Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-04-05
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 05 avril 1908 05 avril 1908
Description : 1908/04/05 (N13904). 1908/04/05 (N13904).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
N# 13904. - 1-5 Germinal An 110
CINQ. CENTIMES MJte NUMERO
Dimanche 5 Avril 1908;—> N* 13904
LE XIX" SIECLE
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TRIBUNE LIBRE
, -ar T & r
)..B UX
Ce titre est celui d'un ar-i
ticle 3e M. Clemenceau, qui
commence ainsi : « Mainte-
nant, ils vont faire leurs
petites élections bien tran-
quillement. Il ne faut pas les
trouuier. Sont-ils de 1 opposition, sont-
ils du gouvernement, on ne saurait le
dire. Ils sont députés et veulent être dé-
putés. Voilà toute l'affaire. »
Ce profond dédain pour les membres
du Parlement on le retrouve cent fois
sous la plume ou sur les lèvres de M.
Clemenceau : il ne les ménage pas plus
au pouvoir que dans l'opposition. Il
semble avoir surtout le mépris des ma-
jorités. Dans rXurore, comme si les
députés vivaient avec la hantise de con-
server l'appui du gouvernement, il a,
pour les désigner, cette périphrase :
« Les membres du Parlement qui ont re-
çu le fâcheux bouche-l'œil des faveurs
ministérielles. »
Cette opinion qu'il a d'Eux, il en fait
en quelque sorte, un système de gou-
vernement. Il est si bien convaincu que
« les faveurs ministérielles » assurent
les réélections qu'il se les prodigue à
lui-même,
Au risque, peut-être, de léser les in-
térêts en cause de trois départements
du Sud-Est, il demande au budget beau-
coup plus d'un demi-million pour les
fontaines du Var.
En raison de la suppression des qua-
trièmes bataillons, il diminue les garni-
sons d'autres villes et s'apprête à aug-
menter celle de Draguignan. Enfin, il
adresse au maire de Brignoles la dépê-
che qui suit :
Le ministre de la guerre vient de déci-
der d'envoyer immédiatement à Brignoles,
où elles occuperont l'ancien séminaire,
deux compagnies d'infanterie coloniale, ve-
nant de Toulon. Tous les ordres sont don-
nés en conséquence, en ce qui concerne la
demande faite par votre télégramme de ce
jour. Je la transmets pour examen bien-
veillant au ministre de la guerre et au mi-
nistre des finances. J'ai, d'ailleurs, chargé
M. Ghéron, sous-secrétaire d'Etat à la
guerre, de se rendre très prochainement
dans le Var pour résoudre sur place les
questions encore pendantes et conférer
avec la municipalité de Brignoles.
Je suis ravi, pour nos concitoyens du
Var de la bonne aubaine. Mais si Jules
Ferry, que M. Clemenceau accusait de
pratiquer la candidature officielle, en
avait ainsi usé, il eût, sans doute, été
renversé, une fois de plus.
Quoi qu'il en soit, on peut voir que le
président du Conseil n'est pas insensi-
ble au « fâcheux bouche-l'œil des fa-
veurs ministérielles. »
Mais est-on bien sûr que les faveurs
seules et non les principes décident des
votes des électeurs et des députés ?
Certes, M. Clemenceau le pense. Je le
cite encore : « J'ai dit au Parlement,
écrivait-il dans Y Aurore, venez au se-
cours de la justice opprimée, représen-
tants du peuple français qui faites des
lois d'égalité et de fraternité sur les mu-
railles. Le Parlement m'a répondu :
Voici venir les élections. II s'agit de sa-
voir qui d'entre nous sera député, mi-
nistre, distributeur de prébendes aux
petits des classes dirigeantes qui ont
faim. Notre premier devoir est de ne
perdre aucune voix. »
Et c'est parce qu'il est convaincu que
les députés obéissent à ce souci d'in-
fluence gouvernementale, que, prési-
dent du Conseil, M. Clemenceau s'adres-
se aujourd'hui à Eux. Comme il parlait
d'Eux, jadis. Il ne les ménage pas da-
vantage. Il les blesse : « muets du sé-
rail. » Il les provoque : « messieurs les
radicaux, je vous attends. » Il les hu-
milie en les obligeant à revenir sur
leurs votes.
Il faut même, quand il se déjuge, que-
la majorité s'associe à lui. C'est préci-
sément ce qui vient de se produire avec
la loi d'amnistie.
M. Clemenceau l'a voulue restreinte,
alors qu'il n'y a pas dix ans, il la vou-
lait élargie : « Je vote, écrivait-il, pour
Cyvoct, candidat de l'amnistie. Je
trouve que l'idée d'amnistie est belle
entre toutes, parce qu'en abolissant les
fautes de l'amnistié, elle suppose chez
l'amnistieur une conscience des fatales
défaillances dans ses jugements. sé-
paré des circonstances qui l'expliquent,
tel acte paraît d'un fou dangereux et
commande, je l'accorde sans difficulté,
une répression nécessaire. Cependant
ceux qui frappent le coupable sont-ils si
sûrs de n'être pour rien dans la prépa-
ration de l'état d'esprit générateur de
ses violences ? »
M. Clemenceau n'y est que pour dix
francs et quelques articles :
Mais Eux, qui n'y sont pour rien,
vont-ils bien longtemps encore suivre le
chef du gouvernement dans sa politique
capricieuse, imprévoyante et stérile ?
« Ils sont députés et veulent être dé-
putés. » Soit : mais les électeurs qui les
ont nommés sur un programme dont
chaque article, après deux années de
législature, semble menacé de caducité,
qui les ont élus contre ce parti du cen-
tre, qu'on croyait à jamais vaincu et
qui renaît de ses cendres, au point que
son président, M. Brindeau, a pu dire
que ses idées, ses doctrines apparais-
saient de plus en plus justes, et se flat-
ter d'apporter au gouvernement l'appui
de ses votes, sans paraître redouter
beaucoup l'avènement de réformes que,
b'¡;en entendu, les progressistes conti-
nuent à combattre ; mais les électeurs,
dis-je, qui fondaient de si belles espé-
rances sur la victoire républicaine de
1906, ne comprendraient pas que leurs
élus laissent compromettre et avorter
l'œuvre de progrès et. de justice atten-
due avec confiance par l'immense ma-
jorité du pays républicain.
Sans doute, la majorité de la Cham-
bre a pu se montrer patiente, prudente
même : elle a cru devoir attendre ; elle
a fait un long crédit au gouvernement.
Mais ce serait être injuste gratuite-
ment envers elle que de supposer qu'el-
le n'a pas conscience de ses devoirs et
de ses responsabilités.
Des symptômes nombreux! sont la
manifestation évidente du malaise
qu'elle ressent : sa confiance faiblit, son
trouble augmente, sa clairvoyance s'af-
firme. Et à vouloir lui trop fortement
boucher l'œil, on finira par l'éblouir de
lumière.
Paul BOURELY
Député de l'Ardèclte.
y l
LA POLITIQUE
L'APPEL DE L'ALLIANCE
RÉPUBLICAINE DÉMOCRATIQUE
L'appel que Y Alliance ré-
publicaine démocratique vient
d'adresser aux électeurs mu-
nicipaux prend, dans les cir-
constances actuelles, une im-
portance particulière.
Nous avions ici-même, récemment,ex-
primé la crainte de voir cette grande
Association s'élargir, elle aussi - à
l'exemple de la majorité de la Chambre
- du côté des progressistes, au détri-
ment de la politique d'union des grou-
pes de gauche, à laquelle elle avait loya-
lement et utilement collaboré jusqu'ici.
Nous espérions que l'action dissolvan-
te de quelques dissidents du parti radi-
cal ne parviendrait pas à détourner Y Al-
liance républicaine démocratique de sa
politique traditionnelle, et nous comp-
tions sur M. Carnot « dont la person-
nalité est unanimement et justement ho-
norée par tous les républicains "j'), pour
la maintenir résolument orientée vers la
gauche
L'appel de l'Alliance républicaine dé-
mocratique est de nature à dissiper les
craintes qu'on avait pu concevoir au su-
jet d'une modification de sa politique.
Il précise, en effet, intentionnellement
que l'Alliance reste « fidèle à ses ori-
gines et à la politique d'union des grou-
pes de gauche qui a toujours été la
sienne îi, et il ajoute que l'Alliancecom-
battra au même titre que les révolution-
naires les anarchistes et les antipatriotes
Zk* le cléricalisme, la réaction ouverte ou
hypocrite et les faux libéraux qui se
parent volontiers 'de l'étiquette républi-
caine bien qu'ils soient en réalité les
complices ou les 'dupes des partis rétro-
grades )i.
Les journaux progressistes font" éon-
tre mauvaise fortune bon cœur; et si les
uns se gardent bien de reproduire cette
déclaration formelle, d'autres n'hés'ftent
pas à la tronquei et à supprimer notam-
ment le passage où l'Alliance déclare
rester « fidèle à la politique d'union des
groupes de gauche ')J. C'est trop com-
mode, en vérité, et ce procédé de discus-
sion démontre le dépit éprouvé par les
progressistes d'avoir échoué dans leurs
tentatives d'entraîner YAlliance républi-
caine démocratique dans leur politique
rétrograde. -
L'Alliance reste lidèle a la « politi-
que d'union des groupes de gauche ïï,
qu'elle a suivie sous les ministères Wal-
deck-Rousseau et Combes. Elle le 'dé-
clare catégoriquement.
Nous eh prenons acte avec plaisir,
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui samedi :
Lever du soleil à 5 h. 34 ; coucher S 6 fi.
33.
Matinées-conférences au théùtm Sarah-
Bernhardt et au Gymnasé.
A la Comédie Française, représentation
de retraite de M. Baillet.
Première représentation à Cluny : Qui
qu'a vu Ninette ?
Courses à Saint-Cloud (trot).
Quelle est la couleur des béfoés nègres
Un médecin allemand après un sé-
jour de plusieurs années sur la côte de
Guinée, a publié dernièrement une étu-
de complète sur cett-e question.
Voici quelles sont les conclusions
qui lui a dictées son expérience per-
sonnelle : le petit nègre est en nais-
sant de la même couleur que n'importe
quel enfant européen. Au bout de trois
ou quatre jours environ sa peau prend
une teinte légèrement foncée. Dix jours
après elle devient marron clair et res-
te ainsi longtemps de cette couleur. Ce
n'est guère que trois ou quatre mois
plus tard que la peau devient complè-
tement noire.
L'origine de la semaine
Les sept jours de la semaine se rat-
tachent au mois lunaire.
Les noms des jours de la semaine
sont empruntés aux sept planètes ad-
mises par les Romains. Le lundi est le
jour de la lune ; le marui de mars ; le
mercredi de Mercure ; le jeudi de Jupi-
ter ; le vendredi de Vénus ; lsamedi
de Saturne ; le dimanche est le grand
jour consacré au Soleil.
La division du temps en semaines
appartient à l'Orient. On la trouve de
temps immémorial chez les Chaldéens,
les Egyptiens, les Indiens, les Chinois.
L'usage de la semaine ne se serait
établi en Occident qu'avec le Christia-
nisme. ,
Une position dangereuse
Qui aurait cru que l'habitude de s'as-
seoir en croisant une jambe par-dessus
l'autre pouvait avoir de graves consé-
quences pour la santé ?
C'est pourtant ce que nous apprend
la science, qui vient de condamner cet-
te position, parfois élégante, toujours
commode, et reposante généralement.
Il paraît que la compression des vais-
seaux qu'elle occasionne nuit à la cir-
culation, produit une stagnation du
sang dans les membres inférieurs, fa-
vorise les varices, donne prise à l'em-
bolie et n'est pas sans connexion avec
des malaises abdominaux comme la
constipation.
Il y a même un médecin de Boston
qui l'accuse d'être l'origine de la moitié
des appendicites.
Enfin, croiser les jambes en tram-
way, en chemin de fer ou en métropo-
litain vous expose à avoir les jambes
brisées si un accident ou un arrêt trop
brusque se produit.
AUTREFOIS
Rappel du 5 avril 1872.. — La loi sur la
déportation (des condamnés de la Commu-
ne et affectant à celle peine la presqu'île
Dvscos et Vile des Pins) est promulguée au
Journal Officiel. -
La commission de la revision des gra.
des militaires a terminé ses travaux.
On vient de présenter à M. Thiers un
nouveau type de la pièce de cinq francs,
la face représentera la tête de la Républi-
que ; en exergue : République française,
et la date. Sur le cordon, la devise :
« Dieu protège la France », est supprimée.
Inauguration de l'école laïque de jeunes
filles de la rue Jean-Lantier.
La machine de Passai
M. Bourgoin, de Bordeaux, possède
.un exemplaire authentique de la ma-
chine arithmétique ou machine à calcu-
ler de Blaise Pascal ; il fut trouvé au
marché à la ferraille bordelaise, pen-
dant la Révolution). par un parent de
M. Bourgoin.
Pascal, avait construit sa machine en
1647, après un premier essai en 16^4 ;
il avait alors dix-huit ans.
Les machines à calculer actuelles,
qui ■ sont d'une admirable perfection,
trouvent leur origine mathémathique
dans la conception du célèbre mathé-
maticien. Il y a un autre modèle, au-
thentique, lui aussi, de la machine de
Pascal, au musée du Conservatoire des
arts et métiers, à Paris.
Quelques liste, civiles
Guillaume II possède une liste ci-
vile de 15.719.296 marksa. soit environ
19.650.000 francs.
Cette grosse dotation ne lui étant pas
suffisante, il en sollicite l'augmenta-
tion- Rappelons à ce propos: les chif-
fres des listes civiles de nos princi-
paux chefs d'Etat.
Le roi Edouard VII touche 11.750.000
francs- L'empereur Nicolas II touche
40-000.000 de francs. L'empereur d'Au-
triche reçoit 23.500.000 francs. Le roi
Victor-Emmanuel III a 10000.000"de
francs. M. Roosevelt n'a aue 250.000 fr.
Les monarchies, pour ce qu'elles va-
lent, coûtent vraiment cher..
Rata musicaux
Un curieux procès va venir prochai-
nement devant les tribunaux.
Une bande de rats avait envahi une
maison particulière de Neuilly. Le loca-
taire étant parvenu à prendre vivant un
de ces hôtes, eut l'ingénieuse idée de
suspendre une petite clochette au cou
de son prisonnier et de lui rendre la li-
berté. - ,r -
Le rat alla naturellement rejoindre
ses congénères qui effrayés par le bruit
de la clochette désertèrent la maison et
s'en furent chez le voisin* -
Celui-ci réveillé une nuit, deux nuits,
toutes les nuits par un tintement ar-
gentin provenant de l'intérieur des lam-
bris, crut sa maison hantée.
Ce n'est que tout dernièrement par
l'indiscrétion d'une servante renvoyée
qu'il apprit d'où provenaient les sons
qui lui avaient fait si grand peur. Il
n'a pas désarmé et se dispose à atta-
quer son voisin pour tapage nocturne
ayant empêché, pendant plusieurs se-
maines, la jouissance des différentes
pièces de son appartement.
Appel aux amie de « Robinson.
Il paraît que le dernier descendant
de Daniel de Foë, l'auteur de l'immor-
tel Robinson Crusoë, est en train de
mourir de faim ou à peu près dans un
asile du faubourg de Londres.
- On va organiser une souscription au
profit du vieillard.
Si tous ceux que Robinson amusa en
leur jeune âge envoient une obole, le
vieux de Foë aura de quoi vivre large-
ment.
Candidat f
Un de nos confrères défendant avec
énergie son candidat écrit \;
« Son talent n'est pas de ceux qui
se louent, mais de ceux qui s'affir-
ment. »
Les typographes ont composé i:
« Son talent n'est pas de ceux qui se
louent, mais de ceux qui s'afferment. »
Si le candidat est élu, ceci ne l'em-
pêchera pas d'être ministre.
Une perle
On a enterré, il y a quelque temps,
d'une façon fort civile, un citoyen de
la petite. ville de Verdun-sur-le-Doubs,
en Saône-et-Loire.
Le défunt venait d'être descendu
dans la fosse, lorsque l'adjoint s'avance
s'éponge, tousse et ne trouve comme
oraison funèbre que ces simples mots :
« Citoyen Morin, au nom de la loi
nous t'enterrons 1 » ,
Pas très éloquent, mais très authenti-
que.
Anniversaire
La « payse » qui n'a pas oublié l'an-
niversaire de son cher « pays » lui ap-
porte à la caserne une superbe paire
de chaussettes blanches. ,,-':
- Alors le brave troupier ému jusqu'aux
larmes : -
— Ah ! ma chère amie, je les porterai
toute ma vie 1 -
Et) passant.
Auguste-Paul-Henri Ar/iarlan, de la Com-
pagnie de l'Ardèche, n'a pas eu dans la
vie la chance que méritait son opiniâtreté.
Il est vrai qu'il prit sa revanche après sa
mort.
Mis à la retraite en 1895, ce bon gen-
darme avait sollicité du gouvernement de
la République un poste d'expéditionnaire à
l'administration des postes et télégraphes.
Il était alors chaleureusement recomman-
dé par quelques personnages notoires, no-
tamment un vétérinaire, président de la
« Ligue des Républicains sans peur et sans
reproches », et par le premier vice-prési-
dent honoraire du Syndicat des pêcheurs,
à la ligne, dont la lemme n'avait rien à
refuser à un ininistre qui, parfois, lui ac-
cordait quelque chose.
Auguste-Paul-Henri Aniarlanse disait
donc — avec quelque apparence de raison
— en son langage militaire : « Mon allai-
re, elle est bonne ; elle "est dans le sac. »
Dans le sac, elle n'y était pas précisé-
ment, ainsi que vous allez le voir.
Une année s'écoula, tandis que le candi-
dat attendait sous l'orme. Les feuilles de
l'orme tombèrent et l'administration des
postes ne répondait rien.
Le gendarme renouvela sa demande, rap-
pela que « subséquemment il était toujours
aux ordres de ses supérieurs, l'arme au
pied » : on l'y laissa.
1 Deux ans passèrent, puis trois, puis qua-
tre. Imperturbable, Auguste-Paul-IIènri An-
jarlan renouvelait sa demande le 31 dé.
cembre de chaque année, et « à l'occasion
de la nouvelle, adressait ses meilleurs sou-
haits et vœux à MM. - ses supérieurs ».
Rien, pas de réponse.
Après cinq ans d'attente, il crut défail-
lir : il reçut, un matin, une grande beue
lettre officielle ,du sous-secrétaire d'Etat
des postes et télégraphes, qui lui annon-
çait sa nomination à l'emploi de « demoi-
selle du téléphone ».
C'était une erreur des bureaux. On avait
confondu le sieur Aniarlan (Henri), ancien
gendarme a pied de la compagnie de VAr-
dèche, avec la dénommée Henriette. Au-
joulan, candidate téléphoniste.
Il faillit éclater, mais il n'en lit rien « à
cause de l'habitude de la discipline ».
Il attendit encore Après sept ans, son
humeur placide s'altéra. L'histoire de la
téléphoniste s'était ébruitée. On jasait
dans la petite ville. On chuchotait en
riant lorsqu'il entrait au calé du Lion
d'Or.
Sa santé fut compromise.
Enfin, ces jours derniers, le Journal of-,
ficiel contenait la nomination du gendarme
retraité Augusle-Paul-Henri Anjarlan, en
qualité d'expéditionnaire à l'administration
centrale des postes et télégraphes, rue de
Grenelle, à Paris.
Or, à la date du 25 mai 1906, figure sur
le registre de l'état-civil de la commune
Argentière (Ardèche), son pays natal,
lacté de décès de l'infortuné Aniarlan.
Nommé demoiselle des téléphones, du-
rant sa vie, puis auxiliaire des postes
après sa mort, cet étonnant gendarme a eu
vraiment une carrière administrative peu
banale '-.-
Pourvu maintenant que M. Simyan ne
Ravise pas de la couronner, en révoquant
feu Artjarian, sous le prétexte qu'il n'a pas
reioint son poste dans les délais réglemen-
taires l
Le Gheminean.
: A LA CHAMBRE
Les Interpellations
M. Jaurès veut interpeller sur la politique générale. — La dis-'
cussion est fixée à lundi. - La santé des troupes. -
La nourriture du soldat.
M. Rabier présidé.
On expédie, au début de la séance, quel-
ques projets d'intérêt local.
La Chambre vote ensuite, par 408 voix
contre 98, les crédits destinés à l'installa-
tion du ministère du travail dans l'ancien
archevêché et, par 501 voix contre 27, les
crédits affectés au voyage du président de
la République à Londres.
M- Becaye pose une question a.u minis-
tre des travaux publics sur les retards de
la Compagnie d'Orléans.
M. Barthou. — Je me suis préoccupé de l'nu^.
mentation du personnel et de l'augmentation
©orrél-ativs du matériel. J'ai obtenu des résultats.
Mon attention se porte maintenant sur les voies
Se dégagement qui paraissent insuffisantes.
L'incident est clos.
L'INTERPELLATION JAURES
Le président annonce qu'il a reçu de M.
Jaurès une demande d'interpellation sur la
!po.litique intérieur du gouvernement! et
sur les réformes qu'il a promises.
M. Clemenceau. — Le gouvcrnemei4 accepte
l'interpellation. Il est à la disposition de la
Chambre pour en fixer la date ; celle de lundi
me semblerait indiquée.
M. Jaurès, qui croit que le gouvernement
a demandé la discussion immédiate, s'é-
crie : it Je suis prêt. » Et il veut monter à
la tribune. Les huissiers l'en empêchent ù
sa grande surprise.
— J'ai dit lundi, lui crie M. Clemenceau
— C'est entendu, réplique M. Jaurès av.ec
une nuance de regret.
LES MORTS DE JEUNES SOLDATS
La parole est ensuite donnée à M. Blanc
pour développer son interpellation sur les
circonstances qui ont précédé la mort de
deux soldats.
M. Blanc. — Le soldai Durand était de fac-
tion ù la prison de Fresnes, quand il fut pris
de faiblesse. Transporté à l'hôpital du pays, il
fut renvové à la chambrée où le délire le saisit.
Alors, seulement, il lut dirigé sur l'infirmerie.
Il mourut. Le pauvre soldat n'avait pas osé se
présenter à la visite à cause de la sévérité du
médecin-major.
L'autre eoM&t dont je veux parler. Estève,
est mort à Bonilacio, dans les conditions les
plus douloureuses. 11 n'y avait pas de feu dans
la salle où il agonisait, et on ne pouvait chaufo"
fer te lit faute de bassinoire.
-Le soldat n'avait pas été baptisé. Sa mère le
fit savoir aux officiers, qui firent des objections
inattendues à un enterrement civil, disant qu'il
porterait préjudice au régiment. L'enterrement
n'en fut pas moins civil.
M. Gérard-Varet interpelle à son tour
sur les. causes qui ont précédé et -entraîné
la mort d'un autre jeune soldat, nommé
Sagnier, à Cosne.
M. Gérard-Faret. — Il était indisposé depuis
longtemps ; il ne put se faire reconnaître ma-
lade une première fois par le médecin-major ;
par la suite, il fut reconnu atteint d'angine,
puis de bronchite.
il est mort parce qu'il a été soigné trop tîir
divement, prétend la famille. Le médecin-major
répond que le soldat a dissimulé, par timidité,
son état de maladie. Une enquête s'impose, mais
il ne suffit }JM' 'dé' statue.r sur un cas isolé.
Il y a un système qui est maurais et qu'il faut
changer.
Plus une armée s'identifie à la nation, plus
la nation se doit à une armée.
M. Goujat affirme que le soldat mort à
Cosne a été l'objet de la plus grande sol-
licitude de la part des autorités civiles et
militaires.
- Il faut le dire, ajoute-t-U, pour rassu-
rer les familles de nos soldats.
M. Groussau intervient pour parler d'un
nommé Mallieux, incorporé l'an dernier,
en même temps que son frère juu,.=au, au
151e de ligne. Réformé, il fut renvoyé du
régiment dans un état de grande faiblesse.
Il mourut en rentrant chez lui.
M. Chéron, sous-secrétaire d'Etat à la guerre.
— Il faut être juste pour les médecins militaires.
J'ai fait une enquête sur le cas du soldat Du-
rand. J'ai constaté qu'il avait été entouré de
soins dévoués. Il a succombé à la méningite
cérébro-spinale ; c'est également de cette mala-
die qu'est mort le soldat Estève. Je ferai faire
une enquête sur l'agencement de l'hôpital de
Bonifacio.. -
Nos médecins militaires sont à la hauteur de
leur tacite. Nous .ferons tous les efforts pour
tissusfcr i'améliomîion de l'ctat sanitaire de
l'armée. (Applaudissements.)
M. Jourde. — Les médecins militaires ont cer-
tainement beaucoup de valeur, mais dans les
corps les mieux tenus, il peut se produire des
fautes, des erreurs.
Comment les infirmières anégimentaires peu-
vent-elles manquer dos médicaments nécessai-
res ? Il y a des fonds affectés à l'entretien des
pharmacies. Il faut faire rendre aux coupables
des -comptes sévères. Il faut que dans le monde
militaire, on prenne ce débat au sérieux.
Un ordre du jour invitant le gouverne-
ment à protéger la santé des soldats est
déposé par M. Alexandre Blanc.
M. Chéron, au nom du gouvernement,
demande l'ordre du jour pur et simple.
M. Blanc s'y rallie.
M. Labori demande le licenciement des
réservistes jqui se trouvent à Fontaine-
bleau, où vient d'éclater une épidémie de
dyphtérie.
Le ministre de la guerre dit, qu'à sa
connaissance, il n'y a pas eu de cas nou-
veau à Fontainebleau depuis le 20 mars.
L'ordre du jour pur et simple est adopté
à mains levées.
LES VIANDES POUR LA TROUPE
La Chanibre discute en fin de séance
l'interpellation de M. Ferrette sur l'affatre
des viandes avariées fournies à certaines
garnisons de l'Est.
M. Ferrette. — Tous les animaux que les vété-
rinaires de la ville de Paris refusent comme
impropres à la consommation sont envoyés dans
l'Est, où ils colportent leurs maladies. C'est
ainsi que la fièvre aphteuse, en 1906, a ravagé
toute une partie du département de la Meuse,
causant, en un seul canton, pldc 200.000
francs de pertes, et dans le resté au départe-
ment, plus de 2 millions. -
Quel est le remède à cette situation ? D'abord
la réorganisation complète du système des abat-
toirs, dont l'installation dans 4 plupart des
villes viole les plus simples principes de l'hy-
giène.
Qu'on fasse partout ce qu'a fait ù Lyon notm
collègue Normand, ce qu'on a lzjl à Reims et
dans les villes d'Allemagne et un grand progrès
sera acquis.
Mais qu'on cesse d'attaquer les officiers, les
sous-officiers, les cuisiniers même de la troupe,
et qu'on s'en prenne au système absurde suivi
depuis des années par l'Etat.
L'Etat, en effet, fixe à 90 ou 95 centimes le
prix du kilo de vnde qu'U paye pOUlo ses sol.
L'Etat, kilo de viande qu'il paye pour ses sol-
dats. Or, comment veut-on que l'adjudicataire
fournisse de la viande, non pas supérieure, mais
simplement mangeable, quand la viande la plus
ordinaire coûte 1 fr. 20 ou 1 fr. 30 ?
Voix à Vextréme-gauche. — il n'est pas forcé
de fournir à ce prix.
M. Ferrelis: — Il est forcé de fournir en frau.
dan.t. (Très bien î)
L'adjudication, en pareille matière, n'est
qu'une fraude forcée. -
M. Ferrette se prononce pour rachat é!¡:'
rect par les compagnies chez les bouchers
des garnisons..
M. Cazencuve. — La population civiie doit êtna
protégée au même fitre que la population mili-
taire. Le marquage des viandes destinées à la
consommation réclame un contrôle des plus
révères.
Il y a des boucheries militaires qUi r-onclion.
nent heureusement ; "nais ce système ne saurait
être généralisé. :
Le plus grave inconvénient tient au taux trop
bas fixé par le ministère de la guerre. Dans le
14' corps (Lyon), -ce taux ne permet d'acheter
qu'un tiers dé viande de deuxième catégorie. et
deux tiers de mande de troisième catégorie.
Le système d'alunentation des troupes devrait
éfcne modifié à fond. Tout au moins les vian-
des destinées à l'armée devraiftnt^ltes être sou.
mises à un contrôle rationnel, au même tilrw
que celles des viandes destinées à la population
civile.
A oet égard le gouvernement pourra être pro-
chainement armé par le projet que vient de
rapporter la commission de l'agriculture.
Pourquoi faut-il que le règlement d'adminis-
tration publique prévu pair l'utile toi de 1905
sur les abattoirs n'ait pas encore par-, ? Le ré-
gime des abattoirs est. il réorganiser tout entier
et partout, sauf eh quelques villes privilégiées.
Ce sont les moins fortunés qui ont le plus de
droits à la protection des pouvoirs publics. La
Chambre doit s'en souvenir. Le logement salu-
hre, l'alimentation salubre sont les deux termes
d'un même problème dont l'importance socialo
mérite tout notre effort.
La suite du débat est renvoyée à lundi,
Gtprès la discussion de l'interpellation de
M. Jaurès.
» *
AU SÉNAT
LA DEVOLUTION DES BIENS
ECCLESIASTIQUES
M. Audiffred dépose une proposition ten-
dant à modifier les dispositions de la loi
de finances de 1898 en vue de faciliter les
transports publics par automobiles.
M. Humbert dépose un rapport sur le
projet tendant à autoriser le rengagement
des simples soldats pour six mois.
Le Sénat adopte après déclaration d'ur-
gence :
1° Le projet tendant à régler, au point
de vue des hautes payes, les droits des
militaires servant au delà de la durée lé-
gale qui se sont engagés pour trois ans
entre le 21 mars 1905 et le 21 mars 1900 ;
2° La proposition de M. Montfort sur
la' créaitlioo d'un régiment étranger de ca-
valerie ;
3° La proposition ayant pour objet la
répression des outrages aux bonnes
mœurs ;
4° Le projet relatif à la création d'un
bureau spécial à la direction générale des
contributions directes en vue de l'évalua-
tion des propriétés non bâties.
Le Sénat reprend la discussion de la loi
sur la dévolution des biens ecclésiastiques.
M. Legrand défend un amendement à
l'article 2, retirant au projet tout caractère
rétroactif;
M. Briand. — Ce que vous réclamez, vous le
réclamez aussi dans l'intérêt des familles qui
ont le droit de remettre là main s' les biens
détournés de leur destination. Mais Nes-vous
sûrs que la 'restitution serait toujours-conforme
aux intentions du donateur ?
Croyez-vous qu'il n'y ait pas des cas où une
donation ait été inspirée précisément par le dé-
sir de déshériter un parent ? (Très bien ! à gau,
che.)-
Laissons de côté la question de J'ind{;pc!!',dlln.
ce des magistrats. Cette indépendance, nul ne la
mcnac. Mais si vous votez l'amendement, dans
quel sens voulez-vous qu'ils jugent désormais ?
M. Guillier commence, en répondant iiu
garde des sceaux, un discours dont la suite
est renvoyée à lundi.
■■■■ ■ O»' ■ —
Coulisses des Chambres
Au groupe Waldeck-Rousseau.
M. Antoine Perrier a pris hier possession
du fauteuil présidentiel à l'Union républi-
caine du Sénat.
Après avoir remercié ses collègues de la
marque de sympathie et de confiance qu';ls
viennent de lui donner, le sénateur de ?»
Savoie fait l'éloge de ses deux prédéces-
seurs, MM. Antcnin Dubost et Jean Dupuy
et il montre les services rendus par l'Union
républicaine à la République.
Puis il ajoute :
Parti d'action, l'Union Républicaine a su évo-
luer avec les transformations que les faits un
posent à notrs société et à nos institutions. Nous
ne sommes pas, en effet, de ceux qu'effrayent
les réformes politiques, économiques et socia-
les, mais nous tes voulons pratiquement organi-
sées. Nous scrîuneis des réalistes et non des uto-
pistes.
Nous sommes résolus à suivre le gouverne-
ment dans la voie des réformées demandées par
la démocratie, mais en les prépairant mûre-
ment et méthodiquement afin d'éviter de çruelk*
CINQ. CENTIMES MJte NUMERO
Dimanche 5 Avril 1908;—> N* 13904
LE XIX" SIECLE
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
14, rue du Mail, Paris.
Et Chez MM. LAGRANGE, CERF etO*
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FONDATEUR: EDMOND ABOUT
ADMINISTRATION : 14' RUE DU MAIL. — TÉLÉPHONÉ 102 83
- Adrmer lettres et mandats à r dministNteur {
TRIBUNE LIBRE
, -ar T & r
)..B UX
Ce titre est celui d'un ar-i
ticle 3e M. Clemenceau, qui
commence ainsi : « Mainte-
nant, ils vont faire leurs
petites élections bien tran-
quillement. Il ne faut pas les
trouuier. Sont-ils de 1 opposition, sont-
ils du gouvernement, on ne saurait le
dire. Ils sont députés et veulent être dé-
putés. Voilà toute l'affaire. »
Ce profond dédain pour les membres
du Parlement on le retrouve cent fois
sous la plume ou sur les lèvres de M.
Clemenceau : il ne les ménage pas plus
au pouvoir que dans l'opposition. Il
semble avoir surtout le mépris des ma-
jorités. Dans rXurore, comme si les
députés vivaient avec la hantise de con-
server l'appui du gouvernement, il a,
pour les désigner, cette périphrase :
« Les membres du Parlement qui ont re-
çu le fâcheux bouche-l'œil des faveurs
ministérielles. »
Cette opinion qu'il a d'Eux, il en fait
en quelque sorte, un système de gou-
vernement. Il est si bien convaincu que
« les faveurs ministérielles » assurent
les réélections qu'il se les prodigue à
lui-même,
Au risque, peut-être, de léser les in-
térêts en cause de trois départements
du Sud-Est, il demande au budget beau-
coup plus d'un demi-million pour les
fontaines du Var.
En raison de la suppression des qua-
trièmes bataillons, il diminue les garni-
sons d'autres villes et s'apprête à aug-
menter celle de Draguignan. Enfin, il
adresse au maire de Brignoles la dépê-
che qui suit :
Le ministre de la guerre vient de déci-
der d'envoyer immédiatement à Brignoles,
où elles occuperont l'ancien séminaire,
deux compagnies d'infanterie coloniale, ve-
nant de Toulon. Tous les ordres sont don-
nés en conséquence, en ce qui concerne la
demande faite par votre télégramme de ce
jour. Je la transmets pour examen bien-
veillant au ministre de la guerre et au mi-
nistre des finances. J'ai, d'ailleurs, chargé
M. Ghéron, sous-secrétaire d'Etat à la
guerre, de se rendre très prochainement
dans le Var pour résoudre sur place les
questions encore pendantes et conférer
avec la municipalité de Brignoles.
Je suis ravi, pour nos concitoyens du
Var de la bonne aubaine. Mais si Jules
Ferry, que M. Clemenceau accusait de
pratiquer la candidature officielle, en
avait ainsi usé, il eût, sans doute, été
renversé, une fois de plus.
Quoi qu'il en soit, on peut voir que le
président du Conseil n'est pas insensi-
ble au « fâcheux bouche-l'œil des fa-
veurs ministérielles. »
Mais est-on bien sûr que les faveurs
seules et non les principes décident des
votes des électeurs et des députés ?
Certes, M. Clemenceau le pense. Je le
cite encore : « J'ai dit au Parlement,
écrivait-il dans Y Aurore, venez au se-
cours de la justice opprimée, représen-
tants du peuple français qui faites des
lois d'égalité et de fraternité sur les mu-
railles. Le Parlement m'a répondu :
Voici venir les élections. II s'agit de sa-
voir qui d'entre nous sera député, mi-
nistre, distributeur de prébendes aux
petits des classes dirigeantes qui ont
faim. Notre premier devoir est de ne
perdre aucune voix. »
Et c'est parce qu'il est convaincu que
les députés obéissent à ce souci d'in-
fluence gouvernementale, que, prési-
dent du Conseil, M. Clemenceau s'adres-
se aujourd'hui à Eux. Comme il parlait
d'Eux, jadis. Il ne les ménage pas da-
vantage. Il les blesse : « muets du sé-
rail. » Il les provoque : « messieurs les
radicaux, je vous attends. » Il les hu-
milie en les obligeant à revenir sur
leurs votes.
Il faut même, quand il se déjuge, que-
la majorité s'associe à lui. C'est préci-
sément ce qui vient de se produire avec
la loi d'amnistie.
M. Clemenceau l'a voulue restreinte,
alors qu'il n'y a pas dix ans, il la vou-
lait élargie : « Je vote, écrivait-il, pour
Cyvoct, candidat de l'amnistie. Je
trouve que l'idée d'amnistie est belle
entre toutes, parce qu'en abolissant les
fautes de l'amnistié, elle suppose chez
l'amnistieur une conscience des fatales
défaillances dans ses jugements. sé-
paré des circonstances qui l'expliquent,
tel acte paraît d'un fou dangereux et
commande, je l'accorde sans difficulté,
une répression nécessaire. Cependant
ceux qui frappent le coupable sont-ils si
sûrs de n'être pour rien dans la prépa-
ration de l'état d'esprit générateur de
ses violences ? »
M. Clemenceau n'y est que pour dix
francs et quelques articles :
Mais Eux, qui n'y sont pour rien,
vont-ils bien longtemps encore suivre le
chef du gouvernement dans sa politique
capricieuse, imprévoyante et stérile ?
« Ils sont députés et veulent être dé-
putés. » Soit : mais les électeurs qui les
ont nommés sur un programme dont
chaque article, après deux années de
législature, semble menacé de caducité,
qui les ont élus contre ce parti du cen-
tre, qu'on croyait à jamais vaincu et
qui renaît de ses cendres, au point que
son président, M. Brindeau, a pu dire
que ses idées, ses doctrines apparais-
saient de plus en plus justes, et se flat-
ter d'apporter au gouvernement l'appui
de ses votes, sans paraître redouter
beaucoup l'avènement de réformes que,
b'¡;en entendu, les progressistes conti-
nuent à combattre ; mais les électeurs,
dis-je, qui fondaient de si belles espé-
rances sur la victoire républicaine de
1906, ne comprendraient pas que leurs
élus laissent compromettre et avorter
l'œuvre de progrès et. de justice atten-
due avec confiance par l'immense ma-
jorité du pays républicain.
Sans doute, la majorité de la Cham-
bre a pu se montrer patiente, prudente
même : elle a cru devoir attendre ; elle
a fait un long crédit au gouvernement.
Mais ce serait être injuste gratuite-
ment envers elle que de supposer qu'el-
le n'a pas conscience de ses devoirs et
de ses responsabilités.
Des symptômes nombreux! sont la
manifestation évidente du malaise
qu'elle ressent : sa confiance faiblit, son
trouble augmente, sa clairvoyance s'af-
firme. Et à vouloir lui trop fortement
boucher l'œil, on finira par l'éblouir de
lumière.
Paul BOURELY
Député de l'Ardèclte.
y l
LA POLITIQUE
L'APPEL DE L'ALLIANCE
RÉPUBLICAINE DÉMOCRATIQUE
L'appel que Y Alliance ré-
publicaine démocratique vient
d'adresser aux électeurs mu-
nicipaux prend, dans les cir-
constances actuelles, une im-
portance particulière.
Nous avions ici-même, récemment,ex-
primé la crainte de voir cette grande
Association s'élargir, elle aussi - à
l'exemple de la majorité de la Chambre
- du côté des progressistes, au détri-
ment de la politique d'union des grou-
pes de gauche, à laquelle elle avait loya-
lement et utilement collaboré jusqu'ici.
Nous espérions que l'action dissolvan-
te de quelques dissidents du parti radi-
cal ne parviendrait pas à détourner Y Al-
liance républicaine démocratique de sa
politique traditionnelle, et nous comp-
tions sur M. Carnot « dont la person-
nalité est unanimement et justement ho-
norée par tous les républicains "j'), pour
la maintenir résolument orientée vers la
gauche
L'appel de l'Alliance républicaine dé-
mocratique est de nature à dissiper les
craintes qu'on avait pu concevoir au su-
jet d'une modification de sa politique.
Il précise, en effet, intentionnellement
que l'Alliance reste « fidèle à ses ori-
gines et à la politique d'union des grou-
pes de gauche qui a toujours été la
sienne îi, et il ajoute que l'Alliancecom-
battra au même titre que les révolution-
naires les anarchistes et les antipatriotes
Zk* le cléricalisme, la réaction ouverte ou
hypocrite et les faux libéraux qui se
parent volontiers 'de l'étiquette républi-
caine bien qu'ils soient en réalité les
complices ou les 'dupes des partis rétro-
grades )i.
Les journaux progressistes font" éon-
tre mauvaise fortune bon cœur; et si les
uns se gardent bien de reproduire cette
déclaration formelle, d'autres n'hés'ftent
pas à la tronquei et à supprimer notam-
ment le passage où l'Alliance déclare
rester « fidèle à la politique d'union des
groupes de gauche ')J. C'est trop com-
mode, en vérité, et ce procédé de discus-
sion démontre le dépit éprouvé par les
progressistes d'avoir échoué dans leurs
tentatives d'entraîner YAlliance républi-
caine démocratique dans leur politique
rétrograde. -
L'Alliance reste lidèle a la « politi-
que d'union des groupes de gauche ïï,
qu'elle a suivie sous les ministères Wal-
deck-Rousseau et Combes. Elle le 'dé-
clare catégoriquement.
Nous eh prenons acte avec plaisir,
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui samedi :
Lever du soleil à 5 h. 34 ; coucher S 6 fi.
33.
Matinées-conférences au théùtm Sarah-
Bernhardt et au Gymnasé.
A la Comédie Française, représentation
de retraite de M. Baillet.
Première représentation à Cluny : Qui
qu'a vu Ninette ?
Courses à Saint-Cloud (trot).
Quelle est la couleur des béfoés nègres
Un médecin allemand après un sé-
jour de plusieurs années sur la côte de
Guinée, a publié dernièrement une étu-
de complète sur cett-e question.
Voici quelles sont les conclusions
qui lui a dictées son expérience per-
sonnelle : le petit nègre est en nais-
sant de la même couleur que n'importe
quel enfant européen. Au bout de trois
ou quatre jours environ sa peau prend
une teinte légèrement foncée. Dix jours
après elle devient marron clair et res-
te ainsi longtemps de cette couleur. Ce
n'est guère que trois ou quatre mois
plus tard que la peau devient complè-
tement noire.
L'origine de la semaine
Les sept jours de la semaine se rat-
tachent au mois lunaire.
Les noms des jours de la semaine
sont empruntés aux sept planètes ad-
mises par les Romains. Le lundi est le
jour de la lune ; le marui de mars ; le
mercredi de Mercure ; le jeudi de Jupi-
ter ; le vendredi de Vénus ; lsamedi
de Saturne ; le dimanche est le grand
jour consacré au Soleil.
La division du temps en semaines
appartient à l'Orient. On la trouve de
temps immémorial chez les Chaldéens,
les Egyptiens, les Indiens, les Chinois.
L'usage de la semaine ne se serait
établi en Occident qu'avec le Christia-
nisme. ,
Une position dangereuse
Qui aurait cru que l'habitude de s'as-
seoir en croisant une jambe par-dessus
l'autre pouvait avoir de graves consé-
quences pour la santé ?
C'est pourtant ce que nous apprend
la science, qui vient de condamner cet-
te position, parfois élégante, toujours
commode, et reposante généralement.
Il paraît que la compression des vais-
seaux qu'elle occasionne nuit à la cir-
culation, produit une stagnation du
sang dans les membres inférieurs, fa-
vorise les varices, donne prise à l'em-
bolie et n'est pas sans connexion avec
des malaises abdominaux comme la
constipation.
Il y a même un médecin de Boston
qui l'accuse d'être l'origine de la moitié
des appendicites.
Enfin, croiser les jambes en tram-
way, en chemin de fer ou en métropo-
litain vous expose à avoir les jambes
brisées si un accident ou un arrêt trop
brusque se produit.
AUTREFOIS
Rappel du 5 avril 1872.. — La loi sur la
déportation (des condamnés de la Commu-
ne et affectant à celle peine la presqu'île
Dvscos et Vile des Pins) est promulguée au
Journal Officiel. -
La commission de la revision des gra.
des militaires a terminé ses travaux.
On vient de présenter à M. Thiers un
nouveau type de la pièce de cinq francs,
la face représentera la tête de la Républi-
que ; en exergue : République française,
et la date. Sur le cordon, la devise :
« Dieu protège la France », est supprimée.
Inauguration de l'école laïque de jeunes
filles de la rue Jean-Lantier.
La machine de Passai
M. Bourgoin, de Bordeaux, possède
.un exemplaire authentique de la ma-
chine arithmétique ou machine à calcu-
ler de Blaise Pascal ; il fut trouvé au
marché à la ferraille bordelaise, pen-
dant la Révolution). par un parent de
M. Bourgoin.
Pascal, avait construit sa machine en
1647, après un premier essai en 16^4 ;
il avait alors dix-huit ans.
Les machines à calculer actuelles,
qui ■ sont d'une admirable perfection,
trouvent leur origine mathémathique
dans la conception du célèbre mathé-
maticien. Il y a un autre modèle, au-
thentique, lui aussi, de la machine de
Pascal, au musée du Conservatoire des
arts et métiers, à Paris.
Quelques liste, civiles
Guillaume II possède une liste ci-
vile de 15.719.296 marksa. soit environ
19.650.000 francs.
Cette grosse dotation ne lui étant pas
suffisante, il en sollicite l'augmenta-
tion- Rappelons à ce propos: les chif-
fres des listes civiles de nos princi-
paux chefs d'Etat.
Le roi Edouard VII touche 11.750.000
francs- L'empereur Nicolas II touche
40-000.000 de francs. L'empereur d'Au-
triche reçoit 23.500.000 francs. Le roi
Victor-Emmanuel III a 10000.000"de
francs. M. Roosevelt n'a aue 250.000 fr.
Les monarchies, pour ce qu'elles va-
lent, coûtent vraiment cher..
Rata musicaux
Un curieux procès va venir prochai-
nement devant les tribunaux.
Une bande de rats avait envahi une
maison particulière de Neuilly. Le loca-
taire étant parvenu à prendre vivant un
de ces hôtes, eut l'ingénieuse idée de
suspendre une petite clochette au cou
de son prisonnier et de lui rendre la li-
berté. - ,r -
Le rat alla naturellement rejoindre
ses congénères qui effrayés par le bruit
de la clochette désertèrent la maison et
s'en furent chez le voisin* -
Celui-ci réveillé une nuit, deux nuits,
toutes les nuits par un tintement ar-
gentin provenant de l'intérieur des lam-
bris, crut sa maison hantée.
Ce n'est que tout dernièrement par
l'indiscrétion d'une servante renvoyée
qu'il apprit d'où provenaient les sons
qui lui avaient fait si grand peur. Il
n'a pas désarmé et se dispose à atta-
quer son voisin pour tapage nocturne
ayant empêché, pendant plusieurs se-
maines, la jouissance des différentes
pièces de son appartement.
Appel aux amie de « Robinson.
Il paraît que le dernier descendant
de Daniel de Foë, l'auteur de l'immor-
tel Robinson Crusoë, est en train de
mourir de faim ou à peu près dans un
asile du faubourg de Londres.
- On va organiser une souscription au
profit du vieillard.
Si tous ceux que Robinson amusa en
leur jeune âge envoient une obole, le
vieux de Foë aura de quoi vivre large-
ment.
Candidat f
Un de nos confrères défendant avec
énergie son candidat écrit \;
« Son talent n'est pas de ceux qui
se louent, mais de ceux qui s'affir-
ment. »
Les typographes ont composé i:
« Son talent n'est pas de ceux qui se
louent, mais de ceux qui s'afferment. »
Si le candidat est élu, ceci ne l'em-
pêchera pas d'être ministre.
Une perle
On a enterré, il y a quelque temps,
d'une façon fort civile, un citoyen de
la petite. ville de Verdun-sur-le-Doubs,
en Saône-et-Loire.
Le défunt venait d'être descendu
dans la fosse, lorsque l'adjoint s'avance
s'éponge, tousse et ne trouve comme
oraison funèbre que ces simples mots :
« Citoyen Morin, au nom de la loi
nous t'enterrons 1 » ,
Pas très éloquent, mais très authenti-
que.
Anniversaire
La « payse » qui n'a pas oublié l'an-
niversaire de son cher « pays » lui ap-
porte à la caserne une superbe paire
de chaussettes blanches. ,,-':
- Alors le brave troupier ému jusqu'aux
larmes : -
— Ah ! ma chère amie, je les porterai
toute ma vie 1 -
Et) passant.
Auguste-Paul-Henri Ar/iarlan, de la Com-
pagnie de l'Ardèche, n'a pas eu dans la
vie la chance que méritait son opiniâtreté.
Il est vrai qu'il prit sa revanche après sa
mort.
Mis à la retraite en 1895, ce bon gen-
darme avait sollicité du gouvernement de
la République un poste d'expéditionnaire à
l'administration des postes et télégraphes.
Il était alors chaleureusement recomman-
dé par quelques personnages notoires, no-
tamment un vétérinaire, président de la
« Ligue des Républicains sans peur et sans
reproches », et par le premier vice-prési-
dent honoraire du Syndicat des pêcheurs,
à la ligne, dont la lemme n'avait rien à
refuser à un ininistre qui, parfois, lui ac-
cordait quelque chose.
Auguste-Paul-Henri Aniarlanse disait
donc — avec quelque apparence de raison
— en son langage militaire : « Mon allai-
re, elle est bonne ; elle "est dans le sac. »
Dans le sac, elle n'y était pas précisé-
ment, ainsi que vous allez le voir.
Une année s'écoula, tandis que le candi-
dat attendait sous l'orme. Les feuilles de
l'orme tombèrent et l'administration des
postes ne répondait rien.
Le gendarme renouvela sa demande, rap-
pela que « subséquemment il était toujours
aux ordres de ses supérieurs, l'arme au
pied » : on l'y laissa.
1 Deux ans passèrent, puis trois, puis qua-
tre. Imperturbable, Auguste-Paul-IIènri An-
jarlan renouvelait sa demande le 31 dé.
cembre de chaque année, et « à l'occasion
de la nouvelle, adressait ses meilleurs sou-
haits et vœux à MM. - ses supérieurs ».
Rien, pas de réponse.
Après cinq ans d'attente, il crut défail-
lir : il reçut, un matin, une grande beue
lettre officielle ,du sous-secrétaire d'Etat
des postes et télégraphes, qui lui annon-
çait sa nomination à l'emploi de « demoi-
selle du téléphone ».
C'était une erreur des bureaux. On avait
confondu le sieur Aniarlan (Henri), ancien
gendarme a pied de la compagnie de VAr-
dèche, avec la dénommée Henriette. Au-
joulan, candidate téléphoniste.
Il faillit éclater, mais il n'en lit rien « à
cause de l'habitude de la discipline ».
Il attendit encore Après sept ans, son
humeur placide s'altéra. L'histoire de la
téléphoniste s'était ébruitée. On jasait
dans la petite ville. On chuchotait en
riant lorsqu'il entrait au calé du Lion
d'Or.
Sa santé fut compromise.
Enfin, ces jours derniers, le Journal of-,
ficiel contenait la nomination du gendarme
retraité Augusle-Paul-Henri Anjarlan, en
qualité d'expéditionnaire à l'administration
centrale des postes et télégraphes, rue de
Grenelle, à Paris.
Or, à la date du 25 mai 1906, figure sur
le registre de l'état-civil de la commune
Argentière (Ardèche), son pays natal,
lacté de décès de l'infortuné Aniarlan.
Nommé demoiselle des téléphones, du-
rant sa vie, puis auxiliaire des postes
après sa mort, cet étonnant gendarme a eu
vraiment une carrière administrative peu
banale '-.-
Pourvu maintenant que M. Simyan ne
Ravise pas de la couronner, en révoquant
feu Artjarian, sous le prétexte qu'il n'a pas
reioint son poste dans les délais réglemen-
taires l
Le Gheminean.
: A LA CHAMBRE
Les Interpellations
M. Jaurès veut interpeller sur la politique générale. — La dis-'
cussion est fixée à lundi. - La santé des troupes. -
La nourriture du soldat.
M. Rabier présidé.
On expédie, au début de la séance, quel-
ques projets d'intérêt local.
La Chambre vote ensuite, par 408 voix
contre 98, les crédits destinés à l'installa-
tion du ministère du travail dans l'ancien
archevêché et, par 501 voix contre 27, les
crédits affectés au voyage du président de
la République à Londres.
M- Becaye pose une question a.u minis-
tre des travaux publics sur les retards de
la Compagnie d'Orléans.
M. Barthou. — Je me suis préoccupé de l'nu^.
mentation du personnel et de l'augmentation
©orrél-ativs du matériel. J'ai obtenu des résultats.
Mon attention se porte maintenant sur les voies
Se dégagement qui paraissent insuffisantes.
L'incident est clos.
L'INTERPELLATION JAURES
Le président annonce qu'il a reçu de M.
Jaurès une demande d'interpellation sur la
!po.litique intérieur du gouvernement! et
sur les réformes qu'il a promises.
M. Clemenceau. — Le gouvcrnemei4 accepte
l'interpellation. Il est à la disposition de la
Chambre pour en fixer la date ; celle de lundi
me semblerait indiquée.
M. Jaurès, qui croit que le gouvernement
a demandé la discussion immédiate, s'é-
crie : it Je suis prêt. » Et il veut monter à
la tribune. Les huissiers l'en empêchent ù
sa grande surprise.
— J'ai dit lundi, lui crie M. Clemenceau
— C'est entendu, réplique M. Jaurès av.ec
une nuance de regret.
LES MORTS DE JEUNES SOLDATS
La parole est ensuite donnée à M. Blanc
pour développer son interpellation sur les
circonstances qui ont précédé la mort de
deux soldats.
M. Blanc. — Le soldai Durand était de fac-
tion ù la prison de Fresnes, quand il fut pris
de faiblesse. Transporté à l'hôpital du pays, il
fut renvové à la chambrée où le délire le saisit.
Alors, seulement, il lut dirigé sur l'infirmerie.
Il mourut. Le pauvre soldat n'avait pas osé se
présenter à la visite à cause de la sévérité du
médecin-major.
L'autre eoM&t dont je veux parler. Estève,
est mort à Bonilacio, dans les conditions les
plus douloureuses. 11 n'y avait pas de feu dans
la salle où il agonisait, et on ne pouvait chaufo"
fer te lit faute de bassinoire.
-Le soldat n'avait pas été baptisé. Sa mère le
fit savoir aux officiers, qui firent des objections
inattendues à un enterrement civil, disant qu'il
porterait préjudice au régiment. L'enterrement
n'en fut pas moins civil.
M. Gérard-Varet interpelle à son tour
sur les. causes qui ont précédé et -entraîné
la mort d'un autre jeune soldat, nommé
Sagnier, à Cosne.
M. Gérard-Faret. — Il était indisposé depuis
longtemps ; il ne put se faire reconnaître ma-
lade une première fois par le médecin-major ;
par la suite, il fut reconnu atteint d'angine,
puis de bronchite.
il est mort parce qu'il a été soigné trop tîir
divement, prétend la famille. Le médecin-major
répond que le soldat a dissimulé, par timidité,
son état de maladie. Une enquête s'impose, mais
il ne suffit }JM' 'dé' statue.r sur un cas isolé.
Il y a un système qui est maurais et qu'il faut
changer.
Plus une armée s'identifie à la nation, plus
la nation se doit à une armée.
M. Goujat affirme que le soldat mort à
Cosne a été l'objet de la plus grande sol-
licitude de la part des autorités civiles et
militaires.
- Il faut le dire, ajoute-t-U, pour rassu-
rer les familles de nos soldats.
M. Groussau intervient pour parler d'un
nommé Mallieux, incorporé l'an dernier,
en même temps que son frère juu,.=au, au
151e de ligne. Réformé, il fut renvoyé du
régiment dans un état de grande faiblesse.
Il mourut en rentrant chez lui.
M. Chéron, sous-secrétaire d'Etat à la guerre.
— Il faut être juste pour les médecins militaires.
J'ai fait une enquête sur le cas du soldat Du-
rand. J'ai constaté qu'il avait été entouré de
soins dévoués. Il a succombé à la méningite
cérébro-spinale ; c'est également de cette mala-
die qu'est mort le soldat Estève. Je ferai faire
une enquête sur l'agencement de l'hôpital de
Bonifacio.. -
Nos médecins militaires sont à la hauteur de
leur tacite. Nous .ferons tous les efforts pour
tissusfcr i'améliomîion de l'ctat sanitaire de
l'armée. (Applaudissements.)
M. Jourde. — Les médecins militaires ont cer-
tainement beaucoup de valeur, mais dans les
corps les mieux tenus, il peut se produire des
fautes, des erreurs.
Comment les infirmières anégimentaires peu-
vent-elles manquer dos médicaments nécessai-
res ? Il y a des fonds affectés à l'entretien des
pharmacies. Il faut faire rendre aux coupables
des -comptes sévères. Il faut que dans le monde
militaire, on prenne ce débat au sérieux.
Un ordre du jour invitant le gouverne-
ment à protéger la santé des soldats est
déposé par M. Alexandre Blanc.
M. Chéron, au nom du gouvernement,
demande l'ordre du jour pur et simple.
M. Blanc s'y rallie.
M. Labori demande le licenciement des
réservistes jqui se trouvent à Fontaine-
bleau, où vient d'éclater une épidémie de
dyphtérie.
Le ministre de la guerre dit, qu'à sa
connaissance, il n'y a pas eu de cas nou-
veau à Fontainebleau depuis le 20 mars.
L'ordre du jour pur et simple est adopté
à mains levées.
LES VIANDES POUR LA TROUPE
La Chanibre discute en fin de séance
l'interpellation de M. Ferrette sur l'affatre
des viandes avariées fournies à certaines
garnisons de l'Est.
M. Ferrette. — Tous les animaux que les vété-
rinaires de la ville de Paris refusent comme
impropres à la consommation sont envoyés dans
l'Est, où ils colportent leurs maladies. C'est
ainsi que la fièvre aphteuse, en 1906, a ravagé
toute une partie du département de la Meuse,
causant, en un seul canton, pldc 200.000
francs de pertes, et dans le resté au départe-
ment, plus de 2 millions. -
Quel est le remède à cette situation ? D'abord
la réorganisation complète du système des abat-
toirs, dont l'installation dans 4 plupart des
villes viole les plus simples principes de l'hy-
giène.
Qu'on fasse partout ce qu'a fait ù Lyon notm
collègue Normand, ce qu'on a lzjl à Reims et
dans les villes d'Allemagne et un grand progrès
sera acquis.
Mais qu'on cesse d'attaquer les officiers, les
sous-officiers, les cuisiniers même de la troupe,
et qu'on s'en prenne au système absurde suivi
depuis des années par l'Etat.
L'Etat, en effet, fixe à 90 ou 95 centimes le
prix du kilo de vnde qu'U paye pOUlo ses sol.
L'Etat, kilo de viande qu'il paye pour ses sol-
dats. Or, comment veut-on que l'adjudicataire
fournisse de la viande, non pas supérieure, mais
simplement mangeable, quand la viande la plus
ordinaire coûte 1 fr. 20 ou 1 fr. 30 ?
Voix à Vextréme-gauche. — il n'est pas forcé
de fournir à ce prix.
M. Ferrelis: — Il est forcé de fournir en frau.
dan.t. (Très bien î)
L'adjudication, en pareille matière, n'est
qu'une fraude forcée. -
M. Ferrette se prononce pour rachat é!¡:'
rect par les compagnies chez les bouchers
des garnisons..
M. Cazencuve. — La population civiie doit êtna
protégée au même fitre que la population mili-
taire. Le marquage des viandes destinées à la
consommation réclame un contrôle des plus
révères.
Il y a des boucheries militaires qUi r-onclion.
nent heureusement ; "nais ce système ne saurait
être généralisé. :
Le plus grave inconvénient tient au taux trop
bas fixé par le ministère de la guerre. Dans le
14' corps (Lyon), -ce taux ne permet d'acheter
qu'un tiers dé viande de deuxième catégorie. et
deux tiers de mande de troisième catégorie.
Le système d'alunentation des troupes devrait
éfcne modifié à fond. Tout au moins les vian-
des destinées à l'armée devraiftnt^ltes être sou.
mises à un contrôle rationnel, au même tilrw
que celles des viandes destinées à la population
civile.
A oet égard le gouvernement pourra être pro-
chainement armé par le projet que vient de
rapporter la commission de l'agriculture.
Pourquoi faut-il que le règlement d'adminis-
tration publique prévu pair l'utile toi de 1905
sur les abattoirs n'ait pas encore par-, ? Le ré-
gime des abattoirs est. il réorganiser tout entier
et partout, sauf eh quelques villes privilégiées.
Ce sont les moins fortunés qui ont le plus de
droits à la protection des pouvoirs publics. La
Chambre doit s'en souvenir. Le logement salu-
hre, l'alimentation salubre sont les deux termes
d'un même problème dont l'importance socialo
mérite tout notre effort.
La suite du débat est renvoyée à lundi,
Gtprès la discussion de l'interpellation de
M. Jaurès.
» *
AU SÉNAT
LA DEVOLUTION DES BIENS
ECCLESIASTIQUES
M. Audiffred dépose une proposition ten-
dant à modifier les dispositions de la loi
de finances de 1898 en vue de faciliter les
transports publics par automobiles.
M. Humbert dépose un rapport sur le
projet tendant à autoriser le rengagement
des simples soldats pour six mois.
Le Sénat adopte après déclaration d'ur-
gence :
1° Le projet tendant à régler, au point
de vue des hautes payes, les droits des
militaires servant au delà de la durée lé-
gale qui se sont engagés pour trois ans
entre le 21 mars 1905 et le 21 mars 1900 ;
2° La proposition de M. Montfort sur
la' créaitlioo d'un régiment étranger de ca-
valerie ;
3° La proposition ayant pour objet la
répression des outrages aux bonnes
mœurs ;
4° Le projet relatif à la création d'un
bureau spécial à la direction générale des
contributions directes en vue de l'évalua-
tion des propriétés non bâties.
Le Sénat reprend la discussion de la loi
sur la dévolution des biens ecclésiastiques.
M. Legrand défend un amendement à
l'article 2, retirant au projet tout caractère
rétroactif;
M. Briand. — Ce que vous réclamez, vous le
réclamez aussi dans l'intérêt des familles qui
ont le droit de remettre là main s' les biens
détournés de leur destination. Mais Nes-vous
sûrs que la 'restitution serait toujours-conforme
aux intentions du donateur ?
Croyez-vous qu'il n'y ait pas des cas où une
donation ait été inspirée précisément par le dé-
sir de déshériter un parent ? (Très bien ! à gau,
che.)-
Laissons de côté la question de J'ind{;pc!!',dlln.
ce des magistrats. Cette indépendance, nul ne la
mcnac. Mais si vous votez l'amendement, dans
quel sens voulez-vous qu'ils jugent désormais ?
M. Guillier commence, en répondant iiu
garde des sceaux, un discours dont la suite
est renvoyée à lundi.
■■■■ ■ O»' ■ —
Coulisses des Chambres
Au groupe Waldeck-Rousseau.
M. Antoine Perrier a pris hier possession
du fauteuil présidentiel à l'Union républi-
caine du Sénat.
Après avoir remercié ses collègues de la
marque de sympathie et de confiance qu';ls
viennent de lui donner, le sénateur de ?»
Savoie fait l'éloge de ses deux prédéces-
seurs, MM. Antcnin Dubost et Jean Dupuy
et il montre les services rendus par l'Union
républicaine à la République.
Puis il ajoute :
Parti d'action, l'Union Républicaine a su évo-
luer avec les transformations que les faits un
posent à notrs société et à nos institutions. Nous
ne sommes pas, en effet, de ceux qu'effrayent
les réformes politiques, économiques et socia-
les, mais nous tes voulons pratiquement organi-
sées. Nous scrîuneis des réalistes et non des uto-
pistes.
Nous sommes résolus à suivre le gouverne-
ment dans la voie des réformées demandées par
la démocratie, mais en les prépairant mûre-
ment et méthodiquement afin d'éviter de çruelk*
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