Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-03-14
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 14 mars 1908 14 mars 1908
Description : 1908/03/14 (N13882). 1908/03/14 (N13882).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
W 13882. - 83 Ventôse An 110 ,.
C13VO CEUÏTIMIÏ» LE NCMEHO
Samedi 14 Mars 1908.-^Na 13388
LE XIX* SIECLE
, AÏVÎVOXCE9 f.
AUX BUREAUX DU JOURNAL J
14, rue du Mail, Paris.
Et chez MM. LAGRANGE. CERF êtO.
plate de la Boursct S
*
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1. TRIBUNE LIBRE
NOS MOBILES
Retenu momentanément
loin de Paris, j'ai lu ces
jours derniers dans les jour-
naux, une information con-
tre laquelle, que je sache,
aucune protestation ne s'est
élevée. C'était au lendemain de ia pu-
blication de la note que connaissent les
lecteurs du Rappel, relative aux fa-
veurs personnelles qu'aurait sollicitées
notre ami Emile Constant.
Les ministres, comprenant eA qu'a-
vait d'odieux une telle insinuation,
d'ailieurs contraire à Ja. vérité, s'em-
- pressèrent de démentir le bruit mis en
circulation.
m* L'un d'eux, je ne sais lequel, expli-
qua que le nom de M. Emile Constant
«« n'avait été prononcé au conseil que
pour rechercher ce qui avait pu susci-
ter son hostilité. On avait été ainsi ame-
né, dit-il, à se demander si quoique
chose, dans un ministère, lui avait été
refusé.
Ne trouvez-vous pas que cela indique
Œe la part. du gouvernement, une con-
ception tout à fait particulière du régi-
me parlementaire ? Un député interpelle.
Inutile de chercher dans des considéra-
tions de politique générale les motifs
de son attitude. C'est simplement qu'il
n'a pas obtenu, pour son protégé, le bu-
reau de tabac ou le bout de ruban violet
qu'il sollicitait.
Si cela n'est pas conforme à la réa-
lité, c'est du moins ce qu'on pense au
sein du conseil des ministres. Et cela
ouvre des horizons tout à fait nou-
veaux, il le faut avouer, sur les procé-
dés de gouvernement auxquels peuvent
avoir recours des hommes qui ont une
telle opinion des mœurs et du régime
parlementaire. -
lis ne peuvent admettre que, dans
* le parti républicain, on ne soit pas en
admiration devant toutes leurs concep-
tions de la politique intérieure ou ex-
térieure. Quiconque ne trouve pas que
tout est pour le mieux dans la meilleure
des Républiques, et se permeb de le
dire, est considéré comme le pire en-
nemi des institutions et du pays.
C'est être mauvais républicain que de
réclamer pour les élus du peuple un peu
d'indépendance, et de demander, puis-
qu'ils doivent juger les actes du pouvoir
exécutif, qu'ils aient la liberté de le
blâmer comme de l'approuver.
C'est être mauvais Français que de
, ne pas vouloir engager le pays dans
des aventures lointaines dont nul ne
peut prévoir les conséquences, et qui,
en mettant les choses au mieux, doivent
être pour nous sans profit.
C'est être mauvais citoyen que de
prétendre, quand son parti est au pou-
voir, l'obliger à appliquer les principes
et les idées qu'il défendait dans l'oppo-
sition.
Le cabinet ne peut admettre qu'il y
ait des hommes fidèles à leurs opinions
-et qu!'Ïtls agissent en conséquence, n
veut que leur attitude soit uniquement
inspirée par des calculs intéressés.
« Je ne veux pas que vous m'accor-
diez une demi-confiance., disait M. Cle-
menceau au début de son ministère. Je
la veux tout entière, sans réticence et
sans arrière-pensée. »
C'est, en réalité, un blanc-seing qu'il
sollicitait. Rien de surprenant à ce qu'il
s'étonne que certains, voyant l'usage
qu'il en a fait, se refusent à le lui lais-
ser plus longtemps.
.-". Comment M. Clemenceauavant d'être
ministre, aurait-il accueilli un cabinet
qui lui. aurait demandé une confiance
aveugle ? S'est-il privé, jadis, de faire
de l'opposition à des ministères qui, ce-
pendant, avaient des républicains à leur
tête r
Si je rappelle ces faits, ce n'est pas
pour l'en blâmer, ayant, à l'époque,
approuvé sa politique, mais simplement
pour réclamer au profit de républicains
qui y sont restés fidèles, la liberté d'ap-
préciation dont il a jadis fait lui-même
usage.
Les luttes parlementaires ne sont
pas, comme on voudrait le faire croire,
uniquement inspirées par des préoccu-
pations d'ambition ou d'intérêt person-
nes. Elles sont plus nobles, plus éle-
vées, partant plus belles. Le seul inté-
rêt que doivent avoir devant les yeux
Jes hommes qui y prennent part, c'est
celui du pays, c'est l'intérêt de la Ré-
publique.
Qu'importe que ce soit tel ou tel qui
détienne momentanément le pouvoir ?
La seule chose que l'on doive considé-
rer, c'est la façon dont il en use pour le
bien général.
C'est donner 'dès armes aux adver-
saires de la démocratie, que d'affirmer
que les interventions qui se produisent
ont des mobiles intéressés. Cela, d'a-
bord, n'est pas exact. On ne peut, en
laissant se répandre de telles affirma-
tions, que discréditer le régime parle-
mentaire et du même coup, porter at-
teinte aux; libertés publiques dont il est
la sauvegarde et la garantie.
Que dirait M. Clemenceau si nous af-
firmions que l'opposition systématigue
que, pendant vingt ans, il a faite à tous
les gouvernements, n'était inspirée que
par son ardent désir d'obtenir le pou-
voir, son dépit de n'y pas réussir ? Si
nous émettions l'opinion qu'il n'a jadis
combattu avec tant d'âpreté la politique
coloniale, que parce qu'elle était prati-
quée par d'autres que par lui ?
Il ne manquerait pas de répondre que
ce sont là d'odieuses calomnies. C'est
parce que nous pensons qu'il aurait rai-
son de parler ainsi, que nous nous re-
fusons à porter, même dans la forme
dubitative, de telles accusations contre
lui.
Nous croyons que dans l'opposition
qu'il a faite à des ministères républi-
cains, il a été toujours sincère et désin-
téressé. Mais nous demandons que l'on
nous suppose, à nos amis et à nous, la
même sincérité et le même désintéres-
sement, lorsque nous critiquons le gou-
vernement actuel.
Soit au point de Vue intérieur, soit
au point de vue extérieur, il ne nous
semble pas avoir nettement conscience
des véritables intérêts de la France, des
véritables intérêts de la démocratie.
Qu'il s'efforce de les mieux compren-
dre, de les mieux servir, et nous serons
les premiers à l'en féliciter. Mais s'il
persiste dans une politique qui nous ap-
paraît comme grosse d'inconnu et de
périls, qu'il ne cherche point les motifs
de notre attitude dans des questions
d'intérêt personnel ou /électoral.
Elle nous sera uniquement inspirée
par le souci que nous avons de notre
responsabilité et de nos devoirs envers
la démocratie.
Alfred MASSÉ,
Député de la Nièvre.
LA POLITIQUE
LE DISCOURS DE M. COMBES
La presse réactionnaire et
progressiste fait au discours
prononcé hier par M. Combes
l'accueil qu'on était en droit
d'attendre d'elle.
Sa protestation véhémente
est la preuve manifeste que l'ancien pré-
sident du Conseil a tenu le langage at-
tendu par la véritable majwité républi-
caine des Chambres et du pays.
M. Combes, soutenu par les applau-
dissements significatifs de l'assistance,
a précisé avec sa netteté et sa franchise
habituelles le désir « d'union étroite et
de rappochement cordial qui se fait
jour visiblement et va en s'accentuant de
plus en plus dans les groupes de gau-
che du Sénat et de la CHambre. »
Puis, envisageant la contradiction qui
existe entre l'élargissement apparent de
la majorité républicaine dans la Cham-
bre, et le ralentissement de l'action répu-
blicaine dans le pays, M. Combes a con-
clu en termes excellents :
« Aussi l'élargissement de la majorité
républicaine tel qu'il est entendu par ceux
qui n'ont pas cessé de la combattre dans
le pays, ne dit rien qui vaille au parti ré-
publicain. Il est de notre devoir de le si-
gnaler comme le mal de l'heure présente et
comme un danger, le plus à craindre, de
l'heure à venir. Pour moi, j'ai déjà dit, en
conseiller désintéressé de mon parti, par-
lant et agissant en toute occasion sous
l'empire dominant de la reconnaissance
sans bornes que je lui dois pour l'appui
continu qu'il m'a donné dans l'accomplis-
sement des réformes les plus considé-
rables, oui. messieurs, j'ai déjà dit à nos
amis du Sénat, mais je tiens à redire de-
vant nos amis de la Chambre que la rai-
son des choses, non moins que l'intérêt su-
périeur de la République exige la formation
de deux partis bien tranchés au sein de
la représentation nationale, à l'imitation de
ce qui existe dans le corps électoral : le
parti des républicains avancés, des répu-
blicains de gauche, et le parti des républi-
cains progressistes ou libéraux, qui ont
derrière eux les autres conservateurs de di-
verses nuances, partout où ces derniers ne
sont nas les plus forls.
Il n'y a là rien qui soit offensant pour
qui que ce soit, rien qui ne soit confor-
me à la logique et à la vérité des faits. En
soutenant cette doctrine, j'ai conscience
de répondre aux désirs du pavs républicain
et, je le crois aussi, aux sentiments de la
véritable majorité républicaine de la Cham-
bre ».
Ce sont ces sages paroles que le jour-
nal des Débats qualifie — avec cette
modération 3e Tangage académique, qui
lui est propre — de « jactance vulgaire
et violente
M. Combes, assurément, n'a pas ex-
primé les sentiments des progressistes et
des conservateurs ; il lui suffira sans
doute d'avoir été l'énergique interprète
de la « véritable majorité républicaine
des Chambres
Et si le Bloc de droite laisse éclater
son dépit avec cette violence et cette
maladresse, c'est qu'il a constaté, suivant
les propres termes du Petit Tempsy « l'o-
vation enthousiaste » gui a salué l'émi-
ment et intègre défenseur de la politique
du Bloc de gauche.
; —
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
13 mars 1881. — Assassinat, à Saint-Pé-
tersbourg, du tsar Alexandre Il.
Aujourd'hui vendredi :
Lever du soleil à 6 h. 20, coucher à 6 h.
Séance à la Chambre et au Sénat.
Courses à Saint-Cloud, réouverture des
courses plates.
La Malle des Indes.
Sait-o-n exactement ce que c'est que la
Malle des Indues 2
C'est un courrier anglais, utilisé aussi
par -la poste française, qui lui fournit
environ deux cents sacs de lettres sur
mille ou douze cents.
Créée en 1839, la Malle des Indes part
de Londres par bateau le vendredi dans
la soirée, et quitte Calais dans la nuit,
en un train de dix à quatorze- wagons-
poste qui contourne Paris par la Gran-
de-Ceinture, est rejointe à Villeneuve-
Saint-Georges par l'ambulant Paris-Mo-
dane, et est remise au service italien
au Mont-Cenis, le samedi soir, à huit
heures et demie.
De là, la Malle des Indes rejoint Brin-
disi par Turin et Bologne. A Brindisi,
un paquebot anglais emporte le cour-
rier pour Colombo et Bombay, où le
chemin de fer le reprend vers Madras et
Calcutta.
La Malle est souvent si considérable,
qu'on est obligé de joindre une partie
des wagons-poste au train péninsulaire
de voyageurs.
Une semaine sur deux, la « Grande
Malle » porte te courrier d'Australie et
d'Extrême-Orient ; l'autre semaine, la
« Petite Malle » va prendre à Naples~un
courrier français.
Il n'y a pas bien longtemps, le transit
postal de la Malle des Indes était pour
ainsi dire un monopole ; mais, depuis
quelques années, elle commence à trou-
ver dans le Transsibérien un concur-
rent sérieux, qu'a paralysé un moment
seulement la guerre russo-japonaise.
AUTREFOIS
Rappel du 14 mars 1872. — Victor Hugo
fait paraître la première édition de Actes
et Paroles (1870, 1871, 1872).
Onze millions d'indemnité sont répartis
entre les propriétaires parisiens pour dom-
mages causés pendant la guerre.
On a entamé des négociations avec l'Al-
lemagne pour faire évacuer le territoire
avant l'époque fixée par le traité de Franc-
fort. pn ananrant 1P. nn.ip.mpnl rfee mil-
liards.
Un concours avait été ouvert pour un
nouveau rideau de l'Opéra (celui de la rue
Lepeleticr) ; les 27 projets présentés sont
repoussés. On repeindra à neuf l'ancien ri-
deau.
Trois trains se rencontrent dans les té-
nèbres, sous le tunnel de Cardiff (Angle-
terre), deux trains de charbon el un train
de voyapeurs. Deux des trains sont brisés
el jetés hors de la voie. Seul, un employé
est blessé gravement.
Annonce américaine.
Une petite annonce cueillie dans le
Courrier des Etals-Unis, et garantie au-
thentique :
« Une demoiselle de bonne éducation,
de parfaite moralité, et possédant d'ex-
cellentes manières, désire se placer
comme bar-maid, dans un buffet de
chemin de fer.
« N. B. — Cette personne peut, avec
une livre de pain -et un quart de beurre,
confectionner cent vingt-cinq tartines
d'apparence satisfaisante 1 »
Chère amie
Une des sociétaires les plus admirées
de la Comédie Française a passé la
quarantaine. Elle a encore, avec raison,
des prétentions à la beauté plastique.
Au cours d'une conversation récente au
foyer, elle dit devant une camarade :
- « J'ai encore de bel es lignes ? »
- « Oui, sur le front, répondit la
c; bonne petite amie ».
La a Marche funèbre » de Chopin.
Les historiographes de Chopin, ce
« Polonais aux oreilles françaises »,
n'ont jamais pu se mettre d'accord sur
la circonstance dramatique qui donna
naissance à cette fameuse. Marche funè-
bre qu'il est impossible d'entendre sans
en être attendri aux larmes.
Or, si nous en croyons M. de Lorgne,
de l'Intermédiaire, celte circonstance
aurait été aussi naïve qu'imprévue.
On sait que l'auteur des Nocturnes,'
avant d'être atteint de la maladie ner-
veuse qui l'emporta, était un gai com-
pagnon, boute-en-train de toutes les pe-
tites réunions artistiques. Habile aux
grimaces, grâce à son masque très mo-
bile, il n'avait pas son pareil pour imi-
ter les flegmatiques Anglais.
Mais écoutons M. de Lorgne :
« Chopin assistait à une fête donnée
dans l'atelier d'un peintre de ses amis,
avec, pour distraction, le. spectacle de
fantoches de bois, pupazzi de l'époque.
La pièce se terminait par les funérailles
de l'un de ces petits personnages en
miniature.
« Sur la prière de son ami, et un peu
par plaisanterie Chopin se mit au pia-
no pour accompagner de musique l'en-
terrement de la marionnette. Emporté
par son imagination maladive, oubliant
qu'il ne s'agit que d'une poupée, il im-
provisa cette page admirable. »
Comme quoi les toutes petites causes
ont souvent les plus grands effets.
LE LIVRE DU JOUR
Rois et Reines que j'ai connus, ".-
par Mme HÉLÈKE VACARESCO
Il n'y a rien de lel~que d'être en Répu-
blique pour s'intéresser aux faits et gestes
des têtes couronnées. Ce sont ae ces cho-
ses qu'on aime à voir. de loin et qui vous
passionnent d'autant plus qu'elles conser-
vent un petit parfum de mystère. Des dé-
mocrates comme nous sont rarement ad-
mis sur les marches des trônes. La vie
intime d'un souverain nous apparait donc
comme une sorte d'énigme, qui nous donne
toujours envie de soulever le voile pour.
apercevoir un coin de la réalité.
Mme Hélène Vacaresco, qui a été reçue
en familière dans la plupart des cours
d'Europe, nous donne à la librairie San-
sot de quoi défrayer amplement notre cu-
riosité. Voici la délicate et attirante phy-
sionomie d'Elisabeth de Roumanie. Carmen
Sylva, la reine-poète, « qui prend un réel
plaisir à humilier ses ennemis par la gé-
nérosité de son pardon. » Voici le Kaiser,
:.e fJNJtée. « pontife sans consécration,
guerrier sans batailles ni ennemis, drama-
turge sans drame, qui, dans toutes ses in-
carnations, est resté le même personnage
impérieux et subtil. » L'empereur d'Autri-
che nous émeut comme un personnage de
Shakespeare « au milieu d'un cortège fu-
nèbre, cortège d'ombres, chacune portant
une urne noire remplie de cendres et de
larmes. » La reine Victoria, la reine
Alexandra. Edouard Vil, les souverains de
Serbie, Marguerite de Savoie, Victor Em-
manuel 111 et la reine Hélène, la reine Ma-
rie Christine et notre sympathique Alphon-
se XH1 complètent un « excellent ensem-
ble - *» dans cette pièce étranae où l'on ne
rencontre que des premiers rôles.
- Une des particularités de ce livre est en-
core qu'il a été écrit en anglais par un au-
teur déjà connu et fort apprécié dans les
lettres françaises. Vu le vif succès de l'ou-
vrage à Londres et en Amérique, Mlle Va-
caresco en a autorisé la traduction. Nulle
part il ne s'imposait davantage qu'en celte
bonne ville de Paris, qu'on a surnommée
le « Passage des Princes.)) MAURICE CABS.
L'anniversaire de Victor Massé.
A propos de l'anniversaire du com-
positeur des Noces de Jeannette et de
Galathé.e, nous avions raison de dire
l'autre jour que le projet de monument
à Victor Massé conçu par Franceschi
fut abandonné.
Mais noii £ avons -eu tort de ne pas
ajouter que Victor Massé a tout de
même son monument, lequel est d'An-
tonin Mercié et orne le Cours de la
Bove, à Lorient. Un de nos lecteurs de
Lorient nous rappelle à l'ordre à ce su-
jet, et nous lui donnons acte de sa très
juste observation.
La Place de la Concorde
Le Matin poursuit sa vigoureuse cam-
pagne contre les barrages, les palissades
et autres horreurs qui entravent la circu-
lation dans Paris aux endroits les plus fré-
quentés.
Il demande la suppression rapide des
palissades de la place de la Concorde.
Ces palissades enlaidissent, paralt-il, la
plus belle place du monde.
Nous sommes de cet avis.
Ce point admis, nous posons la question
vivante à tous les admirateurs de Pa-
ris :
6i de simples palissades provisoires en-
lèvent tout son cachet à la place de la Con-
corde, quel effet désastreux doit produire
la hideuse barraque que l'Automobile-Club a
fait-installer sur les toits de l'hôtel Cril-
lon en face le ministère de la marine ?
Que dites-vous de cet attentat contre 'a
h"I" f/. de l'incomparable place de la Con-
corde T
«. ,auid mettra-ton le tout puissant Auto-
mobile-Club monstruosité qui enlaidit autrement Paris
que de malheureuses palissades qu'on peut
faire disparaître instantanément ?
Jean Clerval
1
En passant.
Les gazettes officieuses ont laissé sous-
entendre récemment que M. le président
du conseil avait songé à fmre un nouveau
chassé-croisé de ministres.
C'est une habitude à prendre, comme une
autre.
Déjà la mort de cet excellent M. Guyot-
Dessaigne avait permis à nos secrétaires
d'Etat de danser un lancier, et de faire en-
trer dans le quadrille l'aimable M. Cruppi.
M. Briand avait ainsi troqué les cultes
pour les sceaux, et M. Doumergue le
commerce pour rinstruction publique.
On aurait pu continuer la série et en-
voyer M. Picquart à l'agriculture réaliser
ta création du soldat-laboureur ; M. Mil-
tiès-Lacroix aux postes et télégraphes ré-
tablir les communications téléphoniques
avec le Matin ; et M. Barthou aux affaires
étrangères, pour appliquer le bouclier du
Métro à la pénétration pacifique du Ma-
roc, etc, Seul le sous-secrétaire d'Etat à
l'intérieur, grenadier immuable, serait res-
té Mauian comme devant.
Ce système pourrait d'ailleurs comporter
d'heureuses variantes.
Ainsi lorsqu'un cabinet aurait cessé
d'avoir la confiance des Chambres — un
malheur est si vite arrivé — les minis-
tres en seraient quittes pour changer de
portefeuille entre eux.
Ou bien encore, on pourrait organiser
un trottoir roulant entre tous les ministè-
res, de telle sorte que chaque ministre
prendrait successivement la signature dans
les divers « Départements ». Le lundi, par
exemple, on commencerait par la guerre,
le samedi on se trouverait aux beaùx-arts,
et le dimanche, on irait tous chez Maufan
se Jaire doucher à Charenton --
Le Chemineau.
LA JOURNEE PARLEMENTAIRE
LE VOTE PEBSlE DES DÉPUTÉS
Comment la majorité devient la minorité. — Les absents ont
toujours tort. — La réforme fiscale. — La réha-
bilitation des faillis au Sénat.
La séance est ouverte à deux heures
quinze, sous la présidence de M. Henri
Brisson.
M. Briand, garde des sceaux, dépose un
projet de loi sur la magistrature, et M.
Caillaux, ministre des finances, le projet,
annoncé depuis longtemps, tendant à ré-
primer la fraude en matière de succession
par l'envoi de valeurs à l'étranger.
L'INTERPELLATION EMILE CONSTANT
M. Emile Constant demande à interpel-
ler sur les conditions dans lesquelles a été
adjugée la. marque de la Chartreuse.
M. Briand déclare ne pas posséder les
documents utiles pour répondre à l'inter-
pellation. La dtate de la discussion sera
donc ultérieurement fixée.
LA MOTION BONNEVAY
M. Bonnevay soulève un vif incident à
propos du vote de lundi sur le paragra-
phe 3 du projet Caillaux (Impôt sur les bé-
nelices agricoles). On sait que les rectifica-
tions à. fOfficiel avaient changé en mino-
rité la majorité qui avait adopté le para-
graphe.
M. Bonnevay propose de supprimer le
vote par procuration. On remettrait à cha-
que député sa boite de bulletins au moment
où il entrerait en séance.
M. Colliard. — Il y a beaucoup de dépulés
avocats qui s'absentent à chaque instant pour
aller plaider en province.
M. Bonnel'all. — Je ne sais si cette parole
me vise. Dans ce cas je n'aurais qu'une chose
à répondre : c'est que j'avais une assez belle
situation au barreau ; je l'ai abandonnée pour
me consacrer au Parlement.
M. Jourde. — Je ne oomprends pas qu'une
pareille discussion puisse s'instituer devant
une Chambre française. Beaucoup de nos col-
lègues travaillent d'une façon plus utile dnns.
les oommisions que dans la salle des séan-
ces'. (Approbations). J'ai confiance que la Cham-
bre ne votera pas le projet de résolution de
M. Bonnevay. '«
Af. Bonnevay. — Je ne demande que l'ur-
gence.
M. lourde. — N'est-ce donc pas un vote ?
M. Aynard. -- Sans viser plus particuliè-
rement le projet d'impôt sur le rcvenu, dont
les députés de toutes les nuances ont adopté
le principe ; (hruil) j'estime que l'incident sou-
levé par notre collègue Bonnevay mérite une
sanction.
Je ne suis pas l'adversaire du vote par pro-
curation ; je le considère comme une néces-
sité.
Voix à gauche. — Ah 1 Ah 1
M. Aynard. — Mais j'ai l'intention de dé-
poser à brève échéance une proposition pour
que la volonté de la Chambre ne puisse pas
disparaître devant une erreur malérielle.
Voix à gauche. — II n'y a pas d'erreur ma-
térielle.
Au grand étonnement de la. plupart des
députés. le garde des sceaux prend la pa-
role dans ce débat qui ne concerne cepen-
dant que le règlement intérieur de l'assem-
blée.
M. Briand, garde des sceaux. — Il n'est pas
d'usage que Je gouvernement, intervienne dans
les discussions qui touchent lç règlement de la
Chambre. Mais ici, une question politique do-
mine k débat. C'est pourquoi le gouvernement
déclare qu'il lui est impossible de s'associer
à la demande d'urgence. (Mouvement).
M. Charles Denoist. — Et la séparation des
pouvoirs ? Qu'en faites-vous ?
L'urgence est Tepoussée par 371 voix con-
tre 210.
L'IMPOT SUR LE REVENU
On reprend la discussion de l'impôt sur
le revenu après avoir validé l'élection de
M. Bougues, élu à Saint-Gaudens.
A propos de l'impôt sur la propriété fon-
cière non bâtie, M. Quilbeuf voudrait sa-
voir comment les agents du fisc calculeront
la valeur locativ3 d'un domaine quand
l'impôt sera mis, par le bail, à la charge
du fermier.
M. Caillaux. - Ils considéreront que la va-
leur locative est augmentée du prix de l'im-
pôt payé par le fermier, mais votre question est
relative à la cédule des bénéfices agricoles.
L'article 8 est adopté.
M. Bonnevay présente un article 8 bis
ainsi conçu :
Sont affranchis de l'impôt sur le revenu pen-
dant les trente premières années de la planta-
tion ou du semis :
1" Pour la totalité de l'impôt, les semis
et plantations effeclués sur le sommet eL le
pendant des montagnes, sur les dunes ou dans
les landes ; V
2* Pour les trois quarts de l'impôt, les se-
mis et plantations en terrains ordinaires.
M. Caillaux. — Cela nous conduirait à des
privjlèges: Nous! serions forcés de dégrever
les grands propriétaires qui, pour leur plaisir,
transforment soit en Sologpe, soit en Seine-
eiliOise, des terres iL labours "en terrains de
chasses.
M. Camille Pelletan conteste que la ques-
tion ait un intérêt pratique. Ii En revan-
che, dit-if, l'amendement de M. Bonnevay
ouvrirait la porte à toutes sortes de privi-
lèges. »
M. Perroche. — Ce ne sont pas seulement
dans les pays de montagnes qu'on a intérêt
à l'adoption de l'amendement. C'est en faveur
des plaines que sont prises les mesures contre
le déboisement: A la servitude qui frappe les
bois doit correspondre une certaine faveur
en matière fiscale.
M. Caillaux. — Il serait impossible do faire
comprendre au pays, pour les bois de plaine
du moins, une exemption aussi particulière.
Pour les bois en .montagnes, qui n'ont qu'un
rapport insignifiant, il ny aurait pas d'impôt
puisqu'à l'évaluation on ne constatera aucun
revenu.
M. Bonnevay demande le renvoi de son
amendement à la commission ; il est re-
poussé par 309 voix contre 261.
M. Bonnevay n'insiste pas pour qu'il soit
statué au fond sur son amendement.
Cn passe à la discussion de l'article 9,
ainsi conçu :
L'impôt est établi au nom des propriétai-
res, dans les communes où sont situées les
propriétés imposables. Il est calculé sur la va-
leur localive réelle de ces propriétés, évalué
comme il est indiqué à l'article 3 de la loi du.
31 décembre 1907^ déduction faite du cinquième
de ladite valeur localive.
M. Monssarvin propose de remplacer les
mots « un cinquième » par les mots « m
quarts
M. Monsservin. - La déduction accordée en
Allemagne est très large : en Alsace-Lorrain^
elle est de 67 En Angleterre, elle est da
tiers.
M. Caillaux. - Il ne s'agit pas de l'exploi-
tant, mais du propriétaire. La propriété fon-
cière doit être traitée équitablement ; encore
ne faut-il pas faire 00s générosités excessi-
ves qui ne profiteraient qu'à la grande pro-
priété..
M. Camille Pcllelcn. — M. Monsservin se
fait de grandes illusions sur le bonheur des
agriculteurs des autres pays. Le projet a fait
en leur faveur le maximum des sacrifices. On
ne peut aller au delà sans compromettre la
¡J'l'forme. Le résultat certain de menderroent
serait- de dégrever la grande propriété.
M. Jaurès. — Comme M. Monsservin, je re-
présente des petits cultivateurs ; ct - dans
leur intérêt que je demande à la Chambre de
ne pas rompre l'équilibre.
M. Monsservin relire son amendement
en se réservant cte présenter de nouvelles
observations sur l'article 12.
Im suite de la discussion est renvoyée à
une prochaine séance.
M. René Besnard, au nom de la commis*
sion de la réforme judiciaier, dépose un
rapport sur le projet de loi tendant àal-
louer une indemnité aux membres du jury
qTn nV sont pas encore appelés.
Séance demain, deux heures.
ÀU SÉNAT
LES FAILLIS
M. Anionin Dubost préside.
M. Rouby. qui avait déposé une interpel-
lation sur le licenciement des ouvriers de
la guerre, se contentera de poser une ques-
tion au général Picquart au début d'une
prochaine séance.
Le Sénat aborde la discussion de la pro-
position de loi de M. Théodore Girard, ten-
dant à modifier la loi de 1903 relative à la
réhabililalion des faillis.
M. Vagnat, rapporteur. — La proposition
actuelle a pour but d'organiser les conditions
dans lesquelles les faillis pourront obtenir leur
réhabilitation, Bllr-e inscrite sur les listes élec-
torales et être éligibles.
La commission espère que le Sénat voudra
bien l'adopter. (Très bien I).
M. Fortier développe un amendement
par lequel les faillis et liquidés judiciaires
ne sont éligibles qu'après réhabilitation, ou
après dix ans à partir de la déclaration de
faillite ou de liquidation judiciaire. Il pro-
teste contre la réhabilitation de droit ac-
cordée à ceux qui, n'ont rien payé à Icum
créanciers. Ce serait un coup futai donné
au commerce.
M. Legrand. — Il semble que ce soit b mot
de réhabilitation qUI.1Jt ému M. Fortier. Mais
l'escroc qui a encouru six mdrs de prison est.
réhabilité après dix ans. Le mot réhabilita-
tion est un terme juridique ; cela no veut pas
dire qu on ait toujours ézé un honnête homme ;
cela veut dire qu'on a droit à des (;ncoljroge-
menls pour l'avenir.
M. Briand. S^rde des sceaux. - Je demande
au Sénat de voter Je texte de la ('.)mm!s-s.iol).
qui met fin a une situation pénible pour beau-
coup de gens, plus malheureux que coupables.
Leurs obligations vis-à-vis de leurs créanciers
ne disparaisent. pas, on ne supprime pas la,
pénalité. Si c'est un employé indélicat qui a-
ruiné son patron, le premier sera coodamn
il la. prison ; le scGÃld pourra être mis ea
faillite.
Faut-l i admettre que le premier recouvre sca
droits après un certain temps et que l'autre
ne le puisse pas 7 La mesure proposée par la
commission est une mesure d'équité et d'buma-
nité. (Très bion 0
M. Bérenger. — Je reconnais qu'il y a des
situations intéressantes parmi ks faillis, et je
n hésite pas à accepter les principales dispo-
suions proposées par la commission
Mais j estime que la léhabittalion de droit au
bout, de dix ans ne peut pas être accordée
à celui qui n'a fait aucun effort. Il faut QU8
le tribunal reste juge de la recevabilité de la
demande.
Je dépose un amendement eh ce sens. (Ap.
plaudissements.)
M. Goiiriu. - La situation des faillis- sim-
ples est telle que si l'on adoptait le système
de M. Bérenger, on les traiterait avec plus de
rigueur que les voleurs ou les escrocs qui
sont relevés de droit de leurs incapacités apPèf
un certain temps. Il est impossible d'ouvrir un
débat public sur la probité de ces faillis : le.
remède serait pire que le mal.
Il ne faut pas oublier qu'il s'al ici1, non des
banqueroutiers frauduleux .ou simplEs, mai*
des faillis.
M. Delahaye appuie l'amendement de At
Bérenger.
M. Forlier se rallie à l'amendement D&
renger.
La discussion générale est close.
Le président met en discussion l'article
premier. Les six premiers paragraphes
sont adoptés. Le septième paragraphe lm;
plique la réhabilitation de droit pour le
failli non banqueroutier et le liquidé JUdh
cin)rp
C'est ici que se place l'amendement de
M. Bérenger ainsi conçu :
Peut obtenir sa réhabilita Lion, en cas de
probité reconnue après dix ans, le failli non
banqueroutier et le liquidé judiciau'c.
M. Théodore Girard soutient le texte de
la commission. M. Bérenger défend son:
amendement.
L'amendement Bérenger est repoussé:
par 184 voix contre 98. Le texte de la com-
mission est adopté.
Les autres paragraphes sont adoptés.
L'article premier est adopté dans son en-
semble, ainsi que l'article 2 et une dis-
position additionnelle proposée par M. Ri-
chard.
L'ensemble de la proposition de loi esti
adopté.
M. Delahaye prononce un discours con-
tre le projet subventionnant de 18.000 fr.;
l'muvre de la Mission laïque.
Séance cet après-midi à trois heures.
• ■ -
mmmis DES CHAMBRES
L'augmentation du nombre des magistrats
Comme nous le disons dans notre oomp-
C13VO CEUÏTIMIÏ» LE NCMEHO
Samedi 14 Mars 1908.-^Na 13388
LE XIX* SIECLE
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ADMINISTRATION : 141 RUE DU MAIL. — TÉLEPHOiNE 102 83
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
1. TRIBUNE LIBRE
NOS MOBILES
Retenu momentanément
loin de Paris, j'ai lu ces
jours derniers dans les jour-
naux, une information con-
tre laquelle, que je sache,
aucune protestation ne s'est
élevée. C'était au lendemain de ia pu-
blication de la note que connaissent les
lecteurs du Rappel, relative aux fa-
veurs personnelles qu'aurait sollicitées
notre ami Emile Constant.
Les ministres, comprenant eA qu'a-
vait d'odieux une telle insinuation,
d'ailieurs contraire à Ja. vérité, s'em-
- pressèrent de démentir le bruit mis en
circulation.
m* L'un d'eux, je ne sais lequel, expli-
qua que le nom de M. Emile Constant
«« n'avait été prononcé au conseil que
pour rechercher ce qui avait pu susci-
ter son hostilité. On avait été ainsi ame-
né, dit-il, à se demander si quoique
chose, dans un ministère, lui avait été
refusé.
Ne trouvez-vous pas que cela indique
Œe la part. du gouvernement, une con-
ception tout à fait particulière du régi-
me parlementaire ? Un député interpelle.
Inutile de chercher dans des considéra-
tions de politique générale les motifs
de son attitude. C'est simplement qu'il
n'a pas obtenu, pour son protégé, le bu-
reau de tabac ou le bout de ruban violet
qu'il sollicitait.
Si cela n'est pas conforme à la réa-
lité, c'est du moins ce qu'on pense au
sein du conseil des ministres. Et cela
ouvre des horizons tout à fait nou-
veaux, il le faut avouer, sur les procé-
dés de gouvernement auxquels peuvent
avoir recours des hommes qui ont une
telle opinion des mœurs et du régime
parlementaire. -
lis ne peuvent admettre que, dans
* le parti républicain, on ne soit pas en
admiration devant toutes leurs concep-
tions de la politique intérieure ou ex-
térieure. Quiconque ne trouve pas que
tout est pour le mieux dans la meilleure
des Républiques, et se permeb de le
dire, est considéré comme le pire en-
nemi des institutions et du pays.
C'est être mauvais républicain que de
réclamer pour les élus du peuple un peu
d'indépendance, et de demander, puis-
qu'ils doivent juger les actes du pouvoir
exécutif, qu'ils aient la liberté de le
blâmer comme de l'approuver.
C'est être mauvais Français que de
, ne pas vouloir engager le pays dans
des aventures lointaines dont nul ne
peut prévoir les conséquences, et qui,
en mettant les choses au mieux, doivent
être pour nous sans profit.
C'est être mauvais citoyen que de
prétendre, quand son parti est au pou-
voir, l'obliger à appliquer les principes
et les idées qu'il défendait dans l'oppo-
sition.
Le cabinet ne peut admettre qu'il y
ait des hommes fidèles à leurs opinions
-et qu!'Ïtls agissent en conséquence, n
veut que leur attitude soit uniquement
inspirée par des calculs intéressés.
« Je ne veux pas que vous m'accor-
diez une demi-confiance., disait M. Cle-
menceau au début de son ministère. Je
la veux tout entière, sans réticence et
sans arrière-pensée. »
C'est, en réalité, un blanc-seing qu'il
sollicitait. Rien de surprenant à ce qu'il
s'étonne que certains, voyant l'usage
qu'il en a fait, se refusent à le lui lais-
ser plus longtemps.
.-". Comment M. Clemenceauavant d'être
ministre, aurait-il accueilli un cabinet
qui lui. aurait demandé une confiance
aveugle ? S'est-il privé, jadis, de faire
de l'opposition à des ministères qui, ce-
pendant, avaient des républicains à leur
tête r
Si je rappelle ces faits, ce n'est pas
pour l'en blâmer, ayant, à l'époque,
approuvé sa politique, mais simplement
pour réclamer au profit de républicains
qui y sont restés fidèles, la liberté d'ap-
préciation dont il a jadis fait lui-même
usage.
Les luttes parlementaires ne sont
pas, comme on voudrait le faire croire,
uniquement inspirées par des préoccu-
pations d'ambition ou d'intérêt person-
nes. Elles sont plus nobles, plus éle-
vées, partant plus belles. Le seul inté-
rêt que doivent avoir devant les yeux
Jes hommes qui y prennent part, c'est
celui du pays, c'est l'intérêt de la Ré-
publique.
Qu'importe que ce soit tel ou tel qui
détienne momentanément le pouvoir ?
La seule chose que l'on doive considé-
rer, c'est la façon dont il en use pour le
bien général.
C'est donner 'dès armes aux adver-
saires de la démocratie, que d'affirmer
que les interventions qui se produisent
ont des mobiles intéressés. Cela, d'a-
bord, n'est pas exact. On ne peut, en
laissant se répandre de telles affirma-
tions, que discréditer le régime parle-
mentaire et du même coup, porter at-
teinte aux; libertés publiques dont il est
la sauvegarde et la garantie.
Que dirait M. Clemenceau si nous af-
firmions que l'opposition systématigue
que, pendant vingt ans, il a faite à tous
les gouvernements, n'était inspirée que
par son ardent désir d'obtenir le pou-
voir, son dépit de n'y pas réussir ? Si
nous émettions l'opinion qu'il n'a jadis
combattu avec tant d'âpreté la politique
coloniale, que parce qu'elle était prati-
quée par d'autres que par lui ?
Il ne manquerait pas de répondre que
ce sont là d'odieuses calomnies. C'est
parce que nous pensons qu'il aurait rai-
son de parler ainsi, que nous nous re-
fusons à porter, même dans la forme
dubitative, de telles accusations contre
lui.
Nous croyons que dans l'opposition
qu'il a faite à des ministères républi-
cains, il a été toujours sincère et désin-
téressé. Mais nous demandons que l'on
nous suppose, à nos amis et à nous, la
même sincérité et le même désintéres-
sement, lorsque nous critiquons le gou-
vernement actuel.
Soit au point de Vue intérieur, soit
au point de vue extérieur, il ne nous
semble pas avoir nettement conscience
des véritables intérêts de la France, des
véritables intérêts de la démocratie.
Qu'il s'efforce de les mieux compren-
dre, de les mieux servir, et nous serons
les premiers à l'en féliciter. Mais s'il
persiste dans une politique qui nous ap-
paraît comme grosse d'inconnu et de
périls, qu'il ne cherche point les motifs
de notre attitude dans des questions
d'intérêt personnel ou /électoral.
Elle nous sera uniquement inspirée
par le souci que nous avons de notre
responsabilité et de nos devoirs envers
la démocratie.
Alfred MASSÉ,
Député de la Nièvre.
LA POLITIQUE
LE DISCOURS DE M. COMBES
La presse réactionnaire et
progressiste fait au discours
prononcé hier par M. Combes
l'accueil qu'on était en droit
d'attendre d'elle.
Sa protestation véhémente
est la preuve manifeste que l'ancien pré-
sident du Conseil a tenu le langage at-
tendu par la véritable majwité républi-
caine des Chambres et du pays.
M. Combes, soutenu par les applau-
dissements significatifs de l'assistance,
a précisé avec sa netteté et sa franchise
habituelles le désir « d'union étroite et
de rappochement cordial qui se fait
jour visiblement et va en s'accentuant de
plus en plus dans les groupes de gau-
che du Sénat et de la CHambre. »
Puis, envisageant la contradiction qui
existe entre l'élargissement apparent de
la majorité républicaine dans la Cham-
bre, et le ralentissement de l'action répu-
blicaine dans le pays, M. Combes a con-
clu en termes excellents :
« Aussi l'élargissement de la majorité
républicaine tel qu'il est entendu par ceux
qui n'ont pas cessé de la combattre dans
le pays, ne dit rien qui vaille au parti ré-
publicain. Il est de notre devoir de le si-
gnaler comme le mal de l'heure présente et
comme un danger, le plus à craindre, de
l'heure à venir. Pour moi, j'ai déjà dit, en
conseiller désintéressé de mon parti, par-
lant et agissant en toute occasion sous
l'empire dominant de la reconnaissance
sans bornes que je lui dois pour l'appui
continu qu'il m'a donné dans l'accomplis-
sement des réformes les plus considé-
rables, oui. messieurs, j'ai déjà dit à nos
amis du Sénat, mais je tiens à redire de-
vant nos amis de la Chambre que la rai-
son des choses, non moins que l'intérêt su-
périeur de la République exige la formation
de deux partis bien tranchés au sein de
la représentation nationale, à l'imitation de
ce qui existe dans le corps électoral : le
parti des républicains avancés, des répu-
blicains de gauche, et le parti des républi-
cains progressistes ou libéraux, qui ont
derrière eux les autres conservateurs de di-
verses nuances, partout où ces derniers ne
sont nas les plus forls.
Il n'y a là rien qui soit offensant pour
qui que ce soit, rien qui ne soit confor-
me à la logique et à la vérité des faits. En
soutenant cette doctrine, j'ai conscience
de répondre aux désirs du pavs républicain
et, je le crois aussi, aux sentiments de la
véritable majorité républicaine de la Cham-
bre ».
Ce sont ces sages paroles que le jour-
nal des Débats qualifie — avec cette
modération 3e Tangage académique, qui
lui est propre — de « jactance vulgaire
et violente
M. Combes, assurément, n'a pas ex-
primé les sentiments des progressistes et
des conservateurs ; il lui suffira sans
doute d'avoir été l'énergique interprète
de la « véritable majorité républicaine
des Chambres
Et si le Bloc de droite laisse éclater
son dépit avec cette violence et cette
maladresse, c'est qu'il a constaté, suivant
les propres termes du Petit Tempsy « l'o-
vation enthousiaste » gui a salué l'émi-
ment et intègre défenseur de la politique
du Bloc de gauche.
; —
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
13 mars 1881. — Assassinat, à Saint-Pé-
tersbourg, du tsar Alexandre Il.
Aujourd'hui vendredi :
Lever du soleil à 6 h. 20, coucher à 6 h.
Séance à la Chambre et au Sénat.
Courses à Saint-Cloud, réouverture des
courses plates.
La Malle des Indes.
Sait-o-n exactement ce que c'est que la
Malle des Indues 2
C'est un courrier anglais, utilisé aussi
par -la poste française, qui lui fournit
environ deux cents sacs de lettres sur
mille ou douze cents.
Créée en 1839, la Malle des Indes part
de Londres par bateau le vendredi dans
la soirée, et quitte Calais dans la nuit,
en un train de dix à quatorze- wagons-
poste qui contourne Paris par la Gran-
de-Ceinture, est rejointe à Villeneuve-
Saint-Georges par l'ambulant Paris-Mo-
dane, et est remise au service italien
au Mont-Cenis, le samedi soir, à huit
heures et demie.
De là, la Malle des Indes rejoint Brin-
disi par Turin et Bologne. A Brindisi,
un paquebot anglais emporte le cour-
rier pour Colombo et Bombay, où le
chemin de fer le reprend vers Madras et
Calcutta.
La Malle est souvent si considérable,
qu'on est obligé de joindre une partie
des wagons-poste au train péninsulaire
de voyageurs.
Une semaine sur deux, la « Grande
Malle » porte te courrier d'Australie et
d'Extrême-Orient ; l'autre semaine, la
« Petite Malle » va prendre à Naples~un
courrier français.
Il n'y a pas bien longtemps, le transit
postal de la Malle des Indes était pour
ainsi dire un monopole ; mais, depuis
quelques années, elle commence à trou-
ver dans le Transsibérien un concur-
rent sérieux, qu'a paralysé un moment
seulement la guerre russo-japonaise.
AUTREFOIS
Rappel du 14 mars 1872. — Victor Hugo
fait paraître la première édition de Actes
et Paroles (1870, 1871, 1872).
Onze millions d'indemnité sont répartis
entre les propriétaires parisiens pour dom-
mages causés pendant la guerre.
On a entamé des négociations avec l'Al-
lemagne pour faire évacuer le territoire
avant l'époque fixée par le traité de Franc-
fort. pn ananrant 1P. nn.ip.mpnl rfee mil-
liards.
Un concours avait été ouvert pour un
nouveau rideau de l'Opéra (celui de la rue
Lepeleticr) ; les 27 projets présentés sont
repoussés. On repeindra à neuf l'ancien ri-
deau.
Trois trains se rencontrent dans les té-
nèbres, sous le tunnel de Cardiff (Angle-
terre), deux trains de charbon el un train
de voyapeurs. Deux des trains sont brisés
el jetés hors de la voie. Seul, un employé
est blessé gravement.
Annonce américaine.
Une petite annonce cueillie dans le
Courrier des Etals-Unis, et garantie au-
thentique :
« Une demoiselle de bonne éducation,
de parfaite moralité, et possédant d'ex-
cellentes manières, désire se placer
comme bar-maid, dans un buffet de
chemin de fer.
« N. B. — Cette personne peut, avec
une livre de pain -et un quart de beurre,
confectionner cent vingt-cinq tartines
d'apparence satisfaisante 1 »
Chère amie
Une des sociétaires les plus admirées
de la Comédie Française a passé la
quarantaine. Elle a encore, avec raison,
des prétentions à la beauté plastique.
Au cours d'une conversation récente au
foyer, elle dit devant une camarade :
- « J'ai encore de bel es lignes ? »
- « Oui, sur le front, répondit la
c; bonne petite amie ».
La a Marche funèbre » de Chopin.
Les historiographes de Chopin, ce
« Polonais aux oreilles françaises »,
n'ont jamais pu se mettre d'accord sur
la circonstance dramatique qui donna
naissance à cette fameuse. Marche funè-
bre qu'il est impossible d'entendre sans
en être attendri aux larmes.
Or, si nous en croyons M. de Lorgne,
de l'Intermédiaire, celte circonstance
aurait été aussi naïve qu'imprévue.
On sait que l'auteur des Nocturnes,'
avant d'être atteint de la maladie ner-
veuse qui l'emporta, était un gai com-
pagnon, boute-en-train de toutes les pe-
tites réunions artistiques. Habile aux
grimaces, grâce à son masque très mo-
bile, il n'avait pas son pareil pour imi-
ter les flegmatiques Anglais.
Mais écoutons M. de Lorgne :
« Chopin assistait à une fête donnée
dans l'atelier d'un peintre de ses amis,
avec, pour distraction, le. spectacle de
fantoches de bois, pupazzi de l'époque.
La pièce se terminait par les funérailles
de l'un de ces petits personnages en
miniature.
« Sur la prière de son ami, et un peu
par plaisanterie Chopin se mit au pia-
no pour accompagner de musique l'en-
terrement de la marionnette. Emporté
par son imagination maladive, oubliant
qu'il ne s'agit que d'une poupée, il im-
provisa cette page admirable. »
Comme quoi les toutes petites causes
ont souvent les plus grands effets.
LE LIVRE DU JOUR
Rois et Reines que j'ai connus, ".-
par Mme HÉLÈKE VACARESCO
Il n'y a rien de lel~que d'être en Répu-
blique pour s'intéresser aux faits et gestes
des têtes couronnées. Ce sont ae ces cho-
ses qu'on aime à voir. de loin et qui vous
passionnent d'autant plus qu'elles conser-
vent un petit parfum de mystère. Des dé-
mocrates comme nous sont rarement ad-
mis sur les marches des trônes. La vie
intime d'un souverain nous apparait donc
comme une sorte d'énigme, qui nous donne
toujours envie de soulever le voile pour.
apercevoir un coin de la réalité.
Mme Hélène Vacaresco, qui a été reçue
en familière dans la plupart des cours
d'Europe, nous donne à la librairie San-
sot de quoi défrayer amplement notre cu-
riosité. Voici la délicate et attirante phy-
sionomie d'Elisabeth de Roumanie. Carmen
Sylva, la reine-poète, « qui prend un réel
plaisir à humilier ses ennemis par la gé-
nérosité de son pardon. » Voici le Kaiser,
:.e fJNJtée. « pontife sans consécration,
guerrier sans batailles ni ennemis, drama-
turge sans drame, qui, dans toutes ses in-
carnations, est resté le même personnage
impérieux et subtil. » L'empereur d'Autri-
che nous émeut comme un personnage de
Shakespeare « au milieu d'un cortège fu-
nèbre, cortège d'ombres, chacune portant
une urne noire remplie de cendres et de
larmes. » La reine Victoria, la reine
Alexandra. Edouard Vil, les souverains de
Serbie, Marguerite de Savoie, Victor Em-
manuel 111 et la reine Hélène, la reine Ma-
rie Christine et notre sympathique Alphon-
se XH1 complètent un « excellent ensem-
ble - *» dans cette pièce étranae où l'on ne
rencontre que des premiers rôles.
- Une des particularités de ce livre est en-
core qu'il a été écrit en anglais par un au-
teur déjà connu et fort apprécié dans les
lettres françaises. Vu le vif succès de l'ou-
vrage à Londres et en Amérique, Mlle Va-
caresco en a autorisé la traduction. Nulle
part il ne s'imposait davantage qu'en celte
bonne ville de Paris, qu'on a surnommée
le « Passage des Princes.)) MAURICE CABS.
L'anniversaire de Victor Massé.
A propos de l'anniversaire du com-
positeur des Noces de Jeannette et de
Galathé.e, nous avions raison de dire
l'autre jour que le projet de monument
à Victor Massé conçu par Franceschi
fut abandonné.
Mais noii £ avons -eu tort de ne pas
ajouter que Victor Massé a tout de
même son monument, lequel est d'An-
tonin Mercié et orne le Cours de la
Bove, à Lorient. Un de nos lecteurs de
Lorient nous rappelle à l'ordre à ce su-
jet, et nous lui donnons acte de sa très
juste observation.
La Place de la Concorde
Le Matin poursuit sa vigoureuse cam-
pagne contre les barrages, les palissades
et autres horreurs qui entravent la circu-
lation dans Paris aux endroits les plus fré-
quentés.
Il demande la suppression rapide des
palissades de la place de la Concorde.
Ces palissades enlaidissent, paralt-il, la
plus belle place du monde.
Nous sommes de cet avis.
Ce point admis, nous posons la question
vivante à tous les admirateurs de Pa-
ris :
6i de simples palissades provisoires en-
lèvent tout son cachet à la place de la Con-
corde, quel effet désastreux doit produire
la hideuse barraque que l'Automobile-Club a
fait-installer sur les toits de l'hôtel Cril-
lon en face le ministère de la marine ?
Que dites-vous de cet attentat contre 'a
h"I" f/. de l'incomparable place de la Con-
corde T
«. ,auid mettra-ton le tout puissant Auto-
mobile-Club
que de malheureuses palissades qu'on peut
faire disparaître instantanément ?
Jean Clerval
1
En passant.
Les gazettes officieuses ont laissé sous-
entendre récemment que M. le président
du conseil avait songé à fmre un nouveau
chassé-croisé de ministres.
C'est une habitude à prendre, comme une
autre.
Déjà la mort de cet excellent M. Guyot-
Dessaigne avait permis à nos secrétaires
d'Etat de danser un lancier, et de faire en-
trer dans le quadrille l'aimable M. Cruppi.
M. Briand avait ainsi troqué les cultes
pour les sceaux, et M. Doumergue le
commerce pour rinstruction publique.
On aurait pu continuer la série et en-
voyer M. Picquart à l'agriculture réaliser
ta création du soldat-laboureur ; M. Mil-
tiès-Lacroix aux postes et télégraphes ré-
tablir les communications téléphoniques
avec le Matin ; et M. Barthou aux affaires
étrangères, pour appliquer le bouclier du
Métro à la pénétration pacifique du Ma-
roc, etc, Seul le sous-secrétaire d'Etat à
l'intérieur, grenadier immuable, serait res-
té Mauian comme devant.
Ce système pourrait d'ailleurs comporter
d'heureuses variantes.
Ainsi lorsqu'un cabinet aurait cessé
d'avoir la confiance des Chambres — un
malheur est si vite arrivé — les minis-
tres en seraient quittes pour changer de
portefeuille entre eux.
Ou bien encore, on pourrait organiser
un trottoir roulant entre tous les ministè-
res, de telle sorte que chaque ministre
prendrait successivement la signature dans
les divers « Départements ». Le lundi, par
exemple, on commencerait par la guerre,
le samedi on se trouverait aux beaùx-arts,
et le dimanche, on irait tous chez Maufan
se Jaire doucher à Charenton --
Le Chemineau.
LA JOURNEE PARLEMENTAIRE
LE VOTE PEBSlE DES DÉPUTÉS
Comment la majorité devient la minorité. — Les absents ont
toujours tort. — La réforme fiscale. — La réha-
bilitation des faillis au Sénat.
La séance est ouverte à deux heures
quinze, sous la présidence de M. Henri
Brisson.
M. Briand, garde des sceaux, dépose un
projet de loi sur la magistrature, et M.
Caillaux, ministre des finances, le projet,
annoncé depuis longtemps, tendant à ré-
primer la fraude en matière de succession
par l'envoi de valeurs à l'étranger.
L'INTERPELLATION EMILE CONSTANT
M. Emile Constant demande à interpel-
ler sur les conditions dans lesquelles a été
adjugée la. marque de la Chartreuse.
M. Briand déclare ne pas posséder les
documents utiles pour répondre à l'inter-
pellation. La dtate de la discussion sera
donc ultérieurement fixée.
LA MOTION BONNEVAY
M. Bonnevay soulève un vif incident à
propos du vote de lundi sur le paragra-
phe 3 du projet Caillaux (Impôt sur les bé-
nelices agricoles). On sait que les rectifica-
tions à. fOfficiel avaient changé en mino-
rité la majorité qui avait adopté le para-
graphe.
M. Bonnevay propose de supprimer le
vote par procuration. On remettrait à cha-
que député sa boite de bulletins au moment
où il entrerait en séance.
M. Colliard. — Il y a beaucoup de dépulés
avocats qui s'absentent à chaque instant pour
aller plaider en province.
M. Bonnel'all. — Je ne sais si cette parole
me vise. Dans ce cas je n'aurais qu'une chose
à répondre : c'est que j'avais une assez belle
situation au barreau ; je l'ai abandonnée pour
me consacrer au Parlement.
M. Jourde. — Je ne oomprends pas qu'une
pareille discussion puisse s'instituer devant
une Chambre française. Beaucoup de nos col-
lègues travaillent d'une façon plus utile dnns.
les oommisions que dans la salle des séan-
ces'. (Approbations). J'ai confiance que la Cham-
bre ne votera pas le projet de résolution de
M. Bonnevay. '«
Af. Bonnevay. — Je ne demande que l'ur-
gence.
M. lourde. — N'est-ce donc pas un vote ?
M. Aynard. -- Sans viser plus particuliè-
rement le projet d'impôt sur le rcvenu, dont
les députés de toutes les nuances ont adopté
le principe ; (hruil) j'estime que l'incident sou-
levé par notre collègue Bonnevay mérite une
sanction.
Je ne suis pas l'adversaire du vote par pro-
curation ; je le considère comme une néces-
sité.
Voix à gauche. — Ah 1 Ah 1
M. Aynard. — Mais j'ai l'intention de dé-
poser à brève échéance une proposition pour
que la volonté de la Chambre ne puisse pas
disparaître devant une erreur malérielle.
Voix à gauche. — II n'y a pas d'erreur ma-
térielle.
Au grand étonnement de la. plupart des
députés. le garde des sceaux prend la pa-
role dans ce débat qui ne concerne cepen-
dant que le règlement intérieur de l'assem-
blée.
M. Briand, garde des sceaux. — Il n'est pas
d'usage que Je gouvernement, intervienne dans
les discussions qui touchent lç règlement de la
Chambre. Mais ici, une question politique do-
mine k débat. C'est pourquoi le gouvernement
déclare qu'il lui est impossible de s'associer
à la demande d'urgence. (Mouvement).
M. Charles Denoist. — Et la séparation des
pouvoirs ? Qu'en faites-vous ?
L'urgence est Tepoussée par 371 voix con-
tre 210.
L'IMPOT SUR LE REVENU
On reprend la discussion de l'impôt sur
le revenu après avoir validé l'élection de
M. Bougues, élu à Saint-Gaudens.
A propos de l'impôt sur la propriété fon-
cière non bâtie, M. Quilbeuf voudrait sa-
voir comment les agents du fisc calculeront
la valeur locativ3 d'un domaine quand
l'impôt sera mis, par le bail, à la charge
du fermier.
M. Caillaux. - Ils considéreront que la va-
leur locative est augmentée du prix de l'im-
pôt payé par le fermier, mais votre question est
relative à la cédule des bénéfices agricoles.
L'article 8 est adopté.
M. Bonnevay présente un article 8 bis
ainsi conçu :
Sont affranchis de l'impôt sur le revenu pen-
dant les trente premières années de la planta-
tion ou du semis :
1" Pour la totalité de l'impôt, les semis
et plantations effeclués sur le sommet eL le
pendant des montagnes, sur les dunes ou dans
les landes ; V
2* Pour les trois quarts de l'impôt, les se-
mis et plantations en terrains ordinaires.
M. Caillaux. — Cela nous conduirait à des
privjlèges: Nous! serions forcés de dégrever
les grands propriétaires qui, pour leur plaisir,
transforment soit en Sologpe, soit en Seine-
eiliOise, des terres iL labours "en terrains de
chasses.
M. Camille Pelletan conteste que la ques-
tion ait un intérêt pratique. Ii En revan-
che, dit-if, l'amendement de M. Bonnevay
ouvrirait la porte à toutes sortes de privi-
lèges. »
M. Perroche. — Ce ne sont pas seulement
dans les pays de montagnes qu'on a intérêt
à l'adoption de l'amendement. C'est en faveur
des plaines que sont prises les mesures contre
le déboisement: A la servitude qui frappe les
bois doit correspondre une certaine faveur
en matière fiscale.
M. Caillaux. — Il serait impossible do faire
comprendre au pays, pour les bois de plaine
du moins, une exemption aussi particulière.
Pour les bois en .montagnes, qui n'ont qu'un
rapport insignifiant, il ny aurait pas d'impôt
puisqu'à l'évaluation on ne constatera aucun
revenu.
M. Bonnevay demande le renvoi de son
amendement à la commission ; il est re-
poussé par 309 voix contre 261.
M. Bonnevay n'insiste pas pour qu'il soit
statué au fond sur son amendement.
Cn passe à la discussion de l'article 9,
ainsi conçu :
L'impôt est établi au nom des propriétai-
res, dans les communes où sont situées les
propriétés imposables. Il est calculé sur la va-
leur localive réelle de ces propriétés, évalué
comme il est indiqué à l'article 3 de la loi du.
31 décembre 1907^ déduction faite du cinquième
de ladite valeur localive.
M. Monssarvin propose de remplacer les
mots « un cinquième » par les mots « m
quarts
M. Monsservin. - La déduction accordée en
Allemagne est très large : en Alsace-Lorrain^
elle est de 67 En Angleterre, elle est da
tiers.
M. Caillaux. - Il ne s'agit pas de l'exploi-
tant, mais du propriétaire. La propriété fon-
cière doit être traitée équitablement ; encore
ne faut-il pas faire 00s générosités excessi-
ves qui ne profiteraient qu'à la grande pro-
priété..
M. Camille Pcllelcn. — M. Monsservin se
fait de grandes illusions sur le bonheur des
agriculteurs des autres pays. Le projet a fait
en leur faveur le maximum des sacrifices. On
ne peut aller au delà sans compromettre la
¡J'l'forme. Le résultat certain de menderroent
serait- de dégrever la grande propriété.
M. Jaurès. — Comme M. Monsservin, je re-
présente des petits cultivateurs ; ct - dans
leur intérêt que je demande à la Chambre de
ne pas rompre l'équilibre.
M. Monsservin relire son amendement
en se réservant cte présenter de nouvelles
observations sur l'article 12.
Im suite de la discussion est renvoyée à
une prochaine séance.
M. René Besnard, au nom de la commis*
sion de la réforme judiciaier, dépose un
rapport sur le projet de loi tendant àal-
louer une indemnité aux membres du jury
qTn nV sont pas encore appelés.
Séance demain, deux heures.
ÀU SÉNAT
LES FAILLIS
M. Anionin Dubost préside.
M. Rouby. qui avait déposé une interpel-
lation sur le licenciement des ouvriers de
la guerre, se contentera de poser une ques-
tion au général Picquart au début d'une
prochaine séance.
Le Sénat aborde la discussion de la pro-
position de loi de M. Théodore Girard, ten-
dant à modifier la loi de 1903 relative à la
réhabililalion des faillis.
M. Vagnat, rapporteur. — La proposition
actuelle a pour but d'organiser les conditions
dans lesquelles les faillis pourront obtenir leur
réhabilitation, Bllr-e inscrite sur les listes élec-
torales et être éligibles.
La commission espère que le Sénat voudra
bien l'adopter. (Très bien I).
M. Fortier développe un amendement
par lequel les faillis et liquidés judiciaires
ne sont éligibles qu'après réhabilitation, ou
après dix ans à partir de la déclaration de
faillite ou de liquidation judiciaire. Il pro-
teste contre la réhabilitation de droit ac-
cordée à ceux qui, n'ont rien payé à Icum
créanciers. Ce serait un coup futai donné
au commerce.
M. Legrand. — Il semble que ce soit b mot
de réhabilitation qUI.1Jt ému M. Fortier. Mais
l'escroc qui a encouru six mdrs de prison est.
réhabilité après dix ans. Le mot réhabilita-
tion est un terme juridique ; cela no veut pas
dire qu on ait toujours ézé un honnête homme ;
cela veut dire qu'on a droit à des (;ncoljroge-
menls pour l'avenir.
M. Briand. S^rde des sceaux. - Je demande
au Sénat de voter Je texte de la ('.)mm!s-s.iol).
qui met fin a une situation pénible pour beau-
coup de gens, plus malheureux que coupables.
Leurs obligations vis-à-vis de leurs créanciers
ne disparaisent. pas, on ne supprime pas la,
pénalité. Si c'est un employé indélicat qui a-
ruiné son patron, le premier sera coodamn
il la. prison ; le scGÃld pourra être mis ea
faillite.
Faut-l i admettre que le premier recouvre sca
droits après un certain temps et que l'autre
ne le puisse pas 7 La mesure proposée par la
commission est une mesure d'équité et d'buma-
nité. (Très bion 0
M. Bérenger. — Je reconnais qu'il y a des
situations intéressantes parmi ks faillis, et je
n hésite pas à accepter les principales dispo-
suions proposées par la commission
Mais j estime que la léhabittalion de droit au
bout, de dix ans ne peut pas être accordée
à celui qui n'a fait aucun effort. Il faut QU8
le tribunal reste juge de la recevabilité de la
demande.
Je dépose un amendement eh ce sens. (Ap.
plaudissements.)
M. Goiiriu. - La situation des faillis- sim-
ples est telle que si l'on adoptait le système
de M. Bérenger, on les traiterait avec plus de
rigueur que les voleurs ou les escrocs qui
sont relevés de droit de leurs incapacités apPèf
un certain temps. Il est impossible d'ouvrir un
débat public sur la probité de ces faillis : le.
remède serait pire que le mal.
Il ne faut pas oublier qu'il s'al ici1, non des
banqueroutiers frauduleux .ou simplEs, mai*
des faillis.
M. Delahaye appuie l'amendement de At
Bérenger.
M. Forlier se rallie à l'amendement D&
renger.
La discussion générale est close.
Le président met en discussion l'article
premier. Les six premiers paragraphes
sont adoptés. Le septième paragraphe lm;
plique la réhabilitation de droit pour le
failli non banqueroutier et le liquidé JUdh
cin)rp
C'est ici que se place l'amendement de
M. Bérenger ainsi conçu :
Peut obtenir sa réhabilita Lion, en cas de
probité reconnue après dix ans, le failli non
banqueroutier et le liquidé judiciau'c.
M. Théodore Girard soutient le texte de
la commission. M. Bérenger défend son:
amendement.
L'amendement Bérenger est repoussé:
par 184 voix contre 98. Le texte de la com-
mission est adopté.
Les autres paragraphes sont adoptés.
L'article premier est adopté dans son en-
semble, ainsi que l'article 2 et une dis-
position additionnelle proposée par M. Ri-
chard.
L'ensemble de la proposition de loi esti
adopté.
M. Delahaye prononce un discours con-
tre le projet subventionnant de 18.000 fr.;
l'muvre de la Mission laïque.
Séance cet après-midi à trois heures.
• ■ -
mmmis DES CHAMBRES
L'augmentation du nombre des magistrats
Comme nous le disons dans notre oomp-
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