alcool en notre pos-
session, mais il ne nous a été tenu aucun
compte des dégrèvements opérés sur les
vins qui se trouvaient en la possession des
commerçants.
Après avoir critiqué l'exposé des motifs
du projet Caillaux, M..lardin s'écrie :
« Comment, dans un pays de production
comme le nôtre, qui se fait un honneur de
posséder les vins de bordeaux, ceux de
bourgogne, les vins de Champagne, les fins-
bois des Charentcs, toutes ces marques,
tous ces crus que l'Europe nous envie, on
en arriverait sous un gouvernement de li-
berté. d'égalité et de fraternité, à considé-
rer que ce sont là des produits que l'on
doit frapper sans merci ; on en arriverait
à considérer les débitants comme une bon-
ne vache à lait qui doit alimenter nos dé-
ficits budgétaires ! ))
La salle fait à ce moment une ovation N
l'orateur et pousse des cris hostiles à MM.
Caillaux et Clemenceau.
Lorsque Je calme est rétabl' M. Girar-
din demaixie qu'il n'y ait pas de manifes-
tation. Tout à l'heure, dit-il, quand nous
allons nous séparer, vous pousserez le cri
de protestation qui convient en la circons-
tance, mais il est essentiel que cette ma-
nifestation soit digne d'hommes conscients.
comme vous l'êtes.
Nous avions dit à M. de de VcrniDae,
rapporteur au Sénat de la loi de 1900, nue
le gouvernement trouverait des mécomptes
budgétaires dans l'application de cette loi,
Nous avions dit vrai.
Le dégrèvement pour les vins. bières, ci-
dres, poirés était d'une somme de 125 mil-
lions 986,663 francs et la surtaxe pour les
alcools, vins de liqueurs, bouilleurs de cru,
licence, imposition des vendanges, sucra-
ges des vins de 126.067,412 francs, cela s'é-
quilibrait.
Les prévisions du ministre n'ont pas été
justifiées ; en cinq ans, de 1901 à 190o, il a
enregistré un déficit de 442,055,962 francs.
L'impôt des boissons rapportait avant ia
loi de 1900 la somme de 520,001,582 francs ;
après la loi, oh enregistre les recettes sui-
vantes. marquant un déficit de :
En 1901 : 433,062,260 francs soit un défi-
cit de 92,729,607 francs.
En 1902 : 42-1,062,2UO francs, soit un défi-
cit de 101,939,230 franci,.
En 1903 : 442,650,?9tî francs, scrit un défi-
cit de 83.344,791 francs. ,
En 1904 : 475,051,874 francs, soit un défi-
cit de 50,949,708 francs.
En 1905 : 413,309,019 francs, soit un défi-
cit de 113,692,537 francs.
Ainsi, en cinq ans, il s'est produit un
déficit de 442,655.962 francs, soit 88 millions
et demi par an, et cela continue jusqu'en
1908. Le déficit de ce chef dépasse le demi-
milliard.
Et l'on a fait, par surcroît, une réforme
à rebours. Le riche qui peut acheter son
vin à la pièce, profite du dégrèvement.
L'ouvrier a dû continuer à payer son vin
le même prix parce qu'il l'achète au lilre.
et que les charges imposées aux commer-
çants n'ont pas permis à ceux-ci de le fai-
re bénéficier d'une réduction. (Vifs applau-
dissements.)
M. Girardin fait ensuite' l'historique de
l'impôt des licences, qui est un impôt
monstrueux, une atteinte à la liberté du
commerce.
Il démontre que des licences, qui étaient
autrefois de 20 francs, ont atteint 450 fr.
dans les villes au-dessus de 100,000 habi-
tants. et qu'elles atteindront 900 franc.
avec 'le projet Caillaux.
Le législateur de 1816 qm a créé la licen-
ce avait peut-être des raisons de vouloir,
que le commerce des boissons ne soit pas
libre : ia hcnce s'expliquait ; mais Ja loi
du 17 juillet 1880 ayant rendu ce commer-
ce libre pour tous les ciioyens honnêtes et
dont le casier est vierge, la licence est de-
venue un impôt de superfétation, sans jus
tice, sans égalité-
Les licences rapportaient, avant la loi de
1900, 14 millions ; on leur demanda 22 mil-
Iions et elles les donnèrent ; et depuis
1903 elles donnent 36 millions. On trouve
que 'ce n'est pas suffisant-
On va demander 900 francs de licence à
un débitant pour lui permettre de vendre,
de l'-a.bintne.. -' l t. d t
Les hommes de la dont nom
sommes orgueilleux d'être les fils, ont d.
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