Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-02-29
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 29 février 1908 29 février 1908
Description : 1908/02/29 (N13868). 1908/02/29 (N13868).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
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Samedi 29 Février 1908. - W 13899
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OPINIONS
L'assistance lain
». 11
Si la loi de 1901 sur les associations,
modifiée en 1902 et en 1904, et pronon-
çant leur dissolution a détruit les con-
grégations enseignantes et contempla-
tives, les congrégations ayant un
but de bienfaisance subsistent tou-
jours. La loi a même déclaré
qu'elles ne pourraient être dissou-
tes ou expulsées qu'après un vote
spécial du Parlement les désignant par-
* ticulièrement et nominativement. Agir
ainsi c'est conserver les congrégations
qui exercent toujours en France leur
propagande confessionnelle sous le man-
teau de la bienfaisance. La vérité ab-
solue, c'est qu'on a été contraint d'agir
de la sorte parce qu'on ne peut substi-
tuer à l'organisation d'assistance reli-
gieuse, une organisation d'assistance
nationale et laïque.
Il en résulte que le devoir de notre
parti est tout tracé : il faut préparer
dès maintenant un plan d'organisation
de l'assistance laïque sous la tutelle de
l'Etat. L'assistance doit être avant tout
un service public et dans certains cas
exceptionnels seulement relever de l'i-
nitiative privée. En tout cas, les ser-
vices d'assistance doivent absolument
échapper à la propagande confession-
nelle, et le seul moyen de donner cette
sécurité à la Démocratie, est d'établir
une organisation nationale de l'assis-
tance afin de soustraire les enfants, les
femmes, les malades, les vieillards,
c'est-à-dire des êtres faibles, soit au
point de vue physique, soit au point de
vue moral, à l'influence confession-
nelle.
Il y a longtemps que les radicaux-so-
cialistes, aujourd'hui au pouvoir, au-
raient dû créer une méthode d'étude et
de discussion, qui parvienne à indiquer
nettement ce que doit être l'assistance
laïque dans une Démocratie telle que la
nôtre.
Pourquoi n'a-t-on pas créé une « Li-
gue française de l'assistance laïque »,
comme on a créé autrefois une « Ligue
française de l'instruction .laïque », qui
a singulièrement bâti le règne de l'ins-
truction primaire laïque en France.
Mais au lieu de faire une oeuvre gé-
nérale, au lieu d'agir en bloc, nos lé-
gislateurs ont procédé par petits pa-
quets. Ils ont fait une loi d'assistance
médicale gratuite, la loi de 1898 sur les
enfants assistés, la loi du 14 juillet
1905 sur l'assistance aux vieillards,
mais ce ne sont là que des parties et
non pas un tout, il n'y a rien d'unifié.
Paris, qui a laïcisé ses hôpitaux, a un
régime différent du régime de la pro-
vince qui subit encore les congréganis-
tes dans ses hôpitaux.
Il nous est pénible de constater que
l'Etat républicain, démocratique et an-
ticlérical fait fournir l'assistance par
des congréganistes appartenant à des
Eglises dont il est séparé. C'est là une
anomalie, je ne dirai pas scandaleuse,
mais frappante. Des républicains, des
démocrates, des anticléricaux des libres
penseurs ont voté les lois que je citais
précédemment ; voici quelques-uns de
leurs effets. D'après la loi de 1898, les
enfants assistés doivent être placés dans
une famille et là, trouver des parents
pour remplacer ceux qu'il n'a pas con-
nus et surtout une vie de famille néces-
saire à l'enfant.
Jusqu'à l'âge de six ans, l'Etat trou-
ve facilement à les placer parce qu'une
mensualité est versée pour l'entretien de
l'enfant ; à partir de treize ans il est
encore très facile de caser l'enfant par-
ce que son travail rapporte. Mais de six
à treize'ans, pendant les années de sco-
larité, l'Etat se trouve réduit et obligé
de les mettre dans des orphelinats con-
gréganistes ! Lorsqu'il s'agit d'enfants
non assistés, orphelins de père ou de
mère, mais pas abandonnés, l'enfant est
livré au contact et à la promiscuité, de
fa rue, et future recrue de l'armée du
crime, il végète abominablement.
Pour cet enfant il y a des orphelinats
laïques, mais ils sont trop chers et il ne
pourra être recueilli que par un orphe-
linat congréganiste gratuitement ou
pour uno somme minime, la. conscience
de l'enfant est accaparée. C'est ce que
nous vaut la situation actuelle ; les
congrégations possèdent seules les éta-
blissements susceptibles de recevoir les
orphelins.
Pour ce qui est de l'assistance aux
vieillards, dix-neuf sur vingt de leurs
hospices sont desservis par dés con-
gréganistes. Les lois votées par la ma-
jorité républicaine sont appliquées par
les bons soins des congrégations !
Il est donc absolument nécessaire d'é-
tablir dès maintenant un plan d'ensem-
Me d'organisation de l'assistance laïque
en France. Contre ce que nous allons es-
sayer de réaliser on nous cite des ar:
ments assez sérieux mais qui ne doi-
vent pas néanmoins arrêter les réfor-
mateurs et les novateurs puisque la
questi :ii n'est pas du totririnsoMA&v Il-
y a d'abord le manque d'argent, mais
on en manquait aussi lorsque l'on ins-
taura en France l'instruction primaire
laïque et obligatoire. Je ferai la même
réflexion en ce qui concerne la seconde
objection qui surgit immédiatement
après la première. Si on manque d'ar-
gent, on manque aussi de personnel.
On a créé un personnel d'enseignement
laïque, on créera un personnel d'assis-
tante laïque.
Ces arguments ne doivent pas nous
arrêter; il faut aboutir - et débarrasser
la France de la dernière tache noire des
congrégations, ces congrégations, qui,
sous le manteau de la charité et de la
bienfaisance, accaparent les consciences
des enfants, vivent du travail des jeu-
nes filles et des femmes dans les ou-
vroirs, troublent les souffrances des ma-
lades et les derniers moments des mori-
bonds dont l'esprit a, jusqu'alors, été
libre de tout dogme.
C'est là un des derniers remparts de
la propagande cléricale qu'il faut dé-
molir.
Pour cela il faut créer des-internats
primaires laïques, des maisons de pro-
tection laïque pour remplacer les ou-
vroirs, des écoles de répression, des hô-
pitaux et des hospices. Il faut surtout
protéger le malade à domicile contre
l'inquisition intéressée de la bonne
sœur, il faut protéger les vieillards, laï-
ciser leurs hospices et éviter aux! mou-
rants libres penseurs, l'emprise cléri-
cale. .,'
On m'objectera que s'il est absolu-
ment nécessaire en principe d'éliminer
des services d'assistance publique l'élé-
ment confessionnel, il n'en est pas de
même en fait, et que si la sœur a de gra-
ves défauts elle a aussi de grandes qua-
lités. Si la sœur tient tout d'abord
compte du point de vue confessionnel
— sur la feuille d'admission dans cer-
tains hôpitaux ont fait mentionner la re-
ligion — et si elle est, de ce fait, très
partiale dans ses soins, elle est, même
pour le malade « païen », très dévouée.
Ce dévouement est un placement sur
l'éternité dont les malades bénéficient
et comme, par une sorte d'égoïsme, elles
attendent cette vie éternelle si douce,
elles ne craignent pas la mort et accep-
tent les besognes les plus malpropres
des hôpitaux.
Ces mêmes objections ont été faites
à la Chambre des députés de Louis-
Philippe, lorsque l'on discutait l'orga-
nisation de l'instruction laïque en Fran-
ce. La loi Guizot trouva en le comte de
Montalembert, l'adversaire le plus vé-
hément. Lui aussi s'apitoyait sur le
sort des enfants qui allaient passer du
frère à l'instituteur, quel meilleur maî-
tre pouvait être pour l'enfant que le
bon frère « Quatre-bras » ou la bonne
sœur, tous deux à l'abri des questions
d'argent et n'ayant aucune attache avec
la vie extérieure, et voués simplement
à l'œuvre de Dieu ! L'avenir lui a donné
tort. Nous avons aujourd'hui un person-
nel enseignant admirable et dont la si-
tuation sociale s'améliore chaque jour.
Comme la France a organisé l'ins-
truction laïque, elle doit organiser l'as-
sistance laïque. Cette organisation, l'E-
tat républicain nous la doit, parce qu'il
y a nécessité absolue ; il faut donner
à ceux qui souffrent, aux faibles, l'as-
sistance en leur évitant des tortures
spirituelles. Notre parti tant épris de
liberté et de justice doit à la Démocra,-
tie française d'en prendre l'initiative.
GEORGES DANCQN.
NUZ GOURNADEC'H
Il y a bien longtemps que
M. de Mun n'est monté à la
tribune de la Chambre ; on
Uisait même que, pour des
raisons de santé, il avait
■déliait!. ;t renoncé à la
parole. Nous aliénons avec plai-
sir que cette voix, -si justement admi-
rée de tous les partis — car, pour re-
connaître la valeur d'un orateur, il
n'est pas nécessaire ; d'être de son avis
— ne s'est pas tue -pour toujours.
M. de Mun vient de faire sa rentrée
comme' orateur. Ce pouvait être une
manifestation très parisienne. Mais le
chef du parti cathoi-ique a préféré, mo
destement, parler à Sainte-Anne d'Au-
ray.
On venait de sacrer à la cathédrale le
nouvel évêque de Quimper et Léon, M.
Duparc. Un banquet était donné en
l'honneur de la cérémonie religJeuse:
C'est à ce banquet que l'orateur chré-
tien a eu l'occasion 'de prononcer un
discours que les journaux réactionnai-
res publient in-extenso et dont nous ne
saurions que nous plaire à vanter les
qualités littéraires.
Quand du porche magnifique de votre ca-
thédrale de Saint-Pol a-t-il dit, vous des-
cendrez sur le chemin de Roscoff, vous dé-
couvrirez, comme un navire - endormi
sur les flots, la grève de nie de Batz.
C'est là que l'apôtre, dont vous êtes le
successeur, délivra du dragon meurtrier l'île
et la terre prochaine.
Il ne le dompta ni par le glaive ni par
le feu, mais par la vertu de son .ét..o-le je-
tée sur le cou- du-serpent : symbole admira-
ble de apostolique ! Saint-Pol,
endàn nfpas- seul quand il accom-
plit cette œuvre de salut. Il était escorté
d'un homme résolu dont, ce jour-là, le
cœur fut si vaillant que ses compagnons
lui donnèrent.. depuis, lç nom de Gournfb
-dec'harnm.e qui né fuit pas. < r".
De cette jolie légende, M. de Mun
tire un symbole. Vous vous y atten-
diez : ,'
Nuz Gournadec'h, l'homme qui ne luit
pas, c'est le jeune catholique breton, dont
nous apportons ici, devant vous, Monsei-
gneur, le témoignage et le serment.
Le paganisme menace aujourd'hui tes
âmes, comme autrefois le dragon dévorait
les corps. Sauvez-lés par la vertu de votre
étole. Vous trouverez, à vos côtés, pour se-
oonder votre apostolat, les .fils de Nuz « qui
marcheront de l'avant », suivant la pro-
messe de Pol, au dernier tableau du mys-
tère, « là tête haute et sans trembler ».
Nous pourrions aisément retourner
le symbole, et le faire servir à la glorï-
fication des idées républicaines. Le dé-
mocrate breton pourrait lui aussi, lui
surtout, s'appeler « rhommeui ne fuit
pas ». Il a accompli' depuis quelque i
années d'admirables conquêtes dans un
pays que l'Eglise croyait avoir asservi
pour jamais. Malgré le cri d'orgueil de
M. de Mun, les catholiques de Bretagne
sont forcés d'avouer qu'ils ont perdu
beaucoup de terrain ; quelques-unes de
leurs citadelles les plus fortes sont tom-
bées aux mains des républicains. Tout
fait prévoir que les cinq départements
d'Armorique seront conquis dans un
délai assez bref à la poétique de gau-
che. Et je serais bien étonné que la
vertu de l'étole de M. Duparc fût assez
puissante pour empêcher cette natu-
relle évolution.
LES OM-DST
Un prédécesseur de Koepenick. -
Mes amis, il est bien difficile de ne
pas imiter quelqu'un, même dans les
genres qui semblent à première vue
inédits. L'aventure prodigieuse du
pseudo-capitaine de Kœpenick excita
jusqu'à radmiration de la cour alle-
mande et, ces jours derniers, le kpon-
prinz après avoir visité le tombeau de
Napoléon, se rendait en pèlerinage de-
vant la vitrine où s'exhibe triomphale-
ment l'uniforme du célèbre escroc. Il
X eut, ce-pendant, un précédent à cette
colossale mystification. Dans la premiè-
re quinzaine de janvier 1860, quatre
des principales banques de Berlin reçu-
rent par écrit l'ordre d'acheter des obli-
gations pour 750 thalers de l'emprunt
5 pour le compte d'un bataillon du
200 régiment d'infanterie. On leur an-
nonça, en outre, qu'à une date certaino
l'adjudant çapitaiILC X,,, viendrait pren-
dre ces titres, sur lesquels les épargnes
'du bataillon devaient être placées.
Au jour dit, un étranger, portant l'u-
niforme de. capitaine, se présenta, en
effet, au guichet des banques, empocha
les titres et remit en échange un bon
sur la caisse militaire générale, muni
des signatures d'usage, des timbres re-
quis et d'une acceptation écrite avec de
l'encre rouge ; il était payable trois
jours après. Inutile d'ajouter que cette
pièce était fausse. L'auteur de cette
audacieuse escroquerie n'a jamais été
découvert.. Enfoncé, le capitaine de
Kœpenick !
La retraite des avocats
Le bâtonnier a reçu une délégation
de La Parlotle, composée de MM. Ou-
dart, Daguin, Languellier et Mme Ma-
ria Vérone.
Les délégués ont remis une lettre an-
nonçant que la pétition en faveur de la
retraite des avocats avait déjà réunis
plusieurs centaines de signatures et
que les fonds provenant de la souscrip-
tion étaient dès maintenant à la dispo-
sition du conseil de l'ordre.
Le bâtonnier leur a fait le meilleur
accueil et leur a promis que le projet de
retraite serait très sérieusement étudié
par le Conseil.
Pas de soldas parisiens à Paris ?
C'est une règle sévère du recrut M-',
ment militaire de répart'r les contin-
gents parisiens chaque année dans des
garni-sons provinciales, aussi lointaines
que possible..On craint avec -raison,
pour ces jeunes gens, les tentations de
la vie facile et de la famille trop pro-
che. Cependant ir fut de tout temps avec
le ciel des accommodements. Il semble
que cette année, on se soit relâché de
la rigueur ancienne. Grâce à de multi-
ples pistons, à des; interventions parti-
culières que M. le ministre de la guerre
est le premier à déplorer, de nombreu-
ses exceptions ont été faites. Et je pour-
rais citer une section d'intendance, à
Paris même, où la plupart des soldats
ont été ramenés d'office de leurs garni-
sons départementales. ,
Le Passant.
————————-—- >1» -
LES PARTISANS DE FRANCO
(De notre correspondant particttlier)
Lisbonne, 27 février.
La nouvelle d'un complot des partisans
de Franco a été démentie, c'est vrai, niais
on ne peut pas dire qu'elle était dénuée de
tout fondemoot, - JI y a eu complot, mais
pas dans le sens que font indiqué certains
journaux. Quelques officiers die l'armée ac-
tive avaient conçu le projet de venger la
mort du roi et 00 prince héritier. Dans ce
bçt, ils avaient" projeté d'envahir les bu-
reVX dev rédaction des journaux républi-
cains et d y massacror tous les rédacteurs.
Le gouvernement ayant eu vent de la
choses a rçris des mesures à tempsv Les
troupes avaient été consignées dans la ca-
serne et autour de. certains journaux on
avait établi un service d'agents
-..
LETTRE D'AUTRICHE
(De notre correspondant particulier)
M. Funck-Brentano à Prague
Vienne, 27 février.
Les sociétaires de l'Alliance française de
Prague et grand nombre de personnes in-
vitées furent charmés par la parole claire,
abondante et élégante du distingué et sa-
vant conservateur des manuscrits de l'Ar-
senal, qui leur fit une conférence sur Paris.
à travers tes dges; Il étudia l'histoire des
origines et. le développement progressif de
Paris, reconnut une origine féodale déve-
loppée ensuite par l'organisation commer-
ciale des célèbres Nantes parisiens - dont la'
bourse de commerce forme l'origine' du Con-
seil municipal. L'orateur passa successive-
ment en revue le Paris des rois, le Paris
religieux, le Paris municipal et termina son
instructive et captivante étude par le mou-
vement de la Révolutionet du Paris roman-
tique. Celui qui sait l'intérêt que les Tchèquc-
portent à tout ce qui se fait en France et
à Paris, comprendra l'émotion profonde et
durable que cette magnifique conférence a
produit sur le public pragois.
Tfoir en 2e pagre :
La séance des Chambres
Les bandits de Langon (2e audience).
NOUVELLE EMINENCE CRISE
(De notre correspondant particulier)
Berlin, 27 février.
A la Cour on ne parle que d'une nouvelle
Eminence grise qui, depuis quelque temps,
aurait pris auprès de l'empereur la place
du prince Eulenbourg. C'est le prince Fuers-
kenberg. Il accompagnera l'empereur à Cor-
fou et lui tiendra compagnie pendant tout
son séjour. On cherche à aeviner par quel
moyen le prince Fuerskenberg a pu pren-
dre un tel ascendant sur le monarque, lui
qui ne sait ni composer des complots, ni
les chanter comme d'Eulenbourg.
D'aucuns croient qu'il sera bientôt ap-
pelé à prendre la succession du chancelier,
prince de BÜlow, mais des gens bien ren-
seignés affirment que M. de Fuerskenberg
préfère rester dans la coulisse.
-■
LA JOURNEE POLITIQUE 1
Le conseil des ministres
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin à l'Elysée, sous la présidence de M.
Faîtières.
Lès ministres se sont d'abord occupés
des affaires du Maroc.
Le ministre de la .guerre a donné lecture
d'une dépêche qu'il a adressée au général
d'Amade pour lui demander des renseigne-
ments sur l'étendue des opérations qu'il a
projetées et sur les forces_dont il dispose.
Jusqu'au moment de la fin du conseil,
aucune réponse du général d'Amade n'é-
tait encore arrivée. En prévision du cas
où le commandant du corps expédition-
naire du Maroc demanderait quelques ren-
forts, des troupes supplémëntaires sont
prêtes à lui être envoyées. Ces renforts se-
raient empruntés pour deux tiers aux gar-
nisons d'Algérie et pour un tiers à celles
de Tunisie.
Il résulte des renseignements communi-
qués au conseil qu'un navire de guerre
français est en station devant Safi.
.Le..-conseil s'est ensuite occupé d'une de-
mande supplémentaire de crédit de deux
millions pour les victimes des départe-
ments inondés.Le conseil statuera sur cette
question dans sa prochaine réunion.
Le conseil des ministres ne se réunira
pas avant jeudi prochain, 5 mars, sauf
l'imprévu, bien entendu.
M. Clemenceau ira-t-il dans le Var ?
Le président du conseil avait, dit le
Temps, accepté en principe de se rendre
dans le Var pour inaugurer une école et
d'autre part s'occuper d'une question d'ad-
duction d'eaux de source. Si la session par-
lementaire se termine à temps, le prési-
dent du conseil ira dans le Var durant les
derniers jours de mars ; sinon, le voyage
sera ajourné. Car il a été décidé que les
ministres ne se déplaceraient pas durant
le mois d'avril, à cause des élections-mu-
nicipales.
Les mineurs de Saint-Eloi
M. René Viviani, ministre du travail, a
reçu une délégation des mineurs de Saint-
Eloi qui lui a été présentée par M. Va-
renne, député du Puy-de-Dôme.
renne, délégation a soumis au ministre un
La
cahier de yevendicatifffis portant notam-
ment sur l'augmentation des salaires, la
reprise de quelques mineurs renvoyés, l'ac-
célération de la descente dans les puits et
de la remonte, les allocations de charbon
aux veuves, etc.
Le ministre, à la suite de cette première
entrevue, a convoqué au ministère M. Léon
Lévy, directeur des mines de Saint-Eloi et
des établissements métallurgiques Châtil-
lon-Commentry.
Après un assez long entretien, M. Léon
Lévy a déclaré que la Compagnie était prê-
te, au moyen d'installations nouvelles et
qui pourront fonctionner dans deux mois,
à opérer plus rapidement la descente des
ouvriers ; d'autre part, la Compagnie est
disposée, d'ici à une quinzaine de jours, à
augmenter le salaire des manœuvres du
fond.
M. Léon Lévy s'est déclaré; en outre,
prêt à demander vendredi prochain au
conseil d'administration de la Compagnie
en faveur des veuves des ouvriers la subs-
titution d'une allocation complètement gra-
tuite de six tonnes de charbon à l'alloca-
tion actuelle de six tonnes dont trois ton-
nes payées à raison de un franc la tonne.
M. Viviani a fait connaître à la déléga-
tion des mineurs, qui était venue l'entre-
tenir de ses revendications, le résultat de
son entrevue avec M. Léon Lévy.
Les travailleurs malgaches
Plusieurs journaux ont annoncé que M.
Augagneur, gouverneur-général de Mada-
gascar, était entré en négociations avec le
gouverneur: de l'Afrique du Sud pour l'en-
voi de travailleurs malgaches dans lu;colo-
nie anglaise.
Nous sommes autorisés a annoncer tout
au contraire, que M. Augagneur ayant eu
connaissance de ces bruits, a câblé au dé-
partement des colonies pour demander ce
qu'il y avait de fondé dans ce projet auquel
il est entièrement opposé.
ENCORE UN PROCES SENSATIONNEL
LES - MMrcîjg anx Ai
THOMAS ET SA BANDE
L'audience d'hier. - Les deux principaux toinsJ Antony
.: Thomas et l'antiquaire Dufay aux prises
Limoges, 27 février.
C'est aujourd'hui que comparaissent de-
vant las cour d'assises de la Haute-Vienne
les fameux cambrioleurs d'églises dont les
exploits retentissants occupèrent si large-
ment l'opinion publique flurant les der-
niers mois de. l'année dernière.
Les aecusés sont au nombre de quatre,
savoir :
1° Thomas Jean, dit Antony. âgé de 29
ans, né le 5 septembre 1878, à Qermont-
Ferrand ;
2° Thomas François-Albert, âgé de 27
ans, né le, 24 mars 1880 à Clermont-Fer-
rand ;
3° Faure Antoine, âgé de 28 ans, né le
29 mars 1879, à Aukiat, arrondissement de
Clermont-Ferrand ;
4° Dufay Michel, âgé de 54 ans. né le 27
mai 1853 à Qermont-Ferrand. Il exerce
le métier d'antiquaire.
Les frères Thomas sont des tonneliers.
Faure était à leur service.
Les quatre accusés sont respectivement
défendus par M68 Planche, du barreau de
Clermont, Python et Gentitlly. du barreau
de Paris, et enfin par M* Duteillet, ancien
bâtonnier du barreau de Limoges.
Les débats sont présidés par M. le con-
seiller Ducros.
M. l'avocat général Dueher occupe le
siège du ministère public.
On prévoit" que les débats occuperont
cinq ou six audiences, une soixantaine de
témoins, - tant à charge qu'à décharge,
ayant été cités.
Une série de vols
Voici succinctement relevés, d'après
l'arrêt de renvoi de la chambre des mises
en accusation, les faits reprochés aux dé-
valiseurs d'églises :
Antony Thomas est accusé d'avoir :
1° Dans le courant du mois d'octobre
.1905, volé, dans l'église de Solignac,. un
reliquaire en cuivre classé comme objet
historique, et un autre reliquaire en cuivre
rurgent) en forme de chefv contenant les
reliques de saint Théau.
Ces deux objets se trouvaient dans un
placard fermé qui fut ouvert à l'aide d'une
pince ;
2° A la même époque et, croit-on, -le len-
demain, volé dans l'église de Laurière,
une châsse en cuivre émaillé du XIIIe isiè-
cle, une custode en cuivre et un reliquaire,
après avoir brisé le cadenas de la grille en
fer qui protégeait les reliques.
Les objets votés à Soflignac et les deux
premiers objets volés à Laurière étaient
classés comme objets historiques.
3° Dans la nuit du 10 au 11 décembre,
volé an musée de Guéret. dans lequel An-
tony Thomas s'introduisit à l'aide d'une
échelle et en passant par une des fenêtres
de la salle des émaux, divers objets de va-
leur, dont sept furent vendus, .à M. de
Lannoy, demeurant à Paris.
4° Le 13 août 1907, dans l'église de La-
guenne (Corrèze), volé une colombe eu-
charistique en cuivre émaillé, de grande
valeur, remontant au XIIIe siècle, qui se
trouvait suspendue entre la nef et le
chœur. Cet objet, n'ayant pu être éoouloé,
fut jeté dans la Seine.
5° Dans la nuit du 4 au 5 septembre, voié
dans l'église d'Ambaza.c, la fameuse ohàsse
de saint Etienne de Muret, qui se trouvait
dans le tabernacle.
François Thomas est accusé de compli-
cité dans le vol de Guéret ; de plus, il est
établi que le frère du chef de la bande a
profité du produit des vols commis par
son aîné, par suite de déopensee exagérées
faites par les tonneliers.
Antoine Faure est accusé de complicité
dans le vol d'Ambazac ; on sait que c'est
lui qui porta sur ses épaudes, jusqu'à la.
station de Saint-Sulpice-Laurière, la châs-
se do saint Etienne de Muret.
Le vol commis, Antony Thomas et Faure
se rendirent en Angleterre et essayèrent de
vendre le précieux objet d'art, qui fut
saisi à Londres et réexpédié à Limoges.
L'antiquaire, Michel Dufay, est inculpé
de complicité ; c'est lui qui indiquait à
Antony Thomas les coups à faire et qui
était chargé d'écouler les objets dérobés.
On sait que les frères Thomas firent de
nombreux voyages dans le! centre de la
France. Ils visitèrent notamment les égli-
ses de Laurière, de Solignac et d'Ambazac
avec l'antiquaire Dufay.
Ils se rendirent encore avec l'antiquaire
clermontois dans la Creuse, le Cantal, la
Haute-Loire, le Loty et la Corrèze. C'est à
Lyon, à Paris et à Gannat qu'ils négociè-
rent la vente des objets provenant des
églises de 'Laurière et de Solignac.
I.'accusation reproche à Dufay d'avoir
fait subir aux châsses de Laurière et de
Solignac certaines modifications avant de
les vendre à M. de Lannoy, antiquaire à
Paris.
On se souvient enfin que la justice fut
mise sur les traces de cette bande d'aigre-
fins après le vol de la châsse d'Ambazac,
par M. Romeuf, grand collectionneur à qui
Antony Thomas avait écrit pouir lui an-
noncer qu'il était en possession d'une
belle châsse remontant au XVIII" siècle ;
il s'agissait de la châsse de' saint Etienne
dé Muret.
L'AUDIENCE
L'audience est ouverie à midi un quart,
devant une sali-2 comble. Des mesures spé-
ciales ont été prises pour le maintien de
l'ordre, qui est assuré par un piquet du
78-3. d'infanterie.
Les quatre accusés prennent place dans
le banc, dans rordre suivant : Jean Anto-
ny Thomas et son frère François-Albert,
Antonin Faure et l'antiquajre Michel Du-
fay.
Dufay est poursuivi comme complice des
actes incriminés.
Au nombre des témoins figurent quel-
ques ecclésiastiques, les antiquaires Ro-
meuf et de Lannoy,. eU'M.. Blof, sous-chef
de la Sûreté à Paris.
Les formalités d'usage étant accomplies,
le président procédés à l'interrogatoire de
Jean-Antony Thomas. Il constate que sa
mère, un instant impliquée dans l'affaire,
fut finalement mise hors de cause.
Quant à son père, aujourd'hui décédé,
c'était, dit-il, un excellent, un parfait hon-
nête homme qui mourut pauvre.
L'accusé s'écrie : « Qui a dit cela ? x
Le président : Cela résulte des docu-t
ments saisis.
L'accusé (avec violence) : La saisie deai
documents, opérée chez moi a été irrégu-
lièrement faite. Tout a été mis au piHage
par les agents.
Le président : Pardon, je vous, invite li
apporter ici toute la modération qui est
indispensable à nos débats. Je ne puis pas,
en tout cas, vous permettre de dire que la
perquisition a été irrégulière.
L'accusé : Le parquet de Ctermont s'est
livré à de machiavéliques machinations
contre moi.
Le président protesta contre cette allé-i
galion, et comme il fait allusion aux con-
naissances photographiques, médicales et
chimiques de Jean Thomas, celui-ci pro-
teste, avec une violence que contient diffi-
cilement le président, qu'il n'existait chez
lui, malgré ce que l'on a dit dans la pres-
se, aucune matière, aucune substance
abortive. Puis, après que le président a
constaté que l'accusé, dont le métier appa-
rent était de fabriquer des cercles de bar-'
riques, s'est laissé aller à dévaliser les
églises, Jean Thomas s'écrie :
« C'est Dufay qui a été mon mentor, qui
m'a guidé, c'est lui qui a fait mon éduca-
tion artistique et archéologique ; c'est par
lui que j'ai été Initié au mystère sacré des
antiquaires, et si je suis ici aujourd'hui,
c'est à Dufay que je le dois ; c'est son
oeuvre. L'élève, je puis le dire, fait hon,
neur au professeur. »
Jean Thomas, s'expliquant sur'les nom-
breux vols qui lui' sont reprochés, recon-
naît notamment avoir pénétré, dans les
premiers jours d'octobre 1905, en pleilr
jour, dans l'église de Solignac, et y avoir:
dérobé des objets précieux. — C'est bien,'
dit le président, nous reviendrons sur tout
cela en détail.
Puis il passe à l'interrogatoire sommaire
du frère cadct de Thomas, François-Albert,1
qui reconnaît s'être rendu' complice des
faits délictueux relevés par l'accusation. <
De son côté, Antonin Faure, qui habitait
Lyon, avoue s'être laissé embrigader par
son ami Jean Thomas.
Sa femme et son enfant habitent en ce.
moment chez leurs parents, à Clermont.
cc Pour moi, dit-il, connaissant les frères
Thomas comme jue les connais, je consi- p
dère que sans Dufay, jamais ceux-ci ne se
seraient laissé aller à commettre les faits
qui tes amènent ici aujourd'hui. »
Dufay parle
Enfin, le président interroge Michel Du-.
fay.
D. - Vous étiez sculpteur et antiquaire t
R. — Parfaitement.
D. — Votre atelier était voisin de celui
de Thomas ? ..,
,
R. — Oui, mais je n'ai jamais eu avec
eux d'autres relations que celles de voit
sinage. ;
D. — Cependant, cela est en contradic-
tion avec les faits., vous avez reconnu
(abolir l;alt de nombreuses tournées en;
province avec Antony Thomas ; c'est donc
que vous le connaissiez. 1
Dufay entre alors dans de longues ex-
plications au sujet de visites qu'il a faites*
dans de nombreux presbytères peur y ac-
quérir des objets anciens. « C'était mon
métier, dit-il. »
Il se défend, toutefois, d'avoir visité au-
cune église dans les communes où il se
Tendit. Il parle cependant d'une visite qu'il
fit à l'église d'Ambazac, où on lui montra
à la sacristie, des objets précieux.
Michel Dufay reconnaît qu'Antony Tho-
mas l'accompagnait dans ces différentes
tournées ; mais il nie absolument être ja-
mais allé avec lui dans le Lot, la Corrèze
et la Creuse.
Antony Thomas s'écrie : « Vous mentez
honteusement 1 » u,
Le président : Oh ! Oh; 1 Plus de modé-
ration, je vous prie. Pas de colloques entre
vous.
Dufay : Je maintiens mon dire.
Le président : Vous avez cependant re«
connu à l'instruction avoir visité trois dé-
partements, ainsi que ceux de la Haute-
Vienne, du Cantal et de la Haute-Loire.
R. — Ce doit être un rnaJentendu.
Me Flanche, avocat d'Antony Thomas,
demande : « Pourquoi vous laisiez-vous
accompagner par Thomas au cours de ces
tournées ? » ;
R. - Je ne me suis jamais fait accom-
pagner par personne. Je l'ai rencontré au
hasard de mes voyages, mais nous ne
sommes jamais partis ensemble de Cler.
mont. Lorsqu'il me rencontrait, il me sui-1
vait. Voilà tout.
Me Planche : Dufay n'a-t-il pas proposé N
divers prêtres d'acquérir des objets pré*
cieux du culte ?
R. — Je l'ai déjà reconnu ; c'est exact
Je suis allé les voir pour cda, ou je leuif
ai écrit.
Comment Thomas opérait
Le président, s'adressant à Antony ThOr
mas : « Du mois d'octobre 1905 au mois de
novembre 1907, vous avez commis une sé.
rie de vols que vous reconnaissez, n'est-ce
pas ? .",-
B. - Parfaitement.
D. — Cela était le résultat d'une organi-
sation, d'une préparation dont l'oprnion pu-.
blique s'est vivement émue.
On en rechercha longtemps et en vain lea
auteurs. Expliquez-nous donc comment
vous procédiez.
R. — Dans les premiers jours d'cctotore,
nous porLimes; Dufay et moi, de Clermont,
pour visiter les églises. Le lendemain da
notre arrivée à Limoges, je me rendis à
Solignac ; je pén(trai en plein jour dans
l'église ; je me dirigeai vers le placard quel
je savais renfermer des objets précieux,
mais ce placard était fermé.
J'introduisis alors une pince entre les
deux portes de ce meuble, à la hauteur de
la serrure, pour produire un écartement,
et deux clous de la serrure- cédèrent.
Le placard ainsi ouvert, je nf emparai
d'un reliquaire en cuivre, classé comma
objet historique sous la mention : « Débris
ajustés d'une châsse en cuivre avec émaux
champ-levé du XIIIe siècle n et d'un autre
reliquaire en cuivre argenté, en forma Ua
Samedi 29 Février 1908. - W 13899
T ii F YT1T mua £ Fi
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL
11, rae du Mail, Paris.
J Et chez MM. LAGRANGE, CERF et 0
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FONDATEUR: EDMOND ABOUT
ADMINISTRATION : 14* RUE DU MAIL. - TÉLÉPHONE tOB sa
Adretscr lettres et maRdatl à l'Administrateur
OPINIONS
L'assistance lain
». 11
Si la loi de 1901 sur les associations,
modifiée en 1902 et en 1904, et pronon-
çant leur dissolution a détruit les con-
grégations enseignantes et contempla-
tives, les congrégations ayant un
but de bienfaisance subsistent tou-
jours. La loi a même déclaré
qu'elles ne pourraient être dissou-
tes ou expulsées qu'après un vote
spécial du Parlement les désignant par-
* ticulièrement et nominativement. Agir
ainsi c'est conserver les congrégations
qui exercent toujours en France leur
propagande confessionnelle sous le man-
teau de la bienfaisance. La vérité ab-
solue, c'est qu'on a été contraint d'agir
de la sorte parce qu'on ne peut substi-
tuer à l'organisation d'assistance reli-
gieuse, une organisation d'assistance
nationale et laïque.
Il en résulte que le devoir de notre
parti est tout tracé : il faut préparer
dès maintenant un plan d'organisation
de l'assistance laïque sous la tutelle de
l'Etat. L'assistance doit être avant tout
un service public et dans certains cas
exceptionnels seulement relever de l'i-
nitiative privée. En tout cas, les ser-
vices d'assistance doivent absolument
échapper à la propagande confession-
nelle, et le seul moyen de donner cette
sécurité à la Démocratie, est d'établir
une organisation nationale de l'assis-
tance afin de soustraire les enfants, les
femmes, les malades, les vieillards,
c'est-à-dire des êtres faibles, soit au
point de vue physique, soit au point de
vue moral, à l'influence confession-
nelle.
Il y a longtemps que les radicaux-so-
cialistes, aujourd'hui au pouvoir, au-
raient dû créer une méthode d'étude et
de discussion, qui parvienne à indiquer
nettement ce que doit être l'assistance
laïque dans une Démocratie telle que la
nôtre.
Pourquoi n'a-t-on pas créé une « Li-
gue française de l'assistance laïque »,
comme on a créé autrefois une « Ligue
française de l'instruction .laïque », qui
a singulièrement bâti le règne de l'ins-
truction primaire laïque en France.
Mais au lieu de faire une oeuvre gé-
nérale, au lieu d'agir en bloc, nos lé-
gislateurs ont procédé par petits pa-
quets. Ils ont fait une loi d'assistance
médicale gratuite, la loi de 1898 sur les
enfants assistés, la loi du 14 juillet
1905 sur l'assistance aux vieillards,
mais ce ne sont là que des parties et
non pas un tout, il n'y a rien d'unifié.
Paris, qui a laïcisé ses hôpitaux, a un
régime différent du régime de la pro-
vince qui subit encore les congréganis-
tes dans ses hôpitaux.
Il nous est pénible de constater que
l'Etat républicain, démocratique et an-
ticlérical fait fournir l'assistance par
des congréganistes appartenant à des
Eglises dont il est séparé. C'est là une
anomalie, je ne dirai pas scandaleuse,
mais frappante. Des républicains, des
démocrates, des anticléricaux des libres
penseurs ont voté les lois que je citais
précédemment ; voici quelques-uns de
leurs effets. D'après la loi de 1898, les
enfants assistés doivent être placés dans
une famille et là, trouver des parents
pour remplacer ceux qu'il n'a pas con-
nus et surtout une vie de famille néces-
saire à l'enfant.
Jusqu'à l'âge de six ans, l'Etat trou-
ve facilement à les placer parce qu'une
mensualité est versée pour l'entretien de
l'enfant ; à partir de treize ans il est
encore très facile de caser l'enfant par-
ce que son travail rapporte. Mais de six
à treize'ans, pendant les années de sco-
larité, l'Etat se trouve réduit et obligé
de les mettre dans des orphelinats con-
gréganistes ! Lorsqu'il s'agit d'enfants
non assistés, orphelins de père ou de
mère, mais pas abandonnés, l'enfant est
livré au contact et à la promiscuité, de
fa rue, et future recrue de l'armée du
crime, il végète abominablement.
Pour cet enfant il y a des orphelinats
laïques, mais ils sont trop chers et il ne
pourra être recueilli que par un orphe-
linat congréganiste gratuitement ou
pour uno somme minime, la. conscience
de l'enfant est accaparée. C'est ce que
nous vaut la situation actuelle ; les
congrégations possèdent seules les éta-
blissements susceptibles de recevoir les
orphelins.
Pour ce qui est de l'assistance aux
vieillards, dix-neuf sur vingt de leurs
hospices sont desservis par dés con-
gréganistes. Les lois votées par la ma-
jorité républicaine sont appliquées par
les bons soins des congrégations !
Il est donc absolument nécessaire d'é-
tablir dès maintenant un plan d'ensem-
Me d'organisation de l'assistance laïque
en France. Contre ce que nous allons es-
sayer de réaliser on nous cite des ar:
ments assez sérieux mais qui ne doi-
vent pas néanmoins arrêter les réfor-
mateurs et les novateurs puisque la
questi :ii n'est pas du totririnsoMA&v Il-
y a d'abord le manque d'argent, mais
on en manquait aussi lorsque l'on ins-
taura en France l'instruction primaire
laïque et obligatoire. Je ferai la même
réflexion en ce qui concerne la seconde
objection qui surgit immédiatement
après la première. Si on manque d'ar-
gent, on manque aussi de personnel.
On a créé un personnel d'enseignement
laïque, on créera un personnel d'assis-
tante laïque.
Ces arguments ne doivent pas nous
arrêter; il faut aboutir - et débarrasser
la France de la dernière tache noire des
congrégations, ces congrégations, qui,
sous le manteau de la charité et de la
bienfaisance, accaparent les consciences
des enfants, vivent du travail des jeu-
nes filles et des femmes dans les ou-
vroirs, troublent les souffrances des ma-
lades et les derniers moments des mori-
bonds dont l'esprit a, jusqu'alors, été
libre de tout dogme.
C'est là un des derniers remparts de
la propagande cléricale qu'il faut dé-
molir.
Pour cela il faut créer des-internats
primaires laïques, des maisons de pro-
tection laïque pour remplacer les ou-
vroirs, des écoles de répression, des hô-
pitaux et des hospices. Il faut surtout
protéger le malade à domicile contre
l'inquisition intéressée de la bonne
sœur, il faut protéger les vieillards, laï-
ciser leurs hospices et éviter aux! mou-
rants libres penseurs, l'emprise cléri-
cale. .,'
On m'objectera que s'il est absolu-
ment nécessaire en principe d'éliminer
des services d'assistance publique l'élé-
ment confessionnel, il n'en est pas de
même en fait, et que si la sœur a de gra-
ves défauts elle a aussi de grandes qua-
lités. Si la sœur tient tout d'abord
compte du point de vue confessionnel
— sur la feuille d'admission dans cer-
tains hôpitaux ont fait mentionner la re-
ligion — et si elle est, de ce fait, très
partiale dans ses soins, elle est, même
pour le malade « païen », très dévouée.
Ce dévouement est un placement sur
l'éternité dont les malades bénéficient
et comme, par une sorte d'égoïsme, elles
attendent cette vie éternelle si douce,
elles ne craignent pas la mort et accep-
tent les besognes les plus malpropres
des hôpitaux.
Ces mêmes objections ont été faites
à la Chambre des députés de Louis-
Philippe, lorsque l'on discutait l'orga-
nisation de l'instruction laïque en Fran-
ce. La loi Guizot trouva en le comte de
Montalembert, l'adversaire le plus vé-
hément. Lui aussi s'apitoyait sur le
sort des enfants qui allaient passer du
frère à l'instituteur, quel meilleur maî-
tre pouvait être pour l'enfant que le
bon frère « Quatre-bras » ou la bonne
sœur, tous deux à l'abri des questions
d'argent et n'ayant aucune attache avec
la vie extérieure, et voués simplement
à l'œuvre de Dieu ! L'avenir lui a donné
tort. Nous avons aujourd'hui un person-
nel enseignant admirable et dont la si-
tuation sociale s'améliore chaque jour.
Comme la France a organisé l'ins-
truction laïque, elle doit organiser l'as-
sistance laïque. Cette organisation, l'E-
tat républicain nous la doit, parce qu'il
y a nécessité absolue ; il faut donner
à ceux qui souffrent, aux faibles, l'as-
sistance en leur évitant des tortures
spirituelles. Notre parti tant épris de
liberté et de justice doit à la Démocra,-
tie française d'en prendre l'initiative.
GEORGES DANCQN.
NUZ GOURNADEC'H
Il y a bien longtemps que
M. de Mun n'est monté à la
tribune de la Chambre ; on
Uisait même que, pour des
raisons de santé, il avait
■déliait!. ;t renoncé à la
parole. Nous aliénons avec plai-
sir que cette voix, -si justement admi-
rée de tous les partis — car, pour re-
connaître la valeur d'un orateur, il
n'est pas nécessaire ; d'être de son avis
— ne s'est pas tue -pour toujours.
M. de Mun vient de faire sa rentrée
comme' orateur. Ce pouvait être une
manifestation très parisienne. Mais le
chef du parti cathoi-ique a préféré, mo
destement, parler à Sainte-Anne d'Au-
ray.
On venait de sacrer à la cathédrale le
nouvel évêque de Quimper et Léon, M.
Duparc. Un banquet était donné en
l'honneur de la cérémonie religJeuse:
C'est à ce banquet que l'orateur chré-
tien a eu l'occasion 'de prononcer un
discours que les journaux réactionnai-
res publient in-extenso et dont nous ne
saurions que nous plaire à vanter les
qualités littéraires.
Quand du porche magnifique de votre ca-
thédrale de Saint-Pol a-t-il dit, vous des-
cendrez sur le chemin de Roscoff, vous dé-
couvrirez, comme un navire - endormi
sur les flots, la grève de nie de Batz.
C'est là que l'apôtre, dont vous êtes le
successeur, délivra du dragon meurtrier l'île
et la terre prochaine.
Il ne le dompta ni par le glaive ni par
le feu, mais par la vertu de son .ét..o-le je-
tée sur le cou- du-serpent : symbole admira-
ble de apostolique ! Saint-Pol,
endàn nfpas- seul quand il accom-
plit cette œuvre de salut. Il était escorté
d'un homme résolu dont, ce jour-là, le
cœur fut si vaillant que ses compagnons
lui donnèrent.. depuis, lç nom de Gournfb
-dec'harnm.e qui né fuit pas. < r".
De cette jolie légende, M. de Mun
tire un symbole. Vous vous y atten-
diez : ,'
Nuz Gournadec'h, l'homme qui ne luit
pas, c'est le jeune catholique breton, dont
nous apportons ici, devant vous, Monsei-
gneur, le témoignage et le serment.
Le paganisme menace aujourd'hui tes
âmes, comme autrefois le dragon dévorait
les corps. Sauvez-lés par la vertu de votre
étole. Vous trouverez, à vos côtés, pour se-
oonder votre apostolat, les .fils de Nuz « qui
marcheront de l'avant », suivant la pro-
messe de Pol, au dernier tableau du mys-
tère, « là tête haute et sans trembler ».
Nous pourrions aisément retourner
le symbole, et le faire servir à la glorï-
fication des idées républicaines. Le dé-
mocrate breton pourrait lui aussi, lui
surtout, s'appeler « rhommeui ne fuit
pas ». Il a accompli' depuis quelque i
années d'admirables conquêtes dans un
pays que l'Eglise croyait avoir asservi
pour jamais. Malgré le cri d'orgueil de
M. de Mun, les catholiques de Bretagne
sont forcés d'avouer qu'ils ont perdu
beaucoup de terrain ; quelques-unes de
leurs citadelles les plus fortes sont tom-
bées aux mains des républicains. Tout
fait prévoir que les cinq départements
d'Armorique seront conquis dans un
délai assez bref à la poétique de gau-
che. Et je serais bien étonné que la
vertu de l'étole de M. Duparc fût assez
puissante pour empêcher cette natu-
relle évolution.
LES OM-DST
Un prédécesseur de Koepenick. -
Mes amis, il est bien difficile de ne
pas imiter quelqu'un, même dans les
genres qui semblent à première vue
inédits. L'aventure prodigieuse du
pseudo-capitaine de Kœpenick excita
jusqu'à radmiration de la cour alle-
mande et, ces jours derniers, le kpon-
prinz après avoir visité le tombeau de
Napoléon, se rendait en pèlerinage de-
vant la vitrine où s'exhibe triomphale-
ment l'uniforme du célèbre escroc. Il
X eut, ce-pendant, un précédent à cette
colossale mystification. Dans la premiè-
re quinzaine de janvier 1860, quatre
des principales banques de Berlin reçu-
rent par écrit l'ordre d'acheter des obli-
gations pour 750 thalers de l'emprunt
5 pour le compte d'un bataillon du
200 régiment d'infanterie. On leur an-
nonça, en outre, qu'à une date certaino
l'adjudant çapitaiILC X,,, viendrait pren-
dre ces titres, sur lesquels les épargnes
'du bataillon devaient être placées.
Au jour dit, un étranger, portant l'u-
niforme de. capitaine, se présenta, en
effet, au guichet des banques, empocha
les titres et remit en échange un bon
sur la caisse militaire générale, muni
des signatures d'usage, des timbres re-
quis et d'une acceptation écrite avec de
l'encre rouge ; il était payable trois
jours après. Inutile d'ajouter que cette
pièce était fausse. L'auteur de cette
audacieuse escroquerie n'a jamais été
découvert.. Enfoncé, le capitaine de
Kœpenick !
La retraite des avocats
Le bâtonnier a reçu une délégation
de La Parlotle, composée de MM. Ou-
dart, Daguin, Languellier et Mme Ma-
ria Vérone.
Les délégués ont remis une lettre an-
nonçant que la pétition en faveur de la
retraite des avocats avait déjà réunis
plusieurs centaines de signatures et
que les fonds provenant de la souscrip-
tion étaient dès maintenant à la dispo-
sition du conseil de l'ordre.
Le bâtonnier leur a fait le meilleur
accueil et leur a promis que le projet de
retraite serait très sérieusement étudié
par le Conseil.
Pas de soldas parisiens à Paris ?
C'est une règle sévère du recrut M-',
ment militaire de répart'r les contin-
gents parisiens chaque année dans des
garni-sons provinciales, aussi lointaines
que possible..On craint avec -raison,
pour ces jeunes gens, les tentations de
la vie facile et de la famille trop pro-
che. Cependant ir fut de tout temps avec
le ciel des accommodements. Il semble
que cette année, on se soit relâché de
la rigueur ancienne. Grâce à de multi-
ples pistons, à des; interventions parti-
culières que M. le ministre de la guerre
est le premier à déplorer, de nombreu-
ses exceptions ont été faites. Et je pour-
rais citer une section d'intendance, à
Paris même, où la plupart des soldats
ont été ramenés d'office de leurs garni-
sons départementales. ,
Le Passant.
————————-—- >1» -
LES PARTISANS DE FRANCO
(De notre correspondant particttlier)
Lisbonne, 27 février.
La nouvelle d'un complot des partisans
de Franco a été démentie, c'est vrai, niais
on ne peut pas dire qu'elle était dénuée de
tout fondemoot, - JI y a eu complot, mais
pas dans le sens que font indiqué certains
journaux. Quelques officiers die l'armée ac-
tive avaient conçu le projet de venger la
mort du roi et 00 prince héritier. Dans ce
bçt, ils avaient" projeté d'envahir les bu-
reVX dev rédaction des journaux républi-
cains et d y massacror tous les rédacteurs.
Le gouvernement ayant eu vent de la
choses a rçris des mesures à tempsv Les
troupes avaient été consignées dans la ca-
serne et autour de. certains journaux on
avait établi un service d'agents
-..
LETTRE D'AUTRICHE
(De notre correspondant particulier)
M. Funck-Brentano à Prague
Vienne, 27 février.
Les sociétaires de l'Alliance française de
Prague et grand nombre de personnes in-
vitées furent charmés par la parole claire,
abondante et élégante du distingué et sa-
vant conservateur des manuscrits de l'Ar-
senal, qui leur fit une conférence sur Paris.
à travers tes dges; Il étudia l'histoire des
origines et. le développement progressif de
Paris, reconnut une origine féodale déve-
loppée ensuite par l'organisation commer-
ciale des célèbres Nantes parisiens - dont la'
bourse de commerce forme l'origine' du Con-
seil municipal. L'orateur passa successive-
ment en revue le Paris des rois, le Paris
religieux, le Paris municipal et termina son
instructive et captivante étude par le mou-
vement de la Révolutionet du Paris roman-
tique. Celui qui sait l'intérêt que les Tchèquc-
portent à tout ce qui se fait en France et
à Paris, comprendra l'émotion profonde et
durable que cette magnifique conférence a
produit sur le public pragois.
Tfoir en 2e pagre :
La séance des Chambres
Les bandits de Langon (2e audience).
NOUVELLE EMINENCE CRISE
(De notre correspondant particulier)
Berlin, 27 février.
A la Cour on ne parle que d'une nouvelle
Eminence grise qui, depuis quelque temps,
aurait pris auprès de l'empereur la place
du prince Eulenbourg. C'est le prince Fuers-
kenberg. Il accompagnera l'empereur à Cor-
fou et lui tiendra compagnie pendant tout
son séjour. On cherche à aeviner par quel
moyen le prince Fuerskenberg a pu pren-
dre un tel ascendant sur le monarque, lui
qui ne sait ni composer des complots, ni
les chanter comme d'Eulenbourg.
D'aucuns croient qu'il sera bientôt ap-
pelé à prendre la succession du chancelier,
prince de BÜlow, mais des gens bien ren-
seignés affirment que M. de Fuerskenberg
préfère rester dans la coulisse.
-■
LA JOURNEE POLITIQUE 1
Le conseil des ministres
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin à l'Elysée, sous la présidence de M.
Faîtières.
Lès ministres se sont d'abord occupés
des affaires du Maroc.
Le ministre de la .guerre a donné lecture
d'une dépêche qu'il a adressée au général
d'Amade pour lui demander des renseigne-
ments sur l'étendue des opérations qu'il a
projetées et sur les forces_dont il dispose.
Jusqu'au moment de la fin du conseil,
aucune réponse du général d'Amade n'é-
tait encore arrivée. En prévision du cas
où le commandant du corps expédition-
naire du Maroc demanderait quelques ren-
forts, des troupes supplémëntaires sont
prêtes à lui être envoyées. Ces renforts se-
raient empruntés pour deux tiers aux gar-
nisons d'Algérie et pour un tiers à celles
de Tunisie.
Il résulte des renseignements communi-
qués au conseil qu'un navire de guerre
français est en station devant Safi.
.Le..-conseil s'est ensuite occupé d'une de-
mande supplémentaire de crédit de deux
millions pour les victimes des départe-
ments inondés.Le conseil statuera sur cette
question dans sa prochaine réunion.
Le conseil des ministres ne se réunira
pas avant jeudi prochain, 5 mars, sauf
l'imprévu, bien entendu.
M. Clemenceau ira-t-il dans le Var ?
Le président du conseil avait, dit le
Temps, accepté en principe de se rendre
dans le Var pour inaugurer une école et
d'autre part s'occuper d'une question d'ad-
duction d'eaux de source. Si la session par-
lementaire se termine à temps, le prési-
dent du conseil ira dans le Var durant les
derniers jours de mars ; sinon, le voyage
sera ajourné. Car il a été décidé que les
ministres ne se déplaceraient pas durant
le mois d'avril, à cause des élections-mu-
nicipales.
Les mineurs de Saint-Eloi
M. René Viviani, ministre du travail, a
reçu une délégation des mineurs de Saint-
Eloi qui lui a été présentée par M. Va-
renne, député du Puy-de-Dôme.
renne, délégation a soumis au ministre un
La
cahier de yevendicatifffis portant notam-
ment sur l'augmentation des salaires, la
reprise de quelques mineurs renvoyés, l'ac-
célération de la descente dans les puits et
de la remonte, les allocations de charbon
aux veuves, etc.
Le ministre, à la suite de cette première
entrevue, a convoqué au ministère M. Léon
Lévy, directeur des mines de Saint-Eloi et
des établissements métallurgiques Châtil-
lon-Commentry.
Après un assez long entretien, M. Léon
Lévy a déclaré que la Compagnie était prê-
te, au moyen d'installations nouvelles et
qui pourront fonctionner dans deux mois,
à opérer plus rapidement la descente des
ouvriers ; d'autre part, la Compagnie est
disposée, d'ici à une quinzaine de jours, à
augmenter le salaire des manœuvres du
fond.
M. Léon Lévy s'est déclaré; en outre,
prêt à demander vendredi prochain au
conseil d'administration de la Compagnie
en faveur des veuves des ouvriers la subs-
titution d'une allocation complètement gra-
tuite de six tonnes de charbon à l'alloca-
tion actuelle de six tonnes dont trois ton-
nes payées à raison de un franc la tonne.
M. Viviani a fait connaître à la déléga-
tion des mineurs, qui était venue l'entre-
tenir de ses revendications, le résultat de
son entrevue avec M. Léon Lévy.
Les travailleurs malgaches
Plusieurs journaux ont annoncé que M.
Augagneur, gouverneur-général de Mada-
gascar, était entré en négociations avec le
gouverneur: de l'Afrique du Sud pour l'en-
voi de travailleurs malgaches dans lu;colo-
nie anglaise.
Nous sommes autorisés a annoncer tout
au contraire, que M. Augagneur ayant eu
connaissance de ces bruits, a câblé au dé-
partement des colonies pour demander ce
qu'il y avait de fondé dans ce projet auquel
il est entièrement opposé.
ENCORE UN PROCES SENSATIONNEL
LES - MMrcîjg anx Ai
THOMAS ET SA BANDE
L'audience d'hier. - Les deux principaux toinsJ Antony
.: Thomas et l'antiquaire Dufay aux prises
Limoges, 27 février.
C'est aujourd'hui que comparaissent de-
vant las cour d'assises de la Haute-Vienne
les fameux cambrioleurs d'églises dont les
exploits retentissants occupèrent si large-
ment l'opinion publique flurant les der-
niers mois de. l'année dernière.
Les aecusés sont au nombre de quatre,
savoir :
1° Thomas Jean, dit Antony. âgé de 29
ans, né le 5 septembre 1878, à Qermont-
Ferrand ;
2° Thomas François-Albert, âgé de 27
ans, né le, 24 mars 1880 à Clermont-Fer-
rand ;
3° Faure Antoine, âgé de 28 ans, né le
29 mars 1879, à Aukiat, arrondissement de
Clermont-Ferrand ;
4° Dufay Michel, âgé de 54 ans. né le 27
mai 1853 à Qermont-Ferrand. Il exerce
le métier d'antiquaire.
Les frères Thomas sont des tonneliers.
Faure était à leur service.
Les quatre accusés sont respectivement
défendus par M68 Planche, du barreau de
Clermont, Python et Gentitlly. du barreau
de Paris, et enfin par M* Duteillet, ancien
bâtonnier du barreau de Limoges.
Les débats sont présidés par M. le con-
seiller Ducros.
M. l'avocat général Dueher occupe le
siège du ministère public.
On prévoit" que les débats occuperont
cinq ou six audiences, une soixantaine de
témoins, - tant à charge qu'à décharge,
ayant été cités.
Une série de vols
Voici succinctement relevés, d'après
l'arrêt de renvoi de la chambre des mises
en accusation, les faits reprochés aux dé-
valiseurs d'églises :
Antony Thomas est accusé d'avoir :
1° Dans le courant du mois d'octobre
.1905, volé, dans l'église de Solignac,. un
reliquaire en cuivre classé comme objet
historique, et un autre reliquaire en cuivre
rurgent) en forme de chefv contenant les
reliques de saint Théau.
Ces deux objets se trouvaient dans un
placard fermé qui fut ouvert à l'aide d'une
pince ;
2° A la même époque et, croit-on, -le len-
demain, volé dans l'église de Laurière,
une châsse en cuivre émaillé du XIIIe isiè-
cle, une custode en cuivre et un reliquaire,
après avoir brisé le cadenas de la grille en
fer qui protégeait les reliques.
Les objets votés à Soflignac et les deux
premiers objets volés à Laurière étaient
classés comme objets historiques.
3° Dans la nuit du 10 au 11 décembre,
volé an musée de Guéret. dans lequel An-
tony Thomas s'introduisit à l'aide d'une
échelle et en passant par une des fenêtres
de la salle des émaux, divers objets de va-
leur, dont sept furent vendus, .à M. de
Lannoy, demeurant à Paris.
4° Le 13 août 1907, dans l'église de La-
guenne (Corrèze), volé une colombe eu-
charistique en cuivre émaillé, de grande
valeur, remontant au XIIIe siècle, qui se
trouvait suspendue entre la nef et le
chœur. Cet objet, n'ayant pu être éoouloé,
fut jeté dans la Seine.
5° Dans la nuit du 4 au 5 septembre, voié
dans l'église d'Ambaza.c, la fameuse ohàsse
de saint Etienne de Muret, qui se trouvait
dans le tabernacle.
François Thomas est accusé de compli-
cité dans le vol de Guéret ; de plus, il est
établi que le frère du chef de la bande a
profité du produit des vols commis par
son aîné, par suite de déopensee exagérées
faites par les tonneliers.
Antoine Faure est accusé de complicité
dans le vol d'Ambazac ; on sait que c'est
lui qui porta sur ses épaudes, jusqu'à la.
station de Saint-Sulpice-Laurière, la châs-
se do saint Etienne de Muret.
Le vol commis, Antony Thomas et Faure
se rendirent en Angleterre et essayèrent de
vendre le précieux objet d'art, qui fut
saisi à Londres et réexpédié à Limoges.
L'antiquaire, Michel Dufay, est inculpé
de complicité ; c'est lui qui indiquait à
Antony Thomas les coups à faire et qui
était chargé d'écouler les objets dérobés.
On sait que les frères Thomas firent de
nombreux voyages dans le! centre de la
France. Ils visitèrent notamment les égli-
ses de Laurière, de Solignac et d'Ambazac
avec l'antiquaire Dufay.
Ils se rendirent encore avec l'antiquaire
clermontois dans la Creuse, le Cantal, la
Haute-Loire, le Loty et la Corrèze. C'est à
Lyon, à Paris et à Gannat qu'ils négociè-
rent la vente des objets provenant des
églises de 'Laurière et de Solignac.
I.'accusation reproche à Dufay d'avoir
fait subir aux châsses de Laurière et de
Solignac certaines modifications avant de
les vendre à M. de Lannoy, antiquaire à
Paris.
On se souvient enfin que la justice fut
mise sur les traces de cette bande d'aigre-
fins après le vol de la châsse d'Ambazac,
par M. Romeuf, grand collectionneur à qui
Antony Thomas avait écrit pouir lui an-
noncer qu'il était en possession d'une
belle châsse remontant au XVIII" siècle ;
il s'agissait de la châsse de' saint Etienne
dé Muret.
L'AUDIENCE
L'audience est ouverie à midi un quart,
devant une sali-2 comble. Des mesures spé-
ciales ont été prises pour le maintien de
l'ordre, qui est assuré par un piquet du
78-3. d'infanterie.
Les quatre accusés prennent place dans
le banc, dans rordre suivant : Jean Anto-
ny Thomas et son frère François-Albert,
Antonin Faure et l'antiquajre Michel Du-
fay.
Dufay est poursuivi comme complice des
actes incriminés.
Au nombre des témoins figurent quel-
ques ecclésiastiques, les antiquaires Ro-
meuf et de Lannoy,. eU'M.. Blof, sous-chef
de la Sûreté à Paris.
Les formalités d'usage étant accomplies,
le président procédés à l'interrogatoire de
Jean-Antony Thomas. Il constate que sa
mère, un instant impliquée dans l'affaire,
fut finalement mise hors de cause.
Quant à son père, aujourd'hui décédé,
c'était, dit-il, un excellent, un parfait hon-
nête homme qui mourut pauvre.
L'accusé s'écrie : « Qui a dit cela ? x
Le président : Cela résulte des docu-t
ments saisis.
L'accusé (avec violence) : La saisie deai
documents, opérée chez moi a été irrégu-
lièrement faite. Tout a été mis au piHage
par les agents.
Le président : Pardon, je vous, invite li
apporter ici toute la modération qui est
indispensable à nos débats. Je ne puis pas,
en tout cas, vous permettre de dire que la
perquisition a été irrégulière.
L'accusé : Le parquet de Ctermont s'est
livré à de machiavéliques machinations
contre moi.
Le président protesta contre cette allé-i
galion, et comme il fait allusion aux con-
naissances photographiques, médicales et
chimiques de Jean Thomas, celui-ci pro-
teste, avec une violence que contient diffi-
cilement le président, qu'il n'existait chez
lui, malgré ce que l'on a dit dans la pres-
se, aucune matière, aucune substance
abortive. Puis, après que le président a
constaté que l'accusé, dont le métier appa-
rent était de fabriquer des cercles de bar-'
riques, s'est laissé aller à dévaliser les
églises, Jean Thomas s'écrie :
« C'est Dufay qui a été mon mentor, qui
m'a guidé, c'est lui qui a fait mon éduca-
tion artistique et archéologique ; c'est par
lui que j'ai été Initié au mystère sacré des
antiquaires, et si je suis ici aujourd'hui,
c'est à Dufay que je le dois ; c'est son
oeuvre. L'élève, je puis le dire, fait hon,
neur au professeur. »
Jean Thomas, s'expliquant sur'les nom-
breux vols qui lui' sont reprochés, recon-
naît notamment avoir pénétré, dans les
premiers jours d'octobre 1905, en pleilr
jour, dans l'église de Solignac, et y avoir:
dérobé des objets précieux. — C'est bien,'
dit le président, nous reviendrons sur tout
cela en détail.
Puis il passe à l'interrogatoire sommaire
du frère cadct de Thomas, François-Albert,1
qui reconnaît s'être rendu' complice des
faits délictueux relevés par l'accusation. <
De son côté, Antonin Faure, qui habitait
Lyon, avoue s'être laissé embrigader par
son ami Jean Thomas.
Sa femme et son enfant habitent en ce.
moment chez leurs parents, à Clermont.
cc Pour moi, dit-il, connaissant les frères
Thomas comme jue les connais, je consi- p
dère que sans Dufay, jamais ceux-ci ne se
seraient laissé aller à commettre les faits
qui tes amènent ici aujourd'hui. »
Dufay parle
Enfin, le président interroge Michel Du-.
fay.
D. - Vous étiez sculpteur et antiquaire t
R. — Parfaitement.
D. — Votre atelier était voisin de celui
de Thomas ? ..,
,
R. — Oui, mais je n'ai jamais eu avec
eux d'autres relations que celles de voit
sinage. ;
D. — Cependant, cela est en contradic-
tion avec les faits., vous avez reconnu
(abolir l;alt de nombreuses tournées en;
province avec Antony Thomas ; c'est donc
que vous le connaissiez. 1
Dufay entre alors dans de longues ex-
plications au sujet de visites qu'il a faites*
dans de nombreux presbytères peur y ac-
quérir des objets anciens. « C'était mon
métier, dit-il. »
Il se défend, toutefois, d'avoir visité au-
cune église dans les communes où il se
Tendit. Il parle cependant d'une visite qu'il
fit à l'église d'Ambazac, où on lui montra
à la sacristie, des objets précieux.
Michel Dufay reconnaît qu'Antony Tho-
mas l'accompagnait dans ces différentes
tournées ; mais il nie absolument être ja-
mais allé avec lui dans le Lot, la Corrèze
et la Creuse.
Antony Thomas s'écrie : « Vous mentez
honteusement 1 » u,
Le président : Oh ! Oh; 1 Plus de modé-
ration, je vous prie. Pas de colloques entre
vous.
Dufay : Je maintiens mon dire.
Le président : Vous avez cependant re«
connu à l'instruction avoir visité trois dé-
partements, ainsi que ceux de la Haute-
Vienne, du Cantal et de la Haute-Loire.
R. — Ce doit être un rnaJentendu.
Me Flanche, avocat d'Antony Thomas,
demande : « Pourquoi vous laisiez-vous
accompagner par Thomas au cours de ces
tournées ? » ;
R. - Je ne me suis jamais fait accom-
pagner par personne. Je l'ai rencontré au
hasard de mes voyages, mais nous ne
sommes jamais partis ensemble de Cler.
mont. Lorsqu'il me rencontrait, il me sui-1
vait. Voilà tout.
Me Planche : Dufay n'a-t-il pas proposé N
divers prêtres d'acquérir des objets pré*
cieux du culte ?
R. — Je l'ai déjà reconnu ; c'est exact
Je suis allé les voir pour cda, ou je leuif
ai écrit.
Comment Thomas opérait
Le président, s'adressant à Antony ThOr
mas : « Du mois d'octobre 1905 au mois de
novembre 1907, vous avez commis une sé.
rie de vols que vous reconnaissez, n'est-ce
pas ? .",-
B. - Parfaitement.
D. — Cela était le résultat d'une organi-
sation, d'une préparation dont l'oprnion pu-.
blique s'est vivement émue.
On en rechercha longtemps et en vain lea
auteurs. Expliquez-nous donc comment
vous procédiez.
R. — Dans les premiers jours d'cctotore,
nous porLimes; Dufay et moi, de Clermont,
pour visiter les églises. Le lendemain da
notre arrivée à Limoges, je me rendis à
Solignac ; je pén(trai en plein jour dans
l'église ; je me dirigeai vers le placard quel
je savais renfermer des objets précieux,
mais ce placard était fermé.
J'introduisis alors une pince entre les
deux portes de ce meuble, à la hauteur de
la serrure, pour produire un écartement,
et deux clous de la serrure- cédèrent.
Le placard ainsi ouvert, je nf emparai
d'un reliquaire en cuivre, classé comma
objet historique sous la mention : « Débris
ajustés d'une châsse en cuivre avec émaux
champ-levé du XIIIe siècle n et d'un autre
reliquaire en cuivre argenté, en forma Ua
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