Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-03-12
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 12 mars 1908 12 mars 1908
Description : 1908/03/12 (N13880). 1908/03/12 (N13880).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
N* 13ââO. - Si Ventôse An II6
- -
CINQ CENTIM88 LE NUMERO
1 Jeudi 12 Mars 1908.- N- 138M
1 LE XIX* SIECLE
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TRIBUNE LIBRE
PORTES DE SORTIE
Ayant décidé l'envoi au
Maroc du général Lyautey
et de quatre mille hommes
de renfort, M. Clemenceau
a dit à plusieurs de nos
confrères : « Nous venons de
nous ouvrir une porte de sortie. »
Ce mot symbolise la politique du gou-
vernement. Sous prétexte de sortir du
Maroc, on y fait entrer quatre mille
hommes de plus ; on pénètre toujours
plus avant et on laisse entendre qu'on
se borne à assurer la sécurité des ports
et de leur banlieue ; on affirme que
tout se réduit à une opération de police
et on engage la France dans une expé-
dition coloniale qui s'étend de plus en
plus.
Le gouvernement a hâte d'envoyer
les Chambres en congé ; il aura alors
les mains libres et, à son retour, le Par-
lement se trouvera en face des faits ac-
complis.
Notre action au Maroc n'entrera dans
sa phase véritable qu'après que les dé-
putés auront, pour plusieurs semaines,
pris la porte de sortie.
L'objectif du ministère est, avant
tout, de durer ; pour cela, de gagner
du temps. Aux difficultés qui se présen-
tent et qu'il est cent fois sûr de surmon-
ter, il fait front avec audace ; mais si
l'obstacle est sérieux, le gouvernement
se dérobe ; on l'a encore vu hier.
Personne n'a oublié avec quelle in-
transigeance le gouvernement avait,
jusqu'ici, repoussé toute motion ten-
dant à réintégrer dans leurs emplois les
modestes fonctionnaires révoqués, soit
pour délit d'opinion, soit pour actes
d'indiscipline.
Le ministère estimait que s'il devait
jamais prendre des mesures de clémen-
ce, il entendait rester maître d'appré-
cier chaque cas et de garder le choix
du jour et de l'heure.
Hier .encore, le sous-secrétaire d'Etat
des postes a confirmé ce langage. Il a
dit : « Le gouvernement demande à la
Chambre de lui faire confiance » ; mais
malgré le mot, la question de confiance
n'a pas été posée.
Jouant, à son tour, le rôle qu'il re-
prochait aux radicaux, le président du
Conseil s'est fait « muet du sérail » ; il
s'est réservé, par son silence, une porte
de sortie, au cas où la Chambre ne ré-
pondrait pas à l'appel du sous-secrétai-
re d'Etat.
La Chambre, en effet, s'est refusée à
faire au gouvernement la confiance que
M. Simyan lui avait demandée. Dans
une excellente et brève intervention, M.
Berteaux a montré que la mesure d'a-
paisement reclamée en faveur d'officiers
de la réserve et de la territoriale, devait
s'appliquer aux fonctionnaires civils.
La Chambre lui a donné raison contre
le gouvernement, par 348 voix contre
150, c'est-à-dire à près de deux cents
voix de majorité.
Mais qu'importe au cabinet, pourvu
qu'il demeure ! Il ne pose la question
de confiance que s'il est bien convaincu
d'être sur un terrain sûr.
Ainsi, pour la question du Rachat, il
a pris l'engagement formel d'obtenir un
vote favorable du Sénat ou de s'en aller.
Sur ce point il a, dès 1906, il y a deux
ans, posé la question de confiance à
terme, et ce terme, il le recule de jour
pn irmn
-"'1/> J wv.* «
Incertain du vote que pourra émettre
la Haute Assemblée, il s'est fait ouvrir
une porte de sortie : l'étude des consé-
quences financières du projet équivaut
t un ajournement sine die.
Comment, dès lors, expliquer qu'en
1906, le gouvernement ait fait voter le
projet par la Chambre, en une séance,
en lui laissant espérer qu'un vote défi-
nitif pourrait intervenir avant la fin de
l'année ?
Pour les retraites. ouvrières, c'est
1 expédient si fragile du forfait qui sert,
depuis plusieurs mois, au gouvernement
de porte de sortie.
Ainsi que, dans la séance du 5 mars,
Klotz le démontra nettement, le système
forfaitaire détruit les principes essen-
tiels de la loi sur les retraites ouvrières.
Ce n'est pas avec ce système que la
République aurait jamais pu créer
l'école.
, Mais, de ce système, le gouvernement
tire, au moins, cet avantage qu'il gagne
du temps.
Il reste, il est vrai, la réforme fiscale
dont il faut se réjouir qu'elle soit venue
2n discussion et dont nous voulons es*
pérer le vote par la Chambre. Mais
a est-u pas décevant de constater que
cette réforme, outre qu'elle risque en-
core de sombrer à maint écueil de sa
route, n est pas de celles dont on pour-
fa, aux élections générales prochaines,
apporter les bénéfices à la démocratie 1.
M. Ribot ne s'est-il pas montré, lui-
même, sans inquiétude, en soulignant
avec ironie que le projet du gouverne-
ment, subordonné, pour son applica-
tion, à une évaluation nouvelle des re-
venus de la propriété foncière, ne ver-
rait le jour, durant cette législature,
que sur le papier ?
Et c'est pourquoi, ainsi rassurés, les
progressistes, suivant le mot de Steeg,
ici même, font risette au gouvernement
et lui offrent, au cas où les radicaux-
socialistes pourraient le mettre en péril,
un refuge au centre, une porte de sortie.
Cette porte pourrait bien être aussi
celle par laquelle le gouvernement fera
sa définitive sortie.
Hier, les progressistes, les modérés
lui furent héroïquement fidèles ; ils af-
firmèrent ainsi leur volonté d'être le
pivot de sa majorité.
Mais le scrutin démontra qu'ils pou-
vaient seulement être le pivot de 'sa mi-
norité.
Paul BOURÉL y
Député de l'Ardèche.
.4>. J
LA POJJJIQUE
FAUSSE MANŒUVRE
L'Alliance Républicaine Dé-
mocratique, présidés par M.
Adolphe Caxnot, est un grou-
pement politique important
qui avait jusqu'ici heureuse-
ment contribué à resserrer les
liens entre les républicains de gauche.
Sous les ministères Waldeck-Rous-
seau et Combes, elle fit partie intégrante
du « Bloc )>, et les très fermes républi-
cains qui la composaient donnèrent à
ces deux cabinets un concours sans ré-
serve en échange d'un appui sans com-
promissions.
Depuis quelques mois, le travail de
désorganisation que l'on voit s'accom-
plir avec regret dans la majorité répu-
blicaine à la Chambre se produit égale-
ment dans les rangs de Y Alliance Ré-
publicaine Démocratique.
Une lente évolution, savamment pré-
parée par quelques-uns de ses membres,
tend à conduire tout doucement cette
Association vers les progressistes, et par
conséquent à l'éloigner chaque jour da-
vantage des socialistes indépendants,
des radicaux socialistes, et des radicaux.
i ses alliés fidèles d'hier.. *
La "large hospitalité consentie par le
Bulletin de l'Alliance, à l'éternel dissi-
dent qu'est M. de Lanessan, qui ne par-
donne pas a son ancien parti les défai-
tes successives que lui a justement infli-
gées le suffrage universel, a marqué la
première étape de cette fâcheuse ma-
nœuvre.
Ce dissolvant, joint à quelques autres,
tend actuellement à rompre le bloc que
formait dans le Bloc de gauche l'Allian-
ce Républicaine Démocratique.
Certains de ses membres s'en inquiè-
tent; des démissions ont été données;
une scission est sur le point de se pro-
duire, si l'on n'y met bon ordre.
M. Carnot, dont la personnalité est
unanimement et justement honorée de
tous les républicains, doit à son nom et
à son passé que Y Alliance Républicaine
Démocratique demeure fidèlement atta-
chée à sa politique d'union à gauche qui
était sa raison d'être, et repousse éner-
giquement les avances des dissidents
honteux et des progressisfes impénitents
dont elle a contribué à combattre le pro-
gramme et a assurer la déroute.
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
11 mars 1674. — Les Français s'empa-
rent de Vesoul.
Aujourd'hui mercredi :
Lever du soleil à 6 h.. 25, coucher à 5 h.
57.
Banquet offert à M. Henri Brisson
Courses à Com-piègnei
Combinazione
Un certain nombre de journaux ont
fait allusion récemment à un projet de
remaniement du cabinet.Ils insinuaient
à mots couverts que le président du
conseil avait obtenu de l'un de ses amis
le sacrifice de son portefeuille, et qu'il
avait songé à faire des offres à l'un des
membres les plus connus et les plus
éminents de la majorité radicale.
On prétend aujourd'hui que le minis-
tre prêt à se sacrifier sur l'autel de
l'amitié était le général Picquart (qui se
serait d'ailleurs pourvu lui-même du
commandement d'un corps d'armée.)
Quant à l'homme politique dont on
désirait se. concilier les bonnes grûcest
citait, parait-il, l'honorable et sympa-
thique M. Berteaux. Tous ces beaux
projets viennent. naturellement de s'é-
crouler, et si M. Berteaux n'est pas en-
tré dans les vues du ministère, il est
du moins entré dans ses ouïes.
Nos joyeux médecine
L'autre soir, le professeur Z., l'un
de nos plus éminents chirurgiens, ra-
contait que .dans sa jeunesse, il avait
longtemps hésité entre la peinture et la
médecine.
Interrogé sur les causes de sa déter-
mination, il répondit : « Dans la pein-
ture, toutes les fautes sont exposées à
la vue ; tandis que dans la médecine,
voyez-vous, elles sont enterrées avec le
malade. M
AUTREFOIS
Ra" el du 12 mars 1872. — L'enquête
sur la reddition de Metz va être close ;
la décision du conseil d'enquête sera por-
tée à la connaissance du ministre de la
justice.
Ouverture de la communication télégra-
phique entre la Guadeloupe et l'Europe par
New-York
Mort d'Auguste Luchet, auteur drama-
tique et romancier. Il avait été en. 1848
gouverneur du palais de Fontainebleau. Sa
pièce la plus connue est la Marchande dU
Temple.
Mort à Saint-Pétersbourg, du prince
Paul Gagarine, président du conseil des
ministres de Russie.
L'armée d'occupation allemande, dans
l'est de la France, compte encore 50.000
hommes et 18.000 chevaux.
Le Conseil municipal s'occupera demain
de la reconstruction des théâtres du boule-
vard du Temple.
L'art de la réclame
On nous signale l'initiative d'un con-
fiseur marseillais qui enveloppe ses
bonbons dans des petits articles récla-
mes minuscules et peu ordinaires. En
voici un échantillon :
« Cheminée mélodium. Les tablettes
de ces cheminées sont disposées en cla-
vier de 6 octaves et demie ; les pédales
font l'office de chenets.
« Chaque chambre se trouvera ainsi
naturellement munie d'un piano fai-
sant partie de l'immeuble, ce qui évi-
tera aux consommateurs la coûteuse
nécessité d'en acheter.., )i
Oh ! Marseille.
Etymologie
L'usage du calembour est aussi an-
cien que l'origine même du nom.
On en trouve la preuve dans les li-
vres des XV0 et XVIe siècles.
A l'origine, le calembour portait la
désignation bizarre de « entend-trois ».
C'est M. de Bièvre qui contribua à le
remettre en vogue et qui lui donna le
nom qu'il porte encore aujourd'hui.
L'origine du mot calembour est ita-
lienne (calem burlo, je joue avec la
plume).
On doit donc dire correctement un
« calembourlier » et non pas un « ca-
lembourdier »,
Une bonne réplique
Un des plus importants fournisseurs
de la marine est aussi connu pour son
audace dans l'art d'exploiter les pots
de vin, que par sa grosse bêtise deve-
nue proverbiale.
Récemment, il se trouvait dans un
souper, avec une demi-mondaine très
spirituelle.
Au cours de la conversation, il frap-
pa énergiquement sur son ventre arron-
di en s'écriant d'un air trivial : « En
voilà une bedaine qui a coûté des mil-
lions à l'Etat ! »
C'est vraiment malheureux, répondit
son interlocutrice, que l'Etat ait dépen-
sé tant d'argent pour votre ventrei et
si peu pour votre cerveau. »
Le boucher et l'avoué.
Le Chemineau contait hier l'histoire
d'un avocat qui, ayant à rendre 50 cen-
times à son client sur une pièce de 10
francs, pour se payer de ses honorai-
res, trouva le moyen, en posant une
question audit. client, d'allonger sa note
d'honoraires de 50 centimes. Cette his-
toire nous en rappelle une autre du
même genre, qui amusa beaucoup les
habitants de la petite ville du Centre
où exerçait un avoué que l'on avait sur-
nommé Patacul.
Certain jour, un boucher de la loca-
lité se présenta chez l'avoué, le priant
de lui dire s'il était fondé à demander
des dommages-intérêts au propriétaire
d'un chien qui venait de dérober à son
.étal un énorme gigot d'une valeur de
10 francs.
— Mais certainement, mon ami, ré-
pondit l'avoué.
— Alors, répartit le boucher, vous
me devez 10 francs. C'est votre chien
qui a commis le larein.
- Je ne vous dois absolument rien.
- ? 1
- Mon chien vous a pris un gigot de
10 francs. Vous venez de me prendre
une consultation Ide 10 francs. Nous
sommes quittes !
.—————————— rfl» 1
Le Bilan des Elections
diétales en Bohême
(De notre correspondant particulier)
Vienne, 9 mars.
La campagne électorale qui vient d'être
close en Bohême est marquée par Je dé-
clin notable du prestige du parti jeune
tchèque, qui a été dominant pendant dix-
sept ans.
Il s'agissait, cette fois, de renouveler le
mandat de la Diète, qui est une sorte de
Parlement régional discutant et votant in-
dépendamment du Reichsrath de Vienne
le budget et les projets de loi touchant les
intérêts particuliers du royaume.
Quant au classement des partis politi-
ques, les élections présentent les résultats
suivants : partis tehèques : agrariens, 44 ;
suivants : partis tchèques-agrariens, 44 :
jounes-tchèques, 39 ; vieux-tchèques, 5 ;
radicaux, 6 ; nationaux-socialistes, 3 ;
réaliste, 1 ; clérical, 1 ; parti allemand :
progressistes, 19 ; radicaux, 15 ; agrariene,
14 ; populistes, 9 ; indépendants, 8. Les
Tchèques enregistrent -le gain d'un mandat.
celui de la ville de Budejovice (Budveis),
où le candidat tchèque l'emporta pour la
première fois, depuis l'ère -constitutionnelle,
sur le eandidat allemand.
Les élections dans la. curie des grands
propriétaires fonciers ne présentent pas de
changements notables, les représentants
des trois partis existants ayant fait un
compromis avant l'élection. Les conserva-
teurs restent ainsi en possession de leurs
33 mandats ; les constitutionnels gardent
21 mandats et ceux du fidéi-commis 16. Le
point saillant de ces élections est donc l'ac-
croissement, d'une part, du nombre de
mandats agrariens, qui s'élève de '25, à
l'ancienne Chambre, à 44, et, d'autre part,
la réduction du nombre des sièges des
jcunes-tdhèques; qui disposaient, avant
l'expiration de la dernière législature, de
67 mandats et ne ressortent des élections
qu'avec 39 mandats.
Cette diminution de la confiance des élec-
teurs tchèques dans la politique jusqu'ici
suivie par les jeunes est la conséquence
à la fois du peu de succès que, par Buite
des manœuvres des Allemands, la politi-
que tehèque accuse, sous la direction des
jeunes, à Vienne, et de l'évolution des idées
qui s'est accomplie ces temps derniers
dans les classes moyennes en Autriche.
La Bohème n'a pu échapper à la péné-
tration de la politique pure par la politique
économique, phénomène que l'on voit se
manifester aujourd'hui dans tous les pays
industriels, en France, en Allemagne et
aiileum."
La Bohême traverse donc, en ce mo-
ment, une période de transition dont il est
impossible de prévoir, à l'heure qu'il est,
l'issue. Les jeunes-tohôques, dont le pres-
tige baisse rapidement, ont pu avoir de
grands torts, — être trop égoïstes, trop
ambitieux et trop dédaigneux envers les
autres partis tchèques, qu'ils traitaient de
quantités négligeables, - mais, à part ces
défauts, on doit avouer que c'était 'un rarti
très sérieux, qui tenait surtout à défendre
efficacement les intérêts de toute la na-
tion tchèque contre les agressions des Al-
lemands.
Les agrariens, arrivés comme parti le
plus nombreux à la Diète, ne négligeront
pas d'évincer les jeunes-tohèques de la po-
sition dirigeante que ceux-ci occupaient
jusqu'à présent. C'est un parti bien inspiré,
mais trop jeune pour avoir pu faire ses
preuves. On so trouve, par conséquent,
devant un aléa bien grave. Pour le mo-
ment, .personne ne peut dire si la modifi-
cation de la situation politique en Bohème
est un bien ou un mal pour la nation tchè-
que.
H.
Voîr à la 3e page
les DERNIÈRES DÉPÊCHES
de la nuit et la
REVUE DES JOURNAUX
du matin
Et] passant.
A peine l'épidémie de scarlatine tend-
elle à diminuer d'intensité, qu'une nouvel-
le maladie contagieuse — inconnue jus-
qu'ici — se prend à exercer de terribles
ravages.
La scarlatine frappait de préférence les
soldats et les lycéens ; le nouveau mal —
qui répand la terreur - atteint principale-
ment les hommes politiques et les fonc-
tionnaires.
Cette affection se révèle par des phéno-
mènes bizarres et discordants.
Crise de prostration complète chez les
uns, de surexcitation violente chez les au-
tres, accompagnées de troubles de la vue,
de délire de persécution, d'hallucinations.
Les malades voient des complots affreux
partout ; des conjurations menaçantes ;
des réunions mystérieuses et secrètes dans
les déserts de la place de la Concorde, sur
les rives désolées de la Bièvre, ou dans
les caissons du Métropolitain.
lis eprouvent une appréhension singu-
lière et caractéristique de serrer la main
de leurs semblables ; enfin ils ont des
« visions » nocturnes, accompagnées de
sueurs froides et de tremblements convul-
sés.
« L'apparition » qui, les hante est tou-
jours la même : un homme de taille au-
dessous de la. moyenne, au regard clair,
aux traits ,é11ergiques, qui va droit son
chemin à travers un réseau de toiles d'a-
raignées.
Leur hallucination est accompagnée
d'une sorte de mysticisme russe, car ils
marmonnent sans cesse « petit nèrr le,
petit père. le petit père Il.
Celle étrange maladie qui va faire l'ob-
jet d'une note, remplie d'observations cu-
1 icuses, à l Academie de Médecine, est dé-
signéer sous le nom de « combophobie ».
Si j'en crois les indiscrétions profes-
sionnelles du médecin de la Cour, certains
ministres eux-memes en seraient qrave-
men t atteints. Ainsi, hier matin, l'un de
nos plus aimables secrétaires d'Etat, était
au lit : il ouvrait son journal et commen-
çait à lire les nouvelles suivantes :
Il La Chambre Syndicale de la tannerie
a été présentée hier à M. le ministre du
travail, par M. Combes, tanneur à Saint-
Denis
« On annonce que le nouvel administra-
teur apostolique du diocèse d'Alger, Mon-
seigneur Combes, vient de s'embarquer à
Marseille », lorsqu'il fut pris soudain
d'une crise altreuse.
Il se mit à courir en chemise et. à qua-
tre pattes tout autour, de son lit en hur-
lant : (t Lui, toujours lui, encore lui, pré-
sident congrégation. direction Rappel..
président gauche démocratique,.. tan-
neur. évêque. Pons. Saint-Denis.
Alger. Paris. tout le monde descend.
horreur ! »
C'est grave l
Le Ghemireats.
A LA CHAMBRE
LA RÉINTÉGRATION DES OFFICIERS
ET DES FONCTIONNAIRES
Sur le cas de M. Joseph J^einach se greffe une question géné-
rale. — Une véritable amnistie politique. — Le gou-
nement, battu deux fois, ne bronche pas.
La Chambre, dont la séance s'est ouverte
à deux heures et quart sous la présidence
de M. Henri Brisson, a statué entin hier
sur le projet de loi réintégrant M. Joseph
Heinach dans son grade de capitaine de
territoriale. C'était la troisième fois que ce
projet revenait à l'ordre du jour. En dernier
lieu, il avait été renvoyé à la commission
de l'armée, conformément à la motion de
M. Lasies, concernant la réintégration des
officiers de réserve et de territoriale frap-
pés pour délits de presse commis en dehors
du service.
La commission de l'armée présente un
nouveau texte dont voici l'article unique :
M. Josopli Rcinach, ancien capitaine de cava-
lerie territoriak; (service d'état-mnajor), est- réin-
tégré dans ce grade pour prendre rang du jour
où il lui a été conîôré pour la première fois.
Sont également réintégrés dans leur grade,
pour prendre rang du jour où il leur a été con-
féré pour la première fois, les officiers appar-
tenant à la réserve et à l'armée territoriale
qui ont été révoques, soit en vertu du paragra.
phe 4. r n raison d'un acte politique, soit en
vertu du paragraphe 7 de l'arlicle 7 du décret
du 31 août 1878, sur la sJmple demande non
motivée qu'ils peuvent adresser au ministre de
la guerre dans le mois qui suivra la promul-
gation de la présente loi.
LE CONTRE-PROJET CONSTANS
M. Paul Constans, qui est déjà intervenu
dans les précédents débats sur le mêmeu-
jet, en faveur des fonctionnaires révoqués
pour leur attitude politique, présente le
contre-projet suivant : -
Sont réintégrés dans l'exercice de leurs fonc-
tions, pour prendre rang du jour où elles leur
ont été confiées pour la premicré fois. les an-
ciens fonctionnaires des administrations publi-
ques qui ont été frappés. administrativement
pour délit d'opinion ou pour un acte politique.
M. Paul Cons/ans. — La commission de l'ar-
mée refuse de s'occuper des fonctionnaires ci-
vils auxquels nous nous intéressons. Je com-
prends son attitude, qui est parfaitement lo-
gique.
Mais te projet qui nous est soumis n'est pas
un projet ordinaire ; c'est une amnistie qu'il
serait abusif de rcsKreindie à une seule per-
sonne. Pourquoi ne ferait-on pas bénéficier de
cette amnistie J'instituteur Nègre ? Il ne doit
pas y avoir de délit d'opinion.
Au banc des ministres sont MM. Clemen-
ceau, le général Picquart et Simyan. Deux
des ministres intéressés dans la question
des fonctionnaires, MM. Barthou et Dou-
mergue, sont absents. Qui doit parler ?
M. Simyau évidemment. C'est du moins
l'avis du président du Conseil, qui pousse
à la tribune le sous-secrétaire d'Etat des
postes.
M. Simyan, sous-secrétaire d'Eta.t des postes
f. télégraphes. — Les agents des postes dont
s'occupe M. Paul Constans n'ont pas été frap-
pés à raison do délits d'opinion.
s se sont rendus coupables de. faits d'in-
discipline, nous ne fermons pas la porte à
l'indulgence- d'une laçon systématique ; le cas
de M. Clavier nous a paru digne d'une bien-
veillance particulière. (Applaudissements.)
Pour la réintégration des fonctionnaires ré-
voqués, le gouvernement vous demande do lui
faire confiance.
Est-cc la question de confiance qui est
posée ? Les députés se le demandent entre
eux. Il semble bien que oui et un ministre
ne prononce pas le mot de confiance à la
légère. Ce n'est pas toutefois l'opinion du
gouvernement. Battu, il ne bougera pas.
Le plomb glisse sur l'aile de l'oiseau.
En attendant, M. Paul Constans riposte
à M. Si m van :
M. Pau Constans. — C'est aussi pour acte
d'indiscipline qu'a été frappé M. Reinach.
M. Berteaux apporte l'avis de la commis-
sion de l'armée :
M. Berteaux, président de la commission de
l'armée. — Ce n'était pas à la commission de
l'armée à accepter l'amendement de M. Cons-
tans, puisqu'elle ne s'occupe que des questions
militaires ; maLs. à titre non officieJ, elle dé-
clare ne pas faire obstacle à cet amendement.
(Applaudissements à gauche.)
M. Reinach a été frappé injustement ; le pro-
jet de loi est une réparation.
M. Jules Delahaye. ,,:-Oh ! nc: protestons 1
M. Berteaux. — Sans doute,, le gouvernement
promet des mesures d'indulgence individuelles,
il voudrait que la question lût rejetée à la dis-
cussion du projet de loi relatif au statut des
fonctionnaires. Mais ce projet n'est pas prêt
d'aboutir.
Nous avons ainsi beaucoup ( projets en l'air,
de discussions en cours. Aucun de ces projets
n'a encore abouti et n'est près d'aboutir. Ce que
nous demandons, c'est non pas des mesuras
oarticulières d'indulgence, maïs une mesure gé-
nérale d'oubli et de pardon. (Applaudissements
à gauche.)
M. Colliard. — Je voterai le projet et l'amen-
dement, comme des mesures de réparation et
d'oubli nécessaires et comme témoignage de
pitié envers les familles des travailleurs frap-
pés.
En rendant son gmde à M. Reinach, rendons
leur pain aux enfants des fonctionnaires révo-
qués.
Par 330 voix contre 217, l'article 1er du
contre-projet de M. Paul Constans est
adopté.
De vifs applaudissements à l'cxtrême-
gauche accueillent ce résultat. C'est un
échec pour le gouvernement. Il est à noter
que les rectifications de vote réduiront.
d'une façon sensible, dans la soirée, la mi-
norité déjà maigre du cabinet.
L'article i du contre-projet de M. Paul
Constans reproduit le projet de la commis-
sion.
M. Lasies développe l'amendement sui-
vant :
M. J. Reinach, ancien capitaine de cavalerie
territoriale (service d'état-rnajor), est réintégré
dans ce grade pour prendre .rang du jour où il
lui a été conféré pour la première fois.
Sont également- réintégrés dans leur grade.
pour prendre rang du jour où il léiu1 h été
conféré pour la première fois, les officiers de
réserve et de territoriale qui ont été révoqués
en vertu du paragraphe 7 de l'article 7 du dé-
cret du 31 août. 1878.
M. Lasics. — Je ne puis t.<1l'nltf' la d.:iiÓ..
rence établie entre M. Reina v et les autres
officiers. Pourquoi exiger une demande de ki
part de cCllx-cl et n'en pas exiger de M. Rei-
nach ?
M. Reinach lui-même ne jxut accep'er de
■vouloir rentrer avec fanfn/es dans l'armée
qu",nd ses camarades seraient obligés de si
présenter en quémondeuns et de passer par
1 escalier de service.
M. Messimy, rapporteur. — M. Reinach mV
chargé de dire qu'il acceptait do laire une de-
mande.
M. Lasies. — Pas plus pour lui que pour les
autres, je ne veux l'humiliation d'une demande,
d ailleurs antÍlglementairc.
Il y a là-bas, sur le sol d'Afrique, des sol-
dais. des officiers qui meurent à l'ombre dir
drapeau français. Y a-t-il donc des différences
entre eux ? Leur demilnde-t-on leur religion 1
Non, tous sont morts pour la patrie. On n'en
demande pas plus.
Le général Picquart. — Cette demande es:
nécessaire et réglementaire. D'ailleurs, je k
dis à mon tour, M. Reinach accepte de la.
faire.
La (réintégration des officiers exige des pré-
cautions ; elle ne doit pas servir de prétexte
a des manifestations. Il ne faut pas que l'offi-
cier soit réintégré malgré lui.
Le président. — Alors le § 1" de l'article uni-
que doit tomber, si M. Reinach accepte de fairi
une demande.
NOUVEAU TEXTE
M. Berteaux dénoue cette situation em
brouillée en apporfant, au nom de la corn.
mission de l'armée, un nouveau projet.
M. Berteaux. — La commission de l'armée
croit répondre au désir de la Chambre et à œ-
lui du gouvernement en déposant un nouveau
texte. Le voict :
Il Sont réintégrés dans leur grade ks officier,
de réserve et de territoriale révoqués en vertu
de l'article 7 du décret de 1878 sur la simple
demande qu'ils en adresseront au ministre de
la guerre dans le mois qui suivra la promulcac
tion de la présente Ici. »
hl. Mcslier. — Et les attachés de cabinet in-
voqués ? (Rires.)
M. Lasies. — Nous acceptons le texte de la
commission, mais si on avait imposé une de-
mande au lieutenant-colonel Picquart il ne se-
rait devenu ni général, ni ministre de la guerre.
M. de Rosambo, accuelli par de nom-
breux cris de : (1 Aux voix ! aux voix ! x
prononce quelques mots qui se perdenf
dans le bruit des conversations particuliè.
res. Il a déposé un amendement suppri-
mant l'obligation, pour les officiers de de-
mander leur réintégmtion.
M. Dclahave. dont on avait promis un<
int.ervention sensationnelle, se contente d<
prononcer quelques mots, dans le stvic vio-
lent qui lui est ordinaire.
M. Delallaye. — Je viens dire pourquoi je Te.
noce à la parole. Depuis quelques jours nous
entendions dire que vous vouliez élever un
t.rone au roi des Juifs. (Bruit et rires.) Vous y
renoncez, merci.
Nous constatons que M. neinach se soumet à
la règle qui atteint les autres officiers. U ne
veut plus être une exception. C'est donc que la
puissance des juifs a des bornes. Nous eu Dre"-
nons acte.
M. Messimy. — Les violences de M. Delahaye
ne nous feront pas changer d'opinion. (lulant A
certaines insinuations, il nous suffit de mies re-
pousser du pied.
Le texte de la commission est adopté è
mains levées.
Un mot du président souligne la victoire
de la volonté de la Chambre sur le désil
du gouvernement.
Le président. — il est entendu que le Utre du
projet sera modifié. Au lieu de. : « Réintégra-
tion de M. Reinach ». il y m?,% « Réintégra-
tion des officiers et fonctionnaires ». !A.ssen.
timent.)
L'IMPGT SUR LE REVENU
Après une suspension de dix minutes,
causée par la convocationà quatre heures,
de la commission .de législation fiscale, k
Chambre reprend la discussion de l'impôt
sur le revenu. M. Vigoureux retire l'amen-
dement qu'il avait déposé.
L'article 7 est adopté.
M. Varenne retire une disposition addi-
tionnelle qu'il avait présentée.
M. Merle développe un amendement ten-
dant à frapper le revenu net dans chaque
cédule et à instituer dians -ce but la décla-
ration facultative pour le contribuable.
M. Merle. — Le projet de la commission n'a
pas abordé de front- le problème difficile de la
recherche du revenu net. C'est cependant oe
qu'on n'a pas hésité ù faire en Allemagne, et
c'est ce qu'avait fait chez nous le projet de M.
Doumer.
Puisqu'on affirme que les contribuables fran-
çais sont hostiles à la déclaration obligatoire,
pourquoi n'établirait-on pas la déclaration facul-
tative ? On donnerait ainsi au contribuable le
droit de se soumettre à l'évaluation du revenu
net faite pur l'administration ou à faire la dé-
claration et à établir alors le chiffre de son re-
venu avec certaines déductions déterminées.
M. Caillau.r, ministre des finances. — L'amen-
dement de M. Merle pourrait être profitable à
l'Etat, m ai s il en I rai i> .Tait de telles complica-
tions, de telles difficullés dans la pratique, * qu'ii
ne parait pas possible que la Chambre l'ac-
cepte. Le système actuel de forfait est favorable
aux petits propriétaires. C'est ce svstème cui
doit être maintenu.
M. Merle retire son amendement.
M. Groussier présente l'amendement sui
vant :
Pendant les cinq années-qui suivront la pro
mulgalion de ia présente loi, les propriétés bâ-
ties dont le loyer sera augmenté seront assu.
jetties à une double taxe. --
L'amendement de M. Groussier vise à
empêcher, à Paris notamment, l'augmenta-
tion du prix des loyers.
M. Caillau.. — L'augmentation extrêmement
légère infligée aux r>-'oprié(ai.res de maisons
aura pour compensation }y'Uf eux la suppres-
sion Je hmpÓt des portes et fndrcs.
L'amendement Groussier est repoussé par
473 voix contre 73.
Séance demain, deux heures.
-- » *
AU SÉNAT
Pour ies pêcheurs de Terre-Neuve. !-';
La loi sur le divorce adoptée
M. Antonin Dubost préside.
L'élection de M. Grosjean, dam le DoubS,
est validée. i
M. Corger de la Villc-Moysan pose une;
question au ministre des colonies sur les.
- -
CINQ CENTIM88 LE NUMERO
1 Jeudi 12 Mars 1908.- N- 138M
1 LE XIX* SIECLE
ANNONCES: .,
AUX BUREAUX DU JOURNAl* :
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Et chez MM. LAGRANGE CERFetCjv :
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1
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Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
-- *r 7 - 1 1
TRIBUNE LIBRE
PORTES DE SORTIE
Ayant décidé l'envoi au
Maroc du général Lyautey
et de quatre mille hommes
de renfort, M. Clemenceau
a dit à plusieurs de nos
confrères : « Nous venons de
nous ouvrir une porte de sortie. »
Ce mot symbolise la politique du gou-
vernement. Sous prétexte de sortir du
Maroc, on y fait entrer quatre mille
hommes de plus ; on pénètre toujours
plus avant et on laisse entendre qu'on
se borne à assurer la sécurité des ports
et de leur banlieue ; on affirme que
tout se réduit à une opération de police
et on engage la France dans une expé-
dition coloniale qui s'étend de plus en
plus.
Le gouvernement a hâte d'envoyer
les Chambres en congé ; il aura alors
les mains libres et, à son retour, le Par-
lement se trouvera en face des faits ac-
complis.
Notre action au Maroc n'entrera dans
sa phase véritable qu'après que les dé-
putés auront, pour plusieurs semaines,
pris la porte de sortie.
L'objectif du ministère est, avant
tout, de durer ; pour cela, de gagner
du temps. Aux difficultés qui se présen-
tent et qu'il est cent fois sûr de surmon-
ter, il fait front avec audace ; mais si
l'obstacle est sérieux, le gouvernement
se dérobe ; on l'a encore vu hier.
Personne n'a oublié avec quelle in-
transigeance le gouvernement avait,
jusqu'ici, repoussé toute motion ten-
dant à réintégrer dans leurs emplois les
modestes fonctionnaires révoqués, soit
pour délit d'opinion, soit pour actes
d'indiscipline.
Le ministère estimait que s'il devait
jamais prendre des mesures de clémen-
ce, il entendait rester maître d'appré-
cier chaque cas et de garder le choix
du jour et de l'heure.
Hier .encore, le sous-secrétaire d'Etat
des postes a confirmé ce langage. Il a
dit : « Le gouvernement demande à la
Chambre de lui faire confiance » ; mais
malgré le mot, la question de confiance
n'a pas été posée.
Jouant, à son tour, le rôle qu'il re-
prochait aux radicaux, le président du
Conseil s'est fait « muet du sérail » ; il
s'est réservé, par son silence, une porte
de sortie, au cas où la Chambre ne ré-
pondrait pas à l'appel du sous-secrétai-
re d'Etat.
La Chambre, en effet, s'est refusée à
faire au gouvernement la confiance que
M. Simyan lui avait demandée. Dans
une excellente et brève intervention, M.
Berteaux a montré que la mesure d'a-
paisement reclamée en faveur d'officiers
de la réserve et de la territoriale, devait
s'appliquer aux fonctionnaires civils.
La Chambre lui a donné raison contre
le gouvernement, par 348 voix contre
150, c'est-à-dire à près de deux cents
voix de majorité.
Mais qu'importe au cabinet, pourvu
qu'il demeure ! Il ne pose la question
de confiance que s'il est bien convaincu
d'être sur un terrain sûr.
Ainsi, pour la question du Rachat, il
a pris l'engagement formel d'obtenir un
vote favorable du Sénat ou de s'en aller.
Sur ce point il a, dès 1906, il y a deux
ans, posé la question de confiance à
terme, et ce terme, il le recule de jour
pn irmn
-"'1/> J wv.* «
Incertain du vote que pourra émettre
la Haute Assemblée, il s'est fait ouvrir
une porte de sortie : l'étude des consé-
quences financières du projet équivaut
t un ajournement sine die.
Comment, dès lors, expliquer qu'en
1906, le gouvernement ait fait voter le
projet par la Chambre, en une séance,
en lui laissant espérer qu'un vote défi-
nitif pourrait intervenir avant la fin de
l'année ?
Pour les retraites. ouvrières, c'est
1 expédient si fragile du forfait qui sert,
depuis plusieurs mois, au gouvernement
de porte de sortie.
Ainsi que, dans la séance du 5 mars,
Klotz le démontra nettement, le système
forfaitaire détruit les principes essen-
tiels de la loi sur les retraites ouvrières.
Ce n'est pas avec ce système que la
République aurait jamais pu créer
l'école.
, Mais, de ce système, le gouvernement
tire, au moins, cet avantage qu'il gagne
du temps.
Il reste, il est vrai, la réforme fiscale
dont il faut se réjouir qu'elle soit venue
2n discussion et dont nous voulons es*
pérer le vote par la Chambre. Mais
a est-u pas décevant de constater que
cette réforme, outre qu'elle risque en-
core de sombrer à maint écueil de sa
route, n est pas de celles dont on pour-
fa, aux élections générales prochaines,
apporter les bénéfices à la démocratie 1.
M. Ribot ne s'est-il pas montré, lui-
même, sans inquiétude, en soulignant
avec ironie que le projet du gouverne-
ment, subordonné, pour son applica-
tion, à une évaluation nouvelle des re-
venus de la propriété foncière, ne ver-
rait le jour, durant cette législature,
que sur le papier ?
Et c'est pourquoi, ainsi rassurés, les
progressistes, suivant le mot de Steeg,
ici même, font risette au gouvernement
et lui offrent, au cas où les radicaux-
socialistes pourraient le mettre en péril,
un refuge au centre, une porte de sortie.
Cette porte pourrait bien être aussi
celle par laquelle le gouvernement fera
sa définitive sortie.
Hier, les progressistes, les modérés
lui furent héroïquement fidèles ; ils af-
firmèrent ainsi leur volonté d'être le
pivot de sa majorité.
Mais le scrutin démontra qu'ils pou-
vaient seulement être le pivot de 'sa mi-
norité.
Paul BOURÉL y
Député de l'Ardèche.
.4>. J
LA POJJJIQUE
FAUSSE MANŒUVRE
L'Alliance Républicaine Dé-
mocratique, présidés par M.
Adolphe Caxnot, est un grou-
pement politique important
qui avait jusqu'ici heureuse-
ment contribué à resserrer les
liens entre les républicains de gauche.
Sous les ministères Waldeck-Rous-
seau et Combes, elle fit partie intégrante
du « Bloc )>, et les très fermes républi-
cains qui la composaient donnèrent à
ces deux cabinets un concours sans ré-
serve en échange d'un appui sans com-
promissions.
Depuis quelques mois, le travail de
désorganisation que l'on voit s'accom-
plir avec regret dans la majorité répu-
blicaine à la Chambre se produit égale-
ment dans les rangs de Y Alliance Ré-
publicaine Démocratique.
Une lente évolution, savamment pré-
parée par quelques-uns de ses membres,
tend à conduire tout doucement cette
Association vers les progressistes, et par
conséquent à l'éloigner chaque jour da-
vantage des socialistes indépendants,
des radicaux socialistes, et des radicaux.
i ses alliés fidèles d'hier.. *
La "large hospitalité consentie par le
Bulletin de l'Alliance, à l'éternel dissi-
dent qu'est M. de Lanessan, qui ne par-
donne pas a son ancien parti les défai-
tes successives que lui a justement infli-
gées le suffrage universel, a marqué la
première étape de cette fâcheuse ma-
nœuvre.
Ce dissolvant, joint à quelques autres,
tend actuellement à rompre le bloc que
formait dans le Bloc de gauche l'Allian-
ce Républicaine Démocratique.
Certains de ses membres s'en inquiè-
tent; des démissions ont été données;
une scission est sur le point de se pro-
duire, si l'on n'y met bon ordre.
M. Carnot, dont la personnalité est
unanimement et justement honorée de
tous les républicains, doit à son nom et
à son passé que Y Alliance Républicaine
Démocratique demeure fidèlement atta-
chée à sa politique d'union à gauche qui
était sa raison d'être, et repousse éner-
giquement les avances des dissidents
honteux et des progressisfes impénitents
dont elle a contribué à combattre le pro-
gramme et a assurer la déroute.
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
11 mars 1674. — Les Français s'empa-
rent de Vesoul.
Aujourd'hui mercredi :
Lever du soleil à 6 h.. 25, coucher à 5 h.
57.
Banquet offert à M. Henri Brisson
Courses à Com-piègnei
Combinazione
Un certain nombre de journaux ont
fait allusion récemment à un projet de
remaniement du cabinet.Ils insinuaient
à mots couverts que le président du
conseil avait obtenu de l'un de ses amis
le sacrifice de son portefeuille, et qu'il
avait songé à faire des offres à l'un des
membres les plus connus et les plus
éminents de la majorité radicale.
On prétend aujourd'hui que le minis-
tre prêt à se sacrifier sur l'autel de
l'amitié était le général Picquart (qui se
serait d'ailleurs pourvu lui-même du
commandement d'un corps d'armée.)
Quant à l'homme politique dont on
désirait se. concilier les bonnes grûcest
citait, parait-il, l'honorable et sympa-
thique M. Berteaux. Tous ces beaux
projets viennent. naturellement de s'é-
crouler, et si M. Berteaux n'est pas en-
tré dans les vues du ministère, il est
du moins entré dans ses ouïes.
Nos joyeux médecine
L'autre soir, le professeur Z., l'un
de nos plus éminents chirurgiens, ra-
contait que .dans sa jeunesse, il avait
longtemps hésité entre la peinture et la
médecine.
Interrogé sur les causes de sa déter-
mination, il répondit : « Dans la pein-
ture, toutes les fautes sont exposées à
la vue ; tandis que dans la médecine,
voyez-vous, elles sont enterrées avec le
malade. M
AUTREFOIS
Ra" el du 12 mars 1872. — L'enquête
sur la reddition de Metz va être close ;
la décision du conseil d'enquête sera por-
tée à la connaissance du ministre de la
justice.
Ouverture de la communication télégra-
phique entre la Guadeloupe et l'Europe par
New-York
Mort d'Auguste Luchet, auteur drama-
tique et romancier. Il avait été en. 1848
gouverneur du palais de Fontainebleau. Sa
pièce la plus connue est la Marchande dU
Temple.
Mort à Saint-Pétersbourg, du prince
Paul Gagarine, président du conseil des
ministres de Russie.
L'armée d'occupation allemande, dans
l'est de la France, compte encore 50.000
hommes et 18.000 chevaux.
Le Conseil municipal s'occupera demain
de la reconstruction des théâtres du boule-
vard du Temple.
L'art de la réclame
On nous signale l'initiative d'un con-
fiseur marseillais qui enveloppe ses
bonbons dans des petits articles récla-
mes minuscules et peu ordinaires. En
voici un échantillon :
« Cheminée mélodium. Les tablettes
de ces cheminées sont disposées en cla-
vier de 6 octaves et demie ; les pédales
font l'office de chenets.
« Chaque chambre se trouvera ainsi
naturellement munie d'un piano fai-
sant partie de l'immeuble, ce qui évi-
tera aux consommateurs la coûteuse
nécessité d'en acheter.., )i
Oh ! Marseille.
Etymologie
L'usage du calembour est aussi an-
cien que l'origine même du nom.
On en trouve la preuve dans les li-
vres des XV0 et XVIe siècles.
A l'origine, le calembour portait la
désignation bizarre de « entend-trois ».
C'est M. de Bièvre qui contribua à le
remettre en vogue et qui lui donna le
nom qu'il porte encore aujourd'hui.
L'origine du mot calembour est ita-
lienne (calem burlo, je joue avec la
plume).
On doit donc dire correctement un
« calembourlier » et non pas un « ca-
lembourdier »,
Une bonne réplique
Un des plus importants fournisseurs
de la marine est aussi connu pour son
audace dans l'art d'exploiter les pots
de vin, que par sa grosse bêtise deve-
nue proverbiale.
Récemment, il se trouvait dans un
souper, avec une demi-mondaine très
spirituelle.
Au cours de la conversation, il frap-
pa énergiquement sur son ventre arron-
di en s'écriant d'un air trivial : « En
voilà une bedaine qui a coûté des mil-
lions à l'Etat ! »
C'est vraiment malheureux, répondit
son interlocutrice, que l'Etat ait dépen-
sé tant d'argent pour votre ventrei et
si peu pour votre cerveau. »
Le boucher et l'avoué.
Le Chemineau contait hier l'histoire
d'un avocat qui, ayant à rendre 50 cen-
times à son client sur une pièce de 10
francs, pour se payer de ses honorai-
res, trouva le moyen, en posant une
question audit. client, d'allonger sa note
d'honoraires de 50 centimes. Cette his-
toire nous en rappelle une autre du
même genre, qui amusa beaucoup les
habitants de la petite ville du Centre
où exerçait un avoué que l'on avait sur-
nommé Patacul.
Certain jour, un boucher de la loca-
lité se présenta chez l'avoué, le priant
de lui dire s'il était fondé à demander
des dommages-intérêts au propriétaire
d'un chien qui venait de dérober à son
.étal un énorme gigot d'une valeur de
10 francs.
— Mais certainement, mon ami, ré-
pondit l'avoué.
— Alors, répartit le boucher, vous
me devez 10 francs. C'est votre chien
qui a commis le larein.
- Je ne vous dois absolument rien.
- ? 1
- Mon chien vous a pris un gigot de
10 francs. Vous venez de me prendre
une consultation Ide 10 francs. Nous
sommes quittes !
.—————————— rfl» 1
Le Bilan des Elections
diétales en Bohême
(De notre correspondant particulier)
Vienne, 9 mars.
La campagne électorale qui vient d'être
close en Bohême est marquée par Je dé-
clin notable du prestige du parti jeune
tchèque, qui a été dominant pendant dix-
sept ans.
Il s'agissait, cette fois, de renouveler le
mandat de la Diète, qui est une sorte de
Parlement régional discutant et votant in-
dépendamment du Reichsrath de Vienne
le budget et les projets de loi touchant les
intérêts particuliers du royaume.
Quant au classement des partis politi-
ques, les élections présentent les résultats
suivants : partis tehèques : agrariens, 44 ;
suivants : partis tchèques-agrariens, 44 :
jounes-tchèques, 39 ; vieux-tchèques, 5 ;
radicaux, 6 ; nationaux-socialistes, 3 ;
réaliste, 1 ; clérical, 1 ; parti allemand :
progressistes, 19 ; radicaux, 15 ; agrariene,
14 ; populistes, 9 ; indépendants, 8. Les
Tchèques enregistrent -le gain d'un mandat.
celui de la ville de Budejovice (Budveis),
où le candidat tchèque l'emporta pour la
première fois, depuis l'ère -constitutionnelle,
sur le eandidat allemand.
Les élections dans la. curie des grands
propriétaires fonciers ne présentent pas de
changements notables, les représentants
des trois partis existants ayant fait un
compromis avant l'élection. Les conserva-
teurs restent ainsi en possession de leurs
33 mandats ; les constitutionnels gardent
21 mandats et ceux du fidéi-commis 16. Le
point saillant de ces élections est donc l'ac-
croissement, d'une part, du nombre de
mandats agrariens, qui s'élève de '25, à
l'ancienne Chambre, à 44, et, d'autre part,
la réduction du nombre des sièges des
jcunes-tdhèques; qui disposaient, avant
l'expiration de la dernière législature, de
67 mandats et ne ressortent des élections
qu'avec 39 mandats.
Cette diminution de la confiance des élec-
teurs tchèques dans la politique jusqu'ici
suivie par les jeunes est la conséquence
à la fois du peu de succès que, par Buite
des manœuvres des Allemands, la politi-
que tehèque accuse, sous la direction des
jeunes, à Vienne, et de l'évolution des idées
qui s'est accomplie ces temps derniers
dans les classes moyennes en Autriche.
La Bohème n'a pu échapper à la péné-
tration de la politique pure par la politique
économique, phénomène que l'on voit se
manifester aujourd'hui dans tous les pays
industriels, en France, en Allemagne et
aiileum."
La Bohême traverse donc, en ce mo-
ment, une période de transition dont il est
impossible de prévoir, à l'heure qu'il est,
l'issue. Les jeunes-tohôques, dont le pres-
tige baisse rapidement, ont pu avoir de
grands torts, — être trop égoïstes, trop
ambitieux et trop dédaigneux envers les
autres partis tchèques, qu'ils traitaient de
quantités négligeables, - mais, à part ces
défauts, on doit avouer que c'était 'un rarti
très sérieux, qui tenait surtout à défendre
efficacement les intérêts de toute la na-
tion tchèque contre les agressions des Al-
lemands.
Les agrariens, arrivés comme parti le
plus nombreux à la Diète, ne négligeront
pas d'évincer les jeunes-tohèques de la po-
sition dirigeante que ceux-ci occupaient
jusqu'à présent. C'est un parti bien inspiré,
mais trop jeune pour avoir pu faire ses
preuves. On so trouve, par conséquent,
devant un aléa bien grave. Pour le mo-
ment, .personne ne peut dire si la modifi-
cation de la situation politique en Bohème
est un bien ou un mal pour la nation tchè-
que.
H.
Voîr à la 3e page
les DERNIÈRES DÉPÊCHES
de la nuit et la
REVUE DES JOURNAUX
du matin
Et] passant.
A peine l'épidémie de scarlatine tend-
elle à diminuer d'intensité, qu'une nouvel-
le maladie contagieuse — inconnue jus-
qu'ici — se prend à exercer de terribles
ravages.
La scarlatine frappait de préférence les
soldats et les lycéens ; le nouveau mal —
qui répand la terreur - atteint principale-
ment les hommes politiques et les fonc-
tionnaires.
Cette affection se révèle par des phéno-
mènes bizarres et discordants.
Crise de prostration complète chez les
uns, de surexcitation violente chez les au-
tres, accompagnées de troubles de la vue,
de délire de persécution, d'hallucinations.
Les malades voient des complots affreux
partout ; des conjurations menaçantes ;
des réunions mystérieuses et secrètes dans
les déserts de la place de la Concorde, sur
les rives désolées de la Bièvre, ou dans
les caissons du Métropolitain.
lis eprouvent une appréhension singu-
lière et caractéristique de serrer la main
de leurs semblables ; enfin ils ont des
« visions » nocturnes, accompagnées de
sueurs froides et de tremblements convul-
sés.
« L'apparition » qui, les hante est tou-
jours la même : un homme de taille au-
dessous de la. moyenne, au regard clair,
aux traits ,é11ergiques, qui va droit son
chemin à travers un réseau de toiles d'a-
raignées.
Leur hallucination est accompagnée
d'une sorte de mysticisme russe, car ils
marmonnent sans cesse « petit nèrr le,
petit père. le petit père Il.
Celle étrange maladie qui va faire l'ob-
jet d'une note, remplie d'observations cu-
1 icuses, à l Academie de Médecine, est dé-
signéer sous le nom de « combophobie ».
Si j'en crois les indiscrétions profes-
sionnelles du médecin de la Cour, certains
ministres eux-memes en seraient qrave-
men t atteints. Ainsi, hier matin, l'un de
nos plus aimables secrétaires d'Etat, était
au lit : il ouvrait son journal et commen-
çait à lire les nouvelles suivantes :
Il La Chambre Syndicale de la tannerie
a été présentée hier à M. le ministre du
travail, par M. Combes, tanneur à Saint-
Denis
« On annonce que le nouvel administra-
teur apostolique du diocèse d'Alger, Mon-
seigneur Combes, vient de s'embarquer à
Marseille », lorsqu'il fut pris soudain
d'une crise altreuse.
Il se mit à courir en chemise et. à qua-
tre pattes tout autour, de son lit en hur-
lant : (t Lui, toujours lui, encore lui, pré-
sident congrégation. direction Rappel..
président gauche démocratique,.. tan-
neur. évêque. Pons. Saint-Denis.
Alger. Paris. tout le monde descend.
horreur ! »
C'est grave l
Le Ghemireats.
A LA CHAMBRE
LA RÉINTÉGRATION DES OFFICIERS
ET DES FONCTIONNAIRES
Sur le cas de M. Joseph J^einach se greffe une question géné-
rale. — Une véritable amnistie politique. — Le gou-
nement, battu deux fois, ne bronche pas.
La Chambre, dont la séance s'est ouverte
à deux heures et quart sous la présidence
de M. Henri Brisson, a statué entin hier
sur le projet de loi réintégrant M. Joseph
Heinach dans son grade de capitaine de
territoriale. C'était la troisième fois que ce
projet revenait à l'ordre du jour. En dernier
lieu, il avait été renvoyé à la commission
de l'armée, conformément à la motion de
M. Lasies, concernant la réintégration des
officiers de réserve et de territoriale frap-
pés pour délits de presse commis en dehors
du service.
La commission de l'armée présente un
nouveau texte dont voici l'article unique :
M. Josopli Rcinach, ancien capitaine de cava-
lerie territoriak; (service d'état-mnajor), est- réin-
tégré dans ce grade pour prendre rang du jour
où il lui a été conîôré pour la première fois.
Sont également réintégrés dans leur grade,
pour prendre rang du jour où il leur a été con-
féré pour la première fois, les officiers appar-
tenant à la réserve et à l'armée territoriale
qui ont été révoques, soit en vertu du paragra.
phe 4. r n raison d'un acte politique, soit en
vertu du paragraphe 7 de l'arlicle 7 du décret
du 31 août 1878, sur la sJmple demande non
motivée qu'ils peuvent adresser au ministre de
la guerre dans le mois qui suivra la promul-
gation de la présente loi.
LE CONTRE-PROJET CONSTANS
M. Paul Constans, qui est déjà intervenu
dans les précédents débats sur le mêmeu-
jet, en faveur des fonctionnaires révoqués
pour leur attitude politique, présente le
contre-projet suivant : -
Sont réintégrés dans l'exercice de leurs fonc-
tions, pour prendre rang du jour où elles leur
ont été confiées pour la premicré fois. les an-
ciens fonctionnaires des administrations publi-
ques qui ont été frappés. administrativement
pour délit d'opinion ou pour un acte politique.
M. Paul Cons/ans. — La commission de l'ar-
mée refuse de s'occuper des fonctionnaires ci-
vils auxquels nous nous intéressons. Je com-
prends son attitude, qui est parfaitement lo-
gique.
Mais te projet qui nous est soumis n'est pas
un projet ordinaire ; c'est une amnistie qu'il
serait abusif de rcsKreindie à une seule per-
sonne. Pourquoi ne ferait-on pas bénéficier de
cette amnistie J'instituteur Nègre ? Il ne doit
pas y avoir de délit d'opinion.
Au banc des ministres sont MM. Clemen-
ceau, le général Picquart et Simyan. Deux
des ministres intéressés dans la question
des fonctionnaires, MM. Barthou et Dou-
mergue, sont absents. Qui doit parler ?
M. Simyau évidemment. C'est du moins
l'avis du président du Conseil, qui pousse
à la tribune le sous-secrétaire d'Etat des
postes.
M. Simyan, sous-secrétaire d'Eta.t des postes
f. télégraphes. — Les agents des postes dont
s'occupe M. Paul Constans n'ont pas été frap-
pés à raison do délits d'opinion.
s se sont rendus coupables de. faits d'in-
discipline, nous ne fermons pas la porte à
l'indulgence- d'une laçon systématique ; le cas
de M. Clavier nous a paru digne d'une bien-
veillance particulière. (Applaudissements.)
Pour la réintégration des fonctionnaires ré-
voqués, le gouvernement vous demande do lui
faire confiance.
Est-cc la question de confiance qui est
posée ? Les députés se le demandent entre
eux. Il semble bien que oui et un ministre
ne prononce pas le mot de confiance à la
légère. Ce n'est pas toutefois l'opinion du
gouvernement. Battu, il ne bougera pas.
Le plomb glisse sur l'aile de l'oiseau.
En attendant, M. Paul Constans riposte
à M. Si m van :
M. Pau Constans. — C'est aussi pour acte
d'indiscipline qu'a été frappé M. Reinach.
M. Berteaux apporte l'avis de la commis-
sion de l'armée :
M. Berteaux, président de la commission de
l'armée. — Ce n'était pas à la commission de
l'armée à accepter l'amendement de M. Cons-
tans, puisqu'elle ne s'occupe que des questions
militaires ; maLs. à titre non officieJ, elle dé-
clare ne pas faire obstacle à cet amendement.
(Applaudissements à gauche.)
M. Reinach a été frappé injustement ; le pro-
jet de loi est une réparation.
M. Jules Delahaye. ,,:-Oh ! nc: protestons 1
M. Berteaux. — Sans doute,, le gouvernement
promet des mesures d'indulgence individuelles,
il voudrait que la question lût rejetée à la dis-
cussion du projet de loi relatif au statut des
fonctionnaires. Mais ce projet n'est pas prêt
d'aboutir.
Nous avons ainsi beaucoup ( projets en l'air,
de discussions en cours. Aucun de ces projets
n'a encore abouti et n'est près d'aboutir. Ce que
nous demandons, c'est non pas des mesuras
oarticulières d'indulgence, maïs une mesure gé-
nérale d'oubli et de pardon. (Applaudissements
à gauche.)
M. Colliard. — Je voterai le projet et l'amen-
dement, comme des mesures de réparation et
d'oubli nécessaires et comme témoignage de
pitié envers les familles des travailleurs frap-
pés.
En rendant son gmde à M. Reinach, rendons
leur pain aux enfants des fonctionnaires révo-
qués.
Par 330 voix contre 217, l'article 1er du
contre-projet de M. Paul Constans est
adopté.
De vifs applaudissements à l'cxtrême-
gauche accueillent ce résultat. C'est un
échec pour le gouvernement. Il est à noter
que les rectifications de vote réduiront.
d'une façon sensible, dans la soirée, la mi-
norité déjà maigre du cabinet.
L'article i du contre-projet de M. Paul
Constans reproduit le projet de la commis-
sion.
M. Lasies développe l'amendement sui-
vant :
M. J. Reinach, ancien capitaine de cavalerie
territoriale (service d'état-rnajor), est réintégré
dans ce grade pour prendre .rang du jour où il
lui a été conféré pour la première fois.
Sont également- réintégrés dans leur grade.
pour prendre rang du jour où il léiu1 h été
conféré pour la première fois, les officiers de
réserve et de territoriale qui ont été révoqués
en vertu du paragraphe 7 de l'article 7 du dé-
cret du 31 août. 1878.
M. Lasics. — Je ne puis t.<1l'nltf' la d.:iiÓ..
rence établie entre M. Reina v et les autres
officiers. Pourquoi exiger une demande de ki
part de cCllx-cl et n'en pas exiger de M. Rei-
nach ?
M. Reinach lui-même ne jxut accep'er de
■vouloir rentrer avec fanfn/es dans l'armée
qu",nd ses camarades seraient obligés de si
présenter en quémondeuns et de passer par
1 escalier de service.
M. Messimy, rapporteur. — M. Reinach mV
chargé de dire qu'il acceptait do laire une de-
mande.
M. Lasies. — Pas plus pour lui que pour les
autres, je ne veux l'humiliation d'une demande,
d ailleurs antÍlglementairc.
Il y a là-bas, sur le sol d'Afrique, des sol-
dais. des officiers qui meurent à l'ombre dir
drapeau français. Y a-t-il donc des différences
entre eux ? Leur demilnde-t-on leur religion 1
Non, tous sont morts pour la patrie. On n'en
demande pas plus.
Le général Picquart. — Cette demande es:
nécessaire et réglementaire. D'ailleurs, je k
dis à mon tour, M. Reinach accepte de la.
faire.
La (réintégration des officiers exige des pré-
cautions ; elle ne doit pas servir de prétexte
a des manifestations. Il ne faut pas que l'offi-
cier soit réintégré malgré lui.
Le président. — Alors le § 1" de l'article uni-
que doit tomber, si M. Reinach accepte de fairi
une demande.
NOUVEAU TEXTE
M. Berteaux dénoue cette situation em
brouillée en apporfant, au nom de la corn.
mission de l'armée, un nouveau projet.
M. Berteaux. — La commission de l'armée
croit répondre au désir de la Chambre et à œ-
lui du gouvernement en déposant un nouveau
texte. Le voict :
Il Sont réintégrés dans leur grade ks officier,
de réserve et de territoriale révoqués en vertu
de l'article 7 du décret de 1878 sur la simple
demande qu'ils en adresseront au ministre de
la guerre dans le mois qui suivra la promulcac
tion de la présente Ici. »
hl. Mcslier. — Et les attachés de cabinet in-
voqués ? (Rires.)
M. Lasies. — Nous acceptons le texte de la
commission, mais si on avait imposé une de-
mande au lieutenant-colonel Picquart il ne se-
rait devenu ni général, ni ministre de la guerre.
M. de Rosambo, accuelli par de nom-
breux cris de : (1 Aux voix ! aux voix ! x
prononce quelques mots qui se perdenf
dans le bruit des conversations particuliè.
res. Il a déposé un amendement suppri-
mant l'obligation, pour les officiers de de-
mander leur réintégmtion.
M. Dclahave. dont on avait promis un<
int.ervention sensationnelle, se contente d<
prononcer quelques mots, dans le stvic vio-
lent qui lui est ordinaire.
M. Delallaye. — Je viens dire pourquoi je Te.
noce à la parole. Depuis quelques jours nous
entendions dire que vous vouliez élever un
t.rone au roi des Juifs. (Bruit et rires.) Vous y
renoncez, merci.
Nous constatons que M. neinach se soumet à
la règle qui atteint les autres officiers. U ne
veut plus être une exception. C'est donc que la
puissance des juifs a des bornes. Nous eu Dre"-
nons acte.
M. Messimy. — Les violences de M. Delahaye
ne nous feront pas changer d'opinion. (lulant A
certaines insinuations, il nous suffit de mies re-
pousser du pied.
Le texte de la commission est adopté è
mains levées.
Un mot du président souligne la victoire
de la volonté de la Chambre sur le désil
du gouvernement.
Le président. — il est entendu que le Utre du
projet sera modifié. Au lieu de. : « Réintégra-
tion de M. Reinach ». il y m?,% « Réintégra-
tion des officiers et fonctionnaires ». !A.ssen.
timent.)
L'IMPGT SUR LE REVENU
Après une suspension de dix minutes,
causée par la convocationà quatre heures,
de la commission .de législation fiscale, k
Chambre reprend la discussion de l'impôt
sur le revenu. M. Vigoureux retire l'amen-
dement qu'il avait déposé.
L'article 7 est adopté.
M. Varenne retire une disposition addi-
tionnelle qu'il avait présentée.
M. Merle développe un amendement ten-
dant à frapper le revenu net dans chaque
cédule et à instituer dians -ce but la décla-
ration facultative pour le contribuable.
M. Merle. — Le projet de la commission n'a
pas abordé de front- le problème difficile de la
recherche du revenu net. C'est cependant oe
qu'on n'a pas hésité ù faire en Allemagne, et
c'est ce qu'avait fait chez nous le projet de M.
Doumer.
Puisqu'on affirme que les contribuables fran-
çais sont hostiles à la déclaration obligatoire,
pourquoi n'établirait-on pas la déclaration facul-
tative ? On donnerait ainsi au contribuable le
droit de se soumettre à l'évaluation du revenu
net faite pur l'administration ou à faire la dé-
claration et à établir alors le chiffre de son re-
venu avec certaines déductions déterminées.
M. Caillau.r, ministre des finances. — L'amen-
dement de M. Merle pourrait être profitable à
l'Etat, m ai s il en I rai i> .Tait de telles complica-
tions, de telles difficullés dans la pratique, * qu'ii
ne parait pas possible que la Chambre l'ac-
cepte. Le système actuel de forfait est favorable
aux petits propriétaires. C'est ce svstème cui
doit être maintenu.
M. Merle retire son amendement.
M. Groussier présente l'amendement sui
vant :
Pendant les cinq années-qui suivront la pro
mulgalion de ia présente loi, les propriétés bâ-
ties dont le loyer sera augmenté seront assu.
jetties à une double taxe. --
L'amendement de M. Groussier vise à
empêcher, à Paris notamment, l'augmenta-
tion du prix des loyers.
M. Caillau.. — L'augmentation extrêmement
légère infligée aux r>-'oprié(ai.res de maisons
aura pour compensation }y'Uf eux la suppres-
sion Je hmpÓt des portes et fndrcs.
L'amendement Groussier est repoussé par
473 voix contre 73.
Séance demain, deux heures.
-- » *
AU SÉNAT
Pour ies pêcheurs de Terre-Neuve. !-';
La loi sur le divorce adoptée
M. Antonin Dubost préside.
L'élection de M. Grosjean, dam le DoubS,
est validée. i
M. Corger de la Villc-Moysan pose une;
question au ministre des colonies sur les.
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