Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-06-01
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Description : 01 juin 1908 01 juin 1908
Description : 1908/06/01 (N13961). 1908/06/01 (N13961).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7571212r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
r wr 13901. — 12 Prairial An 116 T TJB ^IJ-MJbTJKO^ ; ;~ ÏV Juin 1BOB^-- N* 139Ô1 -
LE XIXE SIÈCLE
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i ANNONCES
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14, rue du Mail, Parti.
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Adreuw ,.r,..
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Ê TRIBUNE LIBRE
La Justice militaire,
-, - », *
«F1 -- '!
« Parmi les différentes ré-
formes qui nous furent pro-
mises par le gouvernement
actuel, l'une des plus urgen-
tes est, sans contredit, la îé-
forme de ce qu'on appelle la
justice militaire. M
C'est ainsi qu'en mars 1901, M. Cle-
menceau s'exprimait au début d'un ar-
ticle sur la réforme des conseils de
guerre ; mais nous nous plaisons à pen-
ser que si ces lignes s'appliquent point
par point au gouvernement actuel, avec
cette aggravation qu'au lieu d'avoir at-
tendu deux ans, nous attendons depuis
dix, il serait du moins injuste de penser
que le projet rapporté par notre collè-
gue Labori soit mis en sommeil définitif
Jians les cartons de la Chambre. Nous
espérons fermement qu'aussitôt l'impôt
sur le revenu voté, avant même la fin
4e la session ordinaire, la réforme des
conseils de guerre et de la justice mili-
taire pourra venir en utile discussion.
L'imminence de ce débat permet donc
'd'envisager dès maintenant les solutions
qui vont être proposées. Trois systèmes
sont en présence que Labori a, dans son
rnpport, ainsi formulés : *
1° Suppression absolue des conseils
'de guerre, même en temps de guerre ;
2° Suppression absolue des conseils de
guerre, mais seulement pendant le
, temps de paix, toutes les infractions
commises par les militaires ou marins
'devant être alors jugées, sans exception,
nar les tribunaux ordinaires ; -
,"" 3° Suppression des conseils de guerre
pendant le temps de paix ; renvoi devant
tes tribunaux ordinaires de tous les dé-
lits de droit commun, certaines infrac-
tions en nombre très restreint de carac-
tère essentiellement militaire, en ce sens
Qu'elles intéressent exclusivement la dis-
cipline et qu'on a appelées très ingé-
nieusement un résidu d'infractions spé-
ciales, restant seules passibles de tri-
bunaux particuliers Composés à la fois
ide juges civils et militaires. ,
<>* Ta commission de la réforme judi-
ciaire et la commission de l'armée ont,
Hune et l'autre, écarté le premier systè-
me. La suppression absolue des conseils
ffle guerre, même en temps dé guerre, ne
oserait pas seulement incompatible avec
-les nécessités de la guerre, elle serait
impraticable en fait. Les armées en
campagne ne pourraient évidemment dé
férer aux juridictions de droit commun
les militaires coupables. Crimes, délits,
y infractions de toutes sortes doivent pou-'
voir être jugés surplace, avec toute la
-célérité qu'exige, dans ces moments-là,
l'intérêt de la discipline, avec aussi, ce-
pendant, toutes les garanties indispen-
sables à la défense et aux droits des ac-
cusés.
Le second système compte encore à
la Chambre un grand nombre de parti-
sans ; il eût, il n'y a pas longtemps,
rallié la grande majorité des républi-
cains. Il avait les préférences de M. Cle-
menceau avant son arrivée au pouvoir ;
mais, en toute loyauté, on doit convenir
que si son opinion, sur ce point comme
sur d'autres, s'est modifiée, il en a don-
né de bonnes raisons. Nous pourrons les
discuter ; mais elles méritent d'être rap-
pelées. - - - - ,., -
: Pour expliquer, en effet, pourquoi le
gouvernement avait adopté le troisième
des systèmes formulés plus haut, M. le
président dU Conseil a fait les déclara-
tions suivantes :
« Nous avons été mus, a-t-il dit, par
'deux idées primordiales : d'abord, faire
'le droit ; ensuite, maintenir J'armée
"dans la discipline, ce qui est la condi-
tion nécessaire de sa puissance. Si nous
Voulons avoir des milices, des gardes
nationales, je ne vois aucun inconvénient
'à faire rentrer totalement les militaires
dans le droit commun ; si nous voulons
garder une armée forte, ainsi que cela
:me paraît indispensable dans l'état de
l'Europe, il faut nous rendre à cette évi-
dence qu'il y a une société civile, fondée
sur la liberté et une société militaire, à
travers laquelle tous les citoyens pas-
sent à un moment donné, fondée sur
l'obéissance. Je n'y peux rien, c'est un
fait.
Le jugé de la liberté peut-il être le
lige de l'obéissance ? J'aurais bien vou-
lu qu'il fût possible de réduire l'armée
et la société civile à un même droit. Je
vous avoue que c'est une question sur
laquelle, depuis quelques mois particu-
lièrement, je me suis interrogé tout seul,
très longuement. J'aurais été très satis-
fait si la solution du droit commun pur
et simple avait été praticable. Je dois
même confesser qu'à un moment donné
J'ai cédé à l'entraînement lorsqu'on m'a
'apporte un projet très séduisant qui
n'établissait plus qu'un droit universel.'
X Il y avait pourtant une limite à ce droit
universel ; un moment arrivait où il ces-
sait de fonctionner et où un officier pou-
vait, par us acte de sa volonté, imposer
soixante jours de prison à un soldat, ce
qui n'est pas, que je sache, une des con-
ceptions du code de la société- civile.
Puisque, même dans ce projet de droit
commun universel, je trouvais un résidu
de droit disciplinaire spécial, j'ai cher-
ché jusqu'où devait s'étendre la prolon-
gation de ce droit disciplinaire. J'ai été
ainsi conduit à penser que certains ac-
tes, refus d'obéissance, outrages, coups
et blessures commis sur un supérieur
étaient des actes d'indiscipline poussés
jusqu'à l'extrême limite et devaient être
réprimés comme tels. -
J'ai estimé que, .tant que nous aurons,
une armée, c'est un sacrifice auquel il
faudra nous résigner que d'avoir ces tri-
bunaux spéciaux pour juger des délits
et des crimes T qui sont vraiment spé-
ciaux. »
Nous devions, bien que longues, citer
tout entières ces déclarations du prési-
dent du Conseil ; nous ne leur oppose-
rons pas ses opinions antérieures, puis-
qu'il reconnaît lui-même en avoir chan-
gé ; nous ne lui adresserons pas les cri-
tiques qu'il faisait au projet de M. Wal-
deck-Rousseau et ne lui reprocherons
pas de s'en tenir aux demi-mesures et de
ne pas, suivant sa propre expression,
oser porter le fer rouge, dans le systè-
me en vigueur, jusqu'à complète guéri-
son.
* Mais puisqoo; suivant sa déclaration,,
le juge de la liberté ne peut pas être le
juge de l'obéissance, que signifient les
tribunaux mixtes qu'il nous propose
d'instituer, composés mi-partie de juges
civils, mi-partie de juges militaires ?
C'est, du moins nous le craignons,
créer un antagonisme fatal entre les
deux éléments qui composeront ces tri-
bunaux.
A 'coup sûr, la juridiction unique de
droit commun offrirait moins d'inconvé-
nients et le juge de la liberté, pour par-,
1er le langage du président du Conseil,
ne serait peut-être pas le juge le moins
sévère de l'obéissance.
- Mais si l'on considère devoir a tout
prix conserver des juges militaires, que
■ce soient alors des juges vraiment !
L'armée compte bien dans ses rangs
des médecins et des pharmaciens, pour-
quoi n'aurait-elle pas aussi ses magis-
trats militaires ? • -
Juges et soldats, ils offriraient les
garanties doubles de la connaissance du
droit et du sentiment exact des néces-;
sités de la discipline.
Nous ne faisons qu'ébaucher ici un
quatrième système dont ne parle point
le distingué rapporteur du projet de loi :
il nous apparaît pourtant de nature à'
concilier les thèses qui vont se trouver
en présence au cours des débats, que
nous espérons prOlchains, sur la suppres-
sion des conseils de guerre et la réforme
de la justice militaire.
En tout cas, nous souhaitons vivement
qu'on ne puisse appliquer au projet du
ministre actuel de la guerre ce qu'écri-
vait, en 1901, M. Clemenceau, du pro-
jet déposé par le ministre d'alors :
« Deux ans sont déjà passés depuis le
dépôt du projet. Galliffet. Encore un an
de coma et le progrès républicain par-
lementaire comptera, après tant d'au-
tres, un avortement de plus. »
: Paul BOURÉLY.
Député de PArdèche.
LA POLITIQUE
LES HOMMES-VOLANTS
La tournée que nos avia-
teurs font à l'étranger avait
assez mal commencé. Ils
avaient été. gênés par le mau-
vais temps, et M. Delagrage,
à Rome, n'ayant pu décider
son appareil à quitter le sol, - avait été
sifflé, conspué et s'était vu sur le point
d'être houspillé. -'
«► Mais le vent est tombé, et l'aviation
brille d'un éclat tout nouveau. -
En Belgique, M. Farman, ayant pris
un voyageur à son bord, vole pendant
plus d'un kilomètre à une hauteur de
sept mètres. En Italie, M. Delagrange
accomplit un bond de près de treize ki-
lomètres, battant tous les records de
distance et de durée, et gagnant le prix
de 40,000 francs offèrt par la Société
aéronautique de Rome.
Le premier de ces exploits montre que
l'aéroplane, quand, il aura été perfec-
tionné, cessera d'être uniquement un en-
gin de sport individuel; le second "fait
prévoir que le jour est proche où les aé-
roplanes quitteront les champs de ma-
nœuvre où ils sont confinés., pour accom-
plit 'des trajets plus ou moins longs, en
pleine campagne, à une vitesse analo-
gue à - celle des automobiles ordinaires
de route.
f * r *
A côté, ou plutôt au-dessous, du bal-
lon dirigeable, le plus lourd que l'air
est en train de prendre sa place.
C'est un séduisant petit jeu d'imagi-
nation de se demander - quelle importan-
ce vont prendre, ., dans la vie du siècle
l'aérostat ion et l'aviation. Beàucoup de
.gens se plaisent à croire que. nous allons
devenir une Lraœ d'oisellux. Ils s'atten-
dent à voir le tramway électrique et le
bateau express abandonnés pour des ser-
vices d'autobaHohs et d'aéroplanes, qui
utiliseraient la tour Eiffel et la tour
Saint-Jacques comme points d'arrêt' et
comme pontons.
Au risque d'être traités 'de sceptique,
il faut avouer que la réalisation de ces
rêves semble lointaine, et, autant dire,
improbable. -
Le défaut des machines aériennes de
tout genre, c'est qu'avant d'effectuer un
transport, elles doivent dépenser, line
force énorme pour enlever 'du sol une
charge qu'il est bien plus simple de pla-
cer sur quatre roues, et de pousser sans
perte d'énergie, jusqu'au point de des-
tination.
Le bon sens et la mécanique font com-
prendre que l'industrie îles gros trans-
ports a intérêt à ne pas quitter la terre
pour le ciel. C'est ce qui limite étran-
gement Importance économique des in-
ventions qui suscitent tant "de curiosité
et d'espoir.
Mais quand même l'aviation ne serait
qu'un sport élégant, impressionnant, sus-
ceptible d'ailleurs de quelques applica-
tions pratiques, notamment dans le do-
maine "des choses militaires, il faudrait
encore se réjouir. Une industrie restait
à créer. Nos inventeurs et nos sportsmen
en ont doté la France.
■mmmmmmmmwmmmwmmm i „ , ,
laIS ON-DIT
■m --
,,- NOTRE AGENDA
uio'urd 'hud dimanche :
* Lever du soleil à 4 h. 4 : coucher à
7 h. 50. * - — - -'
- Matinées. - Dans tous les tlféûlreg, sauf
à l'Opéra, à l'Odéon et aux Folies-Bergère.
Courses à Chantilly..
Du « Cri de Paris a
Quand M. Clemenceau entendit pro-
clamer le résultat du scrutin su'r la
taxation de la rente, 4i donna les signes
du plus complet étonnement. Il s'atten-
dait bien à une majorité puisqu'il avait
posé la question de confiance, mais
à une majorité de 179 voix 1 -
-. Or, \S pointeurs avaient, cdmjlaté
que beaucou-p demembres de la droite
avaient voté « blanc », c'est-à-dire pour
la taxe. •
- Ah 1 ça, oit M. Clemenceau à M.
Caillaux, ils ont donc tous envoyé leur
argent en Suisse ?
.,,*. • ¡-
Place Beauvau.
Des bruits sinistres courent sur le
Maroc ; inquiets, anxieux, les journa-
listes assiègent la porte de- M. le Pre-
mier. Enfin, il arrive * il saute léger
de son auto, tout ragaillardi par la
douche quotidienne et s'avance accom-
pagné de son molosse -blanc. :~
Souriant, bourru, il reçoit tout le
monde. « Des nouvelles du'Maroc ?
Adressez-vous à la Mehalla. »
Stupeur visible-de l'auditoire.
« Hé bien ! adressez-vous au capi-
taine ; comme c'est un ancien officier
d'état-major, je l'ai chargé du service
des renseignements »
AUTREFOIS
Rappel du 1er juin 1872. — On vient de
vendre les tableaux inachevés et les études
de Troyon, provenant de la collection con-
servée par {eue Mme Troyon. Le prix le
plus fort a été atteint par des « Vaches
paissant dans une plaine, près d'une riviè-
re » : 11.00j francs,
Mort de M. Alexandre Gouin, député et
ministre sous la monarchie de Juillet, re-
présentant en 1848, député, sénateur sous
l'Empire, et administrateur du chemin de
fer Paris-Lyon-Méditerranée.
Le nombre des accusés de la Commune
sur lesquels il a été statué, est actuelle-
ment de 31.892. Les condamnés par les
conseils de guerre sont au nombre de
8.415 qui se répartissent ainsi : à mort, 73 ;
aux travaux forcés, 212 ; déportation forti-
liée, 804 ; déportation simple 2.800 ;'délen-
tion, 1.160 ;réclusion, G0 ; emprisonnement
à trois mois et aIt-dessous, 305 ;emprison-
nement de trois mois à un an, 1.-373 ; em-
prisonnement de plus d'un an, 1.138 ; ban-
nissement, 291 ; les acquittements ont été
au nombre de 2.112 ; total des jugements,
10.527. -, r-
De la « Vie Parisienne n
Des Parisiens, l'autre jour, visitaient
le château de Versailles. M. de N.lhac,
gracieusement, avait mis à leur dispo-
sition un jeune gardien fort intelligent,
et fait ouvrir pour eux toutes les por-
tes. Comme on arrivait dans la salle
à manger de Louis XV, l'un d'eux s'in-
quiéta de savoir si parfois elle avait
servi à quelque réception. -
- Oui, Monsieur, dit-il, cet hiver. -
- Ah bah !
— Vous vous rappelez que Mme
Gr.ffulhe voulait restaurer et employer
le théâtre 'du château. Pour mie:ùX dis-
cuter, -le président du Sénat 'iui offrit
ici même un dîner. On fit >enir ici les
meubles, les couverts, rar-genterie^'du
rar.genterie~ 'du
garde-meuble, tout ce qu'il y avait 'de
l'époque ; on s'éclaira aux 'bougies :
Us étaient une dizaine. -
Ï -if «,7 ,_.
< r
Etonnement des Parisiens ! AH ! ces
républicains, que ne font-ils pas pour
une comtesse 1
— »
Il n'est Ue beaux dimanches, par les
.fortes .chaleurs, que,ceux passés à En-
ghien ; la coquette station thermale
qui, à onze minutes de la capitale, of-
fre, aux Parisiens le séjour lé plus
agréable, dans un cadre ravissant A
souhait, un casino superbement amé-
nagé et un restaurant dont le confort
parfait est agréablement conplété par
la possibilité de pro-longer, sur ses
: terrasses l'heure exquise du café.
En passant.
Les gazettes russes annoncent Vassassi-
Inat d'un honnête marchand de fourrures
d'irhoust, M. Baratof, que des terroristes
ont pris pour un grand duc. Le malheureux
se montrait très lier de cette ressemblance.
Dans les villes d'eaux où il se rendait, on
le comblait d'égards de toutes sortes. Il
avait beau s'évertuer à dire d'un air mo-
'deste : « Mais non, je vous assure, je suis
Baratof », tout le monde pensait : « Il veut
garder l'incognito » ; et les hôteliers re-
doublaient de prévenances, les touristes
d'égards, les gendarmes de saluts et les
petites femmes de sourires prometteurs.
< Ce pauvre M. Baratof, gentiment, se lais-
sait faire, très flatté, au fond, d'être pris
pour un oncle du tsar. ,
Il ne songeait pas au revers de celle - mé-
'daille à effigie princière.
: Cornue il se trouvait récemment dans un
hôtel, à Ir/wust, entouré, comme d'habitu-
de, d'un cercle de gogos respectueux, une
jeune femme, affiliée aux terroristes rus-
ses, prit, elle aussi, la fameuse ressemblan-
ce au sérieux, et tranquillement, à table
,d'hôte, au dessert, tira cinq coups de revol-
ver à bout portant sur le « "grand, duc ».-
lnforlMe de son erreur, celte-elîapmante
ipersonne répondit en souriant quënia mort
d'une victime de plus ou de moins n'avait
:{Ju.èr;e d'importance au cours des événe-,
ments qui se déroulent actuellement en.
Russie.
L'infortuné M. Baratof — s'il mU été con-
sulté — n'aurait sans doute pas été de cet
avis, et il eût réfléchi sur les inconvénients
:d'abdiquer sa personnalité pour jouer le a
'sosies. ,
On rencontre un peu partout des braveb
.ye" lfii H M)LéQPold, pour Edouard, pour Afaujan, pour
Deibler ou pour Dulayel. Ils vont déchanter
,désormais, et renoncer peut-dire à leur
douce manie, à la pensée qu'un anarchiste
embusqué derrière leur gloriole, peut mur-
'murer air leur passage : « Comme il res-
semble à un tel. c'est à tirer dessus ! »
Le Chemineau.
Le Gouvernement
> et la cérémonie Zola.
Nous avons déjà eu l'occasion de trou-
ver étrange la décision du gouvernement
qui a fixé au 4 juin prochain la cérémonie
du transfert des cendres de Zola au Pan-
théon, alors qu'elle aurait dû avoir lieu
en avril dernier. Il nous sera bien permis
de trouver également étrange que le gou-
vernement ait fait choix du jeudi, de pré-,
férence au dimanche, qui est le jour géné-
ralement adopté pour les solennités popu-
kllres,
En faisant choix d'un jour ouvrable pour
rendre à Zola les honneurs qui consacrent
son immortalité, le gouvernement a mon-,
tré une fois de plus son désir d'éviter -qüe;
la manifestation ne prenne les proportions
grandioses qu'elle devrait comporter et
que le courageux auteur de J'accuse et de
tant dt; chefs-d'œuvre littéraires a si lar-
gement mélitées.
La préoccupation qui n'a cessé de han-
ter le ministère n'a point échappé au peu-
ple parisien. Dans le nombre des lettres
que nous avons reçues à ce sujet, et qui
toutes protestent contre l'amoindrisse.'
ment voulu de la cérémonie, il en est une
que nous tenons à publier parce qu'elle
résume en quelque sorte toutes les autres.
et qu'elle émane d'un républicain aussi
modeste que convaincu.
On ira prendre, dit l'auteur de cette lettre, le
corps dû Zola, à onze heures du soir, dans un
fourgon - à la Ducros.
Pourquoi cette heure nocturne plutôt que le
grand jour ?
Qu-ellc triste comédie va se jouer le 4 juin 1
N'cût-il pas cent fois mieux valu laisser Zola
dormir son dernier sommeil a Montmartre, plu-
tôt que dlnlliger à sa mémoire cette grotesque
comédie ? Car tout est grotesque dans le pro-
gramme qui a Été arrêté : transfert de nuit, un
discours, un morceau de musique : Le Chant du
départ, et. c'est fout.
Les restes de Zola méritent mieux que cela.
Ils devraient être portés au grand jour, et en
cortège, de Montmartre au Panthéon, au milieu
d-J la population parisienne, qui aurait bien su
venger^la mémoire de l'écrivain de la boue qu on
lui a jetée. ,
On a préféré la cérémonie de la peur.
* Ne s'élèvera-t-il pas une voix, dans la presse
ou à la tribune, pour réclamer une cérémonie
populaire et forcer la main au gouvernement ?
Et. c'est M Clemenceau, le compagnon de lutte
de Zola. qui recule devant les menaces des na-
tionalisæs ?
N'est-il pas du devoir du parti radical-socia-
liste de relever la tête quand son chef courbe la
sienne devant les cléricaux 1
Un cortège peut s'improviser dans Paris du
iour au lendemain. Pourquoi ne pas l'exiger du
gouvernement ? PourquoS donner des Armes
aux adversaires de la, République, qui ne man-
aueront pas de. s'en servir le lendemain en di-
sant que l'on n'a pas osé faire une cérémonie
populaire ?
Triste, bien triste, en effet, la comédie qui se
prépare. Quel écœurement pour les vrais répu;
blicains 1
NOUS n'ajouterons qu'un mot à la lettre
de notre. correspondant ; Pourquoi le
gouvernement refuse-t-id systématiquement
a la TWDulation républicaine de Paris l'oc-
casion de se livrer à une manifestation
grandiose, s'il n'obéit pas à un sentiment
de crainte que rien ne justifie, ou, ce qui
serait plus grave, à un calcul politique
dont on peut aisément soupçonner la por-
tée et les conséquences ? - P. G-
W-
i - !
TRIBUNE CORPORATIVE -
t
, -L.' \m J Jï
Dans un précédent numéro (11 mai),
nous avons donné les causes du dépla-
cement d'office chez les instituteurs ;
nous avons exposé aussi les conséquen-
ces matérielles et morales qui en dé-
coulent pour ces modestes fonctionnai-
res. Nous allons essayer, aujourd'hui,
jde rendre compte, aussi exactement
; que possible, des désiderata exprimés
'par le personnel enseignant, dans ses
associations professionnelles et dans
: ses congrès.
Le déplacement d'office, qui se re-
trouve dans toutes les catégories de"
fonctionnaires, a donné lieu, au Parle-
iment, à plusieurs propositions qui n'ont
pas eu de suite. En 1806, la Chambre
-.eût à examiner un projet de loi présenté
par M. Lavy. En 1898, ce même projet
non adopté fut repris avec quelques
; m{)di-fi c.ati on s et améliorations, sans
plus de succès,, par MM. Couyba et
Roujon. L'échec de ces propositions
était .dû beaucoup plus à l'imprécision
',d'Ûs: causes dés déplacements qu'à la
non-justification de la nécessité d-e ga-
irantàes. Tout le monde reconnaissait
ique le déplacement d'offtte, noii' justx:
:né, existait, était même très fréquent.
Mais il restait à démontrer la nécessité
d'une loi, en définissant le déplacement
d'office proprement dit.
Le congrès des instituteurs tenu à
Lille en 1905 se chargea d'éclairer la
situation et d'apporter une argumenta-
tion décisive. Nous avons sous les yeux
le compte rendu te des vœux émis. Les congressistes
pensèrent, dès le début de la q.j:-;cus-
.sion, à définir le déplacement d'office,
¡.qui, sans être considéré comme une
peine disciplinaire, est cependant une
peine à un double titre ; peine matériel-
le, parce qu'il occasionne une p«rie
très grande (frais de déplacement) , pei-
ne morale, parce qu'il déconsidère l'ins-
tituteur déplacé.,
Le-cpngrès établit que le QpHlcemcnL
justifié .par une faute professionnelle ou
pour une raison d'ordre moral n'était
pas un -déplacement d'office propre-
ment dit, puisque, dans ces cas, ce dé-
placement est" accepté et très souvent
demandé par l'intéressé lui-niême. C'est
ce déplacement que les règlements dé-
signent sous la formulé : « pouméces-
sité de service n. Mais, comme tous les
cas peuvent être assimilés à tort ou 4
maison à la nécessité du service, les ins-
tituteurs définirent ainsi le déplace-
ment d'office r: « On nomme déplace-
ment d'office tout déplacement non ac*
cepté par écrit par l'intéressé. » CQttar
définition simple et logique ne préto.,
pas à critique. Si le déplacement n'estf
pas- accepté, c'est que l'intéressé ne*
croit pas avoir commis une faute qui la ;
justifie. Et si le déplacement a lieu mai-
gré son refus, il est bien d'office. c'csr
pour ces cas seulement que les ingtitu- -
teurs réclament des garanties sérieuses
qui nous paraissent des plus raisoiincli
bles. Voici, en effet, ce qu'ils deman-
dent : « Le changement d'une école ï
une autre sera prononcé- par le préfet
sur la proposition de l'inspecteur d'a-r
cadémie. -Si le nouveau poste n'est pa3:
accepté par écrit par l'intéressé, là dé-
cision ne' pourra être prise qu'après,
avis motivé et conformée du conseil dé-
partemental, avis donné dans les mê-
mes formes et avec les mêmes garan*.
ties qu'en matière de révocation. » 1
Peut-on concevoir que, sans contrôle,
pour des, causes politiques ou pour desr.
accusations non prouvées un fonction-
naire puisse être déplacé d vme ville à;
'une autre. subisse par cela même une.
perte, matérielle sensible et une décon-
sidération morale indiscutable, saïts
qu'inui soit donné dé faire appel dé lâr*
décision prise contre lui devant un con.,
seil de discipline existant, institué par.
la loi pour assurer des garanties de jus-,
tice et de sécurité ? , -
A la suite du congrès de Lille,M. BienJ
venu Martin, alors ministre de l'ins..,
truction publique, reconnaissant la
bien-fondé des rcvendicatioais du per-
sonnel enseignant, déposa un projet de
loi donnant les garanties réclamées. Fa-
attendant le vote de ce projet, M.
Briand. devenu ministre, adressa une
: circulaire aux préfets, le 6 avril 1906*
kâreulaire qui n'avait d'autre but que de
devancer la loi projetée.
Le persontnel enseignant est victime,
plus que jamais, des déplacements d'of-
fice. Une circulaire, ne peut avoir cks
effets durables, elle est trop vite ou-v
bliée. La loi, au contraire, est toujours
respectée par ceux qui sont chargés
de l'appliquer. Elle seule est une ga-
rantie, parce qu'elle s'impose.
Cette loi sera-tne prochainement
votée ? Nous l'espérons. Dans un pro-.
chaki article, nous feJ'o-nS":e-naHr{} les.
arguments invoqués contre cette me-"
sure de' Justice, 1
f;.' - ,:,- , J- , P. Courrège. j
UN DRAME SANGLANT ET MYSTÉRIEUX
--,..
Au 186, boulevard Haussmann. - Un étudiant turc blesse le
fils et la mère. — Etat grave de l'une des victimes.
- Le meurtrier serait fou. ,",,"
Deux gardiens de la paix du Se arrondis-
sement, les agents Darrot et Armand,
effectuaient une ronde, la nuit dernière,
vers deux heures du matin. boulevard
Haussmann, lorsque leur attention fut ap-
ïpelée par les cris « Au secours 1 » qui par-
taient d'une fenêtre située au deuxième
étage du n° 186. Ils se disposaient à péné-
trer dans l'immeuble quand la porte s'ou-
vrit subitement, donnant passage à un
homme d'une quarantaine d'années qui
sortait, tête nue, en redingote et tenant
un couteau ensanglanté dans la main
droite.
Aux agents qui l'interpellaient, il répon-
dit : « Oui, je crois bien que je viens d'as-
sassiner deux personnes là-haut. » Les
agents l'appréhendèrent aussitôt, réveHlè-
rent le concierge qui, en voyant le nou-
veau venu, s'écria : « Tiens 1 c'est M. Ré-
cliid Mustapha », puis montèrent en sa
compagnie jusqu'à l'appartement d'où
étaient partis les Cris de détresse et qui
est occupé par le prince Mehemed Ali. La
porte était barricadée. Elle fut ouverte sur
leurs instances et là, ils trouvèrent, cou-
ché sur son lit et baignant dans une mare
de sang, le neveu du prince, un jeune
homme de vingt-quatre ans, Salah el Din.
A ses côtés, se tenait sa mère, la pnp-
cèsse Fatma Fazil sœur deMehcmed Ali.
dont le visage était également couvert de
sang. Tous deux venaient d'être dangereu-
sement blessés par Réchid Mustapha qui,
pénétrant à l'improviste dans l'apparte-
ment dont il avait la clef, les avait frap-
pés à coups de couteau, le premier portant
une profonde blessure à l'arcade sourci-
lière et sa mère plusieurs coups de cou-
teau -à la tète, mais n'ayant occasionné que
des blessures peu graves. Quant à Mehe-
med Ali, il dormait profondément dans
une pièce à côté.
Une enquête sommaire révèle l'origine du
meurtrier
L'enquête ouverte au sujet de cette dou-
ble tentative de meurtre par M. Baube.
commissaire de police du quartier du Rou-
le, a permis de reconstituer comme il suit
les circonstances. qui ont précédé cette
mystérieuse agression.
Sujet turc, originaire de Césarée, Réchid
Mustapha, qui est étudiant en médecine et
qui allait passer sa thèse de dw^rat, es.1
âgé de trente-quatre ans. Dès son arrivée
à Paris, il avait été recueilli par le pnnce
Mehemed AU. -son compatriote, chez qui il
avait trouvé le gîte et le couvert. Héclnd
occupait ordinairement une pièce de l'ap-
partement, lorsque, recevant avant-hier la
visite de sa sœur et de son neveu qui de-
vaient passer la nuit chez lui, Mehemed
Ali k nria de lui céder momentanément sa
t chambre et lui Sonna de l'argent pour
coiwkes à VhôteL On ignore ce que
fit alors Réchid Mustapha. A l'en croire, A
aurait passé une partie de la soirée sur 14
boulevard Saint-Michel, puis aurait ét4
voir un de ses amis, le docteur if. qui
lui aurait suggéré l'idée d'aller assassine^
la princesse fcatma et son fils, Salah ci
Din, qu'il n'avait jamais vus. -
Incohérentes déclarations de Réchid
- Mustapha
« J'étais couché, a-t-il dit à M. Baubey
dans une chambre d'hôtel, rue Royer-Col-
lard, quand je m'éveillai soudain, en proia
à un cauchemar épouvantable. Je me levai
sans savoir exactement ce que je fnisailf
et comme si j'obéissais * à une volonté
étrangère. Je pris une voiture qui me con-
duisit, 186, boulevard Haussmann. Je pé.'
nétrai sans - difficulté dans J'appartement
dont j'avais la clef, puis, trouvant un
étranger couché dans mon lit, je le frappai
aveuglément dans l'obscurité, avec iiii
couteau que j'avais été chercher à la cui.
sine. Une femme étant accourue aux cris
poussés par l'inconnu, je la frappai éaolc
ment. Je suis irresponsable. J'ai agi dans
une crisfi de folie, obéissant involontaire-
ment aux suggestions du docteur H. , qus
j'avais vu dans la soirée et qui m'a déjà
endormi à plusieurs reprises. »
L'état grave du jeune homme nécessite
son transport à l'hôpital
Comme nous le disons plus haut, le"
blessures très graves de Salah el Din, Sent-
le corps est labouré de -coups de coula '1,
ont nécessité son transport immédiat de j*
un des services de chirurgie 7fe l'hôpi J
Beaujon, ou il est l'objet des soins las piJi
dévoués.
Les médecins qui le soignent ne déses.
pèrent pas de sa guérison.
Les blessures de la mère
La vaillante princesse qui n'avait paf
hésité il sacrifier sa vie pour se porter ail
secours de son fils, aux premiers appels de
celui-ci, n'a été, c'est un miracle, que fort
peu grièvement blessée par le forcené.
Elle n'est pas hospitalisée à Beaujon.
comme on l'avait dit tout d abord.
Mme la princesse Fatma Fazil est ren-
trée, avec son mari Ahmed Fouod. à l'hô-
tel particulier qu'ils habitent, t)7 bis, rut
Scheffer..
Un médecin, mandé en toute hate, es'
venu panser les multiples blessures qu elli
venait de recevoir à la tête en. arrachant,
nar son dévouement maternel, son enfanî
des mains du sauvage meurtrier qui allait
lui donner la mort.
Le meurtrier est-il responsable de son
forfait 7 -
A la cuite de l'interrogatoire que M.
Baube a fait subir à Réchid Mustapha, 81!
poste de la rue de la Boëtie, où il est resH
un.e partie JU> ^linée» il semble resu\
¿"
LE XIXE SIÈCLE
----- <'" - -
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14, rue du Mail, Parti.
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Adresser lettres et mandats à F Administrateur VI> »? f
Adreuw ,.r,..
»r-'H , - ,
Ê TRIBUNE LIBRE
La Justice militaire,
-, - », *
«F1 -- '!
« Parmi les différentes ré-
formes qui nous furent pro-
mises par le gouvernement
actuel, l'une des plus urgen-
tes est, sans contredit, la îé-
forme de ce qu'on appelle la
justice militaire. M
C'est ainsi qu'en mars 1901, M. Cle-
menceau s'exprimait au début d'un ar-
ticle sur la réforme des conseils de
guerre ; mais nous nous plaisons à pen-
ser que si ces lignes s'appliquent point
par point au gouvernement actuel, avec
cette aggravation qu'au lieu d'avoir at-
tendu deux ans, nous attendons depuis
dix, il serait du moins injuste de penser
que le projet rapporté par notre collè-
gue Labori soit mis en sommeil définitif
Jians les cartons de la Chambre. Nous
espérons fermement qu'aussitôt l'impôt
sur le revenu voté, avant même la fin
4e la session ordinaire, la réforme des
conseils de guerre et de la justice mili-
taire pourra venir en utile discussion.
L'imminence de ce débat permet donc
'd'envisager dès maintenant les solutions
qui vont être proposées. Trois systèmes
sont en présence que Labori a, dans son
rnpport, ainsi formulés : *
1° Suppression absolue des conseils
'de guerre, même en temps de guerre ;
2° Suppression absolue des conseils de
guerre, mais seulement pendant le
, temps de paix, toutes les infractions
commises par les militaires ou marins
'devant être alors jugées, sans exception,
nar les tribunaux ordinaires ; -
,"" 3° Suppression des conseils de guerre
pendant le temps de paix ; renvoi devant
tes tribunaux ordinaires de tous les dé-
lits de droit commun, certaines infrac-
tions en nombre très restreint de carac-
tère essentiellement militaire, en ce sens
Qu'elles intéressent exclusivement la dis-
cipline et qu'on a appelées très ingé-
nieusement un résidu d'infractions spé-
ciales, restant seules passibles de tri-
bunaux particuliers Composés à la fois
ide juges civils et militaires. ,
<>* Ta commission de la réforme judi-
ciaire et la commission de l'armée ont,
Hune et l'autre, écarté le premier systè-
me. La suppression absolue des conseils
ffle guerre, même en temps dé guerre, ne
oserait pas seulement incompatible avec
-les nécessités de la guerre, elle serait
impraticable en fait. Les armées en
campagne ne pourraient évidemment dé
férer aux juridictions de droit commun
les militaires coupables. Crimes, délits,
y infractions de toutes sortes doivent pou-'
voir être jugés surplace, avec toute la
-célérité qu'exige, dans ces moments-là,
l'intérêt de la discipline, avec aussi, ce-
pendant, toutes les garanties indispen-
sables à la défense et aux droits des ac-
cusés.
Le second système compte encore à
la Chambre un grand nombre de parti-
sans ; il eût, il n'y a pas longtemps,
rallié la grande majorité des républi-
cains. Il avait les préférences de M. Cle-
menceau avant son arrivée au pouvoir ;
mais, en toute loyauté, on doit convenir
que si son opinion, sur ce point comme
sur d'autres, s'est modifiée, il en a don-
né de bonnes raisons. Nous pourrons les
discuter ; mais elles méritent d'être rap-
pelées. - - - - ,., -
: Pour expliquer, en effet, pourquoi le
gouvernement avait adopté le troisième
des systèmes formulés plus haut, M. le
président dU Conseil a fait les déclara-
tions suivantes :
« Nous avons été mus, a-t-il dit, par
'deux idées primordiales : d'abord, faire
'le droit ; ensuite, maintenir J'armée
"dans la discipline, ce qui est la condi-
tion nécessaire de sa puissance. Si nous
Voulons avoir des milices, des gardes
nationales, je ne vois aucun inconvénient
'à faire rentrer totalement les militaires
dans le droit commun ; si nous voulons
garder une armée forte, ainsi que cela
:me paraît indispensable dans l'état de
l'Europe, il faut nous rendre à cette évi-
dence qu'il y a une société civile, fondée
sur la liberté et une société militaire, à
travers laquelle tous les citoyens pas-
sent à un moment donné, fondée sur
l'obéissance. Je n'y peux rien, c'est un
fait.
Le jugé de la liberté peut-il être le
lige de l'obéissance ? J'aurais bien vou-
lu qu'il fût possible de réduire l'armée
et la société civile à un même droit. Je
vous avoue que c'est une question sur
laquelle, depuis quelques mois particu-
lièrement, je me suis interrogé tout seul,
très longuement. J'aurais été très satis-
fait si la solution du droit commun pur
et simple avait été praticable. Je dois
même confesser qu'à un moment donné
J'ai cédé à l'entraînement lorsqu'on m'a
'apporte un projet très séduisant qui
n'établissait plus qu'un droit universel.'
X Il y avait pourtant une limite à ce droit
universel ; un moment arrivait où il ces-
sait de fonctionner et où un officier pou-
vait, par us acte de sa volonté, imposer
soixante jours de prison à un soldat, ce
qui n'est pas, que je sache, une des con-
ceptions du code de la société- civile.
Puisque, même dans ce projet de droit
commun universel, je trouvais un résidu
de droit disciplinaire spécial, j'ai cher-
ché jusqu'où devait s'étendre la prolon-
gation de ce droit disciplinaire. J'ai été
ainsi conduit à penser que certains ac-
tes, refus d'obéissance, outrages, coups
et blessures commis sur un supérieur
étaient des actes d'indiscipline poussés
jusqu'à l'extrême limite et devaient être
réprimés comme tels. -
J'ai estimé que, .tant que nous aurons,
une armée, c'est un sacrifice auquel il
faudra nous résigner que d'avoir ces tri-
bunaux spéciaux pour juger des délits
et des crimes T qui sont vraiment spé-
ciaux. »
Nous devions, bien que longues, citer
tout entières ces déclarations du prési-
dent du Conseil ; nous ne leur oppose-
rons pas ses opinions antérieures, puis-
qu'il reconnaît lui-même en avoir chan-
gé ; nous ne lui adresserons pas les cri-
tiques qu'il faisait au projet de M. Wal-
deck-Rousseau et ne lui reprocherons
pas de s'en tenir aux demi-mesures et de
ne pas, suivant sa propre expression,
oser porter le fer rouge, dans le systè-
me en vigueur, jusqu'à complète guéri-
son.
* Mais puisqoo; suivant sa déclaration,,
le juge de la liberté ne peut pas être le
juge de l'obéissance, que signifient les
tribunaux mixtes qu'il nous propose
d'instituer, composés mi-partie de juges
civils, mi-partie de juges militaires ?
C'est, du moins nous le craignons,
créer un antagonisme fatal entre les
deux éléments qui composeront ces tri-
bunaux.
A 'coup sûr, la juridiction unique de
droit commun offrirait moins d'inconvé-
nients et le juge de la liberté, pour par-,
1er le langage du président du Conseil,
ne serait peut-être pas le juge le moins
sévère de l'obéissance.
- Mais si l'on considère devoir a tout
prix conserver des juges militaires, que
■ce soient alors des juges vraiment !
L'armée compte bien dans ses rangs
des médecins et des pharmaciens, pour-
quoi n'aurait-elle pas aussi ses magis-
trats militaires ? • -
Juges et soldats, ils offriraient les
garanties doubles de la connaissance du
droit et du sentiment exact des néces-;
sités de la discipline.
Nous ne faisons qu'ébaucher ici un
quatrième système dont ne parle point
le distingué rapporteur du projet de loi :
il nous apparaît pourtant de nature à'
concilier les thèses qui vont se trouver
en présence au cours des débats, que
nous espérons prOlchains, sur la suppres-
sion des conseils de guerre et la réforme
de la justice militaire.
En tout cas, nous souhaitons vivement
qu'on ne puisse appliquer au projet du
ministre actuel de la guerre ce qu'écri-
vait, en 1901, M. Clemenceau, du pro-
jet déposé par le ministre d'alors :
« Deux ans sont déjà passés depuis le
dépôt du projet. Galliffet. Encore un an
de coma et le progrès républicain par-
lementaire comptera, après tant d'au-
tres, un avortement de plus. »
: Paul BOURÉLY.
Député de PArdèche.
LA POLITIQUE
LES HOMMES-VOLANTS
La tournée que nos avia-
teurs font à l'étranger avait
assez mal commencé. Ils
avaient été. gênés par le mau-
vais temps, et M. Delagrage,
à Rome, n'ayant pu décider
son appareil à quitter le sol, - avait été
sifflé, conspué et s'était vu sur le point
d'être houspillé. -'
«► Mais le vent est tombé, et l'aviation
brille d'un éclat tout nouveau. -
En Belgique, M. Farman, ayant pris
un voyageur à son bord, vole pendant
plus d'un kilomètre à une hauteur de
sept mètres. En Italie, M. Delagrange
accomplit un bond de près de treize ki-
lomètres, battant tous les records de
distance et de durée, et gagnant le prix
de 40,000 francs offèrt par la Société
aéronautique de Rome.
Le premier de ces exploits montre que
l'aéroplane, quand, il aura été perfec-
tionné, cessera d'être uniquement un en-
gin de sport individuel; le second "fait
prévoir que le jour est proche où les aé-
roplanes quitteront les champs de ma-
nœuvre où ils sont confinés., pour accom-
plit 'des trajets plus ou moins longs, en
pleine campagne, à une vitesse analo-
gue à - celle des automobiles ordinaires
de route.
f * r *
A côté, ou plutôt au-dessous, du bal-
lon dirigeable, le plus lourd que l'air
est en train de prendre sa place.
C'est un séduisant petit jeu d'imagi-
nation de se demander - quelle importan-
ce vont prendre, ., dans la vie du siècle
l'aérostat ion et l'aviation. Beàucoup de
.gens se plaisent à croire que. nous allons
devenir une Lraœ d'oisellux. Ils s'atten-
dent à voir le tramway électrique et le
bateau express abandonnés pour des ser-
vices d'autobaHohs et d'aéroplanes, qui
utiliseraient la tour Eiffel et la tour
Saint-Jacques comme points d'arrêt' et
comme pontons.
Au risque d'être traités 'de sceptique,
il faut avouer que la réalisation de ces
rêves semble lointaine, et, autant dire,
improbable. -
Le défaut des machines aériennes de
tout genre, c'est qu'avant d'effectuer un
transport, elles doivent dépenser, line
force énorme pour enlever 'du sol une
charge qu'il est bien plus simple de pla-
cer sur quatre roues, et de pousser sans
perte d'énergie, jusqu'au point de des-
tination.
Le bon sens et la mécanique font com-
prendre que l'industrie îles gros trans-
ports a intérêt à ne pas quitter la terre
pour le ciel. C'est ce qui limite étran-
gement Importance économique des in-
ventions qui suscitent tant "de curiosité
et d'espoir.
Mais quand même l'aviation ne serait
qu'un sport élégant, impressionnant, sus-
ceptible d'ailleurs de quelques applica-
tions pratiques, notamment dans le do-
maine "des choses militaires, il faudrait
encore se réjouir. Une industrie restait
à créer. Nos inventeurs et nos sportsmen
en ont doté la France.
■mmmmmmmmwmmmwmmm i „ , ,
laIS ON-DIT
■m --
,,- NOTRE AGENDA
uio'urd 'hud dimanche :
* Lever du soleil à 4 h. 4 : coucher à
7 h. 50. * - — - -'
- Matinées. - Dans tous les tlféûlreg, sauf
à l'Opéra, à l'Odéon et aux Folies-Bergère.
Courses à Chantilly..
Du « Cri de Paris a
Quand M. Clemenceau entendit pro-
clamer le résultat du scrutin su'r la
taxation de la rente, 4i donna les signes
du plus complet étonnement. Il s'atten-
dait bien à une majorité puisqu'il avait
posé la question de confiance, mais
à une majorité de 179 voix 1 -
-. Or, \S pointeurs avaient, cdmjlaté
que beaucou-p demembres de la droite
avaient voté « blanc », c'est-à-dire pour
la taxe. •
- Ah 1 ça, oit M. Clemenceau à M.
Caillaux, ils ont donc tous envoyé leur
argent en Suisse ?
.,,*. • ¡-
Place Beauvau.
Des bruits sinistres courent sur le
Maroc ; inquiets, anxieux, les journa-
listes assiègent la porte de- M. le Pre-
mier. Enfin, il arrive * il saute léger
de son auto, tout ragaillardi par la
douche quotidienne et s'avance accom-
pagné de son molosse -blanc. :~
Souriant, bourru, il reçoit tout le
monde. « Des nouvelles du'Maroc ?
Adressez-vous à la Mehalla. »
Stupeur visible-de l'auditoire.
« Hé bien ! adressez-vous au capi-
taine ; comme c'est un ancien officier
d'état-major, je l'ai chargé du service
des renseignements »
AUTREFOIS
Rappel du 1er juin 1872. — On vient de
vendre les tableaux inachevés et les études
de Troyon, provenant de la collection con-
servée par {eue Mme Troyon. Le prix le
plus fort a été atteint par des « Vaches
paissant dans une plaine, près d'une riviè-
re » : 11.00j francs,
Mort de M. Alexandre Gouin, député et
ministre sous la monarchie de Juillet, re-
présentant en 1848, député, sénateur sous
l'Empire, et administrateur du chemin de
fer Paris-Lyon-Méditerranée.
Le nombre des accusés de la Commune
sur lesquels il a été statué, est actuelle-
ment de 31.892. Les condamnés par les
conseils de guerre sont au nombre de
8.415 qui se répartissent ainsi : à mort, 73 ;
aux travaux forcés, 212 ; déportation forti-
liée, 804 ; déportation simple 2.800 ;'délen-
tion, 1.160 ;réclusion, G0 ; emprisonnement
à trois mois et aIt-dessous, 305 ;emprison-
nement de trois mois à un an, 1.-373 ; em-
prisonnement de plus d'un an, 1.138 ; ban-
nissement, 291 ; les acquittements ont été
au nombre de 2.112 ; total des jugements,
10.527. -, r-
De la « Vie Parisienne n
Des Parisiens, l'autre jour, visitaient
le château de Versailles. M. de N.lhac,
gracieusement, avait mis à leur dispo-
sition un jeune gardien fort intelligent,
et fait ouvrir pour eux toutes les por-
tes. Comme on arrivait dans la salle
à manger de Louis XV, l'un d'eux s'in-
quiéta de savoir si parfois elle avait
servi à quelque réception. -
- Oui, Monsieur, dit-il, cet hiver. -
- Ah bah !
— Vous vous rappelez que Mme
Gr.ffulhe voulait restaurer et employer
le théâtre 'du château. Pour mie:ùX dis-
cuter, -le président du Sénat 'iui offrit
ici même un dîner. On fit >enir ici les
meubles, les couverts, rar-genterie^'du
rar.genterie~ 'du
garde-meuble, tout ce qu'il y avait 'de
l'époque ; on s'éclaira aux 'bougies :
Us étaient une dizaine. -
Ï -if «,7 ,_.
< r
Etonnement des Parisiens ! AH ! ces
républicains, que ne font-ils pas pour
une comtesse 1
— »
Il n'est Ue beaux dimanches, par les
.fortes .chaleurs, que,ceux passés à En-
ghien ; la coquette station thermale
qui, à onze minutes de la capitale, of-
fre, aux Parisiens le séjour lé plus
agréable, dans un cadre ravissant A
souhait, un casino superbement amé-
nagé et un restaurant dont le confort
parfait est agréablement conplété par
la possibilité de pro-longer, sur ses
: terrasses l'heure exquise du café.
En passant.
Les gazettes russes annoncent Vassassi-
Inat d'un honnête marchand de fourrures
d'irhoust, M. Baratof, que des terroristes
ont pris pour un grand duc. Le malheureux
se montrait très lier de cette ressemblance.
Dans les villes d'eaux où il se rendait, on
le comblait d'égards de toutes sortes. Il
avait beau s'évertuer à dire d'un air mo-
'deste : « Mais non, je vous assure, je suis
Baratof », tout le monde pensait : « Il veut
garder l'incognito » ; et les hôteliers re-
doublaient de prévenances, les touristes
d'égards, les gendarmes de saluts et les
petites femmes de sourires prometteurs.
< Ce pauvre M. Baratof, gentiment, se lais-
sait faire, très flatté, au fond, d'être pris
pour un oncle du tsar. ,
Il ne songeait pas au revers de celle - mé-
'daille à effigie princière.
: Cornue il se trouvait récemment dans un
hôtel, à Ir/wust, entouré, comme d'habitu-
de, d'un cercle de gogos respectueux, une
jeune femme, affiliée aux terroristes rus-
ses, prit, elle aussi, la fameuse ressemblan-
ce au sérieux, et tranquillement, à table
,d'hôte, au dessert, tira cinq coups de revol-
ver à bout portant sur le « "grand, duc ».-
lnforlMe de son erreur, celte-elîapmante
ipersonne répondit en souriant quënia mort
d'une victime de plus ou de moins n'avait
:{Ju.èr;e d'importance au cours des événe-,
ments qui se déroulent actuellement en.
Russie.
L'infortuné M. Baratof — s'il mU été con-
sulté — n'aurait sans doute pas été de cet
avis, et il eût réfléchi sur les inconvénients
:d'abdiquer sa personnalité pour jouer le a
'sosies. ,
On rencontre un peu partout des braveb
.ye" lfii H M)
Deibler ou pour Dulayel. Ils vont déchanter
,désormais, et renoncer peut-dire à leur
douce manie, à la pensée qu'un anarchiste
embusqué derrière leur gloriole, peut mur-
'murer air leur passage : « Comme il res-
semble à un tel. c'est à tirer dessus ! »
Le Chemineau.
Le Gouvernement
> et la cérémonie Zola.
Nous avons déjà eu l'occasion de trou-
ver étrange la décision du gouvernement
qui a fixé au 4 juin prochain la cérémonie
du transfert des cendres de Zola au Pan-
théon, alors qu'elle aurait dû avoir lieu
en avril dernier. Il nous sera bien permis
de trouver également étrange que le gou-
vernement ait fait choix du jeudi, de pré-,
férence au dimanche, qui est le jour géné-
ralement adopté pour les solennités popu-
kllres,
En faisant choix d'un jour ouvrable pour
rendre à Zola les honneurs qui consacrent
son immortalité, le gouvernement a mon-,
tré une fois de plus son désir d'éviter -qüe;
la manifestation ne prenne les proportions
grandioses qu'elle devrait comporter et
que le courageux auteur de J'accuse et de
tant dt; chefs-d'œuvre littéraires a si lar-
gement mélitées.
La préoccupation qui n'a cessé de han-
ter le ministère n'a point échappé au peu-
ple parisien. Dans le nombre des lettres
que nous avons reçues à ce sujet, et qui
toutes protestent contre l'amoindrisse.'
ment voulu de la cérémonie, il en est une
que nous tenons à publier parce qu'elle
résume en quelque sorte toutes les autres.
et qu'elle émane d'un républicain aussi
modeste que convaincu.
On ira prendre, dit l'auteur de cette lettre, le
corps dû Zola, à onze heures du soir, dans un
fourgon - à la Ducros.
Pourquoi cette heure nocturne plutôt que le
grand jour ?
Qu-ellc triste comédie va se jouer le 4 juin 1
N'cût-il pas cent fois mieux valu laisser Zola
dormir son dernier sommeil a Montmartre, plu-
tôt que dlnlliger à sa mémoire cette grotesque
comédie ? Car tout est grotesque dans le pro-
gramme qui a Été arrêté : transfert de nuit, un
discours, un morceau de musique : Le Chant du
départ, et. c'est fout.
Les restes de Zola méritent mieux que cela.
Ils devraient être portés au grand jour, et en
cortège, de Montmartre au Panthéon, au milieu
d-J la population parisienne, qui aurait bien su
venger^la mémoire de l'écrivain de la boue qu on
lui a jetée. ,
On a préféré la cérémonie de la peur.
* Ne s'élèvera-t-il pas une voix, dans la presse
ou à la tribune, pour réclamer une cérémonie
populaire et forcer la main au gouvernement ?
Et. c'est M Clemenceau, le compagnon de lutte
de Zola. qui recule devant les menaces des na-
tionalisæs ?
N'est-il pas du devoir du parti radical-socia-
liste de relever la tête quand son chef courbe la
sienne devant les cléricaux 1
Un cortège peut s'improviser dans Paris du
iour au lendemain. Pourquoi ne pas l'exiger du
gouvernement ? PourquoS donner des Armes
aux adversaires de la, République, qui ne man-
aueront pas de. s'en servir le lendemain en di-
sant que l'on n'a pas osé faire une cérémonie
populaire ?
Triste, bien triste, en effet, la comédie qui se
prépare. Quel écœurement pour les vrais répu;
blicains 1
NOUS n'ajouterons qu'un mot à la lettre
de notre. correspondant ; Pourquoi le
gouvernement refuse-t-id systématiquement
a la TWDulation républicaine de Paris l'oc-
casion de se livrer à une manifestation
grandiose, s'il n'obéit pas à un sentiment
de crainte que rien ne justifie, ou, ce qui
serait plus grave, à un calcul politique
dont on peut aisément soupçonner la por-
tée et les conséquences ? - P. G-
W-
i - !
TRIBUNE CORPORATIVE -
t
, -L.' \m J Jï
Dans un précédent numéro (11 mai),
nous avons donné les causes du dépla-
cement d'office chez les instituteurs ;
nous avons exposé aussi les conséquen-
ces matérielles et morales qui en dé-
coulent pour ces modestes fonctionnai-
res. Nous allons essayer, aujourd'hui,
jde rendre compte, aussi exactement
; que possible, des désiderata exprimés
'par le personnel enseignant, dans ses
associations professionnelles et dans
: ses congrès.
Le déplacement d'office, qui se re-
trouve dans toutes les catégories de"
fonctionnaires, a donné lieu, au Parle-
iment, à plusieurs propositions qui n'ont
pas eu de suite. En 1806, la Chambre
-.eût à examiner un projet de loi présenté
par M. Lavy. En 1898, ce même projet
non adopté fut repris avec quelques
; m{)di-fi c.ati on s et améliorations, sans
plus de succès,, par MM. Couyba et
Roujon. L'échec de ces propositions
était .dû beaucoup plus à l'imprécision
',d'Ûs: causes dés déplacements qu'à la
non-justification de la nécessité d-e ga-
irantàes. Tout le monde reconnaissait
ique le déplacement d'offtte, noii' justx:
:né, existait, était même très fréquent.
Mais il restait à démontrer la nécessité
d'une loi, en définissant le déplacement
d'office proprement dit.
Le congrès des instituteurs tenu à
Lille en 1905 se chargea d'éclairer la
situation et d'apporter une argumenta-
tion décisive. Nous avons sous les yeux
le compte rendu
pensèrent, dès le début de la q.j:-;cus-
.sion, à définir le déplacement d'office,
¡.qui, sans être considéré comme une
peine disciplinaire, est cependant une
peine à un double titre ; peine matériel-
le, parce qu'il occasionne une p«rie
très grande (frais de déplacement) , pei-
ne morale, parce qu'il déconsidère l'ins-
tituteur déplacé.,
Le-cpngrès établit que le QpHlcemcnL
justifié .par une faute professionnelle ou
pour une raison d'ordre moral n'était
pas un -déplacement d'office propre-
ment dit, puisque, dans ces cas, ce dé-
placement est" accepté et très souvent
demandé par l'intéressé lui-niême. C'est
ce déplacement que les règlements dé-
signent sous la formulé : « pouméces-
sité de service n. Mais, comme tous les
cas peuvent être assimilés à tort ou 4
maison à la nécessité du service, les ins-
tituteurs définirent ainsi le déplace-
ment d'office r: « On nomme déplace-
ment d'office tout déplacement non ac*
cepté par écrit par l'intéressé. » CQttar
définition simple et logique ne préto.,
pas à critique. Si le déplacement n'estf
pas- accepté, c'est que l'intéressé ne*
croit pas avoir commis une faute qui la ;
justifie. Et si le déplacement a lieu mai-
gré son refus, il est bien d'office. c'csr
pour ces cas seulement que les ingtitu- -
teurs réclament des garanties sérieuses
qui nous paraissent des plus raisoiincli
bles. Voici, en effet, ce qu'ils deman-
dent : « Le changement d'une école ï
une autre sera prononcé- par le préfet
sur la proposition de l'inspecteur d'a-r
cadémie. -Si le nouveau poste n'est pa3:
accepté par écrit par l'intéressé, là dé-
cision ne' pourra être prise qu'après,
avis motivé et conformée du conseil dé-
partemental, avis donné dans les mê-
mes formes et avec les mêmes garan*.
ties qu'en matière de révocation. » 1
Peut-on concevoir que, sans contrôle,
pour des, causes politiques ou pour desr.
accusations non prouvées un fonction-
naire puisse être déplacé d vme ville à;
'une autre. subisse par cela même une.
perte, matérielle sensible et une décon-
sidération morale indiscutable, saïts
qu'inui soit donné dé faire appel dé lâr*
décision prise contre lui devant un con.,
seil de discipline existant, institué par.
la loi pour assurer des garanties de jus-,
tice et de sécurité ? , -
A la suite du congrès de Lille,M. BienJ
venu Martin, alors ministre de l'ins..,
truction publique, reconnaissant la
bien-fondé des rcvendicatioais du per-
sonnel enseignant, déposa un projet de
loi donnant les garanties réclamées. Fa-
attendant le vote de ce projet, M.
Briand. devenu ministre, adressa une
: circulaire aux préfets, le 6 avril 1906*
kâreulaire qui n'avait d'autre but que de
devancer la loi projetée.
Le persontnel enseignant est victime,
plus que jamais, des déplacements d'of-
fice. Une circulaire, ne peut avoir cks
effets durables, elle est trop vite ou-v
bliée. La loi, au contraire, est toujours
respectée par ceux qui sont chargés
de l'appliquer. Elle seule est une ga-
rantie, parce qu'elle s'impose.
Cette loi sera-tne prochainement
votée ? Nous l'espérons. Dans un pro-.
chaki article, nous feJ'o-nS":e-naHr{} les.
arguments invoqués contre cette me-"
sure de' Justice, 1
f;.' - ,:,- , J- , P. Courrège. j
UN DRAME SANGLANT ET MYSTÉRIEUX
--,..
Au 186, boulevard Haussmann. - Un étudiant turc blesse le
fils et la mère. — Etat grave de l'une des victimes.
- Le meurtrier serait fou. ,",,"
Deux gardiens de la paix du Se arrondis-
sement, les agents Darrot et Armand,
effectuaient une ronde, la nuit dernière,
vers deux heures du matin. boulevard
Haussmann, lorsque leur attention fut ap-
ïpelée par les cris « Au secours 1 » qui par-
taient d'une fenêtre située au deuxième
étage du n° 186. Ils se disposaient à péné-
trer dans l'immeuble quand la porte s'ou-
vrit subitement, donnant passage à un
homme d'une quarantaine d'années qui
sortait, tête nue, en redingote et tenant
un couteau ensanglanté dans la main
droite.
Aux agents qui l'interpellaient, il répon-
dit : « Oui, je crois bien que je viens d'as-
sassiner deux personnes là-haut. » Les
agents l'appréhendèrent aussitôt, réveHlè-
rent le concierge qui, en voyant le nou-
veau venu, s'écria : « Tiens 1 c'est M. Ré-
cliid Mustapha », puis montèrent en sa
compagnie jusqu'à l'appartement d'où
étaient partis les Cris de détresse et qui
est occupé par le prince Mehemed Ali. La
porte était barricadée. Elle fut ouverte sur
leurs instances et là, ils trouvèrent, cou-
ché sur son lit et baignant dans une mare
de sang, le neveu du prince, un jeune
homme de vingt-quatre ans, Salah el Din.
A ses côtés, se tenait sa mère, la pnp-
cèsse Fatma Fazil sœur deMehcmed Ali.
dont le visage était également couvert de
sang. Tous deux venaient d'être dangereu-
sement blessés par Réchid Mustapha qui,
pénétrant à l'improviste dans l'apparte-
ment dont il avait la clef, les avait frap-
pés à coups de couteau, le premier portant
une profonde blessure à l'arcade sourci-
lière et sa mère plusieurs coups de cou-
teau -à la tète, mais n'ayant occasionné que
des blessures peu graves. Quant à Mehe-
med Ali, il dormait profondément dans
une pièce à côté.
Une enquête sommaire révèle l'origine du
meurtrier
L'enquête ouverte au sujet de cette dou-
ble tentative de meurtre par M. Baube.
commissaire de police du quartier du Rou-
le, a permis de reconstituer comme il suit
les circonstances. qui ont précédé cette
mystérieuse agression.
Sujet turc, originaire de Césarée, Réchid
Mustapha, qui est étudiant en médecine et
qui allait passer sa thèse de dw^rat, es.1
âgé de trente-quatre ans. Dès son arrivée
à Paris, il avait été recueilli par le pnnce
Mehemed AU. -son compatriote, chez qui il
avait trouvé le gîte et le couvert. Héclnd
occupait ordinairement une pièce de l'ap-
partement, lorsque, recevant avant-hier la
visite de sa sœur et de son neveu qui de-
vaient passer la nuit chez lui, Mehemed
Ali k nria de lui céder momentanément sa
t chambre et lui Sonna de l'argent pour
coiwkes à VhôteL On ignore ce que
fit alors Réchid Mustapha. A l'en croire, A
aurait passé une partie de la soirée sur 14
boulevard Saint-Michel, puis aurait ét4
voir un de ses amis, le docteur if. qui
lui aurait suggéré l'idée d'aller assassine^
la princesse fcatma et son fils, Salah ci
Din, qu'il n'avait jamais vus. -
Incohérentes déclarations de Réchid
- Mustapha
« J'étais couché, a-t-il dit à M. Baubey
dans une chambre d'hôtel, rue Royer-Col-
lard, quand je m'éveillai soudain, en proia
à un cauchemar épouvantable. Je me levai
sans savoir exactement ce que je fnisailf
et comme si j'obéissais * à une volonté
étrangère. Je pris une voiture qui me con-
duisit, 186, boulevard Haussmann. Je pé.'
nétrai sans - difficulté dans J'appartement
dont j'avais la clef, puis, trouvant un
étranger couché dans mon lit, je le frappai
aveuglément dans l'obscurité, avec iiii
couteau que j'avais été chercher à la cui.
sine. Une femme étant accourue aux cris
poussés par l'inconnu, je la frappai éaolc
ment. Je suis irresponsable. J'ai agi dans
une crisfi de folie, obéissant involontaire-
ment aux suggestions du docteur H. , qus
j'avais vu dans la soirée et qui m'a déjà
endormi à plusieurs reprises. »
L'état grave du jeune homme nécessite
son transport à l'hôpital
Comme nous le disons plus haut, le"
blessures très graves de Salah el Din, Sent-
le corps est labouré de -coups de coula '1,
ont nécessité son transport immédiat de j*
un des services de chirurgie 7fe l'hôpi J
Beaujon, ou il est l'objet des soins las piJi
dévoués.
Les médecins qui le soignent ne déses.
pèrent pas de sa guérison.
Les blessures de la mère
La vaillante princesse qui n'avait paf
hésité il sacrifier sa vie pour se porter ail
secours de son fils, aux premiers appels de
celui-ci, n'a été, c'est un miracle, que fort
peu grièvement blessée par le forcené.
Elle n'est pas hospitalisée à Beaujon.
comme on l'avait dit tout d abord.
Mme la princesse Fatma Fazil est ren-
trée, avec son mari Ahmed Fouod. à l'hô-
tel particulier qu'ils habitent, t)7 bis, rut
Scheffer..
Un médecin, mandé en toute hate, es'
venu panser les multiples blessures qu elli
venait de recevoir à la tête en. arrachant,
nar son dévouement maternel, son enfanî
des mains du sauvage meurtrier qui allait
lui donner la mort.
Le meurtrier est-il responsable de son
forfait 7 -
A la cuite de l'interrogatoire que M.
Baube a fait subir à Réchid Mustapha, 81!
poste de la rue de la Boëtie, où il est resH
un.e partie JU> ^linée» il semble resu\
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