Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-01-28
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 28 janvier 1908 28 janvier 1908
Description : 1908/01/28 (N13836). 1908/01/28 (N13836).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75710886
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/06/2013
Tï- X3830.1- 7 Pltiviase Anlis; tWTTn l lll 1 * ■ IICTW TiM IIIHIIUlrr r Mardi 28 Janrier 1908._NM383ff
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL1
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Et chez MM. LAGRANGE, CERF eto
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ADMINISTRATION ;14* RUE DU MAtL. - TÉLÉPHONE 1 OC 82
--- 'W"-- Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
-
omwiojsrs
LE PARLEMENT
--" COMMERCIAL
Le litre est peut-être ambitieux ; il
constitue d'ailleurs un engagement et
un programme. L'idée est juste. Les
Chambres ont beaucoup a faire, non
seulement parce que nos promesses
électorales ont été nombreuses eL que
itout honnête homme qui a promis doit
faire honneur à sa parole, mais paree
ue notre mandat général nous impose
l'étroit devoir d'améliorer largement la
situation morale, politique et économi-
que de notre pays.
Certes, dans les conseils de la na-
tion, d'où la loi sort majestueuse et
loute-puissante, les bonnes volontés ne
manquent pas. Les compétences sont
moins évidentes. Elles existent, je di-
rais même volontiers, pour rendre
hommage à la yérité, qu'elles foison-
nent. Mais à côté de réelles valeurs,
flue de timidités qui les empêchent d'é-
ciorc i Jamais l'adage, que la modestie
est l'inévitable compagne du vrai mé-
rite, ne s'est mieux vivifié que dans la
Chambre actuelle.
- De là deux inconvénients. Tantôt les
césures nécessaires, celles qui squt ré-
clamées par l'agriculture, le commerce,
l'industrie, attendent vainement leur
jour. Tantôt elles sont votées à la. hâte,
à la suite de débats confus, et sont ré-
digées de telle sorte, accompagnées de
si singulières prescriptions que leurs
bienfaits demeurent problématiques. Le
principe est excellent, l'application en
'est souvent fâcheuse,
Un de nos confrères, publiciste vi-
goureux et actif, M. Jean Duruskam, a
pensé qu'il y avait là sans doute quel-
que chose à faire. Les faibles se lamen-
tent comme des enfants ; les vrais
hommes agissent.
- Notre confrère a donc eu l'idée 'de
réunir en une vaste assemblée, décorée
du nom de Parlement commercial, les
principales individualités du commer-
ce et des diverses industries françaises.
Dans cette réunion, d'où la politique est
exclue, on examine tous les problèmes
'd'ordre commercial et industriel posés
devant l'opinion publique. La première
séance a eu lieu samedi. On y a décidé
que le Parlement commercial tiendrait
ses assises quatre fois par an. Des ci-
toyens, appartenant aux divers partis
politiques, se sont réunis sur ce terrain
neutre. lis peuvent réaliser une bonne
et utile besogne"
L'assemblée a placé à sa tête notre
ami Tirribillot, grand industriel à Can-
nes, républicain ferme et dévoué des
heures les plus difficiles, radical-socia-
liste de bon aloi: toutes les nuances,
peutrêtre même toutes les opinions,
sont représentées au bureau, pour con-
server à cet important groupement son
yéritable caractère. ,. -
Notre industrie et notre commerce
souffrent, notre agriculture également.
Peut-être leur manquait-il un organe
autorisé pour exprimer leurs doléan-
ces. Nul d'entre nous ne saurait, sans
ingratitude, méconnaître les grands et
innombrables services rendus, non seu-
lement à la cause républicaine, mais en-
core aux intérêts commerciaux, agrico-
les et industriels de notre pays, par ces
grandes associations radicales-socialis-
tes que nous avons toujours trouvées
au premier rang, à côté de nous, aux
heures de bataille. Leur passé est im-
muablement mêlé à l'histoire de notre
parti, et nous avons la ferme confiance
,q.ué leur rôle ne fera que grandir dans
l'avenir.
Le Parlement commercial n'est pas,
ne saurait être pour el'es, à aucun
point de vue, un rival. Bon nombre de
ses adhérents font partie de ces asso-
ciations. Il y a là deux groupements
différents, ayant chacun un but diffé-
rent. Il n'existe aucun antagoniste entre
l'un et l'autre et l'on peut, selon son
goût personnel et ses opinions, faire
son devoir dans les deux ou se confiner
exclusivement dans l'un ou l'autre.
Et ce n'est pas trop, des efforts de
lous. La France a une fâcheuse tendan-
ce au fonctionnariat. La vie y est mo-
deste, mais presque sûre. Peu d'aléa :
une retraite.
Loin de nous de médire des fonction-
naires. Il en faut. Réduits au nombre
strictement nécessaire, ils ont, comme
tous les autres facteurs -de la produc-
tion nationale, leur utilité économique.
Mais, passé ce nombre, ils sont nuisi-
bles ; ils constituent pour le contribua-
ble un lourd fardeau 'dont il est Néces-
saire de l'allégen.
Si le commerce, l'industrie, l'agricul-
lure attiraient à elles tous ces fonction-
naires encombrants, qui sont en sur-
nombre, gardant les uns iians la métro-
£ 0*^ expédiantes au\rc$ U"olonist.
à titre de contremaîtres, d'ouvriers,
d'ingénieurs, de représentants commer-
ciaux. de chefs de comptoirs, la pros-
périté de la Franco recevrait im essor
considérable. Mais il faut, précisément
pour cela, que ces cléments de la ri-
chesse nationale soient protégés par
d'utiles lois à l'élaboration desquelles le
nouveau groupement travaillera avec
efficacité.
Nous sera-t-il permis d'aller jusqu'au
fond de notre pensée 1 if nous semble,
si notre sentiment ,est exact, qu'entre le
capital et le travail les conflits naissent
surtout de malentendus. L'avenir est
dans la conciliation. Le Parlement com-
mercial peut, à mesure que son cercle
d'action s'élargira, devenir le centre des
discussions cordiales entre le capital et
le travail, chacun d'eux exposant ses
désirs, ses vœux, ses espérances, cher-
chant loyalement son intérêt sans vou-
loir absorber l'intérêt légitime de son
collaborateur. De là naîtront enfjn les
conciliations nécessaires.
La tâche est grande, elle est de bonne
haleine ; elle n'est pas au-dessus du
zèle ni des forces de tous ces hommes
de bonne volonté.
LOUIS MARTIN.
L'ANGOISSE DU DICTATEUR
Une dépêche nous apprend
que le chef du gouvernement
argentin a dissous la Cham-
bre, et qu'il a décidé de lever
les impôts pendant un an
l'saris aucune consultation du
Parlement. Peu nous importe la nature
du différend qui existe entre les légis-
lateurs argentins et le pouvoir exécu-
tif ; peu nous importe aussi la façon
fantaisiste dont on pratique, dans l'A-
mérique du Sud, la politique en géné-
ral et le régime républicain en particu-
lier, Un coup. d'Etat est toujours une
vilaine opération. Ajoutons : une mau-
vaise affaire..
Ceux qui auraient des doutes sur ce
dernier point n'ont qu'à consulter M.
Franco, le dictateur du Portugal. N'an-
nonce-t-on pas que depuis longtemps,
sur les conseils de la police, il couche
chaque nuit dans un lit et sous un toit
différents pour dépister les meurtriers
acharnés — pense-t-il ;.- à détruire sa
précieuse existence ?
M. Franco ne pouvait pas subir le
contrôle d'un Parlement ; il a mis le
Parlement à la porte. Maintenant, il
gouverne seul ; il est le maître unique
de son pays. Son autocratie est plus
complète que celle des anciens rois ab-
solus qui avaient au moins des colla-
borateurs, des ministres, qui souvent
régnaient plus qu'ils ne gouvernaient.
- Si M. Franco n'a pas la couronne, il
réunit tous les pouvoirs dans sa main.
Comme il doit être heureux 1
Pardon : comme il est malheureux 1
Quel contraste 1 A côté de M. Franco,
'dictateur qui a supprimé la représenta-
tion nationale, Nicolas II, avec sa Dou-
ma, Guillaume II, avec son Reichstag
sont des potentats limités, et, dans quel-
que mesure, impuissants. Et cet hom-
me auquel les souverains les plus auto-
ritaires peuvent porter envie n'a pas le
droit de rentrer dans sa maison, de
dormir dans son lit. Il est le chemineau
du pouvoir, le vagabond de la dicta-
ture:
Peut-être a-t-il tort de trembler. Peut-
être personne n'a-t-il rêvé sa mort.
Peut-être les complots qui l'affolent
sont-ils imaginaires. Il suffit que le re-
mords l'assaille pour qu'il soit le plus
misérable des êtres
A l'époque actuelle, la démocratie est
le droit certain, la liberté, le fait iné-
luctable.
Les dictateurs 'ne sont pas seulement
nuisibles à ceux qui les subissent. Us
étouffent dans l'atmosphère de leur prfj*
pre tyrannie.
—
LES ON-DITî
L'heure sociale
Nous avions déjà rheure de Paris et
celle des départements, celle de l'Eu-
rope centrale, l'heure de la Bourse,
sans compter l'heure du canon du Pa-
lais-Royal, légèrement désuète. Il était
réservé à M. Jaurès, qui sait tout, peut
tout et dit tout, suivant la formule cou-
rante, d'unifier même la mesure du
temps. Il a créé Vheure sociale, dont le
triomphe concordera avec rétablisse-
ment universel de la caserne collecti-
viste. Quésaco ? direz-vous.
- L'heure sociale est, paraît-il. leDfQl.
aUIt que donne en une heure métrono-
mique un travail d'intensité et d'habi-
leté moyennes, dans une profession, un
milieu, avec un outillage déterminés.
Elle sera la règle de l'ouvrier enrégi-
menté. Par exemple, pour un cordon-
nier, l'heure sociale serait une moitié
de soulier si cent cordonniers de sa ré-
gion, pareillement outillés, fabriquent
cent demi-souliers par heure ; mais M.
Jaurès ajoute qu'il donnera huit bons
de consommation à valoir sur les ma-
gasins sociaux, à l'ouvrier qui aura
doublé cette production et deux seule-
ment à célui qui aura-employé Je Uou-
ble de temps, afin de ne pas fournir
une prime à la paresse et à la mala-
dresse. Sur le salaire, en outre, seront
retenus les frais d'administration so-
ciale accrus des services généraux que
paye -l'impôt actuel, de l'entretien des
incapables, des mille imprévus d'une
organisation fantaisiste
Ces tombes de Louvois et de Coudé
M. Dorbon nous écrit qu'il a quel-
ques raisons de douter de la présence,
dans le cimetière de sa ville natale, des
restes authentiques de Pichegru. Une
erreur a dû être commise lors de
l'exhumation du cimetière parisien de
Sainte-Catherine. C'est une question à
examiner. Nous y reviendrons.
D'autre part, notre fidèle lecteur, M.
Boissard, nous signale, à propos de sé-
pultures illustres, l'état Rlus que mo-
deste de la tombe du premier Condé à
Vallery, dans l'Yonne. - Quelle différen-
ce avec la pompe du tombeau de Lou-
vois. à Tonnerre, chef-d'oeuvre de Girar-
don ! Le corps du grand ministre fut
transféré du couvent des Capucines en
i804,. lorsque le couvent fut démoli
pour l'ouverture de la rue Napoléon,
plus tard rue de la Paix. Il fut placé
dans l'église tfe cet admirable Hôtel
Dieu de Tonnerre, que Mme de Sévigné
comparait à Notre-Dame. C'est dans la
salle des malades que l'ambassadeur de
Charles-Quint déclara la guerre à Fran-
çois Ior en 1542.
Il y a là des merveilles, un gnomon
intéressant construit par trois savants
en 1785-87, un chartrier précieux, de
belle? statues des quatorzième et quin-
zième siècles, le mausolée de la reine
Marguerite de Bourgogne, belle-sœur de
Saint-Louis, par Bridan, quantité d'au-
tres tombes appartenant à l'aristocratie
du pays, enfm le fameux Saint-Sépul-
cre, œuvre de Jean Michel et de Geor-
ges de la Sonnette, élèves de Claus
Huter, qui fit le Puits de Moïse et .'es
tombeaux des ducs de Bourgogne à Di-
jon,
Le Passant
» —i
LA JOURNEE POLITIQUE
Le recrutement du jury
M. Briand, ministre de la justice, prépa-
re une modifioation au mode de recrute-
ment cm jury.
La loi stipule que « ne peuvent être juirés
les domestiques et serviteurs à gages ».
Par suite de l'interprétation de ce texte, on
a rangé tous les salariés, employés, ou-
vriers, dans la catégorie des serviteurs à
gages.
M. Briand estime que la loi a seulement
voulu exclure les domestiques ne présen-
tant pas les qualités d'indépendance néces-
saires.
La représentation proportionnelle
Le groupe socialiste dijonnais commence
à se préoccuper des élections municipales
de mai ppocham. Désireux de voir appli-
quer le système de la représentation pro-
portionnelle, il vient de faire parvenir aux
présidents des divers partis politiques di-
jonnais la lettre suivante :
- « Monsieur le président,
Dans sa dernière réunion, le groupe so-
cialiste dijonnais a décidé, à l'unanimité
moins 2 voix et une abstention, de faire
l'essai loyal du système de la représenta-
tion proportionnelle appliquée aux élec-
tions municipales prochaines, et il a chargé
la commission du groupe d'en informer of-
ficiellement tous les partis sans exception,
en les priant de vouloir bien s'associer à
la tentative du groupe socialiste.
« Nous avons donc l'honneur de vous
transmettre cette décision, en vous priant
de la soumettre le plus tôt possible <à votre
groupe.
« Nous serions heureux de connaître les
décisions qu'il croira devoir prendre fin fé-
vrier.
« Veuillez agréer, etc. a
♦
LA MISSION LAIOUE FRANÇAISE
Hier après midi, à deux heures et demie,
la Mission laïque française (association
pour !la propagation de renseignement ltü.
que aux .colonies et à l'étranger) a tenu
son assemblée générale dans lamphithéà-
tre Richelieu, à la Sotrbonne.
M. Aulard, professeur à l'UniversHé de
Ptaris, présidait, assisté de ¡MM. Camille
Bloch, vice-président, de Mme Potol, vice-
pJ"lésiù.ente, de M. Bénardi secrétaire gé-
néral, et de M. Terquicn,, trésorier.
Cette assemblée générale a été consacrée
aM. Hemri Brkstsotn, président die la Cham-
bre des députés, est venu ensuite présidter
une conférence faite par M. Auîard sur la
Mission laïque. Les ministres de l'instruc-
tion publique et des affaires étrangères
s'étaient fait représenter.
A.u oourgNTune miSlSion dont il fut chargé
en Orient, M. Aulard y a étudié l'organi-
sation de l'enseignement qui, aujourd'hui,
revêt un caractère trop religieux, et il fou-
rme des vœux pour l'extension et le dÓvc-
fappeanoni. tie l'enseignement laïque en
Orient.
L'assemblée a vivement applaudi le con-
férencier. M. Henri Brisson a félicité cihta-
leureusement M. AuJard et a rappelé qu'il
ftt, voilà .près d'un dëmi-tsiècl-e a, un vovwîD
sur les rives du Nil. Pui-s il a fait réloge
de lloeuivm de la Mission laïque en Orient
et a retracé toutes les difficultés auxquel-
les elle se heurte. Il termine ainsi :
» Et nos guerres de religion, à Dous, de
quieJtes horreurs n'ont-elles pas couvert nos
contrées 1
« Faut-il s'étonner alons que reprit tou-
roaân, désertant ttos sentiers ait cherché
ailLeuirs que dans la foi, dams Je dogme, la
règle irlffl mœurs et du gou^ernemeitt des
soiciétés ? Non, ce n'est point d'un effort
impie qu est née rind^ûEidjuieo (Jo la mo-
rafe, de la scIence, do la civilisation. C'efet
d'une médjtaWoTi - "YbératriCe qu'est sortie
cette séctsa.lÏ()n progressive dont VOUA
écrivez, messieurs, un des chiaipitres sous
Je nom de Mission laïque.
u Dites-nous' donc, dner monsieur AuteundD.
dites-nous ce que VOUIS avez vu, ce que
VOUIS avez fait, ce que vous nous proposiez
de faire au nom de la France répuSîicaine,
respectueuse de toutes les croyanoes, dont
legénie et les forces ne peuvent plus, ne
doivent plue seitvir que la science et la li-
oorté. M
Le .soir, à sept heures et demie, un ban-
quet a réuni les adhérents et les émis de
la Mission française.
(Voir la suite en DEUXIEME EDITION)
l i —
LES MURS DE LUCOUES
: Les détxuiru-t'On ?
Depuis quelque temps, les amateurs
d'antiquités ,Jes amis des arts, les ar-
chitectes, les ingénieurs, les militaires,
même les poètes sont dans la plus vive
inquiétude. Il est question de percer les
murs de Lucques et de détruire ainsi
l'ensemble harmonieux formé autour
de la ville par cette merveille admirée
de tous qu'on appelle les murs de Luc-
ques Mura lucchese.
Ce n'est pas seulement dans le mon-
de. intellectuel - que règne l'émotion
causée par cette étonnante nouvelle ;
elle s'est répandue dans le public ordi-
naire, de la ville elle est passée dans la
province, elle a empli la Toscane en-
tière, a gagné Rome et aujourd'hui c'est
toute l'Italie qui est préoccupée.
Le conseil municipal de Lucques a
menacé de donner sa démission si l'on
touchait à ses murs ; le conseil provin-
cial l'a imité et le préfet, qui au fond
.partage leur avis, n'ose prendre de dé-
cision. La direction des beaux.arts,' sai-
sie de la question par la Société toscane
pour la conservation des monuments
artistiques, a émis un avis conforme,
basé sur l'art et, a-t-elle ajoutée sur le-
bonsens.,
Mais la direction des travaux commu-
naux de Lucques ne l'entend pas ainsi
et, malgré tout, elle compte faire prér
valoir son opinion et amener en ville
un tramway à travers les rues.
Ces murs, à vrai dire, sont une mer-
veille d'art, non pas seulement d'art
militaire, mais d'art architectural. Ils
constituent un véritable monument ar-
tistique et, au sens exact du mot, après
les avoir vus, j'ai trouvé que tout le
bien qu'on en disait était au-dessous de
la vérité
Cette enceinte de murailles fut com-
mencée en 1544 et sa construction dura
plus d'un siècle. Elle fut terminée en
1645. Toutefois, les plans de ce colos-
sal travail qui, pendant ce laps de
temps de plus d'un siècle, occupa une
vingtaine des meilleurs ingénieurs de
l'époque, choisis dans les villes d'Urbin,
de Ferrare, de Milan, de Crémone, de
Salerne, furent dressés en 1504.
De ce jour jusqu'à la ân des travaux,
on dépensa environ un million d'écus.
Sur ce million d'écus, les ingénieurs et
les hommes de l'art en reçurent seule-
ment vingt-six mille, c'est-à-dire 2.60
Autres temps autres mœurs.
Le résultat, après les épreuves et con-
tre-épreuves réglementaires par l'artil-
lerie, a fait, depuis 1645, Tadmiration
de tous les ingénieurs militaires, y com-
pris le grand Vauban et de tous les
amateurs des beaux-arts.
Aujourd'hui, ces fortifications ne pro-
tègent plus efficacement la ville ur
ces murs formidables on a tracé de
beaux" et odoriférants jardins, avec, au
milieu d'eux, un large boulevard planté
de grands arbres, formant, autour de la
ville, comme une couronne de verdure
et de fleurs.
Aussi les poètes affirment que les
vents soufflent des montagnes de Pise
ou des Apennins, se changent, en tra-
versant les arbres fleuris des bastions
de Lucques, en douces et tendres mélo-
dies, si bien que seulement dans un
siècle, Boccherini, Catalani et Puccini
sont nés à Lucques pour les écouter,
les transcrire et nous les transmettre.
Mais les gens pratiques, les hommes
de finance n'écoutent pas les poètes ; ils
raisonnent. Ils disent quiune fortifica-
tion doit avoir un but d'attaque ou de
défense militaire ; or, actuellement, il
ne peut y avoir aucune menace pour
Lucques ; cette ville n'a pas à être pro-
tégée contre un ennemi possible ou
probable ; donc les murs sont inutiles.
Ces gens raisonnent comme des gens
qui n'éprouvent et n'ont éprouvé aucu-
ne sensation artistique.
La question, du reste, ne date pas
d'hier. Déjà en 1903, le bruit avait cou-
ru en Italie (il était même venu jus-
qu'en France) que la ville de Lucques
allait ouvrir, à travers ces murs admi-
rables, un large passage nour v Doser
les rails d'un tramway. -. U,.. --
Le projet, un peu hypocrite, consis-
tait seulement dans l'autorisation don-
née à la société des tramways de percer
une ouverture de quatre ou cinq mè-
tres, sauf à placer par-dessus un pont
de fer et de bois pour ne pas interrom-
pre la circulation sur le boulevard.
C'était, de la part de la finance, la
mainmise sur les murs. On le comprit
ainsi et d'un bout à l'autre de l'Italie,
n n'y eut qu'un cri parmi les artistes et
les littérateurs. De Carducci à d'Annun-
zio, de Beltranft à Pascoli, de Puccini à
RiCCi, de Boni à Venturi, les protesta-
tions affluèrent à la Société pour la dé-
fense des monuments historiques. Cel-
les de Carducci et de Ricci sont vibran-
tes d'indignation.
Le mouvement fut tel que plus per-
sonne à Lucqucs ne voulut du projet :
pas "uno seule voix ne. s'éleva en sa fa-
xeur. U fnb enterré
Deux ans ont passé sur cette indigna-
tion. Il n'est plus question aujourd'hul
de couper les murs, d'y trancher une
entaille ; on parle seulement d'y prati-
quer un trou ou un tunnel (un buco,
un traloro). Au fond, c'est le même es-
prit, la même mentalité chez les hom-
mes de finance. Car le trou aurait la
même largeur et la même hauteur que
dans le projet de 1905.
Aussi la commission centrale des mo-
numents historiques a-t-elle approuvé à
l'unanimité un rapport de M. d'An-
drade, architecte fort connu dans toute
l'Europe par ses travaux sur les forti-
fications du moyen âge et de la Renais-
sance. résumant la question et mettant
en relief les arguments qui s'opposent
à l'adoption du projet.
Il sera intéressant pour les amis des
arts. tant en Italie que chez nous, de
savoir qui, dans cette affaire, aura le
dernier mot.
L. FOrcade.
L'ORIGINE DU CHEVAL
IDe notre correspondant particulier)
Berlin, 26 janvier.
Les antisémites peuvent être satisfaits.
I.a plus noble conquête de l'homme n'a au-
cune goutte de sang sémitique dans les
veines ; ainsi le démontre M. le professeur
Edouard Meyer dans un travail qu'n vient
de lire à l'Académie des sciences.
Le cheval était resté longtemps inconnu
dans la partie de l'Asie qui fut habitée par
des peuples sémitiques. C'est la tribu
aryenne des Iraniens qui l'y a introduit,
environ 16 siècles avant notre ère.
Les Babyloniens, qui n'avaient pour mon-
ture que des ânes, n'avaient pas de mot
pour désigner le cheval ils l'appelaient :
âne du pays de l'esL
——————————— ♦ ■■ .a
Les événements du Maroc
NOUVEAU COMBAT
Nos troupes, attaquées par les tribus Ze-
natta et Ouled-Ali, repoussent l'ennemi
après un combat acharné
Tanger, 26 janvier.
On annonce de Casablanca qu'un enga-
gement vient d'avoir lieu entre nos trou-
pes, qui se composaient de deux colonnes,
avec les tribus Zenatta et Ouled-Ali, c'est-
à-dire dons la région baignée par le Nef-
tich et la Mellah. -
Dennemi présentait un front en forme
de croissant de cinq kilomètres d'amplitude.
Notre cavalerie a faif plusieurs charges
heureuses. L'artillerie, en présence des ri-
deaux de cavalerie et d'infanterie ennemies,
n'a pu donner sa mesure.
La retraite de l'ennemi a été déterminée
par un mouvement en avant de notre in-
fanterie, formée en deux colonnes. Une der-
nière attaque des cavaliers marocains a été
repoussée vers trois heures. Le lieutenant
Poirson a été blessé. ,
Nos troupes ont été merveilleuses d'en-
train, et les jeunes contingents français se
sont fait remarquer par leur bravoure et
leur endurance.
DETAILS SUR L'ENGAGEMENT
Quatre heures - de combat - Six blessés
Le général d'Amade télégraphie que la
colonne du littoral s'est portée t' 23 jan-
vier, à trente kilomètres au sud de Bouz-
nika. ,
Le 24, la colonne opéra sa jonction vers
midi avec le détachement venu de la Mé-
diouna, à Ankous, sur l'Oued-Mellah.
C'est sur ce point que les deux colonnes
ont été attaquées par un contingent des
tribus de Medraka-Zeila et Ouled-Ali, déve-
loppées en croissant sur un front de cinq
kilomètres environ.
L'ennemi a été repoussé avec pertes
après un combat de quatre heures.
De notre côté, nous avons' eu six bles-
sés, parmi lesquels Je lieutenant Poirson,
du 13* d'artillerie, atteint de deux balles,
l'une au bras, l'autre à la poitrine.
Nos troupes ont fait un effort de marche
considérable, dans des terrains très acci-
dentés et des labours.
Un télégramme du général d'Amade par-
venu à Paris à la fin de l'après-midi, signa-
le que les deux colonnes qui ont opéré leur
jonction le 24 janvier à Ankoun, se sont
portées sur Médiouna après avoir repoussé
les tribus de Medmka-Ziela et de Ouled-
Ali.
La colonne du littoral regagnera Casa-
blanca après s'être ravitaillée à Mediouna.
L'état des blessés est satisfaisant. L'état
sanitaire des troupes est bon. Le calme rè-
gne dans la région de Settat et de Ber-
Recbid.
Tanger, 26 janvier. .1
Casablanca; 25 janvier. — La colonne
dite des tirs, partie de Ber-Rechid en vue
d'une concentration avec la colonne dite du
littoral, que commande le général d'Ama-
de, a opéré sa jonction à Aïn-M'Koun, chez
là tribu des Ou l-Mellah.
A u moment de sa jonction, la colonne
était engagée avec la tribu des Ouled-Ali,
fraction des M'dakra. La colonne du littoral
prrt position h sa gauche. Le front de l'en-
nemi s'étendait sur environ cinq mille mè-
tres. L'infanterie et la cavalerie furent dé-
veloppées. Notre cavalerie fit plusieurs
charges couronnées de succès.
Vers trois heures, les feux de l'infanterie
obligèrent l'ennemi à battre en retraite.
Au moment de l'installation du bivouac,
quelques groupes de cavaliers se montrè-
rent. mais ils furent aussitôt dispersés ;
l'artillerie tira seulement quelques coups.
Les troupes ont toutes fait preuve d'un
grand courage. Nous avons eu quelques
blessés légèrement : Capeau, du 17' esca-
dron du train Pafoureai.. du 18" escadron.
Schalïer et Nicolas, du 5e elïa3ceurs. et un
tirailleur indigène. ,. -'--
Les chasseurs d'Afrique se sont conduits,
a dit le général d'Amade, d'une façon ad-
mirable.
M. Clemenceau chez M. Pichon
M. Clemenceau, président du Conseil, a
conféré hier dons la soirée, au ministère de
l'intérieur, avec M. Pichon, ministre des
affaires étrangères.
Dépêche de l'amiral Philibert
L'amiral Philibert télégraphie que le caïd
des An flous a envoyé une lettre à Abd-et
Aziz pour lui exprimer ses sentiments df,
fidélité..
Tout est calme à Rabat et aux £ nviraa$
ainsi qu'à Mazagan. -,
Les renforts
, Avignon, 26 janvier.
Un détachement de dix sapeurs-condu& ,
tews du 78 génie, sous la direction du sousj
officier Chauffriasse d'Avignon, est parti 46
Marseille où il s'embarquera pour le Me-,
roc. -
- Il est question, dans les milieux miMtaiH
res, d'un prochain départ de volontaires re-
rcerus, tés dans les régiments d'infanterie dttf
15e corps, à destination d'Oran, appelés à
renforcer prochainement le corps expédié
tionnaire du Maroc. 1
L'attitude de l'AUem&aDe
Berlin, 26 janvier.
Le discours prononcé par M. Delcassê
trouve encore des échos dans les journaux
d'aujourd'hui.
L'oincieux Norddeutsch atténue le laite
gage de son confrère officieux la Gazettes
de Cologne, en se contentant de déclarer:
« avant d'entrer dans les détails des débatât
de la Chambre froBçaise, .nous voulons af
iendre un compte rendu plus explicite sun-
ces débets. u. 1
Le Vorwaërts met en garde contre lof
nervosité montrée hier par la presse bourv
geoise allemande ; les conclusions qutJ:
celle-ci a tirées, relativement au danger
que ferait courir à la paix le discours
M. Delcasse, sont fausses. Le journal oonj
clut en disant que cette nervosité est uni
quement provoquée par cet isolement d4 -
l'Allemagne, dû à la politique du priuceC
de Biilow.. i
A l'occasion de l'anniversaire de l'em;
reur, qui aura lieu demain, les journauz
publient des articles dans lesquels "Us font?
ressortir l'amour de la paix du souverain.'
allemand i !
La Norddeulsche dit que l'empereur, de1
puis son avènement, a fourni la preuves
que jamais il n'a songé à mettre les armes
nationales au service d'ambitions belli..! -
queuses ou d'une politique aventurière. -4
En terminant, le journal, déclare qult
l'Allemagne et l'étranger peuvent être as-
surés que la politique de l'empereur à cet
égard restera la même dans 1 avenir. - -
Révocation d'un caid
Tanger, 26 janvier. -.,'
Rabat, 20 janvier. — Le caïd des Cher-
raga, el Mohamed Chergui, qur a sigiié la
destitution d'Abd-el-Aziz à Fez, a été révo-
qué. j
Il est remplacé par Bouchta-ben-Bagdadiv
Le ministre d'Espagne a pris congé bien
du sultan.
Il était très fatigué et il a dû se faire
porter en chaise jusqu'au palaiSi suivi peuf
le personnel de l'ambassade.
Nouvelles de Tanger
Tanger, 26 janvier.. >
Fez, 19 janvier. - Lorsque l'arrivée des
Français à Bouznika a été connue, quel-
ques fonctionnaires du maghzen à Rabat
ont cru que la colonne française allait reo.
trer dans cette ville. Cette nouvelle les
a"<'ant effrayée, ils ont abandonné tout cef
qu'ils possédaient à Rabat et se sont ea-
fuis à Fez où ils sont arrivés dans la mati-
née. Le bruit de leur arrivée et les raisons
qui les avaient poussés à guitter Rabat
ayant été répandus en ville, une fouie agi-
tée l'a commenté de différentes façons.
vn sait que diverses tribus autour de
Fez ont demandé le retour d'Abd-el-Azia
et crue El Mrani a demandé hulï jours pour.
répondre. El Mrani et Kittani ont alors
fabriqué une lettre chérifienne avec raMe
des rumeurs rapportées de Rabat. Cette
lettre a été lue à la mosquée.
Les habitants de Fez fabriquent activa.
ment do la poudre et préparent leurs fu-
sils. On parle de guerre sainte.
Abd-el-Aziz avait fait fabriquer à LoflS
dres, à Paris, à Berlin et à Fez de la mon-
naie marocaine en cuivre. Cette monnaie
n'a plus cours. Il en res fait pour 30.00G
douros à Fez. El Mrani a contraint la fa*
mille Tazi à les reprendre et à lui donneii
en échange leur équiValenten argent.
Aucune réponse de MÕufâv-Hafid n'est
encore arrivée à Fez. Un sentiment dd
doute circule .dans la population, l'on se
demande si Moulay-Hafid n'a pas encore
répondu ou si El Mrani n'a pas arrêté lui
réponse. On sait seulement que ce demies
pour tromper l'attente a fait simuler paE
un rekkas l'approche de Moulay-Hafid. Ca
rekkas a annoncé qu'il était arrivé sans
lettre, mais que Moulay-Hafid Je suit à
quelques jours.
Tanger, 26 janvier.
Fez, 20 janvier. — Kittani, pour répand
dre ses doctrines a l'intention de publiem
un journal intitulé la Patrie, qui défendrai
l'iutégrité marocaine et prêchera la guerre
sainte.
Le journal de Kittani attaquera la feuilfcf
indigène Es Saàda, qui mène une campa<-
gne contre Kittani et en faveur d'Abd-el*
Aziz.
Les tribus des Charga et des Ouled'
Jamia ont envoyé une délégation qui sesf
réfugiée .au Moulay-Idriss ci a demandé à,'
El Mrani de destituer Ould-Mohamed
Cherguy, leur caïd déjà destitué par Abe
el-Aziz. El Mrani a cherché à concilier les
choses, Il a établi un impôt spécial sur W
denréca, afin d'instituer un fond de rscrv
qui lui servira à calmer la colère des tri-
bus.
Des lettres ont été envoyées de Fez S
Taza pour s'assurer de tous les mouve-
ments des troupes françaises à Oudjda et
chez les Beni-Snassen. La rumeur puôlP
que disait que 25.000 Français étaient ert
marche sur Taza et Fez. Le pacha, qui ect
un caïd du rcgui, a répondu qu'il était en'
bons termes avec les Français et qu'il na
s'occupait pas des affaires de Fez et dea
sultans, son chef à lui étant Bou-Hamara
Fez, 21 janvier. — Une réunion a W te..
nue au Dar-el-Maghzen pour savoir ce qu'il
convient de faire à l'égard de Moulay Ilafid;
qui n'a pas encore envoyé de ses nouvelles,
depuis qu'il a été proclamé à Fez.
El-M'rani c. demandé qu'on ne lui envoyer
pas l'acte d'hommages, qui est toujours à
Fez, jusqu'à ce qu'il ait précisé son attitude
Moulay Hafid a écrit à Méquinez d'envoycn
à Fez son acte d'hommages afin que les
deux actes partent cnsemble. Le pacha de
Méquinez a répondu que cet acte était déjà
parti pour Marrakech, ce qui est inexact,
car le pacha de Méquinez est d accord avec
El-M'rani. -- n- - -. --
Des lettres sont arrivées de Marrakech à
des particuliers leur annonçant que Move-
lay Hafid prépare son mariage avec la filio
du caïd Glaoud. C'est le sixième mariage
que le sultan du Sud contracte depuis sonf
élévation an sultanat. Les gens de Fez ju-*
gent mal cette conduite, disant que Moulay
HaM amasse de l'argent pour préparer les
fêtes de ses noces.
Un parti anUhafidiste se forme titms Je
capitale^
ANNONCES
AUX BUREAUX DU JOURNAL1
54, rue du Mail, Paris.
Et chez MM. LAGRANGE, CERF eto
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Adresse Télégraphique: XIX. SIÈCLE - PARIS
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FONDATEUR: EDMOND ABOUT
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ADMINISTRATION ;14* RUE DU MAtL. - TÉLÉPHONE 1 OC 82
--- 'W"-- Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
-
omwiojsrs
LE PARLEMENT
--" COMMERCIAL
Le litre est peut-être ambitieux ; il
constitue d'ailleurs un engagement et
un programme. L'idée est juste. Les
Chambres ont beaucoup a faire, non
seulement parce que nos promesses
électorales ont été nombreuses eL que
itout honnête homme qui a promis doit
faire honneur à sa parole, mais paree
ue notre mandat général nous impose
l'étroit devoir d'améliorer largement la
situation morale, politique et économi-
que de notre pays.
Certes, dans les conseils de la na-
tion, d'où la loi sort majestueuse et
loute-puissante, les bonnes volontés ne
manquent pas. Les compétences sont
moins évidentes. Elles existent, je di-
rais même volontiers, pour rendre
hommage à la yérité, qu'elles foison-
nent. Mais à côté de réelles valeurs,
flue de timidités qui les empêchent d'é-
ciorc i Jamais l'adage, que la modestie
est l'inévitable compagne du vrai mé-
rite, ne s'est mieux vivifié que dans la
Chambre actuelle.
- De là deux inconvénients. Tantôt les
césures nécessaires, celles qui squt ré-
clamées par l'agriculture, le commerce,
l'industrie, attendent vainement leur
jour. Tantôt elles sont votées à la. hâte,
à la suite de débats confus, et sont ré-
digées de telle sorte, accompagnées de
si singulières prescriptions que leurs
bienfaits demeurent problématiques. Le
principe est excellent, l'application en
'est souvent fâcheuse,
Un de nos confrères, publiciste vi-
goureux et actif, M. Jean Duruskam, a
pensé qu'il y avait là sans doute quel-
que chose à faire. Les faibles se lamen-
tent comme des enfants ; les vrais
hommes agissent.
- Notre confrère a donc eu l'idée 'de
réunir en une vaste assemblée, décorée
du nom de Parlement commercial, les
principales individualités du commer-
ce et des diverses industries françaises.
Dans cette réunion, d'où la politique est
exclue, on examine tous les problèmes
'd'ordre commercial et industriel posés
devant l'opinion publique. La première
séance a eu lieu samedi. On y a décidé
que le Parlement commercial tiendrait
ses assises quatre fois par an. Des ci-
toyens, appartenant aux divers partis
politiques, se sont réunis sur ce terrain
neutre. lis peuvent réaliser une bonne
et utile besogne"
L'assemblée a placé à sa tête notre
ami Tirribillot, grand industriel à Can-
nes, républicain ferme et dévoué des
heures les plus difficiles, radical-socia-
liste de bon aloi: toutes les nuances,
peutrêtre même toutes les opinions,
sont représentées au bureau, pour con-
server à cet important groupement son
yéritable caractère. ,. -
Notre industrie et notre commerce
souffrent, notre agriculture également.
Peut-être leur manquait-il un organe
autorisé pour exprimer leurs doléan-
ces. Nul d'entre nous ne saurait, sans
ingratitude, méconnaître les grands et
innombrables services rendus, non seu-
lement à la cause républicaine, mais en-
core aux intérêts commerciaux, agrico-
les et industriels de notre pays, par ces
grandes associations radicales-socialis-
tes que nous avons toujours trouvées
au premier rang, à côté de nous, aux
heures de bataille. Leur passé est im-
muablement mêlé à l'histoire de notre
parti, et nous avons la ferme confiance
,q.ué leur rôle ne fera que grandir dans
l'avenir.
Le Parlement commercial n'est pas,
ne saurait être pour el'es, à aucun
point de vue, un rival. Bon nombre de
ses adhérents font partie de ces asso-
ciations. Il y a là deux groupements
différents, ayant chacun un but diffé-
rent. Il n'existe aucun antagoniste entre
l'un et l'autre et l'on peut, selon son
goût personnel et ses opinions, faire
son devoir dans les deux ou se confiner
exclusivement dans l'un ou l'autre.
Et ce n'est pas trop, des efforts de
lous. La France a une fâcheuse tendan-
ce au fonctionnariat. La vie y est mo-
deste, mais presque sûre. Peu d'aléa :
une retraite.
Loin de nous de médire des fonction-
naires. Il en faut. Réduits au nombre
strictement nécessaire, ils ont, comme
tous les autres facteurs -de la produc-
tion nationale, leur utilité économique.
Mais, passé ce nombre, ils sont nuisi-
bles ; ils constituent pour le contribua-
ble un lourd fardeau 'dont il est Néces-
saire de l'allégen.
Si le commerce, l'industrie, l'agricul-
lure attiraient à elles tous ces fonction-
naires encombrants, qui sont en sur-
nombre, gardant les uns iians la métro-
£ 0*^ expédiantes au\rc$ U"olonist.
à titre de contremaîtres, d'ouvriers,
d'ingénieurs, de représentants commer-
ciaux. de chefs de comptoirs, la pros-
périté de la Franco recevrait im essor
considérable. Mais il faut, précisément
pour cela, que ces cléments de la ri-
chesse nationale soient protégés par
d'utiles lois à l'élaboration desquelles le
nouveau groupement travaillera avec
efficacité.
Nous sera-t-il permis d'aller jusqu'au
fond de notre pensée 1 if nous semble,
si notre sentiment ,est exact, qu'entre le
capital et le travail les conflits naissent
surtout de malentendus. L'avenir est
dans la conciliation. Le Parlement com-
mercial peut, à mesure que son cercle
d'action s'élargira, devenir le centre des
discussions cordiales entre le capital et
le travail, chacun d'eux exposant ses
désirs, ses vœux, ses espérances, cher-
chant loyalement son intérêt sans vou-
loir absorber l'intérêt légitime de son
collaborateur. De là naîtront enfjn les
conciliations nécessaires.
La tâche est grande, elle est de bonne
haleine ; elle n'est pas au-dessus du
zèle ni des forces de tous ces hommes
de bonne volonté.
LOUIS MARTIN.
L'ANGOISSE DU DICTATEUR
Une dépêche nous apprend
que le chef du gouvernement
argentin a dissous la Cham-
bre, et qu'il a décidé de lever
les impôts pendant un an
l'saris aucune consultation du
Parlement. Peu nous importe la nature
du différend qui existe entre les légis-
lateurs argentins et le pouvoir exécu-
tif ; peu nous importe aussi la façon
fantaisiste dont on pratique, dans l'A-
mérique du Sud, la politique en géné-
ral et le régime républicain en particu-
lier, Un coup. d'Etat est toujours une
vilaine opération. Ajoutons : une mau-
vaise affaire..
Ceux qui auraient des doutes sur ce
dernier point n'ont qu'à consulter M.
Franco, le dictateur du Portugal. N'an-
nonce-t-on pas que depuis longtemps,
sur les conseils de la police, il couche
chaque nuit dans un lit et sous un toit
différents pour dépister les meurtriers
acharnés — pense-t-il ;.- à détruire sa
précieuse existence ?
M. Franco ne pouvait pas subir le
contrôle d'un Parlement ; il a mis le
Parlement à la porte. Maintenant, il
gouverne seul ; il est le maître unique
de son pays. Son autocratie est plus
complète que celle des anciens rois ab-
solus qui avaient au moins des colla-
borateurs, des ministres, qui souvent
régnaient plus qu'ils ne gouvernaient.
- Si M. Franco n'a pas la couronne, il
réunit tous les pouvoirs dans sa main.
Comme il doit être heureux 1
Pardon : comme il est malheureux 1
Quel contraste 1 A côté de M. Franco,
'dictateur qui a supprimé la représenta-
tion nationale, Nicolas II, avec sa Dou-
ma, Guillaume II, avec son Reichstag
sont des potentats limités, et, dans quel-
que mesure, impuissants. Et cet hom-
me auquel les souverains les plus auto-
ritaires peuvent porter envie n'a pas le
droit de rentrer dans sa maison, de
dormir dans son lit. Il est le chemineau
du pouvoir, le vagabond de la dicta-
ture:
Peut-être a-t-il tort de trembler. Peut-
être personne n'a-t-il rêvé sa mort.
Peut-être les complots qui l'affolent
sont-ils imaginaires. Il suffit que le re-
mords l'assaille pour qu'il soit le plus
misérable des êtres
A l'époque actuelle, la démocratie est
le droit certain, la liberté, le fait iné-
luctable.
Les dictateurs 'ne sont pas seulement
nuisibles à ceux qui les subissent. Us
étouffent dans l'atmosphère de leur prfj*
pre tyrannie.
—
LES ON-DITî
L'heure sociale
Nous avions déjà rheure de Paris et
celle des départements, celle de l'Eu-
rope centrale, l'heure de la Bourse,
sans compter l'heure du canon du Pa-
lais-Royal, légèrement désuète. Il était
réservé à M. Jaurès, qui sait tout, peut
tout et dit tout, suivant la formule cou-
rante, d'unifier même la mesure du
temps. Il a créé Vheure sociale, dont le
triomphe concordera avec rétablisse-
ment universel de la caserne collecti-
viste. Quésaco ? direz-vous.
- L'heure sociale est, paraît-il. leDfQl.
aUIt que donne en une heure métrono-
mique un travail d'intensité et d'habi-
leté moyennes, dans une profession, un
milieu, avec un outillage déterminés.
Elle sera la règle de l'ouvrier enrégi-
menté. Par exemple, pour un cordon-
nier, l'heure sociale serait une moitié
de soulier si cent cordonniers de sa ré-
gion, pareillement outillés, fabriquent
cent demi-souliers par heure ; mais M.
Jaurès ajoute qu'il donnera huit bons
de consommation à valoir sur les ma-
gasins sociaux, à l'ouvrier qui aura
doublé cette production et deux seule-
ment à célui qui aura-employé Je Uou-
ble de temps, afin de ne pas fournir
une prime à la paresse et à la mala-
dresse. Sur le salaire, en outre, seront
retenus les frais d'administration so-
ciale accrus des services généraux que
paye -l'impôt actuel, de l'entretien des
incapables, des mille imprévus d'une
organisation fantaisiste
Ces tombes de Louvois et de Coudé
M. Dorbon nous écrit qu'il a quel-
ques raisons de douter de la présence,
dans le cimetière de sa ville natale, des
restes authentiques de Pichegru. Une
erreur a dû être commise lors de
l'exhumation du cimetière parisien de
Sainte-Catherine. C'est une question à
examiner. Nous y reviendrons.
D'autre part, notre fidèle lecteur, M.
Boissard, nous signale, à propos de sé-
pultures illustres, l'état Rlus que mo-
deste de la tombe du premier Condé à
Vallery, dans l'Yonne. - Quelle différen-
ce avec la pompe du tombeau de Lou-
vois. à Tonnerre, chef-d'oeuvre de Girar-
don ! Le corps du grand ministre fut
transféré du couvent des Capucines en
i804,. lorsque le couvent fut démoli
pour l'ouverture de la rue Napoléon,
plus tard rue de la Paix. Il fut placé
dans l'église tfe cet admirable Hôtel
Dieu de Tonnerre, que Mme de Sévigné
comparait à Notre-Dame. C'est dans la
salle des malades que l'ambassadeur de
Charles-Quint déclara la guerre à Fran-
çois Ior en 1542.
Il y a là des merveilles, un gnomon
intéressant construit par trois savants
en 1785-87, un chartrier précieux, de
belle? statues des quatorzième et quin-
zième siècles, le mausolée de la reine
Marguerite de Bourgogne, belle-sœur de
Saint-Louis, par Bridan, quantité d'au-
tres tombes appartenant à l'aristocratie
du pays, enfm le fameux Saint-Sépul-
cre, œuvre de Jean Michel et de Geor-
ges de la Sonnette, élèves de Claus
Huter, qui fit le Puits de Moïse et .'es
tombeaux des ducs de Bourgogne à Di-
jon,
Le Passant
» —i
LA JOURNEE POLITIQUE
Le recrutement du jury
M. Briand, ministre de la justice, prépa-
re une modifioation au mode de recrute-
ment cm jury.
La loi stipule que « ne peuvent être juirés
les domestiques et serviteurs à gages ».
Par suite de l'interprétation de ce texte, on
a rangé tous les salariés, employés, ou-
vriers, dans la catégorie des serviteurs à
gages.
M. Briand estime que la loi a seulement
voulu exclure les domestiques ne présen-
tant pas les qualités d'indépendance néces-
saires.
La représentation proportionnelle
Le groupe socialiste dijonnais commence
à se préoccuper des élections municipales
de mai ppocham. Désireux de voir appli-
quer le système de la représentation pro-
portionnelle, il vient de faire parvenir aux
présidents des divers partis politiques di-
jonnais la lettre suivante :
- « Monsieur le président,
Dans sa dernière réunion, le groupe so-
cialiste dijonnais a décidé, à l'unanimité
moins 2 voix et une abstention, de faire
l'essai loyal du système de la représenta-
tion proportionnelle appliquée aux élec-
tions municipales prochaines, et il a chargé
la commission du groupe d'en informer of-
ficiellement tous les partis sans exception,
en les priant de vouloir bien s'associer à
la tentative du groupe socialiste.
« Nous avons donc l'honneur de vous
transmettre cette décision, en vous priant
de la soumettre le plus tôt possible <à votre
groupe.
« Nous serions heureux de connaître les
décisions qu'il croira devoir prendre fin fé-
vrier.
« Veuillez agréer, etc. a
♦
LA MISSION LAIOUE FRANÇAISE
Hier après midi, à deux heures et demie,
la Mission laïque française (association
pour !la propagation de renseignement ltü.
que aux .colonies et à l'étranger) a tenu
son assemblée générale dans lamphithéà-
tre Richelieu, à la Sotrbonne.
M. Aulard, professeur à l'UniversHé de
Ptaris, présidait, assisté de ¡MM. Camille
Bloch, vice-président, de Mme Potol, vice-
pJ"lésiù.ente, de M. Bénardi secrétaire gé-
néral, et de M. Terquicn,, trésorier.
Cette assemblée générale a été consacrée
aM. Hemri Brkstsotn, président die la Cham-
bre des députés, est venu ensuite présidter
une conférence faite par M. Auîard sur la
Mission laïque. Les ministres de l'instruc-
tion publique et des affaires étrangères
s'étaient fait représenter.
A.u oourgNTune miSlSion dont il fut chargé
en Orient, M. Aulard y a étudié l'organi-
sation de l'enseignement qui, aujourd'hui,
revêt un caractère trop religieux, et il fou-
rme des vœux pour l'extension et le dÓvc-
fappeanoni. tie l'enseignement laïque en
Orient.
L'assemblée a vivement applaudi le con-
férencier. M. Henri Brisson a félicité cihta-
leureusement M. AuJard et a rappelé qu'il
ftt, voilà .près d'un dëmi-tsiècl-e a, un vovwîD
sur les rives du Nil. Pui-s il a fait réloge
de lloeuivm de la Mission laïque en Orient
et a retracé toutes les difficultés auxquel-
les elle se heurte. Il termine ainsi :
» Et nos guerres de religion, à Dous, de
quieJtes horreurs n'ont-elles pas couvert nos
contrées 1
« Faut-il s'étonner alons que reprit tou-
roaân, désertant ttos sentiers ait cherché
ailLeuirs que dans la foi, dams Je dogme, la
règle irlffl mœurs et du gou^ernemeitt des
soiciétés ? Non, ce n'est point d'un effort
impie qu est née rind^ûEidjuieo (Jo la mo-
rafe, de la scIence, do la civilisation. C'efet
d'une médjtaWoTi - "YbératriCe qu'est sortie
cette séctsa.lÏ()n progressive dont VOUA
écrivez, messieurs, un des chiaipitres sous
Je nom de Mission laïque.
u Dites-nous' donc, dner monsieur AuteundD.
dites-nous ce que VOUIS avez vu, ce que
VOUIS avez fait, ce que vous nous proposiez
de faire au nom de la France répuSîicaine,
respectueuse de toutes les croyanoes, dont
legénie et les forces ne peuvent plus, ne
doivent plue seitvir que la science et la li-
oorté. M
Le .soir, à sept heures et demie, un ban-
quet a réuni les adhérents et les émis de
la Mission française.
(Voir la suite en DEUXIEME EDITION)
l i —
LES MURS DE LUCOUES
: Les détxuiru-t'On ?
Depuis quelque temps, les amateurs
d'antiquités ,Jes amis des arts, les ar-
chitectes, les ingénieurs, les militaires,
même les poètes sont dans la plus vive
inquiétude. Il est question de percer les
murs de Lucques et de détruire ainsi
l'ensemble harmonieux formé autour
de la ville par cette merveille admirée
de tous qu'on appelle les murs de Luc-
ques Mura lucchese.
Ce n'est pas seulement dans le mon-
de. intellectuel - que règne l'émotion
causée par cette étonnante nouvelle ;
elle s'est répandue dans le public ordi-
naire, de la ville elle est passée dans la
province, elle a empli la Toscane en-
tière, a gagné Rome et aujourd'hui c'est
toute l'Italie qui est préoccupée.
Le conseil municipal de Lucques a
menacé de donner sa démission si l'on
touchait à ses murs ; le conseil provin-
cial l'a imité et le préfet, qui au fond
.partage leur avis, n'ose prendre de dé-
cision. La direction des beaux.arts,' sai-
sie de la question par la Société toscane
pour la conservation des monuments
artistiques, a émis un avis conforme,
basé sur l'art et, a-t-elle ajoutée sur le-
bonsens.,
Mais la direction des travaux commu-
naux de Lucques ne l'entend pas ainsi
et, malgré tout, elle compte faire prér
valoir son opinion et amener en ville
un tramway à travers les rues.
Ces murs, à vrai dire, sont une mer-
veille d'art, non pas seulement d'art
militaire, mais d'art architectural. Ils
constituent un véritable monument ar-
tistique et, au sens exact du mot, après
les avoir vus, j'ai trouvé que tout le
bien qu'on en disait était au-dessous de
la vérité
Cette enceinte de murailles fut com-
mencée en 1544 et sa construction dura
plus d'un siècle. Elle fut terminée en
1645. Toutefois, les plans de ce colos-
sal travail qui, pendant ce laps de
temps de plus d'un siècle, occupa une
vingtaine des meilleurs ingénieurs de
l'époque, choisis dans les villes d'Urbin,
de Ferrare, de Milan, de Crémone, de
Salerne, furent dressés en 1504.
De ce jour jusqu'à la ân des travaux,
on dépensa environ un million d'écus.
Sur ce million d'écus, les ingénieurs et
les hommes de l'art en reçurent seule-
ment vingt-six mille, c'est-à-dire 2.60
Autres temps autres mœurs.
Le résultat, après les épreuves et con-
tre-épreuves réglementaires par l'artil-
lerie, a fait, depuis 1645, Tadmiration
de tous les ingénieurs militaires, y com-
pris le grand Vauban et de tous les
amateurs des beaux-arts.
Aujourd'hui, ces fortifications ne pro-
tègent plus efficacement la ville ur
ces murs formidables on a tracé de
beaux" et odoriférants jardins, avec, au
milieu d'eux, un large boulevard planté
de grands arbres, formant, autour de la
ville, comme une couronne de verdure
et de fleurs.
Aussi les poètes affirment que les
vents soufflent des montagnes de Pise
ou des Apennins, se changent, en tra-
versant les arbres fleuris des bastions
de Lucques, en douces et tendres mélo-
dies, si bien que seulement dans un
siècle, Boccherini, Catalani et Puccini
sont nés à Lucques pour les écouter,
les transcrire et nous les transmettre.
Mais les gens pratiques, les hommes
de finance n'écoutent pas les poètes ; ils
raisonnent. Ils disent quiune fortifica-
tion doit avoir un but d'attaque ou de
défense militaire ; or, actuellement, il
ne peut y avoir aucune menace pour
Lucques ; cette ville n'a pas à être pro-
tégée contre un ennemi possible ou
probable ; donc les murs sont inutiles.
Ces gens raisonnent comme des gens
qui n'éprouvent et n'ont éprouvé aucu-
ne sensation artistique.
La question, du reste, ne date pas
d'hier. Déjà en 1903, le bruit avait cou-
ru en Italie (il était même venu jus-
qu'en France) que la ville de Lucques
allait ouvrir, à travers ces murs admi-
rables, un large passage nour v Doser
les rails d'un tramway. -. U,.. --
Le projet, un peu hypocrite, consis-
tait seulement dans l'autorisation don-
née à la société des tramways de percer
une ouverture de quatre ou cinq mè-
tres, sauf à placer par-dessus un pont
de fer et de bois pour ne pas interrom-
pre la circulation sur le boulevard.
C'était, de la part de la finance, la
mainmise sur les murs. On le comprit
ainsi et d'un bout à l'autre de l'Italie,
n n'y eut qu'un cri parmi les artistes et
les littérateurs. De Carducci à d'Annun-
zio, de Beltranft à Pascoli, de Puccini à
RiCCi, de Boni à Venturi, les protesta-
tions affluèrent à la Société pour la dé-
fense des monuments historiques. Cel-
les de Carducci et de Ricci sont vibran-
tes d'indignation.
Le mouvement fut tel que plus per-
sonne à Lucqucs ne voulut du projet :
pas "uno seule voix ne. s'éleva en sa fa-
xeur. U fnb enterré
Deux ans ont passé sur cette indigna-
tion. Il n'est plus question aujourd'hul
de couper les murs, d'y trancher une
entaille ; on parle seulement d'y prati-
quer un trou ou un tunnel (un buco,
un traloro). Au fond, c'est le même es-
prit, la même mentalité chez les hom-
mes de finance. Car le trou aurait la
même largeur et la même hauteur que
dans le projet de 1905.
Aussi la commission centrale des mo-
numents historiques a-t-elle approuvé à
l'unanimité un rapport de M. d'An-
drade, architecte fort connu dans toute
l'Europe par ses travaux sur les forti-
fications du moyen âge et de la Renais-
sance. résumant la question et mettant
en relief les arguments qui s'opposent
à l'adoption du projet.
Il sera intéressant pour les amis des
arts. tant en Italie que chez nous, de
savoir qui, dans cette affaire, aura le
dernier mot.
L. FOrcade.
L'ORIGINE DU CHEVAL
IDe notre correspondant particulier)
Berlin, 26 janvier.
Les antisémites peuvent être satisfaits.
I.a plus noble conquête de l'homme n'a au-
cune goutte de sang sémitique dans les
veines ; ainsi le démontre M. le professeur
Edouard Meyer dans un travail qu'n vient
de lire à l'Académie des sciences.
Le cheval était resté longtemps inconnu
dans la partie de l'Asie qui fut habitée par
des peuples sémitiques. C'est la tribu
aryenne des Iraniens qui l'y a introduit,
environ 16 siècles avant notre ère.
Les Babyloniens, qui n'avaient pour mon-
ture que des ânes, n'avaient pas de mot
pour désigner le cheval ils l'appelaient :
âne du pays de l'esL
——————————— ♦ ■■ .a
Les événements du Maroc
NOUVEAU COMBAT
Nos troupes, attaquées par les tribus Ze-
natta et Ouled-Ali, repoussent l'ennemi
après un combat acharné
Tanger, 26 janvier.
On annonce de Casablanca qu'un enga-
gement vient d'avoir lieu entre nos trou-
pes, qui se composaient de deux colonnes,
avec les tribus Zenatta et Ouled-Ali, c'est-
à-dire dons la région baignée par le Nef-
tich et la Mellah. -
Dennemi présentait un front en forme
de croissant de cinq kilomètres d'amplitude.
Notre cavalerie a faif plusieurs charges
heureuses. L'artillerie, en présence des ri-
deaux de cavalerie et d'infanterie ennemies,
n'a pu donner sa mesure.
La retraite de l'ennemi a été déterminée
par un mouvement en avant de notre in-
fanterie, formée en deux colonnes. Une der-
nière attaque des cavaliers marocains a été
repoussée vers trois heures. Le lieutenant
Poirson a été blessé. ,
Nos troupes ont été merveilleuses d'en-
train, et les jeunes contingents français se
sont fait remarquer par leur bravoure et
leur endurance.
DETAILS SUR L'ENGAGEMENT
Quatre heures - de combat - Six blessés
Le général d'Amade télégraphie que la
colonne du littoral s'est portée t' 23 jan-
vier, à trente kilomètres au sud de Bouz-
nika. ,
Le 24, la colonne opéra sa jonction vers
midi avec le détachement venu de la Mé-
diouna, à Ankous, sur l'Oued-Mellah.
C'est sur ce point que les deux colonnes
ont été attaquées par un contingent des
tribus de Medraka-Zeila et Ouled-Ali, déve-
loppées en croissant sur un front de cinq
kilomètres environ.
L'ennemi a été repoussé avec pertes
après un combat de quatre heures.
De notre côté, nous avons' eu six bles-
sés, parmi lesquels Je lieutenant Poirson,
du 13* d'artillerie, atteint de deux balles,
l'une au bras, l'autre à la poitrine.
Nos troupes ont fait un effort de marche
considérable, dans des terrains très acci-
dentés et des labours.
Un télégramme du général d'Amade par-
venu à Paris à la fin de l'après-midi, signa-
le que les deux colonnes qui ont opéré leur
jonction le 24 janvier à Ankoun, se sont
portées sur Médiouna après avoir repoussé
les tribus de Medmka-Ziela et de Ouled-
Ali.
La colonne du littoral regagnera Casa-
blanca après s'être ravitaillée à Mediouna.
L'état des blessés est satisfaisant. L'état
sanitaire des troupes est bon. Le calme rè-
gne dans la région de Settat et de Ber-
Recbid.
Tanger, 26 janvier. .1
Casablanca; 25 janvier. — La colonne
dite des tirs, partie de Ber-Rechid en vue
d'une concentration avec la colonne dite du
littoral, que commande le général d'Ama-
de, a opéré sa jonction à Aïn-M'Koun, chez
là tribu des Ou l-Mellah.
A u moment de sa jonction, la colonne
était engagée avec la tribu des Ouled-Ali,
fraction des M'dakra. La colonne du littoral
prrt position h sa gauche. Le front de l'en-
nemi s'étendait sur environ cinq mille mè-
tres. L'infanterie et la cavalerie furent dé-
veloppées. Notre cavalerie fit plusieurs
charges couronnées de succès.
Vers trois heures, les feux de l'infanterie
obligèrent l'ennemi à battre en retraite.
Au moment de l'installation du bivouac,
quelques groupes de cavaliers se montrè-
rent. mais ils furent aussitôt dispersés ;
l'artillerie tira seulement quelques coups.
Les troupes ont toutes fait preuve d'un
grand courage. Nous avons eu quelques
blessés légèrement : Capeau, du 17' esca-
dron du train Pafoureai.. du 18" escadron.
Schalïer et Nicolas, du 5e elïa3ceurs. et un
tirailleur indigène. ,. -'--
Les chasseurs d'Afrique se sont conduits,
a dit le général d'Amade, d'une façon ad-
mirable.
M. Clemenceau chez M. Pichon
M. Clemenceau, président du Conseil, a
conféré hier dons la soirée, au ministère de
l'intérieur, avec M. Pichon, ministre des
affaires étrangères.
Dépêche de l'amiral Philibert
L'amiral Philibert télégraphie que le caïd
des An flous a envoyé une lettre à Abd-et
Aziz pour lui exprimer ses sentiments df,
fidélité..
Tout est calme à Rabat et aux £ nviraa$
ainsi qu'à Mazagan. -,
Les renforts
, Avignon, 26 janvier.
Un détachement de dix sapeurs-condu& ,
tews du 78 génie, sous la direction du sousj
officier Chauffriasse d'Avignon, est parti 46
Marseille où il s'embarquera pour le Me-,
roc. -
- Il est question, dans les milieux miMtaiH
res, d'un prochain départ de volontaires re-
rcerus, tés dans les régiments d'infanterie dttf
15e corps, à destination d'Oran, appelés à
renforcer prochainement le corps expédié
tionnaire du Maroc. 1
L'attitude de l'AUem&aDe
Berlin, 26 janvier.
Le discours prononcé par M. Delcassê
trouve encore des échos dans les journaux
d'aujourd'hui.
L'oincieux Norddeutsch atténue le laite
gage de son confrère officieux la Gazettes
de Cologne, en se contentant de déclarer:
« avant d'entrer dans les détails des débatât
de la Chambre froBçaise, .nous voulons af
iendre un compte rendu plus explicite sun-
ces débets. u. 1
Le Vorwaërts met en garde contre lof
nervosité montrée hier par la presse bourv
geoise allemande ; les conclusions qutJ:
celle-ci a tirées, relativement au danger
que ferait courir à la paix le discours
M. Delcasse, sont fausses. Le journal oonj
clut en disant que cette nervosité est uni
quement provoquée par cet isolement d4 -
l'Allemagne, dû à la politique du priuceC
de Biilow.. i
A l'occasion de l'anniversaire de l'em;
reur, qui aura lieu demain, les journauz
publient des articles dans lesquels "Us font?
ressortir l'amour de la paix du souverain.'
allemand i !
La Norddeulsche dit que l'empereur, de1
puis son avènement, a fourni la preuves
que jamais il n'a songé à mettre les armes
nationales au service d'ambitions belli..! -
queuses ou d'une politique aventurière. -4
En terminant, le journal, déclare qult
l'Allemagne et l'étranger peuvent être as-
surés que la politique de l'empereur à cet
égard restera la même dans 1 avenir. - -
Révocation d'un caid
Tanger, 26 janvier. -.,'
Rabat, 20 janvier. — Le caïd des Cher-
raga, el Mohamed Chergui, qur a sigiié la
destitution d'Abd-el-Aziz à Fez, a été révo-
qué. j
Il est remplacé par Bouchta-ben-Bagdadiv
Le ministre d'Espagne a pris congé bien
du sultan.
Il était très fatigué et il a dû se faire
porter en chaise jusqu'au palaiSi suivi peuf
le personnel de l'ambassade.
Nouvelles de Tanger
Tanger, 26 janvier.. >
Fez, 19 janvier. - Lorsque l'arrivée des
Français à Bouznika a été connue, quel-
ques fonctionnaires du maghzen à Rabat
ont cru que la colonne française allait reo.
trer dans cette ville. Cette nouvelle les
a"<'ant effrayée, ils ont abandonné tout cef
qu'ils possédaient à Rabat et se sont ea-
fuis à Fez où ils sont arrivés dans la mati-
née. Le bruit de leur arrivée et les raisons
qui les avaient poussés à guitter Rabat
ayant été répandus en ville, une fouie agi-
tée l'a commenté de différentes façons.
vn sait que diverses tribus autour de
Fez ont demandé le retour d'Abd-el-Azia
et crue El Mrani a demandé hulï jours pour.
répondre. El Mrani et Kittani ont alors
fabriqué une lettre chérifienne avec raMe
des rumeurs rapportées de Rabat. Cette
lettre a été lue à la mosquée.
Les habitants de Fez fabriquent activa.
ment do la poudre et préparent leurs fu-
sils. On parle de guerre sainte.
Abd-el-Aziz avait fait fabriquer à LoflS
dres, à Paris, à Berlin et à Fez de la mon-
naie marocaine en cuivre. Cette monnaie
n'a plus cours. Il en res fait pour 30.00G
douros à Fez. El Mrani a contraint la fa*
mille Tazi à les reprendre et à lui donneii
en échange leur équiValenten argent.
Aucune réponse de MÕufâv-Hafid n'est
encore arrivée à Fez. Un sentiment dd
doute circule .dans la population, l'on se
demande si Moulay-Hafid n'a pas encore
répondu ou si El Mrani n'a pas arrêté lui
réponse. On sait seulement que ce demies
pour tromper l'attente a fait simuler paE
un rekkas l'approche de Moulay-Hafid. Ca
rekkas a annoncé qu'il était arrivé sans
lettre, mais que Moulay-Hafid Je suit à
quelques jours.
Tanger, 26 janvier.
Fez, 20 janvier. — Kittani, pour répand
dre ses doctrines a l'intention de publiem
un journal intitulé la Patrie, qui défendrai
l'iutégrité marocaine et prêchera la guerre
sainte.
Le journal de Kittani attaquera la feuilfcf
indigène Es Saàda, qui mène une campa<-
gne contre Kittani et en faveur d'Abd-el*
Aziz.
Les tribus des Charga et des Ouled'
Jamia ont envoyé une délégation qui sesf
réfugiée .au Moulay-Idriss ci a demandé à,'
El Mrani de destituer Ould-Mohamed
Cherguy, leur caïd déjà destitué par Abe
el-Aziz. El Mrani a cherché à concilier les
choses, Il a établi un impôt spécial sur W
denréca, afin d'instituer un fond de rscrv
qui lui servira à calmer la colère des tri-
bus.
Des lettres ont été envoyées de Fez S
Taza pour s'assurer de tous les mouve-
ments des troupes françaises à Oudjda et
chez les Beni-Snassen. La rumeur puôlP
que disait que 25.000 Français étaient ert
marche sur Taza et Fez. Le pacha, qui ect
un caïd du rcgui, a répondu qu'il était en'
bons termes avec les Français et qu'il na
s'occupait pas des affaires de Fez et dea
sultans, son chef à lui étant Bou-Hamara
Fez, 21 janvier. — Une réunion a W te..
nue au Dar-el-Maghzen pour savoir ce qu'il
convient de faire à l'égard de Moulay Ilafid;
qui n'a pas encore envoyé de ses nouvelles,
depuis qu'il a été proclamé à Fez.
El-M'rani c. demandé qu'on ne lui envoyer
pas l'acte d'hommages, qui est toujours à
Fez, jusqu'à ce qu'il ait précisé son attitude
Moulay Hafid a écrit à Méquinez d'envoycn
à Fez son acte d'hommages afin que les
deux actes partent cnsemble. Le pacha de
Méquinez a répondu que cet acte était déjà
parti pour Marrakech, ce qui est inexact,
car le pacha de Méquinez est d accord avec
El-M'rani. -- n- - -. --
Des lettres sont arrivées de Marrakech à
des particuliers leur annonçant que Move-
lay Hafid prépare son mariage avec la filio
du caïd Glaoud. C'est le sixième mariage
que le sultan du Sud contracte depuis sonf
élévation an sultanat. Les gens de Fez ju-*
gent mal cette conduite, disant que Moulay
HaM amasse de l'argent pour préparer les
fêtes de ses noces.
Un parti anUhafidiste se forme titms Je
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